IX 8 La volonté des vivants.
IX 9 Le mage, l'elfe et la bête.
"Hey ! Tu fais quoi toi ?"
L’exclamation résonne en moi et génère un long frisson au fur et à mesure que les pas se rapprochent. Vu la vitesse, il a l’air assez mécontent.
(Que faire ?)
Que faire à présent ? Là est toute la question. J’ai attiré l’attention d’une brute capable de lancer des corps comme s’ils ne pesaient rien. Au-dehors, j’entends les gardes qui se battent. Or lui reste ici, à massacrer des blessés. Que puis-je en déduire ? Qu’il a toute confiance en ses camarades dehors pour finir le travail, ou qu’il a une position autoritaire telle que nul n’ose l’empêcher de faire ce que bon lui semble et d’assouvir ce plaisir morbide qu’il a montré il y a peu. De ce que je sais de mon séjour à Omyre, la seconde hypothèse parait la pus probable. Donc j’ai une brute crainte des siens et à mes côtés, un elfe revenu à la vie, mais ses nombreuses blessures et notamment celle au torse qui a mis fin à sa vie reste particulièrement grave. Hélas, je n’ai pas le temps de le soigner pour qu’il me vienne en aide et si je le fais, l’autre bute va me massacrer.
(Mon sucre d’orge !)
Parmi tous mes objets, mon sucre d’orge me permet de le soigner entièrement et sans que je fasse quoi que ce soit. Mais il faut du temps pour faire effet. Je fouille rapidement dans le sac de l’elfe, avec difficulté à cause de mes menottes et enfourne de force le dernier morceau magique, avant qu’une prise ferme ne me soulève avec brutalité.
"Mais t’es qui toi ?" Grogne-t-il.
De plus près, le Garzock est encore plus laid que je l’imaginais et aussi plus musclé. Des cicatrices sur le visage à n’en plus finir et surtout, surtout, une haleine à réveiller les morts.
"Un prisonnier à la recherche du jeu de clefs !" Dis-je en montrant mes mains menottées.
"C’est cette pourriture d’elfe qui l'a !"
"Mais, il est encore en vie celui-là ?" Constate-t-il en examinant sa victime.
(Ha merde ! Tant pis. Jouons-la au culot !)
"Evidemment ! Je l’ai ramené à la vie. Je vais pas lui laisser ce plaisir de mourir alors que je peux lui faire endurer plusieurs fois une mort douloureuse !" Fais-je avec autant d’assurance que possible.
Le Garzock me détaille du regard avant de lâcher d’un rira franc et particulièrement bruyant à m’en faire saigner les oreilles si près de moi.
"Hahaha. Tu me plais le noir ! Ramène-le à la vie autant de fois que possible." Déclare-t-il avec une lueur sanglante dans les yeux en posant son regard sur le malheureux revenu d’entre les morts.
(Non ! S’il meurt, il n’y aura plus assez de sucre d’orge pour le soigner.)
"J’ai une condition !" Dis-je alors que je suis toujours maintenu dans les airs par une seule et même main.
"QUOI ? Tu oses marchander avec moi gringalet ?" S’offusque-t-il.
Malgré la peur qui m’étreint en ce moment, je tâche de garder mon sang-froid pour répliquer.
"Sans moi tu ne pourras pas le tuer autant. Laisse-moi le plaisir de le voir souffrir de mes propres mains pour sa prochaine mort."
"Mmm, entendu. Mais fais vite !" S’impatiente-t-il en me lâchant au sol.
"Juste le temps de me libérer de ces menottes. Il doit avoir les clefs dans…" Dis-je avant de me faire interrompre par ses deux grosses paluches et que d’un coup sec, il brise mes liens comme s’il ne s’agissait que d’un bois mort et bien sec.
Voilà la brute que je dois affronter pour sauver cet elfe. Non. Pour tous les sauver. Bon sang. Pourquoi suis-je venu dans un tel endroit ? Jouer le temps, il me faut jouer le temps ! Je regarde l’elfe au sol, remarquant que certaines blessures commencent à se refermer. Si j’ai eu peur qu’il recrache le morceau de sucre, maintenant je crains que l’effet magique ne soit trop visible.
