La Grange de Vilaeriane

Répondre
Avatar du membre
Yuimen
Messages : 2484
Enregistré le : mar. 26 déc. 2017 19:17

La Grange de Vilaeriane

Message par Yuimen » sam. 6 janv. 2018 11:55

La grange de Vilaeriane

Image


Ce lieu est assez grand pour accueillir diverses bêtes massives, et pas seulement des chevaux ou des poneys puisqu'on y trouve également des beaux moutons qui fournissent une belle quantité de laine pour la rude saison, ou encore des vaches qui assurent la production laitière en continu durant toute l'année.

La directrice de cette grange, Vilaeriane, est une jeune Elfe Blanche aux cheveux roux presque rouges, bien qu'il apparaît très nettement que cette couleur n'est pas naturelle. Elle est assez bien bâtie sans pour autant laisser apparaître un seul bourrelet mal placé. Ses gestes sont toujours gracieux et son sourire jovial laisse transparaître que cette jeune personne est quelqu'un de très sociable. Cependant, elle peut parfois être très mal à l'aise avec les gens qui se présentent à elle pour les affaires, ne supportant pas les négociations, pas plus qu'elle ne supporte les Elfes Bleus depuis que sa petite sœur s'est vue ôter la vie par un de ces gens qu'elle a à présent en horreur...


Hébergement de montures :
Vous pouvez ici laisser en pension votre monture (uniquement celles du même type que celles vendues). Ce service coûte 50 yus, peu importe le nombre de temps que la monture reste.

Montures hébergées :
Fonctionnement :

Avatar du membre
Kymil
Messages : 24
Enregistré le : lun. 26 août 2019 14:38

Re: La Grange de Vilaeriane

Message par Kymil » jeu. 9 févr. 2023 15:52

<<<<



Elle arriva à la grange en avance. C’était l’une des plus grandes et sans doute la plus réputée de la ville. Il y avait ici, quelque soit la saison, beaucoup de monde ; clients, éleveurs, fermiers, maréchal-ferrant et employés se partageaient l'espace et l’activité ne baissait vraiment qu’à la nuit tombée.

Afin de gagner du temps et espérant bien faire, elle se permit de prévenir un elfe finissant de sceller un cheval iakoute à la crinière presque blonde lui arrivant au dessus des naseaux. Elle remarqua un changement saisissant chez son interlocuteur après qu’elle eût évoqué le nom de la cliente désireuse de les rejoindre. Elle parvint à détecter une touche de compassion, presque un apitoiement envers elle lorsqu’il vit l’insigne de la milice. Cette dame pécuniairement généreuse n’en était pas moins une personne peu appréciée ici, trop stricte, trop intransigeante, peu aimable et exigeante quant à quantité de manies.
Elle les observa pourtant s’échiner à préparer le chariot de la négociante avec une précipitation étonnamment efficace. Deux chevaux iakoute furent sortis de leurs emplacements et attachés à un chariot couvert dont les roues étaient plus grande que la jeune elfe.

« Il y a une commande en attente, dit un contremaître en questionnant Kymil, pour son Voyage … on la charge ? »

Il avait laissé trainer sa voix sur voyage, nul ici ne savait où, quand, ni pour combien de temps et encore moins le nombre de passager il fallait prévoir. Mais il y avait deux grandes caisses de matériels commandées par la négociante. Kymil acquiesça, espérant là encore bien faire car malgré l’empressement manifeste de sa cliente à vouloir quitter la ville ; elle ne savait si parmi les manies agaçantes de cette dernière, évoquées ça et là par les plus râleurs des employés, le contrôle excessif dominait.

Tout fût prêt quelques minutes avant que la négociante n’arrive et un autre étrange ballet s’offrit à la vue de Kymil qui, à nouveau, n’en comprit rien. Les employés déjà au fait de la manœuvre se reculèrent et certains grommelèrent contre la cliente avant d’être repris par le contremaître plus respectueux de la vie privée de la clientèle.
Mais les mots avaient été dits. La folie de cette femme fut moquée ; les plus acides des propos parurent dénoncer une folie inventée afin de faire oublier le suicide du mari. En définitive, chacun avait un avis sur elle sans que quiconque ne connaisse même son prénom.
Kymil, qui ne s’était point jusque là posé la question de l’existence ou non de l’enfant fut tant surprise par les agissements de la négociante qu’elle se mit à se questionner. Elle et son enfant, imaginaire pour beaucoup, passèrent d’un transport à l’autre cachés du regard des autres ; et seule la femme en ressortit. Le visage crispé par une angoisse que les plus acariâtres n’auraient osé dénoncer comme factice ou inventé.

