Manoir Desirelle

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Yuimen
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Manoir Desirelle

Message par Yuimen » mar. 12 avr. 2022 13:18

Manoir Desirelle

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La demeure de la Vicomtesse Oryanne Désirelle est un immense manoir au centre de la ville, entourée d’un magnifique jardin constamment entretenu avec belles fontaines, statues et allées couvertes d’arches vertes.

La richesse du lieu est largement étalée, autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. Meubles de bois de luxe, tapisseries immenses, des tapis aux dorures épaisses, des tableaux et bibelots valants une fortune. Pour exposer sa richesse la Vicomtesse n’hésite pas à organiser chez elle des fêtes où sont invités les habitants les plus riches de la ville ainsi que des nobles venant de tout le royaume. Y être invité est considéré comme un honneur tant les soirées de la Vicomtesse ont bonnes réputation où on peut y déguster les boissons et les mets les plus raffinés qui transitent par Haenian.

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Haple Mitrium
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Re: Manoir Desirelle

Message par Haple Mitrium » mar. 14 janv. 2025 17:08

(((Dans les épisodes précédents...:
1: Haple est bannie d'Anorfain pour avoir, sous le coup de la colère, tué sa mère à l'enterrement de son père et se retrouve à l'Est des Duchés..

2: Ses compagnons de voyage pensent que son arrivée dans le duché des montagnes la place en grand danger, et que certaines personnes sont à sa recherche.

3 et 4: Haple est capturée en chemin vers Beauclair par deux puissantes magiciennes , les Soeurs Nétone et Nacota(PNJ). Celles-ci lui font perdre connaissance en l'intoxiquant à la Douce Féérie.

5 : Haple se réveille au Couvent des Soeurs du Saint Livre avec un mal de crâne carabiné et aucun souvenir de comment elle est arrivé là: Quid des évènements à Beauclair! La Soeur Nétone lui révèle qu'elle la croit être une "Elue" et qu'elle l'ont conduite au couvent pour sa protection. Leur suspectant des intentions plus sombres, Haple prend la décision audacieuse de joindre les rangs des religieuses pour les espionner.

6 et 7: Haple découvre que les Soeurs Nétone et Nacota mènent des expériences suspectes. Haple rejoint le rang des Collecteuses, ces Soeurs qui sillonent le monde à la recherche de commodités utiles au Couvent, afin de les pousser à mettre la lumière sur leurs agissements.

8: Aux côtés de la la Soeur Hermance (PNJ), Haple découvre que les expériences des Soeurs Nétone et Nacota ont couté la vie à de nombreux enfants enlevés par leurs soins et retrouvés malmenés par les éléments.

9: Lors du festival de la bière de Haenian, Haple fait la rencontre de l'un de leur cobaye potentiel, Grégoire (PNJ), frère de la Vicomtesse et confronte la soeur Nétone. Celle-ci tente de tester son hypothèse que l'Elu peut canaliser des fluides contraires. Haple évite le pire de justesse et s'évanouit.

10: Haple est laissée pour morte à Haenian par les Soeurs qui reparte sans elle. Revancharde mais désormais consciente de ses limites, Haple veut monter en puissance avant de confronter à nouveau ses némésis. Elle trouve une nouvelle famille parmi les bardes de l'Académie de Vinalobae, lesquels l'oriente une certaine Gardienne du Savoir résidant au manoir des Désirelle pour obtenir des informations susceptibles de lui indiquer la voie à suivre. Elle réalise à son arrivée que la vicomtesse Désirelle n'est autre que la soeur de Grégoire, qu'elle a par deux fois déjà sorti d'affaire auprès de brigands. La vicomtesse étant une proche des Soeurs, Haple adopte l'identitée inventée de toute part de la percussioniste virtuose Astrid de Fontaine
.

)))
Chapitre 11 : Bonnes résolutions et nouveaux amis

01. Faveur contre service rendu

Aussi massive fût-elle, la porte se referma sans un bruit dans son dos. Un chêne centenaire avait dû être nécessaire à sa réalisation – probablement prélevé dans un domaine forestier des Duchés et échangé contre l’une des nombreuses marchandises exotiques qui transitaient par la cité marchande. Haple se demanda si les propriétaires du manoir s’en rendaient encore compte à chaque fois qu’ils en franchissaient le seuil. A en juger par l’indifférence de Grégoire, ils étaient probablement plus qu’habitués à jouir de l’opulence des lieux.

Le frère de la Vicomtesse s’était avancé d’un pas aussi vif et décidé que sa blessure à la cuisse le lui permettait. Et ce, malgré la pénombre qui envahissait le vestibule. A travers les ombres, Haple devinait d’immenses tableaux accrochés de part et d’autre de la pièce rectiligne et, plus bas, de lourds buffets aux nombreux tiroirs et étagères dans lesquels la maisonnée devait ranger les affaires d’extérieur. Sous ses pieds, un tapis d’une épaisseur déraisonnable avait été positionné dans un espace creusé à cet effet dans la grande dalle de marbre qui parcourait de l’entrée au grand escalier lui aussi taillé dans cette roche à la qualité intemporelle.

La ménestrelle des grands chemins remarqua néanmoins quelque chose d’inattendu. Le portier et l’adolescent avait pris soin de contourner le précieux tapis, comme s’ils avaient voulu le préserver de la boue sous leur chaussure. Alors Haple songea aux deux empreintes qui ne manqueraient pas d’apparaître à la lumière du jour là où elle s’était sottement arrêtée pour admirer le mobilier d’apparat de la riche demeure… Elle fit un pas en arrière.

De retour sur le sol de pierre, elle accéléra le pas pour rattraper les deux humains parvenus aux pieds de l’escalier et conversant posément.

- Bienvenue au manoir Ha…Astrid, corrigea in extremis le fils de marchand. La maisonnée est réduite et, comme il n’y a pas de réception aujourd’hui, l’ambiance est austère mais j’espère que tu auras un jour l’occasion de voir les lieux sous un meilleur jour.

Haple prit alors conscience du fossé – de l’abysse – qui les séparait. (Austère ? Les chandelles sont éteintes, d’accord, mais tout de même…). Grégoire, lui, sembla reprendre conscience de sa blessure et de l’urgence de la traiter.

- Théophile me dit que ma sœur est éveillée et nous recevra dans le petit salon. Elle pourra nous aider. Fais attention à tes pieds en marchant. Je suis tombé une fois dans ces escaliers quand j’étais enfant… les coins de marche ne pardonnent pas ! se remémora-t-il en se massant la tête au souvenir d’un ancien choc.

Le portier – Théophile, pour les intimes donc – les abandonna ici et retourna vers la porte d’entrée. (Peut-être pour y effacer les traces boueuses de mon passage…) Au moins, ses semelles étaient-elles propres maintenant, songea Haple pour se donner bonne conscience lorsque qu’elle parvint en haut des marches. Le palier ouvrait sur trois portes ; un maigre filet de lumière passait sous celle de droite. Grégoire prit encore une minute pour la rejoindre et lui indiqua, en réprimant une grimace que sa jambe douloureuse lui occasionna, de le suivre dans la pièce illuminée.