"Tu comptes le tuer avec ton regard le noir ? Aller dépêche-toi !" S’impatiente encore le Gazrock.
Bon sang, comment l’occuper le temps que l’effet se termine ? Mais il est clairement guidé par ses pulsions meurtrières et visiblement, il parait faible face aux émotions fortes comme la colère, la frustration ou l’impatience. Il faudrait que je détourne son attention sur une autre cible, porter sa colère ailleurs ! Sauf que je ne sais pas où, sur qui, si ce n’est moi-même en provoquant un affrontement. Vais-je le vaincre ? Vais-je même survivre assez longtemps ? Je me baisse pour cacher les blessures légères qui se referment en premières et mon regard se pose sur une des épées de l’Hinïon. Je doute qu’elle possède le même caractère magique que la mienne, mais c’est toujours mieux que rien. Je pose ma main sur celle-ci et me redresse tout en la tenant fermement. Intérieurement, je fais le tour de tous mes sorts connus et visualise ceux qui me seront les plus utiles.
"Ca viens oui ?" Hurle-t-il près de mes oreilles.
Je n’ai plus le temps à perdre. Les blessures ne sont pas refermées, l’elfe est encore dans un sale état. Dégainant la lame face à moi et la pointant en direction de l’Hinïon, je rassemble mon mana, laisse mes fluides de terre guider le reste et canalise ma magie pour générer un pilier de terre qui vient percuter le Gazrock avant qu’il ne comprenne ce qui lui arrive. La brute est projetée en arrière dans la tente dans un grognement de surprise. Il va me falloir rapidement enchaîner. Encaissant mon sort, je me dépêche de me saisir d’une potion de mana dans le sac de l’elfe blanc. Je génère ensuite une armure de pierre sur moi, sachant que les représailles vont être brutales et vide le contenue de la potion. Celle-ci est particulièrement puissante et me permet de récupérer l’intégralité de mes réserves magiques.
"TOI ! TU VAS ME LE PAYER !" Crie-t-il d’une colère qui me prend aux tripes pendant qu’il se relève, aidé par une masse des plus imposantes.
Un amalgame de pierre entoure l’intégralité de mon corps, offrant une bonne résistance aux coups en échange d’une légère difficulté dans mes mouvements. Dans un hurlement de rage, le Garzock charge avec son énorme masse levée, prête à m’enfoncer dans le sol. Je n’ai que le temps de canaliser mes fluides de lumière, attendant le dernier moment pour user ma magie. Dans un flash éblouissant, ma magie se déploie et vient aveugler mon adversaire qui, une main sur ses yeux, continue pourtant sa course. Encore au niveau de l’Hinïon, je me baisse rapidement pour diminuer le choc à venir, en vain. La force du colosse est telle que même en offrant le moins de surface à percuter, ses jambes me percutent dans sa course et nous volons tous deux en dehors de la tente, déchirant la toile. Malgré ma protection, je suis sonné. Encore heureux que je n’ai pas été frappé par sa masse.
Lorsque je me relève la tête encore confuse, un énorme boum boum m’alerte qui ne s’arrête pas. Pire, le bruit devient de plus en plus fort. Le Garzock vient sur moi, comme une charge de rhox colérique, mais en moins amicale encore. De nouveau, je rassemble ma magie pour éblouir le mastodonte. En vain. Je n’ai pas le temps de comprendre ce qui m’a fait défaut, qu’un coup de massue m’envoie voler à plusieurs mètres de là. Le choc est rude, l’arrêt sur un tronc d’arbre résistant l’est tout autant. L’air dans mes poumons s’est quasiment échappé jusqu’à la dernière parcelle, laissant place à un flot de sang dans ma bouche, une réelle difficulté à respirer et ça, avec ma protection de pierre plus résistante qu’une armure lourde.
