La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

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Yuimen
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La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yuimen » lun. 13 août 2018 19:06

La flottille des Danse-Lames
Guilde des Danseurs d'Opale, usage libre pour tous

Image


Les six navires de cette étrange flotte Naorienne sont tous identiques au détail près et, plus surprenant encore, portent tous le même nom, si bien qu'il n'est possible de les distinguer qu'en connaissant des membres de leurs équipages, exclusivement Sindeldi et comportant chacun une cinquantaine de matelots qui servent aussi de rameurs et de combattants en cas de besoin.

Techniquement, ce sont d'élancées galères fluviales à fond plat dont la proue et la poupe ont été rehaussées pour leur permettre d'affronter la houle des eaux côtières du royaume de Sarindel. Si cette construction leur permet de franchir la plupart des récifs coralliens du Naora et même de remonter le fleuve Rafaân jusqu'à Xaoranh, elles sont en revanche incapables d'affronter la haute mer, l'absence de quille engendrerait en effet un rapide retournement en cas de gros temps. Outre leurs rames, ces galères sont dotées de trois mâts munis de voiles d'un blanc immaculé, une combinaison qui en fait des navires extrêmement rapides et maniables. Elles possèdent des cales, certes moins vastes que celle d'un vaisseau hauturier mais permettant néanmoins le transport de bonnes quantités de marchandises.

Toutes naviguent seules, principalement entre Cyniar, Tahelta, Nessima et Xaoranh pour le commerce, vous ne les verrez donc jamais réunies. Ce que très peu de gens savent, et c'est la raison pour laquelle toutes sont identiques et portent le même nom, c'est que ces nefs ont une deuxième vocation: elles livrent régulièrement en toute discrétion des vivres et diverses fournitures aux Eruïons du désert de Sarnissa ainsi qu'aux miséreux de Raynna. Jamais d'armes ou d'armures dans ces livraisons, cependant, leur rôle occulte est de favoriser l'émergence d'une paix entre les peuples, pas de les équiper pour une guerre.

Moyennant une somme très correcte, ces navires pourront aisément vous emmener en tout lieu des côtes Naoriennes ou jusqu'à Xaoranh, il vous suffit pour cela de négocier avec leur capitaine (dépense purement rp, usage libre pour tous).




(6 navires à vitesse X3)

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Tanaëth Ithil
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Tanaëth Ithil » lun. 12 août 2019 22:46

Traverser la cité jusqu'au port situé en contrebas n'est qu'une formalité, bien que les gardes de la porte séparant le quartier noble du quartier pauvre se montrent quelque peu suspicieux en avisant la femme masquée qui m'accompagne. Si le plus jeune, pur troufion de base imbu de son uniforme et prompt aux excès de zèle qui caractérisent les ambitieux, se met en tête de m'interroger, son supérieur intervient aussitôt :

"C'est l'époux de la commandante de la Garde Militaire, abruti. Veuillez lui pardonner, Seigneur 'tar Ithil, il a plus de courage que de cervelle..."

Je hausse les épaules pour lui signifier que ça n'a pas la moindre importance puis, les soldats s'écartant du passage, fais signe à Yliria que nous pouvons poursuivre notre route. Je m'assombris notablement en traversant le quartier des démunis, comment pouvons-nous tolérer que des Enfants de Sithi vivent dans de telles conditions?! Nous pourrions changer cela, ce serait facile, le royaume de Sarindel est bien assez riche pour que nul ne manque de rien, et pourtant rien n'est fait. Combien de nobles se soucient seulement de ce qui se passe ici? Peu, beaucoup trop peu. Mais cela changera, je m'en fais la promesse, lorsque je reviendrai de ma mission. Bien évidemment ma modeste fortune n'y suffira pas, mais je me fais fort de convaincre d'autres membres de la noblesse de participer au projet que j'ai en tête. Quoi qu'il en soit cela devra attendre, pour l'heure c'est vers d'autres démunis, les Eruïons, que notre attention va se tourner. La route pentue menant au bord de l'océan descendue, nous arrivons rapidement au port où est amarrée, aisément repérable, l'une des galères de l'Opale.

J'explique brièvement à Yliria qu'il en existe six, toutes rigoureusement identiques et portant le même nom afin que nul ne puisse les différencier. Je la rassure aussi sur l'accueil qui lui sera fait, les équipages étant constitués majoritairement de réfugiés de Sor-Tini qui ont déjà côtoyé d'autres races, mais en même temps j'étais aussi certain que les gardes de la commanderies seraient fiables... Mieux vaudra que je garde un oeil sur elle, à tout hasard. Je grimpe sans hésiter sur la passerelle et suis accueilli par le capitaine qui nous a vu approcher et qui déclare en Sindel:

"Bienvenue à bord, Seigneur. Nous sommes prêts à appareiller, le matériel que vous avez demandé est arrivé voilà une heure."

"Excellent. Vous avez convenu d'un point de rendez-vous?"

"Oui Messire, Les Eruïons nous attendront dans la baie habituelle."

"Fort bien, alors levez l'ancre dès que possible."

"Immédiatement Seigneur. Oh, une chose encore: deux galères militaires sont portées manquantes, selon la capitainerie, elles auraient disparu dans les environs de Raynna."

"Ah. Eh bien, nous aviserons sur place le cas échéant."

Le Capitaine hoche la tête puis, après un bref regard intrigué en direction d'Yliria, se met en demeure de faire s'activer les matelots tandis que je fais signe à la jeune femme de me suivre vers les cabines afin de lui montrer celle qui nous a été attribuée. Privilégiant le hamac à la couchette, elle dépose ses affaires avant de retirer son masque avec un visible soulagement, puis baille brusquement avant de déclarer d'un air un peu piteux:

"Désolée, la nuit n’a pas été très reposante, et j’ai les mêmes besoins que les humains sur ce point. Je ne serai pas contre une ou deux heures de plus…"


"Dans ce cas, dors un moment, de toute façon nous ne ferions que gêner la manœuvre en traînant sur le pont."

Néanmoins, n'étant pas fatigué pour ma part, je me retire et retourne à l'air libre en prenant soin de ne pas encombrer le passage. Le navire ne tarde pas à quitter le port et à se diriger vers le sud grâce à la seule force de ses voiles, ce qui me laisse assez d'espace pour pouvoir m'entraîner un peu. J'évite cependant de dégainer mon ardente, histoire de ne pas faire paniquer le brave capitaine, et privilégie donc ma lame d'Eden dont je n'use plus que rarement. Je n'en apprécie que davantage son équilibre parfait et ne tarde pas à perdre toute notion du temps, plongé que je suis dans de complexes enchaînements qui demandent toute ma concentration. Je réalise soudain qu'Yliria est en train de m'observer, je ne sais trop depuis quand, aussi je m'immobilise et lui demande :

"Bien reposée? Veux-tu que je te montre cette danse martiale dont je t'ai parlé?"

Comme elle semble toute excitée à cette idée, j'exécute une première fois la danse de l'éclipse, à vitesse modérée afin qu'elle puisse bien percevoir mes gestes:

"C'est une danse très ancienne, mes ancêtres la pratiquaient sur Eden, notre monde d'origine. L'idée est de dissimuler ta ou tes lames pour surprendre ton adversaire et le prendre à contre-pied. Elle peut sembler chaotique, au premier abord, mais en réalité c'est une chorégraphie extrêmement précise qui se base sur les mouvements des astres. Regarde bien, je te montre encore une fois le début, ensuite tu essayeras."

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Yliria
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yliria » mar. 13 août 2019 13:20

<< Auparavant


Bercée par le léger roulis du bateau, le sommeil fut paisible et plus long que je ne l’aurai imaginé. Je me réveillai doucement, roulée en boule dans le hamac que j’avais monopolisé dès que nous étions entrés dans la cabine. Je titubai quelques instants en me mettant debout, m’habituant rapidement au tangage avant de m’habiller et de sortir de la cabine. L’intérieur du vaisseau me rappela de mauvais souvenirs, aussi je me hâtai d’en sortir pour retrouver l’air libre. Le vent me happa une fois sortie et je détournai la tête quelques secondes en fermant les yeux avant de me reprendre, humant l’air marin avec plaisir. Veillant à ne pas gêner les marins, je m’approchai du bastingage pour observer la mer quelques instants, voir la coque du bateau fendre les flots et admirer le scintillement du soleil sur les eaux bleues du Naora. Le dernier voyage en bateau avait été une source d’angoisse et de doute alors que père et moi fuyions Gwadh, j’espérai pouvoir apprécier davantage celui-ci malgré les enjeux qui auraient tôt fait d’accaparer mon esprit.

(Tu devrais tourner la tête, tu y verrais quelque chose d’intéressant.)

La petit voix d’Alyah piqua ma curiosité et je suivis sont conseil, mes yeux tombant sur Tanaëth qui semblait s’entraîner à l’épée. Je m’approchai, restant à distance tout en observant ses mouvements, essayant d’en retenir les enchaînements sans trop y parvenir. Il y avait quelque chose de gracieux dans ses gestes, une précision et une aisance qui me faisaient encore cruellement défaut. Je savais que je n’étais qu’une novice en la matière, mais voir un combattant comme Tanaëth en pleine action mettait encore plus cet état de fait en avant. J’avais encore beaucoup à apprendre pour espérer m’en sortir seule.

(Tu exagères, tu t’en sors plutôt bien.)

(Je vois mal ce qui te fait dire ça.)

(Tu as toujours survécu Yliria.)

Je devais l’admettre, c’était un argument plutôt convaincant, mais je n’étais pas dupe. M’en sortir suffisamment pour survivre ne suffirait pas, surtout quand je repensais à ce qu’Odvala m’avait infligé sans même être inquiétée et la façon dont Tanaëth m’avait vaincu alors même qu’il était épuisé et blessé. Je continuai de l’observer quelques minutes encore, en silence, jusqu’à ce qu’il finisse par remarquer ma présence et n’interrompe ses exercices.

- Bien reposée? Veux-tu que je te montre cette danse martiale dont je t'ai parlé?

Je lui souris franchement.

- Plutôt bien oui. Et oui j’en serai ravie !

Je ne cachai pas mon excitation et l’observai tandis qu’il effectuait la fameuse danse dont il m’avait parlé. J’essayai de suivre au mieux ses mouvements, de comprendre le schéma sans vraiment y parvenir.

- C'est une danse très ancienne, mes ancêtres la pratiquaient sur Eden, notre monde d'origine. L'idée est de dissimuler ta ou tes lames pour surprendre ton adversaire et le prendre à contre-pied. Elle peut sembler chaotique, au premier abord, mais en réalité c'est une chorégraphie extrêmement précise qui se base sur les mouvements des astres. Regarde bien, je te montre encore une fois le début, ensuite tu essayeras.

Il reprit donc et je me concentrai sur autant de gestes que je pus, ne les saisissant hélas pas tous alors qu’il terminait, me faisant signe d’essayer à mon tour. Je le regardai quelques secondes avant d’avouer.

- Je…euh… j’avoue ne pas avoir pu tout voir.

Cela ne me découragea pas pour autant et patiemment, il me montra chaque mouvement que je me bornai simplement à copier un par un, essayant de les effectuer correctement avant de songer à les enchaîner. Avec patience, il rectifia chaque jeu de jambe et chaque mouvement de bassin ou de bras qui ne suivaient pas la danse avec précision, passant parfois plusieurs minutes à m’expliquer l’intérêt de tel ou tel mouvement afin que j’en saisisse toute la nuance et l’intérêt dans l’enchaînement martial final. Je finis par correctement réussir séparément les trois premiers mouvements qui composaient le début de la danse martial et, après m’avoir de nouveau fait une démonstration, je m’essayai, avec un succès mitigé qui fit apparaître une moue frustrée sur mon visage, dessinant un sourire sur le visage de Tanaëth. Je n’allais certainement pas abandonner là-dessus. J’enlevai mon armure et mes bottes, gardant seulement mes vêtements de lin pour bouger plus facilement, comme lorsque j’avais appris à danser avec Lichia dans le désert, me disant que cela m’aiderait sans doute. Je passai l’entière matinée dessus, fixée sur l’idée de maîtriser au moins ces trois mouvements avant quoique ce soit d’autre.

(Tu devrais manger et faire une pause Yliria. Boire un peu d’eau aussi, tu vas finir par t’effondrer.)

Je n’écoutai qu’à moitié, mais quand Tanaëth me dit la même chose, je hochai la tête et l’accompagnai pour manger un morceau. Comme pour la commanderie, je fus la cible de beaucoup de regards au sein du navire, mais ce n’était pas l’agressivité qui dominait, plutôt une franche curiosité ou la surprise, ce qui, sans être agréable, était toujours davantage apprécier que du mépris ou de la haine. Je me rendis compte que j’étais effectivement affamée lorsque nous commençâmes à manger et Tanaëth indiqua qu’il serait préférable que je patiente jusqu’à cette nuit pour reprendre l’entraînement. Je n’eus pas le temps de protester qu’il enchaîna en expliquant qu’il pourrait ainsi me montrer le mouvement des astres en rapport avec cette danse, et que cela pourrait m’aider dans mon apprentissage.

- D’accord, je vais m’économiser un peu alors.

Triturant mon écuelle, j’hésitai à lui poser la question que me trottait dans la tête depuis notre traversée des quartiers pauvres de Nessima. J’avais bien vu son visage se fermer brusquement, j’étais curieuse d’en connaître la raison mais hésitais.

- Tanaëth… Quand nous avons traversé les faubourgs, je vous ai vu enrager sans rien dire, pourquoi ?

- Parce que personne ne devrait vivre dans de telles conditions. Nous aurions les moyens de changer ça et pourtant... personne ne fait rien. C'était pareil à Tahelta.

Je l’écoutai en silence, hochant simplement la tête. Je comprenais son point de vue, bien plus que beaucoup d’autres, ayant vécu pauvrement avec mon père pendant toute mon enfance malgré le statut de ma mère. Le fait d’avoir vécu comme ces gens, ironiquement, faisait que je ne les prenais pas en pitié, parce qu’ils détestaient ça généralement, mais je ne pouvais qu’approuver les paroles de Tanaëth.

- Je comprends… J’espère que vous réussirez à faire quelque chose.

Je terminai mon assiette et m’excusai en vitesse avant de sortir prendre l’air. Encore une fois, parler d’une chose me faisait penser à d’autres qui me pesaient, je commençais à en avoir assez. Sans vraiment faire attention, je grimpai sur la rambarde du navire et m’y assis, les jambes pendant dans le vide au-dessus de la mer, scrutant l’horizon en repensant à des choses qui auraient dû rester enfouies depuis longtemps.

- T’es une Shaakte ?

Je sursautai et bondis sur mes pieds, titubant sur la rambarde avant de reprendre mon équilibre, me traitant mentalement d’idiote. Face à moi, un jeune Sindel me regardait avec curiosité, accroupit sur la rambarde. Il désigna du menton un groupe de marin qui semblait nous fixer.

- Ils ne sont pas d’accord si t’es une Shaakte où une Eruïonne, alors je me suis dit que j’allais venir te demander.

Je pris quelques secondes pour reprendre mes esprits et jeter un œil aux marins qui semblaient attendre avec impatience la réponse que leur donnerai le jeune Sindel.

- Ni l’un ni l’autre, je suis une semi-shaakte.

Cela lui tira une expression étonnée puis un large sourire.

- J’ai gagné alors, c’est ce que j’avais dit, mais personne me croyait. Bienvenue à bord… ?

- Yliria.

- Bienvenue à bord Yliria, moi c’est Livwaë. Si tu veux je te ferais visiter le navire quand je prendrais mon quart. A plus tard.

Et il repartit vers le groupe de marins ou je vis une grande majorité de visage déçus et quelques pièces circuler, me faisant lever les yeux au ciel. Les Sindeldi… Au moins les choses semblaient se passer mieux que dans la commanderie, je me demandais bien pourquoi et gardai la question dans un coin de ma tête. Retournant dans ma cabine, j’en profitai pour ingérer le reste des fioles de fluides qu’il me restait. Si celle de lumière ne posa pas de problème et eut le même effet que d’habitude, la dernière de feu me laissa un curieux sentiment, comme si j’avais rempli un verre à ras-bord et que tenter de d’y ajouter quoique ce soit ne ferait que tout faire déborder. Consciente que jouer avec le feu sur un bateau était une mauvaise idée, je me concentrai davantage sur l’utilisation des fluides de lumière pendant une partie de l’après-midi, assise dans un coin, les faisant doucement circuler pour maîtriser au plus vite l’entièreté du processus. J’avais toujours vécu avec des fluides de feu et y était habituée, il me fallait faire de même avec cette nouvelle puissance, sans pour autant jeter de sort pour ne pas effrayer tout le navire.

Le soir venu, je rejoignis Tanaëth sur le pont, de nouveau pieds nus et avec mes simples vêtements et mes armes, délaissant l’armure restée au chaud dans la cabine.

- Désolée pour ce midi, ça m’a rappelé certaines choses que j’aurai préféré oublier. Je suis prête à reprendre si vous êtes toujours d’accord.

Suite >>

((( HRP : Début de l'apprentissage de la posture Danse de l'Eclipse + consommation d'une fiole de fluide de feu 1/16, une fiole fluide d feu 1/8 et une fiole de fluide de lumière 1/4)))
Modifié en dernier par Yliria le mar. 20 août 2019 21:52, modifié 2 fois.

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Tanaëth Ithil
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Tanaëth Ithil » jeu. 15 août 2019 12:40

La jeune femme ne saisit évidemment pas du premier coup l'enchaînement complexe que je lui montre, ce qui ne me surprend aucunement : aucune danse martiale n'est plus difficile à appréhender selon mon expérience, je la pratique depuis des années et pourtant je sais qu'il est encore possible de l'améliorer. Sans la moindre trace d'impatience, je décompose mes gestes de manière à ce qu'elle puisse s'exercer pas à pas, ce qu'elle fait durant des heures, si opiniâtre que je dois presque la forcer à s'arrêter pour manger quelque chose. Plutôt que de reprendre l'entraînement rapidement, j'insiste pour attendre la nuit, ce qui me permettra de lui montrer les mouvements de divers astres qui inspirent cette technique. Le repas terminé, elle me demande soudain, un peu mal à l'aise:

"Tanaëth… Quand nous avons traversé les faubourgs, je vous ai vu enrager sans rien dire, pourquoi ?"

"Parce que personne ne devrait vivre dans de telles conditions. Nous aurions les moyens de changer ça et pourtant... personne ne fait rien. C'était pareil à Tahelta."

Une réponse quelque peu laconique, mais je ne tiens pas vraiment à m'étaler sur ce sujet qui a le don d'éveiller ma rancœur envers le système figé et injuste qui régit la vie de mon peuple. Yliria hoche la tête et déclare pensivement qu'elle comprend, mais quelque chose semble l'avoir perturbée car elle s'éclipse aussitôt avec une hâte suspecte. Je la retrouve, quelques minutes plus tard, debout sur la rambarde du navire, face à un matelot derrière lequel plusieurs autres attendent.

(Bon sang, ça recommence), me demandé-je en me tenant prêt à intervenir si besoin? Mais non, visiblement la situation n'est pas sur le point de dégénérer, à mon plus grand soulagement, mes compatriotes semblent simplement avoir fait un pari vu que des pièces changent de main peu après. Rassuré, je vais m'installer dans un coin tranquille et entreprends de rédiger un message sur mon nécessaire à écriture télépathique :

(Capitaine Brëanal, ne craignez rien, vous n'êtes pas fou et n'entendez pas des voix, c'est Tanaëth Ithil qui vous parle au moyen d'un artefact permettant la télépathie. Mon mariage est désormais scellé, mais je ne reviendrai pas tout de suite à Tahelta. J'ai appris que les Eruïons s'agitaient étrangement et suis parti enquêter sur les origines de ces troubles. Je vous tiendrai au courant dès que possible. Toutes mes amitiés.)

Je passe le reste de la journée à m'entraîner pour mon propre compte, sous les regards souvent ébahis des marins qui en oublient parfois un peu leurs tâches, notamment lorsque j'exécute la redoutable Danse des Sabres en étant debout sur la lisse. Cet exercice me demande une concentration extrême pour conserver mon équilibre malgré la légère houle qui fait bouger le navire, mais l'idée de tomber à l'eau avec mon armure sur le dos m'incite à me dépasser, ce qui est précisément le but recherché. Une fois le soleil couché, Yliria revient vers moi en s'excusant d'avoir détalé après notre repas de midi en avouant que notre discussion lui a rappelé des souvenirs qu'elle aurait préféré oublié. Bien que je m'interroge sur lesdits souvenirs, me demandant si elle-même a connu la pauvreté, je m'abstiens de la harceler de questions et, comme elle se déclare prête à reprendre l'apprentissage de la danse de l'éclipse, entreprends de lui enseigner les liens entre les différents gestes qui la composent et le mouvement de certains astres.

Mêlant la théorie à la pratique, je l'invite à exécuter méthodiquement chaque mouvement après lui avoir montré à quoi il correspond dans la voûte céleste et remarque bientôt :

"Eh bien, je vois que tu as fait de nets progrès dans le maniement de ton bouclier, depuis la dernière fois. Ta posture générale est meilleure, aussi, c'est très bien. Mais fais attention aux coups bas, ta garde est un peu haute, sans doute parce que tu as l'habitude d'affronter des adversaires plus grands que toi."

Après l'avoir aidée à rectifier sa position, je me recule un peu et dégaine ma Vorpale et la lame de mon ancêtre :

"Voilà, c'est mieux. Maintenant exerce-toi un peu sur moi. Analyse ma défense, oblige-moi à faire des erreurs et frappe de manière à me prendre à contre-pied en dissimulant ton attaque derrière ton corps ou ton bouclier."


Le but n'étant évidemment pas de lui offrir une défense impénétrable j'y laisse volontairement des failles, de plus en plus réduites à mesure qu'elle s'améliore. Une fois satisfait de ses progrès, je la préviens avec un léger sourire:

"Excellent. A présent gare aux ripostes, il faut aussi que tu apprennes à contrer cette danse."

Là encore l'objectif n'est nullement de lui porter des attaques qu'elle serait incapable d'éviter, mais de la pousser à se dépasser en frôlant systématiquement ses limites.

"Tête, tête, épaule, épaule, genou! Plus bas ta garde, jeune femme! Et ne te crispe pas tant sur ton bouclier lorsque tu sais que tu vas prendre un coup, reste souple pour amortir le choc! A toi, attaque en dispersant tes frappes comme je viens de le faire. Trompe ton adversaire en attaquant plusieurs fois dans la même zone, puis surprends-le en frappant ailleurs. Allez, encore! Encore! Gare aux attaques basses t'ai-je dit! Oui non mais pas si basse ta garde, tout de même, protège ta tête!"

Je prends le plus grand soin de ne pas la blesser, mais il n'empêche qu'elle aura quelques jolis bleus au terme de cette séance, rien ne vaut un petit souvenir cuisant pour se rappeler des endroits à ne pas découvrir. Plusieurs jours passent ainsi alors que le Danse-Lame cingle vers le sud, jusqu'à ce que, par un matin brumeux, un lointain vacarme se fasse entendre.

(Bon sang, c'est quoi ce bruit?!)

D'abord à peine audibles, nous ne tardons pas à discerner des cris ainsi que des craquements sinistres évoquant du bois qui se brise. Quelques instants encore et nous pouvons percevoir que les cris sont emplis d'une profonde terreur tandis que le fracas de bois brisé redouble d'intensité, ce qui chasse mes derniers doutes : une bataille est en train de se livrer à l'est de notre position, sans doute pas à plus d'un ou deux kilomètres! Et ce sont des Sindeldi qui se font assaillir, à en juger par certains hurlements qui ne sont autres que des ordres donnés dans ma langue natale. Aussitôt que j'ai cette certitude, j'ordonne d'une voix assez forte pour être entendu sur tout le navire :

"Capitaine! Cap à l'est! Aux armes compagnons, préparez-vous au combat!"

Le navire vire presque immédiatement tandis que le capitaine distribue à son tour des ordres secs et précis et que les matelots qui ne sont pas indispensables à la manoeuvre se saisissent de leurs armes. Je ne sais pas quel drame est en train de se jouer, la brume nous dissimulant tout ce qui se trouve à plus d'une cinquantaine de mètres, mais aux violents craquements on aurait presque l'impression qu'un navire est en train de se faire mâchouiller par un mythique léviathan. Seulement, de telles créatures n'existent que dans les récits fantasmagoriques de marins avinés, n'est-ce pas?

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Yliria
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yliria » ven. 16 août 2019 15:58

<< Auparavant

L’entraînement reprit donc, sous la direction de Tanaëth qui m’expliqua l’origine de chaque mouvement en fonction du déplacement des astres, les détaillant un à un afin que j’en saisisse l’intérêt au cœur de la danse martiale qu’il m’enseigne. Comme pour ce matin, il commence par me faire revoir chaque mouvement indépendamment, en plus de leur explication. Un bon moyen pour m’échauffer avant de passer aux choses sérieuses. Cela faisait longtemps que je n’avais pas fait ce genre de choses sous le ciel nocturne, pieds nus, cela raviva encore quelque souvenirs, bien plus heureux ceux-là. Le léger tangage du bateau m’obligeait à faire un peu plus attention à comment je bougeais mes jambes, mais cela n’entravait en rien mes mouvements. Je fus surprise lorsque Tanaëth nota quelque chose à laquelle je n’avais pas fait attention.

