Le Village de Melicera

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Yuimen
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Le Village de Melicera

Message par Yuimen » ven. 29 déc. 2017 13:06

Village de Melicera
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Melicera est un bourg du duché de Gamerian. Deux ou trois cents habitants, guère plus, vivent pour l'essentiel du commerce issu de l'apiculture. En effet, le village est réputé pour sa cire, utilisée pour les cordes d'arc et d'arbalète autant que pour les bougies, son miel et son hydromel, reconnus à travers tout le royaume. Ce sont d'ailleurs ces deux activités qui ont donné le nom au village.

Hors des ruches et des champs de fleurs utiles pour le miel, il n'y a quasiment rien dans le village: une taverne qui sert une bière au miel tellement forte que les villageois la surnomme "barbar", deux cages sur la place servant de prison, un petit manoir servant de demeure seigneuriale et un petit marché accueillant les primeurs du coin.

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Eyriella Grottenbois
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Re: Le Village de Melicera

Message par Eyriella Grottenbois » lun. 30 sept. 2019 16:08

[Précédent : https://univers.yuimen.net/viewtopic.ph ... 5908#p5908 ]

Bichette et Eyriella furent bientôt en vue de ce qui apparaissaient comme étant Mélisse et Rats...

(pas moyen d'en être sûre avant d'y aller et de demander... mais alors, que ferait-je là-bas ? Dois-je me trouver un travail ? Chercher si l'on a besoin de l'aide d'une guérisseuse ? Je n'ai pas de matériel et ne sait faire, en définitif, que peu de chose à par régénérer des plaies... Bon, certes, c'est déjà pas mal... j'espère juste pouvoir me rendre utile... mais d'abord !)

Le soleil lui chatouillant agréablement le nez, Eyriella leva les yeux vers l'astre béni, et, décidant qu'elle pouvait bien laisser bichette en plan avec son sac à dos sur son dos fixé par la ficelle qu'elle avait, elle prit son envol

" Je reviens ma bichette ! J'ai rendez-vous avec le soleil ! "  Fit elle en riant presque de joie, plongeant vers les hauteurs pour capter au maximum l'ensoleillement recherché.

(et maintenant.... et essayer de communier !)

Eyriella commença par étendre et offrir tous ses membres, un par un, progressivement et lascivement, à l'astre du jour qui la baignait de ses rayons.

(la lumière, la douce et belle et glorieuse lumière... viens à moi, rentre en moi ! Sois à moi !)

Ne bougeant que ses ailes afin de se maintenir à la bonne hauteur, Eyriella resta ainsi pendant un bon quart d'heure les bras et jambes écartés, captant au maximum les rayons, la lumière et son énergie. Elle pouvait presque sentir le fluide caractéristique la pénétrer lentement, petit à petit...

(faites que je puisse améliorer mes capacités actuelles, j'en ai vraiment besoin si je veux pouvoir être efficace ici ! Qu'Avoreen me bénisse !)

Alors, elle commença doucement à bouger, à onduler et tourner sur elle-même, en une danse aérienne progressive, lente, en premier lieu, puis de plus en plus rapide, dansant sur un air qui, au départ, n'existait que dans sa tête, puis, au fur et à mesure que ses mouvements de bras et de jambes se faisaient élastiques, rythmiques, elle se mit à entonner un chant de gloire à la lumière de sa composition, une variante plus grandiloquente et plus sérieuse que sa routine matinale à l'adresse de sa Déesse patronne, Avoreen.
Le temps s'écoula tandis qu'Eyriella tâchait de capter et envoûter par sa danse chaque étincelle lumineuse qui lui parvenait de l'astre du jour fermement campé dans les cieux. Elle se dit même qu'elle faisait une danse d'intégration de Lumière, car, c'est ce qu'elle espérait au plus profond d'elle-même, elle souhaitait réellement faire sienne plus de fluide lumineux....
Quand elle commença à s'essouffler, sa danse se fit plus lente, plus implorante alors qu'elle envisageait d'arrêter là...

(J'espère.... j'espère que c'est suffisant ? Je ne vais quand même pas m'épuiser, cela n'aurait aucun sens de tomber comme une pierre, même à la gloire d'Avoreen ! Et puis, avec tout ce soleil je dois briller comme une luciole moi, si je n'ai pas pris un coup de soleil dans l'affaire !)

Malicieuse, Eyriella fit une grande révérence aérienne à l'adresse du soleil, puis se mit à redescendre en direction de Bichette qui, apparemment, n'avait pas tellement bougé et qui broutait en bordure de champs. De haut, l'aldryde put apercevoir ce qui semblait être un paysan en pleine besogne à quelques lieues de là.

( Parfait, je vais pouvoir lui demander mon chemin ! )

Eyriella redescendit sur Bichette et, d'un claquement de doigts à droite, orienta sa monture en direction du dit paysan. Il ne leur fallu que dix minutes pour arriver à destination, alors que le paysan, de dos, ne semblait pas les avoir remarqué.

«  Olà ! Bonjour ! Puis je savoir si le village que je vois est bien Mélisse et Rats ? » Demanda Eyriella de vive voix, se penchant de côté afin que le paysan soit en mesure de la voir...

«  … ! Sacrénom ! Une biche qui parle ! »

Le paysan barbu se signa, les yeux écarquillés, et Eyriella soupira en déposant son sac là où elle se tenait debout sur Bichette.

«  Mais noooon, Bichette ne parle pas, mais moi oui ! » Fit elle en voletant au-dessus de la tête de la biche, agitant ses petits bras dorés par le soleil, ses longs cheveux roux flamboyants dans la lumière de la journée déjà bien avancée.

«  … ! Oh mé qu'essscekecé que ça ?? Une aldryde ? Ah oui une adryde et bien euh, bien le bonjour ! Késkeuh vous m'demandiez déjà ? Si c'est par là bas Mélicera ??? Bin oui voyons, kessssque ça pourrait bien être sinon ?!! Z'êtes pas de la région vous hein ! »

« Oh, d'accord, euh non, en effet, je suis une voyageuse ! » Fit elle en désignant fièrement sa biche qui venait de reprendre son broutage machinal.

«  Ohhhh très bien, très bien... » Répondit le cul-terreux, se grattant brièvement sous son chapeau de paille. « Bin si vous avez à faire là bas, ça vous r'garde mais j'voôa pas bieng pourquoi une aldryde ira s'fourrer dans not' village, crénom.... » Et il finit la fin de sa phrase par une sorte de grommellement intelligible de mauvaise augure...

«  Oh, très bien, merci ! » Répondit spontanément la jeune aldryde, pas certaine tout de même que le paysan se soit montré cordial et bienveillant...

(Eh bien, on verra bien si on veut de moi !!)

Et Eyriella lança Bichette à bonne allure en direction du village, qu'elles atteignirent en à peine une heure.

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Gamemaster3
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Re: Le Village de Melicera

Message par Gamemaster3 » sam. 5 oct. 2019 13:26

Intervention pour Eyriella


L’aldryde et sa monture sylvestre improvisée atteignirent rapidement le village humain de Melicera suite aux explications bourrues et peu avenantes du bûcheron. Situé en lisière de la Forêt du Châtiment qui recouvrait une large partie du territoire du Duché de Gamérian, ce petit bourg s’était développé au détriment de la forêt qui avait été largement déboisée pour permettre au village et à ses activités apicoles et agricoles. Le duo parcourut ainsi plusieurs centaines de mètres de terrains ruraux, parsemés de souches centenaires décapitées, avant d’atteindre enfin les limites du village précédemment indiqué.

L’aldryde put entrer sans grande difficulté à Melicera, le village n’étant pas spécifiquement gardé, et parcourir les premières ruelles, faites de terre battue. L’animal encore sauvage qui servait de monture à Eyriella commença à s’agiter, peu habitué aux environnements urbains et préférant habituellement se tenir à l’écart des humains et de leur civilisation. La jeune femme sentit qu’il pouvait encore déguerpir à tout instant s’il sentait que la menace était trop importante, obéissant à ses instincts les plus primitifs.

Arrivées à ce qui semblait être le centre de la bourgade, la place était déserte, occupée uniquement par deux cages rouillées actuellement vides. Cependant, en tournant la tête vers sa droite, Eyriella vit trois vieilles femmes, à la peau parcheminée et aux habits sombres et sales, assises sur un banc, en pleine discussion animée, et dont les paroles ressemblaient à cette distance aux croassements de corbeaux. Entendant du bruit sur leur gauche, les mégères se turent et tournèrent leurs visages émaciés dans la direction de l’aldryde fraichement arrivée. Leurs yeux s’écarquillèrent et celle du centre pointa un doigt osseux et accusateur vers Eyriella en poussant un long sifflement :

« Vooooouuuuuus… »

Mues par une force inconnue, les trois furies se levèrent en même temps avec une vivacité inhabituelle pour des êtres humains de cet âge vénérable. Pointant désormais toutes trois les doigts dans la direction de l’inconnue de petite taille, elles commencèrent alors à vociférer des phrases et des cris stridents dans la direction d’Eyriella :

« Vooooouuuuuuus ! »
« Voleeeeeuuuuuuuse ! »
« Comment ooooooooosez-voooooooouuuuuus… »
« Sooooorcccccière ! »
« … venir iciiiiiiiiiii, après vos méfaaaaaaaiiiiiiiits ! »
« Oiseeeeaaaaauuuu de malheur ! »
« Rendeeeeeeeeez nous… »
« Scéléraaaaaattte ! »
« … nos fiiiiiiiiiilles ! »


L’une d’entre elles ramassa une pierre au sol et la lança dans a direction de l’aldryde, la manquant, mais augmentant par la même occasion l’appréhension de la biche, qui obéissait de moins en moins aux ordres pour la tenir au calme. Malheureusement pour le duo, les braillements des harpies avaient alerté les villageois aux alentours qui commençaient à affluer sur la place du village, sortant de leurs petites chaumières ou remontant les ruelles, occultant par la même occasion toutes les issues de ce village et tenant l’aldryde et sa monture au piège. Le contrôle sur la monture était de plus en plus difficile et il en fallut de peu pour qu’Eyriella fut projetée au sol…

Qu’allait donc désormais faire Eyriella dans cette situation plutôt délicate ?
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Eyriella Grottenbois
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Re: Le Village de Melicera

Message par Eyriella Grottenbois » sam. 5 oct. 2019 14:21

Alors qu'Eyriella faisait entrer Bichette dans le village, elle pu constater que cette dernière, d'ordinaire placide, commençait à s'agiter et à devenir de moins en moins manœuvrable...

