La Zone d'Embarcation

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Yuimen
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La Zone d'Embarcation

Message par Yuimen » ven. 5 janv. 2018 10:43

La zone d'embarcation

Image
Grand aynore Sindel
"La compagnie Air Gris vous souhaite un bon voyage sur ses lignes"

C'est ici que vous embarquez pour d'autres villes. Voyages en cynores ou aynores.

""La compagnie Air Gris espère que vous avez fait un agréable voyage à bord de son cynore""

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Yliria
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Re: La Zone d'Embarcation

Message par Yliria » dim. 21 avr. 2019 21:06

<< Auparavant

Dépaysement

Ce fut donc deux jours plus tard que Nyllyn et moi nous présentâmes à la zone d’embarquement, située légèrement à l’écart de la ville. C’était une grande plaine lisse sur laquelle se trouvait un immense bâtiment qui nous fut désigné comme le fameux Aynore. Ancré au sol par de grandes armatures, il était impressionnant, couvert de vitres, et brillait dans le soleil matinal. En apercevoir de loin était une chose, le contempler depuis la piste où il était ancré en était une autre. Si le dessous ressemblait à la coque d’un bateau, la ressemblance s’arrêtait là et je n’étais même pas capable d’identifier vraiment de quelle matière il était fait. Mon amie jubilait à mes côtés, encore plus surexcitée qu’à l’accoutumée.

Plusieurs Sindel semblaient vérifier les réservations et nous virent approcher, nous saluant aimablement, me lançant tout de même un regard curieux. J’avais convenu avec Nyllyn que le masque que je gardais dans mon sac ne quitterait pas mon visage tant que nous ne serions pas arrivés à Kers. Mes vêtements et mon armure masquaient aisément ma peau sombre, seul mon visage était vraiment trop visible. Elle trouvait ça ridicule, mais j’avais entendu suffisamment de mise en garde concernant la haine des Sindeldi envers les Shaakts, je préférais ne pas ajouter une difficulté supplémentaire à ce voyage déjà fort complexe et dangereux. Ce que Nyllyn n’avait toujours pas l’air de comprendre d’ailleurs.

- Je ne vois pas en quoi ce serait si dangereux. On va seulement faire des recherches, probablement dans des bibliothèques poussiéreuses en plus.

Nous étions en train d’attendre la permission de monter à bord, entourées d’autres voyageurs, dans un brouhaha quelque peu bruyant, couvrant un peu nos conversations.

- Nyllyn… avant ça, il faut déjà arriver à Kers, ce qui n’est pas encore fait. Et ensuite, je ne pense pas qu’un objet de cette puissance nous attendra sagement avec une pancarte « servez-vous ». Il y aura des protections, peut-être même que d’autres seront à sa recherche. Ou qu’elle est défendue. Et ça, c’est seulement si on trouve un indice. Et je ne te parle même pas de déambuler dans une ville inconnue, on ne sait pas ce qui peut nous tomber dessus.

- Tu es très négative.

- Réaliste, pas négative. Crois-moi, débarquez dans une ville que tu ne connais pas, ce n’est pas toujours agréable. Et je préfère envisager le pire, ça permet de l’éviter justement.

- A t’entendre, tu as l’habitude de t’attirer les ennuis.

- T’as pas idée…

Le sourire affiché en lui disant cela lui fit tout de même hausser un sourcil mais je n’eus pas le temps d’ajouter quoi que ce soit, l’un des Sindeldi annonçant que nous pouvions monter à bord et que l’appareil décollerait dans peu de temps. Flanquée de mon amie, sac sur le dos et esprit préparé, j’entrai donc au cœur de l’Aynore, surprise par l’intérieur qui, loin d’être austère, était richement décoré. Chaque passager ou famille avait sa cabine réservée. Je partageais la mienne avec Nyllyn, bien évidemment, et nous nous installâmes immédiatement, profitant d’un confort inattendu. Comme deux enfants en quête d’aventures, nous avions alors décidé d’explorer un peu le bâtiment avant son départ, traversant couloirs et coursives pour finalement arriver dans une immense salle servant de passerelle d’observation. D’immenses vitres permettaient d’admirer le paysage de tous côtés et je sus tout de suite que nous passerions la majorité du trajet ici, à observer le paysage. On nous annonça que le départ était imminent et ce fut dans un état de surexcitation que nous nous approchâmes de l’avant de l’appareil qui pointait vers l’étendue océanique que nous devions traverser.