- Eh bien, je vois que tu as fait de nets progrès dans le maniement de ton bouclier, depuis la dernière fois. Ta posture générale est meilleure, aussi, c'est très bien. Mais fais attention aux coups bas, ta garde est un peu haute, sans doute parce que tu as l'habitude d'affronter des adversaires plus grands que toi.

- Je… n’y avais jamais pensé.

Il n’avait pas tort, je m’étais surtout entraînée ou avait combattu des adultes, souvent des hommes qui plus est, bien plus grand que moi, donc j’avais surtout l’habitude d’anticiper des attaques hautes. Seule Nyllyn tranchait avec cette habitude, raison pour laquelle j’avais plus de difficulté contre elle que contre n’importe qui… exception faite de Tanaëth et de ma cousine Odvala. Il m’aida à rectifier ma position, me conseillant à mesure que j’effectuais de nouveau les premiers mouvements de la danse. Il dégaine ensuite ses deux lames et je le regarde avec appréhension tandis qu’il me demande de l’attaquer en utilisant les mouvements appris, histoire de passer à la pratique. Me souvenant très bien de la dernière que nous avions croisé le faire, j’eus un instant d’hésitation avant de finalement me mettre en garde. Il fallait que je progresse, peu m’importait de prendre quelques coups au passage, si cela me permettait de m’en sortir plus tard. Il me fit l’attaquer sans relâche pendant un moment, se défendant contre mes attaques pour m’obliger à accélérer, à accroître la précision et la puissance de mes coups tout en utilisant chaque mouvement pour dissimuler mon arme comme il me l’avait montré. Je percevais parfois des failles qui ouvraient sa défense et m’y engouffrais, comprenant rapidement qu’elles étaient volontaires, probablement pour que j’apprenne à en profiter. Elles se réduisirent au fur et à mesure que le temps passait et que j’étais plus à l’aise en l’attaquant, sans pour autant parvenir à percer sa défense. Rien de surprenant, mais ce fut une frustration tout de même. Un léger sourire apparut sur le visage de Tanaëth alors qu’il se déclarait satisfait.

- Excellent. A présent gare aux ripostes, il faut aussi que tu apprennes à contrer cette danse.

Il passa soudainement à l’offensive, m’obligeant à me défendre contre la même danse que je cherchais à maitriser. Succès plutôt mitigé de mon côté, j’étais trop tendu et raide comme il le souligna. Tout en combattant, il me donnait des conseils, rectifiait ma garde et me faisait alterner entre attaque et défense sans discontinuer. Je pris quelques coups, heureusement sans gravité, mais il sembla satisfait de mes progrès, insistant bien sur le fait de correctement lever ou baisser ma garde en fonction des mouvements de l’adversaire. Mon esprit engrangeait les connaissances, mais c’était surtout mon corps qui retenait les leçons cuisantes de mes erreurs et ce fut courbaturée que je m‘effondrai dans le hamac sous l’œil amusé d’Alyah. Moi qui voulais avoir l’occasion de m’entraîner et d’avoir la possibilité de devenir plus adroite, j’étais servie.

Pendant plusieurs jours, ce fut mon quotidien. Dès le réveil, Tanaëth me faisait faire des exercices sous l’œil parfois amusé des marins qui nous observaient lorsqu’ils avaient un moment de libre. Tanaëth ne me ménageait nullement, mais pas une fois je ne me plaignis. Je lui avais demandé de l’aide, je n’allais certainement pas rechigner malgré la difficulté. Il me faisait avancer pas à pas, mouvement par mouvement, toujours de la même manière, me faisant travailler les mouvements indépendamment avant de les exécuter ensemble puis de les utiliser contre lui, l’attaquant et me défendant successivement. Chaque fois, je finissais épuisée, mais les progrès, même minimes, me suffisaient en eux-mêmes. Lorsque je ne m’entraînais pas, je profitai du calme marin ou discutais avec Tanaëth ou Livwaë, qui me fit faire le tour du navire comme promis. Les marins, je l’appris de sa bouche, étaient tous originaire de Sor-Tini, colonie Sindel ravagée par Oaxaca, mais basée sur un autre monde. Ils n’étaient donc pas contre ma présence, bien qu’ils aient été surpris que je parvienne jusqu’ici, surtout vu mon âge. Je ne précisai pas que j’avais surtout eu de la chance de tomber sur Tanaëth dans les ruines. Si un autre Sindel ou une patrouille armée était passé par là, je n’aurai probablement pas fini aussi bien lotie. Livwaë était très curieux concernant les autres lieux où l’on formait les Danseurs et je décrivis, à lui comme à d’autres, l’Opale de Lune et Tulorim.
Ces quelques jours, bien qu’épuisants, furent relativement calmes. Un matin, je fus brusquement réveillée par des cris en provenance du pont et sortis en vitesse, arme et bouclier en main.

(Ton armure… et tes bottes…)

(Oui… merde… je verrais.)

Sortant en trombe sous les soupirs d’Alyah, je tombai sur un chaos monumental. Les marins allaient en tous sens, certains s’armant tandis que le capitaine aboyait des ordres en Sindel. Je vis Tanaëth et d’autres encocher des flèches et jetai un œil à la cible qu’ils avaiet tous décidé de viser. Mon regard suivit les cris et hurlements accompagnés d’horribles craquements et, lorsque la brume se déchira, la vision offerte me glaça d’effroi. Une immense créature à moitié immergée s’était accrochée à un bateau du même acabit que celui sur lequel nous étions et semblait déterminer à le couler. D’immense trous étaient visibles sur la coque et on pouvait voir plusieurs Sindeldi à l’eau tandis que ceux sur le pont tentaient sans succès de se débarrasser du monstre marin. Sous les ordres de Tanaëth, une volée de flèches partie en direction du monstre. Je vis du coin de l’œil Livwaë accrocher divers objets avec des cordes, probablement pour éviter qu’ils ne finissent à l’eau si la créature venait à nous percuter. Je m’approchai de la rambarde, évaluant la distance qui nous séparait de la créature, voyant clairement que nous nous approchions rapidement.

(Ce serait le bon moment pour voir si ce sort est efficace non ?)

(J’y pensais.)

Inspirant profondément, je concentrai mes fluides de lumière en une sphère au-dessus de moi, la voyant grossir rapidement. J’attendis d’être suffisamment proche et la sphère suffisamment puissante pour la propulser dans le ciel. Elle prit un trajectoire en cloche et sembla s’arrêter avant de brutalement retomber sur ce qui ressemblait à la tête de la créature, provoquant une explosion de lumière. Les flèches continuaient de pleuvoir sur le monstre qui, probablement ennuyé par tout cela, se détacha du navire pour s’immerger soudainement. Du coin de l’œil, je vis le capitaine donner de nouveaux ordres tandis que d’autres Sindeldi scrutaient les flots. J’allais pour rejoindre Tanaëth lorsqu’un cri d’alerte me fit tourner la tête vers les flots d’où la créature surgit pour frapper le navire non loin de l’endroit où se tenait Tanaëth. Sous la violence du choc, le navire se souleva brutalement tandis que le bois criait grâce. Avec effroi, je vis Tanaëth passer par-dessus bord en armure complète. Soulevée du pont, je retombai brutalement dessus, grognant sous la violence de l’impact. J’entendis des cris mais n’y pris pas garde, me relevant rapidement pour scruter les flots, apercevant Tanaëth, l’épée plantée dans la créature, luttant comme il pouvait pour y rester accrochée. Jetant un œil autour de moi dans l’espoir de demander de l’aide, je vis Livwaë, toujours une corde à la main, tremblant près de la rambarde. Je me ruai sur lui, le relevai en lui prenant la corde des mains, une idée germant dans mon esprit.

(Yliria… c’est complétement stupide, tu ne sais pas nager !)

(Je n’en aurais pas besoin !)

Attachant la corde à la rambarde d’un bout et l’autre bout autour de ma taille, je donnai mes armes à Livwaë en lui hurlant d’appeler de l’aide pour me remonter. Voyant Tanëth être brutalement envoyé comme un fétu de paille contre la coque et sombrer, je me jetai à sa suite, plongeant dans les eaux sombres malgré les cris d’avertissements de Livwaë. La fraicheur de l’eau me happa dès que je crevai la surface, me tendant instinctivement. Encore relativement peu profondément enfoncé sous l’eau, je parvins à apercevoir Tanaëth qui luttait pour remonter, son armure l’entraînant irrémédiablement vers le fond, droit vers la créature. Battant chaotiquement des pieds pour me rapprocher, je parvins à saisir sa cape et à m’y accrocher, me rapprochant de lui en tirant dessus. J’espérais réussir à le remonter, mais, trop lourd, il m’entraînait et je craignais que la corde ne suffise pas. Je n’aurai jamais la force de le retenir et nous ne pouvions rester sous l’eau éternellement, aussi je m’agrippai à lui, enserrant son torse entre mes jambes en passant sous ses bras. Ainsi collé à son dos, j’espérais réussir à me hisser avec la corde. Mais je manquai de force et cela ralentissais à peine notre inexorable descente. Je tirai de toutes mes forces sur la corde sans succès, le manque d’air me faisant faire des gestes de plus en pus fébriles avant que la corde ne vienne brutalement me vider les poumons en s’enserrant violemment avant que je ne me sente être tiré vers le haut. Je m’accrochais à Tanaëth, ignorant la douleur d’être ainsi remontée, priant pour que l’air arrive vite.

Je perçai la surface des flots avec soulagement, inspirant de grandes goulées d’air mélangées à de l’eau, toussant et crachant tandis que nous nous collions à la coque, près de l’échelle. Je vis Tanaêth se hisser tant bien que mal et voulus le suivre, mais je manquai encore d’air et je le sentis me soulever pas le col avant de me propulser sur le pont sans ménagement. Je crachai bonne quantité d’eau, allongée sur le ventre avant d’apercevoir sa blessure à la tête. Je m’approchais de lui à quatre pattes et lui ordonnai, avec une voix faible, de ne pas bouger. Respirant fébrilement, je concentrai mes fluides de lumière dans mes mains, répétant le processus enseigné par Sathiël. Avec pour unique but de soigner la vilaine plaie qu’il avait sur la tête, je diffusais lentement mes fluides depuis mes mains, enveloppant la blessure d’une douce lueur blanche. J’eus du mal à me concentrer et dus m’y reprendre à deux fois pour enfin voir la plaie se refermer lentement, trop lentement, mais je n’osais pas injecter plus de fluides dans le processus. Lorsqu’enfin elle fut refermée, je tentai de me relever, titubant avant que Livwaë ne me rattrape. Je lui offris un sourire reconnaissant et perçus son regard gêné. Suivant ses yeux, je vis mon haut blanc complètement trempé me coller à la peau tout en laissant entrevoir bien plus qu’il ne devrait. Je couvrais immédiatement ma poitrine de mon bras en toussant, plus gênée que lui, me félicitant d’avoir une peau trop sombre pour rougir autant qu'un Sindel. Il me tendit mon arme et mon bouclier et je le remerciai d’une petite voix avant de tourner les yeux vers Tanaëth.

- Qu’est-ce qu’on fait ?


Suite >>

(((HRP : Tentative d'apprentissage du sort :"Souffle de Gaïa" et suite de l'apprentissage de la posture "Danse de l'Eclipse" )))
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Tanaëth Ithil
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Tanaëth Ithil » sam. 17 août 2019 14:46

Peu à peu, à mesure que nous nous rapprochons du vacarme, le drame qui est en train de se dérouler se révèle à nous au travers de la brume matinale. La scène que nous découvrons alors nous glace tous d'effroi : une créature immense et cauchemardesque aux allures de crustacé est accrochée à un navire semblable au nôtre, le décortiquant littéralement pour s'emparer des matelots au moyen de ses deux gigantesques pinces et les amener à sa gueule abjecte! Rien ne semble pouvoir résister à son effarante puissance, poutres et cordages cèdent bruyamment sous ses assauts; les Sindeldi dont elle parvient à s'emparer sont broyés par ses appendices chitineux puis, encore vivants pour certains, avalés comme s'il ne s'agissait que de vulgaires grains de raisin! Plusieurs marins sont tombés à l'eau, si tant est que l'on puisse encore appeler eau l'ignoble liquide sanguinolent qui entoure le navire à moitié déchiqueté, percé de failles si béantes que c'est un miracle qu'il flotte encore. Portée par le vent, une puanteur atroce nous parvient, qui fait rendre tripes et boyaux à certains de nos hommes, pourtant marins aguerris. Blême, notre capitaine me hurle d'une voix où perce une terreur sans nom :

"Seigneur! C'est Klakhyss, la Peste-Mer! Il faut fuir, nous n'avons aucune chance!"

Horrifié, je vois les plus courageux matelots du navire agressé tenter en vain de trancher les appendices monstrueux de la bête, les coups les plus violents ne semblent devoir parvenir à percer la carapace du monstre. Fuir... l'idée est plus que tentante, mon instinct de survie me hurle que c'est la seule chose à faire mais quel genre de champion de Sithi serais-je si je laissais mes frères se faire dévorer ainsi sans rien tenter?

"Non! Tenez le cap! Les archers avec moi!"

Je m'empare aussitôt de ma puissante relique de glace et, gelant mon projectile d'un effort de volonté, lâche une première flèche visant la tête de la créature. Contrairement aux armes des marins de l'autre navire, mon trait transperce la carapace du monstre, mais je pourrais aussi bien tirer sur une meule de foin pour l'effet que cela a. Quelques archers se joignent à moi, mais leurs arcs ne sauraient rivaliser avec le mien et leurs flèches ne font que ricocher sur l'espèce de crevette géante. Jurant entre mes dents serrées, je vise soigneusement l'oeil de la bête et décoche une seconde flèche en usant d'une technique que je viens d'apprendre : le tir critique.

"Ha! Prends ça saloperie" exulté-je en voyant ma flèche se ficher profondément pile à l'endroit visé, éborgnant tout net l'horreur marine qui lâche un détestable crissement de douleur mêlée de rage.

En parallèle, Yliria entre dans la danse, du moins je suppose que c'est d'elle que provient l'espèce d'explosion lumineuse qui secoue le monstre une seconde plus tard. Ce dernier, réalisant sans doute qu'il a désormais des adversaires autrement plus teigneux, lâche alors sa proie pour s'immerger et disparaître dans les flots sanglants. Nul cri de victoire ne retentit cependant, ce ne sont que regards inquiets qui fouillent les alentours tandis que le capitaine ordonne anxieusement de virer de bord. Personne ne peut croire que nos coups ont suffit à décourager la bête monstrueuse, mais au moins avons-nous donné une chance aux matelots de l'autre navire de s'en sortir. Scrutant nerveusement les flots, je remise mon arc et vais pour dégainer mes lames lorsque le monstre surgit de l'océan juste devant moi en percutant violemment notre vaisseau. Le choc est tel et l'attaque si rapide que je n'ai strictement rien le temps de faire hormis dégainer ma Vorpale, ce qui ne me sert absolument à rien car le pont se dérobe subitement sous mes pieds et je m'envole dans les airs comme feuille au vent!

(Meeeeerde) hurlé-je mentalement en réalisant avec effroi que je vais passer à l'eau! Et j'ai beau être bon nageur cela ne me sera d'aucune utilité, harnaché que je suis dans ma pesante armure...

J'agrippe désespérément la poignée de ma lame d'adamantite de mes deux mains et la pointe vers le bas, elle ne m'aidera certes pas à flotter mais en tombant je vais heurter la créature et ma seule chance de survie est de parvenir à m'y accrocher. La redoutable épée de Caix Imoros se plante fort heureusement dans les flancs du monstre, arrêtant net ma chute au prix d'un choc qui met mes bras à rude épreuve, mais je réalise immédiatement que je ne suis pas sorti des ronces. Le crustacé géant se cabre si brutalement à cette nouvelle blessure qu'il s'en faut d'un cheveu pour que je lâche prise, mais la peur de sombrer comme une enclume décuple mes forces et je tiens bon. Malheureusement le monstre entend bien se débarrasser fissa de l'insecte que j'ai l'impression d'être et, si je résiste durant quelques secondes, ses folles ruades finissent par déloger mon arme de ses chairs. Voltigeant une nouvelle fois dans les airs, je n'ai que le temps de me replier en boule avant de heurter le flanc du navire avec une violence terrible. Mon armure récemment enchantée empêche sans doute que mes côtes ne cèdent sous l'impact, mais ma tête heurte si rudement le bois qu'un voile noir parsemé de stries écarlates envahit mon champ de vision. Je me sens inexorablement glisser vers l'inconscience malgré les hurlements mentaux de ma Faëra qui m’exhorte à tenir bon, malgré l'indicible terreur qui me submerge : rien ne pourra m'empêcher de couler comme une enclume, à moins bien sûr que l'abjecte créature ne me dévore avant que la noyade n'ait raison de moi...

Mû par l'énergie du désespoir, je puise dans les tréfonds de mon âme la force de rester vaguement conscient et me débats comme un beau diable, mais cela ne sert à rien. Je me sens sombrer à pic, inexorablement entraîné vers les abyssales profondeurs par le poids de mon équipement, lorsque quelque chose agrippe soudainement ma cape, ce qui m'étrangle si bien que je relâche le peu d'air restant dans mes poumons. Une seconde plus tard quelque chose venu de derrière moi m'enserre le torse et, là, je panique vraiment : ça ne peut être que le monstre, il va me bouffer vivant! Submergé d'un raz de marée de pure rage face à une mort si ignominieuse, je m'apprête à essayer de planter au jugé ma lame dans ce qui m'a attrapé lorsque Sindalywë me hurle de toutes ses forces :

(NOOOON! C'est Yliria!)

Yliria? Mais que... bon sang, elle a perdu l'esprit! Jamais elle n'aura la force de me remonter, armé de pied en cap je dois peser au bas mot le double de son poids et tout ce qu'elle va y gagner c'est de crever avec moi! Et ça, c'est hors de question. Il faut que je la contraigne à me lâcher pendant qu'il est encore temps et...

(NON! Fais-lui confiance!)

(Mais...)

(FAIS-LUI CONFIANCE) martèle ma Faëra du ton le plus autoritaire que je lui aie jamais entendu!

Manquant d'air et peinant de plus en plus à rester conscient, je n'ai pas trop de toute ma volonté pour juguler l'effroyable terreur qui s'est emparée de moi et contrer mon instinct qui voudrait que je me débatte de toutes mes forces, mais j'y parviens pourtant sans trop savoir comment. Peut-être est-ce grâce à la foi inébranlable que j'ai en Sindalywë, peut-être parce que, presque inconsciemment, je sais que me démener n'y changera rien et qu'aucun effort ne suffira à me faire remonter à l'air libre. Quelques secondes s'écoulent ainsi, étrangement paisibles une fois que j'ai réussi à calmer ma peur de mourir. Bien sûr je regrette qu'Yliria ait tenté d'intervenir, malgré l'injonction de ma petite amie de fluide je ne crois pas un instant qu'elle parviendra à ses fins, mais je n'ai aucun pouvoir sur ses choix: c'est par sa seule volonté que ses lames se meuvent. Puis, contre toute attente, je sens soudain une forte traction qui nous fait presque aussitôt crever la surface!

Quoique totalement incrédule, toussant comme un perdu tout en m'efforçant d'inspirer un peu de cet air qui me fait tant défaut, je m'aperçois que nous nous trouvons contre la coque de notre navire et à proximité d'une échelle de corde. Je m'y agrippe follement de ma main libre pour tenter de me hisser, mais je réalise à cet instant que ma sauveuse est à bout de forces et qu'elle va incessamment boire la tasse! Geste impensable en temps normal, je balance ma Vorpale par dessus le bastingage pour attraper la jeune femme par le col puis, grâce au pouvoir des runes incrustées sur mes brassards de mithril, la propulse sans ménagement sur le pont, avec autant d'aisance que si elle ne pesait rien. Je l'y rejoins quelques brefs instants plus tard et m'affale lourdement à ses côtés, pris de vertige, secoué tout comme elle d'une toux rauque et m'efforçant de cracher l'eau de mer qui a partiellement envahi mes poumons.

Je tente malgré tout de me redresser, certain que la créature menace toujours nos vies, mais la semi-Shaakte s'approche de moi à quatre pattes et m'ordonne faiblement de ne pas bouger. Bien que perplexe face à cette injonction, je m'immobilise en la scrutant d'un air interrogateur avant de voir ses mains se parer d'une étrange aura lumineuse.

"Mais que fais..."

Je m'interromps en sentant subitement de désagréables picotements du côté de mon crâne ensanglanté, une impression assez similaire à celle d'une potion de soin pour que je comprenne qu'elle tente de refermer la plaie qui doit s'y trouver. Une lueur d'admiration mêlée de reconnaissance teinte alors mon regard, même affaiblie comme elle l'est visiblement elle se préoccupe de mon état de santé?!

(Par Sithi, Tyrdann ne s'est pas trompé en lui accordant sa confiance...) songé-je alors qu'elle tente de se relever, aidée par l'un des matelots qui rougit aussitôt pour une raison que je ne cerne pas immédiatement. Ce n'est qu'en voyant Yliria couvrir hâtivement sa poitrine d'un bras, un air atrocement gêné sur le visage, que je réalise la cause du trouble du marin : trempé, son haut de lin blanc ne cache plus grand chose de son anatomie... Hésitant entre éclater de rire et grogner de dérision, je me relève à mon tour et récupère vivement ma Vorpale tandis que la jeune femme me demande ce qu'on fait maintenant. Avant de lui répondre, je prends une seconde pour analyser la situation : la bête est à une douzaine de mètres de nous, agrippée à notre navire elle s'efforce non sans succès d'arracher des pans de pont pour être en mesure de dévorer une poignée de marins qui se sont sottement réfugiés dans les cales. Plusieurs matelots ont disparu, d'autres sont passés à l'eau tandis que d'autres encore tentent désespérément de lutter contre le monstre malgré la vanité de leurs efforts. Sous le poids de l'horreur, notre vaisseau penche dangereusement et craque de toutes ses membrures, que nous laissions encore une ou deux minutes de répit à l'immonde et il coulera, cela ne fait aucun doute. Aussi dégainé-je ma Flamboyante et, mes deux lames en main, lui répliqué-je avec une grimace carnassière:

"Trouve du citron, y'aura de la crevette au menu ce soir..."

Devant son air incrédule, j'éclate d'un rire sauvage qui doit plus à la tension qu'à un quelconque humour et ajoute plus sérieusement:

"Aide-moi si tu peux mais tâche de rester à distance, cette charogne est trop coriace pour toi. Et pendant que je le peux encore... merci, Yliria. Prends soin de toi."

Après un dernier sourire qui en dit plus long que les mots, je me lance à l'assaut du monstre sans la moindre finesse, certain que seule la puissance brute parviendra à l'ébranler. A l'instant où j'assène une double frappe colossale sur la pince la plus proche, une stupéfiante aura lumineuse apparaît autour de mes membres, mais je n'ai pas vraiment le temps de m'interroger sur son utilité car déjà mes lames percutent leur cible. Le coup est d'une violence dévastatrice, plus qu'il ne le devrait ai-je l'impression au vu de ma réussite plutôt moyenne, mais il ne suffit néanmoins pas à trancher net le membre chitineux comme je l'espérais. L'abjecte réagit aussitôt avec une rapidité inquiétante et balaye le pont de son appendice blessé, ce qui me contraint à une retraite précipitée. Si vif que je sois, cela ne suffirait sans doute pas si, dans son geste peu contrôlé, la créature ne heurtait le mât central du navire. Ce dernier émet un terrible craquement puis, avec une étrange lenteur, bascule en direction de l'arrière du navire, risquant d'écraser Yliria et les quelques matelots se trouvant près d'elle!

"Attention", hurlé-je en réalisant le danger, impuissant à les aider autrement que par cet avertissement.

Je me précipite à nouveau à l'attaque, de manière un peu plus stratégique cette fois : la pince de la créature s'est en effet quelque peu empêtrée dans les cordages qui maintenaient le mât en place, ce qui m'offre une opportunité pour le moins risquée. Usant de mes talents d'équilibriste, je saute sur le membre quasiment immobilisé et, de là, bondis dans les airs pour atteindre la tête du monstre et, je l'espère, lui porter un coup fatal. Malheureusement le crustacé géant bascule légèrement sur le côté avant que je ne l'atteigne et, au lieu du crâne visé, je me retrouve face à deux de ses pattes dont les extrémités sont dangereusement effilées! Je ramène fébrilement mes armes devant moi de manière à parer les pointes menaçantes, avec succès fort heureusement, mais la conséquence de mon attaque manquée ne tarde pas à se dévoiler: je retombe au sol juste à côté de la tête massive de l'abjecte et, pire, sous ses pattes. Qu'elle "roule" comme elle vient de le faire, ou qu'elle rabatte ses deux pattes levées et je vais prendre cher, très cher.

Bien déterminé à ne pas lui laisser cette opportunité, je tente de me dégager au moyen d'un enchaînement brutal visant à dévaster ses pattes les plus proches pour m'extraire du piège dans lequel je me suis malencontreusement enfilé. Là encore j'ai le sentiment que mes coups sont plus puissants que de coutume, si bien que je parviens à ravager suffisamment deux de ses pattes, désormais inutilisables, mais la troisième, elle, ne me rate pas. Semblable à une véritable pique, la pointe de l'appendice de la crevette ripe contre les écailles de mithril qui protègent mes épaules, puis trouve la faille de mes protections et me lacère effroyablement le bras gauche! Outre la terrible douleur qui en résulte, la puissance du choc me jette à terre, position désastreuse s'il en est car il lui reste bien trop de pattes intactes à mon goût...

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Yliria
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yliria » sam. 17 août 2019 22:47

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- Trouve du citron, y'aura de la crevette au menu ce soir...