(Heureusement que je l’ai car sans elle je…)
Justement, le mana qui alimente ma protection s’est tari et les morceaux de pierre se disloquent les uns des autres avant de se désagréger complètement. Néanmoins, je peux respirer un peu plus aisément. J’ai un mal de chien à la poitrine et chaque respiration me fait davantage souffrir. Ce que j’ai besoin pour l’instant, c’est de soin. J’use de mes pouvoirs pour alimenter ma magie de soin, guidée par mes fluides de lumières. Sans ma capacité à mélanger mes fluides, je n’aurais jamais été en mesure de produire autant de magie de lumière aussi puissante. Hélas, j’en suis à court et sans une seule fraction, impossible de me soigner ou d’éblouir mes ennemis.
En me relevant, j’aperçois un geste particulièrement alarmant. Plutôt que de me foncer dessus encore, le monstre de muscle arme son bras pour un lancer. Si son arme m’atteint, je vais finir en purée sanguinolente. D’un bond sur le côté, j’évite son coup qui pulvérise l’arbre sur lequel j’étais quelques instants plus tôt.
(Allez Nhaundar ressaisi-toi ! C’est le moment de contre attaquer)
Mon adversaire est à présent sans arme et ne sais pas quels éléments sont à ma disposition. Je me relève avant de lancer une boule de feu surpuissante. Celle-ci fonce droit sur ma cible et… la manque de peu, brûlant au mieux quelques cheveux. J’ai manqué mon coup. Pire encore, je viens seulement de constater que je n’ai plus de ressources magiques en moi et aucune potion de mana à disposition. La fin est proche. Déjà qu’avec ma magie ce n’était pas gagné, faire sans relève du miracle. Si seulement j’avais enchanté mes propres équipements.
(Mais…c’est le cas ! J’ai toujours mes sorts d’avant mon arrivée au Nosvéris ! Lesquels étaient-ce ?)
La chance me sourit. Sur les trois objets en ma possession encore à disposition, deux sont dotés du sort pour recouvrir mes forces magiques. Mais je doute que le Garzock me laisse le temps de le faire. Il parcourt la distance qui nous sépare, tandis que j’use de l’enchantement contenu dans mes gants. Contrairement aux autres éléments magiques, la psychomancie est beaucoup moins visible. S’attaquant aux plus profondes pensées cachées de ma cible, le sort de mes gants l’empêche de se concentrer, inhibant pendant quelques instants sa capacité à user de ses talents martiaux. Alors qu’il armait une charge d’épaule, il manque son attaque et me loupe de peu. Sans attendre, j’use de mon sort de mes braies pour rassembler mes ressources, mais la haine qui émane du monstre m’empêche de correctement user de ma magie. Sans elle, je n’ai aucune défense. Alors qu’il ramasse sa masse avec fureur, j’use du dernier sort enchanté présent sur mon chapeau et me focalise entièrement dessus. Ma magie se régénère et l’instabilité physique qui émane de mon corps trouble le Garzock qui manque son coup.
(Je ne suis pas sûr de pouvoir le battre en une frappe. J’ai donc absolument besoin d’augmenter la distance qui nous sépare !)
Tandis qu’il arme de nouveau son bras, je monopolise ma magie pour engendrer une colonne de terre. Et plutôt que de l’utiliser pour le frapper, c’est moi qui en suis la cible. Le sort me repousse fortement en arrière écopant d’un gros bleu à l’abdomen, mais me permet d’éviter un coup de masse mortel à la tête. Je lance une première boule de feu en représailles qui touche à la jambe, engendrant une grosse brûlure et un grognement de mécontentement durant sa charge qui devient titubante. Je recommence à être à court de mana, mais le but est proche à le voir souffrir à chaque pas. Une nouvelle colonne de terre vient le percuter pour le faire choir…elle finit pulvérisée par sa masse qui s’abat dessus avec rage. Ce qu’il me reste de mana, je dois le garder pour le regagner mes réserves magiques. Faisant le point, il me reste la moitié de mes capacités de lumière et une dernière parcelle de feu. Plus de protection n’est envisageable et face à un buffle pareil, j’opte pour une retraite stratégique, jouant sur sa mobilité actuellement réduite.
