La Taverne de la Porte des Enfers

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Yuimen
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La Taverne de la Porte des Enfers

Message par Yuimen » ven. 5 janv. 2018 12:34

La Porte des Enfers

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[…] La porte est dégondée. A l'intérieur de l'énorme bâtisse se déroule, comme à l'accoutumée, une bataille épique entre les clients, tandis que Kesh tente de ramener ses ouailles au calme à grand renfort de gourdin. Il ne faut pas être chatouilleux pour apprécier un coup sur le crâne de la part de Kesh. Lui-même ancien chasseur de renom, il a décidé de prendre sa retraite il y a quelques années déjà afin de monter une auberge où tous les chasseurs de la génération suivante pourraient bénéficier de ses conseils et de sa bibine bien fraîche. […]
- Orlyn.
La Porte des Enfers est une taverne en pierre brute et aux murs épais qui lui confèrent une fraîcheur agréable tout au long de l'année. Solide et incroyablement spacieuse, c'est le lieu préféré de tous les chasseurs de vers, ces personnes déterminées que la chaleur et le sable n'effraient pas et qui partent parfois tuer un de ces monstres gigantesques qui vivent dans le désert à l'est d'Imiftil pour en ramener la viande, la peau, ou l'ivoire. Ceux-là pourtant sont d'incorrigibles querelleurs et il n'est pas rare de les voir se mettre sur le gueule pour une simple vétille, ce qui dégénère invariablement en bagarre générale.

Le nom de l'auberge, au premier abord peu attractif, provient de l'énorme cheminée encastré dans le mur au fond du bâtiment. L'âtre, large comme six hommes et haute de moitié, servirait parfois à faire cuire des tranches de vers, les jours de bombance.
La rumeur dit toutefois que ce nom viendrait du fait que bon nombre de chasseurs ayant fréquenté cette taverne ne sont jamais revenus du désert.

A vous de voir ce qu'il en est.

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Selen
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Re: La Taverne de la Porte des Enfers

Message par Selen » ven. 21 janv. 2022 14:34

Arrivé dans la ville de Yarthiss pour la première fois, je déambulai dans les ruelles afin de trouver un endroit où des indicateurs pourraient me donner des indices sur la position de Brytha et des siens. Je vaquai dans ces voies dédiées au commerce et à l’artisanat un bon quart d’heure, apercevant de loin le port fluvial et les quais chargés de troncs d’arbres fraîchement coupés et débités en rondins. Je trouvai enfin l’endroit qui me sembla idéal pour ma tâche : une taverne au nom pour le moins équivoque : « La Porte des Enfers ». Ça annonçait du lourd. Ce n’était sans doute pas une petite auberge paisible où des pieds-tendres sirotaient du thé. Ça sonnait aventureux, agité et… bagarreur.

Un tabouret s’écrasa juste à côté de moi lorsque je passai la porte de l’établissement. Apparemment, deux groupes rivaux aux mines patibulaires en étaient venus aux mains pour quelques obscures raisons, et mettaient l’endroit à sac pour en découdre. La bagarre était observée de tous les coins de la pièce ou se terraient des voyeurs satisfaits, aux sourires hagards et aux visages intéressés. J’en vis même prendre des paris sur les vainqueurs du combat. De mon côté, j’évitai de me mêler à la rixe, et me faufilai jusqu’à un observateur solitaire. Un elfe à la peau boisée, aux cheveux roux tressés en catogan à l’arrière de son crâne, et aux longues oreilles percées. Certainement pas un usuel de son espèce. Plus une sorte d’aventurier sortis de force de sa forêt natale pour parcourir le monde et se dégoter richesses et gloire dans un monde bien humain. Il me lança un regard curieux, et je lui fis signe de la tête en simple guise de salut. Je lui désignai le tabouret libre à son côté, d’un signe de la main, et il opina du chef, avant de se retourner vers la scène de bagarre toujours plus violente et destructrice.