Une secousse secoua l’appareil qui commença doucement à s’élever du sol. Plus le sol s’éloignait et plus Nyllyn semblait au bord de l’explosion à cause de son excitation. Et lorsque l’Aynore se mit à avancer, le paysage défilant sous nos yeux, je fus moi aussi prise d’une certaine excitation à la vue de l’étendue nuageuse que l’Aynore dépassa. Le sentiment de naviguer sur une mer de nuage était incroyable. Dommage qu’il soit impossible de sortir, j’aurai sans doute tenté de toucher l’un des nuages pour connaître la sensation.

Le voyage durant une quinzaine d’heures, il fallut s’occuper et, après avoir déambulé dans tout le vaisseau et avoir passé un moment dans la salle d’observation, apercevant une créature ailée au loin sans pour autant parvenir à l’identifier, quatre heures seulement étaient passées et nous étions déjà à court d’idées pour passer le temps.

- Quand même, on aurait dû y penser… Tu penses qu’on peut s’entraîner ?

Je la regardai comme si elle était devenue folle.

- Mais ça va pas ? On est censées rester discrètes Nyllyn, discrètes !

- Je demande juste ! On s’ennuie ferme !

Je levai les yeux au ciel. Bientôt, elle demanderait à retrouver un moment de calme après une suite d’événements s’enchaînant sans cesse pour nous tenir occupées, mais en attendant, son air boudeur me fit soupirer et je lui proposai donc de trouver de quoi s’occuper en se joignant à d’autres passagers. Certains jouant aux cartes ou autres jeux plus atypiques. Nyllyn semblait attendre cela puisqu’elle se leva aussitôt et se dirigea vers un groupe hétéroclite qui semblait en pleine partie d’un jeu de cartes. Ils acceptèrent de l’intégrer à la partie, mais je restai à l’écart, préférant observer ce genre de jeu. Il y avait un Sindel, deux humains et un Taurion qui salua chaleureusement Nyllyn, ravi de voir une compatriote. Il y avait également une jeune Hironne qui les accompagnait, mais qui, comme moi, ne participait pas à la partie et qui s’approcha de moi avec un sourire engageant.

- Joli masque. On cache quelque chose ?

Elle n’y allait pas par quatre-chemins, c’était clair.

- On peut dire ça.

- Dommage, sh… semi-Shaakt, c’est ça ?

J’eus un léger mouvement de recul qui lui tira un sourire.

- Ne t’en fais pas, tout le monde n’est pas foncièrement contre les Shaakts, encore moins contre ceux qui n’en sont pas totalement. Sans indiscrétion, pourquoi aller au Naora si tu crains tant qu’on sache qui tu es ?

- Et bien… Affaire personnelle et demande de quelqu’un. Comment vous avez su ?

- Tes oreilles, elles dépassent un peu. Autant dire qu’un Sindel le verra tout de suite.

Je vérifiai en murmurant un juron. Soupirant, je laissai tomber l‘idée de rester discrète, relevant le masque sur le sommet de mon crâne puisqu’il était inutile face à la vision d’un elfe. Nyllyn aurait tout de même pu me le dire… le petit groupe me dévisage un instant avant de reprendre la partie de cartes. L’Hirionne sembla ravie, m’offrant un large sourire.

- Il aurait été dommage de cacher un si joli visage.

- Je n’ai simplement pas envie d’être ennuyée.

Ce n’était pas arrivé si souvent en soi. Mais les regards haineux et les chuchotements étaient parfois bien plus inquiétants qu’un type qui vous faisait du rentre-dedans.

- Si tu n’as rien à te reprocher tout ira bien. Oh, je m’appelle Julia et toi ?

- Yliria. Pourquoi vous allez au Naora ?

- Joli prénom, bien que la signification m’échappe. Oh, nous sommes des mercenaires, on nous a proposé un travail, et nous voilà à traverser l’océan. Ton amie semble s’amuser avec mes compagnons.

Effectivement, Nyllyn riait aux éclats, me tirant un sourire. Nous passâmes ainsi une partie du voyage avec la petite troupe, nous retirant quelques heures dans notre cabine pour profiter de quelques heures de sommeil avant d’arriver à destination où un autre vol nous attendrait. Au final, la première partie du voyage fut globalement calme et amusante.


