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par Valhoor » lun. 13 janv. 2020 15:11
Nausée.
Le regard dans le vague, le ventre retourné, la mine pâle et le cœur au bord des lèvres, je me suis traîné hors de l’auberge où je loge. Pour un renouveau, on est bien loin du pas vaillant attendu, de la mine pleine d’espoir et du regard déterminé. C’est tout juste si je ne traîne pas la patte en marchant cadavériquement vers ma destination. Et pourtant, la volonté y est. Le jour du renouveau, de la sortie de cet état pitoyable dans lequel je suis depuis trop longtemps. J’ai longuement réfléchi à comment m’en sortir, à vers quoi me diriger pour tourner la page. Reprendre mon métier d’avant ? Non. Je n’en ai plus le cœur. La vie de mendiant ne me sied guère plus. Marchand itinérant, coursier, messager ? Ça avait le mérite de me faire bouger, mais un peu trop aléatoirement, peut-être. Et ne pas savoir le but de mes missions me dérangeait. Aventurier ? Mercenaire ? Sans doute, mais j’avais besoin de sens, avant tout.
Aussi, c’est vers la milice que je me suis orienté. Vers une vie d’action, de périples, de violences, peut-être, mais au nom de la justice. Et c’est vers son vaste bâtiment à colombages et aux tuiles d’ardoises que je me traîne maintenant, prêt à en passer la porte. Je respire profondément, plusieurs longues inspirations, expiration, alors que j’approche de l’entrée. Je m’appuie sur l’embrasure. Ai-je fait le bon choix ? Seul l’avenir pourra me le dire. Et pourtant, l’hésitation me prend. Suis-je prêt à tourner la page ? à aller de l’avant ? Trois ans… Trois ans bordel. Trois ans perdus.
Une voix rude me tire de mes pensées.
« Oh, l’épave. Soit tu rentres, soit tu vas voir ailleurs si par hasard j’y serais pas, mais bloque pas le passage comme ça ! »
Un milicien, abrupt, arborant un bouc aussi noir que la nuit, m’interpelle. Je secoue la tête, abruti un instant.
« Heu… Pardon oui. Je vais rentrer. »
Mais avant, je lui ouvre la porte et la lui tient pour qu’il me précède, poli. Il renâcle en s’exécutant sans l’ombre d’une hésitation, et je le suis. Cette brute peu amène m’aura peut-être donné le coup de pouce qu’il me fallait.
Me voilà donc dans le bâtiment de la milice kendrane, haute en renommée pour ses faits d’armes et résolutions d’affaires criminelles à en faire pâlir la garde locale. Peut-être qu’un jour, moi aussi j’aurai mon nom dans ses registres, haut placé dans l’estime de chacun. En attendant, je dois bien l’y noter quelque part, et je m’approche d’un bureau d’accueil derrière lequel un homme d’arme portant les couleurs de la milice, bleu et blanc, s’affaire.
« Belle journée, sieur. Je viens prendre les informations sur une inscription au sein de vos rangs. Valentin-Horace d’Orme, pour vous servir. »
J’opine du chef dans un bref salut, attendant la réponse de l’homme.