Je m’assis et contemplai à mon tour un instant les clients se fracasser mâchoires, nez et autres saillances du visage. Ils finirent par se calmer, la plupart étant étendus par terre, groggys. Le camp des « vainqueurs » ramassait leurs blessés et se gaussaient alors que les perdants rampaient et claudiquaient jusqu’à la sortie, non sans promettre une revanche prochaine, en sus de quelques insultes et menaces supplémentaires. Le tenancier de la taverne, un humain robuste à la mine patibulaire, venait de déposer un gros gourdin sur un coin du comptoir, et notait au charbon sur une petite plaquette de bois quelques chiffres. Sa grosse voix résonna dans la salle :

« Cinq, et dix… ça nous fait un total de 175 yus. Payables en une fois et sans délai. »

Nul n’osa contester, et le camp des vainqueurs commença à farfouiller leurs poches, jusqu’à ce qu’un individu finaud, un des spectateurs, ne lance une bourse au tavernier.

« Tiens Kesh, celle-là est pour moi. »

Et il fallait le comprendre : il venait de gagner pas moins du double du montant en pariant sur ces gueules cassées. L’incident clos, l’elfe se tourna vers moi et aborda lui-même la discussion.

« Alors, tu veux quoi visage pâle ? T’as pas l’air du coin. »

Je passai outre le surnom : combien de fois ne s’était-on pas adressé à moi par ce genre d’appellations… Je savais avoir le teint fort clair pour un « humain » en apparence, quand on ne percevait pas mes origines elfiques. Aussi embrayai-je sans tarder.

« Je viens de Tulorim. Je suis ici pour rencontrer Brytha. »

L’elfe s’esclaffa, et rétorqua :

« Ah ! Ouais ben ce n’est pas ici que tu vas la trouver : elle ne fréquente pas trop les bars, la soi-disant déesse. »

Sa remarque était rhétorique, je ne la relevai pas, et le poussai d’un regard insistant à poursuivre. Il soupira devant mon potentiel manque d’humour, et poursuivit bon gré mal gré.

« T’es pas l’premier à vouloir la chercher. Tu dois savoir que j’en n’ai jamais vu un seul revenir. Je dis ça, je dis rien. »

« Je sais me défendre. »

Flegmatique, assuré, j’avais prononcé ces mots posément. Il me jaugea un instant du regard.

« Soit. Tu trouveras rien en ville, c’est bien plus au Sud qu’elle serait apparue. Sur une soi-disant île du Lac Brumeux, qu’on ne sait même pas si elle existe. Faut dire, y’a un sacré brouillard dans le coin, personne ne pourrait l’apercevoir des rives du lac. »

Je gardai un visage impassible. Ça correspondait aux informations que j’avais reçues.

« Et comment y accéder ? À ce lac, à cette île ? »

Il secoua la tête, me regardant comme si j’étais suicidaire. Puis, il haussa les épaules et poursuivit :

« Rien de plus simple pour trouver le lac : Faut longer la Forêt du Renouveau vers le Sud jusqu’à croiser la Yarthe. Elle tient sa source du Lac. Par contre une fois là-bas, bonne chance. Faudra fabriquer un radeau ou une barque. Et encore, avec ça tu n’es pas rendu. Les brumes du lac sont magiques, il parait. Si bien qu’on n’y retrouve jamais son chemin, finissant toujours par arriver sur une rive opposée sans rien croiser. Ou y rester, d’ailleurs, défoncé par les créatures y vivant. »

Je ne me démontai pas et restai neutre d’expression. Une fois encore frustré de son manque d’effet, il poursuivit.

« Il parait qu’il existe un passeur… un être fantomatique et mystérieux qui connaîtrait les passages parmi la brume. Mais c’est que des conneries : qu’est-ce qu’un foutu être magique aurait à gagner à faire passer des paumés sur le lac ? C’est pas comme si c’était un chemin majeur. Il ne mènerait que sur le Territoire de la Sororité. Et ces folles féministes raccourcissent d’une tête tous les mâles qui osent traverser leur frontière. »

J’opinai du chef.

« Merci. Je saurai me contenter de ces informations. Si je ne reviens pas… tu auras une victime de plus à rajouter dans ton récit, l’elfe. »

Je lui glissai une pièce, qu’il rangea sans tarder, et je laissai là mon compaing temporaire. Je n’avais plus de raison de rester là : j’avais un objectif, et un moyen de m’y rendre. Je sortis de la taverne et me mis en route vers ma destination, récupérant Aster au passage.

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