Je lui fais donc faux bond et choisi le chemin qui m’éloignera le plus de lui le plus efficacement possible. J’entends sa rage derrière-moi et jetant un regard en arrière, je le vois peiné à me suivre. Un peu plus et j’aurais une distance de sécurité nécessaire pour user de ma magie. Un peu plus et je pourrais regagner mes ressources. Un peu plus et je pourrais en finir avec ce combat. Sauf qu’un bruit derrière moi m’alerte. Celui d’une arme lourde qu’on lance avec rage et détermination, qu’un bref coup d’œil me confirme.
(Et merde.)
J’avais oublié qu’il savait lancer son arme en cas de besoin et c’est trop tard que je me rends compte de ma méprise. Sa masse s’abat sur mes jambes et me fait chuter en avant, la tête frappant le sol à m’en faire perdre connaissance. Lorsque j’ouvre les yeux, le Garzock est là, haletant. Il ramasse sa masse et me fixe d’un regard empli de haine et de cruauté, prêt à déverser tout le désagrément que je lui ai fait subir avec dommage et intérêt. Il lève son bras armé au-dessus de sa tête. Je tente le tout pour le tout et lance une boule de feu avec tout ce qu’il me reste. Le feu lui dévore le torse, brûlant ses vêtements et éclairant un visage qui bronche à peine. Voilà mes derniers instants, ma dernière vision. Celle d’un Garzock trop dangereux pour moi, animé par une haine féroce et un visage cauchemardesque. Il s’apprête à frapper qu’une ombre passe et avec elle, un éclair de lumière traçant un arc de cercle qui le fend à la jambe déjà affaiblie. Puis une tignasse aux longs cheveux blonds passe sous son bras et lui assène un coup de son bouclier. Surpris par cet assaut, sonné par la frappe en plein visage, mon adversaire prend de plein fouet une vague d’eau sortie de nulle part et se fait envoyer bouler quelques mètres plus loin. Plutôt que d’aller en finir avec lui, il revient vers moi.
C’est l’Hinïon. Mon garde geôlier personnel qui scrutait mes moindres mouvements pour prémunir une fuite. Le même qui a préféré me voir mort plutôt que de me rendre utile. Il me regarde et m’examine brièvement.
"Tiens, bois ça !" Dit-il en me tendant une fiole.
"Je peux soigner ta tête, mais je peux rien pour tes jambes !"
Le contenu d’une autre fiole se vide et un filet d’eau se déverse sur ma tête, rendant mes idées plus claires. Je suis ses instructions et bois la potion, recouvrant toutes mes réserves magiques.
"Il en reste encore ?" Fais-je alors que je soigne mes jambes, résorbant à blessure à une simple ecchymose.
"Non. C'était ma dernière et je n’ai plus de mana." Répond-il.
Sa réponse, même si elle ne me redonne pas autant de satisfaction que je l’aurais voulu, me démontre la générosité de cet elfe. Il ne m’apprécie pas, voir il exècre les Shaakts. Pourtant, il vient de rendre une ressource précieuse à un elfe noir.
"Non seulement tu as tenu face à lui, mais tu l’as même affaibli. Impressionnant !" Dit-il, gonflant mon ego.
"C’est un monstre infatigable, pourtant c’est seulement ainsi qu’on aura sa peau. Tu as quelque chose en stock pour l’affaiblir davantage ?" Enchaîne-t-il, en me crevant ce même ego.
"Je peux tenter le sort d’affaiblissement auquel j’ai eu droit !" Fais-je, confiant dans mes capacités.
"J’en doute." Réplique-t-il sans animosité.
"Ce sort ne fonctionne pas sur des équipements renforcés magiquement et il en a. ! Il faudra trouver autre chose."
(Des renforcements magiques ? Qu'est-ce ? Passons, nous verrons plus tard.)
"Dans ce cas, je peux perturber ses sens. Cela l’affaiblira énormément dans ses mouvements."