( J'aurais dû la laisser dans la campagne environnantes, elle aurait pu se débrouiller sans moi le temps que je visite... mais en même temps, je voulais connaître sa réaction face aux activités humaines... )

Activités humaines qui lui semblaient bien mornes, d'ailleurs. Elle découvrait cet amas horizontal de masures énormes et menaçantes pour la première fois de sa vie, et elle se demanda lesquelles d'entre elles étaient des échoppes ou des auberges où d'aventure elle aurait pu s'arrêter un moment, non sans avoir trouvé une astuce pour gérer sa monture ! Elle commençait à se dire qu'elle allait rebrousser chemin tellement Bichette paniquait face aux allé-venus des passants humains, lorsque une voix s'éleva dans la place et elle fut rapidement prise à partie par un trio de femmes qui semblaient âgées et passablement agitées...
Ne voulant pas risquer que Bichette panique pour de bon et l'envoie valdinguer, Eyriella commença tout d'abord à jouer un air apaisant de sa petite flûte sur-mesure. Sa biche étant mélomane, elle comprendrait le signal que lui envoyait son amie ailée : du calme, tout va bien, ne t'inquiète pas. Chose qu'elle finit par lui murmurer rythmiquement en lui caressant le cou pour tâcher de faire baisser son stress et son agitation.

" Du caaaaaaalme, tout va bien, Bichette. Bichette, ma jolie, ne t'inquiète pas, caaaaaalme toi voyons. " Fit elle tout en lui flattant l'encolure.

( Il faut que je la sorte de là, une biche n'est pas faite pour arpenter les rues, à quoi ai-je pensé ? Si elle se met à s'enfuir j'aurais toutes les peines du monde à la rattraper, je ne voudrais pas la perdre ! )

Et son petit cœur d'aldryde fondit en repensant à ce dernier mois dans sa compagnie, à partager des baies, à dormir ensemble, blotties l'une contre l'autre, à se fier à son instinct pour fuir tout danger alentours, à lui conter et chanter des berceuses et autres airs de flûte de sa composition... Cela avait été idyllique, et elle ne voulait pas jeter cela aux orties pour un peu de tapage urbain !
Aussi, elle dirigea sa biche-monture vers ce qui s'apparentait le plus à une trouée dans l'attroupement de villageois qui avait été attiré par ces quelques humaines étranges et bruyantes qui l'avaient alpagué, et tâcha de se ménager un passage vers la périphérie du village où elle pourrait laisser Bichette paître paisiblement dans la campagne en attendant qu'elle revienne d'avoir investigué plus avant cette étrange situation où certaines personnes l'accusaient d'être une voleuse de filles et un oiseau de malheur, sapristi !

( Me prennent elles pour quelqu'un d'autres ? Il y a t-il d'autres aldrydes dans le coin qui auraient fait quelque farce de mauvais goût ? Ah, pas le temps de penser à ça, d'abord dégager Bichette d'ici.... ! )

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Gamemaster3
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Re: Le Village de Melicera

Message par Gamemaster3 » dim. 6 oct. 2019 18:23

Intervention pour Eyriella


Par manque de chance pour l’aldryde et sa monture, la trouée qu’Eyriella pensait avoir identifié n’en était pas une et le duo se retrouva désormais encerclé par les badauds qui s’étaient rassemblés sur la place du village. L’option de fuite semblait désormais impossible. Sauf peut-être pour l’aldryde qui pouvait s’envoler rapidement de quelques battements d’ailes, mais cela signifiait abandonner derrière elle la biche qui lui servait de monture depuis quelques semaines…

Des chuchotements et autres murmures commençaient à parvenir aux oreilles du couple d’infortune, mais Eyriella eut toute la difficulté du monde à identifier clairement ce que ces humais pouvaient dire d’elle, plus préoccupée à se maintenir en équilibre sur sa tremblante bête de selle. Quelques bribes lui parvinrent cependant :

« … quoi ça ? »
« … penses … elle… »
« … correspond… description… »
« … disparition… ma fille… »


Puis un sifflement retenti derrière elle, et la foule se fendit en deux, laissant passer les trois harpies aperçues plus tôt firent leur macabre apparition, leurs doigts accusateurs toujours pointés vers Eyriella, leurs voix chuintantes et leurs paroles sybillines retentissant au-dessus du brouhaha global :

« C’est elle ! »
« Brûlez-là ! »
« Nous en sommes certaines ! »
« Pendez-là »
« Nous l’avons vu en cette nuit de malheur il y a de cela presque un mois ! »
« Coupez lui les ailes »
« Nous tenons enfin notre vengeance ! »
« Vengeance !! »
« Nous tenons enfin la source de tous nos malheurs ! »
« Vengeance…. »


Attisée par ces mots, la foule commence à se réchauffer et les visages se fermèrent, leur attitude devenant de plus en plus menaçante envers l’aldryde… La situation semblait bien mal partie pour cette petite curieuse…
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Eyriella Grottenbois
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Re: Le Village de Melicera

Message par Eyriella Grottenbois » lun. 7 oct. 2019 14:45

( Pas de chance ! )

En continuant à calmer Bichette, Eyriella lui fit faire demi-tour quand il s'avéra que le passage espéré n'en était pas un. Elle se dit que, piégée pour piégée, autant braver la source de tout ce tumulte et faire la lumière sur ces étranges accusations.... Et, d'ailleurs, les trois vieilles femmes s'avançaient vers elle au milieu de la foule.

" Ecoutez, écoutez moi !! " Cria Eyriella pour se faire entendre par-dessus le brouhaha ambiant. " Je ne sais pas de quoi vous m'accusez, je suis nouvelle ici et j'arrive seulement dans ce beau village de Mélisse et Rats et... voyons, que s'est il donc passé, est ce qu'une autre aldryde vous a causé des ennuis ? Pour cela, j'en suis désolée mais je ne suis PAS la source de vos problèmes, nobles gens ! "

La mention d'un "beau village" lui coûta quelque peu car en son fort intérieur, Eyriella n'était pas ravie de se retrouver au milieu de cet amas imposant de bâtisses trapues et sans esthétique.... même pas quelques arbres dans les structures, même pas une fontaine ou un petit cours d'eau pour égayer tout cela, RIEN, que de la pierre taillée sans style et du bois entassé, et ce qui semblait être une épaisse herbe séchée au niveau des toitures....

( J'ai parlé suffisamment fort, ils m'auront entendu, mais vont ils m'écouter, et surtout elles, ces vieilles femmes ? Que Yuimen me pende si jamais je venais à être torturée et tuée à cause d'une autre aldryde !! )

Eyriella se tenait toujours au niveau de l'encolure de Bichette, au milieu de l'attroupement, faisant bien face aux vieilles femmes accusatrices, espérant instiller un peu de bon sens dans ce mic-mac soudain grâce à sa harangue.

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Re: Le Village de Melicera

Message par Gamemaster3 » mar. 8 oct. 2019 00:23

Intervention pour Eyriella


Les paroles d’Eyriella flottèrent dans l’air pendant quelques secondes, le temps que l’ensemble des habitants amassés autour d’elle puisse prendre conscience de ses mots. Quelques chuchotements se firent encore entendre autour d’elle, mais rien de véritablement perceptible pour la jeune femme ailée. Entre ses petites jambes, la biche était terrorisée et l’aldryde aurait désormais tout le mal du monde à lui donner le moindre ordre. Les petits yeux perçants des mégères dardaient ardemment dans la direction de l’intruse, les trois furies étant visiblement non satisfaites de la rapide tentative de raisonnement prononcée par Eyriella. Celle de gauche cracha au sol dans la direction de l’aldryde tandis que celle du centre, la plus ridée et visiblement la plus vieille du trio, laissa s’échapper à-nouveau des paroles nébuleuses de sa bouche édentée, ponctuées par des récriminations et glapissements de ses deux associées.

« Comment osez-vous revenir sur ces lieux, après nous avoir déjà causé tant d’ennuis ! »
« Voleuse ! »
« Châtions-la ! »
« Comment osez-vous prétendre que ce n’est pas vous, alors que nous vous avons aperçue avec vos semblables enlever la petite Zorah il y a de cela plus de trois semaines !
« Canailles ! »
« Brûlons-la pour l’exemple ! »
« Rendez-nous nos filles, maudite ! Rendez-nous nos enfants, conduisez-nous auprès d’elles et nous verrons comment nous rendrons justice ! »
« Néfaste volatile de Thimoros ! »
« Et si ce n’est pas vous, vous paierez pour les autres ! »
« Attrapez-la mes amis ! Attrapez-la avant qu’elle ne s’échappe et faisons-en un exemple pour ses nuisibles consœurs ! »
« Justice doit être faite ! »
« Agissez mes frères et sœurs ! »


La foule fut de nouveau galvanisée par ces paroles, encore obscures aux oreilles de l’aldryde… La masse de grandes gens se rapprochait petit à petit d’Eyriella et celle-ci pouvait presque commencer à sentir les souffles chauds et nauséabonds des humains sur son corps frêle. Pouvait-elle encore tenter de sauver sa peau par des mots avant de se faire capturer par ces villageois vindicatifs et enfiévrés par trois vieillardes, visiblement mécontentes des justifications fournies par l’aldryde ?
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Re: Le Village de Melicera

Message par Eyriella Grottenbois » mer. 9 oct. 2019 14:11

Eyriella était désespérée, elle savait qu'elle ne pourrait plus contrôler Bichette pour prendre la fuite le cas échéant, aussi elle tenta le tout pour le tout, ne voulant pas prendre la voie des airs pour ne pas devoir abandonner sa biche apprivoisée :

" Je vous en PRIE, écoutez moi, c'est une erreur, je n'y suis pour rien, je ne suis au courant de rien, c'est une injustice, mais si vous m'épargnez, peut être pourrais-je vous aidez à retrouver vos filles et la petite Zorah en guise de pardon au nom des aldrydes qui semblent vous avoir causé ce tort ? Je vous en prie réfléchissez, pourquoi serais-je revenue ici si j'avais commis ces méfaits ? Et pourquoi me punir au lieu me demander de l'aide, cela n'a aucun sens, peut être est-ce une méprise ou une mauvaise blague que je pourrais éclaircir auprès de la communauté aldrydique ? Ou peut être est ce autre chose, je ne vous serais d'aucune aide si vous me punissez, réfléchissez je vous en prie ! Qu'Avoreen la lumineuse m'en soit témoin, je vous offre mon aide dans cette affaire ! "

Tout en prononçant ces mots, Eyriella présentait ses mains paumes ouvertes à la foule afin de montrer qu'elle ne tenterait pas de résister et qu'elle n'était pas une menace. Ainsi, elle ne pouvait plus rien faire pour tenter d'apaiser Bichette, et en pensant à cela, elle rajouta précipitamment, voyant que la populace se rapprochait beaucoup trop d'elle pour sa sécurité :

" Je vous en prie, épargnez ma biche, je l'aime beaucoup et elle n'a rien fait, soyez cléments envers elle, c'est une pauvre créature de la forêt qui n'a jamais souffert d'une main intelligente, je vous en prie ne la brutalisez pas, je vous en PRIE ! "

L'aldryde était aux bords des larmes, sa gorge se serra et elle espérait qu'elle avait fait le bon choix car elle était désormais à portée de leurs mains humaines et de leur courroux...