Le réponse formulée alors qu’il avait tiré deux lames dont l’une d’elle était enrobée de flammes, me laissa incrédule. Le monstre marin s’acharnait à attaquer l’avant du bateau et les cris des marins réfugiés dans la cale retentissaient, me glaçant le sang, tandis que les volutes nauséabondes qui s’échappaient du corps de la créature me donnait envie de vomir, donnant à toute cette scène une allure de cauchemar dont j’aurai aimé me réveiller. Visiblement enragé par sa récente déconvenue aquatique, Tanaëth lança un regard vers la créature et se rua vers elle, non sans répondre à ma précédente question d’une manière un peu plus sérieuse.

- Aide-moi si tu peux mais tâche de rester à distance, cette charogne est trop coriace pour toi. Et pendant que je le peux encore... merci, Yliria. Prends soin de toi.

Je lui lançai un regard angoissé qu’il ne vit probablement pas, le regardant se ruer vers la créature qui menaçait d’engloutir le navire et tous ses occupants. Déglutissant, je le visais de la paume de main et invoquais une nouvelle fois mes fluides de lumière, les concentrant dans ma main pour qu’ils l’entourent d’une aura qui lui permettrait de mieux s’en sortir face au monstre, me nimbant de la même puissance, au cas où. Je n’osais pas lancer de sorts tandis qu’il sautait sur la créature, par peur de le toucher par l’onde de choc du sort. Pestant, je mis un instant à entendre que Livwaë m’appelait, désignant un marin blessé et d’autres l’entourant. Partout des visages terrifiés, comme si l’espoir de survie n’existait pas face à ce monstre. Poussée par l’adrénaline, je n’avais même pas envisagé cela, agissant le plus vite possible sans trop réfléchir, mais en y repensant à présent, en voyant ce monstre arracher des pans entier de la coque, avions-nous la moindre chance ? Je m’ébrouai, chassant cette idée de mon esprit. Il ne fallait pas y penser, juste agir pour le moment, agir, c’était tout ce qui comptait. Tout faire pour s’en tirer et faire en sorte que le maximum fasse de même.

- Un blessé ? Faites voir !

Une plaie barrait la jambe du marin, l’empêchant de vraiment se déplacer et le vidant peu à peu de son sang. J’inspirai et me concentrai, enveloppant la blessure sous mes fluides, la voyant lentement se résorber sans totalement disparaître, mais le soulagement sur le visage du marin et la petite tape sur la tête par un autre me fit sourire.

- Forcez pas trop. Allez-vous mettre à l’abri, je vais voir si d’autres ont besoin d’aide.

Je me relevai, laissant les marins aider leur camarade, avant qu’un cri d’alerte ne me fasse tourner la tête. Un sinistre craquement retentit et j’aperçus le mât se rapprocher de nous. Je poussai Livwaë sur le côté tandis que le mât me frôlait, fracassant le pont dans un vacarme assourdissant. Je soupirai en voyant que le mât n’avait touché personne. Puis un craquement me figea. Il fut suivi d’un autre, puis de plusieurs, puis le pont céda sous mes pieds et je le traversai en même tant que le mât, m’écrasant à l’étage inférieur en grognant de douleur. Ma tête heurta le bois si bien que j’eus pour seule vision de petites lumières devant les yeux tandis que j’essayai de me remettre debout, titubant en me tenant la tête, sentant nettement un liquide poisseux couler depuis le côté de mon crâne. J’entendis Livwaë m’appeler et je levai la main pour signifier que j’allais bien compte tenu de la situation. Tout de même sonnée, j’essayai de me diriger vers l’escalier pour remonter sur le pont, me tenant dès que je le pouvais pour ne pas m’écrouler. La baignade forcée n’avait pas été de tout repos et la chute n’avait rien arrangé. Alyah me souffla de me reposer quelques instants, mais en entendant les cris d’alertes, de peur et les craquements sinistres de la coque, je refusai. Tanaëth était fort, mais s’il luttait seul, tout puissant qu’il était, il allait sûrement mourir. Je devais faire quelque chose pour l‘aider. Remontant enfin à l’air libre non sans mal, je repris peu à peu mes esprits, me retenant de vomir en sortant à l’air libre où l’odeur de la créature, amplifiée par les vents, rendait le tout bien plus nauséabond.

(Yliria ! Tu n’es pas en état. S’il te plaît écoute-moi.)

(C’est bon Alyah, je peux…)

(Bon sang tu n’es pas Tanaëth, qu’essayes-tu de prouver ?)

(Rien je… Je ne peux pas rester à rien faire ! Tu l’as entendu comme moi, il pense qu’il va mourir en essayant ! Je ne vais pas laisser faire ça.)

(Tu ne lui dois rien ! Je ne veux pas que tu te sacrifies pour lui Yliria, tu m’entends ?)

(Je ne compte pas mourir Alyah…)

(Alors arrêtes de penser à le rejoindre ! Je comprends que tu veuilles l’aider, je comprends que tu veuilles tenir ta promesse à Nyllyn, je comprends que tu souhaites montrer à tous ce dont tu es capable, mais pour l’amour de Meno, tu es blessée et Tanaëth est un guerrier plus expérimenté que toi. Il peut se débrouiller sans toi ! Tu lui as déjà sauvé la vie en risquant la tienne une fois aujourd’hui, ne va pas la perdre en recommençant, je t’en prie…)

(Ecoute Alyah je…)

Avant même de pouvoir lui répondre, j’aperçus Tanaëth au beau milieu des pattes de la créature, luttant pour trancher ce qui pouvait l’être. Je le vis ravager deux pattes coup sur coup et aurait été tentée de dire qu’Alyah avait raison, mais lorsque j’aperçus le coup qui risquait de lui être fatale, je ne pus m’empêcher de laisser les avertissements d’Alyah de côté pour agir. Je levai la main au-dessus de moi, concentrant mes fluides de feu en un orbe géant qui fusa vers le ciel tandis que Tanaëth tombait au sol. Je me ruai en avant tandis que l’obus de feu explosait au beau milieu des pattes de la créature. Je lançais une simple boule de feu ensuite, visant sa gueule, plus pour l’ennuyer que véritablement la blesser. Il fallait qu’elle oublie Tanaëth juste assez longtemps pour que je puisse le tirer de là. Peut-être y étais-je allée trop fort ou que le monstre pensa que Tanaëth était soudainement une proie suffisamment affaiblie pour s’en désintéresser. Toujours fut-il qu’une patte fusa vers moi, m’obligeant à me jeter au sol pour ne pas me faire écraser, l’appendice fracassant le pont derrière moi. Je me relevais d’un bon, bouclier et lame en main, courant vers Tanaëth, glissant sur le pont trempé pour le rejoindre. Essuyant le sang qui m’obstruait la vue, je jetai un œil à la blessure de Tanaëth. Son bras était salement amoché, même avec la magie je doutais de vraiment être d’une réelle utilité. Je vis son regard éberlué lorsque j’illuminai mes mains de fluides de lumière pour le soigner, laissant la magie agir.

- Oui, je sais, c’est stupide, ne dites rien. Je vais vous aider, je peux pas rester sans rien faire ! Ah merde !

Poussant Tanaëth, je roulai sur le côté pour éviter une nouvelle attaque qui s’encastra juste à côté de ma tête, projetant des éclats de bois en tous sens, l’un se fichant près de ma clavicule en m’arrachant un cri de douleur, rendant mon bras difficile à bouger.

(Yliria ! je t’en supplie recule ! Va te mettre à l’abri !)

(Putain Alyah ! Si on ne tue pas cette horreur on n’aura nulle part où se cacher, tu le sais.)

Je sentis l’angoisse de ma faera comme jamais auparavant. Pourquoi était-elle dans cet état ? Ce n’était pas la première fois que je risquais ma vie pourtant !

(D’habitude, Yliria, tu n’es pas contre un monstre marin qui ne laisse que mort et désolation dans son sillage ! Lève-toi et fous le camp !)

Je roulai et me remis sur mes pieds en grimaçant, reculant dans l’idée de lancer un nouveau sort, hurlant à l’attention de Tanaëth tandis qu’un orbe de feu apparaissait au-dessus de mes mains

- Tanaëth ! Je vais viser son œil !

En espérant que cela ait un réel impact sur la suite.


Suite >>
Modifié en dernier par Yliria le mer. 28 août 2019 22:14, modifié 4 fois.

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Tanaëth Ithil
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Tanaëth Ithil » dim. 18 août 2019 16:49

Domptant férocement la souffrance qui m'envahit, je roule fébrilement sur le côté pour esquiver une pointe mortelle qui s'abat puis, me retrouvant sur le dos, j'aperçois avec horreur une grande sphère de feu en train de fondre sur la créature, et donc sur moi compte tenu de l'endroit où je me trouve, depuis les cieux. Je n'ai que le temps de me lancer dans une nouvelle roulade en m'enroulant dans ma cape ignifugée avant que la boule incandescente n'explose violemment en touchant la bête, pile à l'endroit où je me trouvais une fraction de seconde plus tôt.

(Merde, elle pourrait faire gaffe par Sithi) juré-je intérieurement en réalisant que l'obus enflammé venait certainement d'Yliria! Si mon mouvement et ma cape m'ont permis d'éviter le pire, je me retrouve quasiment sous les pattes opposées du monstre qui, répandant désormais une puante odeur de chitine cramée, décide subitement de reculer pour se remettre dans l'eau. J'en serais ravi si, pour ce faire, il n'agitait frénétiquement ses membres antérieurs au risque de m'empaler proprement. Je parviens de justesse à en dévier un au moyen de mes lames puis, comprenant qu'ils sont trop nombreux pour que je m'en sorte sans dommage, je roule une fois de plus au sol afin de me placer sous le ventre de la créature, seul lieu susceptible de m'offrir un abri, si précaire soit-il. Que ce maudit crustacé s'affale un tant soit peu et son poids monstrueux me réduira à l'état de galette... mais par chance, il se cabre au contraire alors qu'un nouvel orbe de feu percute sa tête, ce qui me permet de me remettre vivement à genoux et de lui enfoncer de toutes mes forces mes deux lames dans le ventre. Ce dernier étant nettement moins protégé que son dos, mes deux reliques s'enfoncent profondément dans sa chair putride, lui infligeant une blessure si terrible qu'il soubresaute follement pour se soustraire à ce qui le transperce et bascule de côté. J'en profite pour me dégager de ma position foireuse en rampant précipitamment et m'écarter de ses puissantes pattes qui battent dangereusement les airs, puis cille en avisant Yliria qui fonce vers moi au détriment de toute prudence. Alors que je m'apprête à lui dire ce que je pense de cette absurde témérité, elle me coupe la parole tout en examinant ma blessure et en tentant de la guérir d'un sortilège, au vu de ses mains entourées de lumière :

"Oui, je sais, c’est stupide, ne dites rien. Je vais vous aider, je peux pas rester sans rien faire ! Ah merde !"

La jeune femme me bouscule rudement avant de rouler à terre, ce qui lui permet d'esquiver d'extrême justesse une attaque de la créature. Malheureusement l'impact est d'une telle violence qu'il fait éclater le bois constituant le pont, lequel projette de redoutables éclats un peu partout alentour. Si je suis épargné par ces échardes, Yliria en revanche s'en prend une dans l'épaule et crie de douleur lorsque la pointe de bois se fiche dans sa chair. Je lui passerais bien ma gourde contenant des potions de soin, mais déjà l'atrocité marine s'est reprise et s'apprête à essayer de nous saisir de sa pince, bien que cette dernière soit sévèrement blessée par l'attaque massive que je lui ai assénée un peu plus tôt. Je me relève d'un bond afin d'essayer de protéger la jeune femme qui, réalisant sans doute le danger, roule de côté pour s'éloigner de l'abjecte créature et se remettre debout à son tour. Alors que la pince monstrueuse se précipite dans notre direction, je pivote brutalement sur moi-même afin de lui opposer mes deux lames avec la plus extrême violence, visant de mon mieux la grande fente provoquée précédemment dans son armure de chitine. J'entends Yliria me prévenir qu'elle va viser l'oeil de la bête, mais l'inertie de ma frappe est telle que je n'ai plus la moindre chance de l'interrompre pour m'écarter à temps. Le choc est à la mesure de la puissance du titan des mers et, bien que mes redoutables reliques parviennent cette fois à trancher l'odieux appendice, je m'envole comme un fétu de paille et vais lourdement m'écraser contre une pile de caisses qui se fracassent sous la force de l'impact. Quoique rudement sonné, je me fais l'absurde réflexion que, quelque part, cela a du bon car j'ai ainsi bien involontairement esquivé la boule embrasée qui heurte alors la tête de l'horreur. Mais tout de même, un de ces jours il faudra que j'explique à Yliria que risquer à chaque fois de calciner ses alliés n'est pas précisément la meilleure manière de remporter un combat...

Quant à la monumentale crevette, je commence sérieusement à me demander si nous avons la moindre chance d'en venir à bout car, malgré les nombreux coups pourtant dévastateurs que nous lui avons portés, elle ne semble pas vraiment en train de faiblir.

(Rhâaa mais c'est pas vrai bordel, elle est faite en quoi cette saloperie?!)

Puisant dans ma volonté la force de me relever une fois de plus, je me précipite à nouveau sur l'odieuse monstruosité. Il faut en finir et vite, la coque de notre navire émet de plus en plus d'inquiétants craquements et si elle cède nous sommes tous morts. Je réalise dans ma course que la créature s'agite de manière plus désordonnée qu'avant, un fait dont je comprends vite la raison : la dernière sphère enflammée d'Yliria lui a proprement calciné son deuxième oeil! Peut-être avons nous une chance, finalement?

"Yliria! Vise sa gueule à mon signal!"

Reste à espérer qu'il lui reste encore assez de pouvoir pour lancer un sortilège... Quant à moi, je me ramasse subitement sur moi-même en arrivant à portée de son moignon de pince afin de le contourner par le bas puis, parvenu juste devant sa tête, me relève brutalement de façon à lui planter mes deux reliques dans ce qui lui sert de gorge. Ma Vorpale rencontre malheureusement quelque chose de si dur qu'elle ne parvient pas vraiment à s'enfoncer, mais mon Ardente pour sa part perfore profondément la mâchoire inférieure du monstre qui lâche un ignoble crissement de douleur en se cabrant vers le haut ainsi que je l'espérais.

"MAINTENANT!"

Si j'ai bien calculé mon coup, la jeune femme devrait pouvoir lui balancer une de ses foutues sphère de feu dans la gueule béante de l'horreur. Bien sûr elle me touchera aussi à la moindre imprécision, mais qu'importe si cela peut enfin abattre le monstre...

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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yliria » dim. 18 août 2019 21:40

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Chargeant mes fluides en espérant atteindre la créature à l’œil, je vis Tanaëth se ruer sur la créature. Je perdis en concentration en le voyant trancher une de ses pinces et l’orbe qui partit fut moins puissant que le précédent, mais elle atteignit sa cible, explosant en plein sur l’œil de la créature, projetant des flammèches sur sa carapace et sur le pont tellement gorgé d’eau qu’elles s’éteignirent aussitôt sans infliger un quelconque dégât sur le bois. Je commençai à être complètement épuisée et je savais que je n’avais plus beaucoup de réserves. L’increvable bestiole semblait ne rien subir de nos assauts et je commençai à désespérer de l’abattre un jour. En voyant ses mouvements chaotiques, j’eus cependant un espoir. La bête était sans doute aveuglée et il fallait en profiter, ce que fit Tanaëth, me hurlant de me tenir prête à viser la mâchoire de cette saloperie puante. Tentant le tout pour le tout, je concentrai ma magie et me tint prête à agir, le cœur battant la chamade.

(Meno, faites que ça tue cette horreur)

- MAINTENANT!

L’obus fusa aussitôt vers sa cible tandis que je titubai en sentant mes réserves de magie de feu se vider complètement. Je crus un instant que j’allais m’effondrer, mais je restai debout et vit l’impensable. La crevette avala la boule de feu géante. Pas volontairement probablement, mais elle l’engloutit et celle-ci disparût. Il y eut un instant de flottement, une fraction de seconde ou tout semblait s’arrêter, une seconde si longue ou même les bruits de combats, les cris te l’horreur semblaient faire une pause. Puis le ventre de la créature se bomba soudainement, laissant entrevoir deux jets de flammes depuis deux horribles blessures, probablement infligées par Tanaëth. Fragilisée, cette zone s’ouvrit violemment sous la force de l’explosion de feu, envoyant en tous sens flammèches et morceaux putréfiés de chair nauséabondes. Je levai mon bouclier, entendant un « bong » lorsque quelque chose ricocha dessus, apercevant la créature se cabrer en poussant un effroyable cri avant de s’effondrer sur le pont.

- Tanaëth !

Il était situé sous la créature la dernière fois que je l’avais vu ! Je me précipitai en avant, trébuchant sur un morceau visqueux et m’étalant comme une idiote sur le pont. J’avais l’impression d’être complètement vidée et ma vue se brouillait par moment, la douleur n’arrangeant absolument rien. Je me relevai tant bien que mal, titubant en m’approchant, espérant apercevoir Tanaëth. Je finis par le voir et m’approchai de lui. J’avais déjà fait fort niveau stupidité, mais m’approcher aussi près de la créature devait figurer dans l’une des pires choses, juste derrière le fait de foncer seule et sans préparation dans un désert de sable. La créature, toujours vivante, se jeta en avant pour m’attraper dans ses mâchoires. Si j’évitai d’être attrapée en plongeant sur le côté, je vis deux pattes fondre sur moi. J’en évitai une en roulant, mais l’autre m’empalant la cuisse, me faisant hurler de douleur. Je donnai un grand coup d’épée en espérant trancher la pointe enfoncée dans ma jambe, sans succès. Je sentis la douleur empirer lorsqu’elle commença à me tirer vers elle. Je plantai ma lame dans le pont pour me retenir, mais elle avait tant de force que cela ne suffit pas, la lame suivant le mouvement, ralentissant à peine mon approchée inexorable vers ses mâchoires béantes et calcinées.

(Yliria !)

La peur et l’angoisse de ma faera m’électrisèrent et je retirai ma lame du bois, me retournant vers la créature, chargeant mes fluides en une orbe géante de lumière. Pas question de mourir dévorée par cette horreur ! Elle ouvrit la gueule et l’orbe fusa, explosant au contact de ses mâchoires béantes. Je me sentis soulevée du sol et projetée plus loin, la patte de la créature se délogeant de ma cuisse. Le choc sur le pont fut rude et suivit d’un tremblement lorsque le monstre s’affaissa dessus, vomissant le même liquide nauséabond que celui qui suintait par l’extrémité de son corps. Je la vis tressauter avant de s’écrouler et de lentement glisser vers la mer, se figeant lorsque les appendices figées dans la coque la retinrent. Allongée sur le dos, je gémissais de douleur en sentant ma jambe.

(Yliria ! Un sort de soin, vite, tu vas te vider de ton sang à cette allure, soigne ta jambe !)

(J’ai si mal.. je peux pas…)

(TU PEUX ! FAIS-LE ! TOUT DE SUITE !)

Gémissant et pleurant sous la douleur, je me redressai suffisamment pour tendre les mains, utilisant mes dernières réserves pour lancer un sort de soin, lentement, je sentis l’angoisse de ma faera refluer, contrairement à la douleur qui était toujours aussi vive. Pourquoi avais-je laissé mes foutues fioles dans ma cabine ?! J’entendis des pas et des cris, mais je ne voyais déjà plus rien. J’avais les yeux fermés, la respiration sifflante et je sentais mon corps tressauter sous la douleur. Je sentis une main passer derrière ma nuque, me relever doucement la tête et me faire boire quelque chose. Il y eut une voix, mais je n’arrivais plus à saisir ce qu’elle disait, puis ce fut le noir complet, le silence. Un peu de paix.

Ce fut le léger tangage qui me tira du sommeil, mais ce fut la douleur de ma jambe qui acheva de me réveiller. Allongée dans le lit de la cabine, je restai un moment inerte, ne remuant pas le moindre muscle inutile, essayant de réunir des pensées suffisamment cohérentes pour me redresser. On avait bandé mon épaule et on m’avait rhabillé par-dessus, et fait de même avec ma cuisse. Je n’osai pas jeter un coup d’œil et me rallongeai rapidement en soupirant, grimaçant lorsque mes muscles me firent un mal de chien. J’étais salement amochée.

(Doux euphémisme… J’espère que ça te servira de leçon, sombre idiote !)

C’était bien la première fois qu’Alyah utilisait ce genre de mots en me désignant.

(Quoi ? Tu es surprise ? Ce que tu as fait était inconscient, stupide, dangereux et tu aurais pu mourir tellement de fois que je n’ai pas assez de doigts pour le compter. Merde Yliria ! MERDE !)

(Alyah je…)

(Quoi ? Tu es désolée ? J’en ai marre tu m’entends ? Tu n’en fais qu’à ta tête ! Tu pensais que parce que tu as appris quelques sorts et à te servir un peu mieux de ton bouclier tu peux aller terrasser les pires horreurs de Yuimen ? Je vais te dire...)

Elle apparut subitement devant moi, l’air véritablement furieuse, ses cheveux de flammes partant dans tous les sens.

- … la prochaine fois que tu me fais ce coup-là, Yliria, j’abandonne.

- Quoi ? Abandonner ? Attends, mais on l’a vaincu cette…

- Je m’en contrefous ! Tu as foncé tête baissée dans les pattes d’un monstre qui écume les mers en ravageant tout sur son passage depuis je ne sais combien de temps. Et tout ça pour sauver un Sindel que tu connais à peine !

- Et j’aurai dû faire quoi ? L’abandonner ? S’il mourrait, nous étions tous morts ! Et même si on survivait, imagine comment Nyllyn se sentirait si elle…

- Et si toi tu mourrais, comment elle se sentirait ? Comment moi je me sentirais d’après toi ?!

Je la regardai sans rien dire, écarquillant les yeux en voyant des perles lumineuses rouler sur ses joues.

- Alyah…

- Tu crois que je suis quoi ? Hein ? Une poupée qui parle et qui fait de la lumière pour faire joli ? J’existe depuis des millénaires, Yliria, j’ai déjà vu trop de mes maîtres mourir sans pouvoir les sauver, est-ce que tu as la moindre idée de ce que je peux ressentir à chaque fois ? Je passais parfois des siècles avec eux, les voyant soudainement disparaître sans jamais avoir ne serait-ce que l’espoir de les revoir. Et toi Yliria, tu es probablement celle que je chéris le plus parmi tous. Jamais je ne me suis autant inquiétée ou démenée pour l’un d’eux, je restais distante à force de les voir mourir, parce que j’avais trop mal, mais avec toi je ne peux pas m’en empêcher. Tu comptes Yliria, tu comptes pour moi et te voir te jeter dans la gueule du loup me rend folle d’angoisse. J’aimerais tellement pouvoir te toucher pour t’en coller une parfois !

- Ecoute, je…

- Ne dis pas que tu es désolée, parce que je suis sûre que tu recommenceras si je ne fais rien! Tu ne peux pas faire ça Yliria, il est temps de grandir, d’agir de manière plus réfléchie, d’arrêter d’espérer que ça ira et réussir à survivre de justesse à chaque fois. Parce que viendra un jour où ça ne fonctionnera pas, mais ce jour-là, je ne serai pas là pour le voir. Alors je te laisse le temps de te reposer et à Tanaëth de, j’espère, te remettre les idées en place quand il descendra te voir, peut-être que lui tu l’écouteras. Ensuite, on parlera toutes les deux de nouveau et j’espère que tu prendras conscience de tes conneries. Et si après ça, tu recommences…

Elle prit une pause, me laissant pleinement prendre l’ampleur de ce qu’elle disait avant de disparaître, me laissant piteuse et tremblante dans le lit. Après quelques minutes, j’entendis la porte s’ouvrir et tournai les yeux vers Tanaëth qui entrait. Je soupirai tandis qu’il approchait. Je n’avais pas spécialement envie de parler après la tempête d’Alyah.

- Vous semblez aller plutôt bien…


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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Tanaëth Ithil » lun. 19 août 2019 21:08

Je n'ai que le temps de me jeter sur le côté avant que l'obus flamboyant projeté par Yliria n'atteigne la créature qui...l'avale? Pendant une fraction de seconde qui me paraît durer des heures, rien ne se passe, à tel point que je me demande si je n'ai pas rêvé. Puis, soudain, le ventre du monstre gonfle affreusement avant que deux flammes ne jaillissent des plaies béantes que je lui ai infligées lorsque je me trouvais sous lui. Un infinitésimal instant encore, puis l'abdomen de l'horreur explose littéralement, répandant partout d'immondes fragments de chairs et de boyaux fumants! Le monstre pousse un cri terrible et s'affaisse lourdement sur le pont qui cède en partie sous son poids mais, loin de pavoiser, je frémis en réalisant qu'il bouge encore...

(Sithi miséricordieuse... il faut quoi pour buter ce truc?!)

Entre fracas de bois brisé, cris terrorisés de marins et râles du monstre, j'entends vaguement Yliria qui m'appelle et l'aperçois avec angoisse chuter alors qu'elle se précipite vers moi. Ne voit-elle donc pas que l'abject crustacé est encore vivant, enfin, si tant est qu'il l'ait jamais été? La jeune femme parvient à se relever mais, au lieu de reculer comme le voudrait le plus élémentaire bon sens, elle reprend son chemin dans ma direction, se mettant ainsi à la portée des effrayantes mâchoires de la putride horreur! Quoique aveugle, celle-ci doit sentir la présence de la semi-Shaakte car elle est agitée d'un spasme qui la propulse vers sa proie, laquelle parvient fort heureusement à l'éviter en plongeant à terre, mais ce n'est que pour mieux se mettre à portée des pattes encore intactes de l'ignoble. Et cette fois ce qui devait arriver advient, l'une des dangereuses piques de chitine transperce la jambe de ma trop téméraire amie et commence à l'attirer vers la gueule ignoble qui a déjà avalé tant de marins...

