Les Habitations

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Nhaundar
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Re: Les Habitations

Message par Nhaundar » dim. 24 mai 2020 15:30

VII. 1 Etudes magiques (suite).

Les jours passent sans que Sylve ne soit appelée. Je profite d’un moment de solitude pour étudier une capacité magique qui m’a intrigué. Lors de notre retour à Oranan, nous avons eu affaire à un affrontement avec des hommes de l’intendant. Alors que le seul mage du groupe n’était pas en état de lancer de sort, c’est un archer qui a utilisé la même magie et étrangement, il m’a semblé qu’elle provenait de son avant-bras. Je n’ai pas eu le temps de m’y intéresser, mais sur le moment, cela a titillé ma curiosité.

(Bien, je n’ai pas trouvé d’information précise à ce sujet dans mes livres, mais selon toute évidence il faut utiliser un sort connu. Commençons par user de la magie sur une épée.)

Pour ne pas mal interpréter les résultats j’évite de choisir un de mes accessoires et préfère quelque chose qui n’a pas été en contact avec ma magie. Je me saisis d’une des épées de Sylve et choisis le sort dont j’ai la plus grande maîtrise : la boule de feu. Plutôt que de concentrer mes fluides dans mon bâton ou au bout de ma main pour le projeter sur une cible, je préfère agir au plus près de l’arme que je pose au sol. Je fais usage de mes fluides pour les incruster dans l’arme avec les connaissances que je possède sur le sort : une boule de fluide à l’intérieur d’une enveloppe de fluide et une couche supplémentaire qui va générer une rotation jusqu’à l’embrasement et augmenter le pouvoir explosif à l’impact. Une fois fini, je regarde l’arme avec déception. Je ne sens rien, pas une once de magie ! Je me saisis de l’épée et la brandis devant moi comme si j’usais de mon bâton pour lancer mon sort. Bien entendu, rien n’y fait.

(Opérons différemment en générant le sort à incruster !)

Mon fluide se condense et alors que la boule de feu commence à prendre forme, elle explose dès que le contacte avec l’arme se fait. Un bref souffle de flamme m’atteint au visage sans gravité et quelques-uns de mes cheveux ont légèrement brûlés. Encore heureux que je n’y ai mis qu’un minimum de magie. Je me fais la remarque qu’il serait bon de ne pas brûler la demeure de mon hôte. Je décide donc de me rendre à l’extérieur dans un espace dénué d’un maximum de végétation et me laisse à l’examen de mon échec sur le chemin.

(Il est clair que cette opération ne peut se faire ainsi. Ce n’est pas tant mon incompréhension, mais le principe même du procédé qui ne fonctionne pas. Les émanations fluidiques de ma boule de feu réagissent automatiquement au contact d’une surface d’où l’explosion. Ce n’est peut-être pas le sort le plus approprié pour ce genre de tentatives, cependant si je parviens à incruster ce sort-là, je serais en mesure de le faire avec n’importe quel autre. Reste à trouver la manière de procéder.)

J’arrive dans le jardin de la demeure qui me ravit à chaque fois que j’y viens. L’espace est très coloré avec ses petits bosquets fleuris, un petit pont passant au-dessus d’une marre où la présence de quelques poissons perturbent la tranquillité de l’eau. Je prends place dans un espace confortable dans l’herbe, loin des arbres et bosquets, puis reprends la suite de mon étude magique.

(Bien. La boule de feu a explosé au contact de l’objet, ce qui est normal mais pas dans ces circonstances. Le sort que j’ai vu être utilisé était de nature électrique, il ne devrait pas y avoir de différence entre la magie de foudre et de feu, leurs effets avec une surface étant d’un certain point de vue similaire. Il y a donc un moyen d’éviter le choc entre la matière physique et la manipulation du fluide en sa forme voulue. Une préparation de l’objet recevant le sort est peut-être nécessaire. Une harmonie des fluides éventuellement ?)

Je m’essaie à la tâche et use d’un minimum de mon fluide de feu pour l’insuffler dans l’épée. Aucune réaction ne se fait remarquer, mais je sens encore mon fluide à l’intérieur. Ensuite je concentre mes fluides pour créer ma boule de feu que j’approche de l’arme. Mon fluide condensé entre en contact avec la lame, mais cette fois sans engendrer de déflagration. Cette fois-ci je suis satisfait de moi et c’est avec fierté que je brandis l’arme en direction d’une grosse pierre. Je lance le sort de feu qu’elle contient en une petite langue de feu de quelques centimètres, qui s’éteint à la seconde suivant sa naissance. Même pas assez pour embraser un fagot de paille.

(D’accord. Visiblement ma théorie fonctionne, mais il manque encore un élément ! Pourquoi ma boule de feu ne s’est pas générée correctement ? Par manque de mana de toute évidence, mais j’ai agi de la même manière que si je la lançais moi-même, mana compris. Le mana s’est donc consumé à l’intérieur de l’arme, ou d’une manière ou d’une autre il n’y en avait plus assez pour le sort. Faut-il séparer le fluide du sort ? Non, impossible j’en ai besoin pour générer le sort. Sauf si…je n’en utilise qu’une partie pour débuter le sort et le reste pour son utilisation. Un peu comme si je préparais un feu, mais que j’employais le reste du bois uniquement lorsque les flammes prennent !)

Je réitère ma tentative et insuffle mon fluide de feu dans l’arme. Ensuite je génère mon sort en prenant soin de garder séparer la génération du sort et le fluide qui va servir à amplifier le phénomène magique. Visiblement tout se passe correctement, mais l’ultime vérification doit se faire. Je brandis l’arme vers un rocher et agis comme si j’utilisais mon sort. Une boule de feu se génère et va s’abattre sur la cible tandis qu’un sourire large se dessine d’une oreille à l’autre de mon visage.

Maintenant que je suis parvenu au résultat escompté, je suis impatient d’insuffler mes protections avec mes sorts à leurs maximums de puissance. Posséder des sorts déjà prêt à l’emploi est un atout considérable ! Je suis impatient de montrer cela à Sylve alors je concentre mes fluides pour me connecter aux esprits et rassembler mes réserves magiques. J’incruste ensuite ma plus puissante boule de feu à l’intérieur de l’épée. J’agis de la même manière mais mon sortilège semble être repoussé par la lame. Comme si l’ouverture pour faire entrer mon sort n’était plus adéquate.

(Etrange, cela ne fonctionne pas ! Pourquoi ? Pourquoi ai-je eu la sensation de vouloir faire rentrer quelque chose dans un trou trop petit ? Comme mes sorts peuvent demander plus de mana en fonction de la concentration que je manipule, celui-ci répond-il aux mêmes demandes ? D’ailleurs maintenant que j’aborde le sujet, est-il nécessaire d’utiliser les mêmes fluides que le sort que je souhaite incruster ? Je devrais être en mesure de faire de même avec mon sortilège qui me permet de récupérer mes réserves magiques, cependant il ne demande pas de fluides particuliers. Par contre ce sort apporte une autre question. Sa capacité d’atteindre une zone large demande plus de mana qu’un sort ciblé. Cela implique-t-il une demande plus élevée de mana ?)

Je m’attelle à vérifier ces deux hypothèses. J’use de fluides de terre sur l’épée pour préparer le sort et ensuite ajoute mon champ de flamme à son plus bas niveau. Tout semble fonctionner, le sort à air d’effet entrant parfaitement dans l’objet malgré une dépense en mana deux fois moindre pour l’incrustation, je m’assure de la réussite en brandissant l’arme et envoyant le sort infernal autour de moi. Maintenant que je j’ai confirmé que non seulement la nature des fluides sur l’objet ne dépend pas de l’élément du sort, mais en plus il ne nécessite pas non plus de plus de mana pour un sort avec une aire d’effet, je fais appels aux esprits pour augmenter mon mana. J’use d’un maximum de mes fluides pour incorporer dans l’épée ma boule de feu la plus grosse. Je ne suis cependant pas complètement habitué à cette technique et la concentration de fluide est-elle qu’il me faut réitérer la tentative une seconde fois à cette puissance. Néanmoins la réussite est avec moi. Avec une grande fierté, je tiens devant moi une épée dans laquelle je ressens mes fluides de feu.

(C’est une véritable réussite ! J’ai hâte de voir la tête que Sylve fera. Tiens justement, comme le sort possède déjà le mana nécessaire à sa création, je me demande si elle sera en mesure de le lancer.)

Il me faut attendre son retour en début d’après-midi pour m’en assurer. Je ne peux m’empêcher de lui sauter dessus, comme le ferais un animal de compagnie tant je suis excité par l’éventualité d’une réussite de sa part. C’est avec une réelle impatience dans la voix, que je porte la chose à son attention.

"J’ai une surprise pour toi !"

"Mieux que tes sorts d’armures de la dernière fois ?" Me demande-t-elle comme si plus rien ne pouvait la surprendre.

Mes yeux s’écarquillent devant la possibilité qu’elle puisse elle-même générer sa propre armure, avec le sortilège adéquate placé dans un de ses équipements. De mes deux mains, je lui tends son épée habitée par le sort de feu. Malheureusement, ma présentation souffre d’une légère complication.

"Ne me dis pas que tu as encore joué avec mes affaires !" S’offusque-t-elle, saisissant l’arme par le manche et la pointant rageusement vers ma gorge.

Sachant ce qu’elle contient, j’éloigne rapidement la pointe de la lame, quitte à me blesser avec. Il est vrai qu’elle m’a vu observer ses nombreuses armes et armures, cependant si j’ai le droit d’y porter mon intérêt, il m’a strictement défendu de les prendre. Etant un héritage de famille, je n’ai même pas le droit de les entretenir.

"C’est-à-dire que…" Dis-je avant que l’arme ne pointe son bout menaçant à nouveau dans ma direction. "Doucement, veux-tu ? Je l’admets j’ai fauté, mais j’avais besoin de quelque chose qui n’ai pas une once de ma magie et qui ne m’appartienne pas ! L’arme n’a rien, mais tu peux voir par toi-même à l’extérieur ce qu’il en est !"

Je l’invite à pointer la lame dans la direction du rocher qui m’a servi de cible. Elle obtempère, mais si rien ne se passe, son visage lui réagit.

"Mais qu’est-ce que…Qu’est-ce qui s’est passé ici ?" S’indigne-t-elle.

Face à elle, une scène de carnage s’expose à ses yeux, indignant tout jardinier qui se respecte. Le rocher en question possède d’horrible marque de brûlure, mais c’est surtout une partie du jardin qui s’est vu dépossédée de toute végétation sur une zone de deux mètres de rayon.

(Ha mince ! Dans l’exultation, je n’ai pas fait attention aux dégâts qu’a engendré mon sort.)

"Le jardin familial, comment as-tu osé ?" Rugit-elle en pointant rageusement sa lame vers moi.

"Ce n’est pas ce que tu crois, ce…c’était un accident !" Dis-je alors que sa menace me force à reculer.

"Un accident ? Tu t’es encore amusé avec tes sorts sans avoir pris en considération où tu te trouvais. Malheureusement pour toi, il y a des répercutions cette fois !" Insiste-t-elle en donnant un coup d’estoc juste devant moi, juste pour m’intimider.

Je perçois les émanations de magie qui sont présentes dans l’arme et sa manifestation imminente. Je rassemble mes fluides terrestres pour me revêtir d’une armure de pierre afin d’encaisser le coup. Fort heureusement pour moi, les entraînements avec Sylve n’ont pas été vains. Ma protection s’établit avant que la boule de feu ne s’extrait de l’arme et ne m’atteigne. Le choc est rude et même si ma protection fait son office, j’en perds l’équilibre et tombe au sol.

"Mais que… ?" S’exclame la semi-elfe avant de se pencher vers moi. "Comment te sens-tu ? Je t’ai fait mal ? Et depuis quand cette lame génère du feu ?"

Voyant que la jeune femme s’est calmée, je romps le sort de protection et reprends ma respiration.

"Elle le fait depuis que je suis en mesure d’insuffler mes propres sorts à l’intérieur ! En fait je suis content que tu sois parvenue à lancer cette boule de feu. Cela signifie que tu seras en mesure de lancer quelques sorts durant les affrontements !"

Comprenant la situation et voyant que je n’ai pas de blessures graves, elle reporte un instant son attention sur la zone brûlée et reviens vers moi.

"Il va néanmoins falloir que tu répares tes bêtises !" Me toise-t-elle.

"Je suis sûr qu’en travaillant sur ma magie il y a possibilité de…" Dis-je avant d’être interrompu.

"Non, non, non ! Pas de magie ! Tu vas le faire à la sueur de tes mains, c’est bien compris ?" Me menace-t-elle à nouveau en pointant le bout de la lame en signe de détermination.

Bien entendu je hoche positivement de la tête. Comment pourrais-je le lui refuser ? Sans elle je vivrais dans un taudis. Je serais peut-être même mort de nombreuses fois. Mais un point essentiel m’oblige à suivre ses indications : elle prépare de délicieux lapins !

VII. 2 La voie de la lumière.

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Akihito
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Re: Les Habitations

Message par Akihito » mar. 18 août 2020 18:00

Dans le chapitre précédent...
Interarc : Apprendre des meilleurs.

Chapitre XIII.2 : Ombre du passé


Traverser la ville du port jusqu’à sa maison ne prit qu’une poignée de minutes à Akihito. Complètement remis de ses blessures, il courait à en perdre haleine, ne ralentissant que lorsque la densité des habitants l’empêchait de courir aussi vite qu’il le voulait. Et à mesure qu’il s’approchait de son quartier, une foule se formait peu à peu. Quelque chose s’était produit, indubitablement. Et à la vue des miliciens courant avec des sceaux dans la tenue des combattants d’incendie, l’origine de la volute de fumée ne faisait plus de doute. Mais quelle maison pouvait bien brûler ? L’enchanteur commençait à s’inquiéter. Sans avoir loué de vrais liens avec eux au contraire de ses parents, Akihito connaissait au moins de noms la plupart de ses voisins. Des voisins qu’il voyait tout autour de lui, éliminant peu à peu les potentielles victimes. Mais de ses propres parents, aucune trace.

(Valyus tout-puissant… Je le sens pas…)

Les maisons défilaient devant lui. Et à mesure qu’il s’approchait de la maison, la foule et l’activité se faisait de plus en plus importante. Il força le chemin, jusqu’à ce que les gens, des voisins proches, s’écartent naturellement sur son passage, le visage grave. Refusant d’admettre ce que tout cela criait, il voulait se rendre compte de ses propres yeux que sa maison était intact, ses parents indemnes et que c’était malheureusement la maison des Teryo qui brûlait.

Le destin ne fut pas aussi généreux.

Devant ses yeux horrifiés, la maison qui l’avait vu grandir brûlait. Les flammes ravageaient déjà le toit et la chambre dans laquelle il avait passé tant de temps. Une partie du toit s’écroulait d’ailleurs et les miliciens tentaient comme ils pouvaient de contenir l’incendie. Dans ce genre de cas, eux n’étaient là que pour limiter les dégâts le temps qu’un aquamancien puisse intervenir pour éteindre les flammes. Ils étaient rares, ce qui expliquait en partie pourquoi aucun n’était encore là. Akihito se maudit de s’être séparé d’Anthelia et de ses fluides d’eau. Mais l’absence de ses parents dans la foule proche de la maison écrasa rapidement ce remord.

« Père ! Mère ! »

La voix angoissée de l’Ynorien perça le tumulte et le crépitement des flammes, attirant l’attention sur lui. Lâchant son paquetage de voyage, Akihito se précipita vers la porte de la maison. Un milicien tenta bien de le retenir, commençant une phrase contenant les mots « danger » et « interdit ». L’enchanteur n’en pris tout simplement pas compte et le dépassa en courant. Le bois de la porte rougeoyait des flammes se trouvant derrière et sans hésiter, il l’enfonça à l’aide son marteau. Une explosion de chaleur l’accueillit suivie d’une volée de flammes et d’échardes, le projetant en arrière. Les oreilles bourdonnantes, il entendit à peine la foule crier de peur et se releva pour se jeter dans la fournaise qu’était désormais sa maison. Son manteau l’empêcha de prendre feu et de subir les brûlures que quiconque aurait subi en encaissant l’explosion puis en s’engageant dans la maison en flammes, mais l’incrustation de runes ne le protégeait que relativement de la chaleur.

L’océan de flammes qui composait la pièce à vivre empêchait le jeune homme de voir très bien, en plus de la fumée noire comme la suie. Akihito voulait s’assurer qu’aucun de ses parents n’était resté bloqué et prisonnier de l’incendie et si c’était le cas, tout faire pour les en sortir. Un rapide coup d’œil à l’escalier sur sa droite menant à l’étage et à la petite salle d’eau le dissuada de chercher dans cette direction : les flammes étaient bien trop hautes et plusieurs poutres s’étaient en partie effondrées. Sur sa gauche, le petit coin qui était consacré à la cuisine était vide. Il vit les ustensiles et quelques légumes disposés çà et là, comme si sa mère préparait un repas il y avait encore quelques minutes. Sautant par-dessus une rangée de flammes, Akihito arriva au centre de la pièce et quelque chose attira son attention : le sabre de son père, gisant au sol. La table était déplacée et plusieurs des petites chaises gisaient, brisées. On s’était battu ici. Et si le sabre était là…

« Père ! PAPA ! »

Couvrant son visage avec le revers de son manteau, Akihito explora plus en avant le fond de la pièce, où ses parents dormaient. Des larmes coulaient le long de ses joues, de par la fumée mais aussi la cruelle réalité qui s’offrit à lui, en renversant le paravent. Contre le mur, une silhouette gisait contre le mur. Plus que contre le mur, elle semblait avoir été épinglée, crucifiée contre le mur. Cette silhouette, c’était celle de Marcus Yoichi. Son père.

Une fraction de seconde, Akihito vit une partie des moments passés avec lui défiler devant ses yeux. Ses entraînements, ses réprimandes, ses encouragements. Ses conseils, ses éclats de rire, ses coups de colère. Tout ce qu’il n’aurait plus l’occasion de partager ou de voir. Le regard braqué sur le cadavre de son paternel, Akihito ne put que voir le sang maculer le mur et son armure brisée en plusieurs endroits. L’armure qu’il avait abîmée lors de son départ et qu’il avait refusé de réparer, pour porter avec lui une trace de la puissance de son fils.

(AKIHITO !)

Le hurlement mental d’Amy le sortit à peine de la torpeur dans laquelle il était, et c’est pourquoi il évita de peu le madrier qui tomba devant lui. Dans un fracas de bois brisé, l’imposante pièce de bois fit exploser le lit conjugal, près du corps de Marcus. La maison s’écroulait et l’enchanteur allait y passer s’il s’attardait trop.

(Tu n’as pas le temps de le décrocher, tu dois partir, MAINTENANT !)

Serrant les dents à s’en briser la mâchoire, Akihito se tourna malgré tout pour fuir. Derrière lui, une autre poutre s’écrasa au sol, condamnant ultimement l’accès à son père. Les bottes de foudre s’activèrent et l’Ynorien larmoyant sorti comme une flèche de la maison, trébuchant et roulant au sol. Une poignée de secondes, plus tard, il se releva pour voir de ses yeux le gémissement de la maison s’effondrant sur elle-même, emportant avec elle le passé, les souvenirs heureux et la dépouille du Capitaine Yoichi des Samouraïs d’Oranan. Le regard dans le vide, Akihito regarda d’un air abasourdi les miliciens s’activer autour de lui, l’aquamancien arriver, le feu se faire maîtriser. Certaines mains se posèrent sur son épaule, tentèrent de lui parler, de le mettre à l’écart. Il ne bougea pas et resta prostré, à genoux, devant l’amas de débris fumants qu’était désormais son enfance. Le temps passa et la foule se dispersa peu à peu. Quelqu’un déposa sa besace à côté de lui, mais il n’y fit pas attention non plus.

(Pourquoi ? Qui ? Comment ?)

La mort de son père n’avait rien de naturelle, c’était évident. Mais qui pouvait lui en vouloir autant ? Et où était sa mère ? Elle n’était pas dans la foule et il ne l’avait pas vu dans la maison. Il n’avait pas eu le temps de tout fouiller, mais jamais ses parents auraient permis de mourir loin l’un de l’autre. D’une manière ou d’une autre, ils se seraient arrangés pour mourir ensemble.

« Ainsi part Marcus Yoichi… Quel crétin. S’il avait gentiment fait ce que je lui demandais, il n’aurait pas rencontré Phaïtos si tôt. »

Akihito, qui jusqu’alors ignorait même jusqu’à la voix d’Amy qui tentait de lui parler d’une voix attristée, fit volte-face vers l’origine de la voix. Sortant de l’ombre d’une ruelle, deux hommes entrèrent dans son champ de vision. Le premier était un colosse gras, à peine plus grand que lui mais au moins trois fois plus large. Drapé d’un manteau qui devait valoir le double du sien, d’énormes bagues que seuls les riches avaient le mauvais goût d’arborer, l’homme portait un demi-masque couvrant une moitié de son visage. L’autre moitié révélait une peau glabre, un œil sombre et froid ainsi qu’un sourire suffisant. Un homme dont l’opulence et la carrure rappelaient de bien des manières le Conseiller Gale, à la simple différence que ce dernier respirait la bienveillance. L’homme qui l’accompagnait était tout aussi grand, mais bien plus mince. Un costume qui faisait penser à celui d’un majordome, tout habillé de noir, une moustache qui rebiquait et des cheveux grisonnant plaqués en arrière. De sa poche de veston, une discrète chaîne en or semblait maintenir un objet. Le majordome progressait avec une longue cane de marche surmontée d’un pommeau en argent. Enfin, pour s’accorder avec son acolyte, les mêmes petits yeux cruels. Au détail près que ceux-là avaient en sus un éclat qui ne donnait guère confiance à Akihito.

« Qui êtes vous, demanda froidement le jeune homme en dégainant la Kizoku.

- Gamin, si tu tiens à revoir ta mère, je te conseille de ranger ton arme. »

Joignant le geste à la parole, l’imposant personnage sorti de sa poche une bague. Une bague qui ressemblait à s’y méprendre à celle que portait toujours Hitomi sur elle. La colère qui submergea Akihito à ce moment-là était sans commune mesure, si bien qu’elle prit le pas instantanément sur son jugement. Réduisant la distance entre lui et le gros type en un clin d’œil, il se servit de son élan pour le plaquer contre le mur malgré sa corpulence évidente et glissa la pointe de sa lame sous sa gorge. La haine qu’il ressentait lui étreignait tant la gorge qu’il n’arrivait pas à articuler le moindre mot, ce qui ne sembla pas atteindre le moins du monde son adversaire qui se contenta de le regarder d’un air moqueur.

« Tue-moi, et tu retrouveras ta mère en morceaux éparpillés dans tout Yuimen.

- Lâche Monsieur Kisp. »

L’éclat de l’acier caressa la gorge d’Akihito à son tour. Le majordome avait dégainé une lame de sa cane et le menaçait à son tour. Avec une rage contenue, l’enchanteur retira en tremblant la Kizoku de la lame du dénommé Kisp, tout en la gardant à la main, les phalanges rendues blanches par la pression qu’il exerçait sur la poignée.

« Tu as un tant soit peu de jugeote, contrairement à ton père. Je suis Kisp, un… Homme d’affaires de Tulorim. Et il se trouve que j’ai à faire en Nirtim, alors je me suis dit que je pouvais demander de l’aide à mon vieil ami Marcus… Mais il faut croire que la vie en Ynorie l’a transformé en femmelette.

- Jamais mon père n’aurait d’ami comme vous.