(Douce et lumineuse Avoreen, protège moi je t'en supplie, faites que cette histoire se termine bien pour toutes les parties concernées, mais surtout pour moi et Bichette, je t'en prie grande dame de Lumière, je t'en supplie....)

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Re: Le Village de Melicera

Message par Gamemaster3 » mer. 9 oct. 2019 23:36

Intervention pour Eyriella


Les paroles d’Eyriella firent mouche dans un premier temps et un silence gêné s’installa, les habitants ne sachant plus trop quoi penser. Une fois de plus, quelques chuchotements survenaient encore ça et là, mais l’aldryde était bien trop concentrée sur sa survie personne pour y prêter attention. Les trois vieilles femmes s’étaient elles aussi tues, manifestement surprises de la teneur de ton discours, elles qui cherchaient très sûrement une victime facile pour apaiser la colère des villageois. La mégère de gauche ouvrit finalement la bouche pour lâcher dans un long croassement :

« Qu’on lui coupe la… »
« Taisez-vous, vipères ! »

La voix rauque survint de derrière Eyriella et en se retournant celle-ci put constater que la foule de badauds et voyeurs se scindait en deux pour laisser passer une large silhouette, trapue et titubante.

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L’homme était dans la force de l’âge, mais son apparence générale trahissait un certain laisser aller, que ce soit dans ses longs cheveux blonds, sales et mal coiffés, sa barbe hirsute, ou ses frusques à la propreté douteuse. Un long arc, de ceux qui faisaient la fierté du village, était suspendu dans son dos. L’homme empestait l’alcool, perceptible malgré la distance qui l’éloignait de l’aldryde.

« Taisez-vous ! Pour une fois que l’on nous propose enfin de l’aide, votre première réaction est de vouloir l’éradiquer ! Quand apprendrez vous que tuer ne les ramènera pas… »

L’homme continua à se rapprocher d’Eyriella et de sa monture au bord de la crise cardiaque, tandis que le reste des habitants était désormais plongé dans un silence attentiste. Les trois furies portaient désormais toute leur attention à ce nouveau venu.

« J’ai trop perdu pour laisser passer cette chance, si infime soit-elle… Si cette "aldryde" prétend pouvoir nous aider, alors je veux y croire. »
Il se tut quelques instants, cherchant visiblement ses mots. « Je… Je l’accompagnerai, je l’aiderai dans cette tâche, dussé-je en mourir moi aussi… »

Ses derniers mots s’échappèrent avec difficulté, l’homme ayant longuement pesé ses paroles. Les trois vieilles femmes se regardaient désormais, et l’ensemble du village semblait pendu à leurs lèvres. La harpie du milieu, celle qui semblait la plus vieille et la plus sage du trio ouvrit finalement la bouche, prononçant sa sentence dans un sifflement :

« Très bien Jakob l’Ivrogne, nous avons désormais ta parole et celle de cette étrangère… » Elle cracha au sol. « En gage de votre bonne foi, nous garderons cette biche à laquelle la voleuse semble tenir. Ce sera nos enfants contre cette dernière, l’échange me paraît équitable... »

Le destin d’Eyriella semblait désormais lié à cet humain qu’elle ne connaissait que depuis quelques secondes, et elle se retrouvait désormais dans l’obligation d’aider ce village à l’ouverture d’esprit discutable, si elle comptait un jour revoir Bichette…



[HRP : à partir de maintenant, tu vas pouvoir un peu plus orienter la suite de l’histoire, et notamment décider de où tu comptes aller pour enquêter sur ces disparitions. Histoire de ne pas partir sans le moindre indice et dans le flou total, tu peux tout à fait commencer par interroger Jakob ! Pour gagner du temps pour l’aventure et réduire le nombre de posts, on peut organiser ce genre d'apartés par MP directement sur le forum, ou sur Discord, pour que tu me poses les questions que tu souhaites poser aux PNJs. Fais-moi signe en fonction de ce que tu veux faire !]
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Re: Le Village de Melicera

Message par Eyriella Grottenbois » ven. 11 oct. 2019 22:46

[HRP : Dialogue vu en rp avec le MJ sur Discord]

Le silence qui fit suite à sa déclaration laissa présager une meilleure issue que ce qui se profilait auparavant à l'horizon pour Eyriella...

( Ouf ! Enfin un peu de retenue et de raison parmis ces villageois ! Il faut dire que proposer mon aide est peut être un peu téméraire, je ne vois guère ce que je pourrais vraiment faire, je ne suis pas une pisteuse il faut dire ! Mais bon, j'étais désespérée...)

Mais elle déchanta bien vite lorsque la vieille femme du milieu tenta de recommencer sa harangue... elle se voyait déjà les ailes coupées, pendue à l'un de ces poteaux de bois surmonté de métal que la populace semblait placer ici et là pour elle ne savait quelle raison... lorsqu'un homme d'allure négligée prit la parole en sa faveur !

(Merci merci douce Avoreen d'avoir entendu mes prières ! Quelqu'un vient à mon aide !)

Et, en fait d'aide, il s'agissait bien là de la providence car ce monsieur inconnu, qui apparemment s'appelait Jakob, la défendit et proposa même de l'accompagner dans sa recherche ! Même si la réaction de la doyenne la mit passablement en rogne...

( Garder Bichette comme caution ?!!! Et puis quoi encore ! Mais ai-je le choix ? Mais que vais-je pouvoir bien faire pour eux, tout ce que je connais sur les aldrydes me vient de Grottenbois, je ne sais pas s'il y a des aldrydes ici et si elles sont responsables, il me faut plus d'informations ! Il faut que je parle à ce Jakob ! )

Pendant qu'on la séparait de sa biche pour l'emmener, Eyriella se rapprocha de l'homme sentant l'alcool et se mit à la hauteur de ses yeux pour lui adresser la parole :

" Merci, merci d'être intervenu, euuuuuhhhh JAKOB c'est bien cela ? Êtes vous l'un des pères d'un des enfants disparus, par hasard ? "

« Oui, mon nom est Jakob... et vous ? » Son regard s’assombrit ensuite « Quant a mon lien avec les filles disparues, je suis le père de Magda... Elle m’a été enlevée il y a de cela 10 lunes... »


( 10 lunes, mais c'est une éternité !!! )

" Je m'appelle Eyriella, je suis enchantée de faire votre connaissance, même si cela s'avère sous de bien sombres auspices.... Et je suis désolée pour votre perte, également.... "

Eyriella voulait parler du fait que cela faisait longtemps que sa fille avait disparu mais ne sachant comment s'y prendre, elle préféra laisse l'homme parler. Ce qu'il ne fit pas, grognant simplement son assentiment...

"Euuuh.... combien d'enfants ont disparu exactement, et depuis quand... ? Pourriez vous me relatez les faits, précisément ? S'il vous plait ? ... "

« 10 enfants ont disparus jusqu’à présent. Magda était la première, Zorah la dernière... Ces fillettes disparaissaient à chaque nouvelle lune. Nous avons tenté de mettre en place des milices, mais rien à faire. Nous avons demandé de l’aide au duché, mais ceux-ci ont d’autre chats à fouetter avec la guerre contre l’empire d’omyre »
Il cracha au sol. « depuis, les Trois Sœurs mènent une chasse aux sorcières et les étrangers sont mal perçus au village, comme vous avez pu le constater »

( 10 enfants !!! C'est terrible, je comprends leur abattemment et leur férocité, quelqu'un n'a pas juste fait une mauvaise blague à ces pauvres gens, il s'agit de kidnapping réguliers et intensifs !)

" D'accord, je vois. Et ces enlèvements, ils ont eu lieu à Mélisse et Rats même ? Le jour, la nuit... ? Au même endroit, dans des lieux différents... ? ... "

« Oui tout est arrivé ici, ce n’était que des fillettes et vous imaginez bien que dès la disparition de ma fille nous avons commencé à nous inquiéter... Tous eurent lieu la nuit et malgré notre vigilance nous n’avons pu en empêcher aucun... »

" Donc c'est au domicile de CHAQUE fillette, et de nuit lors de la nouvelle lune, qu'a eu lieu chaque enlèvement, c'est bien ça ?"

« Ce sont les faits, oui »

" Et vous êtes sûrs que ce sont des aldrydes qui en sont responsables ? Vous avez des témoins ? "

« Les Trois ont vu la dernière nuit de petites formes ailées qui escortait Zorah, mais le temps de réagir, et il était déjà trop tard... » « Ce sont donc des « aldrydes » d’après vous ? »

" Hum, si l'une des "Trois" a semblé me reconnaître, c'est sûrement des aldrydes en effet, mais je ne vois pas pourquoi elles kidnapperaient des enfants voyons, surtout chaque nouvelle lune.... hum, pouvez vous me montrer où Zorah a été vu pour la dernière fois ? "

Il l’emmena à la sortie du village, dans la direction dont Eyriella venait et pointe la direction de la forêt « Les Trois les ont vu de diriger vers la forêt, nous avons essayé de faire des battues mais nous n’avons trouvé aucun indice »

" Hum, en effet, j'en viens de cette forêt... je peux comprendre pourquoi elles m'ont sauté dessus, mais malheureusement je ne connais pas d'autres aldrydes, à part celles de mon village mais elles n'auraient pas fait ça.... Euhm... est ce que vous pensez qu'il serait possible de voir chacune des chambres des fillettes, pour voir si un point commun ou un indice ne s'y trouverait pas ? "

Eyriella, malgré son ton sérieux et ses questions en rafale désespérait intérieurement et commençait à se dire que sa seule vraie option dans cette affaire allait de devoir fuir le village en laissant Bichette aux mains de ses tortionnaires...

« Si vous le souhaitez mais je doute que ce soit judicieux... comme vous l’avez sûrement déjà constaté, vous n’êtes pas la bienvenue dans ce village » « N’existe-t-il pas d’autres villages aldrydes dans la forêt où vos congeneres ne pourraient-elles pas nous renseigner sur la nature de ces enlèvements ? »

La figure d'Eyriella se décomposa : "à part mon village, non, je n'en connais aucun, mais peut être que l'akrilla de mon village pourrait nous en dire plus ? "
Eyriella se décomposa intérieurement en songeant que sa petite escapade aura tourné court avant de devoir rentrer au bercail...

