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Deuxième Arc : L’art de faire parler la Foudre
Chapitre XLIX : Le secret du Mausolée
« Tu es sûr de toi ?
- Mais oui vas-y, on a déjà testé sans moi, mais il faut bien que je sois sûr que je suis protégé moi aussi ! »
Le soleil brillait haut dans la fraîcheur printanière de Kendra-Kâr. Les deux Oranais se trouvaient au bord du chemin et Akihiko défiait du regard Anthelia, les bras écartés. Dans un soupir, la jeune femme matérialisa un obus de flammes au-dessus d’elle. Elle hésita avant d’exprimer une dernière fois ses inquiétudes.
« Tu as bien le sucre d’orge ? »
Pour toute réponse, Akihiko lui montra la sucrerie régénératrice qu’il gardait sur lui. Un dernier soupir précéda l’envol de la sphère de feu avant qu’elle ne s’écrase violemment… Sur Akihiko. L’explosion de flammes de plusieurs mètres de diamètre carbonisa instantanément l’herbe et la tatoueuse ne put réprimer un cri de surprise, avant qu’un rire ne s’échappe du brasier.
« Ahah ! Ca marche ! »
Émergeant des flammes, l’enchanteur apparut complètement intact, sans la moindre flammèche ni brûlure sur lui. Un sourire presque enfantin barrait son visage alors qu’il rejoignait la jeune femme qui essayait tant bien que mal d’arrêter les battements frénétiques de son cœur.
« Tu vois ? Je t’avais dit que ça marcherait ! déclara Akihiko avant de recevoir un coup de poing sur l’épaule.
- Pfff, et il fallait bien entendu que tu t’empresses de tester ton nouveau manteau.
- Évidemment, sinon comment être sûr de ses propriétés ? Bon, j'ai eu un peu chaud parce que ça ne doit pas protéger de la chaleur pour autant, mais je ne vais pas faire la fine bouche.
- Tu aurais pu demander à quelqu’un d’autre que moi, crétin ! »
Le dépassant d’un pas contrarié, Anthelia se dirigea vers l’immense bâtiment qu’ils voyaient déjà après une heure de marche. Akihiko la rattrapa et l’enserra dans ses bras par-derrière, la forçant à s’arrêter.
« Je te l’ai demandé parce que je te fais confiance, tu le sais bien. »
Elle grogna pour toute réponse, mais ce dernier s’étouffa bien vite quand son amant d’enchanteur déposa un long baiser sur sa joue, en guise de pardon. Finalement, ils repartirent tout deux d’un bon pas, clôturant l’événement sur une réussite. En marchant, Akihiko ne put s’empêcher de jeter un œil aux quatre symboles runiques rougeoyants à l’intérieur du col de son manteau.
Ba – Dai – Aov – Ni.
L’incrustation de la veille avait marché au-delà de ses espérances. La phrase runique avait parfaitement ignifugé le manteau, qui non seulement résistait au feu, mais prêtait également ses propriétés à Akihiko tant qu’il le portait. C’est ainsi qu’il put encaisser sans le moindre mal l’obus enflammé d’Anthelia, après plusieurs essais sur le vêtement seul. Extrêmement satisfait de ces résultats, Akihiko et Anthelia avaient quitté le vieux Moboutou pour rejoindre le temple de Gaïa où le guérisseur qui l’avait soigné quelques jours plus tôt le regarda arriver avec un air navré avant de s’occuper de terminer de soigner leurs blessures, bien stabilisées par les soins du guérisseur de guerre. Akihiko le remercia une nouvelle fois de plus en déposant un don au temple, puis ils étaient ensuite rentrés dans leur auberge où ils avaient pris le temps de manger, discuter, tatouer et dormir en toute quiétude. La dernière activité avait été évidemment la plus appréciée puisque faite ensemble, mais Akihiko avait passé un temps considérable à s’entraîner également, munis de ses nouvelles aiguilles qui suscitaient de la jalousie chez la jeune femme, bien malgré elle. Et c’est donc après un long moment de repos qu’ils se remirent en route, cette fois-ci vers le Mausolée des Valeureux.
