Le poids des choix
J'eus à peine le temps de me préparer que le fauve me fonça dessus à une vitesse effarante malgré ses blessures. In extremis, je parvins à faire ce que je voulais, esquivant l'animal de justesse en passant sur son flanc avant de violemment lui enfoncer ma pointe dans le corps, le faisant glapir de douleur. Violemment, il chercha à s'en défaire, m'arrachant ma lame des mains qui resta enfoncé dans son flanc. D'un bond, il pris de la distance, voulant s'enfuir ou reprendre de la distance pour attaquer, mais il finit par s'effondrer. Haletante, je regardai le corps de l'animal avant qu'une flèche ne me frôle, partant dans les hauteurs. Je perçus plusieurs archers tirer au dessus de moi, Jabalh'Yr à leur tête. Je mis quelques secondes à comprendre avant de voir des Sindeldi tenter de me tirer dessus, tenus en respect par les archers Eruïons. Jurant, je me hâtai vers le corps du fauve avant de me jeter derrière, m'en servant comme protection de fortune contre les traits qui commençaient à tomber. Je respirai avec difficulté et ma jambe me lançai horriblement. Je positionnai mon bouclier au dessus de ma tête et allongeai la jambe. La jambière avait salement encaissé et était proprement foutue, et ma jambe blessé faillit me faire tourner de l’œil. Essayant d'être aussi calme que possible, je concentrai mes fluides dans ma main libre, m'y reprenant à deux fois tant j'étais fébrile. La douleur disparut finalement avec la blessure et je pus constater que les flèches ne tombaient plus. Je risquai un coup d’œil vers le haut, constatant que les Sindeldi se repliaient en bon ordre, leur cheffe visiblement blessée. La seule chose à laquelle je pensais, c'était que c'était enfin fini, que je pouvais enfin respirer.
La douleur de mes côtes me fit grimacer et je les tâtai avec prudence. Si refermer des plaies ouvertes étaient relativement aisée puisque je voyais la plaie, guérir des blessures internes m'étaient tout bonnement inconnu. Je passai mes mains sous mon armure, tâtant les zones les plus douloureuses en grimaçant. Je ne savais pas si j'avais des côtes fêlées ou non... Dans le doute, je concentrai mes fluides de lumière et les diffusai dans tout mon torse. Le résultat ne se fit pas attendre et sentir mes os bouger me fit gémir de douleur. Ce fut bref mais cela me laissa haletante et tremblante sur le sol. Au moins ma respiration redevint normale, quoique erratique. Je restai là quelques instants, allongée sur le sol en reprenant mon souffle avant qu'une voix ne me tire de ma léthargie. Je redressai la tête pour croiser le regard de Jabalh'Yr qui s'était approché avec d'autres archers. Ils me regardaient tous étrangement alors que je me relevai péniblement, assurant que j'allais bien. Aussi bien que je pouvais aller au vu des circonstances. Sentant que quelque chose me manquait, je récupérai ma lame, toujours enfoncée dans le corps du fauve inerte. Elle était couverte de sang jusqu'à la garde et je me rendis compte que j'en avais reçu passablement sur une partie du corps également. Une nausée me prit et un goût acide remonta dans ma gorge. Je me forçai à inspirer autant d'air que possible pour chasser cette impression, mais un simple coup d’œil aux alentours amplifia ce que j'essayai de refréner.
Partout des corps jonchaient le sol. Blessées, morts et mourants de chaque camp. Le silence assourdissant qui avait suivi la bataille laissait place aux gémissements des blessés et Jabalh'Yr commença à envoyer les archers s'en occuper. Je sortis une gourde, celle prise sur Astérie, certaine qu'elle contenait des soins cette fois-ci, et la lançai à, un des archers qui l’attrapa au vol avant d'acquiescer en promettant de ma la ramener une fois vide. Jabalh'Yr me fixait toujours alors que je retournai vers le bas de la cuvette. Il ne me suivit pas, montant plutôt vers l'extrémité, mais je ne m'en occupai pas. Progressant péniblement, je trébuchai sur un corps gémissant et m'agenouillai près de lui. Un Eruïon blessé était allongé là, une flèche planté dans le flanc. Mes mains tremblaient tellement que lui attraper la main pris quelques secondes et il me regarda.