- Ah bon ? Et que sais-tu de son passé, Akihito Yoichi ? Rien, évidemment. Sinon, tu saurais qui je suis, asséna le mastodonte avec un sourire suffisant. Ton père a été un de mes fidèles lieutenants, mais il a décidé de nous quitter suite à un… Désaccord. Dans ma magnanimité, j’ai fermé les yeux sur sa désertion en souvenirs de son aide. Mais là, il m’a manqué de respect et a refusé de m’aider. Je suis un homme patient et conciliant, mais il est passé outre alors j’ai dû le punir. »

Le mot « punir » attisa de nouveau la haine chez Akihito qui fit un pas mais fut stoppé par le majordome qui dénuda légèrement sa cane avec un sourire entendu et dérangeant.

« Il a gardé sa foutue fierté jusqu’au bout et a refusé de lâcher le moindre cri ou de renoncer à son entêtement alors qu’on le clouait au mur. Je peux au moins lui accorder ça.

- Dommage, j’aurais bien aimé l’entendre crier.

- Certes. Mais je peux aussi lui accorder qu’il a su pondre dans une Ynorienne un gamin plutôt compétent. Alors je vais te faire une offre une seule fois, Akihito Yoichi. Et fais bien attention à ta réponse. »

Sortant de l’intérieur de sa veste un rouleau de papier, il le déplia et montra le portrait de quelqu’un que Akihito reconnu, ce qui fait naître la surprise chez lui malgré la rage qui consumait son esprit sur le moment.

« Cette personne, vois-tu, a été d’un niveau d’irrespect encore supérieur à ton père. Je veux la retrouver, mais mes hommes se sont fait rôtir avant d’avoir pu lui mettre la main dessus. Le deal est simple : tu accompagnes mes hommes, tu captures cette cible vivante et on te rend ta mère. Une vie pour une vie, facile non ?

- Et si je refuse ? répliqua Akihito en serrant les dents.

- Bonne question… Qu’est-ce qu’on peut bien faire d’une femme Ynorienne ?

- Vous avez quelques établissements qui sont friands de ce genre de produits sur Yarthiss, Monsieur. Elle est un peu vieille, mais elle fera l’affaire quelques années je pense. Nous pourrons aussi l’utiliser un peu avant de la vendre.

- Ah oui ! Prostitution et esclavage. Merci de me le rappeler, répliqua Kisp en feignant l’homme qui avait oublié.

- Tout le plaisir est pour moi.

- Puis il y a aussi cette tatoueuse magique avec qui tu as voyagé. Bien plus jeune, elle se vendra bien elle aussi. »

À la mention d’Anthelia, Akihito vit le majordome se passer la langue sur les lèvres et vit une lueur lubrique et sadique passer dans ses yeux, ce qui manqua une fois de plus de le faire sortir de ses gonds. Il hésitait à les tuer maintenant, là, tout de suite. Ca ne lui rendrait pas son père, mais ça le démangeait. Le seul problème, c’est qu’il ne savait pas où était sa mère. Et si les sbires de Kisp apprenaient que leur patron s’était fait tuer… Alors la menace de Kisp prendrait bel et bien forme. Ce fut donc les dents serrées qu’il accepta le marché.

« … J’accepte.

- Pardon ?

-… J’ai dit que j’acceptais votre chantage.

- Contrat, gamin. Mais me voilà satisfait de tomber sur un Yoichi qui sait se servir de son crâne. Tu pars ce soir à la tombée de la nuit, sur le Serpent Rouge. Pas un mot à qui que ce soit, sinon… Je t’ai dit que je connaissais aussi un certain Hïo Himatori ? »

Dans un éclat de rire gras et sinistre, Kisp s’en alla, suivit de près par son majordome qui jeta un dernier coup d’œil à Akihito avant d’emboîter le pas à son patron. Akihito resta un long moment, debout dans la rue, retournant la situation dans tous les sens pour y trouver une faille, un moyen de mettre à l’abri les gens qu’il aimait. Mais rien, rien ne lui vint. Kisp connaissait Hïo, Anthelia et avait sa mère en otage. Il était pieds et poings liés.

Le regard vairon se posa alors sur l’affiche qui traînait au sol et confirma de nouveau les traits dessinés et le nom inscrit dessus. Sa Cible. Pourquoi elle ? Qu’avait pu faire cette personne pour s’attirer la haine de Kisp à ce point-là ?

(Aki… Je suis désolée…)

(Désolée de quoi ? Y a rien à faire. Ce salopard me fait du chantage que je ne peux pas refuser.)

(Mais… Qu’est-ce que tu vas faire ?)

(Est-ce que j’ai vraiment le choix ?)

Serrant l’affiche dans son poing, il la rangea dans sa besace et lentement, la mis sur son épaule. Du dos de la main, il écrasa les dernières larmes au coin de ses yeux. Un rayon de soleil frappa la broche des Messagers de Valyus qu’il portait à son manteau, désormais. Valyus… Ou Nizzre’.

(Nizzre’…. La vengeance. Cette Shaakte avait raison, en fin de compte.)

Dans le cœur d’Akihito, la foi qu’il avait envers Valyus s’altéra quelque peu. La foudre pouvait être protectrice. Elle allait désormais être vengeresse.



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Nhaundar
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Re: Les Habitations

Message par Nhaundar » ven. 30 oct. 2020 21:34

VII. 7 Se dire au revoir.

Notre retour à Oranan s’est passé particulièrement vite, tant mes pensées ont été tournées vers ces récents évènements. Il m’a fallu du temps pour assimiler la rencontre avec le Garzock et cette irruption soudain de mon passé par la Shaakt. Je ne pensais pas que les peaux vertes pouvaient elles aussi, vouloir autre chose que la barbarie de la guerre. La présence de l’elfe noire est une ombre qui plane sur mon cœur. Petit à petit, ma magie s’est développée depuis que j’ai quitté, non, depuis que j’ai fui Omyre. Malgré mes efforts, je suis encore loin d’être au niveau de cette guerrière et bien en dessous de sa maîtresse.

Une fois en ville, je me rends à la demeure de Sylve pour me reposer. Malheureusement pour elle, il lui faut d’abord rendre son rapport avant d’espérer une quelconque quiétude. J’espère qu’elle ne trahira pas sa parole. Même si je la sais intègre, j’ignore qui de son honneur personnel ou de sa loyauté envers Oranan est le plus fort. Finalement, elle arrive chez elle et je guette le moindre signe sur son visage pour trouver des réponses.

"Une équipe va se rendre sur les lieux pour enquêter ! La présence d’une troupe à cet endroit les inquiète, mais je pense qu’ils veulent s’assurer de mes propos concernant le village de Garzoks. Si effectivement ils sont morts en voulant s’installer ici, par qui…" Dit-elle en s’arrêtant un bref instant. "…et s’il n’y a vraiment aucun survivant dans les parages !"

Son visage se crispe et ses yeux se perdent au loin. Elle a clairement menti à ses supérieurs pour protéger un ennemi naturel de ses convictions. Elle s’assoit à même le sol de sa maison, abattue par son mensonge. Je l’y rejoins en cachant ma satisfaction pour lui faire face avec respect.

"Comment fais-tu ?" Dis-je finalement en brisant le silence qui s’est installé.

"Quoi donc ?" Demande-t-elle d’une voix presque mécanique.

Je pose une main sur sa tête et d’un geste doux de la main, l’oblige à focaliser son attention sur moi. Je la regarde droit dans les yeux et lui parle de ma voix la plus compatissante possible, en imitant l’exemple du prêtre de Gaïa.

"Comment fais-tu pour me démontrer chaque jour, prouver que tu es une personne encore plus remarquable que je ne le pensais la veille ?"

Ma réponse lui tire un sourire ainsi qu’une rougeur à ses joues. Cherchant à évacuer sa gène visible, elle m’adresse un coup de poing à la mâchoire plus fort qu’elle ne devait le penser.

"Cesse de faire l’idiot veux-tu ?" Me répond-elle avant de se lever et d’enchaîner. "Si je suis une telle personne, j’ai bien mérité de me faire servir à manger non ? Allez, montre-moi ce que tu as appris en me regardant cuisiner !"

Je souris en la voyant partir et avant qu’elle ne disparaisse pour ranger ses armes et armures je tiens à lui dire une dernière chose.

"Sylve ! Merci."

Elle me répond d’un simple hochement de tête avant de disparaître de ma vue avec l’esquisse d’un sourire. Pour ma part je sors en quête du marché et d'un repas bien mérité.

(Pourquoi pas de la volaille ?)

VIII. On a toujours besoin d’un plus petit que soi. Prélude
Modifié en dernier par Nhaundar le dim. 1 nov. 2020 14:25, modifié 3 fois.

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Gamemaster8
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Re: Les Habitations

Message par Gamemaster8 » sam. 31 oct. 2020 01:24

Intervention pré-quête pour Nhaundar

Alors que tu te dirigeais vers le marché, une outarde volait très haut dans le ciel. Lorsqu’elle passa au-dessus de toi, elle laissa tomber un petit caillou qui faillit de justesse tomber sur ta tête. Ce caillou était ficelé à un tout petit parchemin renfermant un message :

Nous, lutins de Tuiles aux rimes recherchons des gens vaillants et téméraires afin d’affronter les dangers de la forêt des aiguilles et y tracer une voie lutine qui partirait du village jusqu’à la boutique de Korer Haibon. Récompense généreuse promise. Pour vous rendre au village, informez-vous auprès des marchands de Tulorim.
Conseil de Tuiles-aux-rimes
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À votre service, pour le plaisir de rp !

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Nhaundar
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Re: Les Habitations

Message par Nhaundar » dim. 1 nov. 2020 14:20

VII. 8 De retour chez soi.

Mon trajet pour le marché s’est soldé avec, des victuailles certes, mais aussi une véritable curiosité. Ce qui semblait être une outarde est passé bien au-dessus de moi et a lâché quelque chose. Pensant qu’elle avait manqué de libérer une sécrétion de son fondement, l’espace d’un instant j’ai failli lancer une boule de feu sur cette saloperie volante, avant de me rendre contre qu’il s’agissait d’un caillou. La curiosité de la pierre provenant de l’animal m’a particulièrement intrigué, mais pas autant que le message qui y était présent. Non sans m’être procuré notre prochain repas, je me dépêche de rentrer auprès de Sylve pour lui en parler.

"Sylve ! Regarde sur quoi je suis tombé ! Enfin, disons ce qui m’est tombé dessus, littéralement !" Lui dis-je en présentant le message qu’elle saisit et lit à haute voix.

"Nous, lutins de Tuiles aux rimes recherchons des gens vaillants et téméraires afin d’affronter les dangers de la forêt des aiguilles et y tracer une voie lutine qui partirait du village jusqu’à la boutique de Korer Haibon. Récompense généreuse promise. Pour vous rendre au village, informez-vous auprès des marchands de Tulorim. Et c’est signé par le conseil de Tuiles-aux-rimes ?"

"Qu’en penses-tu ?" Fais-je en m’asseyant sans lâcher du regard elle et le message.

"C’est…très curieux ! Les lutins ne sont pas connus pour ce genre d’appel à l’aide. C’est même tout le contraire vu la réputation qu’ils traînent. La plupart des gens préfèreraient les chasser à coup de balais plutôt que de leur rendre service !" Répond l’elfe.

Sa réponse ne me plaisant pas, j’insiste sur l’importance de la missive.

"Tu penses que c’est grave ?"

"Je pense que cela mérite au moins qu’on y porte un peu d’attention, mais il n’est pas exclu que cela soit une de leurs nombreuses mauvaises blagues. Tu ne sais pas ce qu’ils peuvent causer comme ennuis sur un…" Explique-t-elle avant de porter sur moi un regard suspicieux. "Dis donc toi, tu n’aurais pas une petite idée derrière la tête ?"

(Ha mince, je suis grillé !)

"Pour tout te dire, je n’ai jamais croisé de Lutin de toute ma vie. Je suis assez curieux de savoir comment de si petits êtres arrivent à vivre dans un monde aussi dangereux !" Dis-je en tentant de noyer le poisson.

"Les lutins sont partout ! Il existe de nombreuses personnes qui passent leur vie entière sans jamais en rencontrer un seul, enfin c’est ce qu’ils croient. Il y en a même dans cette maison. D’ailleurs…" Elle s’arrête un instant pour se tourner vers…nul par en fait, juste un grand espace dans sa maison et se met à crier à qui veut l’entendre. "Si je chope celui qui m’a piqué mon linge, il va passer un mauvais moment !"

Sylve se tourne ensuite vers moi se rapproche, l’air sévère, pour provoquer une réaction. Ses yeux accusateurs sont particulièrement intimidant. Si nous n’étions pas proches, je jurerais être dans un sacré merdier. Finalement je craque et dévoile les vraies raisons de mon intérêt.

"Bon d’accord j’avoue. Je suis curieux de leur magie ! De si petits êtres ne pourraient survivre sans magie et à quoi est dû leur taille ? Est-ce un phénomène magique, une dégénérescence suite à une malédiction ?"

Elle baisse la tête en signe de résignation, puis prend une grande inspiration avant de me répondre.

"J’ignore comment des créatures aussi petites que pénibles parviennent à rester en vie, mais je crois que leur taille n’a rien de magique. Ils sont juste petits c’est tout ! Je suppose que tu vas y aller ?"

Je me lève et tente de convaincre la semi-elfe de l’intérêt de répondre à l’aide à ces créatures pourtant si pénibles d’après les rumeurs.

"Pas moi nous, après ces derniers évènements cela nous fera un peu de repos. Même si l’appel à l’aide des Lutins est en soit curieux, que risque-t-on ?"

"Je t‘arrête tout de suite, je ne participerais pas à ceci !" Déclare-t-elle en levant une main pour me stopper. "D’une part j’aurais du mal à ne pas botter leurs fesses, mais je dois rester présente le temps que les éclaireurs reviennent du village Garzock brûlé ! Cependant tu as raison. Aussi pénibles qu’ils soient cette demande d’intervention est unique pour moi. Alors oui tu devrais y aller."

"Mais…sans toi ?" Dis-je franchement déçu.

"Je ne peux partir pour le moment. Mais tu n’as pas besoin de moi de toute façon. Que risques-tu avec des lutins ? Je crois que le pire ennemis du Lutin c’est le chat !" Elle se tourne de nouveau un instant pour crier en mimant le félin. "Vous entendez ? Un chat ! Avec de grands crocs et de grandes griffes !"

En moi se mélange la déception de savoir que Sylve ne peut quitter la ville et la frustration de ne pas pouvoir rencontrer un peuple unique en son genre. La guerrière s’approche de moi pour me ramener à la réalité avec un coup de poing dans l’épaule.

"Ecoute, dès que j’ai terminé ici je te rejoins, ça te va ?" Me dit-elle en ne voulant pas être un obstacle à mon intérêt grandissant sur la magie.

Ces paroles me touchent et si j’ai la certitude qu’elle me retrouvera alors pourquoi ne pas répondre à l’appel ? C’est d’ailleurs mon devoir en tant que fidèle de Gaïa.

"Entendu ! Mais dans ce cas, j’ai une préparation à faire !" Lui dis-je en sortant précipitamment de la maison.

"Et c’est encore à moi de préparer à manger !" Se lamente-t-elle alors que je suis trop loin pour l’entendre.

De retour A la belle aura. 1

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Yliria
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Re: Les Habitations

Message par Yliria » mer. 6 janv. 2021 23:32

<< Précédemment

Cherock hésita un instant, mais ce fut le hochement de tête de sa mère qui le décida et je finis par les suivre à travers la ville, restant derrière et silencieuse. Je le vis acheter une bouteille de ce qui semblait être un alcool local, sans vraiment en comprendre la raison, et j'en profitai pour acheter quelques fleurs à un marchand qui avait visiblement envie de s'en débarrasser au plus vite. Nous marchâmes en silence, passant par une large place étrament vide où Cherock indiqua vaguement un édifice fait de blanc que je devinai être le fameux temple de Gaïa. Il n'était pas trop loin de chez Anthelia, je saurai me souvenir du trajet. Je n'eus guère envie de laisser mon regard fureter à droite ou à gauche, bien que l'esthétisme étonnant de la ville me donnait envie de parcourir les belles rues de long en large et d'en découvrir tous les recoins. Un autre jour peut-être, parce que tout ce que je voyais pour le moment c'étaient les soldats ynoriens en alerte. Je vis Cherock et sa mère se coller peu à peu l'un à l'autre, le premier passant son bras autour des épaules de la seconde et je compris qu'on se rapprochait avant de finalement atteindre les restes calcinés de ce qui devait être leur maison. Je déglutis face à ce spectacle tandis que Cherock annonçait son retour d'une voix bouleversée.

Il ne restait plus grand chose de la maison si ce n'était un tapis de cendre et les restes de murs par endroit et je suivis la petite famille sans dire le moindre mot, observant les épaules d'Elena bouger sous les sanglots qui commençaient à la secouer. J'avais une boule dans la gorge qui grossissait de seconde en seconde, avant que tout le monde ne se fige. Au sol reposait une stèle, surmontée d'une étrange casque, où l'épitaphe indiquait le nom de "Marcus O'Fall", le père de Cherock. Qui que fut celui qui avait posée ici cette stèle, il l'avait agrémenté d'un bouquet de fleurs à présent fanées. Cherock et sa mère s'assirent face à la stèle et je restai en retrait, reculant un peu pour leur laisser l'intimité dont ils avaient besoin. Je ne voulais pas m'immiscer dans leur deuil, je n'y avais pas ma place. Cherock parla un moment et finit par vider une coupe d'alcool qu'il avait préparé. Sa mère fit de même tandis qu'il versait l'alcool restant sur la stèle. Je n'en compris pas la signification, mais cela devait être un rite propre aux Ynoriens. Lorsqu'il se releva, il posa sa main sur le casque et resta immobile, sa mère sanglotant doucement à ses côtés.

J'approchai finalement et posai une main dans le dos d'Elena. Ce n'était pas que pour la soutenir, mais aussi pour diffuser un peu de calme dans son esprit, essayer d'apaiser un peu la peine qu'elle devait ressentir. Je me sentais mal, pas à ma place finalement, mais je pris mon courage à deux mains et ravalai les larmes qui s'étaient accumulée à la frontière de mes yeux. Cela me rappelait trop l'enterrement de mon père auquel je n'avais pu assister que de loin, interdite de même approcher sa tombe tant que la famille était encore là. Doucement, je récupérai la gerbe de fleurs fanées et posais la mienne en silence. Puis, imitant à ma façon ce que papa m'avait appris et ce que j'avais pu voir, je fis flamber doucement les fleurs mortes et en dispersai les cendres devant la stèle après m'être mise à genoux.

- Puisses-tu rejoindre tes ancêtres et veiller sur les tiens comme tes pères avant toi...

Le reste, je le murmurai, mais difficile de dire si Cherock ou Elena entendirent ou non en gardant les yeux fermés.

- Je suis désolée... C'est moi qu'il cherchait, ça n'aurait jamais dû impliquer quelqu'un d'autre. Ils m'ont accordé leur pardon, Elena et Cherock, comme si je n'y étais pour rien, mais je sais que j'ai ma part de responsabilité... Ils sont sains et saufs, c'est tout ce que j'ai pu offrir pour me racheter, vous avez un fils conciliant, peut-être trop...

Je sentis les larmes commencer à couler, mais je n'avais pas terminé et je me fis violence pour que ma voix ne tremble pas.

- Je n'attends pas votre pardon, je n'attendais pas le leur non plus. Je voulais juste... m'excuser d'avoir à nouveau causé la mort d'un père sans le vouloir. J'espère que vous trouverez le repos plus vite que le mien et que vous veillerez sur eux. Je suis désolée, pour tout...

Je soupirai et reniflai en me redressant. J'avais le visage trempé et elles ne s'arrêtaient pas de couler. J'avais l'impression de me revoir devant la tombe de mon père et cela me faisait plus mal que je ne l'imaginais. Je fis apparaître une petite boule de lumière près de la stèle. Ce n'était pas un soleil comme la tradition Wiehl le voulait, mais vu le temps nuageux, je n'avais rien de mieux à proposer et soupirai à nouveau pour tenter d'endiguer les larmes. Je n'avais pas de deuil à faire, mais je voulais au moins adresser ses mots, parce que, malgré tout ce qu'ils pouvaient dire, j'avais ma part de responsabilité dans le malheur qui avait frappé leur famille. Et ça me pesait chaque jour. Je sentis Cherock passer un bras autour de mes épaules et me serrer contre son côté. Je levai mon visage vers lui, à la fois surprise et reconnaissante pour son geste.

- Merci... Je l'ai enterré comme un Ynorien, et toi comme un homme de Wiehl... Il en aurait été fier.

- J'ai...J'ai pensé que ce serait approprié.

- Ça l'était.

J'inspirai lentement et soupirai pour chasser les dernières larmes qui coulaient encore. Doucement, je m'écartai de Cherock, mais saisis sa main avec les miennes et la serrait doucement pour lui apporter un soutien, certes dérisoire, mais sincère. Et un petit coup de pouce de fluide lumineux, également. Cela ne dura pas bien longtemps et je le relâchai, libérant sa main, avant de me tourner vers Elena.

- Si je peux... faire quoi que ce soit, n'hésitez pas... Je vais vous laisser, j'attendrai devant.

Elle me remercia d'un simple signe de tête. Je laissai les deux ynoriens, sortis de la maison en ruine et m'adossais au mur d'une maison proche. Venir m'avait à la fois peiné et soulagé, c'était assez étrange à vivre et à décrire, mais il fallait que je vienne et j'avais bien fait. J'attendis seulement quelques minutes avant que Cherock et Elena ne sortent finalement à leur tour et je me préparai à repartir lorsque des passants, visiblement des connaissances de la famille, reconnurent Elena et se précipitèrent vers elle. Quelques regards se posèrent sur moi, mais mon masque faisait son office et ils restèrent seulement curieux avant de se détourner pour fixer Elena qui était assaillie de questions. Mes épaules se déraidirent lorsque Cherock approcha finalement, laissant à sa mère le soin de répondre aux questions de leurs voisins.

- On fera un arrêt au temple, si tu veux. Moi, j'irais dans le bâtiment en face, savoir ce qu'on va faire de ce bout de terrain. Reconstruire une maison risque de prendre du temps, dans tout les cas.

- Non... - Je secouai la tête.- J'irai plus tard, je vais y rester un long moment donc je préfère le faire quand les choses seront plus.. posées. Et honnêtement je n'ai pas la tête à expliquer ma présence en ville à qui que ce soit pour le moment, fusse-t-il un prêtre de Gaïa. Je t'attendrai à l'extérieur, je pense que rentrer dans un bâtiment officiel c'est chercher les ennuis.

Je jetai un œil aux restes calcinés de leur maison avant de revenir vers lui.

- Vous allez vous en sortir ? Enfin ta mère surtout...

Cherock était persuadé que sa mère s'en sortirait et à voir la façon dont le voisinage interagissait avec elle, il n'avait probablement pas tort. Lorsqu'il me demanda de l'aide, je haussai un sourcil, mais il partit sans même attendre ma réponse. N'ayant aucune envie de rester avec cet attroupement dans la rue, je le suivis et l'observai récupérer des morceau de poutre, étonnée. Curieuse, je l'accompagnai derrière la maison alors qu'il semblait étudier le terrain. il me tendit une des poutres et pointa le sil du doigt. Apparemment son père avait caché de l'argent et il voulait simplement le récupérer. Comprenant pourquoi il n'avait rien dit avant, je hochai simplement la tête et pris la pelle pour l'aider dans sa tâche. Si le sable fut facile à enlever, la terre fut plus récalcitrante et je sentis la sueur commencer à perler avant qu'un coup de pelle ne produise un son différent. On dégagea rapidement la terre pour découvrir la fameuse caissette que Cherock s'empressa de déterrer alors que je posai la pelle improvisée au sol. Puis je rebondis sur ce qu'il avait dit et qui me chiffonnait.

- Tu n'as pas à être reconnaissant envers moi. Je ne comprends même pas que tu puisses l'être dans cette situation.