Ce ne fut pas le faste d’une salle de réception baignée de lumière et ornée de miroirs aux dorures ostentatoires qui accueillirent les deux adolescents éprouvés. Au contraire, Haple fut frappée par l’atmosphère tamisée qui régnait dans le petit salon, avec ses bulles de lumières disposées stratégiquement où elles étaient nécessaires – que ce soit pour englober ce fauteuil cossu où l’on resterait bien lire des heures durant, ou pour vaincre les longues ombres que projetaient les touches noires sur le clavier en ivoire de cet illustre piano.

Pourtant, ce n’était pas faute de manquer de bougies ! Sur les commodes placées ici et là trônaient des chandeliers en argent massif aussi anciens que la roche dont le métal avait été extrait, et, au centre de la pièce, suspendu par une chaîne en vermeil à une moulure exquise, figurant satyres musiciens et nymphes dansantes, un chandelier spectaculaire positionnait au-dessus de leurs têtes des dizaines de chandelles qui éclaireraient les couvre-chefs ornant les prochains invités de la Vicomtesse.

Mais ce soir n’était pas jour de fête. Et les dépenses inutiles étaient visiblement proscrites dans la demeure de cette fille de marchand mariée dans l’aristocratie locale. De fait, ce n’était pas la lumière qui façonnait l’espace sensoriel des lieux, mais le silence dans lequel crépitait un brûloir à huile dont s’échappait en spirale une volute avant de se dissiper en une brume à la douce odeur de myrrhe et de bois de santal.

Haple réalisa en sentant sa respiration s’allonger qu’elle avait été tendue jusqu’ici à l’idée de rencontrer la vicomtesse. Elle se demanda quand celle-ci allait les rejoindre… Enveloppée dans la douceur de ce lieu de détente, ses sens avaient cependant manqué dans leur examen de remarquer une chose. Une chose qui n’avait pas échappé à son voisin en revanche :

- Oryanne, j’ai été retardé comme tu peux le voir… s’annonça-t-il en présentant à un coin de la pièce plongé dans la pénombre son noble visage tuméfié et sa tenue de satin dépenaillée.

Un bruissement de mousseline sur le plancher en bois révéla la présence de ladite Oryanne aux oreilles de l’elfe. Instinctivement, Haple plia le genou et se fendit d’une révérence approximative qu’elle espérait être interprétée par son illustre hôtesse comme un signe de respect, malgré les probables manquements à l’étiquette dus à sa méconnaissance des coutumes kendranes. La douleur dans ses côtes lui arracha cependant une grimace et elle redouta que la maîtresse des lieux n’interprète son geste comme une pitrerie insolente. L’adolescente salua alors l’humaine, ses yeux poliment détournés, de sa voix la plus humble possible :

- Vicomtesse Désirelle.

Celle-ci s’avança dans la lumière. C’était une vision ! Vêtue d’une longue robe vaporeuse aux teintes pastels de bleu, de rose et de vert, taillée proche de ses jambes sans les révéler et soulignant les lignes de son buste pour suggérer le plus pudiquement du monde sa poitrine de jeune femme, l’humaine au teint d’albâtre lui rendit la politesse d’un signe de tête aussi élégant que… froid. C’est d’ailleurs avec le même détachement émotionnel qu’elle répondit enfin à son frère :

- Mais que t’est-il arrivé ? Tu es dans un piteux état… Cette jeune demoiselle était-elle directement ou indirectement responsable ?

Un soupçon de reproche affleurait derrière ses mots qui, chez une autre, aurait pu passer pour de la sollicitude. Non, la vicomtesse lui faisait remarquer son manquement à l’étiquette. (Se présenter à elle avec un coup de couteau dans la cuisse… c’est d’un mauvais goût !...)

- Pardon, oui, je sais… Dans une certaine mesure, Astrid de Fontaine, ici présente, s’est assurée que mon état ne soit pas pire encore. J’ai été pris à parti par des brutes dans la rue, vois-tu, et Astrid a eu la noblesse d’âme d’intervenir.

La ménestrelle baissa le regard par fausse modestie.

- A nous deux, nous sommes parvenus à les faire fuir ! annonça-t-il fier comme un coq en insistant sur sa propre implication.

C’était une erreur…

- Tu ne dois pas t’abaisser à te battre comme un jeune des rues… La prochaine fois, je m’arrangerai pour qu’un de nos hommes t’accompagnent.

Sans être cinglante dans le ton, la réprimande de la vicomtesse ne pouvait être que cuisante pour l’adolescent. Castratrice, même… Haple commençait à comprendre pourquoi il avait été si empoté et mesquin lorsqu’ils s’étaient rencontrés la première fois. Cette dynamique familiale n’était pas sans lui rappeler certains échanges avec sa propre mère. (Avant que …) Haple chassa le souvenir, passant nerveusement son poids d’une jambe sur l’autre.

La vicomtesse lui jeta un bref regard, puis reporta son attention sur son frère. D’un ton moins sévère, elle le pria d’aller se faire soigner par leur domestique, et aussi de prendre un bain et d’enfiler une toilette décente avant de revenir se présenter devant elle. De toute évidence, Grégoire fut embarrassé de se voir ainsi imposer le rôle du nobliau assisté devant la jeune Hinïonne. Cependant, il réprima l’élan de frustration qu’il devait immanquablement ressentir et, la queue entre les jambes, claudiqua hors de la pièce après avoir salué les deux femmes.

Dans un premier temps, Haple fit mine de le suivre avant de se raviser. Elle n’avait pas été congédiée. Et puis… elle espérait encore obtenir une faveur de la part de la vicomtesse. Alors elle attendit… Le bruit irrégulier de pas derrière elle diminua jusqu’à devenir inaudible… et la vicomtesse ne rompait toujours pas le silence. Elle l’examinait de la tête au pied, patiemment, maîtresse de la situation, avant de finalement prendre la parole d’une voix régale :

- Astrid, en signe de reconnaissance, je te dois l’hospitalité. Mes domestiques s’occuperont de soigner tes blessures, de t’offrir un bon repas et un lit pour la nuit, annonça-t-elle avant de poursuivre avec une lassitude tout juste perceptible dans la voix, mais je tiens à te récompenser pour être venue en aide à mon jeune frère. Fais ta demande, et si elle est raisonnable, je te l’accorderai.

Elles y étaient ! Haple eut du mal à contenir son soulagement, la vicomtesse ayant été intraitable avec son propre frère. De toute évidence, elle n’était pas tenue aux mêmes standards, elle qui n’était personne ou presque. Enfin pas tout à fait, songea la ménestrelle en réaction au sentiment d’humiliation qui montait en elle. Elle était celle qui avait sauvé son frère tout de même !... Elle lui fit donc part de sa requête, légitimement et en toute simplicité :

- Je vous remercie, votre seigneurie. Votre hospitalité dépasse toute obligation à mon égard et vous honore. Quant à une faveur, je n’en ai qu’une, et je l’espère recevable. Je me rendais chez vous pour solliciter une audience avec la Gardienne du Savoir, maîtresse Euan, lorsque je suis tombée sur votre frère. Il me semble qu’elle réside chez vous… Ai-je été bien renseignée ? Serait-il possible de la rencontrer demain ? Je ne voudrais pas l’importuner à cette heure tardive.
- Gardienne Euan réside parmi nous, en effet. Et bien soit, tu pourras la rencontrer demain en matinée, si tu le désires.
- Ce serait formidable. Je vais donc vous laisser ; je vous ai assez dérangée.