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Kerenn
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Re: La Zone d'Embarcation

Message par Kerenn » sam. 6 juil. 2019 12:23

Ladite zone se trouvant en dehors de la cité, il me faut un peu plus de deux heures de marche soutenue pour y parvenir. Me dirigeant aussitôt vers le guichet d'Air-Gris, je ne peux m'empêcher de ressentir un plaisir diffus en retrouvant une autre membre de mon peuple, même si l'employée me dévisage d'un air discrètement horrifié tandis que je m'approche. Une réaction dont je ne me soucie plus depuis bien longtemps, habitué que je suis à engendrer un certain effroi chez ceux de ma race, aussi est-ce d'une voix aimable et dans notre langage que je m'adresse à l'Elfe Grise:

"Ma Dame. Je dois me rendre à Kendra-Kâr au plus vite, quand décolle le prochain Aynore?"

Prenant sur elle, la Sindel me répond dans la même langue avec toute la politesse distante qui constitue la marque des employés d'Air-Gris:

"Bonjour messire. Le prochain Aynore décollera dans une petite heure. Le prix du billet est de deux-cents quatre-vingts dix sept yus, souhaitez-vous un billet?"

"S'il vous plaît", lui réponds-je en sortant la somme requise de ma bourse et en la posant sur le comptoir. Si tout va bien je serai à Kendra-Kâr dans une demi-douzaine d'heures, mais y trouverai-je celui que je recherche? Rien de moins certain, la suite de ma quête pourrait tout aussi bien me prendre des mois s'il faut suivre sa trace à travers tout Yuimen; mais rien ne sert de s'en soucier pour l'instant, je verrai bien ce qu'il en est une fois sur place.

(HRP: yus retirés par GM9)

Si vous ne parvenez pas à trouver la vérité en vous-même, où donc espérez-vous la trouver?
Zenrin Kushu

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Relonor
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Re: La Zone d'Embarcation

Message par Relonor » lun. 6 juin 2022 14:38

Chapitre 16 - Derniers regards sereins avant de planifier la discorde.

VIII.1 Un retour remarqué sur la terre des mortels



Le temps de trajet vers Tulorim est d’une lenteur sans précédent. Trop impatient, Relonor ne cesse de regarder s’il arrive à destination, entre deux idées pour ses plans futurs. Infiltrer les différents organismes qui régissent la ville lui est sa priorité : gouvernement, pègre, commerce et force militaire. Quatre domaines qui lui apporteront des bénéfices importants. Cependant, avant cela, il lui faudra retrouver ses hommes avant toute chose.

Lorsqu’enfin le paysage aérien laisse place à une étendue bleue, puis à la terre ferme, l’excitation est à son comble. L’anyore des Ermansi est d’une beauté sans pareille et sa seule présence à bord lui apportera en soi du prestige.

(Peut-être est-il bon de ne pas trop attirer l’attention sur moi ! Œuvrer dans l’ombre m’apportera bien plus. Quoi qu’à la réflexion, je pourrais jouer sur les deux tableaux ! D’une part je passe pour quelqu’un de prestigieux et accroît ma notoriété ainsi que mon influence, tandis que de l’autre, j’use de tout ce qui est en mon pouvoir pour contrôler mes différents points de contrôles !)

Lorsque le vaisseau atterrit finalement et que Relonor en sort, de nombreux regard sont braqués sur lui, lorsqu’il est clair qu’il est l’unique passager de ce somptueux appareil.

"Mais…mais…qui êtes-vous et qu'elle est cette chose ? Ce n’est pas un appareil des Sindeldi !" Interroge un homme au milieu d’une foule d’une cinquantaine de personnes.

Tandis qu’à son approche, les hommes se méfient du shaakt en armure de guerre, celui-ci feint la politesse en hôtant son casque et s’approche de l’homme en question pour le saluer respectueusement.

"Vous avez l’œil très cher ! Ceci est une anyore des Ermansi. Un appareil qui permet de se rendre à une unique destination : l’île des elfes dorés, ainsi que le lieu de résidence des dieux ! Ce droit m'a été accordé après la défaite d'Oaxaca durant la bataille aux portes d'Oranan."

A cette réponse, la foule autour de l’elfe noir commence à rire de lui.

