La Savane du Ponant

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Yuimen
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La Savane du Ponant

Message par Yuimen » ven. 5 janv. 2018 11:45

La Savane du Ponant

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Au nord du désert de l'ouest, au sud de la plaine d'Exech et à l'ouest des montagnes sèches se trouve une large bande de savane. Cette zone possède plusieurs noms, le plus répandu étant la "Savane du Ponant" mais les Kebakeris l'appellent plus volontiers "Zabaker" et elle est souvent surnommée la "Ponance" par la pègre d'Exech.

La région est une plaine de savane herbeuse où la végétation se fait de plus en plus rare en descendant vers le sud ; elle est surtout une zone de passage pour les voyageurs (principalement des marchands, des truands et des aventuriers de tout poil) venus de tout le continent pour rencontrer les clans du désert de l'ouest, la plupart se rendant à la Ziggurat de Kamareth. C'est aussi un terrain de chasse particulièrement giboyeux et riche en diversité ; aniacs, phacochères, gnous, gazelles, autruches, zèbres, antilopes, buffles, girafes, rhinocéros, éléphants, hippopotames et bien d'autres espèces sont dispersés dans la région.

N'espérez cependant pas une traversée tranquille et sans danger ; outre de nombreux bandits rodant ici dans l'espoir de délester quelques bourses, des tribus de gnolls vivent sur les lieux et pénétrer sur leurs territoires est une erreur à ne pas faire. La savane grouille d'autres créatures dangereuses, tel que les lions, les hyènes, les afrythons et les cannibales des plaines, sans oublier les divers serpents venimeux. Il faudra aussi faire très attention à ce que vous buvez dans les nombreux petits points d'eau que vous pourrez trouver car les locus parasitaires y sont prolifiques.

D'Exech au nord de la Savane du Ponant, vous risquerez de tomber sur des guides et des mercenaires plus ou moins fiables qui vous offriront leur protection et connaissance du terrain pour votre traversée contre argent content... s'ils ne jugent pas préférables de vous détrousser.
Sachez cependant que le clan protecteur Kel Ouleiad veille ; ils sécurisent la route des marchands de leur mieux et remontent parfois très haut vers le nord. Ils ne peuvent cependant pas être présents partout tout le temps, la route est longue et les dangers sont très nombreux, mieux vaut donc être prêt à devoir se défendre.

A noter aussi la présence des Roches de la Maladie tout au sud. L'une d'elle se trouve tout près de la route des marchands et fait office de frontière entre le Royaume d'Exech et le désert de l'ouest, bien que la délimitation d'une véritable frontière n'ait jamais vraiment été décidé d'un côté comme de l'autre.

Il est également possible d'y rencontrer quelques trépassés errants, loin du Manoir Belmont d'où ils proviennent.

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Madoka
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Re: La Savane du Ponant

Message par Madoka » mar. 9 avr. 2019 23:07

Lorsque je me réveille, je suis en mouvement, ballotée mollement avec des rebonds intermittents et j’entends des bruits de sabots. Il fait chaud, les cheveux dans ma nuque sont trempés et mes tempes dégoulinent. Lorsque j’ouvre les yeux, une couverture est tendue au dessus de moi. Les odeurs sont tellement différentes des marais, je sens la poussière, le sable, l’herbe sèche et surtout le chaud, comme si le soleil imprégnait jusqu’à l’essence de chaque fragrance. La soudaine inquiétude qui m’assaille disparaît aussitôt que je reconnais l’intérieur de ma charrette.

Je retire la couverture et vois Sam conduire Blanchette. Il se retourne et me sourit en hochant la tête sur le côté d’un air plutôt jovial. Un sourire de sa part est bien la dernière chose que je pensais revoir après la dernière fois que nos regards se sont croisés. Un raclement de gorge destiné à retenir mon attention me fait tourner la tête. Saadi est là, sur un des deux chevaux des brigands. Il me gratifie d’un sourire plutôt enjôleur et me souhaite la bienvenue parmi les vivants. Ma tête est encore engourdie par le sommeil, j’ai la gorge sèche et la bouche pâteuse, mes paupières ont du mal à rester ouvertes et la luminosité éblouissante ne m’aide pas beaucoup sur ce point.

« Tu m’expliques ? »

Le jeune homme à l’air de vouloir discuter et tant que Sam tient les guides il ne peut pas répondre à mes questions. Il a d’ailleurs l’air plutôt à l’aise. A bien y regarder, il est vraiment ravi de s’occuper de la jument.

