Saadi traduit mes paroles avec emphase à l’éleveur qui ne se départit pas de son large et radieux sourire. Il se dit heureux de nous accueillir dans son humble élevage et prend le temps de réfléchir, observe ma jument un instant puis se tourne vers Saadi pour lui faire part de sa décision. Ses dromadaires seront des montures bien plus fiables et plus adaptées aux conditions difficiles des terres arides qui nous attendent. Il nous propose en guise de transaction ni plus ni moins qu’un échange entre Blanchette et ses Méhara ; ses dromadaires de course, se hâte de préciser Saadi devant mon air perdu. Il prendra soin de ma jument pendant mon voyage et estime que cela devrait être une caution suffisante pour s’assurer du retour de ses bêtes.
« Soyez assuré que je prendrais le plus grand soin de vos montures Karazine. Après tout, de leur bien être dépend notre survie. »
Il me demande cinquante yus pour la nourriture et les soins. Sam hoche la tête pour me signifier son accord et signe quelques mots à transmettre à l’éleveur pour veiller à un meilleur confort.
« Un prix tout à fait raisonnable. Mon camarade souhaite que vous preniez les fruits dans la charrette pour notre jument, elle en raffole. »
Son sourire seul suffit à comprendre sa réponse et le clin d’œil qu’il échange avec Sam vaut toutes les traductions du monde. L’affection récente qu’il porte à notre jument est communicative, pas besoin de Saadi pour être certains que Blanchette se régalera avec ses pommes.
Les deux hommes nous invitent à rejoindre l’enclos et l’éleveur nous présente ses dromadaires. Ils sont grands, gigantesques même, et en voir en vrai est tout simplement fantastique. L’éleveur nous explique que ses animaux sont faits pour parcourir de longues distances et peuvent aller très vite, très différent de notre jument faite elle pour transporter des charges lourdes. Ils sont plus grands, plus fins et plus athlétiques que les dromadaires de bât utilisés par ici, autour de Kamareth. Même si nous sommes petits tous les deux, il nous conseille quand même un animal par voyageur afin d’éviter de fatiguer les bêtes.
Après quelques minutes de discussions et de questions quant à la docilité de ces bêtes envers des voyageurs novices, nous trouvons notre bonheur avec deux jeunes dromadaires nés d’une femelle particulièrement patiente et réactive. Ses employés préparent les selles et passent du temps avec nous afin de nous montrer comment les faire se courber afin de monter et descendre sans risques de chutes, comment les faire avancer et s’arrêter. Karazine nous conseille d’attacher le plus jeune, celui que montera Sam, derrière l’autre à l’aide d’une simple corde. Il est habitué à suivre mais n’acceptera pas mes ordres, lancés depuis un autre dromadaire.
Nous nous exerçons et ne partons qu’une fois sûrs de nous et de nos nouvelles montures. Il est plus aisé que je pensais d’harnacher tout notre attirail sur les dromadaires, les sacoches et les ballots qui pendent ne semblent même pas les gêner.
Je remercie Karazine une dernière fois pendant que je le paye et il nous souhaite bonne chance pour notre voyage, espérant qu’on reviendra après être tombés amoureux du Kebaker.