- C'est bon, ça va aller, d'accord ?
Qu'est-ce que je racontais moi ? Rien n'allait, bordel ! Alyah me ramena au présent et j'usais de mes fluides pour le soigner après avoir doucement enlevé la flèche. La douleur qui marquait ses trait sembla s’apaiser et il soupira doucement. Je lui dit de ne pas bouger tout de suite et me redressai en chancelant avant de continuer à descendre. En route, je bus une potion de mana, puis une deuxième, et de longues gorgées d'eau avant d'en distribuer çà et là à ceux que je pouvais soigner. Alyah me dit de conserver mes forces, mais je ne pouvais faire autrement. Je pouvais les soigner, alors je le faisais Puis je l'aperçus enfin, toujours là, allongée, une flèche plantée dans la poitrine. A peine m'agenouillai-je à ses côtés que les larmes se mirent à couler toute seule. Doucement, je fermai ses yeux encore ouverts. Sa mort avait été si brutale que je n'avais pas totalement réalisé la chose, mais la voir ainsi, inerte, partie à jamais, ça me retourna l'estomac. La haine que j'avais ressentie, les Sindeldi que j'avais tué... je fermai les yeux pour chasser de mon esprit les visages des mots qui jonchaient autant ma mémoire que le sol de cet endroit. J'avais fait ce que je voulais empêcher... j'étais une foutue hypocrite, jamais je ne pourrai regarder Tanaëth, Sylen ou Lyann en face à présent, ni même Nyllyn... je ne pouvais pas les revoir après ce que je venais de faire. Je ne pouvais pas retourner à Nessima comme si de rien n'était. Qu'est-ce que j'allais faire à présent ? Jamais je ne pourrais empêcher cette guerre, c'était tellement évident maintenant. Je me sentais tellement impuissante. Impuissante et ignoble...
(Calme toi Yliria, tu n'y es pour rien!)
(Je les ai tué Alyah... J'aurai pu faire autre chose, mais je les ai tué...)
(C'était eux ou toi, et tu le sais, et combien d'Eruïons as-tu sauvé en agissant ainsi?)
(Quelle importance ? Ils vont partir en guerre... chaque vie que je sauve va être balayée plus tard...)
(Tu n'en sais rien ! Et tu crois que leurs vies ne valent pas la peine d'être sauvées ? Yliria!)
(Je sais ! Je sais que tu as raison, mais ça ne rend pas les choses plus faciles ! Merde pourquoi a-t-il fallu que ça se passe ainsi.. Merde!)
Cela me rendait malade. Je reniflai avant de poser la main sur celle d'Astérie. Un grognement me fit sursauter et je tournai la tête pour voir Daelyrn. Il semblait indemne et n'avait pas bougé, semblant veiller sur sa maîtresse. Doucement, j'approchai la main de lui et lui caressait le haut de la tête. Un gémissement plaintif sortit de sa gorge alors qu'il tournai le regard vers Astérie et j'eus toutes les difficultés du monde à ne pas éclater en sanglot. Je ne voulais pas la laisser là... pas comme ça.
- Yliria, Mahal aimerait vous voir.
Je tournai mon regard vers Jabahl'Yr, qui semblait essoufflé, comme s'il avait couru. Je le regardai avant d'acquiescer, sans bouger pour autant.
- J'arrive... je voulais...
Je ne pouvais pas le dire, mais il comprit et posa une main sur mon épaule qui fit couler de nouveau les larmes que je retenais avec peine. Je caressai Daelyrn d'une main et ça avait quelque chose de réconfortant, malgré tout le reste. Je rassemblai les affaires d'Astérie sous l’œil vigilant de son Silnogure. Je trouvais ça horrible qu'elle meurt ainsi, ici, loin des siens. Jamais sa famille ne saurait que leur fille était morte dans l'espoir de libérer un peuple...
