Le Château d'Endor (Guilde Messagers du Corbeau)

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Maâra
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Re: Le Château d'Endor (Guilde Messagers du Corbeau)

Message par Maâra » mar. 27 avr. 2021 12:11

Voyage vers Akinos


Levée aux aurores, elle croise des Messagers déjà affairés. Il y a beaucoup à faire et aucun ne semble avoir été épargné par les directives de la nouvelle Régente des lieux. Laconiques pour la plupart, ils lui montrent le chemin vers les cuisines où elle remplit modérément son paquetage et ses gourdes ; et de manière tout aussi expéditive, un valet direct de Zéphanie s’enquiert de son départ pour la mission qui lui a été assignée la veille.

Estelle la rejoint en sautillant sous sa longue tunique grise, le visage creusé par la fatigue et le chagrin. Elle lui annonce avoir trouvé un moyen de locomotion plus rapide que la marche pour rejoindre Akinos, la bourgade la plus proche en remontant vers Luminion. Les chevaux étant rares ici à Endor, les Messagers sans grade comme elle sont souvent obligés de partir à pied.
Une charrette de ravitaillement y est envoyée et le conducteur les attend.

La Sindel observe d’un œil vif les deux chevaux nerveux qui piétinent le sol et mordillent leur mors.

« Vous en profiterez pour en apprendre plus sur l’endroit où l’on va. » s’exclame un homme sur un ton professoral. Arken les rejoint et jette ses affaires dans la carriole en saluant vaguement les autres Messagers ; le jeune berger croisé la veille dans le village qui porte et met en cage des brebis ; le conducteur, un grand homme affable et rieur ; et Estelle qui n’a demandé à personne l’autorisation de les rejoindre.

« Que savez-vous de Luminion ? Reprend le semi elfe les dents serrées.
- Sa direction, répond Maâra comme une évidence. »

Estelle et le conducteur échangent un bref rire un brin moqueur mais d’aucun ne pourrait dire de qui ils rient le plus. De la réponse décalée de la Sindel ou de la réaction renfrognée et tristement blasée de son interlocuteur.

« Ecoute Arken, si y’a qu’ça j’peux lui filer toutes les infos sur Luminion et l’reste moi.
- On sait bien que tu préfères travailler seul, renchérit Estelle.
- J’éxécute les ordres, j’suis pas ici pour le plaisir d’instruire cette femme.
- Trois bricoles à connaître sur la région et c’est bon non ? Questionne le conducteur qui s’avère en fait être à l’écoute de tout ce qui se dit dans le château. Ils l’envoient aider à s’occuper des mourants et leur prouver qu’on est pas un nid d’espion ou chais pas quoi ; pas créer une alliance officielle avec Pérussac.
- Vous faites pas avoir par ses airs de bibliothécaire, vous lui tournez le dos une seconde et elle fonce tête baissée dans un piège ou s’attire des ennuis.

- T’en fais pas un peu trop là ? Ajoute Estelle en s’installant aux côtés d’une Maâra muette et pensive.
- Un exemple ? Hier, Lord Azraël lui dit de se méfier de Kadria, de trouver des renforts auprès de Gwandor et qu’a-t-elle fait ? …. Elle est montée affronter Kadria seule, sur son territoire.
- C’est inexact, intervient doucement Maâra. L’affrontement n’a eu lieu qu’à l’arrivée de Lord Azraël ; moi je suis montée pour discuter. »

Et à nouveau, Estelle et le conducteur, visiblement très amusés par ce duo improbable, pouffent de rire.