"Alors c’est parti !" Clame-t-il, usant soudainement de ses bracelets, ou plutôt de l’enchantement présent.
Des fluctuations perceptibles pour les utilisateurs de fluide envahi la zone et atteint mes facultés magiques pour en faciliter l’usage. Il vient d’utiliser un des nombreux sorts incrusté par enchantement de ces derniers jours. Un sort qui, pour être efficace, nécessite de considérer les bénéficiaires positif du sort comme des alliés. Ainsi, l’elfe blanc me considère à présent en tant que tel. Après tous ces jours, passés de criminel à prisonnier et enfin esclave à une tâche harassante, le voile de son mépris pour moi vient de se déchirer.
Pour répondre à ses attentes et à cette confiance, je me plonge plus que jamais dans ma magie. Aidé par les pulsations magiques, je commence par amoindrir les sens du Garzock. Celui-ci exécute des gestes grossiers et se fait malmener par l’elfe. Malgré cela il tient bon, démontrant une résistance naturelle hors norme. Dans ce cas, je vais accroître notre avantage en usant d’un autre atout. J’use de ma psychomancie pour tromper son esprit et lui faire croire à une terrible blessure à la jambe.
Et je le sens. Cette facilité incroyable qu’a ma magie à percer les défenses mentales de ma cible. Ma maîtrise de la magie, couplée aux vagues psychiques générées par le bracelet et enfin, la désorientation qui achève totalement ses dernières barrières. Un tsunami déferlant sur une cabane en bois fabriquée à la va-vite. Telle est l’impression que j’ai lorsque mon sort file sur ma cible avec une efficacité terrifiante. Surpris par la blessure inattendue, il manque son coup, perd l’équilibre et offre la possibilité à l’Hinion et répliquer avec aisance. Une entaille se crée sur le torse, provoquant une colère assourdissante. Je vois qu’il a compris que la blessure n’était qu’un fruit de son imagination, né d’une magie que j’use avec facilité en retrait de la joute entre les deux guerriers.
Je le vois réfléchir. Bien que peiné par le sort qui l’accable, il cherche à trouver une parade. Je le vois et pour l’avoir combattu, je sais déjà ce qu’il s’apprête à faire. De nouveau, j’use de ma magie pour pénétrer son esprit et faire croire à une autre blessure à son bras armé, l’empêchant de lancer sa masse. Encore une fois, mon sort fonctionne et son bras qui devait projeter son arme sur moi faibli, offrant une nouvelle occasion à l’elfe blanc de faire couler le sang de ce monstre infatigable.
Bientôt, mon sort ne fonctionnera plus. Je vais devoir le réitérer à son maximum. Cependant, rien n’est jamais certain. Il y a toujours des facteurs extérieurs qui peuvent empêcher son usage, nous laissant démuni. Si je rate mes sorts ou si l’elfe cède, nous échouerons tous deux. Si seulement mes sorts avaient plus d’impact.
"Quels sont ces renforcements magiques ?" Dis-je, alors qu’une nouvelle blessure imaginaire accable son esprit.
"Ce monstre est connu pour posséder sur lui des revêtements élémentaires qui minimisent la puissance de la magie. Seul mon maître a trouvé le secret pour passer outre. Rhaa !" Déclare-t-il, manquant cette fois-ci son coup.
(Des résistances élémentaires ? Mais alors…)
"Cela n’a donc aucun effet sur les attaques physiques comme les vôtres ?" Dis-je, une idée en tête.
"Au cas où tu ne l’aurais pas remarqué, il est inépuisable. C’est à peine si mes attaques l’atteignent. Il est un fléau pour tous les mages avec ses protections, mais son physique a été forgé pour les affrontements physiques. On dit que son corps a été conçu par le dieu de la guerre lui-même ! Si je suis incapable de le tuer en un coup, nous ne le vaincrons pas !"
"Alors nous le ferons ensemble, en une attaque combinée." Fais-je sans dévoiler les détails, avec un manque de confiance dans la voix.
"Il n’existe aucun sort de ce genre !" Se lamente l’Hinïon avant de sentir que je cache quelque chose.