La vicomtesse fit signe à l’une de ses domestiques d’accompagner son invitée à ses appartements pour la nuit. Haple n’avait pas aperçu la femme de chambre se positionner en attente de recevoir ses ordres et manqua de sursauter lorsque celle-ci s’avança d’un pas pour inviter leur invitée à la suivre. Esquissant une nouvelle révérence maladroite, l’elfe recula de quelques pas, puis tourna les talons et emboita le pas au petit brin de femme en livrée noir et blanc qui l’entraîna vers les étages supérieurs.

(((la PNJ injouable Oryanne Désirelle a été incarnée par GM8 en aparté)))

>>> Suite 02/14
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Haple Mitrium
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Re: Manoir Desirelle

Message par Haple Mitrium » dim. 26 janv. 2025 15:49

02. Chambre d'hopital avec vue

Quelques marches et tableaux d’illustres ancêtres plus haut, Haple rejoignit la domestique sur le palier du deuxième étage, la main posée sur les côtes et la douleur peintes sur ses lèvres. L’humaine l’accueillit d’une voix soucieuse :

- Voici l’étage des invités… Est-ce que vous allez bien ?

Haple la regarda attentivement pour la première fois. L’employée de maison devait avoir la quarantaine (mon âge, plus ou moins) mais le temps et les travaux manuels n’avaient pas épargné cette humaine. La peau de son visage perdait de sa souplesse et l’ombre projetée par la lampe à huile qu’elle tenait dans sa main y creusait des rides, accentuées par un froncement de sourcil inquiet devant le mutisme de l’adolescente elfique. Toutes deux avaient beau avoir vécu le même nombre d’étés et d’hivers, l’apparence juvénile de cette dernière réveillait l’instinct maternel de l’humaine.

- J’ai un peu mal aux côtes, là, répondit Haple en se massant la zone douloureuse.
- Et je vois que vous avez une méchante griffure sur la main aussi, remarqua l’humaine en plissant les yeux. Rien de grave mais il faut soigner ça avant que ça ne s’infecte. Suivez-moi.

Heureusement, sa guide ne la fit pas marcher trop longtemps. Après l’avoir entraînée dans un couloir richement meublé et ponctué de portes invitantes et de glaces accentuant l’impression de gigantisme des lieux, elle s’arrêta entre deux urnes décoratives si grandes qu’elles lui arrivaient aux épaules et si belles qu’elles soustrayaient à son attention l’espace qu’elles encadraient. Devant la domestique – elle, parfaitement indifférente à cet opulent étalage de richesse – une porte en acajou reflétait la lueur de la lampe avec les couleurs chaudes si caractéristiques de ce bois précieux.

Sa guide ouvrit la porte de sa chambre et l’invita à s’installer après lui avoir laissé la lampe, tandis qu’elle allait chercher de quoi s’occuper de ses blessures.

(Pas mal…)

La pièce n’était guère plus petite que le salon d’appoint dans lequel la Vicomtesse l’avait reçue. L’espace disponible au sol était cependant restreint du fait d’un lit à baldaquin qui trônait majestueusement en son centre. Etonnement, sa présence ne gênait pas ; au contraire, elle structurait la chambre. A sa droite, un canapé avait été installé face à une fenêtre donnant sur le parc arboré. A sa gauche, un secrétaire était accolé au mur pour les invités qui souhaiteraient rédiger une lettre, un mémoire… (Sans façons).

L’adolescente posa la lampe sur une table de chevet et s’assit sur le lit (duvet d’oie, hmmm) … avant de se relever d’un bond à l’idée de son pantalon poussiéreux sur la literie immaculée. Cela faisait une éternité qu’elle n’avait pas eu l’occasion de dormir dans un lit si propre et confortable ; elle ne voulait pas le souiller avant même de s’y être couchée. Elle attendit donc patiemment le retour de la domestique, adossée au pied de lit, et passa le temps en anticipant les délices des draps de lin contre sa peau nue.

Heureusement, l’attente fut courte. Le cliquetis d’un charriot de service s’approchant annonça l’entrée de la domestique, revenue avec :

- Une bassine d’eau chaude pour votre toilette. Des bandes de coton pour vos côtes. Et de l’onguent et de la gaze pour votre main… lista l’humaine en les plaçant méthodiquement sur le secrétaire.

Haple détecta au nez une autre cargaison avec vif intérêt.

- Le corps avant l’estomac, lui intima la domestique en remarquant les yeux de l’adolescente lorgner sur une cloche dont s’échappait des effluves de viande en sauce et de légumes beurrés… Si vous voulez bien retirer votre haut et chemise, je vais voir ce que je peux faire pour vous côtes, d’abord.

Haple obtempéra, reconnaissante de l’aide que lui offrait la bonne femme et de son efficacité pragmatique. Car plus vite elles en auraient fini, plus vite Haple pourrait se lover sous l’édredon en duvet d’oie sans autre souci que de digérer son souper. Aussitôt sa chemise retirée, l’autre se mit au travail. De ses mains usées par les corvées domestiques, elle lui palpa le flanc puis, au vu du grognement qu’elle provoqua, l’humaine diagnostiqua :

- C’est une côte fêlée. Très légèrement. Levez les bras et essayez de ne pas inspirer trop profondément, s’il vous plaît.

Elle attrapa la bande de coton posée sur le secrétaire et la déroula, tour après tour, autour du torse de l’adolescente, juste sous sa poitrine naissante.

- Voilà qui devrait tenir, conclut-elle en coinçant le bout de la bande gainante avec une épingle à nourrice. C’est serré et ça sera bloquera un peu la respiration mais c’est comme ça. De toute façon, il ne faudra pas trop bouger si vous voulez guérir rapidement.

La domestique leva les yeux de son ouvrage et croisa le regard de sa patiente. Alors, elle sembla se rappeler qu’elle s’adressait à une invitée de la Vicomtesse… Une gêne passagère sembla la traverser en réalisant avec quelle familiarité elle avait pris les choses en main. Haple n’en était aucunement offensée et, en guise de réassurance, tendit sa main griffée à la domestique aux insoupçonnées compétences de soigneuse.

- Merci, Mademoiselle, si vous voulez bien poser votre main ici… voilà… reprit-elle plus poliment tout en saisissant un petit pot en céramique d’un blanc nacré, je vais panser cette bégnine estafilade.

La pommade était fraîche et picota lorsque l’humaine l’étala de ses doigts précautionneux sur la plaie avant de la recouvrir d’une gaze légère et flexible.

