Une charge de la cavalerie Kendran portée par une femme en armure frappa en plein centre l’armée d’Omyre, ultime acte de folie.
La clameur de la mort du roi fut dissipée en voyant ce qui devait être Satina prendre le taureau par les cornes.
Quelle femme pensa alors l’humoran, déterminé et puissante. Malheureusement pour elle, il devait la stopper et oublier son respect et son admiration.
Le ciel obscur, bercé de nuages cendré, se mit à rugir. Un hurlement de terreur, horrible, informe sans mesure réelle.
Sirat ne put réprimer un frisson, il connaissait ce son, il le redoutait. Une douleur sur sa marque l’empoigna, il était là.
De cet océan de brume fuligineux émergea une vision qui pousserait immédiatement à la mort. Une sorte de peur froide et cinglante s’était emparée des hommes autour de lui. Tout le monde écouta et ils écoutaient encore, agard, quand il surgit. Son immensité noire, ruisselante, déchira cette nappe de poussière et de cendre qui noyait la lumière du jour.
Il volait à l’ouest, balayant l’air de ses ailes membraneuses, recouvrant une partie de la plaine. L’odeur qu’il dégagea était intolérable. Il n’y avait pas de langage pour décrire cette masse noire, fumante. Mais Sirat le reconnut, sa marque le brûlait. C'était lui le dragon noir de la magicienne. Un hurlement d’outre-tombe et des milliers d’êtres sans vie reprenèrent formes et le combat. Lentement, aux milieux de ces horreurs distordues de cette scène indescriptible, il fit bouillonner son poitrail de lueur émeraude. Titanesque, il s’envola, laissant dans son sillage une brume de soufre et de terreur. Il alla se poser sur Oranan et de là où il était, il ne put voir, simplement entendre, le bruit de la destruction et du chaos.
Sirat observa autour de lui, mais Kurgoth n’y était plus.
Il n’était sûrement pas mort, mais il ne pouvait perdre du temps à le chercher.
Il pouvait arrêter cette guerre, il croyait au plus profond de lui-même. Ce massacre n’avait que trop duré, Kendra kar devait se retirer. Il fonça déterminer vers la charge de cavalerie. Il se souvenait alors de la destruction de Fan Ming. Tout cela n’avait qu’un objectif, la prise d’Oranan. Le destin semblait vouloir la détruire.
Je cours, je contourne la masse qui se bat encore. Sous mes yeux tombent les derniers soldats de Shory. Moi-même, j’en ai tué, une amertume se répand au fond de moi. Serais-ce de la culpabilité ? Une odeur de mort me balaye le visage, elle s’infiltre malgré mon casque. Tous ses corps, ma cause, est-elle juste? Zewen m’a pourtant parlé en Aliaénon, je ne dois pas douter.
Je bouscule des garzoks, des guerriers, leurs yeux obnubilés par la bataille.
J’ai pourtant voulu me séparer de tout cela, j’avais un coin, un chez-moi, mais le destin s'est toujours acharné à me ramener, quitte à détruire ce que j’avais. Maintenant, je comprends que l’on gagne, que l’on perd, ma place est ici. Parmis ces morts, parmis ces fous et si elle vient me cueillir, qu’elle vienne, je l’accepte, mais avant, j’aurais joué mon rôle, j’aurais fait ce qu’on attend de moi. Paria, bâtard, traître… Je ne représente déjà plus rien pour eux. Alors, sois j'encaisserais les insultes, j'endosse ce rôle, comme toujours, je serais celui qu’on déteste. Peu m’importe depuis ma plus tendre enfance, on m’a rejeté. Devrais-je courber l’échine devant ce père qui me conspue ? Non, ma colère me guide, m’aveugle, mais je me saoule avec, je me noie dedans. Ivres de haine, ils plieront devant mon courroux et celui de mon maître.
Au pas de course, il se hâtait de rejoindre le centre. Ses cuisses se contractaient à un rythme effréné, et une coulée de sueur trempait son dos. Son visage brûlait d’une légère douleur. Un murmure “celui qui chante” , une clameur “il court avec nous” se répercutait à mesure qu’il passait devant les fantassins d’Omyre.
Une fierté nouvelle s’empara de l’humoran.