« C’que j’en dis moi, c’est qu’elle détonne pas d’la majorité ici !!
- Un peu plus de sérieux nous ferait pas de mal»

Sans doute voulait-il parler de discipline, et encore, pense Maâra. Car bien que moqueur, le conducteur a continué à disposer les affaires de chacun, le petit berger à porter ses bêtes, Estelle à attacher les sangles de la jument qui suivra le convoie. Et du sérieux, elle-même n’en manque pas ! N’a-t-elle pas toute sa vie entendu qu’elle n’avait aucun humour ? L’humeur morose du compagnon semi-elfe était sans doute dû au fait qu’il aurait préféré rester ici et qui sait, risquer sa vie pour un homme qu’il admire comme Lord Azraël et non pour une Sindel qui n’est pas encore des leurs. Mais elle oublie sans doute que lui aussi a dû subir les mêmes troubles au contact de la magie runique de leur précédente mission, que lui aussi a failli en perdre la tête et finir enterré vivant lorsque la grotte s’est effondrée sur elle-même. Et bien qu’elle ne voit pas les choses ainsi ; de son point de vue à lui, elle a foncé tête baissée tout le long de leur mission ; et peu importe que ses raisons fussent logiques.
Tout le monde enfin installé, le conducteur fait avancer ses chevaux à bonne allure. Le visage du semi elfe reste longtemps tourné vers les sombres murs du foyer qu’il venait à peine de retrouver. Ses longs cheveux noirs dissimulent son humeur chagrine et rancunière ; mais aussi les œillades qu’il lance à Maâra lorsque la dernière pierre disparaît de l’horizon. Autour d’eux les discussions vont bon train et tournent étonnamment sur le futur espéré de chacun ; les faits de la veille appartiennent déjà au passé.

« Vous ne portez plus le talisman ? Demande-t-il à Maâra. Alors que nous avons risqué nos vies pour lui.
- Nous avons risqué nos vies pour sauver l’âme d’une des plus grandes Lord Nécromant. Répond-elle avec grande ferveur. Je le cache ; ajoute-elle en montrant un cordon en cuir sous son col. Les gens qui l’observent de près ont une étrange réaction, comme un recul involontaire.
- Je n’ai rien ressenti pourtant.
- Moi non plus, il est vrai ; mais le regard de ceux qui réagissent au talisman m’est très désagréable. »


Le talisman en main, Maâra songe au tournant que vient de prendre sa vie depuis qu’ils ont partagé le rêve de la créatrice du bijou. Leurs regards se croisent, sous l’impulsion d’une pensée identique.

« Vous aussi ? demande-t-il alors, énigmatique.
- Oui,dit-elle d’un souffle soulagé de savoir que son rêve n’en était pas qu’un.»

Entre les murs de ce château séculaire, haut lieu de rémanence, Yama Zatchlas avait à nouveau pénétré leurs songes. De sa voix paisiblement rauque et nimbée de gratitude, elle les a remerciés de l’avoir délivrée de sa prison éternelle au péril de leurs vies. Un simple message, sans réponse possible de leur part.

- C’est bien pour vous. Je sais que vous souffrez de ne plus pouvoir communiquer avec les esprits. »

Un bref instant, presque imperceptible, il paraît sincèrement soulagé pour elle, presque empathique. Un instant seulement, un instant suffisant.
Aussitôt après, comme pour briser cette entente trop lourde à porter, Arken reprend ses remontrances à l’encontre de sa semi compatriote. Il le sait pourtant bien à force de la côtoyer, ses reproches quant à sa prudence traversent un esprit bien trop obtus. Ses conseils sont entendus avec politesse, ce dont elle est tout à fait capable, mais sont-ils seulement écoutés, rien n'est moins sûr.


Les heures passent ainsi, entrecoupées de discussions anodines et de traits d’humour de Sol, le conducteur, quant aux relations compliquées et conflictuelles des Messagers entre eux. Le soir venu, au coin du feu, Maâra apprend que lui et le petit berger font partis des derniers arrivés à Endor, ils habitaient un petit village presque entièrement détruit par une coulée de boue. Un événement tragique qui fait encore trembler la voix du conducteur pourtant si joyeux. Quelques survivants sont venus s’installer à Endor, du moins ceux qui n’avaient pas peur des lieux, car Kadria avait envoyé de nombreux Messagers à leur secours dès qu’elle eut senti la secousse et entendu les tremblements de la terre. Un drame, encore un, dit-il en posant sa main sur l’épaule du petit berger endormi entre eux deux.