"Qu’est-ce que tu ne me dis pas le Shaakt ?"
"Si ça foire, on y passe tous les deux ! J’ai une large confiance en mes capacités, mais à vrai dire, je doute des tiennes." Dis-je en provoquant son ego.
"Misérable peau noire, tu ignores à qui tu t’adresses ! DIS et si nous trépassons par ta faute, je hanterais ton âme même dans le royaume des morts." Clame-t-il plein de fougue, de rage et au bord de la fatigue.
Pendant que nous échangions, la joute entre les deux êtres est restée au statu quo, sans avantage pour l’un ou l’autre. J’ai usé encore une fois de mon sort pour briser ses sens. Moins puissant que précédemment, cela ne durera que le temps de notre tentative.
"Prêt l’elfe ? Ramène-toi !" Dis-je en hurlant.
"Et à présent ?" Me demande-t-il après avoir fait faux bond au Garzock qui hurle de rage en frappant dans le vide.
"Lance ton épée, aussi droite que tu le peux si tu en est capable ! Elle ne doit en aucun cas ciller !" Dis-je au guerrier à mes côtés.
"C’est tout ? Tu me crois vraiment incapable de si peu, même dans mon état le Shaakt ?" Grogne-t-il en lançant sa lame, droit sur la cible, ses cheveux blonds pris par une bourrasque de vent sur nous.
Quant à moi, je rassemble ma magie pour générer un pilier de terre, le plus puissant que je puisse, ne me laissant plus qu’avec une dernière parcelle de magie en moi.
"Je ne m’appelle pas le Shaakt, boucle d’or. Je me nomme Nhaundar et mon nom résonnera un jour dans le monde de la magie !"
Puis je lance mon sort. Un amas de terre termine de se former en un pilier colossal. Lame et magie foncent toutes deux sur le Garzock. Uni par un même but, une même pensée et un même destin, le pilier de terre percute la lame. Dans son lancé parfait, elle ne dévie pas de sa trajectoire. Mieux, elle est davantage propulsée par ma magie et accroissant sa vitesse de façon spectaculaire, elle transperce de part en part la bête de guerre. Le Garzock surpris, tâte le trou dans sa poitrine, avant de nous jeter un dernier regard plein de mépris et de finalement tomber sur le côté.
Après en avoir tant bavé, nous restons là quelques instants, pensant à un subterfuge de sa part, avant de comprendre que nous l’avions vaincu.
"Maître, nous l’avons vaincu." Déclare l’Hinïon à mes côtés, les yeux clos et les larmes coulant sur ses joues. Il regarde le Garzock avant de reporter son attention sur moi.
"Il était le plus fort, mais il y en a d’autres à vaincre. Retournons dans la tente, il doit rester des potions de mana. Et une dernière chose : je ne m’appelle pas boucle d’or. Aëgis, Aëgis Fondebrume."
Finalement, après tout ce temps passé, il m’aura fallu risquer ma vie pour enfin connaître le nom de cet elfe blanc. Après avoir repris notre souffle, nous sommes retournés à la tente, moi pour regagner tout mon mana par le biais d’une potion et lui pour rejoindre ses hommes, faisant preuve de courage pour protéger les blessés. Notre apparition et surtout l’absence de leur chef a été notre plus grand atout. Leur champion vaincu, les troupes se sont enfuis, nous offrant le répit tant mérité. Aëgis m’apprend ce qu’il voulait dire avant que l’explosion ne nous souffle. Tout cela avait été orchestré d’une main de maître, dans le seul but de nous piéger et d'atteindre ce lieu précis, là où la tente médicale serait disposée. L’attaque sur les blessés et l’absence de réussite pour libérer le mage, auraient été le début d’une déroute morale majeur et d’une succession de défaites sur le front.
"Nous aurions pu perdre plus que nos vies dans cette bataille. Et cela, nous te le devons Nhaundar. Ta bravoure sera louée, sois-en certain !" Termine Aëgis en s’inclinant devant moi.