Le Port

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Yliria
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Re: Le Port

Message par Yliria » mer. 13 janv. 2021 21:40

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Nouvelle route

Dire au revoir à Elena fut étrangement difficile. L'ynorienne avait été d'une telle douceur avec moi que la sentir me prendre dans ses bras me serra la poitrine. Je lui rendis brièvement son étreinte, certaine de ne pas pouvoir longtemps supporter ce genre de geste d'affection. Je ne voulais pas commencer à laisser couler des larmes alors que j'avais décidé moi-même de partir. Frans fut beaucoup plus formel, mais m'assura que je pouvais lui rendre visite dans le comté de Shory, au Sud-Est. Je l'en remerciai d'un sourire avant de laisser Cherock faire ses adieux. Je préférai attendre plus loin à ce moment-là. Je détestai les adieux, mais regarder quelqu'un en faire risquait de m'achever et ce n'était vraiment pas le moment.

Lorsque nous sortîmes finalement dans les rues assombries de la ville, je m'étais cachée derrière mon masque et avait repris une expression plus sereine. J'accompagnai donc Anthelia et Cherock dans les rues jusqu'à ce que le fulguromancien ne se rende compte qu'il avait oublié quelque chose et ne retourne chez lui à vive allure, nous laissant derrière à l'attendre.

- Tête en l'air...

Je pouffai doucement face à la réplique soupirée par Anthelia et elle me rejoignit juste après. La nuit était agréable et le vent chargeait avec légèreté les relents de la mer vers laquelle nous nous dirigions. De quoi calmer un peu les esprits tendus par la guerre et l'incertitude qui planait comme une ombre sur chacun.

- J'ai encore du mal à comprendre que tu ais décidé d'y aller.

- J'ai mes raisons... Et j'espère naïvement pouvoir apporter quelque chose, peut-être faire une tout petite, infime différence. Je ne sais pas, mais je ne pouvais pas rester les bras croisés à attendre en sachant ce qu'il se passe.

Elle resta silencieuse quelques instants, comme si elle réfléchissait à mes paroles. C'était sorti tellement naturellement que je n'y avais pas du tout réfléchi, mais ça faisait tellement sens que je n'allais rien ajouter à cela. Elle finit par me regarder à nouveau et me sourit. Pas d'un sourire amusé, non, d'un sourire compréhensif et sincère, comme si elle décidai d'approuver mes paroles avec ce simple geste.

- Tu es une jeune fille bien courageuse.

- On m'a surtout dit que j'étais une satanée tête de mule, mais je préfère ton terme. Plus agréable à entendre.

Elle se mit à rire doucement avant d'écarquiller les yeux en fixant l'autre côté de la rue. Je suivis son regard et fit la même chose qu'elle en voyant Cherock approcher avec... un renne. Un renne couleur beige... avec un nez rouge.

- Me demandez pas pourquoi, je suis pas sûr moi-même. Mais voilà, je vous présente Brume.

Je ne comprenais pas d'où pouvait venir cet animal, mais l'immense lèche qu'il fit en bavant sur la moitié du visage de Cherock me fit crisper la mâchoire. Je tournai la tête vers Anthelia, prête à exploser, mais elle était dans le même état que moi et je ne pus me retenir d'éclater de rire face à la vision d'un Cherock au visage ahuri et luisant de bave. Je me tenais les côtes tandis qu'Anthelia cherchait désespérément de l'air pour continuer à répéter en boucle « Brume.. Mais Brume ! » avant de m'achever.

- Un temps baveux est annoncé.

Je tentai vainement de reprendre mon souffle entre deux éclats de rire et j'avais mal aux côtes et à la gorge à force de rire alors que nous suivions Cherock sans cesser de nous moquer gentiment. Je parvins finalement à me calmer après de longues minutes qui me laissèrent une légère crispation dans le ventre à force de rire. Je soupirai et inspirai longuement pour chasser les derniers éclats, écartant mon masque pour essuyer les larmes qui perlaient au coin de mes yeux. Cherock avait, sans le vouloir, laissé échapper tant de tension d'un coup que j'avais explosé pour au final pas grand chose, mais cela en valait la peine, sans aucun doute là-dessus.