"L’île des dieux ! En voilà un elfe noir avec un sens de l’humour ! Et pourquoi pas le ventre d’une baleine ?" Ricane un homme dissimulé par les nombreux visages riant.

(Ne t’offusque pas pour si peu. Ils ne sont que des pantins sans utilités !)

"Je comprends votre méfiance, mais je suppose que vos propres yeux ne vous ont pas trompé. Si ce n’étaient des Sindeldi, qu’étaient les êtres à l’intérieur ?" Soulève Relonor.

"Il a raison ! Je n’avais jamais vu des êtres aussi beaux de toute ma vie ! Vous avez vu leur chevelure d’or ?" Déclare une voix féminine.

"Je ne vous en tiendrais aucunement rigueur. Je ne suis pas le seul à m’y être rendu, après la guerre contre Oaxaca. Vous apprendrez d’ici peu les nouvelles d’autres appareils de la sorte, apparus sur les autres continents !" Gardant son casque sous le bras, il esquisse brièvement un geste pour mettre fin à la conversation. "Si vous voulez bien m'excuser, je dois me rendre en ville." Il s’arrête un bref instant avant de demander. "Je crois que quelques connaissances à moi se trouvent en ville, mais je n’ai aucune idée de comment les retrouver. Vous savez quel est le meilleur moyen pour que l’on parle de moi dans toute la ville ?"

"Vous voulez dire autrement qu’en apparaissant dans un engin comme celui-ci ?" Demande une femme en ricanant.

"L’arène !" Lance un homme. "Faites un éclat dans l’arène et tout le monde parlera de vous."

"L’arène hein ? En voilà une idée intéressante !" Répond l’elfe noir en reprenant sa route vers la ville.


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Yliria
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Re: La Zone d'Embarcation

Message par Yliria » mar. 6 sept. 2022 22:47

<<Précédemment



Le lendemain matin, je sortis de la commanderie au lever du jour, Nyllyn marchant à mes côtés. La nouvelle de mon départ presque précipité ne l’avait guère réjouie, mais elle fut étonnamment compréhensive malgré tout.

- La vie d’officier et d’instructrice ce n’est pas fait pour toi, Yli. T’as besoin de botter des culs.

- Euh… d’accord. Merci, je suppose ?

Son rire et sa bonne humeur m’accompagnèrent tout le long du chemin jusqu’à la zone d’embarcation où nous patientâmes un moment avant d’enfin apercevoir qu’un Aynore partait pour Nirtim. Je soupirai déjà en entendant qu’il irait à kendra-Kâr et qu’il me faudrait en prendre un autre pour atteindre Oranan. Les trajets en engin volant c’était certes plus rapide qu’en bateau, mais les détours avaient quelque chose de plutôt frustrant. Ça et le fait de passer des heures à uniquement attendre pour avoir le droit d’embarquer pour attendre encore pour arriver à destination. Celui qui avait conçu ça était un tortionnaire sadique. Heureusement, Sorinion m’avait fait cadeau d’un livre le matin-même, avant que je ne parte.

- Un de mes préférés. Il relate les contes et légendes les plus connues de Yuimen. Il a été relié en très peu d’exemplaire et j’y tiens, alors tu fais en sorte de me le ramener, d’accord ?

- Je… je peux pas accepter ça.

- Prends-le Yliria. Et tâche de rentrer, hmm ?

Je l’avais remercié d’une manière loin d’être professionnelle en le serrant dans mes bras et le livre était soigneusement empaqueté dans mes bagages et je savais déjà qu’il occuperait mon temps lors des longues heures d’attente. Lorsqu’enfin je pus approcher du guichet, je saluai la vendeuse, une Sindel.

- Bonjour, un aller pour Kendra-kâr s’il vous plaît.
***
Achat d'un billet direction Kendra-Kâr pour 297 yus

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Cromax
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Re: La Zone d'Embarcation

Message par Cromax » mar. 6 sept. 2022 22:53

Intervention pour Yliria

L'elfe grise te regarde d'un air condescendant. Ta nature ne semble pas lui plaire.

"Voilà. Ca fera 297 yus." dit-elle d'un ton glacial.

Elle se permet même un commentaire, presque sympathique :

"Faites attention tout de même. Ils n'aiment pas les gens comme vous à Kendra Kâr."

Son ton, par contre, ne l'est toujours pas. Mais au moins tu as ton billet.