« Je ne sais, je n’avais jamais rencontré un membre de votre peuple avant aujourd’hui... »

Eyriella reprit courage en entendant le ton dépité de l'homme devant elle. "Jakob... je crois bien que nous n'avons pas le choix, il va falloir interroger des grottenboisés pour avoir plus d'informations, or c'est profondément dans la forêt que mon village se situe, il va donc falloir partir pendant plusieurs jours, voire des semaines... Avez vous une monture ? " Elle eut un pincement au coeur en songeant à Bichette entre les mains de ces rustres et vindicatifs humains...

« Non une monture n’est d’aucune utilité dans cette forêt dense... Mais je suis plus grand que vous, je peux vous porter et nous irons plus vite » « Je connais bien la Forêt du Châtiment mais je ne connais votre village, il me faudra des indications »

(Il va nous falloir des semaines !! Je connais le chemin, mais comment va t-il survivre ? L'automne est abondant pour les aldrydes, mais pour un humain ??)

"Oui, bien sûr ! Je vous indiquerait le chemin, ce n'est pas bien compliqué, il suffit de remonter le cours d'eau que voilà " Fit Eyriellla en désignant le mince filet d'eau qui serpentait entre les champs plus loin. " Mais avez vous ce qu'il faut pour un voyage de plusieurs semaines dans la forêt ? Des victuailles ? Sans compter que nous risquons de rester dans la forêt plus longtemps que cela !"

« Oui ne vous inquiétez pas, je suis bon chasseur »

" Alors, en route ? "

Et ainsi, Eyriella grimpa sur l'épaule de Jakob et lui tendit le bras vers la direction qu'il devait suivre afin qu'il se mette en marche...

[Direction --> Forêt du Chatiment ]

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Inquis Sitor
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Re: Le Village de Melicera

Message par Inquis Sitor » dim. 22 déc. 2019 19:55

Atemporel, oui, c’était le mot que je cherchais. Il décrivait à merveille mon village natal : Melicera où le temps semblait figé. La seule chose ayant réellement changé était quelques visages et l’annonce du décès de mes parents. Attristé, mais préparé à une telle nouvelle, j’ai été rendre visite à leur tombe commune, leur offrant un silence respectueux.
Les morts n’ayant besoin que de peu d’attention, aussitôt je repartis voir les vivants afin de rendre mes connaissances utiles pour cet hameau. Je fis le tour des maisons, de la taverne et des magasins expliquant en quoi mes services pouvaient aider puis j’allai sur la place du bourg, attendant quelques badauds.


Une poignée de curieux mélangée à deux ou trois hommes et femmes cherchant les prémices d’un savoir arriva. Le temps était clément, point trop de vent et une fraîcheur vivifiante parcourait les terres environnantes. Sur une longue table empruntée à l’auberge du coin, j’étalai mes livres, instruments, plantes, encyclopédies et mes notes perdues dans tout ce bazar, ce qui fit peur aux paysans locaux.


Rassurez-vous, rassurez-vous… Je ne vais pas me perdre en explications hasardeuses et interminables. J’accentuais mes gestes, comme au théâtre, rendant la chose légèrement comique. Avant tout, je tenais à remercier les quelques braves ici présents, qui n’ont pas été rebutés par ma certaine, hum… Minceur dirons-nous pour ne pas m’offusquer. Des ricanements fugaces s’entendirent, j’avais enfin terminé mon rituel de préparation. Bien, qu’allons-nous traiter ici, mhh.


Le jeu commença. Faisant mine de réfléchir, je laissais la parole à un fermier du coin, se plaignant de douleurs et de blessures courantes à cause du métier qu’il exerce. Il montra des coupures à peine bandées, dans un état que je qualifiais de « moche ». D’autres le rejoignirent, craignant la gangrène et à fortiori : l’amputation douloureuse d’un barbier.
De mémoire je repensais à une plante jaune, non, violette, ah non d’un petit buisson aux feuilles jaunes et fleurs violacées. Après avoir feuilleté un bouquin parlant de la flore en altitude, je tombai sur la Curchran. Mes souvenirs ne m’avaient pas abandonnés. D’un mouvement délicat, je pris quelques fleurs de cette plante, qui me restaient de mon dernier voyage puis entamer l’écrasement des pétales violettes.


Voyez-vous, cette plante très recherchée se nomme, mon souffle se perdit, mon énergie n’étant plus ce qu’elle était, Curchran. Elle se trouve sur les hautes collines, en montagne, une sorte de buisson jaune et violet. La bouillie commençait à prendre. Elle est rare, mais je l’utilise avec de litharge, du verdet, d’alun, de poix sèche, de résine de pin sèche et à cela je rajoute une hémine d’huile et autant de vinaigre. Je m’arrêtai deux secondes pour sortir et montrer le médicament. J’ai déjà de l’emplâtre, voyez-vous, auquel je vais ajouter la mixture ici présente pour améliorer son effet. Mais avant tout ça, utilisons un savon sur vos tristes plaies.


Je m’attelai à bien frotter leurs chairs brunies, insalubres où du pus commençait à suinter malgré les râles des villageois. Les blessures se trouvaient généralement au-niveau des bras et jambes, la fatigue accumulée responsable d’une seconde d’inattention sanglante. Ainsi de longues heures passèrent en nettoyage de corps et application d'emplâtre, le plus méticuleusement possible. Une fois cela fait, je terminai le cours de ce jour en rappelant les ingrédients, la création de l’emplâtre puis je partis après avoir rangé mes innombrables livres, dessins et notes.


Le premier homme auquel j’ai nettoyé la plaie voulut me remercier en m’offrant le gîte. N’ayant plus d’abri où aller, j’acceptai sans rechigner. Mon paquetage commençait à peser sur mon maigre dos, si bien que je finis de le porter à bout de bras à quelques mètres de la maisonnée du charitable. Nous rentrâmes et il me présenta à sa femme, sa fille et son fils. Il plaisanta un instant avec son enfant, lui disant qu’un jour peut-être lui aussi aura un grand savoir. Je ricanai légèrement, avant d’aller poser mes affaires dans une pièce minuscule où une paillasse m’attendait.


Plus tard, mon ventre cria famine. Cela faisait bien deux jours que je n’avais rien manger. La dame des lieux fit mijoter des lentilles mélangées aux carottes, poireaux et pommes de terre des champs, dans une marmite gigantesque chauffée par des flammes dévorantes. Je me fis railler sur mon poids par le paysan plutôt costaud. D’un franc sourire, il m’autorisa à dévorer tout ce que je voulais à partir du moment où je daignais contrôler l’état de sa cicatrice.
Ainsi pendant deux jours je vécu avec cette famille charmante, oscillant entre la place de la bourgade, cette maison et parfois la taverne.
J’expliquai quand mon cœur désirait s’ouvrir, que j’étais né en ces lieux et que la dépouille de mes parents réunis à jamais sommeillait au cimetière. La petite fille aimait mes histoires, ou plutôt mes descriptions de plantes et de paysages pour elle inatteignables. Le garçon, lui, appréciait les côtés morbides de mon métier, particulièrement les détails concernant les amputations et parfois les arrachements de dents, à vif et avec des outils peu conventionnels.


À la suite d’une après-midi à parler de décoction et remède contre une toux persistante, à classifier plantes et autres ingrédients par localisation et rareté, je partis à la taverne principale pour me réhydrater le gosier.
Le gérant un généreux gaillard, toujours sourire aux lèvres m’offrit une hydromel afin de me remercier. Il me disait qu’à l’heure actuelle, où la connaissance s’échangeait généralement contre de l’or, ça lui faisait chaud au cœur de voir une personne partager son savoir avec altruisme.


Vous savez… Il me coupa gentiment, m’interdisant de le vouvoyer. Très bien. Tu sais, quelque part je suis conscient que certains m’hébergeront où me feront dons que quelques vivres. Ce n’est pas toujours le cas et je fais avec, mais ça reste une sorte de rémunération. Dis-je en reprenant une lapée d’alcool.


Quand bien même, quand bien même t’pourrais faire ripaille ou gagner tes éperons avec toutes tes connaissances… J’ai entendu une gamine parler de toi et des voyages que t’avais fait. Combien d’pauvres gens t’as aidé, voire sauver ? D’autres n’hésitent pas à s’faire payer contre nos vies… M’enfin, ha ha ! Profite bien d’ton hydromel, j’ai pas mal d’clients, ha ha ha !
Annonça-t-il avant de partir s’occuper des autres.


Un léger sourire aux lèvres, presque rêveur, je faisais tourner ma chope ainsi que son contenu. Plein de pensées tournoyaient dans mon esprit, comme l’hydromel. Je me perdais dans l’immensité de mon savoir, comme ils disent…

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Faëlis
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Re: Le Village de Melicera

Message par Faëlis » jeu. 9 janv. 2020 21:19

L’inconvénient de l'amulette était qu'il savait dans quelle direction se rendre, mais pas pendant combien de temps. Pour ce qu'il en savait, Aliéna était peut-être de l'autre côté des océans ! Mais sans plus d'indications, il se contenta de traverser le continent aussi vite que possible. Il suivit la route un certain temps en sortir de Kendra Kâr, jusqu'à un petit village appelé Breen. Là, comme le collier le tirait de plus en plus vers le nord, il se résolu à quitter la route pour longer la forêt.

Il traversa donc la plaine Mellifère, couvertes d'arbres fruitiers, plutôt dénudés en cette saison. La région vivait au rythme des abeilles et, en cet hiver, les abeilles dormaient.

Après plusieurs semaines de voyage, et malgré l'urgence de la situation qui le pressait, il se résolut à s'arrêter pour prendre un peu de repos dans le village de Melicera. Alors que le soleil commençait à descendre à l'horizon, il entra dans la taverne pour demander où il pourrait trouver une chambre d'hôtes. Le tavernier, fort surpris de voir un visiteur de l'extérieur en cette saison morte, avait l'air un peu soupçonneux. En fait, les quelques clients le regardaient aussi de travers. C'était sans doute normal dans un village aussi reculé. Il le pressa de questions :

« Vous vous êtes perdus ? »

« Que non, mon ami. Je fais étape avant de continuer vers le nord-ouest. »

« Il n'y a rien, là-bas, à part Fort-Pascam. »

Fort-Pascam... où avait-il entendu ce nom... mais oui ! Une ancienne communauté d'artistes, aujourd'hui disparue. Il avait vu quelques-uns de leurs très rares tableaux à la cour de Cuilnen ! Il décida d'en profiter :

« Justement, je suis à la recherche d'une peinture sur bois qui s'y trouverait peut-être encore. Vous savez, nous autres, elfes, aimons fort l'art sous toutes ses formes ! »

Il rit joyeusement, décidé à paraître comme un parfait cliché d'elfe. Comme prévu, les gens se détendirent un peu, rassurés de se trouver face à des stéréotypes convenus. Il décida de continuer à jouer le naïf. Allez savoir pourquoi, il passait toujours impeccablement dans son rôle d'elfe cliché...