- Le pansement maintiendra la plaie humide jusqu’à ce qu’une nouvelle peau se forme. Demain, je pense ; oui, demain, vous pourrez retirer le pansement. D’ici, là il serait préférable de ne pas le mouiller.
- Merci, Madame… ?
- Martha, répondit-elle avec un sobre hochement de tête.
- Merci, Martha.

Et sur ce, la domestique rassembla ses affaires médicales et sortit de la pièce pour laisser l’invitée de la Vicomtesse faire sa toilette et souper en toute tranquillité, laissant pour seule instruction de laisser le charriot devant la porte lorsqu’elle aurait fini afin qu’un aide de chambre débarrasse le reste.

Enfin seule, la fatigue lui tomba dessus comme la nuit sur Haenian. Ne voulant pas pour autant méditer l’estomac vide, Haple souleva la cloche métallique qui gardait au chaud son repas et s’empara des couverts en argent disposés de part et d’autre du plat réfléchissant sur lequel avait été dressé une cuisse de poulet arrosée d’une sauce brune onctueuse et entourée de branches de brocolis dont une cuisson vapeur avait exalté le vert émeraude ainsi que d’une purée vaporeuse de céleri dont l’odeur anisée lui chatouillait les narines. L’eau lui en vint à la bouche !

Une fois son affaire terminée, l’adolescente se dévêtit, laissant choir ses affaires au sol, et s’approcha du lit… avant de se raviser. Elle était aussi sale avec que sans ses vêtements – la sueur aigre, ses mains poisseuses, ses ongles terreux, ses cheveux poussiéreux… Un brin de toilette avant de se coucher et elle profiterait encore plus de cette literie luxueuse ! C’est ainsi qu’après quelques coups de gants sous les aisselles et l’aine plus tard, une fois ses cheveux démêlés, brossés et nattés, et ses mains scrupuleusement nettoyées, ses ongles limés et ses follicules réhydratées, Haple s’engouffra sous la couette et sombra dans un monde de douce volupté.

>>> Suite : 03/14
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Message par Haple Mitrium » dim. 26 janv. 2025 16:15

03. Lectures nocturnes

Les aventures de la veille l’ayant particulièrement éprouvée, l’Hinïonne sombra dans un état méditatif plus profond que d’ordinaire. Proche du sommeil, à vrai dire. Un sommeil sans rêve, qui dura plusieurs heures et la laissa, reposée et ressourcée.

Haple ouvrit les yeux. Elle s’était emmitouflée dans le drap de lin et la couette en duvet d’oie, s’entortillant les jambes dans leur épaisseur réconfortante et protectrice. Avec paresse, elle se roula dans l’autre sens, nouant encore plus la literie d’une douceur divine contre son corps dénudé, et referma les yeux en signe de protestation, repoussant la perspective du réveil.

L’air de cette nuit d’automne était froid. Elle le sentait sur la peau de ses paupières, de son front, de ses pommettes, de son nez qui émergeait comme un tuba de la masse informe de tissu et de chair s’agitant sur le lit… en somme, de toute partie de son visage qu’elle ne pouvait enfouir sous la couette. Haple s’accorda le temps de réfléchir.

(Tout le monde dort encore).

Pas un bruit dans le manoir. Seulement le piaillement des passereaux dans le parc arboré qui appelaient avec une ferveur croissante l’aube encore à venir. Pas étonnant, les résidents du manoir étaient tous humains, et cette race passait près un tiers de leur vie à dormir…

(Normal, avec des lits pareils… hmmm)

Haple s’avait néanmoins que bientôt son esprit s’éveillerait et qu’elle ne trouverait plus le repos. Alors, elle passa en revue ses options pour la journée. Son objectif premier était d’obtenir les informations qu’elle était venue chercher auprès de la Gardienne du Savoir, bien entendu. Elle ne savait pas exactement de quoi il en retournait, mis à part que ses gribouillages oniriques sauraient mettre celle-ci sur la piste que la ménestrelle devrait emprunter si elle voulait monter en puissance et « accomplir son destin », comme Otis lui avait expliqué. (Ou plutôt, botter des arrière-trains, comme je préfère le dire, mais d’ici là…)

La veille au soir, alors qu’elle découvrait les richesses étalées dans la demeure seigneuriale en arpentant les escaliers et couloirs, Haple avait envisagé de faire une petite escapade nocturne pour s’emplir les poches de petits objets faciles à receler. Les meubles et armoires ne manquaient pas de bibelots d’apparat, dentelles ouvragées et œuvres d’art mineur qui ne manqueraient à personne… bien que, en son for intérieur, Haple pressentait qu’au contraire, la fille de marchand devenue Vicomtesse connaissait l’inventaire de ses possessions sur le bout des doigts et remarquerait la moindre absence inexpliquée.

(Tant pis)

Elle ne voulait pas risquer de perdre la confiance de la puissante Oryane Désirelle. Pas avant d’avoir rencontré la Gardienne du Savoir à son service, en tout cas… Faute de s’enrichir matériellement, elle pouvait profiter de son séjour, ici, pour faire des recherches sur sa magie tellurique. Direction la bibliothèque du manoir.
(Allez, debout la Simple !)

Et de peur de perdre son élan, Haple repoussa la couette avec résolution, invitant une vague de froid à saisir sa chair amollie par une nuit de profond repos. L’effet fut violent mais efficace : deux minutes plus tard, elle avait renfilé ses vêtements de la veille, refoulant une grimace de dégoût à l’idée de se glisser dans ces fripes sales et odorantes, mais était soulagée de profiter bientôt de leur chaude fourrure laineuse.

Munie de sa lampe à huile et de son audace juvénile, la ménestrelle sortit finalement dans le couloir de cette maison inconnue, tambour rangé et dessins runiques en poche, à la recherche d’utiles secrets enfouis dans les livres précieux que tout aristocrate se devait de posséder.

***



Le périple nocturne de l’étrangère elfique eut une fin heureuse. Contemplant la porte de la bibliothèque, son cœur revenant progressivement à une cadence apaisée, Haple réalisa la chance qu’elle avait eue. Car la maisonnée n’avait pas été aussi endormie qu’elle l’avait crue en sortant de sa chambre. Au détour d’un couloir, elle était tombée nez à nez sur un aide de chambre imberbe qui avait été bien surpris de voir l’invitée de la maîtresse déambuler à une heure si matinale dans l’aile familiale au rez-de-chaussée. Leur rencontre l’aurait encore plus surpris s’il l’avait trouvée les bras remplis de trésors chapardés…

Bien entraîné à dissimuler ses pensées, le jeune domestique l’avait saluée fort poliment et s’était enquis de ses besoins. Peu importait à Haple la suggestion implicite qu’il n’était pas convenable qu’elle se trouve en pleine nuit dans les couloirs, a fortiori dans les appartements de son hôtesse… Pour toute réponse, elle lui demanda d’une voix posée s’il aurait la courtoisie de la conduire à la bibliothèque, où elle comptait passer les heures avant que ses hôtes ne se réveillent.