Une fois le port en vue, la tension remonta légèrement. La zone était étonnamment active malgré l'heure tardive et nombre de marins semblaient affairé à embarquer caisses et provisions sur les bateaux mouillant silencieusement près des pontons. Cherock demanda l'emplacement du fameux bateau, le Cadran et nous y conduisit sans attendre. Bateau encadré par des miliciens qui semblaient empêcher de monter à bord ceux n'ayant pas une permission explicite. Je grimaçai par anticipation et, évidemment, cela ne loupa pas. Cherock put passer en ouvrant simplement son manteau, mais le premier milicien m'arrêta fermement en plaçant un bras devant moi.

- C’est la noiraude que vous promenez dans la ville ? Est-elle autorisée à monter sur le Cadran par le Conseil ?

Je retins tout juste un grognement exaspéré, mais Cherock régla le problème plus efficacement que j'aurai jamais pu le faire en parlant d'un ton sec et sans appel

- La semi-shaakte, soldat. Vous feriez mieux de tenir votre langue, votre collègue et supérieur Sergent Kiyoheiki est aussi un semi-shaakt. De plus, elle est une éminente membre des Danseurs d’Opale, alors elle a plus que sa place dans la mission pour laquelle le Conseil nous envoie.

Je fixai Cherock, partagée entre surprise, gratitude et perplexité. Qu'il me défende me faisait chaud au cœur, mais d'où sortait cette histoire d'éminente membre des Danseurs d'Opale ?

(Ben... tu es la seconde de Sorinion, ça fait de toi une commandante en second, et en plus tu as été apprentie d'un membre du triumvirat, approuvée en tant que Danseuse par deux d'entre eux qui t'ont recommandé à toutes les commanderies... Ce n'est pas rien.)

(Je ne voyais pas ça comme ça... Mais lui peut pas le savoir!)

(Non en effet. Ça s'appelle un mensonge Yliria. Il est simplement tombé juste sans le savoir.)

Je n'ajoutai rien et me contentai de remerciai Cherock à mi-voix lorsqu'il s'excusa d'avoir menti à mon sujet. Honnêtement je me fichai qu'il mente pour m'aider, mais là j'avais encore du mal à complètement enregistrer les paroles d'Alyah qui ne manqua pas de se moquer de moi. Je l'ignorai pour reprendre ma marche à la suite de Cherock pour ensuite grimper sur le pont du navire.

Là aussi l'activité était intense, mais je me gardai bien de gêner et restai loin des mouvements des marins et miliciens. Jusqu'à ce que quelqu'un s'approche. J'écarquillai les yeux en voyant un semi-shaakt s'approcher, vêtue d'une armure verte, et portant sous son bras un casque qui devait miroiter en plein jour. Cherock s'adressa à lui en le nommant sergent et je compris qu'il s'agissait du fameux semi-shaakt dont il avait parlé peu avant. Il était.. étonnamment petit, au moins une tête de moins que moi, et ne semblait pas être beaucoup plus vieux non plus. Lorsque Cherock fit les présentations, je lui offris un simple hochement de tête, pas bien certaine de comment me comporter face à lui. Alyah grogna et me poussa à dire quelque chose après avoir retiré mon masque.

- Euhm... Enchanté, Sergent, je m'appelle Yliria Varnaan'tha et, comme Cherock l'a dit, je vais me joindre à l'appel émis pour contrer Omyre. Ravie de vous rencontrer.