Peu avant midi, ils arrivèrent devant le parvis de marbre massif qui menaient à un pont colossal : le Pont des Statues. Qui n’avait pas usurpé son nom, puisque de gigantesques statues de pierre encadraient de part et d’autre le pont, à intervalles réguliers. Toutes, sans exceptions, représentaient un soldat armé de différentes armes, allant de la lance à l’épée en passant par la hallebarde. Chaque statue avait une posture digne, le visage du soldat, visible derrière son heaume, regardait dans le lointain en agrippant fermement la garde de son arme à la ceinture ou tendue au-dessus du tablier du pont pour les armes de hast. Et, au pied de chacune de ces silhouettes de pierre, un garde portant la même arme que son homonyme de pierre surveillait les allés et venus des passants.
Et il devait bien y avoir une trentaine de statues sur ce pont enjambant le fleuve, et donc tout autant de soldats. En foulant le pont, Akihiko sentit instantanément les regards de plusieurs d’entre eux se braquer sur lui. Avec un tel équipement, difficile de passer inaperçu devant des gardes. À leurs poses et leurs infimes mouvements de poignets pour se préparer à frapper, l’enchanteur sut immédiatement qu’il n’avait pas à faire à de la bleusaille : la couronne Kendrane ne lésinait pas sur la sécurité du tombeau de ses plus illustres représentants. Akihiko estimait qu’il pourrait en affronter un voire peut-être deux, mais qu’il ne ferait pas long feu. De plus, Amy lui indiqua que plusieurs d’entre eux maîtrisaient en sus des fluides. Aucun n’était un magicien accompli, mais dans leur métier, nul besoin de connaître une pléthore de sorts.
Akihiko progressa en compagnie d’Anthelia sur le pont, ne montrant aucun signe d’hostilité ou de volonté de troubler l’atmosphère du pont. Peu à peu, les gardes se détendirent et cessèrent de le surveiller directement, se contentant de le garder dans leur champ de vision tout le long de sa traversée. Il fallait dire qu’il n’était pas très difficile de les louper : peu de civils se trouvaient sur le pont. Les nouvelles de Luminion, parvenue la veille dans la soirée, avaient tôt fait de doucher les envies des kendrans : Luminion était presque tombée sous l’assaut de l’armée d’Omyre, mais n’avait dû son salut qu’à l’intervention inattendue de l’armée thorkine de Mertar. On murmurait même que les Thorkins, non content de libérer Luminion au bord de sombrer, revendiquaient comme leur possession le duché. Rien n’était encore sûr et les rumeurs allaient bon train, mais tout cela participait à l’humeur morose des habitants, qui étaient par conséquent moins désireux de visiter le Mausolée.
Du moins, c’était ce que supposait Anthelia et jusqu’à présent, rien n’avait démenti ses hypothèses, comme les visages particulièrement fermés de tous les militaires qu’ils avaient rencontré depuis le début de la journée. Alors, à part quelque rares badauds et un petit groupe de SInaris qui se trouvait curieusement là, c’était essentiellement les hommes engoncés dans leurs armures rutilantes azur et blanche qui leur tenaient compagnie. Le pont franchi, ils arrivèrent devant les imposantes doubles portes de bois massifs entièrement blanches en cheveu de Gaïa. Là aussi, plusieurs gardes étaient postés à l’entrée, contrôlant d’un œil sévère les personnes entrant et sortant du Mausolée. Ils jetèrent un œil à Akihiko, son équipement, puis le laissèrent entrer en le déconseillant bien de faire quoi que ce soit de profanatoire, ce que Akihiko s’empressa de confirmer. Il était certes venu à la recherche des bottes de Foudre, mais s'il devait pour cela fracturer le cercueil de Silverberg ou Trish Jiila, il renoncerait instantanément à cette entreprise.
(Bien que je doute que ce soit le cas.) pensa Akihiko alors qu’il pénétrait dans le premier étage du bâtiment, qui n’était qu’une seule et immense pièce circulaire extrêmement vaste. Le long des parois, d’innombrables cercueils de pierre, recouverts d’une statue de métal plus ou moins rares représentants les rois s’étant succédés sur le trône, étaient installés les uns à côté des autres. Bien évidemment, aucun nom ne parlait à Akihiko, et il se contentait d’observer les visages des rois qui avaient dirigé le pays. Certains morts à un âge avancés, d’autres au sommet de leur gloire et dans la fleur de l’âge. Disposés en arc de cercle, les cercueils occupaient une bonne moitié de la bordure de la pièce.
(A ton avis, quand ils auront fait le tour, comment vont-ils faire pour les suivants ?)