« Et donc, qu'est-ce que vous voulez ? »

« Une chambre me siérait, si vous savez où je peux en trouver. »

« Pas de chambre hors de la saison des récoltes, ici. »

« Un grenier me suffirait, pour peu que j'ai de l'eau pour me laver ! »

Il déposa quelques pièces d'or, la somme d'une chambre de luxe en ville ! Le tavernier sembla mal à l'aise, comme si même cette proposition lui semblait insuffisante. Le regard des clients était vraiment insistant, et Faëlis commença à soupçonner qu'il y avait plus que du simple chauvinisme. Mais devant la somme, son interlocuteur finit par céder :

« Bon, je peux vous en fournir une... mais vous partez dès demain, d'accord ? »

« Quelle hâte, messire ! Y aurait-il un problème ? »

« C'est pas vos oignons. C'est à prendre ou à laisser. »

Une impolitesse des plus déplaisante. Bon, il faudrait s'en contenter. Il paya et rejoignit la chambre, dont on lui annonça que « pour sa sécurité », elle serait verrouillée jusqu'au levé du jour. Le tavernier marmonna à propos des risques de vol pour les jeunes seigneurs dans un village aussi reculé, et l'elfe compris aussitôt qu'il n'était pas le seul à jouer des stéréotypes pour obtenir ce qu'il voulait. Mais que se passait-il donc, ici ?

La chambre n'avait rien d'un palais, elle était même petite et inconfortable, quoiqu'au vu du bâtiment général, on lui avait probablement confié une des meilleures : il était près du conduit de la cheminée pour ne pas avoir trop froid et reçu même un baquet d'eau qui n'était pas glacée. En revanche, il fut effectivement enfermé toute la nuit. Il envisagea un instant de sortir par la fenêtre, en guise de pied-de-nez à ce rustre, mais il était surtout là pour se reposer. Il dormit donc au mieux.

Au matin, la porte fut rouverte avant même qu'il ne soit réveillé, et, après l'avoir constaté, Faëlis prit bien le temps de recompter ses affaires. Non, rien ne manquait. Il descendit, remercia le tavernier qui lui répondit par un grognement, récupéra son cheval et déambula dans les rues. Elles étaient étonnamment peu animées. Même en hiver, il aurait dû y avoir plus de monde, notamment des enfants qui jouaient. Mais là, il n'y avait personne...

Comme il passait devant une boutique, il décida qu'il serait quand même de bon ton d'acheter un pot de miel dans ce village réputé pour sa production. La maison semblait vaguement plus riche que les autres, et une enseigne montrait une petite abeille, c'était un bon indice...

Une commerçante l'attendait de l'autre côté du comptoir. C'était une femme assez âgée et son visage affichait une pâleur maladive. Comme il lui demandait du miel, elle lui tendit un pot, sans rien dire d'autre que le prix. Il lui tendit l'argent puis s’apprêta à repartir lorsqu'elle l’interpella d'une voix hésitante :

« Vous... êtes un voyageur de passage ? »

« En effet, gente dame. »

Elle semblait mal à l'aise, mais se décida finalement à ajouter :

« Je suppose que vous n'avez pas vu un petit garçon au nez cassé, dehors ? »

« Je crains que non. Pourquoi ? »

Elle semblait maintenant au bord des larmes :

« Mon petit Garry a disparu depuis plusieurs jours. Ce n'est que le dernier d'une longue liste... Si j'étais vous je ne m'attarderais pas ici. Les gens soupçonnent tous les étrangers... »

Qu'était-ce donc que cette sinistre histoire ? Surpris, l'elfe demanda dans quelles circonstances les enfants avaient disparu, mais la femme secoua la tête :

« Personne ne le sait. Des étrangers un peu bizarres sont passé il y a quelque temps. Il y a eu trop de disparitions pour que ce soit un hasard ! Dès qu'ils sortaient dans la rue pour jouer, ils finissaient par ne pas revenir ! Alors on interdit aux enfants d'aller jouer dans la rue. Garry ne m'a pas écouté... »

Elle semblait proche de fondre en larmes. Quelle sinistre malédiction, en effet... Hélas, Faëlis avait déjà tant à faire. Si seulement elle pouvait lui donner une réelle piste... Il dut se contenter d'un triste :

« J'ai bien peur de ne pouvoir vous aider, madame. Si je découvre quelque chose, je vous en informerais, mais je suis moi-même à la recherche d'une amie disparue... »

Alors qu'il disait cela, il réalisa une chose. Aliéna avait été enlevée, elle aussi... pouvait-il y avoir un lien ? Impossible à dire pour l'instant. Il sortit en la saluant. Comme il parcourait le village, il chercha quelques passants à interroger, mais les gens étaient franchement hostiles et n'avaient qu'une envie : le voir s'en aller. Il dut se résoudre à quitter le village et poursuivre son chemin, toujours suivant son amulette.

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Walter Heck
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Re: Le Village de Melicera

Message par Walter Heck » ven. 17 janv. 2020 02:30

Vide. Je porte tout de même la gourde à mes lèvres dans l'espoir d'en récupérer quelques gouttes, mais c'est raté. Bon sang, c'est bien ma veine de tomber à court d'eau près du seul patelin que je voulais éviter de traverser. Comme pour me narguer, le panneau qui indique la direction du village de Melicera apparaît après quelques centaines de mètres, laissant déjà apparaître la toiture des premières maisons. Ça fait combien de temps, maintenant ? Vingt-ans ans ? Davantage, il me semble. Enfin bref, inutile de s'emmerder avec ça. Après tout, plus rien ne me lie à cet endroit, désormais. Tout ceux que j'ai connu doivent être morts ou partis, alors autant se comporter comme un parfait inconnu.

Les frontières du village passées, je me retrouve à arpenter la route principale en espérant que rien n'ai trop changé. Les baraques sont toujours les mêmes, parfois remplacées par de nouvelles plus fraîches, mieux construites. La place centrale est similaire à celle dans mes souvenirs, si ce n'est quelques détails d'architecture qui offrent un cachet non négligeable. Je finis par redécouvrir l'auberge sous un autre nom qui ne me dit rien, certainement tenue par de nouveaux propriétaires. Je ne le saurais qu'en passant cette fichue porte, alors autant se bouger. J'y découvre une pièce plutôt spacieuse, mais pleine d'une chaleur humaine qui m'a presque manqué depuis la dernière fois que je me suis arrêté pour manger quelque chose de chaud. Le comptoir est occupé par un type et l'aubergiste, c'est presque trop pour un solitaire comme moi, mais je n'aurais rien sans demander. L'homme est bourru et son tablier semble indiquer qu'il est en charge de l'approvisionnement.

"B'jour. Me faudrait... de quoi remplir ma gourde, quelque chose à boire et un repas chaud, s'il vous plaît. De l'eau, ça f'ra parfaitement l'affaire."

Son air semble un brin surpris à ma demande et il lui faut quelques secondes pour réfléchir en essuyant ses mains sur son tablier.

"De l'eau ? Vous voulez rien d'plus fort ? On fait du bon hydromel, dans l'village. C'est même la spécialité."

Crois-moi que j'suis bien au courant d'ça, mon gaillard... C'que j'ai pu en avaler quand j'étais plus jeune. M'enfin, c'est derrière moi, maintenant.

"De l'eau, vraiment. J'insiste."

"D'accord, d'accord.... J'vais chercher tout ça, alors."

Le voilà déjà parti, me laissant seul avec celui qui joue avec sa choppe à côté de moi. Je joue les voyeurs sans méchanceté aucune, mais plutôt par curiosité en prenant bien soin de ne pas trop me faire repérer.

(Il me dit quelque chose, le gars. Il est pas bien gras et ses lunettes me trompent un peu, mais il a une bouille qui m'revient. J'ai bien du l'rencontrer ici... Un ancien, comme moi ? C'est pas le fils de la Bergote ? Non, il était plus trapu celui-là. Ou alors ce gamin que mes parents pouvaient pas piffer, comment il s'appelle déjà ? Claudius ? Non, merde, c'est pas ça. Bon sang, je l'ai au bout de la langue... Ah, mais ouais !)

Un sourire dessiné sur les lèvres, j'attire son attention d'un geste.

"Inquis, c'est bien toi ? C'est moi, Walter, tu te souviens ? On était en service à Fort-Gamerian, ensemble !"

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Inquis Sitor
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Re: Le Village de Melicera

Message par Inquis Sitor » ven. 17 janv. 2020 20:18

Je voyais un flot tournoyant aussi vide de sens que nos existences éphémères. Aucune grande cause ne galvanisait mes gestes et je devais bien l’avouer, cela me démotivait un peu plus chaque année. Des lettres et des mots se formaient, certaines phrases pouvaient maintenir la vie, tandis que d’autres l’écourtaient, un pouvoir que beaucoup avaient du mal à se représenter.


Me voilà replongé dans les abysses de mon esprit, je claquai ma langue et repris une gorgée de cette hydromel fantastique. Son goût sucré fit s’envoler mon amertume passagère et me rappela qu’il fallut reposer pieds sur terre. Une voix aida à cela, étrangement familière, lointaine presque inatteignable par ma mémoire pourtant efficace, je tournai donc ma tête vers lui.


Walter ? Dis-je, interloqué. Je réfléchis quelques secondes, le temps d’un battement de cil. Bien sûr, mais oui, à Gamerian ! Ça fait une éternité, je dirais bien trente ans, peut-être un peu moins ?


Mes yeux ébènes l’inspectèrent en vitesse, rien d’intrusif, juste ce qu’il faut pour me rappeler de son visage lors de nos aventures communes. Bien que rapidement envoyés à des postes différents, je me souvenais de moments de camaraderie joyeux, lui, moi, dans une belle bande de jeunes hommes. Ses vêtements simples et son allure, toutefois, donnaient une toute autre image.


Que deviens-tu Walt ? La vie a la caserne t’a réussi ? Je bus une petite gorgée et profitai de la saveur. Si mes souvenirs sont bons, ce qui est ouvert à débat, ha ha ; tu te plaisais bien avec les gars. Tu as sans doute défendus dans contrées, non ? À moins que tu fasses parti de la garde de Melicera. Je fis une pause, m'apercevant de mon impolitesse. Pardonne-moi, c’est juste que ça fait plaisir de revoir un visage amical. Pour être sincère, tu es le seul que j’ai vu depuis mon retour… Je terminai ma chope, un léger mais sincère sourire aux lèvres.