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Kiyoheiki
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Re: Le Port

Message par Kiyoheiki » jeu. 14 janv. 2021 11:52

~Auparavant~

~6~

Lorsque je me rapproche casque sous le bras de l'autre personne mandatée par le Conseil, je constate qu'il n'est pas seul. À ses côtés se tiennent celle que j'ai salué ce matin, la tatoueuse magique Anthelia, ainsi qu'une autre jeune femme. Si je suis quelque peu familier avec la première, je laisse mon regard s'attarder un peu plus longuement sur la seconde. Elle a visiblement une ascendance shaakte avec une peau plus sombre que la mienne et des oreilles pointues, mais quelques détails la différencient. Elle a un visage plus rond que les elfes aux pommettes saillantes que j'ai pu rencontrer et des mèches noires dans sa chevelure blanche. A-t-elle également le sang mêlé ? J'ai fait la rencontre de bien des demi-elfes, mais ce serait la première semi-shaakte qu'il m'est donné de rencontrer. J'ai beau avoir grandi rapidement ces derniers temps, il n'empêche qu'elle s'avère plus grande que moi d'une demie-tête. Je n'y prête cependant pas autant d'attention qu'au fait qu'elle porte armes et armure avec l'assurance de qui sait s'en servir. La cape qu'elle arbore pousse mon esprit à faire un lien avec une toute autre personne, mais je m'efforce de refouler ce souvenir.

Je reporte mon attention sur le Porteur de la Kizoku-Rana, l'interrogeant du regard en haussant à peine un sourcil. Le ser O'Fall fait les présentations, indiquant que la tatoueuse magique compte participer à l'effort de guerre, que l'autre jeune femme se prénomme Yliria et se joint à l'équipe des aventuriers indépendants. Il s'empresse d'enchainer sur une garantie, me certifiant qu'elle est qualifié pour cette mission. Ou que si ce n'est pas le cas, lui non plus. Peu après, c'est la damoiselle qui se présente poliment. Yliria Varnaan'tha, confirmant se joindre à l'appel contre Omyre.

Je manque presque sursauter à la soudaineté de la voix d'Okina.

(Oh...)

(Qu'y a-t-il, Okina ? Dois-je demeurer sur mes gardes à proximité d'eux ?)

(Cœur troublé n'a point de raison d'être en cet instant, mon Protégé. Non. Des présences familière et depuis longtemps éloignées sont la raison de mon intervention. Puisse mon Protégé pardonner ce flagrant manque de contrôle et de sagesse.)

(Réagir à des émotions n'est pas forcément une faute exigeant pardon.)

(Réaction futile et déplacée, indigne de qui prétend vous guider...)

La voix de ma faera semble presque vexée ou troublée de s'être ainsi allée à s'exprimer. Elle qui est toujours calme et réfléchie me fait l'impression de... Se mettre à bouder. J'élève la main à mes lèvres, m'éclaircissant légèrement la gorge pour masquer mon amusement qui n'a rien à voir avec mes interlocuteurs. Je salue le trio face à moi en apposant mon poing fermé dans ma paume gauche, casque coincé dans le coude.

"Sergent D'Esh Elvohk Kiyoheiki, milicien d'Oranan. Je suis honoré de faire votre connaissance."

Je me redresse et réfléchis un instant. Bien des questions me tournent dans la tête. Je pourrais l'interroger quant à ses états de service, mais je suis persuadé que cela froisserait grandement celui qui se porte garant d'elle. Mon attention se porte effectivement sur le jeune homme.

"J'aimerais être en mesure de me fier à vos paroles, ser O'Fall, mais si j'ai foi dans le Conseil, je ne vous connais personnellement que trop peu. Et quand bien même vous me seriez familiers l'un et l'autre, l'expérience m'a par trop souvent prouvé que l'on peut se fourvoyer sur la teinte du cœur des gens."

Droit et direct, je ne leur laisse pas le temps de penser qu'ils me sont indifférents ou sont à l'origine de sentiments négatifs. C'est un fait. Depuis le milicien au service des forces adverses depuis des années et me poignardant dans le dos jusqu'au mercenaire retournant sa veste au dernier moment, j'ai eu pléthore d'exemples. Je détends mes traits et pousse un léger souffle, laissant paraître un petit sourire.

"Toutefois, il n'est pas dans ma nature de ne laisser aucune chance à ceux que je rencontre. Un acte valant mille mots, j'attendrai de vous voir à l’œuvre. Pour l'heure, je vous suis simplement gré de votre appui."

Maintenant mon casque contre ma hanche, je laisse mon regard violet passer de l'un à l'autre. Le voyage durera quelques jours, suffisamment de temps pour faire connaissance avec ces futurs compagnons d'arme.