- Bah... Tu m'as aidé, et tu ne m'en veux pas pour t'avoir capturé et livrer à Kisp. Tu as protégé ma mère. Tu as rendu un hommage à mon père. Tu m'as aussi sauvé d'une certaine façon. Tu m'as soigné. Donc si pour tout ça je ne peux pas être reconnaissant...

Je restai muette et le fixai alors qu'il enroulai la cassette contenant l'argent sous son manteau avant de repartir sans rien ajouter. Je le suivis d'un peu plus loin, ruminant ses paroles avant qu'Alyah n'intervienne.

(Tu sais tu n'es pas obligée de trouver une raison pour qu'il te déteste. Tu n'es pas responsable, ni à ses yeux, ni à ceux de sa mère, cela devrait te suffire. Et si ça peut te convaincre, dis-toi que, quelque part, son père a essayé de protéger ta vie, même sans le savoir. Sois reconnaissant envers lui, plutôt que de te sentir coupable envers son fils. Et si vraiment tu veux essayer de te racheter, et bien aide-le jusqu'à ce que tu ne te sentes plus redevable, mais arrête de culpabiliser pour quelque chose dont tu n'es pas responsable.)

(Je... tu as raison...)

(Je sais.)

Son ton hautain me fit lever les yeux au ciel alors que je voyais Cherock s'éloigner de l'attroupement dans la rue. J'hésitai sur la marche à suivre, mais me décidai à le suivre, le rattrapant à petites foulées en jetant des regards autour. Je n'avais pas envie d'errer seule dans les rues d'une ville où je n'étais pas la bienvenue. Je le suivis sans un mot, continuant d'observer les bâtiments avant d'arriver devant ce qui ressemblait à une forge. Je me demandais ce qu'il allait faire ici à un tel moment et restai sur le pas de la porte un seconde avant que, trop curieuse pour mon propre bien, je ne me décide à entrer. Et puis une forge c'était toujours un endroit intéressant.

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Yliria
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Re: Les Habitations

Message par Yliria » ven. 8 janv. 2021 01:04

<< Précédemment

Le vendeur me repris sur la prononciation, réussissant sans mal à m'embarrasser malgré son sourire. Je hochai la tête et lui tendis une pièce d'or et douze pièces d'argent pour payer le tout, me pensant capable de revenir ici le lendemain sans trop de difficulté pour m'orienter. Lorsqu'il me conseilla de vite quitter la ville comme beaucoup d'Oranais faisaient, je haussai les sourcils, mais hochai la tête, incertaine de savoir s'il disait la vérité ou voulait juste que je déguerpisse. La conversation qu'il eut ensuite avec Cherock me tendit et je déglutis. Un siège ? Sur Oranan ? Je manquai de me frapper le front tellement j'avais été idiote. L'immense campement devant la cité, les regards et les visages tendus des habitants et des soldats qui patrouillaient partout. Évidemment qu'il y avait une raison. Je n'osais même pas lui demander pourquoi il n'en avait pas parlé avant, j'allais passer pour une idiote tellement c'était évident.

Lorsqu'il eut terminé, je suivis Cherock à l'extérieur, non sans offrir un signe de tête reconnaissant à l'armurier en disant que je reviendrai le lendemain. Je ne m'attendais pas à grand chose en entrant, mais il fallait avouer que le style ynorien, que ce soit les armes ou les armures, était particulier et intriguant. Je tournai la tête et haussai un sourcil en entendant soudainement Cherock pouffer en me regardant de biais, comme s'il se moquait de moi. Il m'expliqua que sa famille et celle qui gérait l'armurerie étaient proches, leur fils étant son meilleur ami. Cela expliquait l'accueil plus sympathique que ce à quoi je m'attendais, malgré la tension environnante.

- Si on met de côté le temple de Gaïa, est-ce qu'il y a quelque chose que tu veux voir ?

Sa question me prit totalement au dépourvu. On faisait du tourisme finalement ? Je le fixai d'un air ahuri avant que je ne secoue la tête, un souffle amusé quittant mes lèvres. Avait-il oublié la situation en revoyant des amis ?

- C'est gentil Cherock, mais je préfère ne pas chercher d'ennuis en me baladant plus que nécessaire en ville. Pour le moment du moins... Peut-être une autre fois ?

- Oh oui, oui, bien sûr... Il y a quand même un endroit que j'aimerai te montrer, mais ça peut attendre la nuit. Même, c'est mieux de le voir la nuit. Je pense que ça te plaira et te fera du bien... A moi aussi, d'ailleurs.

Je penchai la tête sur le côté, soudainement curieuse de savoir de quoi il parlait. Je doutais tout de même de pouvoir nous balader de nuit vu les circonstances, mais il ne semblait pas s'en inquiéter outre mesure.

- Qu'est-ce que c'est ?

C'était une surprise apparemment. Une surprise... Je plissai le nez derrière mon masque en marmonnant que je détestai les surprises. Je décidai de jouer le jeu, de toutes façons je ne saurai jamais s'il ne me montrait pas, donc autant aller dans son sens.

- D'accord. Je viendrai avec toi alors. Rien d'étrange au moins ?

Il assura que non, que cela était le lieu le plus apaisant qu'il connaissait et qu'il espérait, sans être sûr que cela aurait le même effet moi. J'acceptai donc, toujours curieuse de voir la ville, surtout avec un guide pour me présenter les meilleurs endroits. Il s'inclina en se déclarant mon obligé et je lui lançai un regard amusé, même s'il ne put voir mon sourire derrière mon masque. De fil en aiguille, nous nous mîmes à discuter. Enfin ce fut surtout Cherock qui parla, évoquant ses souvenirs d'enfance, ce dont je me gardai bien. Comment raconter mon enfance dans la misère et l'esclavage alors qu'il semblait aller un peu mieux depuis qu'il avait pu faire ses adieux à son père ? Je me taisais, priant intérieurement pour qu'il ne commence pas à poser de question avant d'atteindre avec un étrange soulagement la maison d'Anthelia. La jeune femme accueillit aussitôt Cherock tandis que je retirais mon masque et posai mes armes avec mes affaires. J'aperçus du coin de l'œil les deux amants s'embrasser et me sentis rosir à cette vision, avant qu'Anthelia ne se tourne finalement vers moi.

- Dis moi, est ce que tu as eu l'occasion de manger la cuisine Ynorienne ?

- Et bien... dans l'auberge de Bouhen, le fameux coq au Prajio conseillé par Cherock. Sinon, pas vraiment, ce n'est pas vraiment le genre de nourriture que j'ai l'habitude de manger.

Il fallait dire que je mangeais plus de rations prises sur le pouce que de vrais repas consistants depuis deux ans.

- Dans ce cas, tu vas goûter à mon curry. Et rien à voir avec l'espèce de truc que Cherock peut bien préparer.

Je hochai docilement la tête, n'ayant aucune idée de ce qu'était un curry. Probablement un animal local. J'entendis Alyah pouffer, mais elle ne m'aida pas du tout à en apprendre plus, se contentant de ricaner. Je l'ignorai bien vite pour m'installer dans un coin avec mes affaires, répondant par un sourire à Elena qui passa devant moi pour aller se laver. Je défis mon armure, la posai au sol et entrepris de la nettoyer et de l'entretenir en attendant. Quelques écailles étaient un peu tordues et je les redressai avant de graisser un peu le tout, nettoyant aussi ma rapière et mon fourreau qui en avaient bien besoin après toute cette histoire. Le sang séché avait commencé à coller et retirer la lame allait être délicat si je ne faisais pas le nécessaire. Je n'avais pas pris le temps de le faire avant, idiotement, aussi mieux valait ne pas trop attendre à présent. Cela me pris un moment, mais au moins la lame rentrait et sortait à présent aussi facilement que je premier jour lorsque j'eus terminé. Je soufflai, les bras et les épaules endoloris, mais satisfaite. Une douce odeur vint finalement me mettre l'eau à la bouche et je rangeai mon matériel pour observer Anthelia s'affairer pour le repas.

- Tu veux de l'aide ?

- Oh non, ne t'en fais pas, mais c'est gentil. Tu peux dresser le couvert si tu veux, les bols sont dans ce meuble et les baguettes juste au dessus.

Je hochai la tête et mis les bols en place, observant avec circonspection les petits bouts de bois longs et fins qu'elle me demanda de mettre avec sans comprendre leur utilité. Une fois prêt, elle appela tout le monde pour manger. Je m'installai face à une portion bien trop importante pour moi et, même si j'avais faim, je me voyais mal en manger plus que la moitié, même en forçant. Et puis il y eut l'obstacle insurmontable des baguettes...

J'eus beau regarder les autres utiliser leurs baguettes pour attraper leur nourriture, je ne trouvais pas le moyen de faire de même et me contentai d'échouer lamentablement à attraper le moindre grain de riz. Je ne comprenais simplement pas comment j'étais supposée utiliser deux bouts de bois pour attraper quoique ce soit. Et tandis que j'hésitais à laisser tomber, une cuillère apparut devant mes yeux. Je levai les yeux pour voir Cherock me tendre l'ustensile. Je le remerciai, les lèvres pincées en prenant la cuillère, certaine que la situation l'amusait au vu de son regard pétillant. Sa mère se rendit compter de la situation et se mit à vouloir m'apprendre et argumenta avec son fils qui parla d'un... yukata ? Complètement perdue, je me contentais d'enfourner une cuillère du plat préparé par Anthelia et je poussai un léger soupir de satisfaction à la première bouchée. C'était divinement bon, légèrement épicé et la viande était fondante. Je fermai les yeux un instant pour savourer, profitant toujours de ce genre de repas un peu trop rare. Je n'allais pas mentir à la question d'Anthelia, me hâtant d'abord de terminer ce que j'avais dans la bouche. Je m'essuyai les lèvres d'un revers de main avant de répondre.

- Délicieux ! J'ai rarement mangé quelque chose d'aussi bon !

Je ne savais pas ce qu'il y avait dedans, mais cela importait peu, mon absence de talent en matière de cuisine m'empêcherait de réitérer l'expérience avec mes moyens. Je me contentai de savourer le plat, même si la portion était trop grande pour moi et qu'un bon tiers restait encore alors que mon estomac annonçait n'en plus pouvoir. Je me forçai à finir malgré tout, repoussant le bol vide avec autant de satisfaction que de soulagement. Habituée au repas pris sur le pouce ou aux rations de voyage, manger une telle quantité était loin de mes habitudes. Le repas terminé, j'aidai à débarrasser et retournai à mes équipements pour terminer de les entretenir. Jusqu'à ce que Cherock vienne me trouver.

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Akihito
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Re: Les Habitations

Message par Akihito » sam. 9 janv. 2021 18:50

Dans le chapitre précédent...

Troisième Arc : Encre de feu, Ancre de sang.

Chapitre XIX.2 : Un deuil à finir.

Malgré les protestations d'Yliria, Anthelia lui força quelque peu la main en la poussant, ce qui tira un mince sourire au jeune homme. Sourire qui se fana rapidement. Frans tapota sur son épaule, avant d’emboîter le pas au groupe. Akihito marcha le regard un peu dans le vague, la tête pleine de pensées qui tournaient sans cesse. Des pensées qu'ils repoussaient depuis des semaines. Et ce fut Yliria qui le tira de ces pensées.

« Tu saurais m'indiquer où se trouve le temple de Gaïa si on peut l'apercevoir pendant le trajet jusqu'à chez Anthelia ? Elle est toujours comme ça d'ailleurs ? Je suis pas à l'épreuve du feu moi..

- Mmmh... On ne va pas passer devant, mais tu n'auras aucun mal à le trouver. Il est au beau milieu de la ville, en face du Conseil d'Ynorie. Un grand temple blanc. Et pour Theli... elle a un sacré caractère, mais c'est sa façon de s'inquiéter pour toi. Je crois bien qu'elle t'apprécie, mais elle réserve des boules de feu exclusivement pour moi. Même si je ne sais pas si c'est un compliment... »

ils finirent par arriver à la maison d'Anthelia, dans la partie ouest de la ville. Il déposa ses affaires près d'un des divans avant de se tourner vers sa mère.

« Tu veux... Y aller maintenant ?

- Oui. Plus tôt ce sera fait, mieux ce sera. »

posant une main sur l'épaule de sa mère, il se tourna vers le reste du groupe.

« On va chez moi. Mon père a déjà trop attendu.. Et ca nous prendra peut être le reste de la journée.

- Tu veux que je t'accompagne..? demanda Anthelia sur un ton hésitant.

- Comme tu veux. Ca ira sans toi Theli, et ça risque de ne pas être joyeux... alors ne te force pas, d accord ? »

la tatoueuse hésita, puis secoua la tête.

« Vas y sans moi.

- Je viens. Je ne vous dérangerai pas, Hitomi et toi. J'ai juste... Besoin d'y aller. S'il te plaît... »

La supplique d'Yliria le prit de cours. Pourquoi ? Pourquoi voulait-elle venir ? Il essayait de percer la raison de sa motivation alors qu’il la dévisageait, mais sa résolution ne semblait pas faiblir.

(Peut-être se sent-elle responsable, coupable...)

Yliria s'était excusé d'innombrables fois déjà. Il ne serait pas étonnant qu'elle soit encore tourmentée par sa culpabilité. Et si comprenait ce point de vue et la bienveillance de son attention... Akihito avait tout de même un peu de mal à la laisser venir. Car en fin de compte, il ne la connaissait que depuis trop peu de temps.

(Regarde-la, Aki. Si tu lui dis non, elle va s'en vouloir toute sa vie.)

Amy avait raison, mais il chercha en sa mère un soutien à son refus. Soutien qui ne vint pas : Hitomi hocha lentement la tête.

« ... D’accord. Suis-nous. Mais ça ne va pas être agréable... »

Akihito sorti, passa le petit portillon de fer forgé, et mena son groupe à travers les rues de la ville. Personne ne pipa mot et l'ambiance était lourde. Leur chemin croisait d’abord un marché où l'enchanteur acheta une bouteille d'alcool de riz fermenté, spécialité Ynorienne : le sake. Puis ils passèrent par la place du Conseil et d'un geste du menton, il pointa a Yliria le temple de Gaïa qu'elle cherchait.

À mesure que le chemin du deuil se déroulait, mère et fils se rapprochait et alors qu'ils entraient dans le quartier de son enfance, Akihito passa silencieusement son bras autour des épaules de sa mère. Un a un, les souvenirs avec son père remontaient : cette nuit de festival où il l'avait porté sur ses épaules pour admirer les artifices célestes de la capitale, ce coin de rue où il s'était caché après avoir taché l’armure du Samouraï, ce voisin chez qui ils allaient toujours demander des aliments dont ils manquaient... Chaque pas se faisait plus difficile que le précédent.

Tant bien que mal, ils arrivèrent devant les ruines calcinées de sa maison. Le feu avait léché les habitations voisines sans grand dommage, mais personne n'avait déblayer les restes de l'incendie, si bien que des fragments de poutre noircie et de tuiles brisées formaient un épais tapis de débris. Akihito retenait tant bien que mal ses jambes de trembler. Et il pouvait sans peine sentir les épaules de sa mère trembler sous sa main. Lentement, trop lentement, il se dirigea lui et sa mère vers ce qui avait été le pas-de-porte. Et le premier pas hésitant dans la demeure fit crisser la terre séchée des tuiles sous ses bottes. D'une voix éraillée par l'émotion qui reprenait ses droits, il s'annonça.

« On est rentré, papa. »

Autour d’Akihito, rien ne ressemblait aux murs et aux meubles qui l'avaient vu grandir. Et pourtant... Pourtant, il pouvait les voir, ces murs. Ces souvenirs imprimés de manière indélébile. Il situait chaque armoire, chaque chaise. Il contourna même inconsciemment la table qui jadis trônait au milieu de la pièce, et dont il ne restait que des cendres. Akihito retenait toujours ses larmes, mais à grandes peines ; Hitomi striait elle ses joues de deux rivières silencieuses. Et à l'endroit exact où il se souvenait avoir trouvé son père horriblement mutilé et cloué au mur, il vit un spectacle auquel il ne s'attendait pas : une stèle rudimentaire de pierre taillée du nom de "Marcus Yoichi", avec à son pied une gerbe de fleurs fanées. Au sommet de la stèle, un casque de Samouraï était posé. Qui que pouvait être là personne â l'origine de cette sépulture commémorative, l'enchanteur la soupçonnait d'être un collègue Samouraï qui était venu se recueillir sur la tombe de son frère d'armes. Plusieurs noms vinrent en tête d’Akihito, mais il les balaya. Ce n'était pas important.

Le fils s'assit en tailleur en face de la stèle et, alors qu'il parlait, il remplit deux petites coupes de saké.

« Voilà papa. Je suis rentré et comme je te l'ai promis, j'ai ramené maman. Elle s'était égarée et j'ai fini par la retrouver. Elle est à côté de moi...
J'avais tellement de choses à te dire. Mes progrès, mes exploits, mes aventures. Ma rencontre d'Anthelia.. Une vraie humaine de Wiehl, pur jus. Tu l'aurais adoré. Mais voilà... Il a fallu que ton passé te rattrape... »


Il déposa une coupe remplie devant lui et une autre devant sa mère, silencieusement assise à ses côtés. Akihito n'avait même plus conscience de la présence d'Yliria.

« Je sais que je n'ai pas toujours été à la hauteur de tes espérances... Tu voulais faire de moi un fier guerrier de Wiehl, un samouraï. Et j'ai choisi la voie de la fulguromancie. Malgré tout ça, tu n'as pas cessé de me soutenir. Parfois avec un peu de ta mauvaise foi, mais toujours avec sincérité.
Je savais aussi, je m'étais fait à l'idée que chacune de tes sorties pouvait être là dernière. Et j'en était fier. Mais tu nous a été arraché trop tôt, par la pire ordure qui soit.
Malgré tout ça…
la voix d’Akihito hoqueta un instant avant de se reprendre. Je continue de suivre tes principes. Les valeurs que tu m'as inculquées. J'en serai digne, et je revendiquerai fièrement d'être le fils d'un homme exceptionnel.
Au revoir, papa. »


À ces mots, Akihito but d'une traite sa coupe et juste après, renversa le reste de la bouteille sur la sépulture. Son père avait embrassé la culture Ynorienne... Alors Akihito décida de lui offrir un hommage ynorien. Il se releva, posa la main sur le casque métallique, froid, humide de saké, mais si familier. Et, au fond de son coeur, il renouvela ses adieux.

(Au revoir... Papa.)


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Akihito
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Re: Les Habitations

Message par Akihito » sam. 9 janv. 2021 18:53

Dans le chapitre précédent...

Troisième Arc : Encre de feu, Ancre de sang.

Chapitre XX.1 : La vie Oranaise.

« Puisses-tu rejoindre tes ancêtres et veiller sur les tiens comme tes pères avant toi... Je suis désolée... C'est moi qu'il cherchait, ça n'aurait jamais dû impliquer quelqu'un d'autre. Ils m'ont accordé leur pardon, Hitomi et Akihito, comme si je n'y étais pour rien, mais je sais que j'ai ma part de responsabilité... Ils sont sains et saufs, c'est tout ce que j'ai pu offrir pour me racheter, vous avez un fils conciliant, peut-être trop... »

Akihito ne comprenait pas ce qu'elle faisait. Il voyait à travers des yeux embués la jeune fille s'excuser, après avoir consommé dans une gerbe de flammes les fleurs fanées pour les remplacer par une gerbe fraîche. Trop occupé par ce qu’il devait faire, il ne s'était pas rendu compte que la semi-shaakte avait acheté ce bouquet. Il lui était quelque part reconnaissant, mais il commençait à se demander si elle n'en faisait pas trop, avec ces histoires d'ancêtres et cette façon de s'adresser à lui comme s’il était un esprit... Mais Hitomi regardait avec une grande, très grande intensité la jeune fille faire ses rites. Peut-être qu'elle faisait quelque chose dont il ne comprenait pas le sens... Il la laissa donc continuer, en voyant de petites perles humides couler sous son masque.

« Je n'attends pas votre pardon, je n'attendais pas le leur non plus. Je voulais juste... M'excuser d'avoir à nouveau causé la mort d'un père sans le vouloir. J'espère que vous trouverez le repos plus vite que le mien et que vous veillerez sur eux. Je suis désolée, pour tout... »

Une petite boule de lumière apparut à côté de la stèle, convoquée par Yliria. Il reconnut alors un des symboles du peuple de Wiehl, le soleil, dont son père lui avait parlé lorsqu'il lui parlait de sa culture.

(Le reste devait être des rites funéraires de Wiehl…)

Peu à peu, les pièces du puzzle se mirent en place. Sa connaissance de ces rites, cette évocation de la mort de son père. Le père d'Yliria était sans aucun doute un humain de Wiehl, et Yliria l'avait perdu suffisamment récemment pour qu'elle en soit encore affectée. Il se redressa à son tour, et pendant qu'Yliria reniflait pour chasser ses larmes, il passa un bras autour de ses épaules et la serra un peu contre son côté.

« Merci... Je l'ai enterré comme un Ynorien, et toi comme un homme de Wiehl... Il en aurait été fier.

- J'ai...J'ai pensé que ce serait approprié.

- Ca l'était... »

Yliria resta un instant dans son étreinte, terminant de se calmer, puis s'éloigna tout en gardant sa main dans les siennes. Elles étaient si petites, couvrant à peine la sienne. Mais elles étaient chaudes et lui firent étrangement du bien, l'apaisant plus qu'une simple poignée de main aurait dû. Peut-être de la magie fluidique à l'oeuvre ? Toujours est-il que Akihito se sépara de cette présence rassurante et Yliria, après avoir affirmé son soutien une nouvelle fois à sa mère, les laissa tranquille. L'enchanteur enlaça à son tour sa mère et les deux restèrent ainsi, fixant la tombe du père et du mari auquel ils venaient de faire leurs adieux.

Plusieurs longues minutes passèrent, et les deux Ynoriens retrouvèrent Yliria qui les attendaient devant la porte. Mère et fils avaient séché leurs larmes et étaient enfin prêt à aller de l'avant. Quelques passants arrivèrent, des visages connus émergèrent et après quelques exclamations, tout le voisinage se regroupa autour d'Hitomi. SI des regards curieux se posèrent sur la semi-shaakte, aucun ne sembla reconnaître la silhouette masquée et leur attention se reporta bien vite sur la veuve qui fut assaillit de questions. Akihito resta un instant à ses côtés, répondant comme il pouvait, puis s'éclipsa : sa mère avait repris son aplomb et ne risquait pas de fondre en larmes de nouveau, aussi la laissa-t-elle gérer ces histoires et les questions. Lui rejoignit Yliria, qui cessa de se tendre quand il l'approcha.

« On fera un arrêt au temple, si tu veux. Moi, j'irais dans le bâtiment en face, savoir ce qu'on va faire de ce bout de terrain. Reconstruire une maison risque de prendre de temps, dans tous les cas. »

Elle refusa sa proposition, préférant avoir un peu plus de temps pour mettre de l'ordre dans ses idées et que tout se soit calmé, notamment du côté de la milice. Akihito hocha la tête, compréhensif.

« Vous allez vous en sortir ? Enfin ta mère, surtout...

- Elle est forte. Même si je devais la laisser seule, elle s'en sortirait. Elle s'est toujours très bien entendue avec les voisins, comme tu peux le voir, et je doute qu'elle ai du mal à se faire héberger quelques... Oh ! J'allais oublier, tu peux me suivre ? Je vais avoir besoin de ton aide. »

Sans attendre la réponse de la jeune fille, il tourna les talons et traversa la maison en ruine au pas de course. Dans une partie où la toiture s'était écroulée, il repéra rapidement des bouts de poutre quelque peu épargnées par les flammes, et en dégagea deux d'une cinquantaine de centimètres. Les prenant sous son bras, il reprit sa route pour rejoindre ce qui était feu le terrain d'entraînement sablé. Les souvenirs l'assaillirent de nouveau, mais il les repoussa. Repérant le coin supérieur droit du terrain, il s'en approcha et inspecta la terre, au sol.