(Ah ça, je le sais : dans le futur, les architectes ont bâti une coursive au-dessus, pour permettre de loger plus de tombes. Pour économiser la place et donner un peu plus d’impact, ils ont également décidé de murer les dépouilles et de relever les gisants pour en faire des statues.)
Akihiko se contenta de hocher la tête : il ne s’attendait pas à une réponse aussi précise et n’en avait pas besoin, mais c’était toujours intéressant à savoir. Ne s’attardant pas dans la salle, il suivit Anthelia dans un large escalier en hélice les menant à l’étage inférieur. Dans ce même escalier, ils croisèrent une patrouille de gardes qui remontaient. Ils leur accordèrent un simple regard avant de poursuivre leur ronde, imperturbable. Akihiko ne put s’empêcher de soupirer : quoi qu’il allait faire près de la tombe de Trish Jiila, il allait devoir composer avec les troupes de soldats qui allaient et venaient dans Mausolée.
Une fois arrivés en bas, dans une petite pièce carrée, dallée de marbre et éclairée par un large lustre de San-Divyna, Anthelia lui expliqua l’organisation de la pièce.
« Nous voilà dans l’antichambre des Valeureux et comme tu peux le voir, trois entrées s’offrent à nous. À gauche, le Mausolée des Guerriers où reposent les plus illustres combattants Kendrans, qu’on enterre avec armes et armures. Nul doute que la tombe de Porem s’y trouve.
- Et donc, peut-être les bottes ?
- Peut-être, mais il faudrait réussir à forcer son cercueil de pierre, et crois moi ils sont bien plus protégés que tu ne le crois.
- Des enchantements magiques, hein ? Je les ais ressentis vaguement près des cercueils des rois. Ca avait l’air bien costaud.
- Certes. Ensuite, en face de nous, le Mausolée des Sages. Là, on y trouve les prêtres, diplomates et autres intellectuels qui ont contribués à l’essor du Royaume. L’enchanteur Silverberg s’y trouve s’il a été enterré au Mausolée. Enfin la troisième entrée, le Mausolée des Artistes et bon, nul besoin de t’expliquer qui y ont enterrés. La tailleuse Trish se trouve dans cette partie.
- Allons-y donc. »
Leurs pas claquèrent sur les dalles de pierre quand ils entrèrent dans le troisième Mausolée. Là, la présence était très réduite : peu de personnes semblaient s’intéresser à l’art en ce jour-là. La structure de la pièce était radicalement différente de celle plus haut : au lieu d’avoir une vaste salle circulaire, on avait un long couloir ouvert à de nombreuses reprises sur les côtés en autant d’alcôves. Dans chacune d’elle, une tombe à demi enfoncée, une statue la surplombant et un objet y trônait. Chaque objet était une réplique ou parfois un original représentant une des œuvres majeures de l’artiste. Un peintre célèbre, dont la statue représentait un homme petit, à la moustache soignée et équipé d’un pinceau, penchait son regard strict en biais sur la droite, en direction d’un grand tableau d’une femme porteuse d’un mystérieux sourire. L’alcôve suivante abritait elle semblait-il un musicien, dont la statue était figée dans un dernier mouvement de luth et où l’instrument était un vrai et non de pierre.
(Sûrement le luth que ce… Jamie Endriss utilisait de son vivant.)
Les premières statues étaient, malgré le soin évident apporté par les personnes en charge du lieu, quelque peu abîmées par le temps. Plus on s’enfonçait dans le couloir et plus on s’approchait d’artistes morts récemment. Selon les dires d’Anthelia, le bâtiment avait presque mille ans : ce qui faisait que pour chercher la tombe de Trish, il fallait au moins s’avancer pour dépasser la moitié des statues. Akihiko passa donc devant nombre d’alcôves en jetant des coups d’œil autant à sa gauche qu’à sa droite, à la recherche tout d’abord d’une statue de femme. Si c’en n’était pas une, il passait directement à la suivante. Dans le cas contraire, il s’arrêtait un instant pour lire la plaque sur la tombe, à la recherche du nom de la tatoueuse.