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Jorus Kayne
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Re: Le Port

Message par Jorus Kayne » ven. 11 mars 2022 16:14

III La lettre.
IV Conversation entre deux pains.


Une fois que j’ai ma réponse, je quitte l’auberge pour le port à une vitesse qui m’aurait étonné, si je n’avais pas l’esprit focalisé sur le moyen de retrouver Castamir. Je parcours rapidement les rues menant au port, manquant à plusieurs reprises de faire tomber des caisses de marchandises, des passants, ou moi-même, devant réaliser des acrobaties pour ne pas finir les quatre fers en l’air. L’air marin se fait de plus en plus fort à mesure que je me rapproche de l’océan. Cette odeur m’atteint et ravive de nombreux souvenirs, alors que je m’immisce dans le tumulte des dockers.

Dans chaque port, il y a une certaine cohésion entre les marins, qu’ils passent leurs temps à récurer le pont, jusqu’aux capitaines qui s’enorgueillissent de telle ou telle réussite en mer. Ce sont ces derniers que je cherche du regard, car si certains naviguent au gré de leurs besoins, d’autres possèdent des cycles périodiques entre les cités, grâce à des accords marchands perpétuels. Parmi tous les lieux où l’on pourrait les trouver, là où l’alcool coule à flot les attire comme des mouches. A défaut de les avoir trouvés à l’auberge où je me trouvais, faisant également office de taverne, un des bâtiments du port fait certainement cet office. J’observe les alentours et avise d’un lieu plus animé que les autres, offrant également une vue panoramique sur les allées et venues des dockers.

En pénétrant à l’intérieur, une forte odeur alcoolisée m’emplit les narines. De nombreux hommes et femmes sont présents, trinquant, festoyant, jouant et chantant dans chaque recoin du bâtiment. C'est le bon endroit.

(Oulà ! Ca en fait du monde à questionner. Tu comptes t’y prendre comment ?)

(On va commencer par celui qui connaît les mieux ces soûlards et sert toute cette gnôle !)

Je me dirige vers l’homme qui gère le comptoir d’une main de fer, refusant de servir lorsqu’il n’est pas payé. Assez corpulent, le crâne rasé et un petit bouc brun, il me regarde d’un œil mauvais lorsque je m’approche de lui.

"Je cherche quelqu’un, une taurionne. Vous pourriez me renseigner ?"

"T’as cru que c’était une maison de passe, tu m’as pris pour quoi ? Je sers les clients, je m’occupe pas des relations de couples. Dégage de là si tu bois pas !" Grogne-t-il

Contrarié par la remarque, j’attire son attention en posant sur la table un yus d’argent. Il s’apprête à la prendre, mais je suis plus rapide que lui.

"Je peux te trouver n’importe quelle femme, mais faudra aligner plus que cela !" Déclare-t-il, un peu plus intéressé.

Maintenant que j’ai capté son attention, c’est à moi de mener l’échange. Je tends de nouveau la pièce, mais la garde sous ma main.

"Non ! Je cherche une taurionne qui aurait pris la mer ici, il y a quelque temps. Je cherche à savoir avec qui elle a vogué et surtout dans quelle direction."

Mon interlocuteur me regarde en plissant les yeux, lorgne une seconde sur la pièce, puis se tourne vers une femme plus loin.

"Mérédith. Viens par là !" Déclare-t-il à une charmante femme dans la trentaine, au regard mutin. Celle-ci s’avance et m’observe des pieds à la tête. "Toi qui portes plus attention aux femmes qu’aux hommes. Une taurionne qui serait passé ici prendre la mer, ça te parle ?"

"Une taurionne ? Ca se pourrait oui ! Qu’est-ce que j’y gagne ?" Demande-t-elle.

"J’ai de l’argent, si c’est ce que vous voulez ! Je dois la retrouver. S’il-vous-plaît !" Lui dis-je.

"Hooo, comme c’est mignon, il est si poliii !" S’amuse-t-elle en me caressant la joue.

Une voix forte se fait entendre dans l’établissement qui couvre le bruit ambiant.