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Nhaundar
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Re: La Zone d'Embarcation

Message par Nhaundar » ven. 14 juin 2024 22:54

VIII 19 Le pouvoir de Tulorim

VIII 20 Les choses ne se passent jamais comme on l'entend


C’est assez rapidement que nous quittons l’enceinte de la cité, guettant un clairon, ou la présence d’un oiseau portant un message d’urgence aux gardes, à la sortie de la ville. Rien. Nous arrivons à nous éloigner de la menace, nous dirigeant vers la zone d’embarcation sur le dos de Mange-botte et une certaine euphorie s’empare de moi. Depuis que mes sentiments pour elle m’ont été révélés au village des lutins, cela provoque un tumulte profond, surtout que je la sens se serrer fort contre moi pour ne pas tomber, alors que mon cœur bat de plus en plus fort. Le Corgy géant doit inspirer une sorte de crainte, engendrant un besoin de réconfort.

(Merci Mange-botte !)

Nous éloignant de Tulorim, je relâche la pression sur les liens qui dirigent ma monture atypique. Ainsi nous prenons nos aises tandis que la tension de notre fuite se calme. Je profite de cet instant pour narrer mon périple après la découverte du message sur la pierre, qui se trouvait en réalité être une rune. Je lui parle de la potion de rétrécissement, du village des lutins et de l’ambiance particulièrement agréable et chaleureuse qui y règne. Puis j’évoque la disparition de la Penseuse, la sage du village et d’un problème d’ombre trop grande pour une certaine Dicka, avant d’expliquer aussi simplement que possible cet étrange problème. Je parle de mes investigations seules dans la demeure de la disparue, puis de ma course pour rattraper le cortège parti sans moi pour sauver Dicka. Je parle avec gaieté notre périple dans la forêt et les choses insignifiantes qui deviennent des dangers mortels pour les lutins. Enfin, je détaille le rituel pour séparer l’ombre de Dicka avant de revenir sur les quelques jours qui ont suivi. La grande fête, l’apprentissage auprès d’Antonio ainsi que la Penseuse. Je parle également de mes différentes péripéties, comme mon besoin d’aller dans l’eau pour ôter un produit très urticant, même si pour cela il m’a fallu courir nu dans le village.

Bref, je ne cesse de parler des bons moments que j’y ai passés, avant qu’un blanc ne s’installe. J’ai également appris au cours de ce séjour, la présence de sentiments amoureux pour l’elfe qui se situe derrière-moi. Je cherche les mots pour ne pas la choquer, ni la mettre dans une situation de malaise entre nous. Je prépare mon discours, ma cour diraient d’autres, la manière d’aborder les propos, les amenant les uns après les autres dans un enchaînement calculé. La zone d’embarcation est en vue, il est temps de se lancer.

"Je…" Fais-je avant d’être interrompu.

"Alors comme ça…tu…tu as passé un bon moment si j’ai bien compris !" Me coupe-t-elle sur un ton presque froid, du moins c’est ce qu’il me semble.

Ignorant la raison de cette attitude, je préfère attendre avant de me dévoiler.

"Oui c’est…c’est ça." Dis-je un peu déçu de voir mon courage durement rassembler se disperser, m’obligeant à un nouvel effort. "J’aurais aimé que tu sois là pour…le voir pour partager ce moment. C’était…très rafraîchissant !""

"Partager ce moment ? Rafraîchissant ?" Reprend-elle avec une pointe de colère dans la voix qui naît. "Faire mumuse avec ces saletés de lutins qui ne méritent qu’un bon coup d’pied c’est en dehors de mes capacités !"

"Ne sois pas si catégorique ! Les lutins sont bien différents de ce qu’on croit, tu sais ! Et pourquoi tu t’énerves autant ?" Fais-je curieux de ce changement d’attitude si brusque.

"Arrête-toi." Déclare-t-elle d’une voix juste assez audible.

"De quoi ?" Lui dis-je, peu certain d’avoir bien compris.

"J’ai dit…ARRETE-TOI !" Hurle-t-elle de colère dans mon dos, s’assurant que cette fois-ci, le message est bien passé.

Je m’exécute et pensant qu’elle souhaite simplement que l’on s’arrête un bref instant, elle descend du chien pour commencer à partir, avant de revenir vers moi qui suis descendu à mon tour. Je vois dans son attitude que quelque chose de terrible l’a profondément marqué. Serait-ce son séjour en cellule ?

