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Le gros commerçant, fulminant, essaya tout d'abord de comprendre la scène. Une pointe d'incompréhension se mêla à la colère quand il reconnut l'uniforme de ceux qui étaient en train d'empoigner sa fille, à savoir celui de la milice.
Ses yeux de porcins se posèrent ensuite sur Adam et se plissèrent :
« Vous …. Que veut dire tout ceci ?! Lâchez-la ! »
Un des miliciens prit la parole , dardant sur Yzrouel un regard implacable :
« Sir, il s'agit donc de votre fille ? Nous l'avons contrôlé avec en sa possession tout un ensemble de bijoux volés, tout en affirmant d'ailleurs qu'il s'agissait des siens. Peut-être êtes-vous au courant de quelque chose ? »
Nizra n'était plus capable de parler, elle sanglotait avec force, jetant à son père des regards implorants. Ce dernier semblait soudain frappé de l'incompréhension la plus totale.
« Volés ??? M'enfin mais.. Vous êtes sûr ? »
« Certain. La description de chaque bijou correspond parfaitement. Donc je vais reposer ma question, êtes-vous au courant de quelque chose ? »
« Non.. Non bien sûr que non... Mais... Enfin cela n'a aucun sens ! »
Il tourna alors un regard soupçonneux vers Adam :
« D'ailleurs qu'est ce que vous faites ici vous ?? »
« J'ai croisé par hasard votre fille près des docks, vu la dangerosité de ce quartier je lui ai proposé de la ramener à l'auberge. J'ai d'ailleurs bien fait car deux gredins nous sommes ensuite tombés dessus. »
Le commerçant bedonnant semblait abasourdi :
« C'est vrai ça Nirza ? »
Cette dernière, toujours secouée de sanglots, hocha faiblement la tête en signe d'affirmation.
« Mais que faisais-tu là-bas à une telle heure !! »
Bien évidemment que la donzelle n'allait pas lui raconter la vérité . Adam se tourna vers les deux miliciens :
« Permettez ? »
Il passa ensuite une main sur le dos d'Yzrouel et l'amena quelques pas plus loin. Ce dernier se laissa faire, méfiant, toujours sa baguette à la main. Une fois éloignés de quelques mètres, le marchand, traits crispés, s'adressa au jeune mage :
« Vous... Je vous jure que si vous avez quelque chose à voir avec tout ça.... »
Adam chassa le propos d'un revers de main agacé et répondit d'un ton mortellement sérieux :
« Ecoutez, il y a quelques minutes j'ai sauvé votre fille une première fois. Je peux le faire une seconde fois mais cela ne dépendra que de vous. »
Izrouel, toujours en état de choc écarquilla d'abord les yeux, puis les fronça :
« Je vous vois arriv.... »
Le jeune noble le coupa :
« Je connais la caserne, il ne s'agit pas toujours de cellules individuelles. Les gardiens sont en général peu regardant sur ce qu'il se passe à l'intérieur, et vous vous doutez que les détenus n'ont pas toujours la visite de femme comme votre fille. »
Adam laissa le temps à l'imagination d'Yzrouel faire le reste. Une expression d'horreur authentique apparut sur son visage.
« Nous avons des contacts au sein de la milice.. Ou plutôt père... A de nombreux contacts au sein de la milice. D'anciens collègues et subordonnés. »
Mieux valait extrapoler la chose, afin d'afficher une plus grande impression de puissance.
« Laissez-nous faire, et votre fille sera libre ce soir même, sans aucune poursuite judiciaire. »
Plusieurs expressions passèrent sur le visage du commerçant, allant de la méfiance puis à la résignation. Il se contenta de dire, abattu :
« Faites.. J'imagine que cela ne sera pas gratuit. »
« Bien sûr, Père s'expose en agissant ainsi sur les affaires de la milice. Mais pour vous il fera peut-être un prix. Rejoignez le juste chez nous après-demain, pour le dîner. Il vous fera parvenir une missive avec notre adresse et vous pourrez discuter de cela en tête à tête. Ce sera aussi l'occasion de revenir sur sa proposition si cela vous dit. »
Yzrouel remua silencieusement la bouche, en proie à d'intenses réflexions, visiblement perdu. Rapidement cependant, il baissa la tête et hocha d'un air résigné.
« Bien.... Faites. »
Ca y est, le poisson était ferré.
« Laissez-moi faire. »
Tous deux rejoignirent les deux miliciens, qui tenaient toujours une Nirza sanglotante.
« Au fait je ne m'étais pas présenté messires, Adam Von Demorlys, puis je m'entretenir avec vous quelques minutes ? »
Les deux miliciens hochèrent lentement, lâchèrent la greluche et suivirent le jeune mage un peu à l'écart.
«Tout s'est bien déroulé, vous avez été parfaits. »
Ils échangèrent silencieusement, et Adam leur glissa une bourse tout en prenant soin à ce que cela soit un peu visible. Histoire de rajouter plus de véracité à la supercherie. Les deux miliciens lui rendraient ensuite la bourse de toute façon.
Quelques minutes plus tard, les deux soldats reprirent leur ronde, et Adam rejoignit le commerçant et sa fille, restés devant l'auberge.
Nirza était à genoux au sol, et sanglotait sur l'épaule de son père, qui également baissé l'étreignait.
« Ma fille c'est fini. Tout va bien ».
Mais lui-même avait l'air aussi secoué que cette dernière.
Adam baissa les yeux sur la baguette qu'Yzrouel avait maintenant glissé à sa ceinture.
« Puis je voir ? »
Ce dernier ne comprit pas de suite, puis hocha distraitement. Il lui tendit ensuite la baguette d'un air méfiant, étreignant toujours sa fille de son autre main. Adam l'examina. L'objet était très simple, pas forcément de bonne qualité mais éveillait son intérêt. Le jeune mage voulait désormais développer ses talents dans le domaine de la magie, et pour cela un catalyseur s'avérait bien utile. Avoir manqué se faire rosser par un mendiant rachitique et alcoolisé avait suffisamment heurté son orgueil comme ça.
Le marchand bedonnant prit la parole, d'une voix teintée d'amertume :
« Combien ce … Service me coûtera t'il. ..»
Adam ne répondit pas de suite, continuant à faire tourner la baguette entre ses doigts fins. Quelques secondes il répondit, en dressant légèrement l'objet :
«
Vous verrez cela directement avec père. Mais me concernant, pour avoir sauvé une première fois votre fille... Je me contenterais juste de ceci. »
Yzrouel ouvrit la bouche comme pour protester, mais se tût quand Adam posa une main apaisante sur son épaule. Un sourire totalement dépourvu de joie se forma sur le visage de ce dernier :
« N'ayez crainte messire, dame. Vous êtes désormais sous la protection de la maison Demorlys. »
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