Après un atroce juron, je me rue en hurlant sur l'immonde afin de détourner son attention mais, au fond de moi, je sais qu'il est trop tard, les quelques mètres qui me séparent de la créature pourraient aussi bien être des kilomètres pour ce que cela changerait. Alors que je lève mes lames pour asséner le coup le plus brutal qui soit en mon pouvoir, une violente explosion de lumière me prend totalement par surprise, m'aveuglant totalement et me renvoyant brutalement en arrière! Je ne sais trop ce que je percute cette fois, mais cela cède sous moi et je me sens tomber d'un mètre ou deux avant de m'écraser sur un sol quelconque.

(Ouch! Merde! Ça commence à bien faire par Sithi! Mais que... ooohhh putain, on chavire!)

Je sens en effet le navire pencher inexorablement sous moi, mais que pourrais-je faire alors que je n'y vois quasiment rien? Malgré tout, je me dépêtre rageusement de ce qui m'encombre, principalement des morceaux de bois brisés me semble-t-il au toucher, puis m'efforce de remonter à tâtons sur le pont. J'y parviens quelques instants plus tard grâce aux indications anxieuses de ma Faëra et, alors que ma vision retrouve lentement son acuité habituelle, découvre la source du problème : la créature, bien que paraissant morte cette fois, est en train de glisser en arrière, mais quelques unes de ses pattes plantées dans le navire l'empêchent de retomber à l'eau, ce qui entraîne le navire avec elle! Avisant quelques matelots tétanisés, je leur hurle férocement:

"Les pattes! Coupez ses pattes! Ho! Remuez-vous bande d'abrutis!"

Ce n'est que lorsqu'ils me voient en train de frapper comme un bûcheron l'un des appendices que certains se décident enfin à me rejoindre. D'interminables secondes s'écoulent, anxiogènes au possible car chacune nous rapproche du naufrage mais, in extremis, le dernier membre de l'abjecte "Peste-Mer" cède sous nos coups acharnés! Le gigantesque cadavre s'enfonce enfin dans les profondeurs, mais le vaisseau se redresse alors si brutalement que je manque de peu passer une fois de plus par dessus bord, une chute mortelle que m'évite fort heureusement un bout de rambarde encore intact qui craque dangereusement sous mon poids. Le coeur battant à tout rompre, je m'ébroue pour retrouver un brin de lucidité et examiner la situation : deux mâts ont été brisés dans l'aventure, le pont semble avoir subi un ouragan d'une puissance démentielle, encombré de débris et percé de nombreux trous ; à en juger par la ligne de flottaison largement plus basse qu'elle ne l'était avant le combat, nous prenons salement l'eau ; il ne reste plus qu'une petite vingtaine de marins pour ce que je peux en voir, certains gravement blessés, d'autres littéralement statufiés par la terreur qui s'est emparée d'eux. Le navire que nous sommes venus secourir est sur le point de sombrer définitivement et au moins une quinzaine de matelots tentent désespérément de surnager dans le chaos ensanglanté de poutres, caisses et autres débris qui flottent un peu partout. Attrapant le marin le plus proche de moi par le bras, je le secoue rudement pour qu'il reprenne ses esprits et lui demande:

"Où est le capitaine?"

"Je...je sais pas... mort...sûrement..." bégaie-t-il en me dévisageant comme s'il ne comprenait pas ce qui lui arrive.

"Hey! Regarde-moi! C'est fini, tu m'entends? Reprends-toi matelot! Trouve-moi le capitaine et fissa!"

Absolument pas convaincu que le malheureux me soit d'une quelconque utilité, je hurle ainsi que j'ai appris à le faire durant ma formation d'officier, à savoir comme un sergent hargneux et autoritaire, espérant par là que quelques marins sortiront assez de leur torpeur pour réagir:

"Remuez-vous bande de pucelles anémiques! Colmatez les brèches! Les chaloupes à la mer, on a des hommes à l'eau! Allez par les enfers, plus vite que ça ramassis de moules!"

Quelques Sindeldi semblent réaliser l'urgence de notre situation et, quoique dans un désordre digne d'une bande de trolls écervelés, entreprennent d'obéir à mes ordres. Mon soulagement est cependant de courte durée car Sindalywë intervient subitement d'un ton pressant:

(Tanaëth! Occupe-toi d'Yliria! Elle est en train de mourir!)

(Quoi?! Bon sang! Elle est où?!)

(A gauche! Derrière la pile de cordages!)

Je me précipite dans la direction indiquée et découvre alors avec horreur la jeune femme en train de se vider de son sang par plusieurs plaies de gravités diverses. A en juger par l'état des plus sévères elle semble avoir tenté de les soigner au moyen de sa magie, certaines sont étrangement à moitié refermées, mais je réalise vite que cela n'a pas été suffisant. Je m'empresse de saisir ma gourde magique et, glissant délicatement une main sous sa tête pour la relever, lui fais boire une énorme potion de soin en tentant de la faire revenir à elle :

"Yliria! Reste avec moi! Tu m'entends?! Tu ne crois quand même pas que je vais te laisser mourir, non? Ho! Yliria!"

Mes injonctions pressantes n'ont malheureusement aucun effet, mais la potion fait son oeuvre et la blessure la plus dangereuse cesse peu à peu de saigner, ce qui n'atténue pas vraiment mon inquiétude car elle est si pâle que je redoute fort d'être arrivé trop tard. Mais comme elle respire encore et que renoncer n'est pas précisément dans mes habitudes, je découpe rapidement quelques lanières de tissu dans un morceau de voile déchirée qui traîne et bande sommairement ses plaies. Il lui faudra des soins autrement plus conséquents dans les plus brefs délais, évidemment, mais rien ne la sauvera si notre navire coule et c'est à éviter ça que je m'emploie dès les grossiers pansements achevés.

Les heures qui suivent sont aussi exténuantes qu'angoissantes. Le capitaine ayant disparu corps et biens, j'endosse tant bien que mal son rôle en attendant que le second, largement plus à même que moi de diriger un navire, se remette de ses blessures. Fort heureusement les matelots survivants ne sont pas avares de conseils et, grâce à leur aide, je suis en mesure d'identifier les tâches les plus urgentes et de donner les consignes adéquates. Nous luttons ainsi de toutes nos forces défaillantes pour colmater les trous que le monstre a percé dans notre coque, craignant à chaque instant que la structure malmenée ne cède soudainement. D'autres marins font de leur mieux pour sauver ceux qui sont passés à l'eau, d'autres encore s'assurent que notre bâtiment ne heurte pas l'un des nombreux récifs qui parsèment la zone. J'ignore combien de temps passe au juste avant qu'il ne me soit possible d'emmener Yliria dans une cabine plus ou moins intacte pour m'occuper plus sérieusement d'elle, mais quand cet instant arrive seul mon entêtement me permet encore de rester debout. Quoique tremblant d'épuisement, je refuse opiniâtrement de voir mourir celle qui m'a sauvé d'une mort certaine et m'acharne sans répit jusqu'à ce que toutes ses plaies soient soigneusement désinfectées et pansées. Ce n'est qu'après l'avoir bordée comme je le ferais s'il s'agissait de ma propre fille que je me résigne à m'effondrer à mon tour, à même le sol dans un coin de la petite pièce.

Lorsque j'émerge, je ne sais trop combien d'heures plus tard, la première chose qui me frappe est l'ignoble puanteur qui emplit les lieux. Manquant de peu en rajouter une couche en vomissant, je titube aussi vite que possible jusqu'au pont supérieur et remplit avec délices mes poumons d'air frais. Ce n'est qu'alors que je remarque avec répugnance que je suis encore couvert d'ignobles résidus et du sang immonde de la créature que nous avons abattue... Ecoeuré, je m'attelle alors à nettoyer méthodiquement mon équipement avant de me décrasser, usant d'une quantité tout à fait déraisonnable de savon avant de parvenir à me débarrasser de l'infect fumet généreusement offert par l'ignoble crevette. Ceci fait je peux enfin manger un petit quelque chose puis, estimant qu'Yliria dort depuis assez longtemps, décide de lui apporter une portion du modeste ragoût qu'a réussi à concocter notre cuistot avec les provisions ayant réchappé au carnage. Lorsque j'entre dans la cabine, la jeune femme est réveillée mais soupire en m'apercevant, comme si ma présence l'ennuyait, avant de remarquer que je semble aller plutôt bien. Je souris légèrement en lui tendant le bol de ragoût:

"Toi aussi tu as l'air en pleine forme, j'en suis heureux. Je ne voulais pas te déranger mais... j'ai pensé que tu aurais faim..."

Après une seconde de silence, j'ajoute en la fixant au fond des yeux avec sérieux:

"Je te dois la vie. Tu as été rudement téméraire, mais je serais malvenu de te le reprocher. Aussi, outre un immense merci, te dirai-je simplement ceci: si tu as besoin d'un ami, d'un frère, dans un jour ou dans mille ans, pour quelque raison que ce soit, je répondrai toujours présent à ton appel."

Laissant un franc sourire éclairer mon visage, j'achève :

"Mange maintenant, il faut que tu reprennes des forces. Nous devrions arriver demain soir à destination. Allez, je te fiche la paix, à plus tard."

Ayant dit, je quitte la cabine et referme doucement la porte avant de remonter sur le pont pour participer aux travaux qui se poursuivent afin de remettre le navire en état.

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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yliria » mar. 20 août 2019 21:38

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Tanaëth s’approcha de moi en répondant à mes paroles de la même manière. J’étais vivante, donc oui, je devais aller bien si on comparait à mon état sur le pont avant que je ne perde connaissance. Il me tendit un bol fumant, contenant ce que j’identifiai comme un genre de ragoût. Je le remerciai et le posai sur la table de chevet, me redressant légèrement histoire de ne pas me tordre le cou en lui parlant. Ses iris captèrent les miennes et il prit un air sérieux qui me fit presque déglutir. Nous y étions.

- Je te dois la vie. Tu as été rudement téméraire, mais je serais malvenu de te le reprocher. Aussi, outre un immense merci, te dirai-je simplement ceci: si tu as besoin d'un ami, d'un frère, dans un jour ou dans mille ans, pour quelque raison que ce soit, je répondrai toujours présent à ton appel.

Je restai là sans rien dire, trop éberluée pour parler et, lorsqu’il quitta la pièce en m’informant que nous arriverions le lendemain, je restai muette, le regardant seulement s’éloigner et refermer la porte derrière lui après avoir terminé par quelques mots qui me firent me dire que je l’avais plutôt mal accueilli sans vraiment le vouloir. J’eus envie de le suivre pour lui dire le contraire mais Alyah toussota dans mon esprit et me pria d’attendre, de manger, de prendre un peu de repos avant de discuter de nouveau. Soupirant, je m’exécutai néanmoins, avalant le ragoût sans trop y penser, remarquant la douleur quand je bougeais mon épaule, reste du bout de pont qui s’était planté dans mon épaule pendant le combat. Lorsque je reposai le bol et m’enfonçai dans les couvertures, Alyah apparut de nouveau, bras croisé, son index tapota son bras opposé avec sur le visage un air sévère.

- Je suis désolée Alyah… tu sais que je le pense vraiment.

Elle ne répondit pas, se contentant de me fixer.

- Très bien, j’ai compris, je ne recommencerai plus d’accord ?

Elle resta silencieuse, le tapotement de son doigt s’accélérant, me sortant de mes gonds.

- Bon sang mais tu veux quoi ?! Que je laisse mourir les gens sous mes yeux alors que je peux les sauver ? Tu sais très bien que je ne peux pas faire ça ! Si je peux les aider, je le ferai tu entends ? Que ça te plaise ou non ! Il n’est pas question que je reste les bras croisés à regarder quelqu’un mourir…

- Je sais, ce n’est pas ce que je te demande.

- Que… Quoi ? Mais tu as dit…

- J’ai dit, grosse tête de mule que tu es, que tu devais grandir, que tu devais réfléchir à ce que tu faisais et ne pas foncer tête baissée. Si tu as la possibilité de sauver quelqu’un, fais-le, mais fais-le en réfléchissant, en anticipant ce qui pourrait arriver, en prévoyant les dangers potentiels autour de toi. Ne fonce pas tête baissée comme un taureau fou. Ré-flé-chis ! Et je n’aurai rien à redire… enfin presque, mais ça c’est parce que c’est mon rôle. Tu comprends ?

- Je crois…

- Je ne veux simplement pas que tu prennes des risques inconsidérés. Je sais bien que parfois tu n’as pas beaucoup de temps, que parfois tu es dos au mur, mais là Yliria, ce n’était pas le cas, tu n’as aucune excuse pour ne pas avoir pris le temps de penser à une stratégie au lieu de jouer la pyromancienne explosive et en fonçant bien trop témérairement au cœur d’un combat qui te dépassais. Tu as failli mourir Yliria, plusieurs fois. Ne refais jamais ça…

Je restai silencieuse, mais acquiesçai en comprenant où elle voulait en venir. Cela sembla lui suffire car je perçus une petite vague de réconfort de sa part avant qu’elle ne pointe ma cuisse du doigt.

- Tanaëth a fait du mieux qu’il pouvait, mais rien ne remplace un peu de magie, guéris moi ça et après tu pourras sortir. Enfin si tu tiens debout… Et te laver serait bien aussi, tu pues.

- Merci Alyah…

Son ricanement me tira un léger sourire et j’entrepris de retirer doucement le bandage, hoquetant face à la plaie et détournant le regard. Pas étonnant que la bouger me fasse un mal de chien. Je me focalisai sur le soin et ignorai de mon mieux le visuel et la douleur, illuminant mes mains avant que la magie ne se diffuse autour de la blessure, refermant lentement cette dernière. Lorsque le sort prit fin, elle n’avait pas disparu, mais ne semblait plus aussi grave et je remis le bandage tel qu’il était avant de poser délicatement mes jambes sur le sol en tentant de me lever. Un franc succès, pendant quelques secondes, puis la douleur de ma jambe fut trop intense pour me tenir dessus et je m’appuyai sur la paroi de la chambre pour ne pas tomber. Alyah me conseilla de ne pas forcer et d’y aller doucement, ce que je fis, sortant de la chambre en clopinant, grimpant l’escalier de la même manière en pestant contre la bestiole. Une fois à l’air libre, je goûtai quelques secondes au vent marin, manquant de tomber en cessant de me tenir pour ménager ma jambe.

L’activité sur le pont était intense. Les marins allaient et venaient et je vis quelques regards surpris se poser dans ma direction. Je remarquai qu’ils ne portaient pas les mêmes habits que les autres. Probablement des rescapés de l’autre bateau que l’immonde bête avait envoyé par le fond. Fouillant le pont du regard, j’aperçus Tanaëth qui semblait discuter avec un autre Sindel qui donnait des ordres en même temps aux marins autour de lui. Avec dans l’idée de le rejoindre pour m’excuser de l’accueil que je lui avais réservé un peu plus tôt et le remerciai pour les soins, je tentai de marcher sur le pont, manquant de m’étaler après trois petits pas ridicules, jurant à voix basse avant qu’une voix caverneuse dans mon dos ne me fasse sursauter.

- De bien vilains mots dans la bouche d'une jeune fille.

En me retournant, je fis face au visage buriné d’un marin qui me regardait d’un drôle d’air que je n’arrivai pas à identifier. Il leva les yeux vers Tanaëth, les baissa de nouveau et sourit.

- Besoin d’aide ?

- Non, merci… Je peux me débrouiller. Merci quand même.

Il avait l’air occupé et je pouvais bien franchir quelques mètres toute seule, même avec une jambe douloureuse. Je fis demi-tour en me demandant comment rejoindre Tanaëth, évaluant mes chances d’y aller à cloche-pied et ne voulant pas le déranger en pleine conversation. Je sentis soudainement deux bras me saisir et me soulever tandis que je poussais un cri de surprise. Un bras placé dans mon dos et un autre sous mes genoux, le marin m’amena à Tanaëth comme si je ne pesais rien, me déposant doucement sur le pont avant de saluer militairement les deux autres Sindeldi visiblement amusés par la situation tandis que j’étais morte de honte, évitant spécifiquement le regard de Tanaëth, toussotant pour essayer de faire oublier ce léger moment gênant. Je tournai un regard furibond vers le marin qui ne fit que sourire davantage avant de faire demi-tour. Je pus voir quelques marins tapoter le dos de leur camarade en me lançant de grands sourires, me faisant hausser les sourcils. Je ne comprenais rien à ce qu’il se passait.

- C’est… une coutume Sindel ? Bref, je voulais pas vous déranger…

Le deuxième Sindel affirma qu’ils avaient terminé et s’éclipsa, me laissant seule avec Tanaëth.

- Je… euh… Je voulais m’excuser pour mon comportement tout à l’heure, c’était pas contre vous, je suis désolée. Et pour ce que vous avez dit à ce moment-là… vous ne me devez rien, je n’ai fait que respecter une promesse, rien de plus. Et vous m’avez soigné, sans vous je… enfin, merci, je ne l’oublierai pas non plus.

Peut-être que m’incliner en remerciement était un peu trop, mais ça me semblait approprié sur le moment. Après avoir relevé la tête, Alyah me taquina sur un sujet qui me fit grimacer et, toussotant, je demandai d’une petite voix à Tanaëth.

- Et … y’aurait un endroit où je pourrais me laver… seule ?

Si c’était possible, j’allais en profiter pour détaler du pont, enfin aussi vite que je le pouvais, voyant approcher le même marin avec le même sourire aux lèvres… Oh par Meno…

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Yliria
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yliria » sam. 7 sept. 2019 03:39

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Retour à Nessima


Une rune d’esquive… je regardai attentivement la petite pierre, commençant à envisager sérieusement de m’en servir pour m’aider dans mes combats au quotidien. Il y avait bien quelque chose que je pouvais faire avec toutes ces runes non ? Je sortis la besace et en vidai discrètement le contenu devant moi, examinant les petites pierres une à une. Celles liées à la magie ou aux éléments je les rangeai aussitôt, ne gardant que celle qui pouvait être utile en combat au corps à corps. Sans m’en apercevoir vraiment, je misais beaucoup sur cet aspect et il fallait que je le renforce. La magie viendrait après, parce que j’y étais habituée depuis plus longtemps, la maîtrise serait plus aisée…. Du moins je l’espérais. Les runes particulière comme « Taureau » ou « Livre », je les rangeai également et essayai de trouver quoi faire avec celles restantes.

(« Défendre », « Esquive », « Jet », « Diminuer », « Initiative » et « Maîtrise »… On peut les combiner c’est ça ?)

(Il me semble oui, comme des phrases. Les effets par contre, je ne suis pas certaines qu’on puisse les contrôler.)

Cela me laissa dubitative et je restai plantée un moment devant les pierres en essayant de trouver une idée de phrase et quelque chose sur quoi les équiper. Arme ? Armure ? Bouclier ? Mon serre-tête ? Le pendentif de l’Opale ?

(Attends d’être à la forge pour te renseigner peut-être ?)

J’acquiesçai au conseil d’Alyah. Je n’étais de toute façon même pas certaine que les utiliser maintenant soit une bonne chose. Je les rangeai donc sans avoir vraiment trouvé d’idée pertinente, à mon plus grand dam.

Calme, repos et soleil furent les ingrédients principaux de ce voyage de retour malgré une raison quelque peu angoissante, autant pour Tanaëth que pour moi. J’essayai tant bien que mal de me réjouir de rentrer aussi vite, mais l’ombre d’une machination planait tout de même sur le retour et je ne dérangeai que très peu Tanaëth pendant le trajet, le sollicitant uniquement pour savoir s’il avait besoin d’aide pour quoi que ce soit. Il me répondit toujours par le négatif, mais avec un sourire montrant qu’il avait compris ce que j’essayai de faire avec la subtilité qui était la mienne. Ce voyage écourté m’avait permis d’en savoir un peu sur lui, de voir au-delà de la fascination que Nyllyn avait pour lui et de l’apprécier pour ce qu’il était. Un ami, un frère d’arme sur qui je savais que je pourrai compter, au besoin. Rejoindre l’Ordre avait probablement été l’une des décisions les plus irréfléchies que j’avais prises, et pas un instant je ne le regrettai maintenant. Je serrai brièvement le bras de Tanaëth en lui renvoyant un sourire.

- SI jamais vous avez besoin de moi, peu importe quand, n’hésitez pas.

Au moins il le savait maintenant.

***

Les quelques jours suivants filèrent à une vitesse folle et nous fûmes bientôt la veille de notre arrivée à Nessima et, assise dans ce qui me servait de cabine, je cherchai toujours quoi faire de cette fichue pince de crevette géante. J’avsi beau la tourner dans tous les sens, pour moi, c’était juste un encombrement supplémentaire qui n’allait ne m’être d’aucune utilité. Mais Alyah ne partageai visiblement pas cette avis.

(Regarde à quel point c’est solide cette carapace ! Tu pourrais en faire une armure !)

(T’imagines le poids ? SI c’est pour m‘enfoncer dans le sol, non merci.)

(Un marteau alors ? Oh, une grosse masse !)

Je me contentai de soupirer. Une masse… et depuis quand je savais me servir de ce genre d’armes moi ? an décidément, ce « cadeau » m’ennuyait.

(Un bouclier ! Fais toi un bouclier avec !)

(J’en ai déjà un.)

(Mouais… il est un peu vieillot, pas franchement adapté à ton bras et couvert de bosses. Sans vouloir te vexer Yliria, il est un peu nul. Alors qu’avec ça tu peux t’en faire faire un sur mesure !)

Je jetai un œil à mon bouclier qui était effectivement un peu cabossé et je savais qu’il n’était pas vraiment adapté à ma morphologie, il y avait un déséquilibre assez facile à identifier dès que je le portais. Je m’étais efforcée de le contrebalancer au mieux, mais Alyah n’avait pas tort, du sur-mesure, ce serait la panacée. Mais en voyant la tête de la carapace, je ne pus m’empêcher de douter. Qui aurait envie de se balader avec ça sur le bras ? J’entendis Alyah soupirer.

(Non, bien sûr que non, tu vas le faire sur-mesure, donc tu peux demander à ce qu’on te le fasse d’une certaine forme, taille et qu’on le décore.)

(Pourquoi pas oui… je mets quoi ? Le symbole de l’Ordre ?)

(Quelle bonne idée !! Comme ça si tu sors une oreille tu as immédiatement tout le clergé de Sithi sur le dos. Trouve quelque chose de plus personnel.)

(Mais.. je ne sais pas moi ! Je suis censée mettre quoi sur un bouclier ?)

(Ce que tu veux ! Quelque chose qui te différencie, quelque chose que tes amis ou tes ennemis reconnaitront. Par exemple…un symbole lié à tes magies par exemple.)

(Feu et lumière ? Je ne sais pas …)

(Moi je sais. Qu’est-ce que craignent tes ennemis au quotidien ?)

(Mes ennemis ? mais je n’ai pas… oh… je vois. Il réchauffe et éclaire, feu et lumière… C’est pas mal.)

Je sentis plus que je ne vis le sourire d’Alyah avant qu’elle ne continue pour trouver un modèle à proposer, faisant ainsi passer une bonne partie de la soirée jusqu’à ce que je m’endorme, avec enfin une idée pour cette pince.

***

Nessima fut enfin en vue lors de la matinée du lendemain. Sachant pertinemment que la ville n’avait pas changé en à peine un mois, je me résignai à remettre mon masque et à cacher autant que possible le fait que j’étais une semi-shaakte. Assez d’ennuis, je voulais simplement retourner à la commanderie, retrouver Nyllyn et profiter de quelques jours de calme avant de songer à autre chose. Je me lavai rapidement avant de rejoindre Tanaëth sur le pont. Je le vis m’indiquer le quai et aperçu Lyann, bras croisés, qui attendait que nous accostions. A peine le navire arrêté et la passerelle posée, elle grimpa à bord et donna une lettre apparemment urgente à Tanaëth avant de se tourner vers moi.

- Désolée Yliria, je sais que tu viens juste d’arriver, mais j’ai une tâche à te confier et elle ne souffre que peu de délai.

Elle m’expliqua rapidement que Sylënn, l’épouse de Tanaëth, avait convié des aventuriers de tous les coins de Yuimen à se rendre à la garde militaire de la ville et que l’Ordre était persuadé que certains de ces membres y seraient, incognito. Lyann voulait que je les identifie et que je leur indique l’emplacement de la commanderie afin qu’ils reçoivent toute l’aide possible.

- Et, j’aimerais également que tu participes à la mission, quelle qu’elle soit.

- Quoi ? Participer à une mission officielle SIndel ? Moi ? Mais je… je suis tellement mal vue ici…

- Je sais Yliria, justement. Si les frontières s’ouvrent pour des étrangers, il y a une chance que cela continue. Et si tu aides notre peuple, je suis sûre que tu ne seras plus obligée de porter ce masque constamment dès que tu mets le nez dehors. Qu’en penses-tu ?

Elle en avait de belle… Evidemment que j’aimerais me balader en ville seule sans craindre pour ma vie, mais est-ce que j’étais capable de participer à ce genre de chose ? J’en doutais un peu, je n’avais jamais fait ça, je ne travaillais jamais vraiment en groupe, tout au plus en duo, mais le plus rarement seule, de manière forcée ou non. Alyah me poussa à accepter.