Après une seconde d’hésitation durant laquelle le jeune sembla hésiter entre obtempérer discrètement et en référer à son supérieur qui n’apprécierait probablement pas d’être tiré de son sommeil, il l’invita à la suivre et la conduisit à bon port d’un pas furtif qui évitait expertement les lattes de plancher grinçantes. Considérant sûrement qu’il avait pris assez de risque comme cela, le garçon disparut sans demander son reste comme un fantôme dans l’obscurité du long couloir.

De nouveau seule, Haple porta la main sur le pommeau en cuir de la porte. A défaut de lumière, ce fut une odeur boisée et musquée qui révéla la pièce comme le lieu dépositaire d’ouvrages en cuir huilé sur de longues étagères de sapin. Haple pénétra l’espace feutré et ferma en silence la porte derrière elle.

Ecartant la lampe à huile de son champ de vision pour tout à la fois éclairer les étagères en sapin blanc et éviter de s’aveugler, la ménestrelle découvrit avec enchantement la profusion de livres et parchemins anciens entreposés méticuleusement le long des murs. Au centre de la pièce, une table munie de deux pupitres, d’un encrier, de feuilles de précieux papier et… d’un chandelier dont Haple s’empressa d’allumer les bougies pour éclairer la pièce de sa généreuse lumière.

Une fois ses yeux habitués à la confortable luminosité des chandelles en cire d’abeille, Haple se mit à arpenter les rayons en quête d’un traité de magie tellurique pas trop rébarbatif ou bien d’un dictionnaire de rune avec un maximum d’illustrations, ou bien… (là, voilà qui est plus intéressant). Un tome avait arrêté sa curiosité ; son titre, gravé en lettres dorées dans la tranche en cuir de veau, lisait : (« Vie et œuvre de X. Désirelle – Vicomte, père, maître géomancien »).

L’adolescente s’installa sous la lumière du chandelier avec l’ouvrage bibliographique et ouvrit la première page, ravie d’avoir trouvé un texte qui ne serait pas trop théorique.

(« À mon père »)

La dédicace était touchante de simplicité. L’adolescente refoula le sentiment que celle-là suscita en elle, ainsi que jusqu’au souvenir de son propre père, absent émotionnellement de sa vie avant d’être absent physiquement. Elle tourna la page hâtivement et se mit à feuilleter la suite.

Un passage en particulier retint son attention. L’auteur, ou l’autrice – elle ne pouvait le déterminer avec certitude – racontait une anecdote comique qui éveilla son intérêt. C’était une scène de famille, une scène de jeu bucolique dans l’arrière-pays kendran. Le Vicomte et sa femme avaient emmené leur marmaille loin des regards et des attentes pesant sur leur noble progéniture pour leur offrir un moment de décontraction et d’oubli de soi. Ils faisaient une partie de cache-cache. C’étaient les enfants qui cherchaient les parents.

Et les éclats de rire fusaient jusqu’à ce que… l’auteur mette la main sur son père, ou plutôt crut avoir remporté la partie. Car au moment où sa paume se ferma sur la jambe paternelle, celle-ci explosa recouvrant l’enfant sous une pluie de confettis de poussière ! Le cri de surprise que celui-ci poussa s’était ensuite transformé en pleurs lorsque la silhouette de son père s’était désagrégée tout entière sous ses yeux larmoyants. Le Vicomte avait finalement accouru pour rassurer son enfant crédule : ce n’était qu’une copie du géomancien ! Son père était là et le tenait dans ses bras aimants…

L’anecdote, au-delà de son caractère tendre et ludique, révélait à la ménestrelle un usage de ses fluides telluriques qu’elle n’avait jamais envisagé. Il était donc possible de façonner une statue à son image qui, au contact d’une autre créature, pouvait exploser ? L’enfant n’avait pas été blessé, car le Vicomte l’avait sûrement voulu ainsi, mais ne pourrait-elle pas, elle, augmenter la charge explosive de manière à infliger des dégâts en combat ? Voilà qui aurait le mérite d’augmenter sa puissance tout en ajoutant à son répertoire de ruses dont elle tirait si souvent parti… Oui, il y avait là matière à expérimenter, puis à mettre un jour en pratique contre ces maudites Sœurs Nétone et Nacota !

Refermant le livre, Haple se leva et se dirigea vers la fenêtre. Il faisait encore nuit dehors, mais le clair de lune éclairait de sa lumière blafarde les blancs bras des statues de marbre et les fantomatiques branches des arbres animés par la brise nocturne. Elle ouvrit la fenêtre… et se glissa sans un bruit au-dehors.

Le sol était à moins d’un mètre, mais, malgré cela, elle s’enfonça les pieds en se réceptionnant. Elle avait atterri dans un parterre de fleurs fraîchement plantées ; la terre y était meuble… et odorante. (Du fumier, sympa…). Faisant fi de l’exercice de curage de bottes qui s’en suivrait inévitablement, l’adolescente audacieuse se mit en place sur le sol plus solide de la pelouse herbeuse et se concentra.

(Comment faire ?). Il fallait façonner une statue de pierre ou de terre ; cela s’apparentait à de la terraformation et à de la sculpture… Puis, il fallait lui donner l’apparence de la vie de manière à tromper l’agresseur, et ensuite le charger d’une énergie qui exploserait à l’impact !... (Chaque chose en son temps).

Haple entreprit de procéder de manière séquentielle, s’attaquant d’abord à l’aspect le plus facile. Fermant les yeux, elle se connecta aux fluides qui la parcouraient, aux fluides qui parcouraient le sol. Ils n’étaient qu’Un, formant un océan d’énergie aussi profond et immense que la planète. Et comme toute étendue de fluide, il était agité de vagues ; Haple n’avait qu’à appeler à elle l’un de ses soubresauts fluidiques. Elle le fit ; la terre se dressa devant elle pour former une colonne grumeleuse de sa taille.

Haple rouvrit les yeux. (Comme ça…) Satisfaite de cette première tentative, bien que le résultat ne ressemblât guère qu’à un serviteur de cire fondu, Haple poussa l’expérience jusqu’à toucher prudemment le monticule terreux d’apparence humanoïde. (Rien). Elle fut soulagée, car elle avait craint que, contre toute attente, la grossière statue n’explose et la couvre de terreau puant. (Maintenant, il faudrait la rendre plus fidèle à la réalité.)

Car, en l’état, aucun adversaire ne serait dupe. De ses mains tendues, elle tailla, arrondit et fragmenta au besoin jusqu’à obtenir une copie à peu près ressemblante de ce à quoi elle s’imaginait ressembler. Elle ne voyait pas comment un adversaire pourrait se tromper s’il avait à choisir entre l’original et son double, mais… peut-être était-ce l’apport de ses fluides telluriques qui opéreraient la magie ?

Alors, la ménestrelle rassembla à la surface de ses paumes l’énergie dont elle vibrait intérieurement, celle dont elle tirait ses rythmes percutants et son caractère inébranlable, et le transféra à sa création terreuse. (Voilà) Elle avait accompli la séquence… Oserait-elle ? Au risque de…

(Allez, fais pas ta mauviette !)