"Sylve qu’est-ce que tu essaies de me dire, que s’est-il passé ? Tu peux tout me dire tu sais." Lui dis-je en descendant à mon tour de ma monture qui elle, regarde les oiseaux passer tout près.

"Tu l’ignores ?" Me demande-t-elle.

"Quoi donc ?" Fais-je curieux, posant une main réconfortante sur son épaule.

"De ce qui s’est produit durant ton séjour ici, pendant que tu t’amusais gaiement !" Enchaîne-t-elle, le froid revenant dans sa voix et chassant ma main de son épaule.

"Je t’écoute." Dis-je simplement, me jurant de trouver une solution à son mal-être.

"O…Omyre a attaqué Oranan !" Me lâche-t-elle dans un sanglot étouffé.

La déclaration me fige sur place. Tout mon corps se raidit et il me faut un peu de temps avant de parvenir à penser correctement.

(Oranan ? Attaqué ? Par les dieux !)

"Comment ça attaqué, raconte-moi !" Fais-je en la forçant de capter son regard.

Elle se débat de nouveau contre moi. Ne voulant pas la forcer, je préfère abandonner l’idée de la voir face-à-face.

"Omyre a assiégé Oranan avec une immense armée dans le but de conquérir la cité. Une armée s’est levée contre, mené par le roi de Kendra Kâr." Répond-elle d’un ton neutre, dénué de d’émotion. "Des humains, des elfes, des nains, même des semi hommes !" Continue-t-elle en lâchant un petit rire de surprise devant cette dernière révélation. "Puis elle est apparue. Oaxaca, elle est venue avec son immense Dragon."

Ce nom, ce simple nom me donne un effroi glaçant, comme si chaque partie de mon être était terrifiée rien qu'à entendre ce nom. Je revois mes longues années de souffrance à Omyre et toute cette peine infligée aux plus faibles dans le seul but de séduire leur reine.

"Le Dragon a détruit les remparts de la cité." Reprend-elle. "Tous ceux qui s’y trouvaient ont été broyés par ses pattes ou les décombres qu’il a engendré. Mais il a fait bien pire que cela !"

Je m’arrête. Tout mon corps est tenu en alerte, attendant le moindre mot sortant de sa bouche. Je suis suspendu à ses lèvres et chaque déclaration me donne l’impression de défaillir.

"Le Dragon a usé d’une magie…effroyable. Il a englouti la quasi-totalité des âmes présentes, ennemis comme alliés. Il n’y a eu…il n’y a eu qu’une poignée de survivants, si ce n’est les elfes plus résistants ou protégés par une magie inconnue."

Je n’ose imaginer ce qu’elle ressent. Elle ne semble avoir eu que des informations rapportées, ce qui expliquerait sa présence ici. Jamais elle n’aurait quitté sa patrie alors qu’elle a besoin de tous ses soldats pour se défendre, même si c’était pour venir me chercher. Ainsi, elle a passé tout ce temps dans les geôles de la milice de Tulorim, tandis que les siens se faisaient massacrer, incapable de retourner chez elle avant mon retour. Lentement, j’approche une nouvelle fois la main, espérant qu’après ces révélations, elle accepte de se laisser réconforter.

"Sylve, je…" Mes mots s’arrêtent ici. Lorsque ma main la touche, une véritable opposition s’installe.

"NE ME TOUCHE PAS !" Hurle-t-elle en me repoussant une nouvelle fois, mais me faisant enfin face-à-face. Ses yeux prennent les prémices d’une tristesse on ne peut plus palpable. "Je… Ma mission finie, je suis partie te chercher et c’est à mon arrivée que j’ai eue vent du blocus entourant Oranan. Plus un navire flottant ou volant ne s’y rendait. Je suis venue pour toi au lieu de défendre ma patrie. Non seulement j’ai croupi dans ce trou à rats pendant que mes proches se faisaient décimer, mais toi tu…tu jouaient avec des lutins ! Tu prenais du bon temps pendant que…" Les larmes se mettent à couler alors qu’un mélange de tristesse et de colère se mêle dans le regard qui m’est adressé. "J’aurais dû mourir avec les miens et…et…et j’aurais préféré que toi aussi tu sois mort, plutôt que d’apprendre que tu prenais du bon temps !"