(Tu as le choix, mais pour moi, tu devrais accepter. Je suis sûre que ça te sera bénéfique. Et qui sait, tu pourrais apprendre beaucoup de chose, sur les autres, sur les Sindeldi et sur toi-même aussi. En plus…)

(J’ai compris Alyah, tu veux que je participe. Très bien… je n’ai pas vraiment de raison de refuser en plus. Sylënn n’est pas du genre à essayer de nuire à qui que ce soit d’une manière aussi détournée et si Lyann pense que c’est une bonne idée.)

- D’accord, j’accepte. Je dois y aller…

- Aussi vite que possible.

- C’est que… j’avais une petite chose à faire.

Je désignai du doigt la grosse pince de couleur sombre qui trônait non loin, attirant le regard de Lyann qui écarquilla les yeux.

- Mais, par Sithi, qu’est-ce que c’est que ça ?


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Tanaëth Ithil
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Tanaëth Ithil » jeu. 12 sept. 2019 16:42

C'est avec des sentiments mitigés que je contemple la côte qui s'éloigne alors que le Danse-Lame nous emporte au nord. J'aurais aimé passer plus de temps en compagnie des Eruïons et, en particulier, de Sëraya ; aimé en apprendre davantage sur leurs coutumes, leur manière de vivre. Bien sûr l'existence est rude dans le désert mais, quelque part, ils entretiennent avec leur environnement un lien étroit et essentiel - du moins à mes yeux - que nous, Sindeldi, n'avons que trop oublié. Un mode de vie qui n'est pas sans me rappeler les décennies que j'ai passées à errer sur les différents continents avant de découvrir les Danseurs d'Opale. Tout était si simple alors. Oh, j'ai bien conscience d'idéaliser un peu les choses, j'ai connu la faim et la soif, enveloppé en tout et pour tout d'une mauvaise couverture j'ai grelotté de froid plus souvent qu'à mon tour. Ne possédant alors qu'une mauvaise épée j'ai souvent dû défendre ma vie contre brigands et créatures hostiles, mais je n'avais de responsabilités qu'envers moi-même. Aurais-je accepté de reprendre les rênes de l'Ordre, de devenir le Héraut de Sithi, si j'avais su ce que cela impliquerait réellement? Un léger sourire flotte sur mes lèvres alors que la réponse jaillit instinctivement en mon esprit, claire et pure comme de l'eau de source : oui, bien sûr que oui.

Quoi qu'il en soit, c'est une aventure qui s'achève avec ce départ, une de plus. Je pourrais essayer d'entrevoir le futur, découvrir peut-être ce qui m'attend, mais à quoi bon? Quel intérêt aurait encore la vie si l'on savait d'avance ce qui va arriver? Et puis, quasiment aucune de mes visions de l'avenir ne s'est révélée exacte, sans doute parce que, connaissant un futur, j'ai agi différemment de ce que j'aurais fait sans ce savoir et ai ainsi emprunté une autre voie.

Consciente sans doute de mes doutes existentiels, Yliria me demande à plusieurs reprises si elle peut faire quelque chose pour moi ; mais, toujours, je lui réponds par la négative avec un tranquille sourire. Je ne peux partager le fardeau que m'a confié Sithi, il m'appartient de le porter, de l'assumer. Peut-être y a-t-il une part d'orgueil dans cette manière de penser, mais comment expliquer la force du serment qui m'unit à notre Créatrice à quelqu'un qui ne l'a pas rencontrée, qui n'a pas connaissance du passé de mon peuple? Je peux raconter notre histoire, bien évidemment, mais ce ne serait jamais que des mots. A contrario j'ai vu - vécu en quelque sorte - la fin d'Eden, la rencontre entre mon aïeul et notre Mère, le combat qui a engendré la naissance de l'Opale. Comment expliquer ce sentiment paradoxal d'être un jeune Elfe âgé d'à peine plus d'un siècle et, dans le même temps, d'avoir vécu plus longtemps qu'aucun Sindel vivant en ce monde? Je n'ai pas réellement vécu sur Eden, naturellement, mais les souvenirs transmis par ma Faëra sont si parfaitement gravés en moi que, parfois, la distinction m'échappe.

Après plusieurs jours de navigation tranquille, qui nous laissent accessoirement le loisir de récupérer de nos blessures, nous arrivons enfin en vue de la puissante Nessima, véritablement impressionnante sur son titanesque promontoire rocheux lorsqu'on la découvre depuis la mer. Malgré les dérives de mon peuple, je ne peux m'empêcher de ressentir une certaine fierté en la voyant ainsi : l'armée qui la prendra n'est pas encore née...

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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Gamemaster7 » sam. 21 sept. 2019 12:44

Émergence : màj pour Yurlungur et Jorus


Le capitaine du Danse-Lame acquiesça simplement lorsque Yurlungur lui annonça que d'autres aventuriers la rejoindraient peut-être, précisant tout de même :

"La marée monte dans une heure. Nous partirons à ce moment, sans quoi il vous faudra attendre demain matin."

Jorus arriva sur ces entrefaites et, moyennant présentation du laisser-passer fourni par Sylënn'tar Ithil, put grimper à bord sans difficulté. Un peu moins d'une heure plus tard, les amarres furent larguées sur un ordre du Capitaine et le vaisseau s'éloigna lentement du quai. Des gardes censés rapporter de la nourriture à Jorus, en revanche, nulle trace. Le jeune homme avait-il vraiment cru que des Sindeldi allaient lui servir de garçons de courses? Sans doute lui restait-il encore quelques petites choses à apprendre sur ce peuple fier et hautain. Il ne lui resterait plus, pour le temps de la traversée, qu'à jeûner, ou à mendier sa pitance auprès de Yurlungur ou des marins.

Bientôt, alors que le soleil sombrait derrière l'horizon, le navire cingla vers le nord, toutes voiles dehors, sur une mer calme teintée de magnifiques couleurs orangées. La nuit s'écoula tranquillement, puis la journée du lendemain. Au soir de celle-ci pourtant, les aventuriers purent voir qu'au loin, au dessus des puissantes Montagnes Grises, de sombres nuées s'accumulaient, observées par un capitaine au visage trahissant une certaine inquiétude. Au cours de l'heure suivante, les masses nuageuses dévalèrent les flancs des montagnes, engloutirent la plaine tourmentée de Nisiorë et se répandirent sur l'océan, semblables à une chape de plomb.

Le capitaine fit réduire massivement la voilure, juste à temps car, avec la soudaineté et la violence propres aux tempêtes tropicales, le grain s'abattit subitement sur le navire et ses occupants. Un vent tempétueux se mit à souffler, suivi presque aussitôt par une pluie cinglante qui réduisit la vue à quelques dizaines de mètres. La mer, de plus en plus démontée, ne tarda pas à malmener durement le navire, projetant sur le pont de dangereuses masses d'eau salée chaque fois que le vaisseau négociait une nouvelle vague. Le Capitaine, poing levé vers les cieux, hurla une imprécation qu'un matelot proche de Yurlungur et Jorus leur traduisit obligeamment par un énigmatique : "Salauds de mages".

Durant un moment, le fier vaisseau affronta victorieusement les éléments déchaînés puis, soudain, l'un des cordages maintenant la dernière voile hissée céda brutalement. Avec une violence inouïe, il se détendit comme un fouet et balaya le pont, projetant un marin ensanglanté à la mer. La voile, désormais imparfaitement maintenue, claqua au vent, menaçant de se déchirer et, surtout, faisant dangereusement pencher le navire sur le côté. Pire, cette soudaine et importante gîte eut aussi pour effet de déstabiliser la cargaison, ou une partie en tout cas, car un choc sourd et puissant provenant des cales ébranla soudain de manière inquiétante la structure du vaisseau. Comme si cela ne suffisait pas, un paquet d'eau de mer s'abattit sur le pont à cet instant, entraînant trois marins hurlants par-dessus bord.

Dans une atmosphère qui confinait désormais à la panique, certains Sindeldi se précipitèrent pour tenter de se débarrasser de la voile qui menaçait de faire chavirer le Danse-Lame tandis que d'autres se ruaient vers les cales, sans doute pour essayer d'arrimer la cargaison menaçant d'endommager la coque chaque fois que le navire penchait d'un côté ou d'un autre. D'autres encore foncèrent vers les rames en une tentative désespérée de reprendre le contrôle du bâtiment désemparé, semblable maintenant à un vulgaire fétu de paille dans une tempête pour laquelle il n'était visiblement pas conçu.

Qu'allaient faire Jorus et Yurlungur? Tenter d'aider de leur mieux les marins, du côté de la voile, de la cargaison ou encore des rames? Se réfugier dans les entrailles du vaisseau pour se mettre à l'abri des éléments, dans l'espoir que tout s'arrangerait sans leur appui? S'attacher au mât pour ne pas risquer d'être emportés par les vagues hautes comme trois hommes qui avaient déjà prélevé un lourd tribut sur l'équipage?

*****
Gains et récompenses :

Yurlungur : rp du quotidien : 0,5xp ; Evénement aventureux simple (prise de sang dans les bas-quartiers) : 1xp ; Total : 1,5xp

Jorus : rp du quotidien : 0,5xp ; interactions avec les gardes et sa Faëra : 0,5 xp ; Total : 1xp

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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Gamemaster7 » sam. 21 sept. 2019 13:49

Émergence : màj pour Yliria et Astérie


Le capitaine du Danse-Lame sourit aimablement aux deux jeunes femmes, déclarant à la semi-shaakte sans sembler se soucier de la lettre qu'elle lui tendait :

"Je sais qui tu es, Yliria, comme tous les marins de la région. Montez, vous arrivez juste à temps pour la marée."

Il observa avec curiosité l'humaine et son Silnogure, comme tous les matelots qui se trouvaient sur le pont mais, son devoir l'appelant, il entreprit aussitôt de donner les ordres nécessaires au départ. Une dizaine de minutes plus tard, le navire quitta le quai et, bien vite, prit la direction du sud à bonne allure. La journée s'écoula tranquillement mais, au soir, les deux aventurières purent apercevoir, assez loin au nord, de fort inhabituelles masses de nuages sombres. Si le ciel demeura dégagé au-dessus de leurs têtes et la mer calme dans leurs parages, il n'en allait visiblement pas de même au nord de Nessima. Les aventuriers partis dans cette direction devaient sans nul doute affronter une redoutable tempête.

Le lendemain en fin d'après-midi, alors que le navire longeait les côtes arides du Domaine de Charlùm, les jeunes femmes entendirent un sourd et puissant grondement, suivi du fracas assourdi d'une puissante explosion. Quelques minutes plus tard, un gigantesque panache de fumée s'élevait au-dessus de l'Akuynra, signe d'une éruption massive. Les éléments capricieux se liguaient-ils contre le Royaume de Sarindel? On aurait presque pu le croire.

Au soir, le panache recouvrit le Danse-Lame et il se mit à pleuvoir des cendres qui, bien vite, recouvrirent tout d'un dais grisâtre, s'insinuant partout et rendant la respiration difficile. Quelques instants encore et ce furent des petites pierres étonnamment légères qui tombèrent des cieux assombris, engendrant un vacarme de fin du monde en frappant le pont. Quelques minutes de plus, et ce furent des braises incandescentes qui s'abattirent sur le vaisseau, déclenchant ici et là de dangereux incendies et embrasant les voiles. La chaîne du Dragon portait visiblement bien son nom…

Immédiatement les marins réagirent pour tenter d'étouffer les multiples foyers naissants, au péril de leur vie car la pluie de braises ne semblait pas vouloir cesser de sitôt. Qu'allaient faire les deux aventurières? Se mettre prudemment à l'abri en attendant que la drache mortelle cesse? Aider les marins à contrer le feu? Le choix leur appartenait...


*****
Gains et récompenses :

Yliria : interactions avec Astérie : 0,5xp ; interaction avec Tanaëth : 0,5xp ; interaction avec Llyann : 0,5xp ; interactions avec Nyllyn (y compris entraînement) : 0,5xp ; rp du quotidien : 0,5xp ; Total : 2,5xp

Astérie : interactions avec Yliria : 0,5xp ; apprentissage CC (2 x 0,5xp) : 1xp ; interaction avec Llyann : 0,5xp ; rp du quotidien : 0,5xp ; Total : 2,5xp

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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yurlungur » dim. 22 sept. 2019 11:25

...

La jeune fille observait la mer, les vagues et l'écume majestueuse qui était soufflée sur les crêtes ; elle contemplait, du bastingage, la coque de bois qui tranchait l'eau avec une lourde grâce ; elle sondait les profondeurs de l'océan, comme pour chercher à comprendre, dans ce bleu profond, tous les secrets de l'impitoyable Moura. Elle pouvait passer ainsi une heure à rêver, un sourire aux lèvres, en laissant le sel du vent marin lui vivifier les pores, puis faire quelques pas sur le pont, en s'accommodant du doux roulis que les flots imposait. C'était comme si elle était bercée : pour la première fois, elle prenait la mer et elle profitait. Elle se souvenait à peine de ce voyage de Dahràm à Oranan, qu'elle avait passé enfermée dans la cale du navire qui avait finalement accepté de l'emmener ; cette fois-ci, elle comptait en profiter pleinement.

Comme tous les gosses de Dahràm, elle avait vécu dans l'expectative de prendre la mer un jour. La mer, c'était l'immensité qui s'étalait au-delà du port, c'était l'aventure même, l'infini qui se présentait à soi et la fuite sans retour, l'échappatoire ultime à la misère du Royaume conquis. C'était aussi l'or et la gloire, pour ceux des pirates qui étaient suffisamment féroces ou chanceux.

Mais les fillettes ne sont pas acceptées sur les bateaux, qu'ils soient pirates ou marchands. Elles restent au port, aident éventuellement à réparer les cordages ou les filets de pêche contre un salaire dérisoire, sont moquées quand elles demandent à monter et, pour chasser leur chagrin, rêvent en s'entraînant à faire et défaire des nœuds marins d'être né mâle, eux qui, à dix ans à peine, sont engagés comme matelots sur le premier navire qui accoste. Elle ne voyait pas l'envers du décor, qui est la dure vie du mousse ainsi récupéré, la fatigue, le mépris, les maladies et parfois la famine. Tout cela ne faisait pas partie du rêve. Il n'y avait que l'océan et, entre ses bras massifs, l'espoir, comme une étoile timide qui se reflète sur une mer d'huile.

Arrivée à bord, elle avait certes essayé d'aider les marins dans leurs diverses taches : c'est-à-dire qu'elle les avait observés et avait tenté de les imiter, non sans s'attirer l'ire d'un second qui la fustigea et lui intima de retourner à sa place, puisqu'elle avait failli faire relâcher complètement la grand'voile. Mais peu à peu, au cours de cette première journée, certains matelots qui l'avaient remarquée en train de s'entraîner à nouer des nœuds marins, malgré leur distance naturelle vis-à-vis des êtres non-elfiques, avaient profité de sa présence pour se décharger de certaines de leurs corvées. Les nœuds, en marine, sont un facteur universel : qu'importe qu'on vienne du Naora, de Nirtim ou de Nyr'tel Ermansi, les marins ont ce langage commun qui leur fait repérer aisément leurs pairs.

On lui demandait surtout des tâches ingrates ou fastidieuses, mais elle s'en chargeait avec une gaieté sincère, sans se douter de l'exploitation qui ainsi prenait forme. Elle cherchait naturellement à échapper au regard de ce tyrannique second, mais s'empressait, dès qu'il était affairé ailleurs, à nouer fermement tel cordage, ou à soigneusement ranger tel autre. Il semblait qu'on ne lui laissait que des affaires de cordes. Et puis, lorsqu'elle avait fini, elle s'écartait un peu, et elle épiait. Bientôt le second arrivait, pour vérifier que tout était en ordre et, sans se douter qu'il avait devant lui le travail d'une humaine, examinait prestement les nœuds, avant d'opiner du chef et d'avancer plus loin. C'était un orgueil immense pour l'apprentie matelote.

Le soir tomba vite et le ciel s'orna de pourpre et de mauve tandis que le soleil filait se cacher derrière la terre à l'Ouest, laissant la vaste mer plongée dans les ténèbres qui s'amoncelaient. Elle cherchait déjà à voir des étoiles dans les cieux, les plus brillantes commençant à apparaître : elle voulait déterminer si, ici, le ciel était le même qu'à Dahràm et qu'à Nirtim. C'était en mer qu'on le voyait le mieux, éclatant de toute sa splendeur sépulcrale : il n'y avait rien pour en atténuer la majesté, aucun obstacle pour en amoindrir l'étendue. Mais un des marins qu'elle avait aidés ce jour-ci lui indiqua les Montagnes grises, au-dessus desquelles des nuages s'étaient bien formés et commençaient, déjà, à descendre sur la plaine en contrebas. Ce n'étaient pas de paisibles cumulonimbus qui pouvaient gentiment protéger les marins d'un soleil qui taperait trop fort : ceux-ci étaient gris et sombres, violents, et ils semblaient s'approcher progressivement de leur position. On lui expliqua que le capitaine les avait repérés depuis une demi-heure et que leur trajectoire rencontrerait bientôt la leur : alors la première inquiétude monta dans l'esprit de Yurlungur. Elle ne pourrait pas contempler les étoiles cette nuit.

Cette affaire-là était tout de même fâcheuse. La nuit dernière, elle avait dormi, estimant qu'elle pourrait bien en profiter l'une des nuits suivantes, et puis il fallait se remettre d'un léger décalage horaire, dont elle ignorait à vrai dire l'existence ou la raison d'être, mais qui l'envoyait au lit (ou plutôt au hamac) alors que la nuit tombait à peine. Mais les éléments se liguaient contre elle et, maintenant qu'elle était fraîche et dispose pour une nuit d'observation des cieux, c'était la météo qui lui refusait ce plaisir. Il fallait qu'il y ait un bien méchant farceur là-dessous.

Yurlungur fila dans la cale, à côté de son hamac, chercher la longue-vue qu'elle avait achetée à Kendra Kâr, pour observer plus attentivement cette tempête qui s'avançait. Elle put voir distinctement les formes arrondies et tumultueuses de l'orage qui avançait, la pluie qui formait un rideau trouble en-dessous, la plaine qui peu à peu disparaissait tandis que progressaient les nuées. Lorsqu'il fut devenu clair, même pour elle, qu'ils seraient bientôt en plein dans la tempête, elle retourna prestement ranger sa longue-vue dans son sac, la calant consciencieusement dans la couverture pour éviter qu'un choc ne la fracasse.

Le temps qu'elle remonte, la pluie battait déjà sur le pont et le capitaine jura : un marin poli leur traduisit rapidement l'imprécation. Mais qu'est-ce que des mages venaient faire là-dedans ? Yurlungur observait la tempête et se demandait s'il était possible qu'il existât des sorciers suffisamment doués pour déclencher de telles ouragans : sur Aliaénon, la chose l'aurait moins étonnée, sachant là-bas la magie incontrôlable et outrepassant souvent les intentions de l'arcaniste ; mais sur Yuimen, ceux capables de créer un tel chaos étaient des adversaires pour le moins redoutables.

Alors qu'un vent violent la décoiffait tout à fait – et qu'elle se félicitait de n'avoir pas de cheveux trop longs, contrairement à certains Sindeldi qui s'en trouvaient embêtés en de telles circonstances -, elle nota depuis son point d'observation, à la sortie de la cale, que le capitaine avait judicieusement fait réduire la voilure : ainsi, le navire continuait à avancer, presque sans dommage, si ce n'était un tangage énergique. Il semblait que de telles tempêtes, finalement, étaient contrôlables par un capitaine expérimenté : malgré la peur première qui avait monté en elle, elle osa un sourire de satisfaction à voir ainsi le Danse-Lame progresser en dépit des éléments – lorsqu'un cordage céda et, balayant le pont, envoya brutalement un des marins par-dessus bord. La voile ainsi détachée déstabilisa grandement le navire, tout en menaçant de se déchirer à tout instant ; dans la cale, un choc sonore indiqua qu'une partie de la cargaison s'était détachée et avait été violemment projeté contre la coque. Il fallait espérer que cela n'ouvrirait pas une voie d'eau : mais déjà, sur le point, trois marins imprudents furent envoyés par-dessus bord par une lame d'eau – Yurlungur s'agrippa de toutes ses forces au mât à côté.

La situation était critique et de tous côtés, les marins paniqués fonçaient, vers les rames ou vers la cale, voire vers la voile détachée pour les plus audacieux. Yurlungur sentait qu'elle ne pouvait pas faire un pas sur le pont sans risquer d'être projetée par-dessus bord : sans hésitation, elle redescendit dans la cale, tentant d'avancer vers son hamac. Mais elle se sentait envoyée, tantôt d'un côté, tantôt de l'autre, ou même en avant et en arrière : sa progression était difficile. Le dortoir était situé au centre de la cale, tandis que les marchandises étaient disposées à l'avant comme à l'arrière : elle voyait des Sindeldi, plus loin devant elle, essayer vainement d'accrocher les tonneaux et les caisses libérées, quand soudain l'un d'entre eux fut écrasé entre un mur et un fût par une embardée violente. Il avait disparu derrière la cloison : seul restait un bras gris qui dépassait, et un filet de sang.

Enfin arrivée à son paquetage, qui avait été projeté dans tous les sens, elle récupéra rapidement la corde, qu'elle accrocha autour de sa taille en s'aidant de la poutre à laquelle était suspendu son hamac pour ne pas perdre l'équilibre ; puis, pour le reste de ses affaires, elle les enroula dans le hamac lui-même, avant de nouer le tissu pour former comme un cocon qui retiendrait, elle l'espérait, toutes ses affaires sans les endommager.

Et elle remonta sur le pont, le reste de la corde dans les mains. Cette sortie de la cale était située juste derrière le mât central : alors que seul son buste en dépassait, elle enlaça à peu près le mât, qui était néanmoins trop large pour elle, l'autre extrémité de la corde dans la main du côté du vent : elle la lança enfin et la récupéra de l'autre en tâtonnant dans les rafales, puis conclut un nœud solide. Elle était ainsi attachée : il lui restait une quinzaine de mètres de jeu pour se déplacer sur le pont, ce qui lui laissait en particulier l'accès au mât avant et à la voile détachée. Depuis tout à l'heure, il lui semblait qu'il y avait déjà moins de marins affairés là-bas : certains, sans doute, avaient été envoyés par-dessus bord, noyés immédiatement et emportés par le fond.

Elle savait qu'en laissant un jeu trop mou, elle n'aurait aucun équilibre : aussi conservait-elle toute une partie de la corde enroulée entre ses mains lorsqu'elle se risqua sur le pont, conservant ainsi le lien tendu en permanence. Le vent soufflait de travers et elle s'aidait de cette tension pour maintenir son équilibre, avançant à petit pas vers le mât avant : le sol glissait affreusement et, si ce n'était par des talents de balancement finement travaillés, elle aurait chu à maintes reprises. Mais contrairement à ce qu'il s'était passé dans la cale, elle pouvait observer ce qui venait, et le relief des flots l'informait vaguement des rafales qui se préparaient : à vérifier ainsi en permanence la mer et l'orage, sa progression n'en était que plus lente, mais aussi plus certaine.

Enfin elle parvint au mât avant, sur lequel elle se lança pour s'y agripper. Elle avait lâché sa corde, qui désormais claquait dans le vent : en observant rapidement la situation, elle se rendit compte qu'il lui faudrait escalader jusqu'à un promontoire intermédiaire puis jusqu'au nid-de-pie situé tout en haut du mât pour détacher complètement la voile. Elle ne cherchait pas une quelconque façon de la récupérer : une fois détachée, la voile serait emportée par le vent et le navire libre ; le capitaine préférerait sans doute perdre une voile que son navire.

Elle s'apprêta à grimper lorsqu'un choc violent sur la corde derrière elle lui fit perdre sa prise contre le mât et la projeta avec brutalité contre le bastingage, auquel elle parvint par chance à se maintenir. Un regard en arrière lui fit comprendre qu'un des marin s'était pris une vague de plein fouet et n'avait dû sa survie qu'à la corde en travers de son chemin : elle lui hurla une injure, mais le vent l'empêcha probablement de comprendre quoi que ce soit.

Fastidieusement, elle remonta jusqu'au mât, auquel elle noua la corde en son milieu, de façon à ce qu'elle soit tendus entre les deux mâts avant et que ceux qui l'utiliseraient, que ce soit pour traverser le pont de façon plus sûre ou pour se rattraper, ne la déstabilisent pas elle. Il lui restait, estimait-elle, juste assez de jeu pour monter tout en haut en conservant cette corde en rappel : aussitôt elle se mit à escalader.

Il y avait naturellement de nombreuses prises pour aider les marins à accéder à leurs postes d'observations, nouer des cordages et hisser les voiles : mais l'eau, qu'elle fût salée issue de la mer ou douce issue de la tempête, aspergeait toutes les anfractuosités et les rendaient aussi traîtres qu'une algue sur un rocher. Yurlungur s'accrochait comme elle pouvait : elle ne voyait pas grand-chose, de l'eau de mer venant sans cesse mouiller ses yeux et son visage – elle se sentait poisseuse et l'eau alourdissait ses vêtements trempés. Mais elle faisait fi et grimpait, courageusement, comme un pion bleu nuit sur la tempête noire.