(Encore bien tassée, pas retournée... Alors elle doit encore être là.)

Comme il s'y attendait, Yliria l'avait suivi et posait un regard curieux sur lui. Il lui tendit une de ses pelles de fortune et pointa du doigt le sol.

« Mon père était quelqu'un de prudent, et il cachait une petite somme d'argent dans une cassette en bois, qu'il avait enterré ici. Au cas où... Et ce cas où est arrivé. Il jeta un œil à la rue, d'où ils étaient visibles. Même s'il doutait que leurs voisins puissent se montrer d'une quelconque façon appâtée par le gain, il préférait finir ça vite. Si tu pouvais m'aider à la déterrer, je t'en serais reconnaissant. Enfin... Plus que je ne le suis déjà, quoi. »

Yliria hocha la tête et l'aida à déblayer. La couche de sable fut rapidement enlevée, mais la terre en dessous était elle plus dure à retirer, compactée par les années. Et avec de simples bouts de bois, c'était compliqué de creuser efficacement. Néanmoins, la pointe durcie par les flammes laboura suffisamment la terre pour la rendre plus meuble, et lorsqu'un son mat retentit, Akihito lâcha sa pelle de fortune et termina de la tâche à la main, et finalement dégager une petite boîte de bois.

(De l'acajou.)

Pourquoi un détail aussi futile lui revenait soudainement en tête ? Il n'en savait trop rien, mais le son des yus tintant à l'intérieur lui confirma qu'elle était encore pleine.

« Tu n'as pas à être reconnaissant envers moi. Je ne comprends même pas que tu puisses l'être dans cette situation.

- Bah... Tu m'as aidé, et tu ne m'en veux pas pour t'avoir capturé et livré à Kisp. Tu as protégé ma mère. Tu as rendu un hommage à mon père. Tu m'as aussi sauvé d'une certaine façon. Tu m'as soigné. Donc si pour tout ça je ne peux pas être reconnaissant... »

Tout en énumérant les choses qu'Yliria avait fait pour lui, il enroula la cassette dans son manteau et se redirigea vers sa mère qui était encore accaparée par la foule. Ils échangèrent un regard et Akihito comprit qu'il pouvait la laisser tranquille. Il s'engagea alors dans une rue adjacente, se dirigeant vers l'armurerie des Himatori. Étant des proches de sa famille... Il se devait de les avertir et les rassurer.


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Akihito
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Re: Les Habitations

Message par Akihito » dim. 10 janv. 2021 06:03

Dans le chapitre précédent...

Troisième Arc : Encre de feu, Ancre de sang.

Chapitre XX.4 : La vie Oranaise.

Sur le chemin du retour, Amy et Akihito discutaient mentalement des emplettes de leur amie.

(Pour elle, c'est sans doute des armes exotiques.)

(Ca fait sens.) approuva Amy

(peut-être qu'elle va vouloir en adopter l'armure ou les armes ?)

(Sur ses armes... Je ne pense pas. Elle a l'air de ne pas vouloir en démordre de sa rapière et de son bouclier. Tu peux tenter de lui faire changer d'avis, mais je te souhaite bonne chance.)

(Mmmh...)

(Elle peut néanmoins en adopter le style pour son armure. Et là, pour le coup, une semi shaakte, armée d'une épée et d'un bouclier en crevette, qui a des fluides de lumière, et qui a une armure dans le style ynorien... Je dis bravo.)

L'enchanteur étouffa un rire. L'image était amusante, et il jeta un regard à Yliria.

« La famille Himatori est très proche de la mienne. Leur fils, Hïo, est mon meilleur ami d'enfance, et mon père était un fidèle client, pour le meilleur et pour le pire. »

Après s'être étiré, il se tourna vers la jeune fille en lui offrant un sourire rayonnant. Même si, quelque part, il était encore affecté par la mort de son père, il avait fait son deuil et Marcus aurait voulu que son fils aille de l'avant.

« Si on met de côté le temple de Gaïa, est-ce qu'il y a quelque chose que tu veux voir ?

- C'est gentil Akihito, mais je préfère ne pas chercher d'ennuis en me baladant plus que nécessaire en ville. Pour le moment du moins... Peut-être une autre fois ?

- Oh oui, oui, bien sûr... Il y a quand même un endroit que j'aimerais te montrer, mais ça peut attendre la nuit. Même, c'est mieux de le voir la nuit. Je pense que ça te plaira et te fera du bien... À moi aussi, d'ailleurs.

- Qu'est-ce que c'est ? »

À sa question curieuse, il lui sourit et fit un clin d'oeil.

« C'est une surprise ! Même si c'est en réalité un peu compliqué d'expliquer ce lieu sans y être.

Si elle sembla hésiter un instant, elle finit par acquiescer, non sans une certaine réserve.

« Rien d'étrange au moins ?

- Non. C'est un lieu apaisant, le plus apaisant que je connaisse. Mais je ne peux pas te promettre qu'il aura ce même effet sur toi...

- Oh... Dans ce cas d'accord. Je suis toujours un peu curieuse de voir la ville, ce n'est pas tous les jours que j'ai un guide en débarquant dans un endroit nouveau. »

Il hocha la tête avant de faire une petite courbette, arguant qu'il était son obligé. Elle fit ensuite la remarque qu'il devait faire bon y vivre dans sa ville natale, ce à quoi il ne répondit que par un maigre sourire en coin. C'était à la fois vrai et à la fois faux, car même s'il n'avait jamais eu à se plaindre, il n'avait pas non plus beaucoup de villes avec lesquelles il pourrait comparer. Surtout qu'en ce moment... L'ambiance de la ville était loin d'être au beau fixe.

(Oooh crois moi, Oranan est une ville bien calme.)

(Même maintenant ? Avec cette tension, avec la Milice qui est partout ?)

(Oh oui. Les villes où tu peux te faire détrousser à chaque coin de rue et où la garde ne lèverait pas le petit doigt pour t'aider sont plus nombreuses que tu ne le crois.)

(Errrrh...)

Les deux enchanteurs continuèrent de discuter avant de finalement se retrouver devant la maison d'Anthelia. À l'instant où il pénétra dans la bâtisse, Anthelia qui attendait anxieusement sur un des divans se releva et se dirigea vers lui. Ses traits s'adoucirent en voyant le visage calme du jeune homme et elle caressa tout doucement sa joue.

« Ça a été...?

- Oui... On a pu lui dire au revoir. »

Un doux sourire soulagé éclaira le visage d'Anthelia, qui embrassa son amant avant de se tourner vers Yliria.

« Dis-moi, est ce que tu as eu l'occasion de manger la cuisine Ynorienne ?

- Et bien... Dans l'auberge de Bouhen, le fameux coq au Prajio conseillé par Akihito. Sinon, pas vraiment, ce n'est pas vraiment le genre de nourriture que j'ai l'habitude de manger.

- Dans ce cas, tu vas goûter à mon curry. Et rien à voir avec l'espèce de truc que Akihito peut bien préparer. »

Le concerné leva les yeux au ciel, mais sourit et ne contre-attaqua pas. Après tout, elle avait raison : s'il avait indéniablement progressé en cuisine, son curry était encore tout juste moyen.

Sa mère rentra peu après et il retint un soupir de soulagement. Elle avait voulu rentrer seule, mais il avait quand même été inquiet qu'une nouvelle attaque ne survienne. Il lui confia la cassette et elle alla s'éclipser, demandant à Anthelia où elle pouvait faire ses ablutions. L'enchanteur aida néanmoins par la suite la tatoueuse à préparer son plat, désormais suffisamment doué pour quand même pouvoir assister quelqu'un en cuisine. Du coin de l'oeil, il regarda la jeune fille entretenir son matériel, dans son coin. Le genre d'activité qu'il ne faisait que rarement, préférant laisser les forgerons compétents s'occuper de ça.

(Elle a pas dû être très bien accueillit par les forgerons qu'elle a croisée jusque-là.)

(Les Shaakts sont si mal vu que ça partout ?)

(En Imiftil, il n'est pas rare de les croiser en dehors de leurs territoires matriarcaux. Mais comme il reste un peuple belliqueux, ils sont tout de même pas très bien vu même là bas.) expliqua la Faëra, ce qui fit hocher la tête d'un air pensif à l'enchanteur. Lorsqu'Yliria perturba ses pensées en leur demandant ce qu'elle pouvait faire, Anthelia lui indiqua les couverts d'un signe de la tête. Rapidement, la table fut dressée et peu de temps après, les quatre personnes se mirent à table. Une fois rafraîchit, sa mère avait repris l'apparence qu'elle avait avant qu'il ne parte pour Kendra Kâr. Même s'il pouvait voir ses yeux légèrement voilés...

(Elle fait quand même dis ans de moins.)

Il commença à manger avec entrain, avant de voir qu'Yliria, placée en face de lui, jetait un regard circonspect et paniqué à ses baguettes qu'elle tenait dans chacune de ses mains. Elle tenta de les pincer en imitant ses compagnons de table, mais dans un cuisant échec. Akihito se garda bien de rire, l'exercice n'était pas évident pour qui n'avait pas l'habitude. Il se leva donc, fouilla un instant un tiroir où il avait vu Anthelia en tirer une cuillère avant de rapporter l'ustensile à la Shaakte.


« Tiens Yliria, ça sera plus facile pour toi.

- Oh mais oui ! Tu ne sais pas utiliser les baguettes Yliria. Je t'apprendrai après si tu veux !

- Maman... Laisse la tranquille un peu, sinon elle va finir avec un Yukata avant la fin de la soirée.

- Je suis sûre que ça lui irait très bien, riposta sa mère en le pointant de sa baguette.

- Euhm... Certes. »

Une Shaakte avec une tenue Ynorienne ? Voilà qui serait encore plus surprenant que les chignons Ynoriens. Il commença à imaginer la jeune fille dans la fameuse tenue, avant qu'un coup de coude d'Anthelia ne le tire de ses pensées.

« Eh oh, je sais à quoi tu penses.

- Je ne vois pas de quoi tu parles, répondit avec un air innocent.

- Mouais mouais, je te connais bien. Alors Yliria, ce curry ? »

Yliria appréciait visiblement le repas.. Elle avait l'air d'avoir quelques difficultés à terminer son assiette, mais n'eut pas trop de mal à se forcer. Et alors que le repas se terminait...

« Tu es sûr que je peux me balader en ville, surtout de nuit ?

- Mmh ? Oh, oui bien sûr. Seule ce serait suspect mais avec moi, on est encore plus visible. On détonne plus, donc les miliciens devraient nous remarquer plus facilement. Et donc, nous identifier comme un groupe "normal" dans la ville. »

Akihito se gratta sa barbe de quelques jours, pas sûr d'être vraiment très clair.

« Mais on peut remporter à plus tard si tu veux.

- J'avoue ne pas avoir saisi, mais si tu dis que c'est bon, je te suis.

- Content que tu considères autant mon avis.

- Je suis curieuse de toute façon, je préfère ne pas trop attendre sinon je ne vais jamais m'ôter ça de la tête. »


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Kiyoheiki
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Re: Les Habitations

Message par Kiyoheiki » dim. 10 janv. 2021 14:20

~Auparavant~
~2~


Les lueurs du petit jour illuminent une porte que j'ai franchi plusieurs fois auparavant. Mes pensées se tournent brièvement vers le dessin tatoué dans mon dos tandis que je m'apprête à frapper à la porte. Je ressens un bref élan de culpabilité. Depuis mon voyage sur Aliaénon, je ne perçois plus l'empreinte de l'encre magique sous ma peau. La nature de ce monde désormais inaccessible, sans doute. Des heures de travail dont il ne reste plus qu'une belle mais vide empreinte.

Je prends une brève inspiration puis signale ma présence à la porte de la tatoueuse magique, casque au creux du bras. Lorsque le panneau de bois se déplace, je découvre derrière l'artiste dont le regard laisse paraitre une lueur de reconnaissance. Il est tôt, aussi je ne laisse pas mon regard s'attarder sur sa silhouette par politesse. J'incline lentement et respectueusement la tête.

"Bonne matinée à vous. Le dénommé Cherock O'Fall se trouve-t-il ici ?"

Elle répond à mon signe de tête puis s'éclipse dans le bâtiment. Je ne l'y suis pas, me contentant de patienter à l'extérieur, le regard tourné vers la ruelle. Le nom de cette personne n'a pas vraiment de sonorité locale. Un nouvel arrivant peut-être ? Ou comme mon apprenti Andreï, un métisse ? Je suis curieux mais n'en laisse rien paraitre. Si le Conseil exige aussi de le voir, c'est que l'individu doit être remarquable à sa façon.

Je ressens d'un coup une présence proche, et je découvre un jeune homme dans le cadre de l'entrée. Je ne l'ai pas entendu arriver. Suis-je si préoccupé pour l'avoir perçu au dernier moment ? Il me dépasse de presque deux têtes, une chevelure blonde peu commune en ma Patrie et des yeux vairons. Son apparence ne me perturbe en rien. Après tout, il est moins grand ou massif que mon ami Hidate et n'est pas non plus le premier à me regarder de haut. J'appose mon poing clos dans ma paume, rivant mon regard violacé au sien. Je le salue d'un geste militaire.

"Cherock O'Fall ? Sergent D'Esh Elvohk Kiyoheiki, milice d'Oranan. "

J'abaisse les mains, changeant de prise sur mon heaume et poursuis avec assurance.

"Nous sommes tous deux convoqués ce matin par le Conseil de la République. Le temps nous est précieux. Veuillez vous apprêter séance tenante, je vous y accompagne."

Campant sur mes jambes, je laisse ma gestuelle indiquer que je ne compte pas repartir d'ici sans lui.


Modifié en dernier par Kiyoheiki le dim. 10 janv. 2021 19:45, modifié 1 fois.

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Re: Les Habitations

Message par Akihito » dim. 10 janv. 2021 15:31

Dans le chapitre précédent...

Troisième Arc : Encre de feu, Ancre de sang.

Chapitre XXI.2 : L'appel du devoir.

« Hrm... Akihito ? Je... Tu veux bien me faire descendre ? »

La voix d'Yliria surprit Akihito, qui venait tout juste de retrouver le chemin jusqu'à la maison d'Anthelia. Il n'était en réalité allé que peu de fois chez elle, aussi le chemin ne lui était pas très familier, surtout de nuit.

« Oh tu es réveillée ? Bien sûr. »

Il la laissa glisser au sol avant d'ajouter dans un sourire :

« Mon épaule est peut-être confortable, mais ça ne vaut pas un lit au chaud... Mmh. En fait ça ne sera pas un vrai lit, Anthelia n'en a pas autant... Un des divans t'irait ? Sinon je peux m'arranger avec Theli... »

il avait parlé un peu trop vite et se sentais un peu ridicule.

« Pas la peine de t'en faire, j'ai tout ce qu'il faut dans mes affaires. »

Ils marchèrent les quelques dizaines de mètres qui les séparaient de la maison, dans le silence de la nuit, avant de finalement arriver à leur lieu de repos. Et alors qu'il s'apprêtait à entrer dans le petit corridor, Yliria le retint par son manteau. La regardant, il la vit hésiter, puis finalement se décider à ouvrir la bouche pour... Le remercier. Encore. La petite escapade nocturne lui avait fait beaucoup de bien, apparemment.

« Ne me remercie pas autant Yli', c'est normal de prendre soin de ses amis. Surtout, n'hésite pas à venir me voir si y a quoi que ce soit. Je ne pourrai pas résoudre tous tes problèmes... Mais tu trouveras toujours une oreille attentive chez moi. »

Il lui frotta affectueusement la tête, comme pour appuyer ses propos. En une poignée de jours, la shaakte était devenu comme une petite soeur à protéger, une amie à aider. Un rapprochement des plus rapides qui, pour Akihito, s'expliquait avant tout par leur rencontre des plus singulières. Portant un doigt à ses lèvres étirées en un fin sourire, il fit signe à Yliria de ne pas faire de bruit avant d'ouvrir lentement la porte. Il pénétra dans la salle, étouffant un faible arc électrique dans le creux de sa main pour les éclairer. Il pointa du doigt un des divans sur lequel la jeune fille s'empressa de s'installer douillettement. Et alors qu'il se dirigeait pour dormir, lui aussi, la voix d'Yliria lui parvint dans un chuchotement.

« Pour ce que tu as dit... C'est pas que je refuserai de t'en parler, mais juste.... J'en suis simplement pas capable seule. Mais ce que tu as dit, ça compte, vraiment.

- On prendra ce temps un autre jour. Dors bien Yli. »


- - - - - - - - - - -


Le réveil du lendemain fut des plus particuliers. D'abord, quelqu'un frappa à la porte de la tatoueuse de bon matin, ce qui réveilla Akihito quand la jeune femme se leva et quitta son étreinte. Puis elle revint une poignée de minutes plus tard, un air étrange sur le visage.

« Euh, Akihito... Y a le Dragon d'Ynorie qui veut te voir.

- Gnnh ? Répète ? balbutia l'enchanteur en émergeant lentement du sommeil.

- Le Dragon d'Or d'Ynorie, le sergent de la Milice. Il attend devant la maison et souhaite te parler.

-... Qu'est-ce qui se passe encore... »

Parfaitement réveillé par la nouvelle, Akihito s'habilla promptement, ceignit la Kizoku à sa taille et descendit les marches, réfléchissant à ce qui pouvait bien faire se déplacer le célèbre semi-shaakt. Etait-ce lié à sa déclaration de garantie pour Yliria faites la veille ? Il l'avait cité en guise d'exemple de présence shaakte dans la ville, alors peut-être n'avait-il pas apprécié pour une quelconque raison...

Quand il ouvrit la porte, il fut contraint de baisser les yeux pour observer le fameux Dragon. Une peau sombre, des cheveux noirs et des yeux en amande typiquement ynoriens et des oreilles pointues qui attestait de son ascendance elfique. Il était le parfait mélange des deux races et avait hérité également de leur petite taille, puisqu'il ne devait pas dépasser le mètre quarante.

« Akihito Yoichi ? Sergent D'Esh Elvohk Kiyoheiki, milice d'Oranan. »

Sa présentation se fait également dans un signe militaire, que Akihito lui rend, pour l'avoir vu des dizaines de fois lorsque son père rencontrait d'autres collègues.

« Nous sommes tous deux convoqués ce matin par le Conseil de la République. Le temps nous est précieux. Veuillez vous apprêter séance tenante, je vous y accompagne.

- Le Conseil ? Mais qu'est-ce que le Conseil me veut ? murmura Akihito avant de se secouer la tête. Non, j'imagine que je le saurais une fois arrivé sur place. Je vous suis, Sergent, donnez moi juste quelques instants. »

Il ne se risqua pas à prononcer son nom, par peur de l'écorcher, et ne préférait pas l'importuner en l'appelant par son surnom. Se tournant vers Anthelia qui était quelques mètres derrière lui, il confirma que cette dernière avait tout entendu, ce qu'elle fit dans un hochement de tête. Rapidement, il acheva de se préparer et de s'équiper avant de ressortir.

« Allons y. »

Puis, l'enchanteur emboîta le pas au milicien, portant comme lui, son nouveau heaume sous le bras.

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Re: Les Habitations

Message par Yliria » dim. 10 janv. 2021 21:15

<< Précédemment


Le réveil fut étonnamment doux. J'ouvris les yeux sans que rien ni personne n'eut à faire quoi que ce soit pour cela. Sentant la caresse du soleil matinal à travers la fenêtre la plus proche, je profitai de quelques minutes de pure oisiveté, chose devenue rare ces derniers mois. Je percevais vaguement le bruit provenant de la cuisine et m'étirai enfin avant de me redresser, sentant mes cheveux faire leur vie propre et s'éparpiller dans des directions aussi aléatoires qu'incongrues. Je les rabattit en arrière en me levant, installant mon serre-tête pour maintenir le tout tandis que j'entrai dans la cuisine où je trouvai Anthelia, seule, affairée. Elle m'offrit un sourire sincère mais bizarrement crispé et je ne pus m'empêcher de remarquer qu'elle semblait soucieuse en se retournant vers les fourneaux qu'elle semblait ne pas avoir envie de quitter. Je la laissai en paix et partis vers l'arrière de la maison. Après une rapide toilette aussi revigorante que fraîche, je rejoignis la cuisine où Elena était désormais installée et discutait avec Frans. Je les saluai et fuyais ensuite la pièce au plus vite en voyant la mère de Cherock fixer mes cheveux lâchés et encore humides avec désapprobation. Je trouvai Anthelia dans la pièce principale, étrangement seule.

- Cherock n'est pas là ?

- Un sergent de la milice est venu aux aurores et il lui a demandé de le suivre au Conseil. Il n'est pas encore rentré.

Je compris enfin son expression quelque peu inquiète et pinçai les lèvres. Je me demandais si cela avait quelque chose à voir avec ma présence et le fait qu'il se soit porté garant de ma présence. Comme si elle lisait dans mes pensées, elle me sourit.

- Tu n'y es pour rien, ce doit être lié à ce qu'il se passe avec Omyre. C'est le Dragon en personne qui est venu le chercher.

Dragon ? C'était la deuxième fois qu'on mentionnait un dragon à Oranan. Alyah ne put me renseigner et je restai dans mon ignorance, n'osant pas poser de question à une Anthelia visiblement inquiète. N'étant pas capable de calmer son angoisse, je sortis sans faire de bruit de la pièce et m'équipai. J'aurai préféré que Cherock soit là, mais tant pis. Je me préparai pour sortir, mettant mon masque sur mon visage pour me diriger vers la porte. Elena m'intercepta sur le trajet, un sourcil haussé et lorsque j'expliquai aller chercher ma commande chez le forgeron, elle me demanda d'attendre le temps qu'elle se prépare pour m'accompagner. Cela ne luit prit pas longtemps et nous sortîmes rapidement dans les rues presque désertes de la ville. Je comprenais mieux en connaissant la raison, mais ça n'enlevait pas le sentiment étrange qui flottait dans l'air, ni la tension qui rôdait.

Le détour chez le forgeron ne prit pas très longtemps. Elena alla le saluer et ils papotèrent un moment, la matriarche visiblement inquiète de la tournure des événements récents. Lorsqu'elle évoqua le fait que Cherock ait été appelé au conseil, le vendeur émit l'hypothèse que Cherock soit mandaté pour un objectif précis. J'écoutai en silence jusqu'à ce que le vendeur, avec le même sourire forcé que la veille, ne me tende finalement mon dû dans un étui du plus belle effet. Elena observa, curieuse, tandis que je sortais une des étoiles d'un noir de jais et le pinçai entre le pouce et l'index pour l'observer attentivement avant de la remettre dans son étui. Je remerciai le forgeron qui hocha simplement la tête. Les deux ynoriens discutèrent encore un peu avant que nous ne sortions finalement pour retrouver le temps couvert de cette fin de printemps.

En sortant, nous croisâmes une famille ayant visiblement décidé de plier bagage et de fuir la ville par voie maritime. Les deux parents tenaient fermement deux de leurs enfants tandis que le troisième, visiblement pas au courant de tout ce qu'il se passait, s'amusait avec un jouet rond. Lorsque l'objet lui échappa des mains et se mit à rouler sur les pavés, il se précipita à sa suite, attirant l'attention de son père qui le somma de revenir au plus vite. Peut-être perturbé par le ton autoritaire de son père, ou bien trop maladroit pour son propre bien, le jeune garçon trébucha et s'étala de tout son long sur les pavés. Je ramassai l'objet qui roulait près de moi avant d'entendre les pleurs de l'enfant tandis qu'il s'asseyait, les genoux salement égratignés. Sa mère se précipita vers lui, de même qu'Elena qui devait vouloir aider. Je retins de lever les yeux au ciel face aux pleurs hystériques du garçon. Ce n'était pas si grave...