« T’as dormi plus longtemps que Sam, et c’est pas rien, il mange et dort plus souvent qu’un greffier. Les épaules du forgeron remuent au rythme de son hilarité et Saadi lui fait un clin d’œil complice. On est à la limite de la savane, plus très loin du marchand de dromadaires. T’as dit à ma mère que tu voulais y aller.
- J’m’en souviens pas.
- Ha ! Pas étonnant vu ton état. Ma mère t’a mis un de ces trucs de sorcière dans le thé, pour te faire dormir, qu’elle puisse te soigner avant que tu décides de fuir. T’as pas la confiance facile hein !
- C’est rien de le dire. »

J’en demande un peu plus sur sa mère, sur ce nom qu’il lui donne avec affection. Dans la région, elle se fait appeler ainsi sans que cela ne passe pour une accusation ou une calomnie. Elle travaille avec la flore et la faune des marais et des montagnes, préparent des baumes, des potions ou des poisons si nécessaires. Je l’ai apparemment beaucoup questionnée sur ce sujet dans la soirée mais n’en garde aucun souvenir, preuve que ces potions sont efficaces et sans doute un peu trop. Au cours de la discussion cependant, un détail m’interpelle et j’hésite à en faire part tant la légèreté de la question me fait réaliser à quel point ces minutes sont paisibles, à mille lieues de mon état d’esprit de l’avant-veille.

« Saadi ? Qu’est-ce que je porte là ?
- Ta tunique, rapiécée à la perfection comme tu peux le constater, ton pantalon et tes bottes …
- Et comment je suis rentrée dedans ?
- Ma chère, c’est pas parce que je vis dans un village isolé que j’ai pas eu mon lot de conquêtes. J’suis capable de déshabiller et rhabiller une femme les yeux fermés … j’dis pas que c’est c’que j’ai fait. »

Son sourire et sa bonne humeur sont un régal pour le moral. Même Sam, que je sais plutôt romantique et très respectueux de l’intimité des femmes, rit sans gêne. Je me demande ce qui s’est passé en mon absence et je n’ose lui demander de crainte de le renfrogner à nouveau alors qu’il profite comme moi de ce moment calme et serein, loin de la tragédie des marais et loin des péripéties à venir. Le jeune homme remarque mes coups d’œil hésitants vers le Sinari et y répond à demi-mot.

« Ma mère lui a parlé. Il en avait besoin et votre relation aussi.
- Elle connaît le langage des signes ?
- Non. Mais c’est une sorcière, elle sent les choses. »

Après avoir partagé un peu d’eau avec Saadi et Sam, je reprends les guides afin de le soulager un peu et qu’il puisse manger. Blanchette réagit au changement de conducteur, elle lève et tourne la tête vers moi en soufflant par les naseaux, comme pour dire bonjour.

« Je suis désolé de t’avoir traité de monstre, signe Sam entre deux gorgées.
- Ne le sois pas. C’était la vérité.
- Sur le moment, oui, je l’ai pensé, j’ai eu peur de toi. Mais je ne pense pas que tu sois un monstre. Mawada m’a raconté et montré ce que font les hommes comme eux aux gens qu’ils attrapent. Je suis triste qu’ils soient morts comme ça … mais je suis heureux que tu aies été là pour m’en protéger. Je sais qu’il faut que je m’endurcisse comme toi si je veux intégrer votre armée mais …
- Sam, je peux te donner mon avis ? Ne pense pas qu’il faille devenir comme moi. Ne sois pas désolé d’être sensible aux sorts des autres. Les gens comme moi rendent le monde froid et triste. Tu veux gagner ce concours pour prouver qu’un Sinari peut devenir un expert reconnu, pour montrer aux tiens que tu es capable de faire de grandes choses et que tu as le droit d’avoir de l’ambition … pas besoin de devenir insensible pour cela.
- Je ne t’ai pas tout dit, à propos de ma famille, et pourquoi j’étais seul à Oranan. Ils pensent que forger des armes qui servent à tuer équivaut à tuer ; que je devrais avoir honte de vouloir gagner car c’est accepter la guerre.
- C’est débile. Des gens meurent noyés, meurent étouffés, meurent de froid, meurent ensevelis sous des coulées de boue … est-ce que pour autant les Dieux qui ont créé tous ces éléments doivent se sentir coupables ? Est-ce que les Sinaris sont devenus des criminels parce qu’ils ont demandé à Kendra Kar de repousser les Sektegs à leur place ?
- Ce n’est pas si simple.
- Si tu gagnes, tu forgeras des armes et des armures pour que des soldats défendent leurs familles, leur pays, leur valeur et leur droit de ne pas vivre sous la domination d’une demi-déesse en colère contre son divin Père. Mais ça, ce n’est que mon avis. Rien n’est simple … même de vivre selon ses propres valeurs. Tu ne deviendras pas un monstre si tu gagnes ce concours. Si ta famille t’aime, elle s’en rendra compte et s’ils ne sont pas trop cons, ça ne leur prendra pas des années.
- Je suis sûr qu’ils m’aiment. Pour le reste … donnons-leur du temps. »

Ce trait d’espièglerie étire ses lèvres et illumine son regard. Il prend sur lui pour ne pas trop sombrer dans des réflexions sans fins et je sens que sa bonne humeur tient à pas grand-chose. Mais compte tenu de ce qu’il a vu et vécu dans les marais, il s’en sort bien. Il fait face là où d’autres ferment les yeux.
Je lui tapote l’épaule et lui conseille de s’allonger un peu à l’ombre de la couverture lorsque Saadi nous avertit que nous sommes à une heure ou deux de Kamareth, et qu’il y a un campement non loin où l’on peut faire une halte afin de remplir les outres et les gourdes.

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