Elle atteint rapidement le premier promontoire et reprit son souffle, avant d'attacher à nouveau la corde à cet endroit et de détacher le dernier cordage qui retenait la voile ici, d'un coup ajusté de sa dague ; puis elle reprit l'ascension. Là-haut, le vent semblait se faire plus violent encore et la tempête plus coléreuse ; elle ne sentait plus rien si ce n'était le vent et la pluie qui cinglait sur son visage et ses muscles crispés à l'extrême pour éviter de choir. À deux reprises, sa main glissa et elle faillit tomber effectivement : ce ne fut que par un réflexe inouï qu'elle se maintint, continuant malgré tout à progresser.

Il y avait une seconde difficulté qui s'amplifiait à mesure qu'elle montait : le roulis. Si celui-ci était déjà conséquent à la surface du pont, il faisait voltiger le mât d'un côté et de l'autre, et l'amplitude du mouvement était accru proportionnellement à sa propre progression. Enfin elle parvint au nid-de-pie : mais en tendant la main, elle ne pouvait atteindre le bout de cordage qui tenait encore la voile, et la corde qui la retenait contre les flots et le vent la retenait aussi d'atteindre son but. Il ne lui manquait pas grand-chose : le bout de sa dague arrivait à une vingtaine de centimètres de la corde, peut-être – elle songeait avec rage que si elle n'avait pas rajouté un nœud au niveau du promontoire intermédiaire, elle aurait peut-être eu suffisamment de jeu.

Elle lança un regard en contrebas pour s'apercevoir que les Sindeldi utilisaient déjà la corde qui traversait le pont pour se déplacer – elle espérait qu'ils ne l'useraient pas trop, ou qu'ils la lui rembourseraient. Certains d'entre eux la fixaient, les yeux pleins d'espoir, attendant qu'elle détachât enfin cette voile qui, sinon, ferait peut-être chavirer leur navire : mais comment leur dire qu'elle ne pouvait pas ?

Elle se plaqua contre le mât et entreprit de se décrocher de la corde, qu'elle ne laissa pas flotter au vent pour autant, l'attachant à la base du nid-de-pie ; puis elle se leva, s'accrochant aux bords de cette sorte de panier juchée en haut du mât. Elle avait à vrai dire assez peu de chance de passer par-dessus la balustrade de la vigie, étant assez petite elle-même et le garde-corps ajusté à la taille d'un Sindel ; mais il y avait ce trou dans le plancher, trou par lequel elle-même était entrée et qui permettait à la vigie de monter à son poste : si elle tombait dedans, c'en était fini.

Ses mains étaient crispées sur la rambarde du nid-de-pie pour éviter de choir : elle fixait ce trou dans le sol avec un air de terreur mêlé de courage, ou de témérité. À pas mesurés, elle s'approchait de l'ultime cordage : puis lorsqu'il fut à sa portée, d'un coup net et brutal, elle le trancha de sa dague.

Tout s'enchaîna alors très vite. La voile fila effectivement dans le vent, disparaissant au loin dans la tempête ; le navire, brutalement, se redressa, reprenant une position acceptable qui permettrait probablement aux rameurs de récupérer le contrôle de leur vaisseau ; Yurlungur fut projetée au sol et tomba dans le trou.

Ses yeux grands ouverts observèrent la scène avec effarement : le mât commençait à accélérer auprès d'elle, tandis qu'elle chutait : ses doigts trouvèrent la corde et s'y frottèrent avec douleur, ralentissant sa chute, mais pas entièrement, tout en l'orientant vers le promontoire intermédiaire, sur lequel elle dégringola avant de s'immobiliser complètement. C'étaient ses jambes qui avaient amorti la chute du reste de son corps : elle se tenait à présent prostrée contre le ventre, les jambes ramenées en position fœtale et les bras étendus vers la corde, s'y agrippant toujours avec une incroyable ténacité. Elle avait presque l'air de prier, selon les rites orientaux.

Une douleur intense envahissait le bas de son corps, qu'elle laissa monter en attendant que le premier choc passe. Il y avait sans doute quelques larmes de douleur qui coulaient sur son visage, mais elles étaient indiscernables de la pluie qui avait baigné ses traits tout le long de son ascension. Après deux minutes, la souffrance commençait à décroître : elle osa quelques mouvements légers et estima qu'elle n'avait, par chance, rien de brisé ou fracturé. Mais elle sentait toujours une vive douleur sur la cuisse droite : en y amenant doucement sa main, elle sentit qu'une plaie y était ouverte et saignait. La blessure n'était pas trop grave : en d'autres circonstances, elle ne s'y serait penchée que plus tard ; mais pour descendre le mât jusqu'au pont, elle ne pourrait réussir dans ces conditions avec cette gêne, même légère.

Conservant toujours sa main gauche sur la corde qu'elle avait tendu elle-même, en se rapprochant du mât en rampant, elle saisit de sa main libre la grande gourde à sa ceinture et en versa un peu sur la plaie. Le liquide de soin qu'elle avait mentalement sélectionné se déversa sur la blessure, contrant le sel et les infections, puis raccrocha la gourde à sa ceinture en attendant que le soin fasse effet.

En quelques minutes la plaie s'était refermée. Ce n'était désormais rien de plus qu'une cicatrice un peu douloureuse, qu'il faudrait ensuite panser pour s'assurer de son bon rétablissement, mais qui lui permettait pour l'heure de se déplacer comme à l'ordinaire. S'aidant de la corde, elle descendit sur le pont pour s'enquérir de la situation actuelle du navire, maintenant que la voile en avait été entièrement détachée.

(((Utilisation d'une petite potion de soin)))

...
Modifié en dernier par Yurlungur le jeu. 3 oct. 2019 21:11, modifié 1 fois.

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Jorus Kayne
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Jorus Kayne » jeu. 26 sept. 2019 21:46

"Ils en mettent bien du temps !" Dis-je à moi-même alors que ces fichus gardes ne semblent pas vouloir revenir.

C’est avec un cœur empli de colère et le ventre vide que j’abandonne finalement l’idée qu’on vienne m’apporter la nourriture promise. Une larme viendrait presque courir sur ma joue au souvenir de cette nourriture durant la réunion avec la commandante. L’heure est au départ et guettant le quai sur le pont, jusqu’au dernier moment je pensais qu’ils reviendraient. Ca m’apprendra à faire confiance à ces Sindeldi !

Je monte à bords du Danse-Lames, un magnifique trois mâts, équipé d’une bonne cinquantaine de matelots. Nous allons avoir quelques jours de voyage en mer avant d’atteindre notre destination. Afin de calmer mon ventre je m’arrange pour effectuer quelques tâches parmi les plus ingrates en échange de vivres. Peut-être pensaient-ils que mon travail ne mériterait pas plus qu’un vieux bout de pain rassis, ils se sont rapidement aperçus que même un humain pouvait être utile, voir même efficace. Après tout, j’ai tout de même passé trois années de ma vie à bords d’un navire à voguer entre l’Imiftil et le Nirtim. J’ai connu des tempêtes très vigoureuses entre ces deux continents et ce n’est pas ce bateau visiblement incapable de voguer sur les hautes mers et le travail qui incombe sur le pont qui me fera peur. Bien au contraire, j’apprécie ce retour aux sources après les évènements chaotiques d’Aliaénon.

Je m’occupe en premier lieu de nouer des nœuds. Si aucun des marins ne peut se targuer de critiquer mon travail, ce n’est pas pour autant qu’on m’envoie sur quelque chose de plus intéressant comme carguer les voiles lorsqu’il s’avère nécessaire. Je suis au contraire envoyé en cale, pour aider à une vérification d’inventaire. Un travail tout ce qu’il y a de plus intéressant surtout lorsque l’on n’est pas autorisé à voir le contenu de la marchandise, cantonné à un rôle de simple scribe. Je fais mon possible pour rester aimable, même si dans ces moments où je dois laver la cale, l’air marin me manque quelque peu.

(Que ne donnerais-je pas pour être à la proue du navire et sentir mon visage se faire fouetter par les projections de vagues ?)

(Je ne sais pas, ton repas du soir ?)

Toujours aussi taquine, ma faéra reste un moteur essentiel pour le maintient de mon moral, surtout lorsque mon ventre crie famine. Malgré tout, j’ai le droit à des repas décents, même si avec la distance les Sindeldi j’ai cette impression que mon côté humain est une grave maladie qui peut se donner au moindre contact. Au moins j’ai droit à une couchette correcte et profite d’une nuit sur un hamac bercé par le roulis du bateau.

Le lendemain je reprends mon poste sur le pont, aidant parfois lorsque certains le désiraient. La journée passe sans aucun évènement particulier tandis que sur le soir, des nuages sombres se dressent sur la pointe des montagnes du Naora. Ne connaissant pas les effets que peuvent avoir les évènements météorologiques de la région j’ignore ce qu’il peut nous arriver, mais par expérience il est toujours bon de se tenir prêt lorsque les nuages sont aussi noirs que l’expression inquiète du capitaine. Connaissant les tâches à accomplir dans les situations potentiellement à risques et me refusant toujours l’accès au mât pour carguer les voiles, je suis les membres d’équipages qui se dirigent à la cale. Il est bon de voir que dans ces conditions, la barrière de la race à tendance à s’effriter. Nous vérifions ensemble les cordes qui retiennent les cargaisons. Dans l’éventualité où l’une d’elles devaient lâcher, elle pourrait être propulsée suffisamment fort pour ouvrir un trou dans la coque, diminuant la capacité du bateau à flotter à un simple amas de bois.

Lorsque je reviens sur le pont la voile est tout juste repliée que le vent montre la puissance de son souffle. Une pluie, semblable à un mur d’eau tombant par d’infinis morceaux, réduit notre champ de vision à guère plus d’une quinzaine de mètres. La houle, qui fait tanguer dangereusement le bateau, rend les déplacements sur le pont presque impossible sans prendre de risque et ses vagues qui déferlent sur le pont n’arrangent rien. Alors que je rejoins la seule humaine à bord, je vois le capitaine hurler comme un dément, son juron presque étouffé par l’ambiance locale d’un bateau au bord de la perdition. Un matelot proche de nous traduit les propos en une injure à des aquamanciens.

Si j’ai affronté des évènements tempétueux, je n’ai pas encore eu la possibilité d’affronter le pouvoir magique des mages d’eau. Je doutais néanmoins qu’une telle puissance puisse être possible, mais qui sait, peut-être qu’un vieil ermite qui s’ennuyait a soudain décidé qu’il serait marrant de faire chavirer un navire au détriment de son équipage ? Par expérience, je sais que les choses vont se gâter et je me hâte dans ma cabine pour récupérer mon grappin. Depuis que je l’ai utilisé contre la créature de Simaya sur Aliaénon, mon grappin et la corde avec laquelle je l’ai attaché, ne m’ont plus quitté. Avec l’autre extrémité je fais un nœud autour de ma taille en cas de choc soudain. Une fois cela fait, je laisse le grappin sur le côté gauche de mes hanches et participe avec le reste de l’équipage à œuvrer pour le maintient du bateau à flot. Tout se passe comme dans mes souvenirs : les cordes tirées, la chaleur de l’effort se cumulant avec le climat tropical de la tempête, les matelots recrachant l’eau de leurs poumons par une vague inopinée. S’en serait presque amusant si une corde ne venait pas de céder, fouettant avec violence un marin désormais plus rouge que gris, le propulsant hors du pont. Dans notre malheur, la voile enroulée il y a encore quelques instants s’ouvre et prenant la force du vent, menace de faire chavirer le navire. J’entends comme d’autres un bruit sourd dans la cale. L’un des cordages a cédé, laissant libre court à la marchandise d’explorer tous les coins et recoins de cette partie de bateau et vérifiant la capacité de celui-ci à encaisser les chocs internes.

Alors que je me trouve au milieu du pont pour attacher une corde qui s’était défaite, une immense vague arrive en face de moi. Si j’arrive à atteindre in extremis le mât centrale pour m’y accrocher, la vague nettoie le pont des impuretés venant du fond des mers ainsi que trois Sindeldi jetés à l’eau. En plus de la tempête et des vagues, la panique prend d’assaut le navire. Certains Sindeldi prennent d’assaut la dangereuse voile ouverte, d’autres se dirigent vers les rames tandis qu’un troisième groupe se rend à la cale pour arrimer correctement la marchandise dans la cale. Mon premier réflexe est de vérifier que je peux saisir le grappin sans aucune gêne.

La voile est mon inquiétude première. Tant qu’elle sera ouverte, nous aurons beau ramer ou sécuriser la cargaison, tout peut s’effondrer à cause d’elle. Je me rends vers les cordes qui permettent d’atteindre le haut de la voile, pour stabiliser l’ascension des marins, lorsqu’une nouvelle vague percute le navire et me pousse à bâbord. Un peu plus et je passais par-dessus bord. Si je suis parvenu à me stabiliser, ce n’est pas le cas du Sindel qui arrive sur moi, incapable d’arrêter sa chute inévitable. Je n’ai que le temps de saisir mon objet fétiche et de tendre les bras que celui-ci m’emporte. Nous passons du mauvais côté du bateau, mais sans avoir fini notre chute pourtant inévitable. Si ma main droite tient fermement le marin, l’autre s’agrippe au crochet pris dans la rambarde du navire. Une vague vient s’échouer sur la coque, nous obligeant à forcer sur nos muscles pour ne pas lâcher prise. Plutôt que de le remonter moi-même d’une seule main, ce dont je doute être capable, je stabilise notre position contre la coque du navire et y appuie ma jambe en la pliant, offrant au Sindel la possibilité de grimper. La tâche est ardue avec le puissant roulis du bateau et la tension sur mes bras qui s’intensifie alors qu’une nouvelle vague vient nous frapper, nous faisant perdre notre équilibre déjà précaire. A la seconde tentative je parviens à hisser mon paquet sur le pont et celui-ci m’aide à faire de même. Je me laisse tomber sur le cul après l’effort effectué. Même si mes bras me font un mal de chien, je serre les dents car tout n’est pas fini, loin de là !

Pendant que je reprends mon souffle, j’aperçois Yürlüngür tenter une ascension jusqu’au nid-de-pie, après avoir nouée une corde entre deux mâts. Au moins cette partie du navire peut être traversée sans trop de difficultés à présent. Déjà quelques marins profitent de la corde salvatrice pour garder leur équilibre, ce qui n’est malheureusement pas le cas de tous. Rendu glissant par les dépôts venus du fond des mers, un Sindel dérape et perd pied. S’il atteint la corde tendue, il n’est pas capable de l’attraper et celle qui aurait pu le sauver se transforme en un piège qui l’emporte dans une horrible roulade. Complètement déboussolé par le tournis que lui impose sa pirouette, il ne parvient pas à se stabiliser. Suffisamment près de moi pour que j’intervienne, je jauge la vitesse du marin ainsi que notre distance et cours le long de la rambarde bâbord. Je saute pour attraper le Sindel qui s’apprête à explorer les fonds marins. A l’aide de mon épaule je l’attrape et le plaque de toutes mes forces contre le pont, lui arrachant un cri de douleur à l’impact. Nous glissons tous les deux sur le pont gaugé d’eau salée, jusqu’à se faire arrêter par un deux Sindeldi accrochés à la cabine menant aux niveaux inférieurs.

Je reprends tant bien que mal appuie sur mes jambes avec la tempête qui semble ne jamais finir et vérifie l’état de ma corde ainsi que mon grappin. Au loin j’aperçois Yürlüngür, malmenée par un marin qui tire sur la corde reliée à la jeune fille à cause d’une vague. S’il continue de tirer sur la corde ainsi ou si une nouvelle vague vient le frapper, il va mettre la jeune fille en danger, plus qu’elle ne l’est déjà. Je m’élance pour lui faire relâcher la corde et lui montrer qu’il y a quelqu’un relié à elle lorsqu’une nouvelle vague nous percute de plein fouet. Emporté par un torrent d’eau, nous glissons sur le pont jusqu’à la rambarde tribord. Je tente de ralentir notre progression avec mon grappin, mais je ne parviens pas à l’encrer dans le pont. Au mieux je le raye, ce qui me vaudra éventuellement une remontrance une fois la tempête passée, en admettant que nous soyons l’un comme l’autre encore présent sur le bateau après la tempête. C’est le Sindel qui nous empêche de sortir en mer en se rattrapant à une corde. Alors que nous nous relevons lorsque la vague est passée, un nouveau danger nous assaille. Me faisant face, le marin ne voit pas la corde arrivant sur nous et tout particulièrement la poulie qui y est rattachée. Le temps de réflexion étant un luxe dans cette situation, je l’écarte de la course de l’objet fatal en me rendant compte trop tard que c’est désormais moi la prochaine cible.

Tout est noir. Un voile d’obscurité se dresse devant mes yeux, alors que dans mon esprit c’est l’éclipse totale. Comme lorsqu’on effleure quelque chose du bout du doigt, je ne ressens qu’à peine mon corps mouillé, ainsi que la surface du pont sur ma joue et cette douleur, arrivée aussi soudainement qu’elle est repartie, comme un lointain souvenir d’une nuit trop arrosée alors qu’un sommeil attendu me tend les bras. Même la voix intérieure de ma faéra me paraît si loin désormais. Plus aucune pensée ne me tord l’esprit. Je ne crains plus les jugements des Sindeldi ni cette sensation très éloignée d’être emporté par une vague d’eau. Plus rien n’a de sens ni de valeur, juste le néant qui m’enlace.
Modifié en dernier par Jorus Kayne le ven. 27 sept. 2019 20:58, modifié 1 fois.

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Asterie
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Asterie » ven. 27 sept. 2019 15:52

Sans difficulté, nous montons donc sur le navire des contacts d’Yliria à Nessima, ce fameux groupe libertaire visant à l’ouverture des esprits et des mœurs des elfes gris du cru. Le capitaine, si elle ne semble pas le connaître, parait la reconnaître, elle. Une bonne chose, sans doute, puisqu’il nous accueille sans plus de cérémonie. Je sens les regards des marins se poser sur moi avec curiosité, intérêt. Jugement, peut-être ? Daelyrn ne doit pas y être étranger : l’on m’a plusieurs fois répété qu’ils étaient rares et précieux, ici.

Sans tarder, le voyage commence, les voiles gonflant pour prendre la voie du Sud, vers les chaleurs du désert. La journée passe tranquillement, et nous œuvrons chacun à nos tâches respectives. Observer les flots bleus fendus par la proue, l’horizon lointain, presque inaccessible. Dégourdir les jambes de Daelyrn aussi, en le coursant sur le pont alors qu’il jappe avec entrain, ravi sans doute de se voir entouré ainsi d’eau, son élément préféré. La journée passe ainsi sans grand incident. On peut même constater, vers la fin de la journée, une masse nuageuse bien plus au nord, à laquelle on a échappé. Ceux partis vers le nord, eux, doivent être en plein dedans. Ils n’avaient qu’à mieux choisir. La nuit que nous passons est brève et mouvementée. Pas spécialement à cause de la houle de ce bord de côte, mais plus parce que je ne suis guère habituée au roulis constant d’un navire.

À un moment dans la journée, le lendemain, alors que le soleil avance dans l’après-midi, je m’approche d’Yliria, qui semble occupée à… une sorte de danse rituelle et martiale, armée d’une bien curieuse arme. Elle a l’air un peu ridicule, il faut avouer, à frapper ainsi le vide. A-t-elle déjà seulement tenté ces mouvements contre un ennemi réel ? Je tâche de réfréner le petit sourire moqueur sur mon visage pour lui poser une question, sérieuse elle, tout en m’approchant.

« Impressionnant… Un art que je ne maîtrise que peu. »

Je n’y connais que peu en combat au corps à corps, il est vrai. De quoi me défendre contre les importuns, bien que je préfère de loin l’usage de mon arc. Essoufflée, la jeune sang-mêlé prend repos sur la rambarde du pont pour me remercier du compliment, avouant n’être pas encore totalement à l’aise dans sa pratique. Elle me questionne alors sur la qualité de mon sommeil. Grimaçant, je rétorque :

« Comme sur un bateau ? »

J’orne alors mes lèvres d’un grand sourire, poursuivant sur le sujet de son entraînement et désignant l’endroit de sa danse du doigt.

« Ça s’utilise vraiment en combat, ça ? »

Elle avoue s’en être déjà servi, et précise l’avantage de déstabilisation de l’adversaire, arguant qu’on trouve rarement de combattant usant d’une telle gestuelle. Sans rire. Moi aussi je serais perturbée si un ennemi se mettait à bouger ainsi devant moi.

« Ah oui… j’imagine. »

Je reste un instant pensive, un peu perplexe sur ce style de combat, avant de changer de sujet.

« Ils sont bien sympathiques, en tout cas, ces gens que tu suis. Un navire prêté, des vivres et matériels divers… Comment tu as fait leur connaissance, toi qui es… ben… pas tellement commune ici, au Naora ? »

Elle narre rapidement l’histoire de leur rencontre, sur Imiftil, où elle faisait partie d’un cirque, endroit où ils l’auraient repérée. Une artiste ? N’ayant nulle part où aller, elle les aurait suivis, intégrant leur grande famille. Ça sonne un peu comme une obscure secte, en vérité… Elle doit percevoir mon trouble car elle me demande aussitôt si c’est si étonnant. Je hausse les épaules avant de répondre, bien sincèrement :

« Oui. Oui. Mon histoire a été toute autre, en vérité. Je dois avouer ne connaître que mon coin de forêt, dans le Royaume de Yarthiss. Cette histoire de silnogures et le désert… c’était un accident plus qu’autre chose. Mais ça m’a montré ma voie, en tout cas. C’est ce que j’ai toujours voulu, ce de quoi j’ai toujours rêvé : l’aventure. C’est pour ça que je suis ici. »

Je grimace, revenant sur son propos.

« Mais… le cirque flamboyant d’Exech… Qu’est-ce qu’ils fichaient là ? Ils ont beau sembler plus ouverts que la plupart des leurs, ils semblent quand même pas mal repliés sur leurs soucis, non ? »

Yliria s’étonne dans un premier temps du passage incongru des forêts d’un continent au désert de l’archipel du Naora. Il est vrai que cette histoire est un peu spéciale. Un peu trop pour être narrées… Et j’ai l’impression que mes souvenirs à ce propos sont un peu flous, pas très précis. Elle avoue ensuite n’avoir pas vraiment choisi la vie d’aventure, un peu forcée par le destin. Mais elle s’y est faite. Elle précise que son ordre est traqué depuis des âges par le clergé, et u’ils attendent d’être assez puissants pour agir pour de bon. Un frisson me parcoure l’échine alors qu’elle poursuit, évoquant des libérations d’esclaves à Khonfas, et des contacts établis avec plusieurs peuples. Elle n’a pas en main toutes les cartes pour me répondre, en tout cas. Quant à moi, je rétorque :

« Khonfas ? Hmmm. J’connais pas. Le monde est tellement vaste, comment peut-on avoir entendu parler de tout ? De ma forêt à Sarnissa... j'avoue que moi-même je n'arrive pas vraiment à l'expliquer. Une... une sorte de force supérieure, j'imagine ? J'étais destinée à ça, y'a pas de doute. Mais le clergé, tout ça, c’est pas eux qui dirigent le pays, de ce que j’ai compris ? Agir pour de bon, tout ça… ça parait un peu extrême, non ? »

Elle m’indique que Khonfas est une ville shaakt sur mon continent originel, puis répond à mon interrogation en affirmant qu’elle répugne voir les riches rire des pauvres rampant dans la misère alors qu’ils sont eux-mêmes vêtus de précieux tissus, et que c’est selon elle une raison suffisante pour agir. Prudente, elle dit vouloir renverser leur dictat sans le remplacer par le leur propre, avouant toutefois penser qu’une voie paisible semble compromise. Je hausse les épaules, peu convaincue par son discours.

« Oui. Enfin, ceux que tu sers n’ont pas l’air de ramper dans la boue non plus. »

Une question plus provocatrice que je ne le l’ai imaginée avant de la dire. Ça semble chiffonner la jeune semi-elfe, qui précise qu’elle agit selon ses principes, n’appréciant pas le terme « servir ». Elle avoue que les Ithil sont fortunés, et commente en affirmant qu’il faut de l’argent pour entrainer et entretenir des soldats, ainsi que fournir du matériel aux plus démunis. Je baisse les yeux un instant, pensive, avant de les relever vers elle.

« J’sais pas. De viens d’un milieu où ce sont les démunis qui fournissent des vivres aux riches juste parce qu’ils sont riches. Enfin, c’est toujours mieux que de tout garder pour soi, c’est sûr. Mais du coup, tu parles de soldats, tu parles de combats… Si ça avait été les autres qui t’étaient venus en aide, ce clergé, tu ne serais pas aussi ficèle à eux que tu ne l’es à ceux-ci ? »


Sévère, elle indique qu’elle ne serait pas là à en parler si le clergé s’en était mêlé. Elle pense qu’elle n’aurait pas été dupe, sans être pleinement sûre d’elle. Elle poursuit en disant vouloir faire ce qui lui semble juste, via cette voie qu’elle a choisie. Elle admet ne pas pouvoir répondre plus précisément à ma question. Je décide de pousser un peu plus loin ma réflexion.