J’ai une famille, c’est celle qui m’a choisi. Plus que cette mission que je m’impose, car je le pressens dans mes entrailles ; j’ai une famille !
Il arriva à environ cinquante pieds, il lança une ultime prière a Zewen souleva son fléau de l’ombre. Il perçut instinctivement sa magie répondre à sa demande.
Qu’il en soit ainsi !
Il frappa le sol, d’un geste vif. Une onde de choc s’en alla de l’épicentre, et la terre s’ouvrit en une gueule béante sous les cavaliers. Une vague de débris, de roc et de boue, vola dans les airs et retomba ensevelissant plusieurs d’entre sur un rayon de seize mètres.
Une fatigue intense s’empara alors de lui. Il avait sans le vouloir été plus loin qu’il ne le pouvait. Ses épaules se relâchèrent et son armure parue plus lourde.
Kurgoth réapparu, projeté sur la pointe de la formation de cavalerie vengeresse alors que la terre s’était mise à se soulever du sol abruptement, monstre élémentaire hurlant et avalant tout. Elle retomba durement, avalanche d’argile et de boue, sur les chevaux, y compris ceux de la princesse et de ses défenseurs, stoppant instantanément leur progression. Des dizaines de blessés et presque autant de morts, mais la princesse et son escorte semblaient bien s'en sortir, ils faisaient face à maintenant à Kurgoth.
Un shaakt ou un hinion, qui aurait su dire, son visage était un mélange des deux, s’approcha de l’humoran.
La silhouette svelte et la face opalescente, recouverte d’une cape carmin, il était accompagné d’un amas de sphères agglutinées et mouvantes, irradiant d’une lumière blafarde, soutenue par un corps plus sombre et recouverte de nervures tentaculaires et griffues, qui relient le tout, et tombent, en longs membres arborescents, au milieu de ce charnier cette vision était cauchemardesque. L’elfe parla à cette chose et lui demanda de soigner le zélote.
Essoufflé, Sirat sentit sa respiration se calmer, une force qui semblait s’être en aller renaquit en lui. Il remercia d’un signe de tête cet étranger, sans plus poser de question. Zewen le protégeait et ce soigneur en était la preuve. Une coupole de lumière s’était installée autour d’eux, un dôme luminescent semblait les couper du reste de la mêlée .
Il reconnaissait le chevalier avec sa lance pour être celui qui l’avait accueilli au camp Kendran. Il lui barrait le chemin de la princesse et le troisième était le général Andel’ys. Celui-ci faisait face à Kurgoth. Les deux apparamments se connaissait déjà et Sirat se souvint que le garzok avait déjà fait une incursion dans le camp Kendran avant la bataille.
Sirat se hâta pour intervenir.
Cela suffit ! Princesse, si la clameur dit vrai votre peuple a déjà perdu votre frère. Doivent-ils vous perdre aussi ? J’ai une proposition !
Tout de suite, la lance du gardien s’avança vers lui, le repoussant et l’empêchant de faire un pas de plus en direction de la princesse.
Calme-toi cerbère si j’avais voulu elle serait déjà à terre
La princesse répondit d'une voix étouffée, mais déterminée.
Je vengerai mon frère en vainquant les armées de ses assassins. Parle, Bâtard d'Ybelinor, mais n'avance pas un pas de plus si tu ne veux pas finir avec un carreau en travers de la gorge.
Le garzok n’appréciait pas la négociation de l’humoran et lui fit entendre. Il attaqua alors le général, le regard aliéné de rage.
Sirat eut à peine le temps de lui répondre « parce que je ne suis pas là pour massacrer inutilement et nous pouvons sauver autant des tiens que des leurs »
Que le garzok se battait déjà. Le zélote jaugea Duval qui semblait imprenable et s’érigeait en rempart protégeant la princesse.
« Vous avez entendu votre front Est est battu » il observa l’ouest et les morts-vivants « l’ouest vient de prendre un nouveau revers et le dragon est arrivé. Vous voulez vous venger et entraîner votre peuple dans votre folie. Qui protégera Kendra kar quand vous serez morte et que vos plus valeureux soldats vous auront suivi dans vos représailles ? Battez en retraite, il n’est pas encore trop tard.