Avant d’avoir pu se convaincre du contraire, Haple testa le fruit de son expérimentation du bout du pied, ses bras levés et ses doigts dressés entre ses yeux plissés et le leurre explosif… Ou pas. Le seul effet qu’elle causa en touchant son double fut de se salir encore plus les mains… Elle n’y était pas. Que pouvait-elle faire différemment ?

(Et puis…) Ce n’était pas le seul problème que cette tentative avait révélé, songea la ménestrelle. En effet, l’entreprise avait non seulement échoué, mais elle avait duré près de dix minutes. Un temps trop long pour être jamais utile en combat – ou une partie de cache-cache avec des marmots surexcités. Le Vicomte avait donc dû s’y prendre autrement. (Mais comment ?) Peut-être qu’en combinant les trois étapes… ? Peut-être qu’il fallait qu’elle se libère de cette manière séquentielle d’envisager le sort ?

(Terraformer - sculpter – infuser… non, ça ne va pas… Je sais !)

Elle se frappa le front de sa paume terreuse. C’était une épiphanie, une véritable révolution mentale : il ne fallait pas qu’elle cherche à contrôler la terre par ses fluides – c’étaient ses fluides qui devaient prendre le contrôle et façonner eux-mêmes la terre ! Donner corps à une nouvelle matrice pour recréer la forme qu’ils avaient habités jusqu’ici en la personne de la géomancienne. Ça tenait. Ça valait le coup de s’y entraîner. Haple se retroussa les manches…

- Qu’est-ce que vous faites là ? la surprit une voix aussi sévère qu’incrédule sortant par la fenêtre de la bibliothèque.

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Re: Manoir Desirelle

Message par Haple Mitrium » dim. 26 janv. 2025 16:43

04. En quête d'un guide

Une jeune femme hautaine la dévisageait, elle, la folle à lier qui faisait des sculptures de terre dans le jardin du manoir dans la nuit. Celle-ci avait néanmoins du mal à la prendre au sérieux : son visage était encadré d’une épaisse chevelure dont les boucles blondes rebondissaient comme des ressorts à chaque mouvement de tête scandalisé. Ne souhaitant pas pour autant se mettre à dos la servante ébouriffée, Haple garda son sérieux et lui répondit prestement :

- Je suis Astrid de Fontaine. La Vicomtesse m’a invitée à passer la nuit au manoir.
- Et l’invitation s’étendait à errer dans les couloirs la nuit et saccager les parterres de fleurs ? riposta l’humaine avec irritation.

(Pas commode la soubrette… Elle a du culot de parler aux invités sur ce ton…)

- De plus, je sais bien qui vous êtes, repartit-elle à la charge, on est venue me chercher pour me dire de vous retrouver à la bibliothèque. Vous vouliez me parler, donc… Je doute que l’on ait quoi que ce soit à se dire, mais je vous écoute.

Haple déglutit avec difficulté en réalisant à qui elle avait affaire.

- Ga-Gardienne Euan ? balbutia l’adolescente, réalisant son erreur…
- De toute évidence.
- Je suis navrée que l’on vous ait tirée du lit de si bonne heure. Ce n’était pas mon intention. J’étais simplement venue lire en attendant que la maisonnée se réveille.

La préceptrice croisa les bras, signifiant clairement qu’elle ne se répéterait pas et attendrait que l’elfe explique pourquoi avoir sollicité cette audience.

- C’est le Ménestrel Otis qui m’envoie.
- Otis ? répéta la blonde avec une étincelle dans les yeux.

Haple remarqua la pause que marqua la Gardienne du Savoir. L’espace d’un instant, celle-ci sembla avoir oublié son irritation, perdue dans le monde de douceur qu’évoquait le nom de l’angélique Kendran. (Et ils eurent beaucoup de blondinets aux yeux bleus…). Haple, narquoise, s’amusa du contraste entre l’attitude avec laquelle la bibliothécaire bonifiée l’avait accueillie et le ton mielleux de sa réponse :

- Et pourquoi ce cher Otis t’a-t-il dirigée vers moi, mon enfant ?

(Alors, d’abord, je ne suis pas une enfant…)

- Il a pensé que vous pourriez m’aider à faire sens de desseins que j’ai réalisés. Je les ai laissés sur la table derrière vous. Je peux vous les montrer ?

Le visage de la Gardienne du Savoir se décomposa à l’idée de la sauvageonne boueuse dans sa précieuse bibliothèque.

- Non, ne te donne pas cette peine. Reste où tu es. Je vais les chercher, offrit-elle précipitamment.

Haple attendit une minute. Ou deux peut-être. Immobile dans la fraîcheur nocturne, elle commençait à perdre patience. Ça ne devait pas prendre si longtemps de faire l’aller-retour entre la fenêtre et la table… La lumière aurorale se levait dans son dos, éclairant le ciel de sa faible lumière. Bientôt, les autres humains se lèveraient et elle aurait volontiers éviter que tous la voient ainsi, au milieu des bégonias…

Heureusement, la lumière qui sortait par la fenêtre s’intensifia tandis que son interlocutrice la rejoignait équipée du chandelier et de… :

- Intéressants, ces desseins, attaqua-t-elle de but en blanc en agitant les œuvres de la ménestrelle. Ils sont d’inspirations runiques, c’est certain.
- Je sais…
- Une pour chaque élément, à quelques imprécisions près.

(Intéressant.) Haple ne put s’empêcher de frissonner. Elle fit instinctivement le rapprochement avec cette soi-disant prophétie qui avait conduit les Sœurs Nétone et Nacota à pourchasser des enfants comme elle chez qui les religieuses fanatiques pressentaient la capacité de « rassembler les fluides ». Haple écarta ces idioties de son esprit : ces pseudo-runes avaient été dessinées lors d’un rêve fiévreux et pouvaient tout aussi bien être une manifestation de son inconscient délirant qu’un signe confirmant la prophétie.

- C’est intéressant, mais Otis a sous-entendu qu’il y avait autre chose que vous pourriez me dire. Quelque chose qui pourrait m’aider « à trouver ma voie »… Un « guide », m’a-t-il dit.
- Tiens donc, il a dit ça… botta la Gardienne du Savoir en touche, évasive.
- Il ne voulait pas trahir votre confidence, offrit la ménestrelle en gage de réassurance avant de renchérir, et j’y accorderai le même respect.

L’humaine la sonda du regard avec une intensité qu’elle avait jusqu’à présent réserver à l’expression de son mécontentement. Elle hésitait. Haple aussi. Que dire ? Que faire pour faire pencher la balance ? (Rien.) Montrer sa retenue, son sang-froid. Voilà qui serait le plus susceptible de convaincre l’érudite qu’elle était digne de se voir confier un secret.

- Soit, concéda la jeune femme comme avec regret, j’ai effectivement raconté au ménestrel une histoire susceptible de t’intéresser. Mais dis-moi, Astrid de Fontaine, pourquoi devrais-je étendre cette courtoisie à toi ?