(Toi aussi tu as pleuré, étant petite.)

(Les blessures étaient d'un autre genre de gravité, excuse-moi. Enfin...)

Je m'approchai et tendis le jouet au garçon qui cessa de pleurer pour m'observa d'un air bizarre. Je grimaçai derrière mon masque, espérant qu'il n'allait pas se mettre à pleurer à nouveau. Pour lui faire oublier tout ça et éviter d'attirer une attention dont je me serai bien passée, j'illuminai mes mains et soignai les plaies du garçon qui sauta sur ses jambes aussitôt qu'il ne sentit plus la douleur. Sa mère poussa un léger soupir et me remercia d'une façon rigide tandis que l'enfant, lui, fouillait ses habits pour en sortir un curieux bâton au bout duquel pendait une ficelle d'une couleur sombre qu'il manipula délicatement. Il me tendis l'objet qu'il déposa dans ma paume avant de suivre sa mère en me faisant un grand sourire et un signe de la main. Je me retrouvai avec l'objet dans les mains sans trop savoir quoi en faire ni ce que c'était.

- C'est un feu d'artifice, une version pour les enfants. M'informa Elena qui semblait avoir capté ma perplexité. Si tu allumes l'extrémité, ça fera de jolies étincelles de couleurs. Tu pourras essayer en rentrant.

Ce que je fis, dans la cour à l'arrière de la maison. Je fixai avec émerveillement les étincelles colorées qui remontaient peu à peu la ficelle tout en produisant un petit crépitement. C'était très joli effectivement, mais je me demandais où il avait pu trouver un tel objet. Lorsque je posai la question à Elena, elle me sourit d'un air entendu comme si elle savait que j'allais poser la question.

- Nous avons un artificier qui en fabrique. Je t'y aurai bien emmené, mais sa boutique n'est pas en ville. Et à l'heure actuelle...

- Oh... ne t'en fais pas, ce n'est pas grave. Et je ne suis pas sûre que sortir à nouveau sans Cherock soit une bonne idée.

- Jeune fille, j'ai élevé ce garnement pendant 22 ans, alors c'est pas aujourd'hui qu'il va se mettre à jouer les nourrices !

Je ne retins pas un sourire et bavardai un peu avec elle avant de prendre congé. Je souhaitai essayer mes fameux shuriken et m'éloignai à nouveau vers la cour derrière la maison. Si vraiment la guerre pointait le bout de son nez, il valait mieux que je sois capable de m'en servir, cela pouvait certainement m'être utile. Profitant du moment, je pris le temps de sortir de ma besace la rune que j'avais trouvé non loin de la maison de Cherock, alors que je les attendais à l'extérieur. Je me concentrai dessus. Une rune aussi, ça serait toujours utile.
***

(((HRP : identification de la rune Tev)))

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Gamemaster5
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Re: Les Habitations

Message par Gamemaster5 » dim. 10 janv. 2021 22:44

Intervention GMique pour Yliria

En serrant la rune dans ton poing, tu te sens soudain envahi d'une puissante énergie. Une énergie indomptable, un puissant courant, une Force dont tu aurais bientôt besoin. Tu viens d'obtenir la rune Force.
Allez, viens mon copain ! Si tu as des questions n'hésite pas !



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Yliria
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Re: Les Habitations

Message par Yliria » lun. 11 janv. 2021 19:03

<< Précédemment

La sensation qui m'envahit en tenant la rune fut autant galvanisante qu'étrange. Force. Ce dont j'avais cruellement manqué ces derniers temps. Je soupirai en observant la rune avant de la ranger délicatement avec les autres. Je leur trouverai bien une utilité un jour. Pour l'heure, je me concentrai sur autre chose en mettant debout un bout de bois assez large et haut pour servir de cible. Une fois le shuriken en main, je voulus le lancer comme j'avais vu les pirates lancer leurs dagues. Autant dire que ce fut un cuisant échec et que le shuriken faillit se perdre dans le voisinage. Heureusement que je n'avais pas lancé fort. Après plusieurs essais infructueux dans le même genre, je commençai à me dire qu'il devait y avoir une certaine façon de les lancer et essayai de les lancer à l'horizontal plutôt qu'à la vertical. Il y avait du mieux, au moins ils partaient à peu près dans la direction voulue. Pour la précision, par contre, j'en étais encore très loin.

- On se prend pour une ninja ?

Je me retournai pour faire face au sourire amusé d'Anthelia qui devait m'observer depuis un moment. Je haussai les épaules, ne voulant pas paraître ignorante en avouant ne pas savoir ce qu'était un ninja. Sans se départir de son sourire, elle approcha et tendit la main. J'hésitai un instant avant de déposer un des shuriken dans sa paume. Comme si elle les avait manié toute sa vie, il passa de sa paume pour aller entre son pouce et son index et, d'un simple et court mouvement, l'étoile de jet fendit l'air pour se ficher dans le bout de bois qui me servait de cible. Je restai bouche bée en fixant le shuriken planté avant de la fixer elle, complètement prise au dépourvu. Elle rigola doucement.

- Je t'ai un peu observée. Tu permets que je te donne quelques astuces ?

- Oui bien sûr !

- Alors, pour commencer, tiens-le comme ça, par une branche...

Je passai ainsi un moment avec Anthelia, tandis qu'elle m'apprenait à utiliser correctement les étoiles de jet. Cherock avait raison, c'était loin d'être évident, mais Anthelia semblait être plus que qualifiée pour lancer ces armes et elle me fit vite comprendre comment m'en servir. Davantage pour distraire que pour attaquer, plutôt en milieu encombré puisqu'il étaient difficilement repérable. Il me fallut un moment avant de toucher la cible pour la première fois, mais ce fut comme si c'était une réussite cruciale sur le moment. Après ça, j'essayai de leur donner des trajectoire moins rectiligne, avec plus ou moins de succès, mais je sentais que j'avais compris l'intérêt et la façon de faire. Restait juste à m'entraîner suffisamment pour maîtriser la chose, mais cela n'allait pas se faire en une matinée. Et alors que je lançai un shuriken en lui donnant une trajectoire en arc de cercle, la porte de la maison s'ouvrit. Le visage de Cherock apparut au moment où le shuriken se plantait dans le bois de la porte, à quelques centimètres de son visage.

Mortifiée, je le vis blanchir et porter lentement son regard sur l'objet ayant été à deux doigts de l'éborgner. Je me figeai tandis qu'il déclarait, d'une voix blanche, qu'il nous laissait tranquille. Il referma aussitôt la porte. Anthelia me tapota le tête et le suivit sans attendre tandis que je restai derrière à ramasser mes shurikens en me traitant mentalement d'idiote. J'aurai eu l'air fine si ça l'avait atteint. Alyah tempéra la chose, assurant que ça ne serait jamais arrivé et que ce n'était qu'un presque accident. Même en le sachant, je m'en voulais tout de même et décidai de retrouver le fulguromancien pour m'excuser réellement. Je le cherchai dans la maison pour finalement le retrouver en compagnie d'Anthelia dont la voix me fit me figer, au vu de son intonation.

- Tu plaisantes ?!

Cherock essaya de l'apaiser et j'écoutai sans vraiment le vouloir leur conversation. Il était apparemment réquisitionné par le Conseil de l'Ynorie pour joindre l'effort de guerre contre Omyre, mais en tant que représentant Ynorien auprès des Kendrans qui avaient fait appel à des aventuriers de toutes part pour renforcer les troupes prêtes à partir au combat. Il partait le soir même, sur un navire marchand affrété pour l'occasion. Je compris rapidement pourquoi Anthelia semblait à la fois furieuse et angoissée, il allait littéralement rejoindre la guerre face à la Déesse Sombre. Adossée au mur près de la porte menant à la pièce, j'écoutai en silence, mes méninges tournant à toute vitesse. La guerre semblait avoir pris une ampleur démesurée pendant que je voguai au milieu des mers et que je battais la campagne pour fuir Kisp. Je fermai les yeux puis me retirai en silence, peu encline à me faire prendre à écouter aux portes, même involontairement. Je retournai dehors et m'assis un instant contre le mur de la maison.

(Alyah?)

(Hmm?)

(Tu penses que je devrais participer?)

(À la guerre ? Oh oui, quelle bonne idée, ça t'a tellement réussi la dernière fois au Naora.)

(Je suis sérieuse là ! Même si je ne vis pas ici, ça concerne tout Yuimen!)

(Et ? Que comptes-tu faire exactement ? Rejoindre les Kendrans contre Omyre ? Tu n'es pas une soldat, Yliria. Tu te plains que les ennuis te cherchent, mais là tu vas carrément leur ouvrir les bras !)

(Mais je ne peux pas rester sans rien faire!)

(Et pourquoi pas ? Cite-moi une seule et unique raison valable, j'insiste là-dessus, d'aller risquer ta vie pour des peuples qui te flécheraient à vue s'ils en avaient l'occasion, qui te méprisent probablement et dont tu ignorais jusqu'à l'existence il n'y a même pas deux mois.)

J'ouvris la bouche avant de la refermer. Elle n'avait pas tort, même si cela me faisait mal d'admettre que je pouvais être égoïste à ce point. Ça ne concernait pas que ma seule personne. Je me rongeai les ongles en cherchant une raison valable autant à mes yeux que ceux d'Alyah. Sauver des vies, combattre l'obscur et son influence, cela ne suffisait pas à Alyah.

(Ce sont de simples buts que n'importe qui peut se fixer. Bon sang... Je veux une raison qui te tienne à cœur à toi, Yliria, je me fous des raisons des autres. Pourquoi toi, tu irais, pourquoi toi plus qu'un autre ? Yliria!)

(Parce que j'ai prêté serment ! Parce que c'est ma volonté ! Parce que, merde, je veux pouvoir me dire que j'ai aidé à changer les choses et peut-être ne plus être mal perçue partout où je vais ! Parce qu'il serait fier ! Parce que... qu'il...)

Je soupirai et fermai les yeux. J'étais facilement tombée dans son piège, une fois encore et l'entendre ricaner de manière espiègle me tira un rictus, mélange d'exaspération et d'amusement.

(Parfois je te déteste.)

(Moui, moui, tu m'en diras tant.)

Elle reprit cependant un ton plus sérieux.

( Es-tu sûre de toi, Yliria ? Ce n'est pas une décision à prendre à la légère et personne, je dis bien personne, ne t'en voudra de plier bagage et de rentrer à Tulorim.)

(Honnêtement ? Je ne suis sûre de rien... Mes raisons sont bonnes non?)

(Oui, elles sont bonnes.)

(Alors ma décision est prise.)


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Akihito
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Re: Les Habitations

Message par Akihito » mar. 12 janv. 2021 06:10

Dans le chapitre précédent...

Troisième Arc : Encre de feu, Ancre de sang.

Chapitre XXII.1 : Qui veux la paix, prépare la guerre.

Ses paroles résonnèrent un temps dans la salle inhabituellement vide, avant que le milicien ne vienne lui aussi déclamer sa détermination… Avec un sous-entendu que Akihito ne comprit pas. Pourquoi cette emphase sur le terme « indépendants » ? Exprime-t-il des doutes à l’idée de confier le destin de l’Ynorie à des personnes qui ne sont pas natifs de la Républiques, qui ne sont que des mercenaires indépendants ?

(Une crainte légitime, mais un luxe qu’on ne peut pas s’offrir. De plus, si l’Ynorie tombe, les autres nations subiront une pression sans cesse croissante et finiront, à terme, par céder.)

Une analyse dont il ne partagea pas les fruits, car déjà, les conseillers reprenaient la parole. Si pour le haut capitaine de la garde, l’entrain n’était pas flagrant, le soulagement se vit davantage sur les traits de la Conseillère.

« Soyez honorés de cette décision. Le Conseil compte sur vous, serviteurs de l’honneur et d’Oranan. Puisse le sort vous être favorable. »

Tirama annonça ensuite qu’un navire marchand était réquisitionné pour les escorter au plus vite vers le camp Kendran. Un port temporaire avait été improvisé sur la côte au sud d’Oranan, et ils allaient y accoster pour rallier au plus vite le camp de Kendrâ-Kar. Le Sergent salua les membres du Conseil et Akihito s’inclina à sa suite, avant de prendre congé. La matinée ne faisait que commencer, mais il devait se préparer… Et préparer ses proches à de nouvelles perturbations dans leurs plans.

Lorsque les portes de la salle du Conseil se refermèrent devant eux, Akihito adressa un rapide hochement de tête à son nouveau compagnon.

« Sergent, j’ai plusieurs affaires à régler avant de partir, et je risque de manquer un peu de temps si je ne me presse pas. Retrouvons-nous ce soir au port à la tombée de la nuit, si vous le voulez bien. »

Son interlocuteur acquiesça, et les deux hommes se séparèrent quand l’enchanteur sortit du bâtiment à grandes enjambées. Levant le nez, il observa un ciel toujours aussi chargé de nuages sombres. Était-ce un mauvais présage, ces lourds amas annonciateurs d’une guerre féroces, ou bien un signe encourageant pour le fulguromancien qu’il était ? Une question qui ne trouverait sa réponse qu’à la fin de la guerre. Sa foulée s’allongea, le trottinement devint une course, la course une traversée foudroyante de la ville, propulsée par les bottes de foudre. Une poignée de minutes plus tard, Akihito se trouvait devant la maison d’Anthelia, et y pénétra sans un bruit. Des voix étouffées provenaient du petit lopin de terre à l’arrière de la maison, à travers la porte entrouverte. Dans la pièce qui servait de cuisine et qui menait aux voix en question, Akihito trouva sa mère attablée avec Frans. Tous deux braquèrent leur regard sur le nouveau venu, et la question de savoir pourquoi il avait été convoqué au Conseil, par le Dragon d’Ynorie qui plus est, tomba rapidement.

L’air résolu, le jeune homme leur raconta ce qui l’attendait, et la nécessité d’un départ prochain pour lui. Il s’attendit alors à une brimade de sa mère, qui ne vint jamais.

« Tel père, tel fils.

- Maman…

- Ce n’est pas la peine Akihito, le coupa l’Ynorienne. J’ai vu ton père quitter la maison un trop grand nombre de fois pour avoir appris à ne pas me ronger les sangs. Vous faites ce que vous pensez être juste, et vous vous battez pour notre foyer. Alors tout ce que je peux faire, c’est prier Rana pour que tu reviennes indemne. »

Elle se leva, porta une main douce et chaude à la joue de son fils, avant de se loger dans ses bras, un bref instant. Emu et reconnaissant, Akihito la serra contre lui à son tour, avant de braquer son regard sur Frans.

« Maître Frans, j’ai un service à vous demander.

- Dis moi.

- Prenez soin de ma mère en mon absence, je ne connais pas grand monde à qui je pourrais confier sa sécurité sereinement. Je refuse qu’elle reste dans Oranan en plein siège, et la voie des mers sera bientôt closes. Si elle et vous êtes d’accord, dit le tatoueur en regardant à tour de rôle les deux adultes, j’aimerais que vous quittiez la ville le plus tôt possible.

- Je ne sais pas ce que votre mère souhaite, mais je suis prêt à assurer sa sécurité. C’est le moins que je puisse faire pour mon apprenti qui part au front, acquiesça après un temps de réflexion le fulguromancien.

- Maman, je ne veux rien t’imposer, et je sais que tu tiens à Oranan. Mais je ne pourrait m'empêcher d'être inquiet si je te sais dans la ville. »

L’Ynorienne hésitait, visiblement. Puis, dans un murmure, elle lui demanda de lui laisser un peu de temps pour réfléchir à tout ça.

(Au moins, elle ne semble pas réticente à l’idée.)

(Tu lui forces un peu la main, il faut dire.)

(Je n’accepterai pas de perdre ma mère dans un conflit qui ne la regarde pas) affirma avec détermination le jeune homme.

(Oui, enfin bon… Le plus dur reste à venir.)

Le jeune homme déglutit bruyamment. Anthelia. Elle n’allait pas aimer ce qu’il allait lui dire, et elle allait vouloir venir, l’accompagner. C’était une combattante confirmée, mais pas une militaire : il n’était pas sûr de vouloir la voir sur un champ de bataille…

(Arrête de décider pour elle, et va lui parler.)

Suivant les paroles de la Faëra, Akihito ouvrit la porte menant à la cour. Il entendit plus distinctement les voix de la tatoueuse et d’Yliria, et se montra à la lumière du jour.

*chtonk*

Un bruit mat sonna très, trop proche de lui. Tournant très lentement la tête, il vit avec des yeux ronds une étoile, noire comme le jet, vibrer dans le bois dans lequel elle s’était fichée. À, à tout casser, deux centimètres du visage d’Akihito. Sentant son visage perdre peu à peu sa couleur, il fixa ensuite les deux jeunes femmes au milieu du petit lopin de terre. Et, plus précisément, la semi-shaakte qui tenait un autre shuriken dans ses doigts. Il ne pensait pas que son visage pouvait prendre une teinte aussi claire, tellement elle avait l’air mortifiée de son acte.

« Euh… Je vais vous laisser, hein… bredouilla le jeune homme avant de s’empresser de rentrer de nouveau dans la maison, sous les yeux curieux de sa mère et de son mentor. Il eut un sourire penaud avant d’être à moitié bousculé par Anthelia, qui ouvrait la porte à sa suite.

« Désolée, Aki, j’entraînais Yliria à lancer ses shurikens, puis…

- C’est pas grave, elle m’a juste fait une peur bleue. Essaye juste de l’entraîner autre part que sur la porte d’entrée la prochaine fois, répondit-il avec un petit sourire mi-nerveux, mi-moqueur. Theli, vient voir un instant…

- C’est le Conseil, c’est ça ? » questionna la jeune femme en le suivant dans la petite pièce qui servait autre fois d’espace de stockage pour la tatoueuse. L’enchanteur acquiesça gravement, avant de lui raconter son entrevue avec les Conseillers… Et la mission qu’il avait acceptée.

« Tu plaisantes ?!

- Non, je suis sérieux Theli. Je suis désolé de repartir si vite, mais c’est ma responsabilité, mon devoir.

- Très bien, alors je t’accompagne.

- Hein, quoi ?! s’exclama Akihito. Mais, tu ne peux pas ! Et puis c’est trop dange…

- Dangereux ? Oui je sais. Et alors ? Ca serait moi qui devrait partir, tu me laisserais y aller seule ?

- Non, mais… »

Sans un bruit, la jeune femme se glissa contre lui, saisit son visage entre ses mains et l’embrassa, tendrement, coupant court à ses protestations.

« Aki, dit-elle en le laissant finalement reprendre son souffle, ça me touche que tu t’inquiètes pour ma sécurité. Mais c’est chez moi, ici. Et je ne peux pas laisser ces enfoirées de peaux vertes détruire mon foyer… NOTRE foyer… Alors, que tu le veuilles ou non, je viens. »

Puis c’est avec une expression déterminée sur le visage que la jeune femme partit rassembler ses affaires. Il soupira et s'assit sur un divan, ne sachant trop quoi penser de la nouvelle. D'un côté, il était inquiet, indubitablement. Elle allait se plonger dans un conflit où des milliers de personnes allaient mourir. Mais de l'autre... Il ressentait une certaine fierté d'aimer une jeune femme si courageuse, avec un caractère aussi bien trempé. Et qui, si elle n'était pas Ynorienne par le sang, l'était sans aucun doute par le coeur.

(Et toi Amy ? Tu en penses quoi ?)

(Tu dois t’en douter. Tu te jettes encore la tête la première dans le danger, et celui-là est colossal.)

(Peut-être, mais là…)

(… Là, c’est différent. Tu ne fais pas ça pour toi, tu le fais pour les autres.)

(Dis tout de suite que je suis égoïste,) s’offusqua Akihito.

(C’est exactement ça. Regarde comme tu veux décider pour les autres, pour Anthelia, pour ta mère, et même pour Yliria aussi, je le sens dans ta tête. Tu dis vouloir les protéger, mais au final tu imposes ta volonté aux autres. Est-ce que ce n’est pas la définition de l’égoïsme ?)

(Arrête Amy. Tu sais bien que c’est différent.)

(…)

(J’essaye de les protéger. Mais je ne suis pas assez fort pour pouvoir les mettre, seul, à l’abri du danger. La mort de papa me l’a rappelé. Alors j’essaye de faire ce que je peux, mais je ne veux les forcer à rien. Et pour Anthelia qui décide de venir avec moi… Même si ça me terrifie, je la laisserai m’accompagner. Et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour la préserver.)

(… La Sagesse de reconnaître tes limites, le Courage d’affronter malgré tout le danger. Et qu’en est-il de la Force, cher Porteur ?)

(La Force… Elle me manque. Mais je peux la combler. Par les armes, par mon armure. Par ma préparation à ce conflit qui me dépasse.)

(Si vis pacem, para bellum.)

(Qu’est-ce que cela veut dire ?) s'étonna l'enchanteur en entendant les curieuses intonations de la voix de la Faëra dans sa tête.

(La locution fétiche d’un Porteur de la Kizoku-Rana, d’un futur très éloigné. « Qui veut la paix, prépare la guerre. » Et je crois qu’elle est de rigueur, Aki.)

Au sein de son esprit, la sphère de lumière qui représentait la Faëra d’air brilla d’un intense éclat jaune, presque blanc. Elle n’avait sûrement jamais manifesté sa fierté envers son Maître qu’à ce moment-là.

(Allons préparer cette guerre, Akihito. Montrons à tous la fierté et la force du Porteur de la Kizoku-Rana que j’ai choisis.)

De discrets coups se firent entendre, et Akihito fut tiré de ses pensées et de sa conversation faërique par l'arrivée d'Yliria. La nervosité se peignait sur son visage, avant qu'elle n'ouvre la bouche pour s'excuser de l'incident avec le shuriken. De nouvelles excuses, que Akihito accepta évidemment : il commençait à connaître la chanson.

« T'en veux pas, c'est qu'un accident. Mais j'admets que tu m'as flanqué une sacrée frousse. »

Il tira deux runes, trouvées dans la caisse de son père, et les montra à la jeune fille. Étant enchanteresse, peut-être qu'elle les avait déjà eus entre les mains... Mais ce ne fut pas le cas. Dans un geste lui signifiant que ce n'était pas grave, il commença à se concentrer dessus, tout en s'adressant à la jeune fille d'une voix distraite mais pleine d’une détermination nouvelle.

« Je vais aller à la Belle Aura, voir ce que je peux faire des runes que j'ai avec moi. Et prendre quelques potions au passage, les miennes sont épuisées. »


(HRP : Identification des runes Tao et Aoz.)

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Re: Les Habitations

Message par Gamemaster6 » mar. 12 janv. 2021 14:33

Intervention pour Cherock

En se concentrant sur la première des deux runes, Cherock perçut un fourmillement familier, comme s'il l'avait toujours connu. Et pour cause, la rune Tao qu'il tenait signifiait Magie, celle qui l'avait toujours accompagné. La deuxième, en revanche, fut une sensation différente. Il la sentit rouler sur sa peau, lourde et immuable, comme s'il tenait un roc plus solide qu'il n'y paraissait. Il tenait dans sa main la rune Aoz, signifiant Terre.
Image

Quand on l'appelle, il apparaît !!
Et il reste, alors gare !

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Re: Les Habitations

Message par Akihito » mer. 13 janv. 2021 20:04

Dans le chapitre précédent...

Troisième Arc : Encre de feu, Ancre de sang.

Chapitre XXIV.1 : Brume de guerre.