Sirat devait les faire battre en retraite, les convaicres.
"Nous empêchons ici vos douteux alliés de souiller et envahir les terres de nos alliés. Il est inconcevable que nous les laissions faire. Si vous êtes si modéré que vous l'insinuez, humoran, ralliez-vous à notre juste cause plutôt que de la combattre."
Votre juste cause?! Quelle juste cause qui exclut les êtres comme moi ou ce garzok, quelle juste cause qui spolie les terres à son profit ? Vous vous érigez en donneur de leçon tellement sur de votre bon droit et de votre justesse ! Je vous offre juste un choix, vous avez votre libre-arbitre, le reste est écrit par mon seul et unique maître : Zewen. Je réitère ma demande une dernière fois ! Retirez vous sur-le-champ et rentrez à kendra kar ou périssez au combat.
Il parlait face à un mur, c’est vrai il le comprenait se retirer pouvait apparaître comme un échec et pourtant, se retirer maintenant leur permettait aussi de garder un ascendant sur leur adversaire.
Un trait de lumière frappa à côté de Satina et de sa monture. Haineuse, elle s’exclama.
"Voilà tout ce que ceux que vous défendez savent faire, fils d'Ybelinor : trahir et attaquer à revers. Quant à vos propos, je ne peux que déplorer que vous me connaissiez si mal. Je ne suis pas mon frère, ni les rois d'antan. Je crois en la discussion, raison pour laquelle nous parlons. Mais croyez bien que jamais, même devant d'insidieuses menaces, je n'abandonnerai mes alliés à un sort que je ne veux pas moi-même subir."
Quand on parlait d’Omyre, il était responsable de toutes les exactions, mais eux non ils pouvaient dans leur discours se laver les mains des méfaits de leurs pairs. Il en avait soupé de ce discours à sens unique. Il était temps de se battre.
Si c’est vrai, j’aurais aimé avoir le temps de discuter avec vous. Peut-être qu'un jour, en attendant aujourd’hui, nous sommes ennemis. Voyons ce que zewen a décidé pour nous !
Le garzok se battait comme un beau diable, mais manquait de maîtrise face à l’expérience d’Andelys. Il les observait du coin de l’œil sans pouvoir intervenir. Sirat entra dans la danse, mais lui aussi manqua d’agilité et de chance fut tenu en respect par le gardien, qui ne broncha pas. Il avait essayé de frapper la monture, mais la lance ne lui permit pas de faire grand-chose et pire que tout son sort sembla partir sur une autre cible, car le cerbère le toisait toujours imperturbable.
Kurgoth et le général se battaient échangeant des amabilités, s’insultaient, le combat n’était plus que physique, il était aussi psychologique.
La princesse de son arbalète tira vers le poulpe lumineux, mais échoua.
Le gardien frappa l’épaule de l'humoran qui cette fois-ci ne sentit rien hormis la fatigue de ses assauts successifs.
Un nouveau trait de lumière frappa alors le cheval de Satina. La monture affolée et transit de souffrance fit une ruade. Satina sauta à temps, abandonnant son canasson à une mort horrible, hachée par la horde.
Il devait se protéger, sa respiration peinait à soulever son armure et elle le faisait de manière saccadée.
Il eut la vision de xel. Comment avait-il fait ? Il avait utilisé une rune et crié son nom. Une rune, il en avait et on lui avait dit son nom et sa signification. Il devait essayer, ne serait-ce que pour gagner du temps.
Il empoigna l’artefact dans sa main et le colla sur lui en criant son nom.
Piiii !!!
Sa peau se transformait alors en un cuir solide et à la fois souple. Il se sentait investi d’une nouvelle force sous cette carapace : l'espoir. La lance du chevalier fila droit sur son torse, mais n’y pénétra pas.
La surprise se lisait dans son regard et derrière sa cerveliere on ne put voir le sourire de satisfaction de Sirat.
La reine renouvelait son appel et demandait qu'ils battent en retraite. Mais la vague d'euphorie de cette réussite emportait Sirat, noyant sa raison. Un bruit sourd balaya toute retenue. Kurgoth venait de tomber. Une colère sourde remonta, de ses entrailles, comme un geyser avant d’exploser. Pour qui se prenait elle, ils avaient un dargaon, leur flanc Est était mort et elle osait encore demander la retraite, ce petit stratège avait encore la morve au nez.