La suite fut expédiée de main de maître. La vérification de la marchandise, la fixation de la paille pour les chevaux, le paiement et les réglages des sangles et des guides … tout se fit sans heurts ni amabilité avec le contremaître.
Jusqu’au bout, Kymil fut invisible aux yeux de la commerçante.

« Veuillez déposer vos affaires contre la paille et prenez place à l’avant. »

La jeune milicienne s’exécuta aussitôt sans toutefois parvenir à croiser le regard froid et inquiet de l’autre, un regard qui passait de la ville à la forêt et Kymil jurerait avoir aperçut de l’humidité perler au bord intérieur de ces yeux bleus.
A peine installées, les chevaux avancèrent au pas et la commerçante s’enquit du plan prévu pour les mener vers leur destination.

« Nous allons emprunter la voie balisée jusqu’à la Manufacture des Jumeaux, de là, nous longeront l’orée Est de l’Astirya, plus praticable pour le chariot et il y a entre la forêt et le fleuve plusieurs petites garnisons à la frontière et des hameaux de bucherons et de chasseurs. Plus on montera, moins il y aura de garnisons ou de convois de marchands. Nous aurons alors à choisir si nous contournons l’Astirya par les steppes ou si nous la traversons. Cela dépendra des conditions météorologiques et de la détermination de vos ennemis. »


L’Earionne eut une brève réaction à l’énonciation de ses ennemis, à peine décelable par le mouvement des mèches rousse contre son front. Ses lèvres pincées prédirent à Kymil une nouvelle série de critiques ou remontrances mais il n’en fut rien. Elle vit cette femme abîmée par le chagrin et l’angoisse guider ses chevaux vers les premières marques de peinture du balisage vers la Manufacture d’armes et outils.
Toutes ces recherches effectuées en amont par Kymil, la négociante n’avait osé les faire, de crainte d’éveiller les soupçons quant à ses projets et précipiter le moment où les menaces seraient mises à exécution. Elle entrevoyait tout de même quelques erreurs manifestes dans ce choix et le fit remarquer à la trop jeune et trop confiante milicienne.

« J’ai pensé au contraire que partir dans cette direction nous donnerait une chance de prendre de l’avance si d’aventure quelqu’un nous surveillait. Répondit Kymil qui s’efforçait de paraître professionnelle et assurée. Bien qu’insolite, ce trajet vers la manufacture ne peut guère être pressenti comme une échappatoire ; dans quelques jours, ne vous voyant pas revenir, ils chercheront en vain des traces effacées par la neige.
- Vous oubliez votre présence. Dit la commerçante avec une amertume à peine contenue
- L’escorte de citoyens fait parti des affectations d’un milicien novice.
- Et les caisses de chargement ? Quelqu’un pourra parler.
- Elles sont toujours fermées. Elles ont été chargées alors que j’étais seule avec les employés et aucun d’eux n’a été curieux. »

Mais la vieille Earionne n’était pas convaincue. Elle maugréa à nouveau ses griefs vis-à-vis de la milice et les compétences de la jeune elfe ; les mots étaient durs mais le timbre tendait à se faire tremblant et l’intensité était à l’opposé de la colère. Car l’espoir que représentaient ce départ et la présence controversée de Kymil avait rendu plus faillible encore son moral.
Elle ne parvenait pas à détecter d’imposture dans la patience et la politesse de la jeune milicienne, mais ne parvenait pas à ressentir l’aplomb qu’elle en espérait. Elle venait d’un monde dur où loyauté et faux-semblant vacillaient au gré des courants et des modes, où tout s’achetait et se vendait, même la déférence. Un gouffre existait entre les deux femmes, tant générationnel que social, même leur échelle de valeurs n’était compatible que dans un monde imaginaire.

Kymil se contentait d’essayer de bien se faire voir sans avoir la curiosité de comprendre le monde d’origine de cette femme qui voyait, elle, ses ressources habituelles devenues inefficaces et se murait dans une antipathie inutile et non réciproque.