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Walter Heck
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Re: Le Village de Melicera

Message par Walter Heck » lun. 20 janv. 2020 20:40

Pendant une seconde, je me demande si je m'adresse à la bonne personne. Il faut dire que le bougre n'est plus si ressemblant à l'image du jeune gaillard que j'avais en tête, mais son expression changeante me ravive le cœur. Inquis parvient même à se remémorer le nombre d'années qui sépare notre dernière réunion, ce qui a pour effet de me surprendre un instant.

(Bon sang, j'aurais pas dis aussi longtemps... J'deviens vraiment gâteux, ma parole !)

"Trente ans, ouais ! Haha, ça fait une sacrée paille !.."

Je l'écoute tenter de deviner ce qui a suivi après mon service militaire, s'imaginant de ma poursuite dans le corps d'armée. Je pouffe doucement à cette idée qui aurait pu en être une si je n'en avais pas eu ras-le-bol de tous ces pourris. Inquis se coupe dans ses questions à-tout-va, me précisant que je suis le premier qu'il retrouve depuis son arrivée à Melicera. J'en conclus qu'il est là depuis plusieurs jours, si ce n'est davantage.

"Non, c'est derrière moi, maintenant. J'ai quitté la caserne peu de temps après ton départ, ça m'convenait plus. Enfin, bon, c'était pas la plus belle période de ma vie, mais j'ai fini par m'retrouver. J'ai fini par rentrer dans les ordres, mais là aussi, ça a été compliqué. Maint'nant, u'est-ce que je pourrais t'dire ?... J'voyage beaucoup dans l'continent, j'pèlerine comme je peux et j'vis au jour le jour. J'suis p'têt par l'plus riche, mais j'suis heureux et c'est tout c'qui compte."

Voilà longtemps que je n'avais pas défini ma vie à quelqu'un, une vieille connaissance qui plus est. Plutôt satisfait du résultat, je finis par lui retourner la question, curieux de savoir ce qui l'a occupé depuis notre service militaire.

"Bon, et toi ? T'as bien changé, dis donc ! Attends, laisse-moi d'viner... Tu s'rais pas... Chirurgien-barbier ou un truc du même genre ? Et ça fait longtemps qu't'es revenu à Melicera ? Tu m'diras, ça m'étonne moyen qu'on y trouve plus personne d'notre époque. 'Doivent tous être partis ou enterrés à l'heure qu'il est."

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Re: Le Village de Melicera

Message par Inquis Sitor » mar. 21 janv. 2020 13:20

Une sorte de mélancolie me traversa en me remémorant ce passé si éloigné. Cette période de vie que j’enviais aux plus jeunes, où l’on voyait le monde d’un regard naïf et galvanisant. Pour moi et Walter, cette existence folâtre paraissait remonté à il y a un siècle ou deux, au bas mot. Nous étions les vestiges d’une époque de ce petit village, des reliques d’un autre temps.


C’était avec une attention toute particulière que j’écoutais son histoire, l’encourageant parfois d’un signe de tête accompagné du plus discret des sourires. Sourire qui d’ailleurs se transforma en une gêne amusée, découvrant que j’avais tort sur toute la ligne le concernant. Cependant, j’étais content que son mode de vie lui plaisait, au point de pouvoir affirmer que ça le rendait heureux.


Eh bien, Walt, on peut dire que je me suis bien trompé. J’en ricanai, presque machinalement. C’est vrai, c’est vrai, le fringuant jeune homme a laissé sa place à la carcasse que je suis, ha ha. Peut-être pour me motiver, je me remémorai le goût de mon hydromel succulente, pensant à sa qualité qui n’était pas usurpée. Après avoir terminé mon service, je me suis intéressé à ce qui me passionnait le plus ; les différentes cultures des races et l’étude de la médecine. J’ai voyagé de bibliothèque en bibliothèque pour avoir une somme de savoirs, disons, suffisante pour entamer une étude plus poussée.


L’espace d’un moment, je me surpris à contempler les rides précoces de mon corps et à écouter mon souffle, déjà en train de se perdre.


J’ai passé tant de jours sur les routes, à aller de hameau en hameau toujours plus exalté de découvrir telle ou telle chose sur les Elfes, les Thorkins et différentes cultures humaines. Mais j’y ai surtout vu des hommes et des femmes malades et blessés, n’ayant aucun moyen de se guérir. Alors au fil des années, je venais enseigner des rudiments compréhensibles de tous sur les cataplasmes, les emplâtres, les décoctions, et cetera. Je me mets également à l’ouvrage, gratuitement et parfois on me logeait et me nourrissait. J’ai toujours répugné à faire payer ce genre de services, la santé n’est pas un vulgaire commerce. Je me mis à caresser ma barbe naissante et à ressentir la maigreur de mon menton. Ce n’est pas l’existence la plus saine, mais tu sais ce qu’on dit, ce sont les cordonniers les plus mal chaussés.


Je respirai un peu, ça faisait une éternité que je n’avais pas résumé ma vie à une autre personne que moi-même. Je ne savais pas comment l’interpréter, comme un échec ou une réussite.


Oui, oui, ça fait deux jours maintenant que je suis ici. Je surveille l’état d’une blessure contre le gîte, un pauvre fermier qui a dû se faire une vilaine coupure avec une faucille. Un moment d’inattention ou une fatigue passagère et ce genre d’accident arrive plus vite qu’on ne le pense.
Mes doigts plutôt frêles se mirent à jouer avec ma chope ferreuse, tapotant librement sa surface. Oui, peut-être ont-ils migré vers de plus grandes villes ou sont-ils tout simplement morts. Ça me rappelle que j’ai appris le décès de mes parents, c’était prévisible mais ça reste douloureux. Un silence puis je me remis à parler, me souvenant de sa commande. Tu as commandé de l’eau ? Tu devrais faire attention, l’eau potable est rare, préfère une bière ou ici une hydromel, le miel est bon pour la santé. À moins que ça ne rentre en contradiction avec les vœux que tu as prononcé ? J’avoue être curieux de savoir quelle divinité tu as servi ou que tu sers encore. Je ponctuai cette phrase d’un sourire amical.

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Walter Heck
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Re: Le Village de Melicera

Message par Walter Heck » jeu. 23 janv. 2020 17:17

J'écoute le récit d'Inquis, plus attentif qu'ordinaire. Il faut dire que le bonhomme parle bien, certainement mieux que moi. Je ressens son habitude d'enseignement, sa facilité à s'adresser aux autres au travers de ce qu'il me raconte. Tout le contraire de moi, en tout cas. Il me parle de ses voyages et de ce qui l'amène à rester ici et là, souvent pour quelques explications sur les remèdes et autres mixtures destinées à guérir. Je me souviens en avoir appris quelques p'tites choses pendant mon séjour au temple, mais je serais incapable de remettre tout ça en pratique. Quoi qu'il en soit, il fait quelque chose de bien et c'est tout c'qui compte. Ça court par les routes, des bonnes âmes comme la sienne qui sillonnent le continent pour transmettre quelques savoirs à ceux qui n'y ont pas accès. Je rigole à son expression sur les cordonniers, hochant la tête pour faire signe que je rejoins ses propos tout en captant la silhouette de l'aubergiste qui revient.

"Haha ! C'est pas moi qui te dirais le contraire."

Inquis finit de me raconter ce qui l'amène à rester à Melicera, prétextant une blessure faite par un paysan du coin. Je le regarde d'une moue approbatrice, gardant quand même l'idée de la nostalgie en tête. Après tout, c'est ce qui m'a ramené ici et c'est ce qui me fera y rester quelques jours, alors pourquoi pas lui ? L'aubergiste finit par déposer ma commande sur le comptoir, moment que prend Inquis pour me parler de la mort de ses parents. Je repense un instant aux miens, partis il y a bien longtemps.

"Ouais, j'connais ça. Mes condoléances, en tout cas. Puisse la Déesse les mener dans un endroit meilleur."

"Et voilà pour vous. Y'a tout ce qu'il vous faut ?"

Je pose les yeux sur ce qu'il m'a amené. Dans une gamelle, un genre de ragoût qui sent bon le lapin et les carottes. Je récupère également ma gourde qu'il s'est affairé à remplir et je pose mes doigts autour de la choppe remplie d'eau, ne pouvant m'empêcher d'y sentir les effluves de l'hydromel qui y est normalement servi. Peu enclin à faire le difficile, je porte la choppe à mes lèvres en remerciant l'aubergiste d'un signe de tête. Visiblement concerné par ma commande, Inquis intervient sur la nature peu commune de celle-ci et tente d'en comprendre les raisons, chose à laquelle je réponds après avoir avalé une bonne rasade d'eau.

"Je sais bien, je sais bien...*s'essuie le menton*... Disons que... J'tente de réduire au mieux. J'ai eu pas mal de soucis avec la boisson dans ma jeunesse et j'me connais quand j'ai bu. C'est pas quelqu'un que t'apprécierait. Personne, en fait. Et c'est plus ou moins dans les vœux que j'ai prononcé, ouais. Fervant croyant d'Gaïa, la Dame de Lumière. Bon, tu m'diras, ça picole sévère à la table des fidèles et c'est simplement interdit d'en abuser. Mon abstinence, c'est plus personnel, je sais pas si tu vois c'que je veux dire. Enfin bon, j'tente de plus y toucher. J'me suis mis au jus d'poire ou d'pomme, ça fait parfaitement l'affaire. Et vu que j'connais l'eau du fleuve Kokyo qui passe dans le Duché, j'me permets d'boire l'eau qui en provient."

Je commence à déguster mon repas tant qu'il est chaud et relance Inquis sur ce qu'il compte faire à Melicera.

"Et quand ton gaillard s'ra guéri, qu'est-ce que tu comptes faire ? J'vais essayer d'me trouver un peu de travail dans l'coin pour continuer ma route. T'as peut-être entendu quelque chose, d'ailleurs ?"

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Re: Le Village de Melicera

Message par Inquis Sitor » mar. 28 janv. 2020 18:08

Walter écoutait mes paroles avec un certain intérêt. J’espérais en mon fort intérieur qu’il ne mimât pas l’attention pour me faire plaisir. Je conclus sur la mort de mes parents et il usa de la politesse commune à l’annonce de ceci. Je le remerciai d’un doux signe de la tête et souris lorsqu’il parla de la Déesse. Je trouvais réconfortant de voir quelqu’un croire qu’un divin puisse porter attention à de simples gens, pour ma part, je savais que seul le néant nous attendait tous. À ce moment, je me dis que je devais ressembler à un bien triste personnage, trop vieux pour son âge et d’un cynisme désavoué. Le temps n’épargne personne, surtout pas mes vieux os pensai-je.