Le reste de la journée passa en un éclair. Arrivés chez Anthelia, cette dernière affirmait qu’ils pouvaient partir sur-le-champ si nécessaire. De son côté, Hitomi avait pris sa décision : elle partirait avec Frans, vers le comté de Shory. La région la plus éloignée de la guerre, mais aussi là où résidait le fulguromancien. Si la bataille venait à être perdue… Alors le mage aurait le temps de mettre les à l’abri. Akihito le remercia, du fond de son cœur, tout en leur promettant de les rejoindre dès que la guerre serait finie. Il posa une main sur la main de sa mère, et la serra, fort. Il savait à quel point ça lui coûtait de le voir partir, en ces temps si difficiles pour elle. Mais elle était et avait toujours été forte pour dire au revoir souhaiter bonne chance aux hommes de sa vie, quand ces derniers allaient au-devant des dangers.

Alors qu’il pensait chaque mot de sa promesse de retour rapide, l’enchanteur eu une sensation des plus étranges. Ses fluides, encore surexcités par le déluge de foudre qui les avaient traversés, convergèrent dans sa main avant de se focaliser sur l’alliance qui ornait le doigt d’Hitomi. Une puissance qui prenait des formes si connues… Mais pourtant tellement différentes. En un mot, Akihito avait la sensation d’enchâsser un nuage de foudre dans le bijou. Sa mère poussa un petit cri de surprise à cause de picotements dans sa main, mais il les ignora. Guidé par son instinct, il ordonna à la foudre de sceller le nuage, s’engravant dans le métal sous la forme d’une marque brillante qui luisait désormais aussi sur son armure : le symbole runique Aok.

Libérant sa mère, il sentait comme un lien invisible entre lui, ses fluides, et la marque. Un lien ténu, dont il pouvait que très approximativement désigner une direction, mais qui était là. Avec la sensation de toujours, à tout temps, avoir la possibilité de retrouver cette marque.

(Je peux ajouter la Balise magique aux ressemblances de cette étrange capacité… Amy ?)

(Ne me demande pas, Aki. J’en ai aucune idée, et après ce qu’il s’est passé tout à l’heure, plus rien ne m’étonne. Mais c’est vrai que cette drôle de marque a l’air d’avoir un rapport avec l’éclair que tu t’es mangé.)

Une affirmation qu’il put confirmer, car l’étrange énergie restée après l’impact de foudre avait diminué. Avec la permission de sa mère, il prit la bague entre ses doigts et grâce à ses facultés d’enchanteur, tenta de comprendre l’enchantement qu’il avait lui-même mis sans le vouloir. Le secret de la marque se révéla bien vite, sans doute puisque Akihito en était à l’origine : elle contenait un nuage de foudre qui pouvait, à la volonté de son créateur, se libérer au-dessus de la marque. Ce dernier pourrait alors voyager jusqu’à ce point précis, passant de nuage d’orage en nuage d’orage et peu importait la distance. Un don d’une rare utilité que Akihito venait d’obtenir, et qu’il s’empressa d’expliquer à sa mère. Qui fut bien entendu ravi de savoir que son fils pourrait la rejoindre en un claquement de doigt.
De plus en plus convaincu que tout cela était une bénédiction que Valyus lui faisait en sa qualité d’Elu, Akihito prépara à son tour ses effets. Il n’avait de toute manière pas déballer grand-chose. Il profita du reste de la journée pour faire le plein de vivres, changer ses habits usés, prendre soin de ses cheveux et de sa barbe qu’il avait un peu négligé avec ses aventures. Le soir vint, et avec lui l’heure du rendez-vous. Akihito avait fait ses aux revoirs une boule dans le creux de son estomac, peu ravi malgré tout de quitter sa mère après s’être autant inquiété. Il se rassura en se disant qu’elle était avec une personne largement capable d’assurer sa sécurité.

Lorsque les trois compagnons se dirigèrent vers le port, mais le jeune homme dut rebrousser chemin, ayant oublié de confier une partie des économies de son père à sa mère. Elle avait refusé, arguant qu’il en avait plus besoin qu’elle, mais il parvint à la forcer à prendre mille yus avec elle. Et alors qu’il sortait de la maison pour retrouver les deux jeunes femmes, Akihito se trouva subitement nez à nez avec un museau. Rouge.

(Qu’est-ce que…)

Même Amy, pourtant rompue à toutes les bizarreries du monde de par ses années d’existence, était complètement abasourdie. Car devant Akihito se dressait ni plus ni moins qu’un renne. Un renne avec un nez coloré d’un rouge pomme et affublé d’un petit bonnet rouge à pompon entre ses bois. Un renne adorable, certes, mais un renne quand même. Que faisait-il là ? Et d’où sortait-il, surtout !

La réponse vint d’abord avec un impact, puis sous la forme d’un petit être de flammes qui s’accrocha à son manteau. Heureusement ignifugé, l’enfant de feu sauta en une magistrale pirouette au sol, avant de se tourner vers l’enchanteur, toujours médusé.

« Coucou ! Je suis Ignim le cacaoté, fidèle compagnon du papa Nono Hell ! Et j’ai des cacadeaux pour toi ! »

Il sortit de derrière son dos un paquet qu’il offrit à Akihito, qui le saisit machinalement, dépassé par les événements. En l’ouvrant, il vit à l’intérieur une paire de gants et de bottes dans un cuir beige et rehaussés de fourrure blanche, mais aussi un billet doré ainsi qu’une curieuse fiole froide au toucher. Son contenu ressemblait à s’y méprendre à un fluide de glace, mais semblait plus transparent et moins visqueux.

« Ces cacadeaux, c’est moi qui te les offre ! T’as une cocopine tout feu tout flammes, alors il faudra savoir la manipuler sans te brûler ! Et si ça marche pas, glougloute ça ! Tu pourras éviter les sorts avec, ça va gliglisser sur ta peau ! Et le coucoupon, c’est pour appeler le traîneau de papa Nono Hell ! Il a dit que si tu voulais aller sur Nyr’Tel… Nur Tal… L’île volante, ça pourra t’aider. Il a dit qu’il avait peperdu la boussole pour y aller normalement… »

Akihito se frotta les yeux, doutant sérieusement de sa santé mentale. Peut-être que la foudre ne l’avait pas laissé indemne et qu’il hallucinait. Le coup de langue baveuse lancé par le renne sur le visage de l’enchanteur le convainquit du contraire.

« On dirait que Brume t’aime bien aussi ! Allez, Ignim le cacaoté est grand prinprince, il te fait aussi cacadeau de Brume ! Jolie renne, toute douce ! »

Un son de carillon se fit entendre, et Akihito leva les yeux : dans la nuit encore couverte, il distinguait à peine, au-dessus des maisons, un attelage volant tirés par des formes équines.

« Ah zut, Papa Nono Hell m’appelle, je dois yaller.Au revoir CheAkihito ! À l’année prochaine ! «

Le petit être de feu courut dans la rue et après un bond propulsé par une berge de flammes, il s’envola de plusieurs mètres pour s’accrocher à ce qui était, que l’enchanteur le croit ou non, le traîneau du Père No Hell. Qui disparut dans la nuit, sans plus d’explication, laissant un Akihito en état de choc.

(Amy… Dit moi que je rêve.)

(Aki, je sais pas si tout ce qui se passe autour de toi devrait m’impressionner ou me terrifier. Alors si tu me demandes si tu as bien vu un ifrit de Meno te faire cadeau d’habits, d’une fiole magique, d’un bon gratuit pour l’île des dieux et d’un renne du Père No Hell… La réponse est oui. Et non, je ne me l’explique pas.)

L’enchanteur rangea d’abord ses curieux cadeaux dans sa sacoche, avant de tourner un regard des plus circonspects vers le renne. Ou la renne, Brume étant un nom plus féminin que masculin. Il flatta l’encolure de l’animal, qui le fixa avec de grands yeux noirs.

« Qu’est ce que je vais bien pouvoir faire de toi, ma grande… ? »

À la lueur d’un arc électrique qu’il manifesta, il observa avec plus d’attention le cervidé. Une robe beige mouchetée de tâches crème jusqu’à entièrement recouvrir son pelage ventral, une queue étonnamment fournie, et une selle spacieuse qui pouvait sans problème accueillir deux personnes et un bon mètre quatre-vingt au garrot. Une silhouette élancée qui ne demandait qu’à fendre le vent… Mais Akihito en avait-il vraiment envie ? Ou le besoin ?

Manquant de l’éborgner de ses bois, Brume poussa gentiment son épaule à l’aide de son museau, demandant plus des caresses qu’elle semblait apprécier. Ce qu’il finit par faire, avant de la mener par la bride dans la rue. Après un court instant de réflexion, il décida de l’emmener : son ancien propriétaire était parti dans un traîneau magique volant, et il ne faisait pas grand cas de son espérance de vie dans une ville assiégée. Une fois arrivé au camp des kendrans, il pourrait la relâcher s'il le désirait. Quand il rejoignit les deux jeunes femmes qui discutaient d’il ne savait quoi, elles tournèrent la même expression interdite dans sa direction au même moment.

« Me demandez pas pourquoi, je suis pas sûr moi-même. Mais voilà, je vous présente... Brume. »

Une Brume qui semblait très contente de son nouvel ami, qu’elle gratifia d’une belle léchouille en travers du visage. Yliria et Anthelia se regardèrent l’une l’autre, puis lui en train d’essuyer la bave dégoulinante de son visage. Et elles éclatèrent de rire. Embarrassé, Akihito traversa une bonne partie de la ville avec les deux jeunes femmes derrière lui riant aux larmes, se payant ouvertement sa tête.

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Yliria
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Re: Les Habitations

Message par Yliria » mer. 13 janv. 2021 20:33

<< Précédemment

Le gifler eut plus d'effets que prévu et il se redressa soudainement. Trop sans doute puisqu'il se tint la tête sous mon regard inquiet. Il tenait à peine sur ses jambes lorsqu'un flot de jurons lui échappa, me tirant un sourire. Le voyant tituber, je me précipitai à son secours et passai son bras autour de mes épaules pour le soutenir jusqu'à un banc proche. Il mit un moment à réagir à nouveau, finissant par demander ce qu'il s'était passé.

- Je ne suis pas sûre... Je crois qu'un éclair t'est tombé dessus, vu le bruit et la lumière...

J'examinai son visage, mais il reflétait plus un trouble compréhensif que la douleur et cela me rassura. Il semblait hagard et toujours perdu, ce qui n'avait rien de très étonnant vu ce qu'il venait de vivre. il cligna plusieurs fois des yeux avant d'assurer qu'il allait bien. Puis son regard perplexe me dépassa et se posa derrière moi. Je haussai un sourcil lorsqu'il me demanda ce qu'était un truc qu'il voyait et je tournai la tête pour voir Ssussun qui ondulait doucement à la hauteur de mes épaules, juste derrière moi. Les Ynoriens toujours présents fixaient soit Cherock avec étonnement en chuchotant, soit l'élémentaire avec une expression surprise ou perplexe. Je ne pus retenir un sourire en me tournant à nouveau vers Cherock.

- Manifestement, c'est un poisson.

- Sans blague ?

Face à sa réaction immédiate, mon sourire s'élargit. J'étais honnêtement soulagée de le voir réagir, bien plus que je n'oserais lui admettre.

- C'est Ssussun, un élémentaire de lumière. Je lui ai demandé de s'occuper de toi après que tu sois tombé. Visiblement il a été efficace. Ssussun ?

Le poisson s'approcha et je glissai ma main sous son ventre en souriant béatement à ce contact. Cela me fascinait toujours autant de le voir onduler et observer ses écailles changer de couleurs au gré de ses mouvements. Je reportai mon attention sur Cherock, ma mains toujours en contact avec l'élémentaire tant c'était agréable.

- Tu peux te lever ?

Je l'observai se collecter et essayer. Manifestement il était capable de se lever, quoi qu’encore un peu sonné, visiblement. Malgré qu'il assura aller mieux, je fis la moue, pas totalement convaincue en le voyant relativement peu à l'aise. La petite troupe de curieux se délita lorsqu'il assura qu'il allait bien et je pus souffler de soulagement en voyant tout ce monde reprendre le cours de sa vie sans faire davantage attention à nous. Une bonne chose de faite.

- Je pense que je peux rentrer, maintenant.

Je hochai la tête et l'aidai à se relever. Ses jambes semblaient encore avoir un peu de mal à le porter, aussi je restai près de lui, juste par prudence. Ma colère à son égard s'était complètement envolée vu la situation, ce qui amusait franchement Alyah, mais je n'avais pas dit mon dernier mot et comptai bien le suivre une fois la nuit tombée.

- Et surtout... Pas un mot à Anthelia ou ma mère. Me faire passer un savon par la première et rassurer la seconde, c'est quelque chose que j'aimerai éviter.

Je tournai la tête pour le fixer, un sourcil haussé.

- Tu es sûr ? Tu as peut-être des séquelles qu'on n'a pas remarquées ? Je devrais leur dire, surtout si tu comptes partir alors que tu n'es pas en état...

- Elles seraient capable de se liguer contre moi, m'attacher à un lit pendant une semaine juste pour s'assurer que je n'ai rien. Surtout Theli, après ce qu'il s'est passé à Kendra-Kâr... Et j'ai pas vraiment une semaine devant moi.

Je ne pus m'empêcher de pouffer à cette phrase dit avec un sérieux étonnant. Soit il cachait bien le fait qu'il plaisantait, soit il était parfaitement sérieux, et les deux solutions étaient parfaitement envisageables. Et ce fut lui qui ramena le sujet de mon départ sur le tapis et, étonnamment, il assura qu'il essaierait de me faire monter à bord. Un changement d'esprit bienvenue, même si un navire affrété par l'armée oranaise était, comme il le souligna, susceptible de me laisser à quai sans le moindre remord. Je hochai la tête aussi surprise qu'heureuse par son changement d'avis à ce sujet.

- C'est déjà bien que tu acceptes. Dans le pire des cas, je me débrouillerai, mais je doute qu'ils aient envie de laisser une semi-shaakte au beau milieu de leur ville sans celui censé gérer son « tutellage ».

Cela termina de le convaincre et je terminai de l'accompagner jusqu'à chez lui. La mère de Cherock et Anthelia furent surpris de m'entendre leur annoncer que je partais également, mais aucune n'essaya de me faire changer d'avis. J'avais été très claire dans mes intentions et je n'avais de toute façon aucune envie de passer encore la moindre seconde à expliquer ou essayer de convaincre qui que ce fusse. Je m'isolai un moment, préférant être au calme, persuadée que j'étais de ne pas en avoir une fois le bateau emprunté.

(Hey, tu as choisi, tu vas pas te plaindre en plus!)

(Je ne me plains pas ! Je préfère simplement prendre le temps. Et puis Ils doivent avoir besoin de discuter entre eux, je ne veux pas m'immiscer là-dedans.)

Après un soufflement approbatif, Alyah me laissa tranquille et je pus préparer mes affaires en silence, vérifier que chaque chose était bien rangée à sa place et prête pour ce qui m'attendait. Je ne savais juste pas réellement ce qui m'attendait, et c'était la seule vraie inconnue que j'aurai voulu connaître.

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Hatsu Ôkami
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Re: Les Habitations

Message par Hatsu Ôkami » jeu. 17 juin 2021 16:46

Retrouvailles.


Les yeux fermés, Hatsu enlaçait son frère qui s’était presque jeté sur elle, ignorant sa petite pique pour loger sa tête dans le creux de son épaule. Hatsu sentit son cœur se remplir d’autant de soulagement que de joie en sentant contre elle son jumeau bien vivant et en bonne santé. Elle avait tellement craint, en voyant le siège, qu’il ne lui soit arrivé quelque chose, à lui, à ses parents, qu’elle ne pouvait qu’être reconnaissante envers Rana pour avoir veillé sur les siens. Le spectacle des deux jumeaux s’enlaçant suffit visiblement à calmer les soldats alentours qui rangèrent leurs armes. Ce ut Kinome qui interrompit leurs retrouvaille en s’approchant et poussant un hululement outré. Un léger rire échappa les lèvres de Hatsu qui offrit une caresse à l’animal qui semblait jaloux de l’attention que Hatsu portait à cet humain qu’il n’avait jamais vu. Humain qui s’écarta de la jeune femme pour l’observer elle, puis le griffon, avant de sourire.

- Cela explique ton odeur.

- Oh… la ferme.

- Tu m’as manqué aussi.

Ne s’arrêtant pas de sourire, Hatsu lui frappa doucement l’épaule avant de se tourner vers la petite Saori et de faire les présentations. L’enfant hocha la tête, un peu intimidée par l’apparence martial de Ryo qui se mit à sa hauteur et assura que sa famille prendrait soin d’elle. Hatsu avait pu voir comment les orphelins pouvaient finir et elle n’avait aucune envie de laisser Saori à la rue, et voir son frère aller dans son sens sans qu’ils se soient concertés la rassura. Il n’avait pas beaucoup changé pendant son absence.

- Je vais vous escorter à la maison. Nos parents seront ravis de te voir Hatsu, ils se faisaient un sang d’encre. Et pour…. Lui ?

Il lança un regard un peu anxieux vers le griffon qui n’avait cessé de le fixer, faisant pouffer doucement Hatsu qui caressa le cou de l’animal.

- Il va me suivre, pas d’inquiétude. Et il sera sage.

Visiblement son frère en doutait au vu du regard qu’il jeta au griffon, mais il haussa les épaules et partit discuter avec les soldats qui semblaient déjà prêts à retourner à leurs postes. Hatsu prit la main de Saori et fit comprendre à Kinome de la suivre. Elle n’eut pas à insister puisque l’animal semblait déterminé à ne pas la lâcher d’une semelle. Hatsu n’avait pas vraiment prévu de l’emmener directement en ville, ayant plutôt prévu de le laisser à l’extérieur et d’aller s’occuper de lui chaque jour. Elle craignait qu’il ne se montre agressif dans un environnement si différent du sien, mais jusque-là les choses se passaient plutôt bien, si on omettait les cris d’avertissement envers de parfaits inconnus et les claquements de becs agressifs qui forcèrent Hatsu à davantage s’occuper de Kinome que de discuter avec son frère alors qu’elle n’attendait que cela. Ils parvinrent néanmoin sans encombre devant les portes de la maison Ôkami et un sourire ourla de nouveau les lèvres de Hatsu lorsqu’elle vit qui gardait les grilles.

- Bonjour Chef Tanis

- Hat… Damoiselle Ôkami ?! Comment … ?

Il la regarda avec des yeux surpris puis se ressaisit et la salua d’une manière plus martiale et adéquat, selon le protocole. Hatsu, elle, lui répondit d’un sourire, ayant toujours apprécier le garde qu’elle connaissait depuis sa plus tendre enfance. Tanis hocha la tête, un sourire aux lèvres, visiblement rassuré de la savoir à la maison malgré la situation. Il haussa un sourcil interrogateur en voyant Saori et fixa d’un air partagé Kinome lorsque celui-ci passa les grilles en fixant chaque humain un à un, comme pour les évaluer. Hatsu veilla à ce qu’il avance avant de se retourner pour fixer avec bonheur sa maison d’enfance. Le jardin, l’allée de pierre blanche et le son de l’eau du bassin lui parvenaient et elle se rendit compte que tout cela lui avait manqué, finalement, bien plus qu’elle ne l’imaginait.

- Où sont … ?

- Père est à un conseil. Notre famille a toujours protégé l’Ynorie, alors il en sera de même pour cette fois et il tient à ce que cela se sache. Mère doit être dans ses appartements… ou dans ta chambre. Elle y passe au moins une fois par jour depuis ton départ, comme tu allais soudainement y apparaître, un jour.

- Oh… je vais aller la trouver.

- Sans vouloir t'en empêcher, il faudrait déjà s’occuper de ça…

Il désigna Kinome qui semblait décider à suivre Hatsu, peu importe l’endroit, quitte à entrer dans la maison. Cela tira un sourire amusé à la jeune femme qui bifurqua vers le jardin, qui serait sans doute plus approprié pour le griffon. Entre les arbres, l’animal se mit à observer ses alentours avec curiosité pour finalement accepter la demande de Hatsu pour s’allonger et se lécher la plaie que la flèche lui avait infligé. Hatsu l’aida en passant le reste de baume cicatrisant qu’il lui restait, mais la blessure n’étant pas grave, elle n’avait que peu de crainte sur la capacité de Kinome à en guérir rapidement.

- Faudra que tu m’expliques comment tu en es arrivé à ramener un griffon…

- Longue histoire et je n’ai pas envie de la raconter vingt-cinq fois donc tu attendras que nos parents rentrent.

- Tu pourrais faire un effort… je suis ton frère.

- Je vais d’abord aller nous laver, Saori et moi et ensuite, nous verrons.

Faisant fi de l’air faussement boudeur de son frère, elle entra dans la maison après avoir rassuré Kinome qui sembla enfin à son aise. Elle ne fit pas visiter la demeure à la fillette qu’elle n’avait pas lâché, mais lui assura qu’elles auraient tout le temps une fois propres. Saori restait muette, ne répondant que par monosyllabe et Hatsu s’en inquiéta un instant avant de voir le regard de l’enfant fixer chaque élément de décor avec fascination et curiosité. Elle avait peur que le traumatisme qu’elle n’évoquait pas la rattrape très vite, mais elle semblait plus occupée à observer ce nouveau monde qu’à penser au passé, rassurant l’archère qui se dirigea vers sa chambre. Chambre qui n’avait pas changé, si ce n’était la silhouette féminine immobile qui se tenait près de la fenêtre et qui tourna la tête vers elle lorsqu’elle entra.

- Hatsu !

Oubliant la retenue que sa mère s’évertuait, sans succès visiblement, à lui faire rentrer dans le crâne depuis son enfance, Hatsu se jeta dans ses bras qui se refermèrent en une étreinte douce et ferme. Elle se réappropria ses souvenirs en sentant le jasmin qui ne quittait jamais la toilette de sa mère. Cette dernière ne put cependant pas en dire autant.

- Par Rana, tu es saine et sauve, comment es-tu revenu ? tu es blessée ? Tu… tu…tu sens le bouc ma parole !

La jeune femme ne put retenir un rire face au ton indigné et quelque peu surpris de sa mère. Elle s’écarta sans cesser de sourire et présenta Saori qui était restée en retrait, intimidée par la matriarche Ôkami. Cette dernière se mit à la hauteur de l’enfant, l’observa quelques instants avant de lui caresser doucement la joue.

- Tu es en sécurité ici. Tu as aussi besoin d’un bain. Allez toutes les deux dans la salle d’eau, tout de suite, pas question que vous encrassiez cette demeure une minute de plus. Et Hatsu… Bon retour à la maison.

- Merci maman. Ça fait du bien d’être rentrée.
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Re: Les Habitations

Message par Hatsu Ôkami » ven. 18 juin 2021 15:14

En s’immergeant dans l’eau parfumée, Hatsu ne retint pas un soupir de bien-être. Cela faisait si longtemps qu’elle n’avait pas pris de bain qu’elle en avait oublié la sensation. Elle ferma un instant les yeux avant de les rouvrir en entendant la petite Saori entrer à son tour dans l’eau. Elle semblait hésitante, mais l’archère l’invita à se laisser aller et la regarda avec un air attendri alors qu’elle soupirait elle aussi. Elles barbotèrent quelques instants avant que Hatsu ne commence à lui laver les cheveux, décrassant sa tignasse au fur et à mesure. Lorsqu’elles sortirent pour se rincer et s’habiller, elles étaient bien plus propres. Enfilant un peignoir, Hatsu conduisit Saori jusqu’à sa chambre où attendaient des habits qui lui avait appartenu, lorsqu’elle était plus jeune. Visiblement sa mère gardait tout. Une fois habillées et coiffées, Hatsu commença à faire une petite visite de sa maison, montrant à Saori où s situaient les pièces principales pour qu’elle se repèrent facilement. Elle voulait garder l’esprit de l’enfant occupé le plus possible, bien consciente que cela n’était qu’un remède temporaire.