En ce petit matin d’un printemps qui tardait à s'installer, un long voyage vers l’inconnu commençait.

Avatar du membre
Nhaundar
Messages : 188
Enregistré le : dim. 30 déc. 2018 20:08

Re: La Grange de Vilaeriane

Message par Nhaundar » dim. 14 déc. 2025 15:42

X.6 Préparer le voyage.

X.7 Un attelage pour Mange-Botte.


Bien qu’un peu à l’écart de Lebher, la dite grange est composée de plusieurs bâtiments et de plusieurs espaces pour les bêtes. Des moutons profitent de l’air, protégés par leur épaisse fourrure. De nombreuses vaches y sont présentes, bien que dénué de quoi tenir le froid, elles semblent se faire discrètes et ne sortent que lorsque le besoin s’en fait ressentir. Des chevaux sont également présents, mais ils sont bien moins nombreux que leurs comparses rennes, plus adaptés au climat de la région.

Aëgis nous guide, moi et Mange-Botte, à l’intérieur des bâtiments, en quête de la directrice. Afin de ne pas faire peur avec ma monture si particulière, je préfère attacher mon Corgy, le temps d’échanger avec les personnes à l’intérieur. Etant une elfe blanche, je cherche une chevelure typique des hinions. Etrangement, lorsqu’Aëgis hèle la fameuse Vilaeriane, c’est une tignasse rouge qui se relève et se retourne, avant de venir à nous.

« Ravi de te revoir Vilaeriane. Nous avons une demande assez particulière à te faire. Enfin, quand je dis on, je veux surtout parler de mon ami ici présent. Il se nomme Nhaundar et tu as peut-être déjà entendu parler de lui, un elfe noir qui a risqué sa vie pour protéger les blessés lors de notre dernière tentative. » Déclare Aëgis en me présentant.

Il se tourne sur le côté, me laissant bien en vue de la responsable des lieux et fait quelques gestes dans ma direction. Ce n’est qu’après des regards insistant que je comprends qu’il souhaite mon intervention.

« Je heu… oui… je… Nhaundar, enchanté. » Fais-je timidement, pris de court. « J’aurais besoin d’un chari… non, » Dis-je avant de revenir vers Aëgis. « Un traîneau, c’est cela ? » Confirmant d’un hochement de tête, je continue à l’attention de sa comparse à la chevelure rouge. « J’ai donc besoin d’un traîneau, cependant ma… monture, est assez… singulière ! Le problème est de savoir si vous êtes en mesure d’adapter le système pour harnacher le traîneau, avec cette monture. Elle est… » Dis-je, avant de mimer mon corgy ave des gestes amples pour tenter vainement de d’écrire sa taille imposante.

« Peut-être que le plus simple serait de directement voir Mange-Botte ! »

J'invite Vilaeriane à me suivre pour faire la rencontre de mon Corgy Géant et ainsi saisir le léger détail de ma requête.


X.7 Un attelage pour Mange-Botte. (2)
Modifié en dernier par Nhaundar le jeu. 18 déc. 2025 15:51, modifié 1 fois.

Avatar du membre
Gamemaster6
Messages : 628
Enregistré le : lun. 2 sept. 2019 17:36
Localisation : Prêt à plonger

Re: La Grange de Vilaeriane

Message par Gamemaster6 » dim. 14 déc. 2025 20:31

Intervention pour Nhaundar


- Ah, Aegis ! Ravie de te revoir.

Face à Nhaundar, la propriétaire des lieux affiche un sourire affable, bien qu'un peu tendu. Ses épaules ne sont pas décontractées et il est facile de voir l'index de sa main droite triturer nerveusement l'ourlet de sa robe tandis que l'elfe parle. Cela dit, à mesure que Nhaundar parle, bafouille et peine à expliquer sa demande, la tension présent dans l'elfe aux cheveux rouges semblent s'évaporer. Comme si le naturel de Nhaundar calmait une certaine inquiétude des premiers instants. Lorsqu'elle parle finalement, sa voix est claire, mesurée, mais avec une pointe d'intérêt.

- Un traineau ? Ma foi, je vais voir ce que je peux faire. Montrez-moi donc cette fameuse monture.

En arrivant face au corgy géant, l'elfe s'arrête, se frotte les yeux d'une main avant de contempler l'animal avec une expression perplexe.