Revint alors le tavernier avec une gourde remplie d’eau ainsi qu’un bouillon somme toute classique. Ce qu’il fallait pour apaiser une petite faim s’y trouvait ; de bons légumes, un jus appétissant et du lapin bien frais.
Mon comparse s’essuya le menton et justifia son choix par l’option envisagée par moi-même ; à savoir ses vœux personnels. Il était de notoriété publique que les croyances en générales n’interdisaient pas la consommation d’alcool, tout du moins, elle désirait garder ses fidèles lucides. Je compris pourquoi lorsqu’il rentra un peu plus dans les détails, mes sourcils se fronçant machinalement à l’écoute de ses révélations.


Gaïa, alors, je vois, je vois. Je réajustai mes lunettes dans un clic sonore. En effet, il est préférable d’éviter l’enivrement. Puis je souris en soufflant du nez, les sourcils gaiement remontés. Cependant, arrêter net ta consommation ne te permettra pas de te guérir. Un jour quand tu te sentiras prêt, tu devras boire de nouveau et parvenir à te maîtriser. Sinon, ce fantôme te suivras toute ta vie, crois-moi, tu pourrais le regretter. Je regardai l’aubergiste prendre ma chope et répondis à son sourire jovial avant de me revenir sur mon ami d’enfance. Oh, et bon appétit, j’en perds mes bonnes manières.


Le pèlerin patibulaire entama son bouillon, avant de me questionner sur ce que je ferais après la guérison de mon patient. J’ai toujours été si entraîné par ma routine que je n’y ai pas vraiment pensé. Je caressai donc mon bouc, faisant comprendre ma réflexion. Ça dura plusieurs secondes, à dire vrai, peut-être même une minute avant que je ne me décide à répondre.


Sincèrement, je n’ai pas de but particulier. Souvent, je regarde si l’on a encore besoin de moi, je donne mes derniers cours et puis, je reprends la route si rien ne retient mon attention.
Je soufflai doucement du nez. Et il y a ici quelqu’un qui retient mon attention. Amusé, je le fixai un petit temps puis ricanai. Hé hé hé. Je pensais juste m’en aller, mais autant profiter de nos retrouvailles. Néanmoins, au risque de te décevoir, je n’ai rien entendu de spécial. Il y a bien une caravane qui réapprovisionne le village de temps en temps, tous les deux, trois jours. Peut-être cherche-t-elle des bras supplémentaires. Sinon, le plus simple serait d’aller rendre visite aux artisans locaux. Il y a toujours quelque bricole à régler.

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Re: Le Village de Melicera

Message par Walter Heck » sam. 1 févr. 2020 16:11

Le cuiller aux lèvres, j'écoute l'homme de savoir qui a partiellement prit la place du Inquis que je connais. Il tente de me faire une morale que je n'entends que trop bien, surtout de la part des taverniers qui souhaitent écouler leurs stocks. Celui qui tient cet endroit en profite pour acquiescer à plusieurs reprises tout en essuyant ses choppes, trouvant la vérité qu'il veut dans les mots de mon partenaire de comptoir. J'acquiesce avant de reposer mon cuiller et fouille un peu dans ma mémoire, tentant d'y trouver ce que je réponds généralement à tout ceci. Mais cette fois-ci, rien. Je me contente d'y mettre un terme et de changer de sujet.

"Merci. Ne t'en fais pas pour moi, j't'assure."

Là encore, je laisse Inquis prendre la main sur la parole tandis que je suis toujours occupé à finir mon ragoût. Plus intéressé qu'auparavant, je ralentis la cadence de mon repas et l'écoute avec plus d'attention, un brin déçu qu'il ne puisse pas me fournir davantage d'informations. Les rumeurs courent ici et là et tendre l'oreille, ça me connais, mais je n'aurais pas été contre les avoir sans délai. Le peu que je parviens à en tirer me convient moyennement, mais devant le choix qui s'offre à nous, inutile de faire la fine bouche. Nous, car le bonhomme se propose pour me rejoindre après son cas à traiter. Je pose ma gamelle à deux mains et m'essuie la bouche d'un revers, empoignant ma choppe pour la finir, la moue impassible quoique tintée d'amusement.

"Ma foi... Faisons comme ça."

Je tourne déjà la tête vers l'aubergiste et lui demande de s'approcher d'un signe de main, le coupant dans son essuyage qui commence à se faire long. Nul doute que le gaillard sait déjà ce que je vais lui demander, certainement occupé à tendre l'oreille à notre discussion depuis nos retrouvailles.

"Dites, vous savez s'il y a un peu de boulot dans le coin ? On est pas difficiles, tant que ça demande pas de traîner dans des trucs louches."

Le temps d'assimiler mes paroles, il finit par répondre, d'abord déconcerté, puis assuré.

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Re: Le Village de Melicera

Message par Gamemaster9 » lun. 3 févr. 2020 17:12

Intervention pour Walter Heck et Inquis Sitor

« Laissez-moi réfléchir… »

L’aubergiste fit mine de réfléchir un instant, pendant plusieurs longues secondes, avant de lever le doigt comme si une idée lui serait venue, le regard subitement illuminé.

« Ah, y’aurait bien une chose. Le brasseur de la bière du village, la Barbar, m’a indiqué qu’il arrivait au bout de sa production. Il n’aurait plus aucune nouvelle de l’apiculteur qui lui fournit d’habitude le miel, ingrédient essentiel du mélange. Pourriez aller enquêter là-dessus et voir pourquoi ça coince. Tout l’village serait bien ennuyé si un souci perdurait, dans ce domaine. »

Il regarda les chopes vides des deux clients.

« L’apiculteur vit plus au nord, dans le Duché, dans la Plaine Mélifère en direction de Gamerian. Si vous arrangez le souci, pour sûr que le brasseur aura un sou à donner. Z’aurez qu’à lui rendre visite. »
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Re: Le Village de Melicera

Message par Walter Heck » dim. 1 mars 2020 22:08

J'écoute la proposition de l'aubergiste, le visage bardé d'une moue un brin déconfite. À la mention de l'apiculteur, je creuse dans mes souvenirs pour tenter de mettre un visage sur le disparu et sa ferme d'abeilles, mais cela remonte à trop loin pour y parvenir. Après plusieurs secondes d'un lourd silence, je sors enfin de ma pêche mentale et pousse la chope vide vers son propriétaire, bégayant quelques mots avant de reprendre plus clairement.

"Ho-heu... Ouais, l'apiculteur. Il a disparu, donc. Pas d'puis bien longtemps, j'imagine. Sinon, vous auriez pas d'mandé à deux voyageurs de s'en occuper..."

J'en viens à me demander si la proposition est sérieuse, m'imaginant déjà comment cela va se termine. Un voyage jusqu'à chez lui, trois coups sur la porte et un imbécile qui va répondre qu'il s'est absenté quelques jours sans prévenir qui que ce soit. Impossible de lui demander le moindre sou si j'dis vrai. M'enfin, l'aubergiste a l'air inquiet et ça n'a pas l'air d'être dans ses habitudes de ne plus donner de nouvelles. Et puis, j'préfère ça à porter des caisses toute la journée pour une misère et un sourire d'hypocrite qui m'dira que c'est tout c'qu'il a. Reste à d'mander à Inquis s'il est d'accord.

"Ça t'irais, Inquis ? J'suis pas contre l'idée d'revoir les abords du village après tout c'temps. Surtout que si l'affaire est sérieuse, on s'ra pas trop de deux pour retrouver l'pauvre bougre s'il a des ennuis."

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Re: Le Village de Melicera

Message par Inquis Sitor » dim. 1 mars 2020 22:53

Walter demanda à l’aubergiste si un quelconque travail était disponible. Ce dernier sembla réfléchir avant de lever son index, ayant sans doute mis le doigt sur un souvenir adéquat.
Il nous expliqua qu’un apiculteur ne donnait plus de nouvelle au brasseur en contact avec lui. Instantanément, je me mis à imaginer des possibilités diverses du pourquoi et du comment.


Mes réflexions passèrent de la mort de ses abeilles, d’une urgence à régler ailleurs, d’un voyage ayant mal tourné, d’une simple perte de production, d’une blessure malheureuse ou encore d’une attaque de telle ou telle créature.
Je m’étais perdu dans ces songes quelques instants, mais je revins à moi lorsque mon camarade reprit la parole. Il fit une simple déduction fort bien amenée sur l’hypothétique durée de cette disparition et me demanda si je désirais le suivre.


Ma foi, j’ai déjà inculqué une bonne partie des connaissances triviales sur les plantes de la région et remèdes pouvant se faire avec. D’un geste machinal, je caressai ma barbe blanchâtre. Néanmoins, j’ai une dernière question. Je me mis à regarder l’aubergiste d’un regard neutre. L’apiculteur vit plus au nord du duché, très bien. De mémoire, il y a un certain nombre d’apiculteurs dans la plaine Mélifère. Peux-tu, s’il te plaît, te montrer plus précis sur son emplacement ? Je terminai ma phrase en l’encourageant d’un signe de tête ainsi qu’un fugace sourire.


Le tavernier fronça quelque peu les sourcils, peut-être chercha-t-il plus intensément dans sa mémoire. Le gars s’appelle Norbert Deschamps et… Son visage fit une moue, comme s’il ne voyait plus quoi ajouter puis ses yeux eurent un éclat différent. Ah oui ! Au nord-est d’la plaine, voilà, c’est la précision que j’cherchais, ha ha ! Il prit la chope que Walter lui glissa et partit la nettoyer plus loin après avoir conclu : C’est tout c’que j’peux dire, à vous d’voir si vous y allez, maint’nant, j’ai d’autres choses à faire.

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Re: Le Village de Melicera

Message par Walter Heck » lun. 2 mars 2020 21:22

En écoutant Inquis poser sa question à l'aubergiste, je comprends qu'il est d'accord pour s'intéresser à cette disparition. Non sans tendre l'oreille, j'écoute la réponse donnée et lève les yeux au ciel en comprenant qu'elle n'est pas des plus instructives. La Plaine Mélifère grouille de fermes en tous genres et ce Norbert Deschamps ne me rappelle rien, c'est donc l'inconnu qui nous attend. Et pourtant, je reste serein. Ces terres sont belles et vierges du moindre mal, propices à la nature et à son exploitation raisonnable. Bref, une visite de courtoisie, en somme.