Au bout de quelques minutes de recherche dans un silence presque religieux à n’avoir croisé qu’un seul et unique kendran en pleine méditation devant la statue d’un peintre, ils trouvèrent enfin la sépulture de la tailleuse. La statue qui la surplombait montrait une femme étonnement jeune, aux cheveux courts et au visage doux. Dans ses mains, elle tenait une longue aiguille et une bobine de fil, symboles incontestables de sa profession. Mais là où les autres artistes semblaient plus statiques, solennels, cette dernière avait une posture dynamique, comme si elle s’élançait en avant dans les plis de sa robe rocheuse flottant dans un vent invisible. Sur la plaque enchâssée dans le granit rosé de son cercueil, on pouvait lire :
« Trish Jiila.
Tailleuse de génie,
Créatrice des Bottes de foudre,
Emportée par la maladie,
Au sommet de son art de coudre. »
« Sa mort prématurée est peut-être la raison de cette statue… Elle a disparu en plein élan de son art, au sommet de sa gloire.
- Quelle tristesse. »
Comme tous les autres artistes, Trish Jiila reposait à côté d’un de ses chefs d’œuvres, qui n’était autres que les Bottes, ou du moins une des paires qui ne furent jamais enchantées comme celles en possession de Lilo. Akihiko s’en assura en essayant de détecter un quelconque enchantement à travers la paroi de verre épais qui protégeait la relique et n’en trouva évidemment aucun. Une patrouille de gardes passa à proximité à ce moment-là, remonta jusqu’au bout le couloir avant de revenir sur leurs pas, attentifs à toute activité qui aurait pu être suspecte. S'ils s’attardèrent quelque peu sur l’unique duo de la salle, un simple et innocent sourire de la jeune femme sembla les satisfaire et ils continuèrent leur ronde. Quoi qu’il devait trouver ici, il allait devoir le faire entre deux passages de la patrouille. Il se mit donc à compter, patiemment, tout en faisant mine d’observer tel tableau, tel manuscrit, telle statue. Au bout de ce qui lui sembla être une quinzaine de minutes, il entendit de nouveau les claquements des bottes sur cloutées et renforcées sur les dalles de granit. La troupe armée repassa puis s’en alla de nouveau. Un quart d’heure était donc la limite qu’il avait pour trouver quelque chose.
Sa première action, une fois les gardes disparus, fut de placer sa main sur le cercueil de pierre. Il ferma les yeux et se concentra pour en analyser les fluides et tenter de sonder l’intérieur, à la recherche d’une éventuelle trace des artefacts. Cependant, l’enchantement qui scellait le cercueil de pierre était très puissant, si bien qu’il parasitait toute tentative d’inspection de son contenu.
(Pas bien grave, on cherche un tunnel sous cette tombe.)
(peut-être faut-il passer par l’intérieur du cercueil ?) supposa Amy.
(Et donc sur le dernier lieu de repos de celle qu’il aimait ? Non, l’enchanteur Silverberg voulait que quelqu’un "de digne" puisse récupérer ces bottes. Jamais il n’aurait mis le moyen d’accès par là. Il doit y avoir un autre moyen.)
Akihiko murmura donc à l’oreille d’Anthelia de l’aider à trouver un quelconque mécanisme, une trappe, une porte dérobée, n’importe quoi qui pourrait dissimuler un passage vers le fameux tunnel. Chacun de leur côté, les tatoueurs commencèrent à inspecter minutieusement la statue, les gravures courant le long du cercueil, les parois de l’alcôve. Sans succès. La statue ne portait aucune aspérité suspecte, les gravures, aucune moulure louche, pas plus que les parois ne comportaient de pierre anormale. Les dalles, elles aussi, étaient toutes semblables. Les soldats choisirent ce moment pour venir et les Ynoriens s’empressèrent de s’éloigner pour se faire face, comme s'ils étaient en pleine discussion. Ce qui n’était pas tout à fait faux.
« Tu n’as rien trouvé toi ?
- Rien. La statue n’a rien donné.
- Rien du côté du cercueil ni des parois non plus.