- C'est... un drôle d'animal. Et il ne risque pas d'aller vite avec ces pattes ridiculement petites.

Elle fait le tour du chien géant, une expression pensive sur le visage. Elle semble étudier la faisabilité d'un tel projet.

- Il va falloir que je prenne des mesures et que je fasse quelques ajustements pour être sûre que l'harnachement tienne bien. Mais ça ne devrait pas poser de problèmes. Réchauffez-vous à l'intérieur, le temps que je m'occupe de ça.

Que Nhaundar et Aegis obéissent ou non, l'hinionne se met au travail et fait preuve d'une habilité impressionnante et pleine de grâce. Elle traite le corgy avec une douceur toute particulière tandis qu'elle teste divers harnachements et sangles qu'elle adapte au mieux à la morphologie particulière de ce chien géant. Cela lui prend plus d'une heure, mais elle finit par présenter le résultat à Nhaundar. Le traineau est un modèle classique, mais l'harnachement est adapté au corgy, avec une allonge plus grande, des sangles plus larges et un harnais composé de quatre points d'accroche pour mieux répartir le poids du traineau et de ses passagers. Elle semble satisfaite du résultat, malgré le rougissement de son visage à cause du froid.

- Et voilà. Faites attention en le manœuvrant, il risque d'être un peu moins maniable qu'un traineau classique, avec un seul chien pour le tirer. Et veiller à régulièrement poncer le dessous des skis pour qu'ils continuent de glisser au mieux. Nourrissez bien le cuir des harnais, avec de la graisse, pour éviter que le froid ne l'endommage trop et ne laissez pas le cordes trainer dehors si vous pouvez l'éviter. Elles risquent de casser si elle font constamment face au gel.

Elle semblait prête à continuer, mais s'interrompt en toussotant.

- Enfin, bref, c'est prêt. Ça vous fera 200 yus.
Image

Quand on l'appelle, il apparaît !!
Et il reste, alors gare !

Avatar du membre
Nhaundar
Messages : 188
Enregistré le : dim. 30 déc. 2018 20:08

Re: La Grange de Vilaeriane

Message par Nhaundar » jeu. 18 déc. 2025 15:50

X.7 Un attelage pour Mange-Botte.

X.7 Un attelage pour Mange-Botte. (2)


Avant d’évoquer, et même en détaillant ma demande et la complication due à la morphologie particulière de Mange-Botte, je n’ai de cesse d’observer la patronne des lieux. Ma présence dérange, il n’y a aucun doute à ce sujet et ce n’est pas son sourire affable qui me fera douter du contraire. Outre la crispation observable sur son visage, signe de tension, je remarque également que ses épaules sont contractées et elle n’a de cesse de jouer avec l’ourlet.

Son attitude me met particulièrement mal à l’aise, au point où je perds mes mots et bafouille assez grossièrement. Ma réaction, si elle paraît assez puérile, a au moins le mérite d’offrir une image de moi bien moins menaçante qu’impose la réputation des shaakts et l’ajout de mon problème associé à l’absence de détail, attise sa curiosité. Qu’elle n’est pas sa réaction en voyant un Corgy géant. S’arrêtant net, elle se frotte les yeux comme si un voile illusoire lui avait peint une vision irréelle. Pourtant, c’est bien d’un chient géant dont il est question.

Passé les premiers instants, elle porte sur l’animal un intérêt plus professionnel. En raison de ses pattes, plus petite que d’autres chiens en rapport avec son gabarit, elle le juge peu apte à être capable de tirer le traîneau assez rapidement. Finalement, elle prend les mesures de Mange-Botte et assure qu’il sera possible d’avoir un système adapté pour l’animal. Nous passons donc avec Aëgis, le reste du temps au chaud, à discuter de la suite des événements.

Autour d’une table, l’elfe blanc frotte ses mains de nervosité, comme pour aborder un sujet épineux, avant de se lancer.

« Sinon, après la formation des apprentis et cette histoire de relique terminée, tu feras quoi une fois libre ? »

Bien que le sujet ait été abordé il y a peu, en un sens la question me prend de court. J’ai déjà réfléchi sommairement sur le sujet, mais je ne m’attendais pas à ce qu’il me repose la question.