- Tu as faim ?

Le son du ventre de Saori servit de répons autant que son visage mortifié qui tira un léger rire à l’archère. Hatsu conduisit la plus jeune dans leur cuisine et entrepris de confectionner un repas pour elles deux. Sans surprise, la nourriture n’était pas présente en grande quantité. Avec le siège, elle supposait que les denrées étaient distribuées judicieusement. Elle trouva tout de même de quoi largement faire une collation pour elles deux et s’attela à la tâche avec entrain, compensant quelque peu son manque d‘expérience dans le domaine. Si elle connaissait fort bien la théorie, la mettre en pratique était toute autre. Au vu de l’enthousiasme de Saori lorsqu’elle engloutit son repas, elle ne s’en était au final pas sorti trop mal. La mère de Hatsu les rejoignit leur après et renseigna Hatsu sur les derniers évènements en ville, tant que ceux de l’extérieur dont elle avait connaissance. Elle mit prudemment la guerre de côté et Hatsu l’en remercia intérieurement, elle n’avait pas envie que Saori y soit confronté à nouveau, surtout aussi vite. Finalement le dernier membre manquant de la famille finit par revenir, portant un air fatigué sur le visage, entrant sans s’annoncer dans le salon où les trois discutaient déjà. Il mit quelques instants avant de se rendre compte de qui se trouvait dans la pièce.

- Ces réunions auront raison de ma santé avant la fin du siège. Ils essaient tous de faire valoir leur point de vue sans prendre en compte la population ou la situation qui… Hatsu ?

- Bonjour Père, suis-je restée absente si longtemps que vous avez du mal à reconnaître ma présence ?

Le patriarche ignora la pique amusée de sa fille et vint la serrer dans ses bras. La jeune femme lui rendit son étreinte et toutes ses angoisses disparurent momentanément. Elle pouvait enfin serrer chaque membre de sa famille dans ses bras et ne plus s’inquiéter pour leur sécurité immédiate. Ils finirent néanmoins par s’écarter l’un de l’autre et Hatsu put finalement entamer le récit de ses voyages. Elle arrangea la vérité, évitant de parler des moments les plus terribles ou de Kraska qu’elle décrivit comme un homme fier et droit, ce qu’il était, bien qu’étant garzok et non pas humain. Saori, qui ne savait rien de tout cela, écouta, elle aussi fascinée par les voyages dans les montagnes, posant des questions sur les animaux qu’elle n’avait jamais pu croiser. Et alors que Hatsu allait parler de Kinome, elle entendit son cri depuis l’extérieur et se redressa, inquiète.

- Hatsu ? Qu’était-ce ?

- Kinome... c’est… Je vais vous montrer.

Prenant la tête du petit cortège, elle se hâta de sortir pour trouver le griffon en pleine intimidation fac au destrier sombre et fougueux de son père. Visiblement resté un peu farouche, le canasson ne semblait pas décidé à montrer sa faiblesse face au griffon qui claquait du bec et terrorisait visiblement le jeune home qui devait s’occuper du cheval. Hatsu soupira et désigna Kinome à ses parents dont les yeux semblaient vouloir quitter leurs têtes.

- Voici Kinome. Il se laisse approcher quand je suis là, mais je préfère rester prudente et vous conseille simplement de ne pas être près de lui si je ne suis pas avec vous. Il m’obéit…relativement bien, mais je préfère ne prendre aucun risque.

Si sa mère resta en retrait, son père, lui, avança sans lâcher l’animal des yeux. Se portant au contact de son cheval, il l’apaisa en lui murmurant quelques mots. Hatsu faisait exactement la même chose avec Kinome, ayant vu de nombreuses fois son père discuter avec ses chevaux, même si elle savait bien qu’ils ne comprenaient pas les paroles, seulement l’intention derrière le ton qu’il employait.

- C’est incroyable, Hatsu ! Et tu parviens à tenir sur son dos ?

- Généralement, oui, mais ce n’est pas toujours évident et je doute de trouver un artisan ayant une selle tout faite pour lui. Je veux éviter de le restreindre de toute façon.

- Hmm… Je pourrais y réfléchir, si cela t‘intéresse et avec son accord, pour confectionner une selle adaptée.

Surprise, mais ravie de la proposition de son paternel, Hatsu accepta aussitôt avant de calmer Kinome qui se rallongea après avoir vu le destrier s’en aller. Il semblait fier de sa victoire et arborait un air de noble fier qui tira un ricanement à Hatsu. Parfois elle trouvait qu’il avait des réactions vraiment étonnantes. Après s’être assurée que Kinome ne manquait de rien et en espérant que l’envie d’aller vadrouiller seul ne soit pas trop forte, elle retourna à l’intérieur avec sa famille et la soirée passa ainsi, à raconter ce qu’elle avait vécu ou manqué durant ses mois de vadrouille. La situation actuelle était complexe et inquiétante, et Hatsu avait bien compris que le sort d’Oranan allait se jouer sous peu. Alors lorsque son père lui apprit que des aventuriers avaient été appelé et même mandaté par le conseil d’Ynorie, une idée germa dans l’esprit de la jeune femme. Une idée qui n’allait probablement pas plaire à ses parents, mais elle n’allait certainement pas faillir à son devoir.
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Re: Les Habitations

Message par Hatsu Ôkami » lun. 21 juin 2021 11:45

Onoda sembla intéressé par la demande de l’archère et se pencha sur le dessin. Son homologue, Himatori, en fit de même lorsque le forgeron lui montra le croquis. Onoda décida de s’en charger lui-même, refusant de laisser un apprenti s’en occuper, ce qui fit sourire Hatsu avant qu’Onoda ne s’éclipse pour commencer son travail dans l’heure. Après avoir assuré que l’armure serait prête dans quelques jours, Himatori prit la somme que Hatsu lui tendit et la jeune femme, après l’avoir remercié, sortit de la boutique pour s’atteler à la seconde tâche de sa journée. Elle retourna chez elle d’un pas vif, croisant surtout des hommes d’armes sur sa route.

Une fois rentrée, elle prit de quoi dessiner, un mètre ruban qu’elle espérait suffisamment grand et alla voir Kinome qui semblait apprécier le cadre du jardin dans lequel il se prélassait. Il accueillit la jeune femme d’un simple clignement d’œil, recevant grattouilles et caresses en échange. Ne sachant pas trop par quoi commencer, la jeune archère décida de mesurer ce qu’elle imaginait être les choses importantes. Sous le regard curieux du griffon, elle lui mesura la largeur du dos, la hauteur de ses flancs et fit le tout de son torse, notant le tout sur son parchemin en ébauchant un dessin de Kinome. Curieuse, elle alla même jusqu’à mesurer la taille de ses ailes lorsque le griffon cessa de la regarder d’un air indigné alors qu’elle essayait de lui faire ouvrir les ailes.

- Cesse de faire le précieux, ça va prendre plus de temps sinon.

Bon gré mal gré, la jeune femme parvint à obtenir les informations qu’elle voulait, et davantage, et remercia le griffon de quelques morceaux de viande qu’elle avait réussi à obtenir de sa mère. Elle n’avait guère envie que Kinome ait faim et se mette en tête de voler au-dessus de la ville, voire pire, au-dessus du camp d’Omyre. Ils avaient déjà eu de la chance d’avoir été suffisamment rapides et inattendus pour passer la première fois, elle n’avait guère envie qu’il aille seul se jeter sous les flèches des arches, peu importe leur camp dans cette guerre. Elle n’allait cependant rien faire pour le restreindre au sol, persuadée qu’il serait aussitôt prêt à attaquer quiconque si elle lui faisait l’outrage de le priver de sa liberté. Ce n’était pas parce qu’il l’accompagnait et ne semblait pas vouloir la quitter qu’elle pouvait se croire tout permis. Une voix lui fit tourner la tête.

- Te voilà bien occupée, Hatsu.

- Père !

L’ynorien sourit à sa fille et observa le griffon qui avait tourné la tête dans sa direction avant de détourner la tête pour faire quelque chose de plus intéressant, comme se pencher la tête pour se faire davantage caresser par l’archère.

- Il est magnifique. Tu t’es trouvé un allié incroyable. Me montrerais-tu ce que tu fais ?

- Oui, bien sûr. Voici. J’essaie de prendre des mesures pour la selle, je ne sais pas trop comment en fabriquer une, mais je ne peux pas continuer à glisser sur son dos.

- Oui, je comprends. Je t’ai dit que j’allais t’aider et je vais le faire. J’imagine qu’il faudra le baser sur une selle de cheval, l’élargir un peu et faire en sorte que tu restes accrochée dessus sans que tout cela ne gêne ta vaillante monture.


- C’est possible ?

- Je pense. Je vais demander à Tokare, son père était sellier, il aura peut-être des idées.

Avec l’aide du garde, son père ébaucha une esquisse de ce qui pouvait devenir une selle sous le regard intriguée de Hatsu. Aucun d’eux n’étant un artisan compétent, ils tâtonnèrent un moment avant qu’un résultat qu’ils juchèrent adéquat ne finisse par émerger de leurs réflexions. Tokare, un homme d’une quarantaine d’années au visage buriné, au maintien droit et au visage carré, semblait apprécier l’exercice qui le changeait agréablement de son rôle de garde. Le père de Hatsu semblait penser que le croquis était valable, mais la jeune femme ne voyait pas comment réaliser quelque chose de ce genre alors que la ville était en plein siège. Elle doutait que les ressources disponibles puissent être allouées ainsi, mais son père lui assura que ce n’était pas un problème. D’où tenait-il cette assurance, elle n’en avait aucune idée.

En milieu de journée, elle s’occupa de Saori qui avait dormi jusque-là. La petite fille avait toujours cet éclat de tristesse dans les yeux, mais la mère de Hatsu affirma que cela lui passerait si on lui laissait le temps. La matriarche semblait prendre à cœur l’idée de s’occuper de l’enfant et vint à en discuter avec sa fille lorsque la petite se fut endormi à nouveau dans le milieu de l’après-midi.

- Cette pauvre enfant mérite qu’on s’occupe d’elle… Cette guerre va jeter des milliers d’orphelins à la rue, mais nous ne pouvons malheureusement pas tous les accueillir.

- Je sais, mère... J’aurai aimé qu’elle trouve un foyer après ce qui lui est arrivé…

- Ce n’est pas impossible à réaliser. Même si nous ne sommes pas la famille la plus riche d’Ynorie, j’imagine que faire une levée de fond pour la création et la gestion d’un orphelinat adéquat serait toujours possible, nous avons toujours d’excellent contact au Conseil et parmi les familles nobles.

- Vous n’avez pas pensé à cela uniquement à cause de la présence de Saori n’est-ce pas ?

- Non, bien sûr que non. La guerre m’a beaucoup fait réfléchir Hatsu et nous devrons nous reconstruire après la victoire.

- Vous semblez certaine que cela en sera une.

- Imaginer la défaite ne fera que la provoquer, tu ne crois pas ? Et si tu défends notre pays, nous n’avons rien à craindre.

- Vous me surestimez, mère.

- Je suis simplement fière de mes enfants, Hatsu. Ce n’est point de l’orgueil mal placé.

Emue par la confiance que sa mère lui offrait, Hatsu hocha la tête et un silence confortable s’installa entre les deux femmes tandis que la petite Saori, allongée sur le divan, la tête sur les genoux de Hatsu, remuait doucement dans son sommeil. Cela tira un sourire tendre à la matriarche.

- Elle me rappelle toi à son âge quand elle dort. Tu bougeais toujours et tu marmonnais des fois. Parfois même tu frappais ton frère dans ton sommeil.

- Il devait l’avoir mérité.

La matriarche ne retint pas un léger rire.

- Je n’en doute pas. Nous prendrons soin d’elle, Hatsu, sois en sûre. Fais ce que tu as à faire, mais promets-moi une chose.

- Tout ce que vous voudrez, mère.

- Reviens nous vivante. J’ai déjà cru t’avoir perdu une fois, je ne veux pas que cela se produise réellement.

La jeune femme hocha la tête, la gorge trop serrée pour parler. Elle ne savait pas si elle pourrait tenir cette promesse face à la tempête qui s’annonçait. Rana lui en soit témoin, elle ferait tout ce qu’elle pourrait pour protéger son peuple et sa famille.
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Re: Les Habitations

Message par Hatsu Ôkami » lun. 21 juin 2021 17:58

Contre toute attente, le père de Hatsu parvint à se procurer les matières nécessaires et même demander l’aide d’un artisan pour l’aider dans la confection de la selle de Kinome. Au vu du caractère quelque peu unique de la selle, cela se fit par tâtonnement et Hatsu donna ses idées. Elle voulait éviter de faire un arçon en bois ou en métal, qu’elle jugeait trop lourd et inconfortable pour Kinome. Le but était qu’elle tienne sur son dos, pas que cela gêne ses mouvements. L’armature fut donc allégée et la majeure partie de la selle fut faite en tissus recouvert d’un cuir imperméabilisé. Quatre sangles partaient des côtés pour s’attacher sous le ventre du griffon alors que deux autres passaient par-dessus les épaules de ses pattes et se joignait sur son poitrail pour ensuite rejoindre les sangles sous le ventre. Le tout était supposé être relativement stable sans gêner le griffon. Pour que Hatsu tienne sur son dos, plutôt que des étriers qui n’allaient pas changer grand-chose, trois paires de sangles étaient installées sur la selle, retenant respectivement le haut de ses cuisses, le haut des tibias et les chevilles. Elles étaient suffisamment simples à accrocher et décrocher pour qu’elle puisse théoriquement le faire en plein vol et devaient lui permettre de rester en place quoi que fussent les acrobaties du griffon. Restait cependant un problème de taille.

- Bon, je vais voir s’il accepte de la mettre sur son dos.

Hatsu s’approcha avec la toute nouvelle selle. Contrairement à une selle de cheval, elle pesait vraiment peu, étonnamment, mais ce n’était qu’un prototype et nul doute qu’elle y apporterait quelques modifications après un certain temps à l’utiliser. Kinome, la voyant approcher avec cette curieuse chose dans les mains, darda son regard curieux vers elle et la suivit du regard tandis qu’elle approchait son flanc. La jeune femme put sans difficulté poser la selle sur son dos et fut satisfaite de voir qu’elle était parfaitement de la bonne taille. Visiblement l’artisan savait ce qu’il faisait. Le plus difficile fut d’attacher les sangles autour de Kinome, l’animal protestant violemment dès qu’elle tenta d’accrocher le premier jeu sous son ventre. Il s’écarta et lui jeta un regard mauvais après s’être débarrassé de la selle. Hatsu soupira. Elle s’y attendait, quelque part, mais elle voyait mal comment lui faire comprendre que c’était un mal nécessaire pour eux deux. Elle ne pouvait décemment pas continuer à lui arracher les plumes dès qu’il faisait un virage un peu serré.

À force de patience et de nombreux bleus à force de tomber en étant repoussée par le griffon, Hatsu parvint enfin à installer correctement la selle. Elle vit Kinome remuer, comme s’il essayait de jauger si la chose sur son dos était un problème, puis la fixa d’un œil perçant. Elle lui caressa doucement la tête, murmurant des paroles d’apaisement. Lorsqu’elle put finalement grimper sur son dos, Hatsu put enfin jauger la selle. Elle devait adopter une position un peu différente que celle d’avant, les genoux pliés pour que les sangles la retiennent correctement. Elle trouva la position moins agréable que de simplement avoir les jambes pendues contre les flancs de Kinome, mais elle était persuadée qu’elle trouverait une solution au léger inconfort avec la pratique. Elle ne doutait pas, en revanche, du fait qu’elle pouvait tenir sans problème sur le dos du griffon. Elle tourna le buste, essaya divers mouvements que la selle ne gênait pas. Elle n’osa pas décoller au beau milieu de la ville, mais le simple fait de se tenir sur Kinome la rassura quant à l’efficacité de la selle. Restait maintenant à l’essayer en situation réelle. Elle n’avait pas vraiment hâte, mais cela allait finir par arriver et elle devait s’y préparer.

Le lendemain, elle eut la surprise de voir Onoda se présenter devant la demeure familiale, un sourire aux lèvres malgré son air fatigué, un large paquet dans les mains. Elle l’invita à entrer et le fit s’installer dans le salon où elle apporta au forgeron de quoi boire. Elle trépignait d’impatience, mais garda un masque calme et le plus neutre possible alors que le forgeron soupirait en buvant son thé. Il lui jeta finalement un coup d’œil et un sourire goguenard ourla ses lèvres.

- Je vous croyais plus impatiente…

- Je me retiens, figurez-vous, j’ai des manières.

- Je n’en doute pas. Tenez, n’allez pas exploser cette veine sur votre front.

Lui donnant finalement le paquet, elle put admirer l’œuvre du forgeron et, s’excusant un instant, alla l’enfiler. Sans être trop lourde, l’armure semblait être parfaite pour son rôle et la jeune femme revint dans le salon pour remercier l’auteur. Celui-ci se leva et la fit tourner pour vérifier quelques ajustements, déclarant finalement que tout était en ordre.

- C’est très réussi, Onoda.

- Evidemment, je ne suis pas un amateur. Travailler l’olath est toujours un défi que je suis ravi de relever. Vous allez donc vous battre ?

- Oui. Je suis restée longtemps loin d’Oranan et, même si je n’aurai rien pu changer, j’aurai quand même pu aider, et je veux donc le faire maintenant.

- Très noble de votre part. Vous n’avez pas besoin de flèches ou de quoi que ce soit d’autre ?

- Rien que je n’ai déjà, mais je vous remercie.

- De quoi protéger vos bras et jambes serait pourtant utile.

- Peut-être, mais j’aime ma liberté de mouvement et mes finances ne sont pas au beau fixe. Cependant, si l’occasion se présente, je ferai de nouveau appel à vous.

Le forgeron répondit par un léger hochement de tête.

- J’en serai honoré. Que comptez-vous faire ?

- À vrai dire je n’en sais encore rien. N’étant pas une militaire ou une milicienne, je ne sais où mon aide pourrait être utile.

- Je vois… Si je puis me permettre, allez au Conseil. Ils ont engagé des mercenaires et aventuriers pour répondre à l’appelle de Kendra-Kâr et je doute qu’ils refusent l’aide de qui que ce soit désormais, même de ceux n’étant pas des militaires.

La jeune femme hocha la tête. L’idée n’était pas absurde et elle voulait que son aide soit officielle, pour éviter de gêner un quelconque déploiement militaire. Elle ne savait pas exactement ce qu’elle pouvait faire, mais un archer était toujours utile pour défendre une cité assiégée, elle en était certaine. Onoda et elle discutèrent seulement un court instant, le forgeron étant visiblement très occupé, ce que Hatsu comprenait parfaitement. Cela lui laissa une question sans réponse.

- Si vous êtes si occupé, pourquoi être venu vous-même apporter ma commande, vous auriez pu la donner à un coursier ou même attendre que je vienne la chercher.

- Allons Ôkami, ne soyez pas ridicule, comme si j’allais laisser un autre que moi transporter mon travail. Et puis, il me semble que venir en personne soit tout à fait naturel, non ?

- Je… Merci Onoda, vous êtes un ami sur qui on peut compter.

- Vos mots me vont droit au cœur. Tâchez de revenir vivante, voulez-vous ?

Une fois encore, elle hocha la tête avant de laisser le forgeron partir et retourner à son travail. Plus elle entendait ses mots et plus la nervosité la gagnait tandis que l’idée de livrer ce qui serait peut-être la dernière bataille d’Oranan se faisait de plus en plus de place dans son esprit. Elle ferma les yeux et inspira. Rana la guiderait vers la victoire, ou l’accompagnerait dans son dernier souffle, mais, quelque soit le résultat, elle comptait bien donner le meilleur d’elle-même.
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Re: Les Habitations

Message par Hatsu Ôkami » ven. 2 juil. 2021 23:20

Symbole d'encre


En sortant du Conseil, les pensées de Hatsu tournaient à plein régime. Ce qui allait suivre allait probablement mettre un terme à cette guerre, d’une manière ou d’une autre, et les pensées de la jeune femme étaient quelque peu obnubilées par l’idée de ne pas voir un autre lever de soleil après la bataille qui s’annonçait plus que sanglante. Elle inspira et s’apprêta à rentrer chez elle avant que son regard ne passe sur le fulguromancien qu’elle avait croisé bien avant toute cette histoire, à une période qui lui paraissait, ironiquement, bien plus douce. Hésitant une fraction de seconde, elle changea ses plans et se dirigea vers le jeune homme.

- Sieur O’Fall ? Auriez-vous un instant à m’accorder ? Ce ne sera pas long.

Assurant qu’en tant que futurs frères et sœurs d’armes ils pouvaient oublier les noms honorifiques, Cherock s’approcha de l’écurie qui retenait habituellement les écuries des officiels qui venaient au conseil. S’attendant à un cheval, Hatsu fixa d’un air surpris le renne au nez rouge qui tenta de lécher son apparent propriétaire tandis que ce dernier le prenait par la bride. Elle fixa l’étrange duo avec scepticisme et, puisqu’il n’avait pas répondu à sa question sans pour autant lui refuser la parole, elle enchaîna.

- Sieur… Cherock, je viens tout juste de rentrer à Oranan, il y a à peine quelques jours à dire vrai, et je me demandais si vous aviez des nouvelles de notre ami commun… Kage.

Volh n’avait pas donné signe de vie depuis une éternité et la jeune femme espérait obtenir quelques informations, même sommaires, sur ce qu’il faisait ou sur l’endroit où il pouvait se trouver. Elle n’avait pas besoin d’espoir, mais elle ne voyait pas qui d’autre pouvait la renseigner. Ce peu d’espoir s’envola face à la réponse négative du jeune homme. Hatsu hocha la tête, uniquement pour bondir d’un pas en arrière lorsque le renne de Cherock tenta de lui lécher le visage, retenu de justesse par son propriétaire. Il la nomma Brume, puisque visiblement c’était une femelle. Hatsu leva une main apaisante face à ses excuses.

- Il n’y a pas de mal. Vous permettez ?

Approchant une main, elle grattouilla le cou de l’animal qui sembla apprécier. Hatsu ne comprenait pas vraiment comment un renne portant un pompon pouvait bien être devenue la monture de quelqu’un, mais après tout, elle avait bien un griffon comme compagnon, alors un renne ce n’était pas si étrange.

- Je me demande où vous avez pu trouver pareille monture.

- Honnêtement Hatsu, vous ne me croiriez pas si je vous le disais.

- Si étrange que cela ? Moi qui pensais qu’un griffon était le summum de l’inattendu, je me suis trompée, visiblement.

Elle termina de gratter le cou du renne et réajusta son arc avant d’incliner légèrement la tête.

- Ma famille vous est toujours redevable, si d’ordinaire vous aviez besoin de quelque chose, n’hésitez pas à me le faire savoir. Et Ryö serait probablement ravi de vous revoir, s’il vous prenait l’envie de lui rendre visite.

Elle ne savait pas si c’était l’allusion au tatouage que son frère avait fait faire, le fait qu’il essaie de lui sortir une histoire à propos d’un feu-follet du Père-No-Hell ou son air ahuri lorsqu’il demanda ce qu’elle entendait par griffon, mais Hatsu lâcha un gloussement face à la réponse de Cherock. Elle se râcla rapidement la gorge pour oublier ce son qu’elle jugeait elle-même assez stupide et reprit.

- Les tatouages, oui, je me souviens. Grand moment d’intense réflexion de la part de mon frère. Vous pouvez lui proposez votre idée, cela devrait l'intéresser. Et si c’est un renne du Père No Hell… Effectivement j’ai du mal à vous croire. Quant au griffon…

Elle ne put s’empêcher de sourire.