"Tu…tu ne le penses pas." Fais-je faiblement. Je sais qu’elle agit sous le coup des émotions, mais ses propos n’en restent pas moins douloureux.

"LAISSE-MOI ! JE NE VEUX PLUS TE VOIR ! PLUS JAMAIS !" Hurle-t-elle de nouveau, alors qu’elle prend la direction des embarcations, les larmes ruisselant sur son visage.

Je la regarde partir avec une terrible douleur au cœur. Ai-je mal agi ? Je ne suis pas responsable des actes d’Omyre, ni de la magie du Dragon et ce n’est pas moi qui l’ai incité à venir me chercher. Rien ne m’oblige à ressentir de la culpabilité. Pourtant, c’est bien cette tornade insidieuse de la responsabilité qui se déchaîne en moi. Je ne vois plus Sylve. La tête basse, je ne perçois le sol plus que je ne le regarde réellement. Je visualise mille scénarios. Ce que j’aurais pu faire, ce que j’aurais pu dire, tant avant d’accepter la requête des lutins qu’en ce moment. Et surtout, qu’est-ce que je fais à présent ? Où vais-je et pourquoi ? Dois-je repartir à Oranan et sombrer en voyant les décombres de la cité en plus des morts incalculables ? Moi qui ai juré de la défendre, j’ai passé mon temps à m’amuser en compagnie des lutins. Suis-je en droit d’y retourner ? Dois-je simplement me rendre à la milice de Tulorim pour expier mes fautes ?

Un mouvement sur mon bras me ramène à la réalité. Mange-Botte commence à s’impatienter et tire en avant, peut-être pour poursuivre le chemin. Je ne sais pas depuis combien de temps je suis là à me morfondre et Sylve n’est même plus dans mon champ de vision. En regardant Mange-Botte, je me dis que Tulorim n’est finalement pas une bonne option. Il serait une source de grand intérêt et de conflit. Au mieux, il finira dans une cage à l’abri des regards dans la cave d’un riche homme avide de possession unique et au pire, il finira mort. Un mercenaire préférant le tuer plutôt que de laisser un rival l’obtenir. L’embarcation des Sindeldi est finalement la meilleure option. Je remonte en selle et pour Mange-Botte, au moins pour lui, je reprends la route, une balafre irrémédiable sur mon cœur. Si seulement la magie pouvait la soigner.

(Je crois que...j’ai quelque chose comme ça.)

Je fouille dans mon sac pour y retrouver l’orbe émotif qui se teinte d’une couleur grisâtre tournoyante et se mêlant à du pourpre, ainsi que ma boule à neige. En la secouant, je revois ma première rencontre avec Sylve. Bien que la revoir me ramène à notre dure séparation, je me sens un peu mieux, plus serein, ma peine légèrement atténuée. Hélas, lorsque je quitte les yeux de mon objet, la douleur revient de plus belle, une lame insidieuse qui me perce le cœur. Il ne me reste plus qu’à me plonger sans cesse dans ces souvenirs heureux, qu’il s’agisse de mes moments avec Sylve ou bien ceux en compagnie des lutins.

J’arrive ainsi jusqu’à la zone d’embarcation, la tête plongée dans ma boule à neige, ne levant le regard que pour ne pas dériver de ma destination. J’entends bien que l’on me parle, mais les mots ne trouvent pas le chemin jusqu’à mon esprit. Il est certainement mention de payer pour le trajet de toute manière. Je ne me souviens plus comment je l’ai obtenu, mais je me rappelle la dernière fois que j’ai fouillé mon sac, que je dispose d’un bon pour voyager gratuitement. Avec regret, je laisse ma boule à neige miraculeuse pour retrouver mon bon et le tends, sans pour autant prêter attention à ce qu’on me dit pour rapidement retrouver le confort émotionnel de mes objets magiques. C’est à peine si je perçois qu’on me laisse passer pour pénétrer à bord de l’Anyore.

Je me laisse guider par le personnel qui nous conduit, moi et Mange-Botte là où lui sera le mieux logé. Je reste un petit moment avec le Corgy, le temps qu’il s’habitue à cette nouvelle expérience, puis je retourne en cabine. Sachant qu’un voyage en mer prend plusieurs jours, je compte m’installer à peu près confortablement afin de contempler ma boule à neige pour le reste du voyage, peu importe où nous allons.

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