« Ma foi je… je ne sais pas. Ma présence ici est une lutte incessante pour me faire accepter de la population. Ce n’est pas que je ne comprenne pas les réactions en me voyant, mais… regarde Vilaeriane, j’aurais beau faire des efforts, il y aura toujours quelqu’un pour me regarder de travers ou au mieux, avec méfiance. Je pourrais partir d’ici, mais… Où irais-je ? Devrais-je faire à nouveau les mêmes efforts encore et encore ? Prouver ma valeur et tenter de me faire accepter me semble être une quête qui ne connaît aucune fin. »

Je vois que ma réponse l’affecte, je ne suis pas dupe. Cependant, il cherche à la dissimuler en mettant en avant certains points.

« Tu finiras par te faire accepter. Tu l’es du capitaine et de bien des hommes. Tout n’est qu’une question de temps et c’est une notion qu’en tant qu’elfe nous pouvons largement user. » Clame-t-il avant d’orienter la conversation ailleurs. « Que faisais-tu avant de venir ici ? Tu ne l’as jamais clairement dit. »

Cette question me rappelle à des souvenirs, des moments joyeux comme douloureux. Jouant sans y faire attention avec mes doigts, je refais le fil des derniers instants avant mon arrivée ici.

« J’étais à Oranan, chez… quelqu’un qui, m’avait également en haute estime. Je suis parvenu à me faire accepter comme ici, œuvrant pour le bien et la protection de la cité. Un jour j’ai reçu un message, un appel à l’aide. Je suis donc parti en Imiftil pour prêter main forte à un village d’êtres… assez singuliers : des lutins. » Dis-je en analysant les tics faciaux d’Aëgis.

Ses traits sont détendus et si les muscles de ses sourcils se dressent, ce n’est pas par scepticisme, mais par stupéfaction.

« Tu dis avoir découvert un village lutin ? »

« C’est cela. Ils avaient besoin d’aide pour un rituel complexe et malgré des péripéties, nous avons finalement achevé notre mission aussi bien que possible. En-tout-cas, mon séjour là-bas a été des plus agréables. Vivre auprès des lutins était une expérience… » Fais-je avant de me faire couper la parole.

« Attends, attends. Lorsque tu dis vivre auprès des lutins, comment tu as fait ? Ils n’avaient pas peur que tu les écrases ? » M’interroge-t-il.

La gestuelle de ses bras prend une plus ampleur caractéristique des arguments que l’on commence à mettre en doute. Ayant rapidement saisi le sens de sa question et d’un simple geste de la main vers le bas, je tâche de calmer ses doutes à mon égard.

« Alors, il y a une explication à cela, mais tu dois me promettre de garder cette information pour toi jusqu’à ta mort et au-delà. » Dis-je en observant autour de moi. Vilaeriane est toujours auprès de Mange-Botte et j’ai le loisir de voir à quel point elle fait en sorte de prendre soin de mon Corgy Géant, tout en travaillant. « Il se trouve que… ils connaissent un moyen de rétrécir les êtres à la taille de lutin. L’effet a duré plusieurs jours, mais…il est possible de le rendre définitif. »

Mes explications balayent les doutes de l’hinion, à présent curieux des possibilités que cela offrent.

« Rétrécir mais… mais… c’est énorme ! » S’exclame-t-il en reculant de la table. Il porte les mains à sa tête visiblement pleine d’idées. « Si ce que tu me dis est vrai, tu imagines les possibilités que cela représente ? On pourrait…on pourrait... » Continue-t-il avant que je ne vienne à lui et ne l’arrête, son attitude pouvant attirer l’attention de la maîtresse des lieux.

« Ho que oui je sais et c’est bien pour cela que je garde le secret ! Ils possèdent quelque chose qui pourrait faire tomber les barrières, réduire des hordes d’ennemis à une taille de chiots. Mais aussi puissante qu’une telle chose représente, elle possède un défaut terrible : son utilisateur. Si une telle information venait à se savoir, comment crois-tu que nos ennemis agiraient ? Lebher ferait face à une toute nouvelle menace à laquelle elle n’est pas prête et quid des lutins et de leur village ? » Je laisse la question en suspens avant d’enchaîner avec une autre. « Crois-tu qu’ils mériteraient le sort qu’on leur réservera ? »

Ma réplique lui semble avoir agi comme une claque. Estomaqué, il préfère baisser la tête et ne rien dire.