(Elle a dit venir de Yarthiss.. tu comptes y retourner non?)
(Et trouver sa famille pour lui apprendre la nouvelle ? Merveilleux... mais tu as raison, je lui dois bien ça. Et lui donner une sépulture décente aussi.)
- Je dois l'incinérer... C'est la tradition de son peuple... Jabalh'Yr, vous voulez bien veiller sur elle ?
- Navré, je dois m'occuper des blessés. Mais je vous assure que personne ne touchera son corps.
- Je vois... Merci. Je vais voir Mahal.
Il hocha la tête et je me relevai pour partir en direction de Mahal. La voix de Jabalh'yr me fit me retourner et j'attrapai au vol des objets. EN les détaillant, ej vis une bourse et deux bijoux. J'écarquillai les yeux avant de froncer les sourcils, furieuse, mais il m'incita au calme.
- Je pense que survivre doit être votre priorité. D'ailleurs le mage que vous avez vaincu avait aussi des objets, et ils vous reviennent, nous y veillerons.
- Mais je n'en veux pas !
- Ils sont à vous.
- Mais...
(Yliria, ça ne sert à rien, et tu le sais. Accepte et range ça. Va voir Mahal pour savoir ce qu'elle te veux, et va dormir. Tu iras mieux une fois reposée.)
(J'en doute...)
Je soupirai avant de reprendre le chemin pour rejoindre Mahal. Les survivants rassemblaient les corps et les blessés. Dès que je pouvais, je soignais un blessé à l'aide ma magie, lui épargnant beaucoup de souffrance, mais j'étais trop fatiguée pour en soigner beaucoup. Ce fut lorsque je me penchai vers un Sindel blessé que l'horreur prit une nouvelle forme. Il était salement amoché, son torse barré d'une vilaine plaie. Il était inconscient mais gémissait et je voulais simplement l'apaiser . Mais un Eruïon m'aperçut, penchée au-dessus du Sindel et s'approcha. Naïve, je crus qu'il venait pour m'aider, mais d'un coup rapide, il lui trancha la gorge sous mes yeux effarés. Et il me remercia pour avoir repéré un survivant... je le regardai sans bouger, éberluée. Le temps que je me reprenne, le sindel était mort et l'Eruïon était reparti. Cette fois, je ne fis que deux pas avant de rejeter tout ce qui restait dans mon estomac. C'était quoi ces conneries ? Il était blessé, quel besoin avait-il de l'achever ? Ma gorge me brûlait. Toute cette horreur n'allait donc faire qu'empirer ? Je pris une longue gorgée d'eau pour faire passer l'horrible goût dans ma bouche et me hâtai vers Mahal que j'avais repérée au sommet de la cuvette, entourée de Seraya et des étranges petits êtres vêtus de noir.Je voulais en finir au plus vite. L’ascension fut pénible, mais je la rejoignis finalement. J'étais partagée entre la tristesse, le dégoût et la colère après avoir assisté à tout ça, mais fis de mon mieux pour rester calme face à elle, même si ma voix était porteuse d'une certaine lassitude, à moins que ce ne fusse de la fatigue, ou un mélange des deux.
- Vous vouliez me voir ?
Aux Enfers la politesse, j'en avais plus que marre de tout ça, de tous ces morts. J'étais épuisée, voilà tout.
***
(((HRP : Utilisation de deux potions de mana et de :
Grande gourde magique (Contient [12/16 doses] de potions. Le liquide bu est choisi mentalement par le personnage lors de l'absorption dans la gourde. Liquide contenu :
4 grandes potions de soin (stabilise une blessure grave)
4 énormes potions de soin (stabilise les blessures incapacitantes)
4 potions de coagulation (arrête un saignement))
dans le but d'aider les Eruïons blessés.
)))