« Tu crois que ceux que tu suis pourraient être à l'origine de ces troubles par ici ? J'ai bien entendu la version de Dame Tar'Ithil qui défend son camp, j'imagine, en disant que leurs détracteurs pourraient en être à l'origine pour militariser encore plus les elfe gris, mais... est-ce possible qu'eux-mêmes apportent de l'aide à ces elfes bruns pour qu'ils se... libèrent de cette oppression ? »

Elle secoue la tête, convaincue que ce n’est pas le cas. Elle dit qu’ils n’ont pas les moyens pour armer autant de monde, et précise que l’envoi de leurs cargaisons via ces navires ne se fait que pour des vivres et du matériel de première nécessité. Se fait-elle abuser par ces elfes gris ? Comment peut-elle être certaine qu’ils lui disent la vérité ? Elle étaie ses paroles en narrant l’histoire de sa dernière mission pour l’Opale, dans ce désert. Une prise de contact avec les elfes bruns visant à comprendre leur agitation. Des sindeldi les auraient attaqués, identifiés comme des soldats officiels de l’armée, mais déguisés et masqués. Elle pense qu’il s’agit là un moyen pour attiser les troubles entre gris et habitants du désert, avant d’avouer ignorer qui pourrait bien tirer les ficelles. Elle est certaine, cependant, qu’il ne s’agit pas de l’Opale.

« L’opale, c’est le nom qu’ils se donnent ? ça a un sens ? Mais du coup, si l’armée sindel vole les ressources envoyées aux elfes bruns, ils peuvent aussi être exemptés de toute culpabilité, non ? Ca n’a pas de sens d’arme des gens et de les affamer dans le même temps. »

Je hausse les épaules, un peu défaite.

« Enfin, j’comprends pas grand-chose à tout ça. Et ils ont répondu quoi, les Eruïons ? »

Elle précise le nom complet de sa caste : les Danseurs d’Opale, et admet n’en connaître pas le sens. Elle résout ensuite ma question par un petit jeu d’esprit, faisant un parallèle entre les armes, le fait de les affamer et leur agressivité. Ce n’est pas idiot, en soi. Quant aux Eruïons, elle n’a fait que survoler la surface du problème, raison de notre retour ici, sans doute. Elle vise à rencontrer une matriarche pour se faire entendre… Et entendre ce qu’elle aurait à nous dire.

« Oui. Oui, peut-être. Dans tous les cas, c'est détestable d'agir ainsi sur des êtres vivants. J'ai beau être embauchée par une sindel, la cause de ces elfes du désert me parle plus que leurs histoires internes de politique foireuses. S'ils n'arrivent pas à s'entendre, qu'ils laissent la place à ceux qui en ont besoin ! »

Elle affirme pourtant que les choses changent, précisant qu’il y a un mois, elle comme moi aurions été fléchées à vue. Elle précise vouloir, naïvement, empêcher un nouveau massacre d’innocents. Je secoue la tête, rassurante…

« Sans espoir, rien n’a de sens. »

Elle semble plutôt d’accord, et reprend confiance pour la suite. Je tends mon poing vers elle pour qu’elle le choque du sien, mais… elle ne semble pas réagir, aussi le ramené-je vers moi, la regardant d’un air étrange. Surprise, elle me pose la question de la signification de ce geste. Amusée, je rétorque en pouffant :

« Ah, ça. C'est... une sorte de signe pour... marquer une entente. On choque doucement nos poings. C'est... un symbole de connivence. »

Elle lève alors à son tour son poing, demandant si ça tient toujours. Avec un grand sourire, je choque son poing avec le mien, et nous retournons toutes deux à nos occupations, sans plus discuter. Sans doute y reviendrons-nous, plus tard.

Mais alors que mon regard se pose sur les terres avoisinantes, une détonation brutale se fait entendre, grondante. Une montagne vient d’exploser, son sommet se parant d’une colonne de fumée noirâtre. Quelques temps après, les retombées de cette éruption violente apparaissent sur le pont du navire, sous la forme d’une pluie de cendres recouvrant tout d’une couche grisâtre. Je décide de me mettre à l’abri avec Daelyrn sous le couvert du navire, afin de n’être pas salie par cette suie inquiétante tombant des cieux. Je couvre ma bouche du tissu de ma cape pour ne pas avaler ces saletés oppressantes. Quelle plaie, tout de même ! Le voyage ne semble pas s’augurer sous les meilleurs auspices. Et ce n’est pas tout : après quelques minutes, les cendres froides laissent place à une pluie de petites pierres noirâtres légères, faisant pleuvoir un vacarme infernal sur le pont du navire elfe. Et elles sont vite elles-mêmes remplacées par des braises incandescentes, véritable pluie flamboyante causant de multiples foyers incandescents. Les marins se ruent pour éteindre les feux, s’exposant dangereusement à la pluie brûlante. Yliria elle-même se lance vers l’extérieur pour leur porter secour, se couvrant de son bouclier pour se protéger. De mon côté, je reste bien sous le couvert du navire, n’ayant aucune envie de me retrouver brûlée au troisième degré sans avoir fait quoique ce soit de pertinent. Je lance à Yliria :

« Fais les venir ici, à l’abri ! »

En parlant des marins blessés, frappés par le feu venu du ciel. Je me prépare, quant à moi, à les accueillir, à organiser les blessés, à nettoyer leurs plaies d’eau douce et à les couvrir des bandages si cela s’avère nécessaire. En espérant que le chaos cesse vite, et que les retombées ne soient pas majeures sur notre expédition.

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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yliria » ven. 27 sept. 2019 23:33

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Cendres et écume


Il fut finalement facile de monter à bord du Danse-Lame. La remarque du capitaine, affirmant qu’il me connaissait de nom, m’arracha un sourire gêné et je montai à bord en le remerciant, posant mes affaires dans la cale près d’un hamac qui me servirait de couchette pour la durée du trajet. Rapidement, le navire quitta les eaux tranquilles du port pour longer la côte en direction du sud à bonne allure. Assise sur la rambarde du navire, les pieds nus pendant dans le vide, je humai avec délice les embruns, contemplant la mer qui scintillait, comme si des diamants perlaient à la surface de l’eau. J’appréciai le calme et la sérénité de ces moments, le bruit des vagues, le souffle du vent et les odeurs du large. Il ne me restait qu’à attendre d’arriver à destination, autant profiter du voyage du mieux que je le pouvais, bercée par le léger tangage du navire. Comme de coutume, l’équipage et le capitaine refusèrent catégoriquement que j’apporte mon aide pendant le voyage. Lorsque j’affirmai ne pas être impotente, il rétorqua simplement que je n’y connaissais probablement rien à la navigation ou au travail d’un matelot et que, si aide il devait y avoir de ma part, ce serait sur des domaines que je maitrisais. Sa logique était imparable et je me retrouvai là, assise, à attendre que le temps passe depuis la veille où j’avais aperçu de gros nuages noirs descendre du Nord, me félicitant de ne pas avoir choisis cette direction. J’avais aperçu Astérie jouer avec son Silnogure, mais je me contentai d’attendre en silence ou en discutant avec quelques marins à l’occasion.

Au bout d’une heure d’ennui, je me levai, marchant d’un pas dansant sur la rambarde avant de sauter sur le pont et de descendre à la cale pour prendre mes armes et, trouvant un coin où je ne gênerai personne, je fis quelques exercices avec ma rapière pour continuer de m’habituer à son maniement pour le moins particulier. Finit les coups de tailles, il me fallait penser à porter des coups d’estoc et adapter tout ce que je savais à cette nouvelle forme de combat. Y compris la danse de l’Eclipse que je me devais de maîtriser toujours davantage. Plus facile à dire qu’à faire et, dans les faits, j’avais surtout l’impression de mouliner dans le vide. Difficile de visualiser un adversaire avec suffisamment de concentration tout en enchainant attaque, danse, feinte et esquive, mais il devint rapidement plus naturel, au vu de la façon dont avait été conçu ma rapière, d’enchainer les attaques d’estocs. Il manquait un adversaire pour gérer attaque et défense en simultanée, mais le maniement de mon arme commençait à devenir plus simple, naturel et rapide. Je fis quelques mouvements supplémentaires avant d’entendre Astérie approcher. Je m’arrêtai et me tourne vers elle, le souffle court, haussant les sourcils face à son compliment. Un art oui, même si j’en étais loin de le maîtriser totalement. Je m’assis sur la rambarde, dos à la mer.

- Ah euh... merci ? Je suis pas encore à totalement l'aise cela dit. Tu as bien dormi ?

Elle me répondit d’un large sourire qu’elle avait dormi… comme sur un bateau, voulant dire que ce n’était pas terrible, avant de pointer du doigt le lieu où je m’entrainais juste avant, demandant si cela s’utilisait vraiment en situation de combat. Il suffisait d’avoir vu quelqu’un maîtriser pleinement cette danse pour le savoir, mais ce n’était pas son cas.

- Oui, oui. Je m'en suis déjà servi et ça a l'avantage de déstabiliser l'adversaire. On s'attend rarement à ce genre de mouvement en plein combat. Faut juste trouver le bon instructeur.

Cela ne l’avait visiblement pas vraiment convaincue, mais ce n’était pas vraiment le plus important. Le tout, c’était que je m’en serve correctement en cas de besoin, l’utilité serait tout de suite plus évidente pour elle. Suite à cela, elle enchaîna par une question concernant l’Opale, s’étonnant de ce qu’ils nous offraient et demandant comment j’avais pu finir ici alors que je n’étais pas « commune ». Un doux euphémisme puisque j’étais une indésirable pour la vaste majorité.

- Pas commune et pas la bienvenue non plus. Et je les ai rencontrés en Imiftil. Je faisais en quelque sorte partie, temporairement, du Cirque Flamboyant d'Exech et une des leurs m'a repéré et proposé de les rejoindre. Comme j'avais nulle part où aller, je l'ai suivi et depuis je fais partie de la famille. Ça te semble si étonnant ?

Cela semblait véritablement la surprendre comme histoire et elle raconta succinctement la sienne. Yarthiss… de douloureux souvenirs que je chassai rapidement pour l’entendre. Je haussai un sourcil lorqu’elle évoqua sa précédente venue dans le désert comme un « accident ». Comment pouvait-on atterrir dans un désert à des milliers de kilomètres dans un archipel fermé par « accident » ? Mais selon elle, cela lui avait montré sa voie et je n’avais rien à redire là-dessus, moi qui avait aussi trouvé la mienne au sein des Danseurs.

- Je me demande quand même comment tu as pu passer des forêt de Yarthiss au désert de Sarnissa, c'est pourtant pas la porte à côté... Mais si c'est ce que tu aimes faire, tant mieux. Moi l'aventure, j'y ai plus été contrainte qu'autre chose, je m'y suis faite on va dire.

L’Opale semblait véritablement l’intriguer, notamment sa présence à Exech et leur proposition alors qu’ils semblaient si renfermé, ici, au Naora.

- Ici, c'est différent, le clergé traquait notre ordre à une époque et on attend d'avoir assez de force avant d'agir pour de bon. Je sais que sur Imiftil, des membres ont participé à des libérations d'esclaves de masse où à des combats contre les shaakts de Khonfas. Je sais qu'on a des contacts avec plusieurs peuples aussi, mais je suis arrivée récemment, je n'ai pas toutes les informations.

Elle non plus, visiblement, puisqu’elle ne connaissait pas Khonfas et assura ne pas savoir elle-même comment elle avait pu passer de Yarthiss au Naora, ce qui me laissa perplexe.

- Khonfas, c'est une ville shaakte sur Imiftil. Bizarre... enfin j'imagine que le principal, c'est le résultat et le fait que ça te convienne.

Toujours était-il que mon discours sur le clergé lui parut quelque peu extrême et je me contentai de hausser les épaules. J’avais mes raisons, je n’allais simplement pas les détailler maintenant.

- Quand je vois les pauvres ramper et les puissants en rirent en se pavanant dans leur robes en tissus précieux, j'ai une raison suffisante. C'est à cause du clergé que les Sindeldi méprisent à ce point les autres et que la situation est ce qu'elle est. On veut juste contrebalancer leur dictat, pas en instaurer un autre, mais il y a peu de chance que cela se fasse calmement.

Cela ne sembla pas la convaincre et sa remarque me fit froncer les sourcils, un peu vexée. Comment ça « ceux que je sers » ? Oui les Ithil étaient riches, mais ce n’était pas l’argent le problème.

- Je ne sers personne, Astérie. J'agis selon mes principes, c'est tout. Quant à la fortune des Ithil, je ne nie pas, ils sont riches, mais il faut bien de l'argent pour entrainer et entretenir des soldats et fournir du matériel et des vivres aux démunis.

Elle rétorqua qu’elle ne connaissait que la version où c’étaient les pauvres qui offraient aux riches parce qu’ils étaient riches. Un statut que je ne connaissais que trop bien, mais je gardai les lèvres closes, cela n’avait rie à faire dans notre discussion, ça ne la regardait pas. Sa question m’étonna, mais je répondis plus sèchement que je ne l’aurai voulu, peut-être parce que la question me dérangeait plus que je ne voudrais l’admettre.

- Le clergé ? Je serais pas là pour t'en parler s'il m'était tombé dessus. Mais dans le cas contraire, j'ose croire que je n'aurai pas été dupe, mais c'est difficile à dire. J'essaie juste de faire ce qui me semble juste. Peut-être qu'il y a un autre moyen, mais c'est la voie que j'ai choisi, comme toi tu as choisi l'aventure. J'ai pas de réponse à ta question…

La question suivante aurait pu m’énerver, mais je la trouvais finalement légitime pour quelqu’un qui ne connaissait pas l’Opale, je m’assurais simplement de bien lui faire comprendre que, non, l’Ordre n’y était pour rien.

- Non, j'en doute vraiment. Déjà parce qu'on n'a pas les moyens d'armer autant de monde et parce que nos cargaisons sont uniquement des vivres et du matériel de première nécessité.

Je me grattai la tête, le temps de toruver les mots justes.

- Le truc... c'est que, je te l'ai dit, j'en reviens du désert, j'avais une mission pour l'Opale sur place, je devais prendre contact avec les Eruïons, essayer de comprendre pourquoi ils s'agitaient autant. Des Sindeldi nous ont attaqué, des soldats de l'armée Sindel, mais masqués, presque sans signes distinctif, en tout cas aucun identifiable par d'autre qu'un Sindel. Ils volaient ce que nous leur donnions. De là à voir un moyen d'attiser un peu plus les troubles, le rapprochement est assez facile. Je ne sais pas qui tire les ficelles, mais, vraiment, je ne pense pas que l'Opale soit derrière tout ça c'est... ce serait aller à l'encontre de ce qu'elle défend.

Sa réponse me posa une colle. La signification du nom de l’Opale ? Je n’avais jamais posé la question en vérité…

(Ah bah bravo !)

(Rho ça va ! J’avais autre chose en tête !)

Astérie avoua ne pas vraiment comprendre quel serait l’intérêt pour des Sindeldi d’armer puis d’affamer les Eruïons, me demandant ce que ces derniers avaient bien pu répondre suite à mon arrivée.

- J'ai jamais pensé à en demander le sens en fait, c'est une bonne question que je poserais une fois rentrée. Pour le reste, c'est simple en fait, donne une arme à un affamé et il attaquera son voisin pour manger. Alors soit ils les poussent à s'entretuer, soit à se regrouper pour attaquer... enfin c'est ce que je pense. Quant aux Eruïons… Disons qu'ils ont apprécié mon aide, mais ce n'était qu'une partie d'une tribu. C’est à peine si j'ai effleuré la surface du problème. Il faudrait déjà pouvoir rencontrer une matriarche pour avoir une chance de se faire entendre…

Et de les entendre eux aussi, de les connaître, les comprendre. Mon but, c’était d’assurer la paix et d’améliorer leur quotidien autant que possible. Si seulement ils pouvaient vivre ailleurs que dans ce désert… Et la cause Eruïons semblait intéress davantage Astérie que les querelles intestines Sindeldi, ce que je pouvais comprendre. Mais elle mettait tout le monde dans le même sac et ne savais pas à quel point tout avait changé très vite.

- Les choses changent, crois-moi. Il y a un mois à peine, nous aurions été fléchées a vue. J'ai bon espoir que tout cela s'arrange, qu'ils finissent par comprendre et s'ouvrir. Moi je veux juste empêcher un énième massacre inutile...

La vision du jouet d’enfant tombant en poussière dans les ruines de la ville souterraine des shaakts exterminés par les Sindeldi me revint en mémoire, tel un douloureux rappel de ce qui risquait de se produire si nous échouions.

- C'est naïf pas vrai ?

Pour moi, ça l’était, mais elle affirma que, sans espoir, rien n’avait de sens, et, en quelque sorte, elle avait raison. Un léger sourire se dessina sur mon visage en réponse.

- C'est vrai ! Bien pour ça qu'on va réussir !

Elle fit alors quelque chose de curieux et tendit le poing vers moi. Perplexe, mon regard passa de son visage à son poing, sans comprendre et elle le ramena vers elle, me regardant bizarrement. J’avais fait quelque chose de bizarre ? Je n’y comprenais rien…

- Euh... C'est pour quoi le poing ?

Elle me regarda avec surprise et pouffa avant de me répondre qu’il s’agissait d’un geste pour montrer qu’on était camarade, pour s’entendre. Je n’avais jamais vu cela… mais j’avais si peu côtoyer d’humains que leurs mœurs m’était presque totalement étranger, malgré le fait que ce soit Père qui m’ait élevée.

- Ah, d’accord, je savais pas.

Voulant lui assurer que j’étais d’accord avec elle, je tendis le poing à mon tour, me trouvant un peu ridicule malgré tout.

- Si ça tient toujours.

Avec un grand sourire, elle tapa doucement le sien contre le mien et je souris à mon tour, appréciant étrangement ce geste. Je la regardai ensuite repartir et en profitai pour aller ranger mes équipements près de mon hamac avant de remonter sur le pont pour profiter du vent. Mais ce fut le bruit assourdissant d’une explosion qui m’accueillit et mes yeux se portèrent aussitôt vers le responsable. Un volcan venait d’entrer en éruption au beau milieu du désert. Misère…

Les panaches de fumée qui s’échappaient du volcan, poussés par les vents, semblaient se diriger vers nous et cela ne me disait rien qui vaille. Je vis le capitaine lever les yeux vers le ciel encore bleu avant d’ordonner aux rameurs de s’activer. Mais il ne fallut pas longtemps pour que le soleil ne commence à disparaître, remplacé par un nuage de cendre qui rendait la respiration difficile. L’humidifiais le tissu mauve que je gardais toujours à portée et m’en fi un foulard que je plaquai devant ma bouche et mon nez, avec l’espoir de filtrer au mieux les particules de cendre. D’autres eurent la même idée, mais ce n’était hélas pas le plus gros problème. D’abord, de petit bruit de chute, très léger, se firent entendre, puis ils furent de plus en plus nombreux, petits morceaux de roches qui retombaient çà et là sur le navire, obligeant tout le monde à se mettre à l’abri sous peine de risquer de sérieuses contusions avec la vitesse à laquelle ces pierres tombaient du ciel. Puis un marin hurla en pointant du doigt le pont où un début d’incendie avait lieu. J’en cherchai l’origine avant de voir un second départ après la chute d’une pierre encore incandescente. Jurant, je vis quelque smarins se précipiter, se protégeant maladroitement avec ce qui leur était tombé sous la main, pour éteindre les début d’incendie tandis que le capitaine ordonnait de réduire la voilure pour en pas menacer d’enflammer tout le navire si elle prenait soudainement feu.

Après une rapide réflexion et la vision d’un sindel se tordant de douleur sur le sol après avoir reçu un projectile, je me ruai vers mon couchage, récupérant mon bouclier avant de foncer vers l’extérieur avec l’idée de les aider, de soigner ceux qui seraient blesser. Astérie, que je croisai avant de sortir, me demanda de faire venir les blessés vers elle. Je répondis d’un simple hochement de tête, me couvrant la tête avec mon bouclier avant de sortir. Deux nouveaux départs d’incendie avaient débuté, mais les deux premiers semblaient presque éteints, aussi me ruai-je vers le blessé. J’invoquai rapidement un bouclier magique de lumière par-dessus mon bouclier pour ne pas risquer de le voir s’enflammer contre mon bras et tirai le blessé près du mat avant de réunir mes fluides et de lancer un sort de guérison. Le Sindel cessa de se débattre et me lança un regard étonné avant que je ne lui dise rapidement de courir se mettre à l’abri, désignant du doigt l’endroit où Astérie se trouvait. Je n’allais pas pouvoir soigner tout le monde, aussi je fis rapidement passer le message avant de continuer, aidant à maitriser les feux, envoyant les blessés vers Astérie et soignant les plus atteints en quatrième vitesse. J’entendis le capitaine hurler un nouvel ordre en Sindel et le bateau fit une brusque accélération pour sortir de la zone, probablement que les rameurs avaient pris le relais des voiles que les marins s’efforçaient de remonter un peu plus tôt.

Régulièrement, j’entendais de petits bruits sourds contre mon bouclier, preuve que j’avais eu une idée lumineuse en allant le chercher. Si un de ces cailloux me touchait sur le haut du crâne, je n’osai même pas imaginer le résultat. Aidant un marin à hisser un seau d’eau depuis la mer, j’en entendis un autr crier et constatai avec horreur que ses habits prenaient feu. Je pris le seau destiné à l’incendie et lançai aussitôt son contenu sur le marin, le trempant de la tête au pied. IL ne cessa pas pour autant de se tortiller sur le sol et il était facile de voir pourquoi. Une grave brûlure s’étendait sur sa jambe et j’eus un léger temps de paralysie en voyant cela.

(T’es une pyromancienne non ? tu devrais le savoir que le feu laisse ce genre de marque.)

(Je… merde je sais.)

(ça aussi tu veux trouver un moyen de t’en prémunir ?)

(Et comment ! Une pyromancienne insensible au feu ce serait totalement normal et censé !)

Je m’agenouillai près du blessé, essayant tant bien que mal de lui faire arrêter de se tortiller. Avec peine, j’entourai sa blessure d’un halo de lumière régénératrice et il sembla aller mieux, bien que la blessure n’ait pas totalement disparu. Je lui désignai ensuite l’endroit où Astérie devait toujours être, l’aidant à se relever. J’espérai que cette situation n’allait pas s’éterniser, je commençai à manquer d’énergie.


Suite >>
Modifié en dernier par Yliria le mar. 1 oct. 2019 18:04, modifié 1 fois.

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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Gamemaster7 » sam. 28 sept. 2019 14:41

Émergence : màj pour Yurlungur et Jorus


L'action téméraire - mais ô combien héroïque - de Yurlungur, saluée par des vivats à peine audibles dans le fracas de la tempête, permit au navire de se redresser, évitant ainsi le pire. Le capitaine et les marins réagirent aussitôt et, à force de s'acharner sur les rames et le gouvernail, parvinrent à reprendre le contrôle du vaisseau.

De son côté, Jorus accomplit sa part d'exploits, empêchant deux marins de passer à l'eau et un troisième de se faire proprement assommer par une lourde poulie. Ses actes de bravoure lui valurent des regards aussi surpris que reconnaissants, mais le jeune homme n'eut guère le temps de profiter de son moment de gloire car la poulie le percuta de plein fouet et le jeta à terre, le plongeant dans une inconscience potentiellement mortelle. Le jeune homme n'en eut pas conscience, mais il ne dut son salut qu'aux réflexes du Sindel qu'il venait de le sauver, lequel l'agrippa rudement par la ceinture et lui évita un fatal plongeon dans les eaux déchaînées.

A une petite dizaine de mètres de là, Yurlungur assista à la scène et put réaliser sans mal que le danger, pour son compagnon de voyage, était loin d'être écarté : sous le poids de Jorus, le Sindel qui tentait de le retenir dérapa sur le pont détrempé, chuta lourdement et, alors que le Danse-Lame affrontait une nouvelle vague, tous deux glissèrent en direction de la rambarde bâbord. Cette dernière retiendrait-elle les deux hommes? Rien n'était moins sûr.

Dans la cale, la situation ne semblait pas s'être stabilisée car un nouveau choc, violent, ébranla la structure malmenée du fier navire. Un choc qui fut immédiatement suivi d'un autre, non moins violent, lorsqu'une immense lame frappa le vaisseau de travers, déferlant sur le pont comme un irrépressible raz de marée et menaçant d'emporter Jorus et le Sindel. La situation était critique, mais les paquets d'eau qui s'abattirent sur le jeune homme eurent tout de même un effet positif : quoique toujours bien sonné, il retrouva une bribe de conscience. Assez, peut-être, pour s'agripper quelque part le temps que quelqu'un lui vienne en aide.


*****
HJ : l'xp vous sera attribuée à la fin du voyage. Vous pouvez rp librement jusqu'à ce que la tempête s'apaise, au petit matin.

Yurlungur : utilisation d'une petite potion de soin

Jorus : blessure sérieuse à la tête, vertiges et nausées pendant 24H si elle n'est pas soignée.

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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Gamemaster7 » sam. 28 sept. 2019 16:08

Émergence : màj pour Astérie et Yliria


Malgré la pluie de feu qui s'abattait sur le navire, Yliria ne fut pas la seule à entendre Astérie l'inciter à lui ramener les blessés et, moins d'une minute après, un marin lui apporta une caisse remplie de bandages, de baumes divers et même de quelques potions de soin. Il pressa brièvement l'épaule de l'humaine, un geste de reconnaissance sans doute, puis fila aider ses compagnons à maîtriser les foyers naissants alors que les premiers blessés commençaient à affluer.

De son côté Yliria, judicieusement protégée par son bouclier qui ne fit pas mine de s'enflammer, avait fort à faire : la drache flamboyante accroissait le nombre de blessés à chaque minute qui passait et ses fluides de lumière s'épuisaient à toute allure. Elle n'était pas seule à s'efforcer de mettre les marins brûlés en sécurité, bien sûr, mais la plupart des Sindeldi avaient rejoint les bancs de nage de la galère et pesaient de toutes leurs forces sur les lourds avirons pour tirer au plus vite le vaisseau de ce mauvais pas. Les autres s'étaient partagés en plusieurs groupes : certains achevaient de ferler les voiles, d'autres faisaient de leur mieux pour juguler les incendies naissants, bref, l'aide était limitée.