« Les lutins sont connus pour êtres particulièrement farceurs, mais ils possèdent une joie de vivre unique. C’est chez eux que j’ai connu les moments les plus doux de ma vie. Pour rien au monde je ne risquerais de mettre à mal ce petit havre de paix et de joie. »

Nous restons ainsi quelques instants sans enchaîner, avant que finalement Aëgis n’aille dans mon sens.

« Tu… tu as probablement raison. Du… du coup, que t’est-il arrivé par la suite ? » Demande-t-il fébrilement pour chasser ce moment de gêne.

« Une fois le rituel terminé, j’ai passé quelques jours là-bas. J’y ai appris quelques sorts, dont celui pour enfermer les êtres dans un étau de boue et mieux, pour les ramener à la vie. » Je le vois frémir au premier sort et s’adoucir à la mention du second. « Ils m’ont offert mon épée magique, Mange-Botte et lorsque les premiers symptômes de mon changement de taille sont réapparus, je suis revenu à la civilisation des grands-pas. C’est à peu près à ce moment-là que les choses ont dérapé. La personne qui m’avait accueilli chez elle… »

« Elle ? » Me coupe-t-il la parole avec un sourire en coin.

Pris de court, je suis déstabilisé par sa question et me fais avoir comme un bleu. Il sait que j’étais en compagnie d’une femme, mais je comprends qu’il voulait me perturber et révéler les sentiments à son égard, que je tâchais de dissimuler. Malgré la gêne en lien avec l’aptitude que possède un des lutins, il a su reprendre son calme et user de ses aptitudes pour déceler ce que je cache.

« Oui, elle. » Fais-je rougissant. « Je l’ai retrouvée dans les cellules de Tulorim. Elle voulait à tout prix retourner à Oranan en ayant appris pour la guerre qui sévissait à sa cité. La suite est simple, une rixe, la présence de miliciens pour calmer la situation et après avoir brisé brutalement leur ego, elle a fini en geôle. Je suis parvenu à l’en faire sortir, mais lorsque j’ai évoqué mon passage agréable chez les lutins… elle a mal pris ce passage assez doux, tandis que par delà les eaux, la mort faisait rage. Pour avoir traversé la mer jusqu’à moi, elle n’a pas pu participer à la défense de sa cité. Nos chemins se sont séparés en prenant des Anyors différents. Nos derniers échanges ont porté sur sa capacité à accompli son devoir...seulement si je n’avais pas été là. » Dis-je avec une profonde tristesse.

La main d’Aëgis vient se coller sur mon épaule, la serrant pour me réconforter.

« Et elle aurait probablement péri en défendant sa cité ce jour-là. »

« Peut-être. Toujours est-il que même si je ressens le besoin de retourner à Oranan pour accomplir mon devoir, je… je crains de croiser à nouveau son chemin après notre séparation, d'affronter sa réaction. » Dis-je en baissant la tête

La main de l’hinion se resserre et il cherche à croiser mon regard.

« Si tu n’es pas prêt à repartir je serai toujours là pour t’épauler, sois en certain. D’ici à ce que ce jour arrive, tu n’as qu’à renforcer tes connaissances magiques. Cette femme ne pourra pas détourner le regard lorsqu’elle verra les prouesses que tu es capable d’accomplir ! »

Je me laisse aller en arrière, levant la tête pour observer le plafond.

« Peut-être oui. Ha, si seulement les femmes étaient aussi faciles à comprendre que la magie ! »

« Ou que l’escrime ! » Déclare mon comparse à la chevelure d’or en me singeant.

« Haaa ! » Fais-je comme si j’étais dégoûté. « Manier un bout d’ferraille dans tous les sens, ça ne vaut pas une bonne boule de feu dans le coin du bec. »

« Chaque élément a son potentiel et sa manière de se battre. Tu auras beau user de magie, si elle ne parvient pas à toucher sa cible à quoi bon ? Quant à manier un bout d’ferraille, tu peux toujours te battre même si tu as épuisé toutes tes réserves. Toi, quand t’es à court de mana ba… on se comprend hein. » Se moque-t-il d’un coup de coude, mettant l’accent sur l’inutilité d’un mage sans magie.

Je reviens à une position plus confortable en enchaînant, lorgnant sur son épée.