"Hey Mérédith, depuis quand tu t’intéresses aux hommes ?"

Elle vient d’un homme bien en chair et tous ceux, entre lui et nous, s’éloignent pour laisser le champ libre pour admirer la scène.

"Un homme ? Diantre, j’aurais parié que c’était une femme !" S’offusque-t-elle faussement. "Tu me diras, il m’a l’air bien plus viril que toi Dourg !" Termine-t-elle en provoquant l’hilarité générale.

Loin de s’en offusquer, gras-du-bide s’approche de nous, ou plutôt d’elle.

"Ha oui ? Dans ce cas, tu accepterais bien une p’tite danse, juste toi et moi ?" Propose-t-il.

Elle fait mine de réfléchir avant de repousser l’idée.

"Non merci ! Il me faudrait un homme, un vrai, pour me donner satisfaction. Hélas, je n’en vois aucun !"

"Laisse-moi quelques minutes et je vais te donner plus que tu n’as jamais eu !" Insiste-t-il en la saisissant fermement au poignet.

"Aucune chance avec toi ! Lâche-moi Dourg, tu me fais mal !" Gémit-elle de douleur.

"Fais pas ta timorée, je vais te…" Commence-t-il avant que ma main n’arrête la sienne, sans qu’il ne puisse me faire lâcher prise. "Il veut quoi le gringalet ?"

"Elle t’as demandé de la lâcher !" Dis-je en y mettant toute ma conviction.

L’homme hésite un instant, avant de se reprendre, poussé par les moqueries de ses camarades, voyant que j’ai le dessus physiquement.

"Fou-moi le camp gamin !" Dit-il en armant son poing libre.

J’esquive le coup visant ma tête, d’un simple pas en arrière. Manquant sa frappe, mon adversaire du moment cherche à m’attraper, mais je suis plus vif que lui et ses réflexes amoindris par une haleine chargée en alcool. Agacé par ses échecs, il lâche enfin Mérédith pour s’occuper de moi avec ses deux mains. Malgré son ivresse, il accélère ses frappes. Habitué à des adversaires plus dangereux qu’un marin ivre, je n’ai pas de mal à éviter les coups. Pas en arrière, esquive sur le côté, parade du bras, j’enchaîne différentes parades et esquive pour dérouter mon adversaire et diminuer ses chances de me frapper. Contrairement à lui, je commence à m’habituer à ses assauts et profite d’une ouverture pour me loger sous son bras et bloquer ses jambes, le faisant tomber lourdement au sol, dans l’hilarité générale.

"Sal petit, tu vas me le payer !" Me menace-t-il en se relevant.

Je me prépare à éviter un coup direct, comme il m’a habitué, mais c’est une chaise qui se dirige vers moi. La maniant de ses deux mains, elle se brise sur mon épaule que je présente pour bloquer le coup. L’impact est fort et me fait tomber à la renverse. Je suis rapidement relevé, mais mes pieds ne touchent plus terre. Tenu par la force de ses bras au niveau de la nuque, je commence à suffoquer avec la pression.

"Dourg ! Ma chaise putain !" Hurle l’homme derrière son comptoir.

Visiblement, personne ne semble vouloir me venir en aide et pourtant, je souffre terriblement des attaques olfactives qui m’agressent le nez. J’essaie de me défaire de sa prise, mais incapable de saisir une prise correcte, cette fois-ci je perds le duel de force. Il me faut trouver une parade pour m’en défaire et vite.

(Tant pis pour toi, c’est toi qui auras commencé avec la chaise !)

La femme peut m’être d’un grand secours pour retrouver Castamir et dans cette optique, je compte user de toutes les méthodes qui seront bonnes pour y parvenir, même défaire un adversaire lâchement. Mon pied vient donc trouver sournoisement la partie sensible de l’anatomie de mon adversaire. Du coin de l’œil, je perçois les spectateurs qui se tiennent l’entre-jambe, comme s’ils ressentaient le choc. Quant à l’intéressé, il se cambre en avant à cause de la douleur, dans un gémissement qui me fait plaisir. Son étreinte se relâche suffisamment pour que j’en défasse complètement. J’éloigne ses bras pour me laisser le champ libre et viens caresser violemment son nez de mon front, ne laissant de cet échange, qu’un filet de sang tirant sa source d’une animosité réciproque.