- Et maintenant ses rumeurs mais, d’vous à moi, une guerre nous pend au nez d’puis des années.

Ne sachant quoi lui répondre quant à cette guerre-ci, Maâra le questionne sur ce qu’il sait de leur destination. Elle comprend bien vite que le nom de verrou Kendran n’est point imagé, qu’une porte en pierre immense et massive protège l’issue nord-ouest, une porte datant de l’ère des nains ; une éternité donc selon Sol. Une dense et large forêt sépare la porte des bâtiments du bourg de Luminion enfoncé au fond d’un col encaissé dont les parois même sont dites infranchissables.

- Comment quiconque espère-t-il pouvoir percer ces défenses là ? demande-t-elle en tentant difficilement de s’imaginer la scène.
- Parce que les Treize existent, gronde la voix professorale d’Arken. Sol, allez vous reposer, ajoute-t-il à l’humain qui s’éloigne en emmenant l’enfant endormi avec lui.
- Est-ce la première fois que de telles rumeurs de guerre parviennent de Luminion ? Demande une Maâra au visage fermé.
- Oui, de mon vivant en tout cas.
- Et vous les prenez vraiment au sérieux, n’est-ce pas ?

Arkan acquiesce, les yeux perdus vers le Nord. Un combattant centenaire comme lui se doit de toujours envisager le pire. Et de son expérience, il sait que le doute tue plus certainement que la prudence.

- Alors pourquoi m’envoyer seule là-bas ? Ne les ont-ils pas prises assez au sérieux à Endor ? Ont-ils suffisamment confiance dans les qualités du Duc pour que le soutien d’Endor ne soit pas nécessaire.
- Nous ne sommes pas si nombreux pour être un allié de premier choix, et ne perdez jamais de vue que nous sommes hors-la-loi de Kendra-Kar. La magie noire est interdite ici.

Elle l’observe un instant pendant qu’il continue de lui parler des relations diplomatiques au sein des Duchés ; inquisitrice et relevant mentalement qu’il n’objecte pas la mention d’être la seule en mission.

- Ils vous ont envoyé pour me surveiller n’est-ce pas ? Déduit-elle à voix haute, au grand désespoir d’Arken.
- Avez-vous seulement entendu ce que j’essaye de vous apprendre !?!
- Parfaitement. Dit-elle en se braquant à son tour. Je sais écouter et penser en même temps !

Le ton monte et descend aussitôt. Après tout, peu lui importe à lui qu’elle sache la vérité sur sa présence ici ; et peu lui importe à elle d’être seule ou accompagnée une fois là-bas ; que la guerre soit réelle ou que les rumeurs soient exagérées. Planifier n’est de toute façon pas son fort.

- Veiller, plutôt que surveiller à dire vrai, marmonne soudain Arken en brisant le silence.
- Peu importe, lâche Maâra en se relevant, on ne sait même pas vers quoi on se dirige.
- Une dernière chose, dit-il pour la retenir. Là où on va, en tout cas, vous aurez besoin de ça ...

Il lui lance sans ménagement une cape en fourrure très épaisse, au capuchon serré et ajusté, assez longue pour lui tomber sur les mollets. Il s’est souvenu qu’elle a vécu quasiment toute sa vie dans la jungle du Sud Naorien, qu’elle s’est précipitée au lendemain d’une bataille vers une destination inconnue d’elle avec ce qu’elle portait à Bouhen. Il lui explique sans la regarder que le froid qui les attend à Luminion sera intense en cette saison, et que cette cape lui sera utile pour le supporter.

- Merci Arken, dit-elle en échangeant ses capes. Je sais de source sûre ((Coucou !!)) que je ne suis pas un cadeau. A bien des égards, votre mission sera plus difficile que la mienne.

Il hausse les épaules et la laisse s’en aller se reposer. Seul au coin du feu, les yeux fixés sur l’espace vide où elle se tenait.

- J’en doute …

((suite))
Maâra _-_ Sindel _-_ Nécromancienne _-_ Maître des Runes
Ceux qui pensent que les morts appartiennent au passé, ne savent rien du futur.

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