« Eyöim te tient en haute estime et de ce que je sais, ton escrime a sa petite réputation. Comment l’as-tu apprise ? »

« Par un maître, comme bien d’autres avant moi. » Déclare-t-il tout simplement.

Derrière cette modestie, je descelle autre chose de plus profond. Il ne semble pas réticent à en parler, alors je me permets de creuser un peu plus.

« Un maître, c’est tout ? Tu vantes mes prouesses magiques, mais tu ne sembles pas dénué de talent non plus. Ou bien est-ce ton maître qui est particulièrement doué pour enseigner. »

« Ha ça. Pour être doué… il l’était. » Fait-il avec une pointe de tristesse.

« Il l’était ? Je suppose qu’il n’est plus c’est cela ? » Dis-je en poussant timidement l’hinion à s’ouvrir.

« Tu ne comptes pas lâcher l’affaire n’est-ce pas ? » Réplique-t-il avant de prendre une grande inspiration et de s'épancher sur ce qui le tient au cœur. « Le maître instructeur Ogëis s’est occupé de moi depuis mon tout jeune âge. Mes… je suis issu d’une famille de marchands itinérants. Nous voyagions sur les mers principalement. Un jour, en repartant de Lebher, nous avons été abordés par un navire de Darhàm. Mes parents ont eu beaucoup de chance en périssant ce jour-là. Ils n’ont pas assisté à ma capture et encore moins à celle de… ma jeune sœur, qui n’a pas survécu à un traitement atroce. » Déclare-t-il avec une voix tremblotante empreint d’une peine profonde. « Encore maintenant, j’entends sa voix, ses hurlements par moments. » Il passe une main sur ses yeux humides avant de continuer. « J’ai fini par être libéré par maître Ogëis, je l’ai suivi jusqu’ici et j’ai juré de dévouer ma vie à brandir mon arme contre les oppresseurs. Longtemps durant, j’ai affronté les navires de Drahàm, jusqu’à ce que Pohélis ne menace ma cité d’adoption. Ma témérité m'a… souvent octroyée bien des faits d’armes qui me sont encore loués aujourd’hui, mais elle m’a aussi mis en danger… moi et les hommes qui m’accompagnaient. Un… piège m’a été tendu et aveuglé par mon excès de confiance, j’ai sauté à pieds joints. Mon maître m'a sauvé, mais au prix de sa vie, abattu par le Garzock que nous avons vaincu à deux. »

Je le regarde, muet, sans un mot. Qu’est-ce que je pourrais bien dire ? Quelles paroles pourrais-je prononcer pour apaiser une âme ainsi tourmentée. Je vois bien qu’il ne me dit pas tout cependant, je n’ai clairement pas envie d’insister, de remuer le couteau dans la plaie.

« On lui aura mis une sacré dérouillé à celui-là hein ? » Fais-ce après un léger moment.

« Oui en effet. » Réplique-t-il en souriant légèrement. « Le vaincre est le plus beau cadeau que tu as pu me faire. »

« Plus que te ramener à la vie ? » Dis-je surpris.

« Non. »
Dit-il en souriant plus franchement. « J’ai pu voir sa mort et assister à sa défaite. »

« Plus qu’assister ! Si tu n’avais pas été là, jamais je n’aurais pu le vaincre. »

« Oui. » Cède-t-il. « On l’a eu à deux. »

Après cet échange qui nous a permis de nous rapprocher davantage, de mieux nous comprendre l’un et l’autre, nous restons muets. Une douce quiétude après les émotions qui ont accompagné nos révélations, jusqu’à ce que l’elfe rousse nous interpelle une fois son travail terminé. Elle met en avant les points sur lesquels il a fallu faire des ajustements et m’explique comment entretenir le traîneau : ponçage des skis, nourrir le cuir des harnais avec de la graisse pour le protéger du froid mordant de la région, tout comme il m’est conseillé de ranger les cordes afin qu’elle ne casse pas à cause du gel. J’écoute et examine tout cela avec un grand soin, avant de payer la prestation de deux pièces d’argent.

J’ai hâte d’aller me promener avec Mange-Botte, mais il me reste encore des choses à faire avant cela, comme vendre les équipements des assassins pour faire le plein des potions que j’ai dû consommer à cause d’eux.


X 8 Former, pas seulement instruire.

Répondre

Retourner vers « Lebher »