La question était, étonnamment, neutre. Pas d’animosité, pas d’insulte. Une question qui invitait à argumenter intelligemment avec cette détentrice d’un savoir dont elle avait la garde. Haple réfléchit…

- Vous êtes une Gardienne du Savoir, amorça-t-elle avec déférence, et votre ordre a pour mission de dispenser le savoir à ceux qui en ont besoin.
- En effet, c’est l’un des commandements de l’Omnisciente… Néanmoins, il n’est pas spécifié si je dois transmettre mes connaissances à un, deux ou une myriade de nécessiteux. Grégoire est mon élève et je juge peut-être que son éducation suffit à ma déesse.

Haple sentit que le débat n’était pas clos, le jugement encore en suspens. Le devoir d’éducation ne contraignait pas suffisamment la Gardienne. Quelle autre carte jouer alors ? (Le devoir de collecte !)

- Je comprends l’importance de choisir les bénéficiaires des connaissances que vous gardez. Une information partagée avec la mauvaise personne peut nuire à la production globale de connaissances.
- Par exemple ? invita la Gardienne Haple à illustrer son propos, comme pour juger du mérite d’un élève.
- Prenez un seigneur de guerre qui souhaiterait acquérir un secret militaire concernant les défenses d’une ville qu’il convoite. Si, par la suite, il met la ville à sac et en brûle la bibliothèque, le gain de connaissance qu’il aurait connu individuellement serait inférieur à la perte de connaissance des générations futures. Un Gardien du Savoir ne saurait être responsable de cette perte nette.
- Bien raisonné, lui concéda l’humaine, bien que le problème de savoir ce que les générations futures auraient fait de ces connaissances se pose alors, nous plongeant dans un abîme logique dont on ne peut mesurer l’issue… Mais j’accepte néanmoins ton argument comme recevable : tu n’utiliseras pas cette connaissance à mauvais escient. Je suis disposée à te croire puisque Otis t’a recommandée à moi. Est-ce tout ?

Encouragée par cette petite victoire, mais ne souhaitant pas prendre de risque quant au délibéré de la blonde qui la surplombait de sa fenêtre comme un juge sur son estrade, elle renchérit dans la même lignée :

- Non seulement cela, mais je m’engage également à vous procurer de nouveaux savoirs. Je suis une aventurière et ce « guide » m’amènera assurément à découvrir de nouvelles connaissances qui enrichiront votre bibliothèque des Savoirs. Des livres, des parchemins, des conversations volées au détour d’une taverne, des…

Euan interrompit ce qui s’annonçait une longue liste improvisée d’occasions par laquelle la ménestrelle pourrait se rendre utile à la Gardienne du Savoir. Elle avait pris sa décision.

- Il y a longtemps, très longtemps, un maître des runes du nom de Iglesios Durynion intégra notre ordre. Il raconta aux hiérophantes de l’époque qu’il avait été appelé par les dieux à servir l’Omnisciente, qu’il y avait été guidé.

(« Guidé » ?...)

- Je vois que tu as relevé le choix de mes mots… En effet, Iglesios était le détenteur d’une étrange boussole qui lui indiquait sa voix dans le Grand Livre de Zewen. Un artefact d’un temps plus ancien encore et dont l’inventeur avait déjà sombré dans l’oubli lorsqu’Iglesios le gagna au combat contre un maître des runes rival.

Malheureusement, l’érudition hors du commun que cette boussole lui permit d’acquérir fit des jaloux parmi les membres du clergé de Zewen. Notre collègue fut assassiné par un zélote qui arracha à sa dépouille la relique convoitée. C’est ainsi que la chaîne de succession qui l’avait vue passer de maître des runes en maître des runes fut rompue, et que l’objet sombra dans les profondeurs de l’histoire.

La ménestrelle était captivée par l’histoire. Si bien qu’elle repoussât de son esprit le froid qui avait désormais gagné ses os et relança la conteuse :

- Et quel rapport avec Otis ? Avec moi ?
- Avant-hier, je racontais à notre ami commun des faits divers qui ont retenu mon attention. J’avais entendu parler de citadins et de festivaliers n’ayant aucun lien ou point commun entre eux autre qu’ils avaient perdu des runes en leur possession à quelques heures d’intervalle. En soi, qu’un soudard perde sa bourse pendant un soir d’ivresse… Rien d’anormal. Mais là, ils n’avaient « perdu » que leurs runes. Leurs bijoux, leur monnaie… toutes leurs autres possessions étaient toujours avec eux.

(Et… ?)

- C’est tout ? Je ne comprends pas. Quel rapport entre une boussole mythique et des runes volées… ?
- Eh bien, je ne sais pas. Mais il est permis d’imaginer que la boussole a refait surface et que son détenteur actuel l’utilise pour détecter des runes qu’il peut ensuite dérober à leurs propriétaires légitimes.
- La boussole serait donc un détecteur de runes ?
- Ici encore, je ne peux qu'émettre des suppositions, mais… oui, c’est ce que je devine de la biographie d’Iglesios qui a été conscrite aux annales de l’Ordre.

Haple n’en croyait pas ses oreilles… Tout ça pour ça ?! Elle s’était donnée toute cette peine (combattre des brutes, m’inventer une nouvelle identité, m’humilier devant cette pouffiasse pédante !) pour un vulgaire détecteur de runes !

- Mais qu’est-ce que j’en ai faire ? A quoi ça pourrait bien me servir d’avoir plus de runes, je vous le demande ?! Déjà que j’en ai dans mon sac sans quoi savoir en faire…

Le visage de l’humaine se ferma devant l’envolée agressive de l’adolescente. Ce fut d’un ton scolaire qu’elle répondit :

- Les runes ont plusieurs usages : premièrement, elles peuvent altérer les propriétés d’un objet par incrustation, et deuxièmement, on peut libérer leur pouvoir de manière ponctuelle par utilisation spontanée. Pour cette deuxième utilisation, on note que les maîtres des runes obtiennent généralement des résultats plus fiables et puissants.

Haple but les paroles de l’enseignante. Voilà qui l’intéressait plus. Posséder des runes lui offrirait donc les moyens de monter en puissance et d’affronter à armes égales les puissantes magiciennes du Couvent. (Attends… ça veut dire que… j’ai passé un an à bûcher sur des manuels d’écriture divine au couvent et on ne m’avait jamais dit qu’elles avaient une utilité quelconque ?!) Elle pestait intérieurement contre la Sœur Rosemonde – la vieille bique, fidèle à la tradition conservatrice de leur communauté religieuse, devait sûrement penser que les runes n’avaient d’intérêt qu’en tant que vestige de la Grande Rédaction.

La ménestrelle contint son agacement de peur de laisser transparaître son passé caché à travers le masque fraîchement moulé d’Astrid de Fontaine. Remotivée dans sa quête d’information, elle relança l’humaine d’une voix plus raisonnable :

- Pouvez-vous m’indiquer où trouver ces personnes qui ont perdu leurs runes, s’il vous plaît ? J’aimerais leur poser quelques questions pour tester votre hypothèse.
- Le premier réside actuellement à l’auberge de la Croisée des Chemins, récita-t-elle de manière platement factuelle. Le second, marchand de minerai, peut être trouvé dans sa boutique de l’Avenue d’Abondance.
- Très bien. J’y vais dès à présent.