Tais toi chienne et va rejoindre ton frère en enfer !
Il arrêta le temps, ils allaient voir le réel pouvoir, celui du héraut d’un vrai dieu.
Fou, le fanatique, frappa d’une onde psychique la princesse qui en eut le souffle coupé. Sa bouche purpurine, se figea sous son chérîmes. La lumière de son marteau frappa à nouveau, alors que Satina s’écroulait sur les genoux. Ses yeux obnubilés, les mains recroquevillées sur sa poitrine, elle pencha la tête en avant, quasiment inanimée.
La lumière explosa de la pierre du fléau. Une dernière fois, mais le choc qui l'accompagnat cloua Sirat au sol. Un coup non prévu et qui l’empêcha de continuer ses sorts. Un dragon ébloui par son arme venait de tomber sur lui, fracassant son torse. Il n’arrivait plus à respirer. Frénétiquement, il chercha dans son sac des fioles.
Il peinait à comprendre ce qui venait de se passer, non loin de lui gisait un corps de femme désarticulé et décédé. Devant lui le dragon qui l’avait percuté, Kyosheki. Il le reconnu a ses traits caractéristiques et a ses yeux prune. Comment pouvait-il oublier cet adversaire qu’il avait combattu en Aliaénon.
En haut dans le dôme de lumière virevoltait cet elfe, brun à la peau diaphane. D’une voix suppliante il demanda à l’humoran d’épargner la princesse. Le général aveuglé cracha son nom : cromax…
Des douleurs l’élançaient dans le bas du dos, une barre l’empêchait de se relever et irradiait ses cuisses le clouant au sol. Son torse brûlait encore de l’accrochage. Sa fouille dans son sac se termina et il prit deux potions qu’il bu d’une traite avant de se redresser.
Cet alors que sortit de la mêlée, des soldats, l’armure éclaboussée de sang apparurent et formèrent un mur de bouclier autour de la princesse. Défense bien vaine quand on connaissait les pouvoirs psychiques du zélote.
À leur tête, un homme se dirigea prestement sur le côté de l’humoran. Ezak d’Arkasse, était reconnaissable par son allure féline, malgré son visage recouvert d’une bouilli purpurine. Il semblait en vouloir à l’elfe qui derrière l’humoran s’était accroupi devant le cadavre de la jeune femme en le pleurant. Il ne connaissait pas l’attachement de cet étrange garçon à cette femme, mais ses lamentations étaient émouvantes.
Et à cet instant, Ezak et sa troupe arrivent pour protéger la princesse, témoins de tout ce qui vient de se passer, mais sans être aveuglés. Ils viennent de l'ouest, dans le dos de la princesse, à l'opposé de la position de Sirat.
Sirat jaugea le dragon qui reprenait vie doucement.
Kyosheki, je ne savais pas que je te manquais à ce point que tu veuilles me baiser les pieds, tu n'aurais pas pris du poids depuis Aliaenon ?
Il leva la tête vers l’elfe.
J’ai proposé à ta princesse la vie sauve si elle battait en retraite. Il est inutile qu’elle meurt et qu’elle entraîne tellement de vie dans le sillage de sa folie.
Tout allait peut etre s’apaiser, il avait bon espoir que ce Cromax puisse l’aider à calmer l’attroupement. Il regarda Ezak.
Ezak d'arkasse ! Te voilà enfin, avec tes petites bouclettes. J’ai rencontré ton paternel un homme charmant.
Fit-il avec une pointe d’ironie
Prenez votre princesse, Ezak rend toi utile mon vieil ami ramène cette enfant chez elle. Si je me souviens tu les aimais jeunes. Que les armées kendran battent en retraite jusqu’à votre ville. Abandonner Oranan.
Voilà, en toute bonne foi, il faisait un geste avec l'espérance d'être enfin entendu.
HRP : prise de potion vu avec le chef
[XP : 3 (combat contre du Val et les troupes kendranes) + 0,5 (pourparlers) + 0,5 (voyage dans les troupes)]