- Longue histoire, évitez juste de pénétrer dans le jardin sans ma présence, surtout accompagné de ce qui se rapproche d’un déjeuner appétissant. Dit-elle en désignant le renne d’un mouvement du menton. Il est affreusement gourmand et a un sale caractère.

Cela eut le mérite faire sourire son interlocuteur qui pensait visiblement qu’un griffon était plus étonnant qu’un renne au nez rouge et à pompon. La jeune femme haussa les épaules, amusée. Cherock laissa finalement sa monture au soin du palefrenier, avouant lui-même que les endroits où garder une monture étaient devenus rares. Hatsu ne put qu’acquiescer, sa famille ayant largement la place pour Kinome. Lorsque Cherock proposa d’aller directement chez elle pour voir si Ryo, elle alla accepter immédiatement, mais la fin de sa phrase la fit légèrement hésiter. Personne qui l’attendait en ville ? Elle ne savait pas trop comment prendre cette information et choisit plutôt de la laisser de côté pour le moment. Nombre d’habitants avaient quitté la ville, elle espérait que ses proches faisaient partie de ceux-là.

- Et bien… je n’y vois pas d’inconvénients. Mon frère sera heureux de vous revoir et je doute que mes parents soient contre l’idée d’accueillir le Porteur de la Kizoku-Rana dans leur demeure ou à leur table.

Visiblement pris au dépourvu par la proposition, elle crut qu’il allait refuser, puis accepta finalement. Elle prit la tête de leur duo et ils parcoururent les rues d’Oranan, désespérément vide de l’activité qu’elle appréciait tant. Cela la rendait triste et elle attendait avec impatience le retour de la foule, des bruits et des odeurs si familières et qui rythmaient la vie de la cité qu’elle chérissait. Et tandis qu’ils tournaient à l’angle d’une rue, elle jeta un regard surpris vers le fulguromancien qui venait de lui proposer de la tatouer. Elle s’arrêta un instant puis secoua la tête avant de reprendre son chemin.

- J’en pense que si Ryo sera ravi d’en avoir un, cela ne m’emballe pas plus que ça pour le moment. Je ne remets pas en cause votre talent, mais je ne suis pas spécialement attirée par l’idée de porter un dessin à vie incrusté sur ma peau.

Son manque d’entrain ne sembla pas déranger le jeune homme qui affirma comprendre ses réticences. Elle dressa légèrement l’oreille lorsqu’il avoua que ses tatouages étaient mêlés à sa magie, mais se contenta e hocher la tête, incertaine. Si elle n’avait pas été bénie par les dieux en naissant avec cette magie qu’elle trouvait parfois fascinante, l’idée de porter un tatouage empli d’un pouvoir magique lui semblait déjà plus intéressante. Elle garda pourtant ses réflexions pour elle tandis que les murs de la demeure Ôkami se dressaient enfin devant eux. Elle salua les deux gardes et invita Cherock à entrer avant d’apercevoir son frère, revenant visiblement d’une séance d’entraînement puisqu’il portait son sabre à la ceinture. Lorsqu’elle le héla, il tourna la tête dans leur direction et leur fit signe avant d’approcher.

- Cherock, quel plaisir de vous revoir ! J’espère que ma chère sœur n’a pas été trop désagré..Aïe !

Soufflant d’un air satisfait sur la main qui venait de donner un taquet à l’arrière de la tête de son frère, Hatsu jeta un regard moqueur à ce dernier avant de reprendre son sérieux.

- Ryo, Cherock aurait une proposition à te faire, alors écoute au lieu de dires des âneries.

La proposition de Cherock intrigua visiblement Ryo qui écouta le fulguromancien tatoueur chevaucheur de renne avec intérêt. Lorsqu’il expliqua concrètement qu’un non mage pouvait, grâce à son tatouage, lancer un sort, Hatsu ouvrit des yeux ronds. Les possibilités d’une telle chose ne lui étaient jamais venues à l’esprit et elle se mit à réfléchir à l’intérêt d’un tel procédé. Autant d’un point de vue martial, qui était probablement le but d’origine, mais aussi d’un point de vue plus… financier. Une telle chose devait coûter une fortune, aussi plissa-t-elle les yeux tandis que Cherock finissait son explication. Et alors que Ryo allait ouvrir la bouche, visiblement enthousiaste, Hatsu le prit de court.

- C’est un procédé assez unique en son genre et… probablement coûteux, non ?

- Coûteux ? Non, absolument pas. La seule chose dont j'ai besoin, c'est d'une fiole de fluide qui va me servir d'encre pour contenir le sort.

Elle n’avait pas vu venir cette réponse et se contenta de hocher la tête. Le fulguromancien ne semblait pas s’inquiéter d’un potentiel dédommagement de sa part pour pratiquer son art. Elle perçut son frère hausser un sourcil, visiblement tout aussi étonné, mais aucun des deux n’ajouta rien à ce sujet. Ryo semblait fort enthousiaste et Hatsu conduisit Cherock à l’intérieur où elle le laissa avec Ryo.

- Ryo, j’imagine que ta chambre sera un endroit idéal, vous serez au calme. Si vous me cherchez je serais dans le jardin. J’ai un griffon dont je dois m’occuper. Si vous avez besoin de quelque chose, vous savez où demander.
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Re: Les Habitations

Message par Hatsu Ôkami » ven. 2 juil. 2021 23:35

Après avoir laissé son frère aux soins de Cherock, Hatsu se rendit dans le jardin où Kinome semblait avoir décidé de se mettre à l’aise. Il releva la tête à son arrivée et la gratifia d’un hululement affectueux qu’elle avait appris à reconnaître. Le sourire aux lèvres malgré la pression qu’exerçait l’idée que Volh ait disparu, elle cajola un instant le griffon qui se laissa faire avec plaisir avant de lui donner à manger. Goinfre qu’il était, elle ne se faisait pas trop d’illusion sur le sort de ce qui était supposé durer une semaine de nourriture, mais elle ne voulait pas qu’il soit affamé au point de s’envoler chercher lui-même sa pitance. Ce qui semblait parfaitement convenir à l’intéressé qui se prélassait au soleil pendant la majeure partie de son temps. Elle le vit soudainement redresser la tête, se relever et étendre les ailes avant de pousser un cri d’intimidation en fixant quelque chose derrière elle. La voix de Cherock la fit se retourner et elle calma Kinome en lui caressant le cou tandis que le fulguromancien semblait amusé du caractère du griffon. Elle sourit en levant le nez vers Kinome qui semblait ne pas vouloir cesser de fixer le jeune homme.

- Il doit sentir que vous êtes dangereux. Tout doux, Kinome.

Le griffon cessa de fixer Cherock pour se concentre sur Hatsu qui lui donna un nouveau morceau de viande en lui tapotant le cou avec douceur.

- Voilà, c’est bien mon grand. Il n’y a pas de danger.

Elle tourna ensuite la tête vers le fulguromancien, gardant tout de même sa main contre le cou de Kinome qui ne semblait pas vraiment être redevenu calme.

- Comment s’est passé la séance tatouage avec Ryo ? Rien d’extravagant ?

Son frère avait visiblement choisi de rester sobre concernant le tatouage, soulageant quelque peu Hatsu qui ne savait jamais ce qui pouvait parfois lui passer par la tête. Elle grogna en entendant Cherock lui parler des questions matrimoniales que se posaient Ryo.

- Il se mêle surtout de ce qui ne le concerne guère. J’espère qu’il n’a pas insinué de choses ridicules à votre sujet. Sans vouloir vous offenser.

Elle jeta un œil à Kinome suite aux paroles de Cherock qui s'interrogeait sur leur rencontre, puis secoua la tête, un fin sourire aux lèvres.

- Dressé ce n’est pas vraiment le mot qui convient. C’est plus une histoire de confiance mutuelle. S’il décidait de partir, je n’aurai pas le pouvoir de le retenir et je ne le ferai pas. Il est libre.

En disant cela, elle lui caressa affectueusement le front, le griffon pressant sa tête contre elle pour recevoir d’autres caresses, la faisant sourire plus largement.

- Si vous ne faites pas de mouvements brusques, vous pouvez vous approcher. Je ne l’ai pas vraiment habitué au contact avec les humains, moi exceptée. Ce serait peut-être le moment. Enfin, si vous le souhaitez.

Cherock sembla vouloir tenter la chose, mais il restait réellement sur ses gardes et Kinome ne semblait pas apprécier cela le moins du monde. Il claqua du bec plusieurs fois et déploya ses ailes pour paraître plus imposant. Hatsu dut s’interposer entre lui et Cherock et attirer son attention en sifflant un bref coup et en lui posant une main apaisante sur le bec.

- Tout doux mon grand. C’est un ami, il n’y a rien à craindre... Cherock, essayez d’être moins tendu ou sur vos gardes. Il sent votre méfiance et ça attise la sienne.

Ayant visiblement compris le problème, Cherock obtempéra. Il fixait Kinome, une paume tendue vers l’avant en approchant lentement du griffon qui le fixait de la même façon. Quelques petits bruits de gorge remplacèrent les claquements de bec tandis que les ailes se baissaient doucement. Hatsu continuait de caresser Kinome tout en laissant la place à Cherock jusqu’à ce qu’il atteigne le griffon. Celui-ci dressait la tête bien haut, comme pour se sentir au-dessus de l’humain qui lui faisait face. Hatsu pouvait cependant percevoir sa curiosité. Il pencha finalement la tête vers l’avant, la mettant à hauteur du visage du fulguromancien. Un large sourire s’étala sur les lèvres de la griffonière.

- C’est bien Kinome. Vous pouvez le toucher, Cherock. Il adore les caresses malgré son sale caractère.

- C'est... Etonnamment doux, murmura-Cherock en posant sa main sur la tête de Kinome. Je n'ose pas imaginer à quel point ça a dû être un enfer pour l'apprivoiser et gagner sa confiance.

La jeune femme passa sa main dans les plumes de son compagnon qui émit un léger hululement. Elle finit par hocher la tête.

- Il m’a sauvé la vie. J’ai sauvé la sienne en retour. Je me suis attachée à lui et il a dû faire de même. Ça n’a pas été simple, je devais sans doute à l’origine être un repas, mais je suis visiblement trop coriace pour l’estomac d’un griffon. Même si c’est celui de ce goinfre.

Elle tapota affectueusement le flanc de Kinome qui ne semblait pas vouloir bouger tant que Cherock lui touchait la tête. Il fixait toujours le fulguromancien, mais ses pupilles étaient dilatés et il semblait calme. Hatsu eut un sourire.

- Il doit vous juger digne de confiance. Dites-moi donc, qu’est-ce que mon frère a donc choisi comme… magie ? J’imagine quelque chose de discret, le connaissant.

Il lui donna raison. Un sort pour le protéger des armes de traits, javelots, flèches. Elle ne put s’empêcher de ricaner lorsqu’il évoqua le fait qu’il avait probablement aussi voulu se protéger d’elle si jamais il lui prenait l’envie de s’entraîner à lui tirer dessus. Ce qu’elle ne ferait jamais, mais elle trouvait l’attention amusante.

- Malin le frangin… j’admets que cela pourrait être utile, mais je n’ai pas la moindre idée de ce qu’un fulguromancien peut faire. En dehors de lancer des éclairs particulièrement douloureux…

Les explications d’un des fameux fulguromanciens sur les possibilités de la magie furent assez brèves, mais Hatsu n’était pas certaine d’avoir saisi l’entièreté de ce qu’il avait à offrir. Effrayer ses ennemis ou les immobiliser lui semblait un moyen plutôt intéressant de faire appel à une puissance magique. Elle n’avait nullement l’intention d’être suffisamment proche pour devoir utiliser une lame de foudre ou lancer des éclairs. Ses flèches faisaient parfaitement l’affaire et étaient illimitées, elle ne voyait pas l’intérêt d’ajouter la foudre à son arsenal. Peut-être une erreur, mais immobiliser une cible lui sembla le plus idéal étant données ses capacités martiales. Difficile de la frapper si on ne pouvait pas bouger.

- J’admets que pouvoir immobiliser quelqu’un à distance me semble intéressant. Pensez-vous pouvoir faire cela avec un tatouage plutôt discret ?

Cherock assura que la taille importait peu, mais il sentit la réticence de la jeune femme. Sa mâchoire se contracta tandis qu’elle cherchait ses mots pour expliquer ce qui la retenait.

- J’ai une très mauvaise expérience avec la fulguromancie, je dois juste être un peu nerveuse à l’idée de la manipuler sans la comprendre. Et il est facile pour mon frère de se faire tatouer, c’est un homme, mais sur une femme…

Elle se demandait si on n’allait pas lui reprocher ce genre d’extravagance. Ce n’était pas courant de voir une femme d’Oranan porter un tatouage. Elle finit par soupirer.

- Peu importe. Si vous m’assurez que c’est sans danger, faisons-le.


- Je n'avais pas pensé à votre... Position, vis à vis d'un tatouage. Je ferai en sorte qu'il passe inaperçu, dans ce cas. Pour la fulguromancie... Vous m'en voyez désolé. Mais le sort n'est pas forcément un sort de foudre, vous savez. Tant que j'ai un fluide de l'élément correspondant et un mage qui connait le sort souhaité, je peux le tatouer. Si vous avez parmi vos connaissances un mage connaissant un sort que vous voulez, nous pouvons reporter le tatouage à plus tard, quand cette personne sera disponible.

- Votre intention est louable, Cherock, mais je ne connais aucun mage, vous excepté. Ils ne sont pas si courants. Un sort de foudre conviendra très bien si vous m'expliquer comment m'en servir sans que je ne me touche moi-même avec. Quels sont les endroits les plus facile à tatouer pour vous ?

Certains endroits semblaient délicat, mais se faire tatouer la tempe ou le cou ne l'enchantait guère de toute façon. L'intérieur du poignet aurait pu être une bonne idée, mais devait déjà porter un brassard et mettre un tatouage sensible en dessous ne lui disait rien du dos. Elle réfléchit un instant et trouva un endroit que personne ne verrait et qui n'allait pas la gêner tout en lui évitant de dévoiler trop de choses à Cherock. Un bon compromis.

- Le bas de l'épaule, à peu près à ce niveau, c'est possible ?

Elle désigna la zone qui courrait sur le haut de son bras jusque sur le dessus de son épaule. Apparemment cela était possible et Cherock lui demanda ce qu’elle aimerait.

- J'ai eu une idée. Une tête de griffon face à une tête de loup, mais en miroir inversé. Une tête en haut, l'autre en bas, comme le symbole de l'équilibre, en cercle. Je ne sais pas si c'est très clair.

Cherock sembla d'abord perplexe face à sa demande et s'assit par terre pour sortir un parchemin sur lequel il griffonna. Curieuse, Hatsu le regarda faire avant qu'il ne lui présente un vague croquis. La jeune femme l'étudia quelques secondes et hocha la tête.

- Exactement ce à quoi je pensais, idem pour les couleurs. Cela ne vous semble pas trop contraignant ?

Il ne semblait pas le penser, mais les couelurs allaient probablement être associées à du violet en plus, dû à la fiole de fluide de la même couleur. Elle trouvait cela étrange que la foudre magique soit violette, elle se souvenait d’éclairs bleue si lumineux qu’ils en devenaient blancs. Peut-être que les mages avaient des couleurs différentes parfois.

- La couleur violette ne me gêne pas, faites ce qui vous semble le plus approprié, je vous fais confiance. Si le dessin est aussi convaincant que celui que mon frère porte, je n'ai pas à m'en faire.

Une heure semblait convenir, aussi Hatsu hcoha la tête lorsqu’il demanda si elle voulait commencer maintenant et l'invita à la suivre après avoir cajolé Kinome une dernière fois. Comme pour le tatouage de Ryo, elle le conduisit à l'étage, mais entra dans sa chambre plutôt que dans celle de son frère. La décoration était restée sommaire malgré le mobilier de qualité qui occupait une bonne partie de l'espace que le lit ne prenait pas. Son bureau était toujours encombré de parchemins divers et de croquis, certains datant de la veille, mais elle n'embarrassa pas à les ranger et invita Cherock à entrer pour fermer la porte derrière lui. D’ordinaire elle n'invitait pas d'hommes à rentrer dans sa chambre. Talabre avait forcé son domaine et avait presque pris possession d'elle, mais le souvenir de Volh se lovant dans ses bras dans ce lit avait largement chassé le reste. Elle ne craignait pas Cherock et s'avança vers son lit. Elle tourna le dos au fulguromancien pour tout de même conserver un peu de pudeur alors qu'elle sortait son bras de la manche de son habit, dévoilant son épaule droite et une partie de son dos avant de s'installer sur le lit. Accepter un homme dans sa chambre, certes, se dévoiler, certainement pas.

- Cela vous convient ?

Cherock s'installa près de la jeune femme, assis sur la chaise ordinairement accolée au bureau de Hatsu. La jeune femme retint une grimace, mais pas un sursaut lorsque Cherock usa de sa magie dans son bras. Cela lui rappela douloureusement un autre genre d'éclair qui avait failli lui coûter la vie en plus de la faire souffrir atrocement. Elle savait bien que Cherock ne lui faisait pas de mal, mais elle n'avait pas pu s'en empêcher. Elle finit par se détendre, sentant ses muscles s'engourdir dans son bras. Elle était curieuse de voir le jeune homme en action, mais la position ne lui permettait pas vraiment d'observer le processus de tatouage et elle se contenta donc de ressentir la pointe qui commença à percer sa peau pour former le futur tatouage. Elle le sentait aller et venir, tracer des formes qu'elle imaginait sans pouvoir les voir. Elle avait uniquement reconnu le cercle au début, tout le reste était complètement flou. Une fois le griffon terminé, il lui demanda comment représenter le loup. Elle réfléchit quelques instants.

- Le dessiner en train de hurler comme ils savent si bien le faire serait un plus, mais sinon comme un prédateur et ce sera parfait.

- Ça risque d'être compliqué, ça en revanche. Pour respecter la continuité du cercle, le loup se doit d'avoir le museau incliné vers le bas, sans quoi le tatouage serait déséquilibré s'il devait le lever pour hurler à la lune

- Oui je vois... dans ce cas prédateur agressif c'est parfait.

Après ce court interlude, Cherock se remit au travail, allant même jusqu'à chantonner tandis qu'il martelait la peau de Hatsu. La jeune femme ne s'en offusqua pas, elle avait déjà chantonné en préparant un repas en pleine montagne ou en dessinant un croquis, ça aidait à calmer les nerfs en faisant une activité nécessitant une intense concentration pendant un long moment. Hatsu resta parfaitement immobile pendant toute la durée du tatouage. L'habitude de rester immobile en attendant le moment propice pour tirer sur sa cible faisait en sorte que cela ne la gêne pas. Lorsque Cherock finit par s'éloigner, elle hésita puis se redressa lentement avant de bouger doucement son bras. Il lui semblait légèrement engourdi, mais elle ne souffrait pas, c'était un bon point. Pendant que Cherock farfouillait elle ne savait quoi dans son sac, Hatsu s'empara d'un miroir et observa le tatouage sous toutes ses coutures. Le détails des plumes, des poils, la couleur des yeux doré pour le griffon et bleu glace du loup, les crocs étincelant constatant avec le pelage noir nuit, le cercle d'où débordait légèrement quelques éléments, comme s'il ne pouvait contenir les deux animaux, tout dans ce tatouage ravissait la jeune femme qui se serait sentie bien bête de ne pas accepter la proposition du tatoueur, finalement.

- Non, vous n'avez pas à rougir, en effet.

Lorsqu'il voulut qu'elle essaie de lancer un sort à l'aide d'une pièce en lui expliquant comment faire, Hatsu se retourna après avoir savamment remit son habit, évitant de dévoiler plus que la décence n'autorisait à un homme qu'elle appréciait simplement. Elle prit la pièce de sa main gauche, et fixa le fulguromancien avec perplexité face à sa métaphore d'une arbalète invisible envoyant une décharge de foudre. Elle se contenta de pointer la pièce vers le marteau qui servait de cible et... rien.

- Qu'est supposé faire le sort contenu dans cette pièce, exactement ? Je pense que je préfère savoir ce que je fais avant tout.

Un simple éclair allait donc sortir de la pièce. Hatsu hocha la tête, écouta une autre explication de Cherock qui ne lui facilita pas davantage la tâche, mais elle se garda bien de le dire et se concentra. Elle ne sentait rien de ce qui pouvait émaner de la pièce, mais il y avait quelque chose, donc elle persévéra. Elle inspira doucement et ordonna au sort de sortir. Rien ne se passa là non plus. Elle grogna de frustration, inspira à nouveau et somma l'éclair de quitter la pièce. Un éclair fusa alors sur le marteau qu'il percuta. Hatsu sursauta et lâcha la pièce par réflexe, l'empêchant tout de même de rouler en la plaquant avec son pied. Elle toussota pour se redonner une contenance, un peu gênée de sa réaction maladroite.

- Je crois que j'ai compris le principe. Et donc je n'aurai qu'à faire ça pour que le tatouage fonctionne, c'est bien cela ?

Il confirma et l’enjoignit à essayer plusieurs fois avec les pièces pour être certaine d'avoir bien compris. Le second essai lui pris encore une tentative de trop, mais les deux suivants furent instantanés et elle n'eut aucun sursaut ces fois-là. Lorsqu'il lui expliqua concrètement ce que le sort d'immobilisation faisait, Hatsu ne retins pas un rictus. Elle avait déjà goûté aux éclairs d'un fulguromancien, elle imaginait sans mal la douleur qu'un sort fait pour en infliger afin d'immobiliser pouvait créer. Néanmoins, elle se lança et pointa sa main tendue vers le marteau. Un picotement lui parcourut l'épaule avant de brusquement descendre le long de son bras. Elle se crispa involontairement sous la sensation malgré l'absence de douleur. Le sort fusa sur le marteau, très semblable à celui contenu dans les pièces. Elle se frotta le bras et ferma et ouvrit le poing à plusieurs reprises.

- C’est... impressionnant, je n'avais jamais ressenti une chose pareille. J'en ferai bon usage. Merci de m'avoir proposé une telle offre, Cherock.

- Croyez-moi, que si je pouvais tatouer tous les soldats de l'armée Ynorienne, je le ferai. Mais vous serez un atout pour notre côté. Alors je me devais de vous aider dans la mesure de mes moyens

- Je doute qu'une simple archère puisse faire une quelconque différence dans le conflit qui s'annonce, contrairement à un mage comme vous, mais merci Cherock. Ma famille vit ici, c'est mon peuple et mon pays, alors je me devais de faire quelque chose, ne serait-ce qu'un peu…

Il assura qu’une simple flèche pouvait faire la différence, comme celle qui avait blessé Crean, le général en chef des Treize, lors de leur affrontement. S’opposer à ces être surpuissants n’était pas à la portée de la jeune femme, mais elle se garda bien de lui affirmer qu’il avait tort. Il se redressa et prépara ses affaires et Hatsu regarda un instant alors qu’il lui demandait de veiller sur lui et les soldats depuis els airs.

- J'y veillerai, occupez-vous simplement de ne pas faire tomber la foudre sur ma tête depuis le ciel. Je suis tenace, mais pas à ce point.

Son sourire mutin trahissait ses dires, mais elle ne fut pas aussi familière que son interlocuteur qui l'avait tutoyé juste à l'instant. Garder une distance était dans ses habitudes. Elle ne l'en empêcha pourtant pas non plus. Elle le raccompagna à la porte et lui souhaita une bonne soirée. Et alors qu'il allait partir, elle l'interpella et attendit qu'il se retourne.

- Que les vents vous portent et que Rana vous protège, Cherock.

- Et que sa sagesse guident vos flèches.
Hatsu Ôkami, Chasseuse Ynorienne
Première Née des Ôkami
Réceptacle de l'esprit de Loup
Image
Armoiries des Ôkami:
l'Or pour la fortune, le Loup pour la noblesse d'âme et la flèche pour le passé guerrier.

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