L’adolescent s’ébroua pour faire circuler le sang dans ses membres engourdis.

- Mademoiselle de Fontaine. N’oubliez-vous pas quelque chose ?
- Ah oui, mes dessins ! s’exclama-t-elle en se frappant de nouveau le front avec sa main terreuse.

La Gardienne du Savoir la regarda calmement, ne faisant pas mine de lui remettre ses gribouillis.

- Votre promesse…
- Je vous rapporterai de nouvelles connaissances, oui oui…

(Mais si, en plus… j’avais pas oublié)

Puis, d’un bond, elle reprit ses dessins dans la main détendue de la bibliothécaire de lumière et, sur ce, traversa d’une allure qui réchauffe le jardin mouillé par la rosée du matin jusqu’à la place des festivals qui reprenait vie.

>>> Suite : 05/14
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Re: Manoir Desirelle

Message par Haple Mitrium » dim. 23 févr. 2025 11:21

10. Ton comté pour un cheval!
- Grégoire !

L’adolescent s’entraînait à l’arbalète dans le parc arboré, comme le lui avait indiqué le portier. Haple s’élança à sa rencontre. Elle n’avait qu’une chose en tête depuis sa découverte de la destination du voleur. Une obsession qui l’avait aiguillée lors de sa course folle à travers les rues de la cité commerçante, manquant de la faire trébucher sur les rares pavés inégaux, et ce jusqu’à ce qu’elle parvienne, essoufflée, à la grille du manoir Désirelle.

- Grégoire ! appela-t-elle encore l’arbalétrier d’opérette. J’ai besoin de toi.

Son cœur battait à tout rompre une rythmique endiablée. Quelle ironie, songea Haple, elle à qui le temps semblait fuir entre ses doigts, seconde après seconde. (Six jours ?!) Le temps lui était compté, et il pressait qu’elle se mette en route. Mais pour espérer arriver à temps dans la capitale de Blanchefort, il lui fallait :

- Ton cheval ! s’exclama l’Hinïonne en finissant de couvrir la distance qui la séparait de son seul espoir.

Elle n’avait pas les moyens de se payer une monture, et pas le temps de trouver un convoi en partance pour Beauclair suffisamment charitable pour l’emmener à titre gratuit. Le Kendran daigna enfin tourner son noble visage vers l’agitée du bocal qui avait couru vers lui en s’époumonnant.

- Haple, qu’est-ce que tu fais là ? demanda-t-il, un petit peu effrayé devant le spectacle qu’elle offrait.
- Ton cheval… répéta-t-elle dans un souffle, les mains sur ses genoux, le torse plié et un terrible point de côté s’imposant impitoyablement sous son sein. Il me faut ton cheval.
- Tu n’es pas sérieuse ? Jamais… c’est mon cheval. Et puis, tu sais monter ?

La ménestrelle n’avait pas le temps pour ces palabres. Oui, elle savait monter. Certes, cela faisait quelques années qu’elle n’en avait pas eu l’occasion – l’exil, tout ça, tout ça. Mais elle s’en sortirait. Il n’avait qu’à :

- … tenir parole. Tu… m’avais … promis… articula-t-elle péniblement entre deux grimaces.
- Je t’ai promis mon cheval ?!
- De me rendre… « la pareille ». Ma potion … de soin…

Haple tapa du pied sur l’herbe pour évacuer sa frustration, autant envers ses poumons qui lui faisaient défaut qu’envers l’adolescent qui se montrait particulièrement récalcitrant à sa requête… tout ce qu’il y avait de plus naturelle.

- Tu as perdu la raison ? s’effara-t-il, un rire soudain secouant son torse trop long portant sur une nuque trop maigre cette tête que l’elfe aurait volontiers baffée en cet instant. Un cheval contre une potion ? Même pas en rêve !
- Alors, emmène-moi !
- Mais où ?
- Beauclair, je dois y être absolument dans six jours. Il faut partir au plus vite !

Grégoire la dévisagea avec une mine plus grave cette fois. Tentait-il de déterminer si l’intrépide musicienne avait fait des percussions sur les murs avec sa tête ? Ou bien, cherchait-il des mots justes pour lui dire le fond de sa pensée ?

- Haple, je ne peux pas. Eventuellement, je le ferais si je pouvais… mais je ne peux pas, répéta-t-il laconiquement. Ma sœur ne me le permettrait jamais.

Devant la moue ombrageuse que l’adolescent affecta en mentionnant la vicomtesse, la ménestrelle en Haple pressentit comment manipuler l’égo blessé du jeune coq à son avantage.

- "Ma sœur ne me le permettrait jamais"… Ouin, ouin ! moqua-t-elle cruellement d’une voix outrancièrement servile et geignarde.
- Haple, je te préviens…
- Je ne m’abaisse pas à ça, reprit Haple en lui recrachant les paroles castratrices de sa sœur au visage. On me donne des gardes quand je sors dans la rue pour protéger ma petite personne, moi…

C’est alors que plusieurs choses survinrent en une fraction de seconde. Excédé par les moqueries de l’adolescente, Grégoire lâcha son arbalète sans prendre le soin de la désarmer et poussa l’effrontée de toutes ses forces. S’ensuivit ce qui devait : Haple tomba à la renverse dans l’herbe et le mécanisme de l’arbalète s’actionna en heurtant le sol, libérant son carreau qui vint se ficher… à quelques centimètres des yeux surpris de la ménestrelle !

Deux secondes de silence mortifère passèrent. Puis, les deux inconscients éclatèrent de rire ! L’instant d’après, Grégoire tendait sa main à Haple et l’aidait à se relever. Une main levée sur l’épaule du grand dadais, celle-ci reprit son plaidoyer :

- Grégoire, je ne te le demanderais pas si ce n’était pas essentiel. Je suis à la recherche…
- Je crois que je préfère ne pas savoir, l’interrompit-elle en posant sa main sur son épaule en retour. Mais d’accord, je te conduirai à Beauclair.
- Merci, tu sais que je ne pensais pas ce que j’ai dit.

(Ou si peu…)

- Je sais, confirma-t-il en hochant du chef avant de faire un pas en arrière et de ramasser l’arbalète.

Progressivement, par à-coups, un sourire gagna ses lèvres jusqu’à découvrir ses dents. Sans qu’elle lui demande, il lui fit part de ce qui se cachait derrière cette soudaine bonne humeur :

- Elle ne va pas être contente… confia-t-il d’un air rebelle. Pas contente du tout.
- Tu vas lui dire ?

Grégoire manqua de s’étouffer.

- Tu plaisantes ?! Elle m’enfermerait pour mon propre bien… exagéra-t-il dramatiquement. Attends-moi aux portes de la ville dans une heure. J’y serai avec des provisions et Vent Debout.

Haple hocha de la tête et lui confirma qu’elle y serait avant de lui rappeler qu’elle comptait sur lui, inquiète de le voir reprendre la route de l’imposante demeure seigneuriale avec son arbalète nonchalamment posée sur son épaule et affectant crânement une assurance qu’il ne ressentait probablement pas.

>>> Suite : 11/14

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