Il ne fallut qu'une petite vingtaine de minutes aux rameurs pour extirper le Danse-Lame de la zone dangereuse, mais sans doute semblèrent-elles interminables aux marins et passagers qui luttaient de toutes leurs forces. Au final, près de vingt marins furent plus ou moins grièvement atteints, de brûlures ou de plaies ouvertes, et trois morts furent à déplorer. Tous les survivants étaient épuisés, crasseux à faire peur et plongés dans une stupeur hagarde que le capitaine s'empressa de rompre en affectant abruptement chacun à des tâches précises ou à un repos bien mérité. Il ne manqua pas de venir ensuite remercier brièvement mais chaleureusement les deux aventurières qui avaient sauvé bon nombre de vies durant la catastrophe.

Le lendemain, en milieu de matinée, le navire s'approcha des côtes et mit en panne le temps que les matelots jettent à l'eau une trentaine de lourdes caisses soigneusement emballées dans des toiles à l'épreuve de l'eau. Voilés par la chaleur du désert, de hauts murs et nombre de tours se dessinaient, plus clairs, sur le sombre massif de l'Akuynra : Raynna, lieu maudit et oublié des dieux comme des hommes, ou presque. Peu de paroles furent échangées durant cette brève halte, tous les Sindeldi arboraient un visage sombre et grave, à la vue du bagne qui représentait pour eux un châtiment bien pire que la mort.

Tard dans la soirée, le Danse-Lame atteignit une large baie qu'Yliria n'eut aucun mal à reconnaître : ils étaient arrivés à destination. Debout au sommet d'une grande dune, trois silhouettes sombres se découpaient sur les ors flamboyants du couchant : les Eruïons les attendaient. Une chaloupe fut mise à l'eau et le capitaine s'approcha alors des deux jeunes femmes et déclara gravement :

"Votre aide ne sera pas oubliée. Je n'ai pas grand chose à vous offrir pour vous remercier d'avoir sauvé nombre de mes hommes, mais…"

A chacune, il tendit une petite pierre gravée d'un symbole avant de compléter avec un léger sourire :

"Au nom de tout mon équipage, je vous prie d'accepter ce modeste témoignage de notre gratitude. Mes hommes les ont choisies avec soin, j'espère qu'elles vous seront utiles. Un Danse-Lame passera dans les parages toutes les trois semaines environ, au cas où. Soyez prudentes, puisse Sithi veiller sur vous."


*****


HJ : l'xp vous sera attribuée à la prochaine màj, une fois que vous aurez rp la fin du voyage. Vous pouvez rp librement diverses péripéties liées à la pluie de feu, en respectant la temporalité bien évidemment. Des apartés sont possibles entre vous après la fin de ladite pluie, mais aussi avec les matelots ou le capitaine si vous le souhaitez. Me contacter sur discord le cas échéant.

Gains et récompenses :

Astérie : une rune "Bet" à identifier

Yliria : une rune "Aov" à identifier

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Yliria
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yliria » mar. 1 oct. 2019 18:03

<< Auparavant


Les minutes semblèrent interminables et, alors que je rassurai un Sindel blessé, lui assurant qu’il allait s’en tirer, le soleil réapparut soudainement. Ce fut la délivrance autant que l’hébètement qui s’emparèrent de moi pendant quelques secondes, avant qu’un sifflement de douleur du blessé face à moi ne me ramène à la réalité. Epuisant mes dernières réserves magiques, je laissai la lumière guérir la plaie calcinée avant de m’asseoir sur le pont du navire. Le Sindel, lui, se releva et après regard reconnaissant, fila aider ses camarades à éteindre les derniers foyers d’incendie. Je restai là quelques instants, sans bouger, avant de lever le visage vers le ciel en fermant les yeux, ravie de sentir de nouveau la caresse du soleil, signe que les nuages ardents étaient derrière nous. J’entendis la voix du capitaine tonner, donnant des ordres brefs, signalant aux blessés de se reposer, aux autres de se bouger et j’ouvris les yeux je sentis une ombre me recouvrir. Il posa sa main sur mon épaule et, après un bref sourire, me remercia avant de retourner à son poste. Je le regardai s’égosiller pour que les marins ne succombent pas à l’abattement ou à l’inaction et fit de même, me relevant sans hâte, un léger mal de tête s’invitant dans la journée délirante qui était la nôtre. Au loin, le volcan crachait toujours ses panaches de fumées et de cendres ardentes, mais nous étions sortis d’affaire.

Une vingtaine de blessés et trois morts. C’est ce que l’un des marins me répondit lorsque je posai la question. Je hochai la tête sans rien dire, le laissant retourner à son poste, m’asseyant sur la rambarde sans un mot, les jambes dans le vide.

(Tu as fait de ton mieux, ne sois pas inutilement dure envers toi-même.)

(Je sais, j’aurai juste aimé sauver tout le monde.)

(Tu n’es pas infaillible Yliria, personne ne l’est. Je suis fière de toi et tout le monde t’es reconnaissante. Tu as fait ce qu’il fallait, du mieux que tu pouvais.)

J’acquiesçai en silence, sachant très bien que je n’aurai hélas pas pu faire mieux. Pas encore. Si j’avais passé beaucoup de temps pour comprendre et utiliser l’escrime, il allait être temps de me remettre à apprendre la magie, et sérieusement. Mais pour l’heure, j’aidai çà et là, soutenant un blessé ou donnant un peu d’eau à un Sindel souffrant. Astérie aussi avait fait de son mieux et l’équipage était réellement reconnaissant, de ce que je pouvais en voir. Je savais que ces Sindeldi étaient plus ouverts que les autres, puisqu’ils venaient des colonies Sindel, sur d’autres mondes, mais voir les sourires ou les petits gestes de remerciements sincères, c’était la preuve que les mentalités pouvaient changer. Lorsque, finalement, je pus me reposer, j’en profitai pour me laver dans un coin, à l’abri des regards, enlevant la cendre qui avait négligemment ajouté une fine pellicule sur ma peau et mes cheveux, avant de rejoindre mon hamac et de m’endormir comme une masse, sans même penser à manger.

Le lendemain, j’assistai sans comprendre au largage de plusieurs caisses emmailloté dans un tissu leur permettant visiblement de flotter. Je les regardai quelques minutes se faire emporter vers lea terre ferme et demandai à un marin à quoi cela servait. Un unique mot, « Raynna » et je compris, fixant mon regard sur le désert, discernant difficilement des murs et tours, vision floue de ce qu’était Raynna, le lieu que redoutaient tous les Sindeldi à en voir les visages graves et le silence qui régnait à bord. Lorsque nous reprîmes le cap vers la baie, je laissai mon regard sur ce lieu quelques instants, mais retint mes questions. Plusieurs fois, Tanaëth et d’autres en avaient fait mention, sans jamais s’attarder dessus, comme si le simple fait d’en prononcer le nom était douloureux. Un lieu que je n’avais décidément pas envie de découvrir.

En fin de soirée, notre destination fut en vue. La baie, familière, n’avait pas changé et je pus apercevoir trois sombres silhouette se découper sur les dunes alentours. Nous étions attendus, j’étais rassurée que mon message soit bien parvenu à Seraya. Le capitaine fit descendre une chaloupe et, alors que j’allais le remercier, c’est lui qui le fit, à Astérie et moi, de sa part et de celle de son équipage tout entier. Il tendit les mains et nous offrit chacune une rune, soigneusement choisie selon ses dires, par l’équipage, ajoutant qu’un Danse-Lame passerait ici toutes les trois semaines, au cas où.

- Merci capitaine. Puisse Sihti veiller sur vous également, ainsi que sur vos hommes.

Je le gratifiai d’un sourire avant de descendre dans la chaloupe, regardant quelques instants la navire tandis que nous nous en éloignions. C’était étrange, de revenir ici aussi vite. J’avais cru devoir y retourner seule, au début, mais la présence d’Astérie à mes côtés avait quelque chose de rassurant. Je ne lui avais même pas demandé, d’ailleurs.

- Au fait… pourquoi as-tu décidé de venir ici ? C’est bien plus dangereux que le Nord et bien moins attrayant.

Elle haussa les épaules, se disant que ce qu’elle avait fait par le passé pourrait nous ouvrir des portes. Elle ajouta qu’elle n’allait quand même pas me laisser y aller seule et je ne pus m’empêcher d’être étonnée en entendant cela. Etonnée, mais ravie et un large sourire reconnaissant s’étira sur mon visage.

- C'est vrai qu'avoir quelqu'un sur qui compter c'est quand même rassurant dans ce genre d'endroit. Merci Astérie, tu peux aussi compter sur moi.

Je tapotai mon bouclier en ajoutant :

- J'en ai pas l'air, mais paraît que je me débrouille bien

Ce qui la fit sourire et affirmer qu’elle n’en doutait guère. Je lui rendis son sourire tandis que nous approchions de la berge. Une fois le pied posé sur le sable, je remerciai les marins et leur souhaitait bonne route tandis qu’ils repartaient. Je fis ensuite dériver mon regard jusqu’aux trois Eruïons et m’approchai d’eux aux côtés d’Astérie. Je haussai un sourcil surpris en reconnaissant les trois, un en particulier auquel j’adressai un sourire. Plus âgé que tous les Eruïons que j’avais pu croiser, maigre et noueux comme une racine, un bouc ornant un menton surmonté par une bouche fine et des yeux d’un violet sombre, presque noir, Jabahl'Yr attendait patiemment avec ses compagnons.

- Bonjour, ravie de vous revoir.

Je désignai tour à tour Astérie et le Silnogure à ses côtés.

- Voici Astérie et Daelyrn. Je sais que c’est un peu étrange de nous voir revenir aussi vite après ce qu’il s’est passé et notre départ précipité, mais les Sindeldi s’agitent et semblent prêts à se battre, leur armées s’amassent la frontière et il y a des rumeurs d’une possible guerre alors… alors nous sommes venues dans l’espoir d’éviter que cela se produise, et d’aider votre peuple, comme j’aurai voulu le faire en venant la première fois.

Je jetai un œil à Astérie, la laissant ajouter quelque chose si elle le désirait, avant de terminer.

- Nous aimerions rencontrer votre matriarche et… et trouver une solution plus durable qu’une guerre.

Comment, là était toute la question…


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Yurlungur
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Yurlungur » jeu. 3 oct. 2019 21:10

...

Alors qu'elle s'accrochait à la corde pour essayer de revenir vers le mât central, Yurlungur sentait la fatigue et la douleur peu à peu se propager. Malgré la potion de soin, elle avait besoin d'un peu de repos : étant donné que la situation vis-à-vis de la voile semblait un peu plus sous contrôle à présent, elle estimait qu'il ne serait pas trop mal vu qu'elle se réfugie dans la cale pour attendre que la tempête ne passe : car si elle savait découper des cordages pour éviter un naufrage, elle était bien incapable de calmer une tempête, et c'était tout ce qu'il manquait au navire. Elle ne pouvait aider ceux qui se faisaient emporter par des vagues trop brutales, étant trop petite par rapport à eux pour être capable de les retenir, ni aider à rattacher les caisses de la cargaison, pour les mêmes raisons : par ailleurs elle n'en avait probablement plus tellement la force.

Elle cherchait à voir à travers la pluie qui battait le pont si la situation s'arrangeait : en particulier, elle ne savait pas où Jorus était. Curieusement, l'idée qu'il ait pu passer par-dessus bord ne lui vint même pas à l'esprit : il était forcément quelque part en train d'aider, bien portant, à accomplir son devoir - mais où ? Quand soudain elle aperçut un mouvement brusque d'une poulie qui vint frapper un homme et le projeter au sol : elle fut frappée un instant de stupeur en reconnaissant la silhouette fine de son coéquipier. Celui-ci était encore retenu par le Sindel à ses côtés, mais celui-ci dérapa et commença à glisser vers les eaux déchaînées.

« Par Moura, » souffla-t-elle lorsqu'une vague gigantesque vint percuter le navire et qu'une trombe d'eau la frappa de côté : elle glissa mais s'agrippa des deux mains à la corde auprès de laquelle elle progressait encore. Se relevant une fois celle-ci passée, elle lança un regard angoissé vers Jorus : celui-ci semblait péniblement sortir de l'inconscience et le Sindel à ses côtés ne le maintenait que difficilement avec lui. Il était peu probable que le marin décide de mourir avec le jeune homme et il semblait que personne alentours n'était suffisamment courageux - ou téméraire - pour venir à leur rescousse.

Un sursaut d'adrénaline vint chasser toute la léthargie qui avait commencé à s'emparer d'elle. Avec rapidité, elle rejoint le mât central et, sans réfléchir, entreprit de détacher la corde. Aussitôt, la situation devint plus instable : de même que précédemment, elle essayait de conserver ce fil de survie tendu, mais les perturbations étaient perpendiculaires à la direction de traction. Son équilibre avait beau être travaillé, elle savait qu'une vague trop forte risquait de l'envoyer par le fond : elle avait gagné quelques mètres de corde en la détachant, ce qui lui permettrait, elle l'espérait tout du moins, d'atteindre la position de Jorus ; mais la corde était également suffisamment longue pour lui permettre de tomber dans les flots. C'était une aide précieuse pour conserver l'équilibre, mais guère plus le garant de sa survie. Elle était toute poisseuse de sel, et trempée : ses cheveux, heureusement courts, lui collaient contre les joues tandis qu'elle sentait la démangeaison du sel coincé entre sa peau et ses vêtements croître progressivement.

Paradoxalement, ce fut presque en se pressant qu'elle commença à s'approcher de Jorus, déroulant petit à petit la corde : sans doute préoccupée par l'angoisse d'arriver trop tard, elle chut à son tour et, s'agrippant comme elle pouvait à la corde, commença à glisser selon un arc de cercle sur le pont, jusqu'à se retenir par les pieds à la rambarde bâbord. Elle faillit se relever avant d'apercevoir une vague qui balayait à nouveau le pont : se plaquant contre le sol, elle tira de toutes ses forces contre la corde. Pendant quelques instants, elle fut submergée, puis l'eau s'évacua enfin et elle se releva prestement, avant de se diriger vers Jorus.

Celui-ci semblait un peu plus conscient, mais à la dérive : le Sindel avait disparu et l'aventurier était tombé sur le sol : elle le réceptionna juste à temps avant qu'il ne risque une chute mortelle dans les eaux.

« Attrape ! » hurla-t-elle dans la tempête en lui agitant devant le nez les quelques décimètres de corde qui restaient disponibles. Prenant les devants, elle l'aida à se relever en lui proposant sa main puis, à deux, ils commencèrent à remonter le pont, s'appuyant l'un sur l'autre lorsqu'une vague déferlait sur le vaisseau. Ils parvinrent cependant finalement à atteindre la trappe menant à la cale et à s'y engouffrer sans tarder. Tous deux profitèrent d'un repos bien mérité, attendant à l'abri, la situation globalement revenue sous le contrôle du capitaine et de son équipage.

...
Modifié en dernier par Yurlungur le dim. 6 oct. 2019 18:11, modifié 1 fois.

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Asterie
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Asterie » ven. 4 oct. 2019 10:42

Fourbue par l’aide un peu improvisée que j’ai apporté à ces marins dans le besoin, dont le regard paniqué, endolori, m’a semblé compter sur moi et mon initiative, je ne remarque qu’à peine la sortie heureuse de la zone de troubles. Je poursuis encore, plusieurs minutes durant, ma lourde tâche d’aide aux blessés, lavant et pansant les blessures grâce au matériel fourni par leurs soins. Je suis aidée dans mon rôle par plusieurs autres qui imitent cet art que je ne maîtrise que peu, finalement. Ces blessures leur laisseront des marques, indéniablement. Des cicatrices indélébiles et profondes. Un souvenir d’horreur, une pluie de feu. Malgré tous mes efforts, trois d’entre eux périssent. Pour l’instant, car les plaies et blessures d’une vingtaine d’autres sont graves et ils sont loin d’être tirés d’affaire.

Le capitaine tire abruptement ses hommes d’un état second d’après catastrophe en distribuant des ordres d’action ou de repos. Une bonne chose, en soi. Un cadre bienvenu pour ces âmes à la dérive. Je m’approche finalement d’Yliria, et le dirigeant du navire nous aborde à notre tour pour nous remercier chaleureusement de nos interventions. Tous n’auraient-ils pas fait de même ?

La journée se poursuit, et chacun, semble dans un état second, œuvrant de manière mécanique à sa tâche. Je passe celle-ci auprès des blessés que j’ai aidés, les soutenant moralement dans leurs douleurs, leur donnant la conversation avec compassion et positivisme. Ceux-là s’en sont sortis. On a évité le pire, grâce à eux, sacrifiés pour la sauvegarde de tous, grâce à l’énergie des rameurs, au sang-froid du capitaine. L’on ne sort pas indemne d’une telle expérience, et chacun d’eux, tout comme moi, en sommes conscients.

Le lendemain, après une nuit agitée, quoique bienvenue pour le repos qu’elle apporte, alors que j’admire, pensive, le paysage, j’aperçois une structure sordide dans le désert, dont nous approchons pour décharger quelques caisses que le navire transportait. J’apprends via l’un des marins qu’il s’agit d’une sorte de bagne maudit, où étaient reclus les pires criminels du Royaume de Sarindel. Une sentence pire que la mort… Je n’en apprends guère plus, les mines sombres et le mutisme de l’équipage me dissuadant de poser davantage de questions.

Nous reprenons ensuite la voie des mers, longeant toujours ces côtes désertiques. En soirée, nous arrivons enfin à destination, dans cette baie décrite par la jeune semi-elfe. Des chaloupes sont mises à l’eau pour nous débarquer. Avant d’y accéder, le capitaine du navire s’approche de nous pour nous remercier une fois encore de l’aide apportée à ses hommes… à ses elfes, plutôt. Il nous remet à toutes deux un présent, sous la forme d’une petite pierre gravée d’un étrange symbole incompréhensible. Elle me rappelle celles que j’ai déjà trouvées dans ce désert, au fond des cavernes de lave des elfes sombres du désert. Il affirme que l’équipage les ont choisies avec soin… J’ignore pourquoi. Il assure aussi qu’elles pourront nous être utiles. Serait-ce une sorte de monnaie d’échange locale, liée au Désert de Sarnissa ? Je préfère ne pas jouer les curieuses ingénues, et retiens pour plus tard mes questions, saluant le capitaine et l’équipage de mon plus beau sourire, reconnaissante.

Nous le quittons finalement, alors qu’il nous indique qu’un bateau semblable au sien passera par ici approximativement toutes les trois semaines. Un sacré délai, que nous devrons occuper avec le plus de pertinence possible. Notre tâche était complexe, et imprécise. Et complexe par son imprécision. Nous naviguons en eaux troubles, à la recherche de sombres secrets, d’associations délétères et martiales… Nous devons déminer une guerre.

À bord de la chaloupe, Yliria me demande pourquoi j’ai choisi de partir vers le désert, destination pour le moins inconfortable. Je hausse les épaules avant de lui répondre avec sincérité :

« Ce que j'y ai déjà fait peut nous servir à ouvrir quelques portes, je pense. Et puis, j'allais pas te laisser y aller toute seule. »

Je n’ai guère pensé à mon confort : nous avons une tâche à accomplir, grand bien fasse à ceux qui voulaient prendre moins de risques en restant dans une zone de confort : moi, rien ne me faisait peur, tant que je découvrais de nouveaux paysages, si hostiles soient-ils. Elle a l’air surprise de ma réponse, mais confirme qu’il est agréable d’avoir quelqu’un sur qui compter, me remerciant de l’avoir suivie. Elle assure que je pourrai également compter sur elle, frappant d’une main décidée son bouclier en ajoutant qu’elle se débrouille pas mal, malgré les apparences. Je souris pour rétorquer avec connivence :

« Ça, j’en ai pas le moindre doute ! »

Nous arrivons bientôt sur la berge, rompant notre conversation. Nous remercions rapidement les marins, un dernier au-revoir que je fais poliment, mais sans prononcer mot. Alors qu’ils reprennent la voie vers leur bateau, nous tournons toutes deux les yeux vers trois silhouettes qui nous attendent en haut d’une dune. Nous nous en approchons, Yliria semblant confiante, paraissant même les connaître. Il s’agit de trois elfes à la peau sombres, les elfes du désert, ceux-là même que nous sommes venus contacter. Au moins ça n’aura pas tardé. Elle les salue oralement, et je me contente alors de leur faire un respectueux signe de tête. La dernière fois que j’en ai vu de leur espèce, ils étaient plutôt agressifs… malgré toutes les tentatives de ma part de les ramener à la raison. C’est sur le cadavre de l’un d’eux que j’ai récupéré mon arc… Je me sens un peu mal à l’aise, finalement, de cette occurrence.

La petite me présente, ainsi que Daelyrn. Elle annonce, sans réserve, la situation complexe que l’on nous a présentée à Nessima. Je crispe un peu les mâchoires : est-ce vraiment la bonne stratégie, que de leur mettre ainsi une pression dès notre arrivée ? Elle conclut en affirmant vouloir éviter que cela se passe, et aider leur peuple. Une bonne note finale, en soi. Elle se tourne un instant vers moi pour me donner la parole, mais je ne trouve rien à dire, me contraignant à simplement opiner du chef à ses paroles, alors qu’elle termine en précisant vouloir rencontrer leur matriarche pour évoquer des solutions autres que la guerre. J’avoue être un peu déstabilisée par sa franchise très frontale et directe. J’aurais sans doute préféré que nous préparions cette rencontre plus en détail, mais n’y ai guère pensé. Souriant comme une potiche, je me contente donc d’opiner sans rien dire, prête à toute réaction de leur part… Et si eux, la guerre, c’est ce qu’ils souhaitent par-dessus tout ? Nous voilà marquée d’une intention fort vite dévoilée. Des portes qui se ferment ? Je le crains, même si j’espère qu’il n’en est rien. Elle semble les connaître, faisons-lui confiance.

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Jorus Kayne
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Re: La Flottille des Danse-Lame (Guilde des Danseurs d'Opale)

Message par Jorus Kayne » ven. 4 oct. 2019 13:40

D’habitude j’apprécie l’odeur et le goût de l’eau de mer. Ca me rappelle mes premières vraies années de libertés à voguer sur les océans, l’air marin s’insinuant dans mes narines et faisant onduler mes cheveux alors que je détaille l’horizon sur la proue du navire. En revanche, ce que j’aime moins c’est cette eau qui s’infiltre dans mes poumons et le sel qui m’irrite la gorge alors que je recrache le tout en toussant à de multiples reprises. Je reprends conscience, enfin presque. Tout tourne autour de moi et le roulis n’y est pour rien. C’est comme si le navire tournait sur lui-même. Je saisis quelque chose effleure ma main. Après coup, il s’agit d’un cordage le long de la rambarde. Sa présence me permet de me relever sans trop de difficultés, en revanche rester sur mes jambes est un tout autre problème. Le tangage naturel du bateau, doublé avec celui que je subis dans ma tête, est trop pour moi. Les sens complètement perturbés, je retombe sur le pont dans les secondes où je lâche le cordage, me forçant à le chercher de nouveau. Je suis une nouvelle fois malmené par une vague qui traverse le pont et m’aurait emporté hors du navire sans la présence de cette corde salvatrice.

(Je ne peux pas rester ici ! A ce rythme-là je vais finir par me faire emporter si le navire se fait percuter violemment.)

Sans être un excellent nageur je suis capable de rester hors de l’eau, cependant dans mon état actuel je n’ai aucune chance de survie si je finis à la flotte. Il faut que je regagne un lieu plus sûr. Dès que le bateau retrouve un semblant de stabilité, je profite de l’occasion pour me rendre à la cabine menant aux étages inférieurs. C’est sans compter sur mon sens de l’équilibre qui me donne l’impression d’être complètement retourné. Mon corps suit d’ailleurs les indications de mes sens et je me retrouve les quatre fers en l’air, la tête raclant le pont. Sans l’aide d’un support bien ancré au navire, je risque de passer par-dessus bord à la prochaine vague.

"Attrape !" Hurle une voix familière dans le tumulte de la tempête.

Mes mains brassent l’air autour de moi et je parviens à mettre le grappin sur un bout de corde. Je trouve par la suite la fine main mais ferme de Yürlüngür. Ensemble nous parvenons à remonter le pont en se soutenant l’un l’autre lorsqu’une vague nous percute, même si dans mon état je suis assez proche du boulet de bagnard pour la jeune fille. L’idée qu’elle soit ici m’incite à croire que la voile ouverte n’est plus un problème. Je puise dans mes retranchements, repoussant mes limites ainsi qu’un relent du fond de mon être, parvenant grâce à Yürlüngür à atteindre les niveaux inférieurs. Je me laisse guider tandis que je suis malmené d’une cloison à une autre du navire par le tangage du bateau. Nous atteignons finalement une zone où nous pouvons prendre du repos en attendant la fin de la tempête. Dans mon état, je ne suis d’aucune aide pour les marins et le capitaine qui doivent se démener pour garder le navire à flot. Durant cette nuit les nausées se font plus fortes, m’obligeant à deux reprises à vomir jusqu’à la bile. Dans mon état je suis incapable de diriger mon corps pris de mouvements involontaires. Je ne peux qu’espérer que personne ne sera inquiété par mes rejets stomacaux, en particulier Yürlüngür qui est restée non loin de moi.

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