J’enchaîne les coups avant qu’il ne se reprenne et ne soit de nouveau une menace. Guidé par mon énergie, mon bras passe au travers d’une garde fébrile et vient percuter sa gorge. Une frappe tenant sa rapidité du serpent, mais aussi une certaine sournoiserie. Sa capacité à respirer étant amoindris, sa défense s’en fait encore sentir. Tandis qu’il se tient la gorge, je le frappe à l’abdomen sur le côté. En règle générale, cette partie est plus tendre, même chez les hommes bien bâtis comme les marins. Ma frappe remontant légèrement vers le haut, elle force l’expiration d’une partie de l’air contenu dans ses poumons. J’attrape ensuite l’arrière de sa tête qui se penche vers moi et y joint avec force mon genou. Sonné, il titube en arrière, mais reste pourtant sur ses appuis.

(Il est temps d’en finir !)

Je me précipite vers lui pour réduire la maigre distance qui nous sépare pour attraper ses bras et lui sauter dessus, en enlaçant son abdomen de mes jambes. Affublé d’une charge supplémentaire, mon opposant perd l’équilibre et tombe en avant. De mon corps, je le guide selon mon gré pour faire terminer sa chute sur le dos, tandis que je me déporte sur le côté. Je passe ma jambe qui s’est retrouvée dans son dos, devant, isolant le bras où je me trouve et viens le tirer dans un angle qui déplaît à ses articulations. Hurlant de douleur, l’homme cherche à se libérer, en vain. Plus il insiste et plus je force. C’est inévitablement qu’il abandonne.

"Arrête ! ARRETE ! J’me rends !"

J’attends quelques secondes avant de relâcher prise, pour lui faire comprendre que c’est moi qui prends cette décision et non lui. Je me remets sur pieds d’une roulade arrière et observe sans rien dire l’homme qui peine à se relever, calmant les battements de mon cœurs ainsi que ma respiration. J’ai droit à des acclamations, mais j’en ignore la raison. Pour tout dire, je m’en fiche même. Je m’attends à ce que mon adversaire réplique, mais il n’en est rien. J’ai le droit à un regard mauvais, tandis qu’il est accompagné par ses petits camarades, lui disant qu’en agissant comme il l’a fait, ça devait bien arriver un jour. De mon côté, je retourne au comptoir revoir la femme. Je prends une gorgée de son verre avant de lui redemander à nouveau nonchalamment, passant un main dans mes cheveux pour me recoiffer.

"Donc cette elfe verte, par où est-elle partie ?"

La femme me caresse à nouveau le visage avant de répondre avec des yeux doux.

"Mmm, voilà un homme comme je les aime ! Tu es sûr de ne vouloir que cette taurionne ? Nous pourrions nous entendre toi et moi !" Me propose-t-elle en venant plaquer sa généreuse poitrine contre mon buste, ses bras enlaçant ma nuque.

Elle approche lentement son visage du mien, dans une attitude féline face à une proie succulente et embrasse finalement mon doigt qui s’est interposé entre nos lèvres. Je recule de quelques centimètres pour réitérer ma question.

"Vous êtes une femme très attirante, je dois l’avouer. Pourtant, ce n’est pas vous qui habitez mes rêves et mon cœur. Maintenant dite-moi, où se trouve cette elfe !"

Sans cesser de fixer mon regard, elle provoque une certaine fébrilité en moi, en léchant langoureusement mon doigt avant de répondre.

"Y’en a qui ont de la chance !" Prenant ma main dans la sienne, elle rapproche ensuite son visage du mien et se décale vers mon oreille. "Tu trouveras ta belle à Eniod !" Elle termine ensuite en me mordillant l’oreille, mais mon esprit n’est déjà plus là et ma main libère la pièce.

(Pourquoi ? Pourquoi de tous les endroits de Yuimen, il a fallu que tu te rendes là-bas ?)

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