- Et si tu utilisais ton truc ? Tu sais, ton pouvoir qui t’as permis de trouver le mécanisme au manoir. »
Akihiko se frappa le front d’hébétement. Comment pouvait-il ne pas y avoir pensé plus tôt ?! Embrassant avec plaisir la jeune femme pour son idée brillante, il ferma de nouveau les yeux une fois les soldats partis. Il eu alors deux plaisantes surprises : la première, c’est qu’il sentait que ses sens, sa maîtrise de ses fluides, s’étaient de nouveau améliorés. Il percevait avec plus de distinction et dans une zone plus grande toutes les traces de métaux basiques. La seconde, c’est qu’Anthelia avait raison : il y avait bien quelque chose de suspect, un mécanisme. Juste derrière la statue, une dalle était dotée d’un fond pour le moins étrange : non seulement, il percevait quelque chose qui ressemblait pour le moins à une échelle, mais aussi quatre tiges métalliques qui s’enfonçaient chacune dans une des dalles adjacentes, verrouillant ainsi solidement la dalle pour qu’on ne puisse pas la déloger par la force aisément. Le fulguromancien s’accroupit et rapprocha sa main de la dalle pour lui donner une analyse plus précise de ces barres d’acier. La main balaya lentement la pierre, la touchant presque pendant que les fluides de foudre tourbillonnaient au creux de sa paume, projetant des vagues de magnétisme dans l’attente des réponses du métal, quelques centimètres plus bas. L’enchanteur se fit rapidement à l’idée que si l’échelle se trouvait en dessous, c’est qu’il y avait bien un moyen de déloger la pierre.
(Silverberg était un fulguromancien, comme moi. Il a sûrement bloqué l’issu comme un manipulateur de foudre le ferait.)
L’Ynorien se mit donc à réfléchir. Qu’avait bien voulu faire Silverberg en plaçant les barres métalliques de cette façon ? Ancrer et souder les dalles ensemble, bien entendu. Mais si la dalle pouvait s’arrimer à ces voisines, il était possible également de l’en décrocher et donc les barres, d’une manière ou d’une autre, ne plus bloquer la trappe. Or… Le métal, c’était ce que pouvait faire bouger à distance un fulguromancien. Akihiko n’était pas sûr de pouvoir faire bouger des tiges d’acier qu’il ne voyait pas et ne faisait que ressentir ; il essaya tout de même car il n’avait guère d’autre choix. L’index et le majeur tendu, il pointa de ces deux doigts l’extrémité d’une des tiges et lentement, déplaça sa main dans le but de libérer la trappe. Ce qui ne fonctionna pas, la tige rencontrant rapidement une résistance qu’elle ne pouvait pas franchir. En fronçant les sourcils, l’enchanteur fit parcourir le chemin inverse à ses doigts et au contraire, tenta de faire intégrer complètement la tige dans la trappe rocheuse. Ce chemin, malgré le crissement étouffé de l’acier contre la roche, s’avéra être le bon. Une des quatre barres ne retenait plus la dalle.
Akihiko releva la tête vers Anthelia, qui s’occupait elle de monter la garde tout en lui jetant de temps en temps des coups d’œil, s’assurant que tout se passait bien.
« J’ai trouvé le moyen d’ouvrir la trappe, expliqua-t-il à voix basse à la jeune femme.
- Bien joué. Dépêche-toi, il ne nous reste que quelques minutes avant le retour de la patrouille. » répondit d’une voix douce et tout aussi bas Anthelia.
Akihiko se mit donc à l’œuvre et une à une, les barres d’acier coulissèrent vers le centre de la dalle, la désolidarisant des autres. Cependant, aucune poignée, aucun trou ou aspérité quelconque ne permettait de soulever la lourde dalle. Qu’à cela ne tienne : Akihiko se mit en position accroupie paume vers la dalle et convoqua de nouveau ses fluides pour attirer à lui les tiges d’acier, prisonnières de la roche. Dans un nouveau crissement accompagné d’un craquement, la dalle de pierre, soulevée par l’attraction que Akihiko exerçait sur l’acier, se déchaussa et dévoila enfin un trou circulaire à peine moins large que la dalle.
« Theli… Vite ! L’échelle ! »
La concernée le rejoignit vite d’un mouvement félin, alluma une petite flamme dans sa main et se glissa dans le trou obscur, ouvrant la voie. Akihiko lui emboîta le pas tout en manipulant toujours la dalle. Des gouttes de sueurs commençaient à perler sur son front, la rune devant avoisiner le poids de ce que ses pouvoirs lui permettaient de déplacer. Avec minutie, il replaça lentement la dalle au-dessus de sa tête, enfermant les deux amants dans les entrailles du Mausolée, dans une zone que nul ne connaissait : à partir de maintenant, ils allaient devoir se débrouiller réellement seuls.
C’est donc après avoir brièvement reprit son souffle que Akihiko entama sa descente, dans l’obscurité faiblement dispersée par la flamme, solitaire, de la tatoueuse qui l’attendait en bas.