Je laisse l'aubergiste essuyer nos verres vides et m'éloigne du comptoir en étirant mes jambes. Le fourmillement est désagréable et me jette mon âge en pleine poire, comme pour me rappeler d'y aller plus doucement. J'évite d'y penser trop souvent, mais la plupart des types de ma génération ont déjà plus de petits-enfants que de doigts sur la main. Mon passé d'amoureux se glisse dans mon esprit, regrettant de ne pouvoir muer en présent. Il est vrai que la solitude est pesante, même lorsqu'on s'y accoutume, mais je me complais de choses plus simples et nul doute que mes retrouvailles avec Inquis sont des plus agréables. Un pote perdu de vue, ça court pas dans la rue, mais plutôt dans un cimetière. Presque tout ceux qu'j'ai connu à l'époque doivent avoir cassé leur pipe, s'ils ne sont pas sur le point de le faire. Et maintenant que j'y pense, j'étais persuadé que ce bon vieux Inquis avait passé l'arme à gauche. Comme quoi, la Déesse arrive encore à me surprendre.

Laissant filer une partie de la journée, j'échange quelques banalités avec le vieux renard, toujours au sujet de nos histoires passées. Le service militaire s'impose comme l'élément principal, mais il est intéressant d'en savoir plus sur les pérégrinations d'un homme tel que lui. Je profite de certains moments plus tranquilles pendant lesquelles il feuillette ses notes pour m'assoupir un instant, croisant les doigts pour ne pas ronfler trop fort. Finalement, la soirée s'approche plus vite que prévu et je me réveille en sursaut d'un rêve dont je ne me souviens pas pour quémander l'hospitalité à l'aubergiste qui me propose gratuitement son étable pour la nuit, sauf si je suis prêt à allonger quelques pièces pour une paillasse plus confortable. L'idée de dormir au gré des renâclements des chevaux ne m'indiffère pas et j'accepte en le remerciant, donnant rendez-vous à Inquis au matin pour se préparer à partir en direction de la demeure de l'apiculteur.

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Re: Le Village de Melicera

Message par Inquis Sitor » jeu. 19 mars 2020 16:13

Certes, l’information supplémentaire n’était pas d’un grand secours, mais je remerciais le barman d’un signe de la tête avant qu’il ne parte. Un moment de silence s’installa, je profitais du mutisme afin de revoir mes souvenirs de la plaine Mélifère, malheureusement trop éloignés pour en tirer quoique ce soit d‘utile. Je soupirai en regardant mon compagnon, d’un air faussement amusé.


Il va falloir s’en contenter, l’on dirait bien. Mon sourire, bien que discret, retrouva de sa sincérité. Ça nous fera une excuse pour visiter ces fameuses plaines qui nous ont vues grandir.


Walter ne semblait pas contrarié, voire même devait penser comme moi. Deux vieux loups solitaires qui se retrouvaient après tant d’années, c’était tout de même cocasse.
Je m’extirpai du haut tabouret pour sortir avec mon acolyte puis vint l’inévitable douleur au dos. Sur toute mon échine mes muscles se contractaient intensément, piquant comme des coups de poignards.
Je grimaçai à peine, ayant appris à contrôler mon faciès, néanmoins ça n’atténuer pas la douleur.


Nous traînons nos vielles carcasses hors de la taverne pour nous balader dans le village, s’arrêtant parfois à sa lisière sous un arbre.
Nous échangeâmes des bribes de nos vies passées, les quatre cent coups au service militaire et un peu plus en détail nos raisons d’en sortir. Très vite, je me rends compte que j’ai trop de choses à dire et pour la première fois depuis longtemps, je ne sais pas comment mettre cela à l’oral.
Je profitai alors d’une sieste de mon comparse pour revoir mes différentes notes. Le son de ses ronflements rythmant ma lecture qui me rendait de plus en plus nostalgique.


Les premiers carnets étaient rédigés d’une écriture propre, soignée où chaque lettre prenait la place qu’elle devait prendre avec un bel espace entre phrases et croquis. L’espace d’un instant aussi chaleureux qu’amer, je me revis les rédiger avec une fougue et un optimisme à tout épreuve. Le frêle gamin que j’étais avait trouvé sa voie et pour une fois ma vie ne me semblait pas si inutile.
Au fil des cahiers, la calligraphie s’étiolait au point de devenir des pattes de mouches, les proportions des lettres étaient inharmonieuses, la faute à ma vue affaiblie. Les dessins avaient perdus en âme et gagnés en austérité, comme mon visage au quelque cicatrices.


Finalement, je tombais sur un calepin à la couverture de cuir noir avec quelques tâches rougeâtres ça et là. C’était une sorte de suivi de mon état, de mes blessures et leur avancement. Parfois une maladie se baladait entre ces lignes, c’était intéressant de décrire les symptômes et ressentis et tester certains remèdes.
Ça l’était moins lorsqu’il s’agissait en fait de poison aggravant mon cas, le fruit d’erreurs de jeunesse. À cette pensée je souris naïvement puis tombai sur les pages décrivant chaque marque sur mon corps. Le sourire devint rictus, ma peau brûlait à moult endroit et me démangeait.


On se retrouve demain dans la matinée, on partira aux aurores. Avec un peu de chance, l’on pourra profiter d’un beau lever de soleil, ça nous motivera. Je fermai le carnet puis repartis à Melicera en n’oubliant pas de faire un signe d’au revoir à Walter.


J’étais confus, mon esprit emporté par des sentiments positifs et négatifs. L’âge n’aida pas à me recentrer. Pour tasser ce mal-être, je reportas mon attention sur la blessure du fermier qui m’hébergeait. Bien qu’il me soutint qu’il n’avait plus mal, je portai un regard expert sur chacune des croûtes refermant sa plaie.
Finalement, avec un linge propre, un peu d’eau et du savon je lui nettoyais sa blessure et celle-ci apparut comme guérie. Le bougre semblait bien content, mais par mesure de prévention je lui indiquais de bien laver la cicatrice, une fois par jour avec savon pendant une semaine et d’éviter d’exposer la chair à nue.


Je suis content qu’elle se soit bien réparée.
Mon visage neutre contrastait avec l’honnêteté de mes paroles. Je vais réunir mes affaires, je ne vous dérangerais pas plus longtemps.


À mes mots le paysan parut virer au rouge. Je lui avais bien dit que je partirais une fois tout risque d’infection écarté, cependant, il insista pour que je reste au moins la nuit. Il ne voulait pas passer pour un avare et savait rendre la pareille à autrui dit-il.
Je le remerciai avant de partir me coucher. L’homme m’indiqua qu’il fallait souper, mais je lui demandai juste de me garder un peu d’eau et de pain sur le côté pour mon départ. Enfin, je pus me laisser tomber dans les abysses de mes songes.


Selon mes habitudes, je me réveillais avant le cri des coqs, quand le ciel passait du bleu nuit au prémices céruléennes. En silence, je rassemblais mon package et grattais quelques mots de remerciement. Peut-être ne savaient-ils pas lire, mais c’était une tradition chez moi de laisser une trace, un souvenir, quelque chose prouvant qu’à un certain moment j’ai pu exister en ces lieux.
Walter m’avait rassuré au niveau de la provenance de l’eau, c’était uniquement pour cela que je me permis d’en boire avec le pain sec. Avec ceci, j’étais repu au moins pour la journée si je ne faisais pas trop d’effort. À cette pensée je regardai mes bras décharnés, manquant de me railler moi-même.


Mon sac sur le dos, malgré les douleurs, je me dirigeais vers l’entrée du hameau d’un pas automate. Bientôt, j’arrivai puis déposai mon barda, attendant la venue du disciple de Gaïa. Il me tardait de prendre la route avec cet ami de trop longue date, quelle sorte d’aventure nous attendait donc ?

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Re: Le Village de Melicera

Message par Walter Heck » jeu. 19 mars 2020 21:41

Le réveil est soudain, mais plus cocasse qu'autre chose. La langue râpeuse d'une des bêtes de l'aubergiste me réveille en me parcourant le visage, renâclant par moments pour retenir mon odeur. J'éloigne le museau du cheval en rigolant, clignant plusieurs fois des yeux pour m'habiter au petit matin qui se faufile déjà entre la porte mal fermée de l'étable. Le cul vissé sur la paille, j'étire mes bras sans trop insister dessus et me passe la main dans les cheveux, ou du moins ce qu'il en reste.

"*baille*... Bon, bon. Sortons de là."

Quelques caresses et paroles réconfortantes avec les animaux me mettent toujours de bonne humeur et j'en profite pour attraper quelques pelles d'eau avec ma main directement dans l'abreuvoir. S'ils la boivent, c'est qu'elle est bonne, alors aucune inquiétude à avoir. Plus frais qu'un gardon, je pousse la porte en prenant soin de bien la refermer pour ne pas laisser d’échappatoire aux chevaux et me traîne vers l'entrée secondaire de l'auberge, à l'arrière du bâtiment. Je déboule dans la remise, là où le propriétaire stocke toute sa marchandise. Un véritable trésor pour un sans-le-sou comme moi, mais loin de mes mains l'idée de s'y balader sans autorisation. Je traverse la pièce sans un bruit et déboule dans la pièce principale, là où l'aubergiste arrive plusieurs secondes après moi, certainement alerté par le bruit.

"Ho, c'est vous ? Bien dormi ? J'ai pas encore ouvert, mais vous pouvez vous installer, s'vous voulez. J'arrive tout d'suite !"

D'un signe de main, je lui fais comprendre que ce n'est pas un problème. Je m’assois au comptoir et regarde au dehors, par les volets déjà ouverts. Le soleil se réveille encore, mais l'horizon est perceptible par delà la plaine que nous nous apprêtons à traverser, Inquis et moi. Je repense au vieux renard et au rendez-vous que je lui ai donné ce matin, m'impatientant alors du retour de l'aubergiste pour me servir. Les secondes deviennent une minute, puis deux, puis trois. Je finis par me faire une raison et me lève rapidement de mon tabouret lorsque sa silhouette passe à nouveau la porte battante de sa cuisine.

"Vous embêtez pas, j'vais manger sur la route. Z'avez quelque chose à m'donner contre quelques pièces d'étain ?"

D'une main plate, je secoue la monnaie qui provoque cet irrésistible son si caractéristique pour les rapiats. Le bougre n'est pas contre le fait de profiter de mon empressement et il retourne dans sa cuisine pour y farfouiller moins longtemps qu'auparavant, les mains chargées de quelques victuailles. Rien d'incroyable, mais ça remplit l'estomac d'un homme dans le besoin. Je pose l'étain sur son comptoir et attrape le gros quignon de pain complet et les deux pommes qu'il me tend. Un dernier regard amical et je passe la porte, d'entrée cette fois-ci, avant de me diriger vers l'entrée du village en mordant dans un des fruits à pleines dents. Là, j'y retrouve un Inquis prêt à partir que je salue d'un signe de main en jetant mon trognon dans une touffe d'herbe, frottant mes mains pour essuyer le jus de la pomme.

"Hey ! Me v'là ! En route !"

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