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Re: La Chaîne du Karathren

Posté : sam. 16 nov. 2019 15:17
par Oryash
Précédemment : Simple discussion suite


Oryash eut une légère moue aux paroles du Sindel concernant le fait que lui aussi avait besoin de repos et les montures aussi.

Les chevaux , je sais bien. Cesse donc de me prendre pour une ignarde. Certes je n'ai pas tes connaissances, mais je ne suis pas stupide. 

Elle se lève et va cherche le pain et les pommes dans ses fontes qu'elle ramène près du feu, les déposant devant eux.

Un attentat à la pudeur, vraiment ? Oh en ce cas, je comprends mieux certains regards dans les diverses bourgades où villes que j'ai pu traverser. 

Un léger rire aux paroles qui suivirent quant au fait qu'il n'était pas tous ces êtres incapables de maîtriser leurs instincts.

Moi ? Obtenir quelque chose de toi ?! Ne va pas te faire des idées. Tu n'es pas vraiment mon genre, même si tu es plutôt pas mal pour un sindel.

Elle tend alors la main en direction des victuailles qui composent leur repas , prend un peu de pain, de viande séchée et une pomme et se met à manger en silence. Une fois son repas terminé, elle se lève et va prendre place sur sa couche, pour la nuit.


Suite: ....

Re: La Chaîne du Karathren

Posté : mer. 18 août 2021 14:00
par Agril
« PLUS VITE ! »

« Me crie pas dans l’oreille ! »

« AAAAAAAH ! »

Criais-je dans son oreille au même moment où la créature au dessus de nous pousse un hurlement. Bergham, l’ami des bêtes, aux rênes de l’attelage de bouc des montagnes qui tire notre charrette détourne la tête et les bêtes pas la même occasion, évitant de justesse le souffle sonique qui soulève une gerbe immense de poudreuse, secoue la charrette et fait paniquer d’avantage les boucs.

« Mais faites quelque chose ! »

Rétorque le cocher en hurlant.

« J’ai plus de carreaux ! »

« Mais t’en a pas tiré un seul ! »

« Ils étaient trop chère à Amarok ! Ces Fujoniens ont essayés de m’arnaquer ! »

Les autres Thorkins du chariot poussent des chapelets d’injures avant de s’accrocher fermement aux planches de bois quand l’attelage prends un virage pour éviter un amas rocheux. Nouveau hurlement, nouveau souffle destructeur qui frappe juste devant nous. Aveuglés pendant quelques secondes par l’épais nuage de neige qui se soulève.

« Je vais essayer quelque chose. »

Déclare Igrit, le flamboyant, alors que les autres ne trouvent rien de mieux à faire que de critiquer mon sens aiguisé des affaires avec, en plus, une grossièreté que ma maman n’aurait pas toléré. Igrit, donc, sans doute le nain le plus jeune du groupe, à la barbe et aux cheveux roux, se redresse et génère une boule de feu qui s’envole dans le ciel, passant à quatre bons mètres du monstre qui nous poursuit.

« Mais t’as de la merde dans les yeux !? »

S’écrie Furim, le géant, un mètre soixante-cinq de muscles, de poils et de bière. Une rareté parmi les Thorkins et la bosse au milieu de son front le démontre, rappelant qu’une porte classique chez nous dépasse rarement le mètre soixante de haut.

« Réessaie et concentre toi. »

Conseille calmement Luvik, l’ingénieur, le cerveau du groupe après moi évidemment, qui s’agrippe fermement à la fois à la charrette et à son précieux sac.

« Je crois que je suis à court de magie. »

« Après une boule de feu ? »

Le flamboyant entre ouvre la bouche pour s’expliquer mais je reprends la parole.

« ATTENTION ! »

Criais-je dans le tympan de Bergham qui fait faire un écart à ses bêtes, évitant les serres mortelles de la wyverne qui nous poursuit. Le monstre ailé ressemblant à un long lézard remonte dans les cieux pour dessiner un demi-cercle et nous faire face.

« Accrochez vous ! »

Je m’accroche. Saisissant à deux mains une poignée de fer qui sert d’ordinaire à sangler la cargaison. La bête fonce droit sur nous, ouvre grande sa gueule débordante de crocs aiguisés, tends ses pattes aux griffes acérées, déploie ses ailes pour ralentir soudainement sa chute. Elle saisit entre ses griffes notre attelage et le soulève, provoquant le hurlements des boucs paniqués et les nôtres. La charrette décolle de quelques mètres avant que les lanières de cuir ne lâchent, nous laissant retomber avec fracas à flanc de montagne. Le bois se brise tandis que le cri des boucs s’éloigne. Je sens la neige glacée rentrer dans mes vêtements. Ma barbe grise atténue l’impact de ma joue contre la poudreuse. Le bruit de la neige écrasée étouffe les grognements de mes compères qui déboulent avec moi le long de la pente abrupte accompagnés de ce qui reste de notre chariot et du matériel qu’il contenait.

La descente fini par s’arrêter et je me retrouve sur le dos, les membres douloureux, brûlés par le frottement sur la glace ou écorchés par les pics rocheux qui en dépasse. Je parviens tout de même, à mon grand soulagement, à bouger. Je passe d’abord une main sur mon gros nez, essuyant un filet de sang qui s’en dégage avant de lisser ma barbe, m’assurant qu’elle est intact. Puis je passe une main sur mon crâne cabossé, retirant la neige rouge de mes plaies. J’observe le ciel bleu un instant, me perdant dans son immensité avant que la gueule du géant ne surgisse dans mon champs de vision.

« Allez debout ! Elle revient ! »

Au même moment j’entends son hurlement, encore assez éloigné pour ne pas me vriller les oreilles. Nous nous activons, ramassons les affaires à portée. C’est avec rage que je remarque que mon carquois à disparu.

« Cent Yus de perdu ! Maudite créature ! »

Pestais-je dans ma barbe tout en aidant Igrit à sortir le haut de son corps de la neige, lui qui agite ses pieds à l’air libre comme un crétin.

« Par là ! Regardez ! »

Luvik, portant toujours son précieux sac, désigne une cavité qui se creuse dans la montagne. Trop étroit pour la wyverne qui se rapproche dangereusement.

« Dépêchez vous ! »

« Quelle idée de merde cette chasse ! »

Rugit Bergham en mettant en branle son gros cul pour atteindre la grotte avant que la créature soit sur nous. Je fais de même, me frayant un passage dans la neige alors que derrière nous ce qui reste du matériel est balayé par un souffle sonique.

« Allez bougez vous ! »

L’entrée de la caverne n’est plus qu’à quelques mètres, une distance pénible quand on s’enfonce dans la neige jusqu’à la poitrine et qu’on vient de débouler depuis le toit du monde.

« COUCHEZ VOUS ! »

Beugle le géant alors que le cri strident de la wyverne fend le ciel au dessus de nous. J’obéis et me jette au sol. Une décision qui m’épargne d’être tranché en deux par ses griffes.

« PAR MENO ! C’ÉTAIT CHAUD ! »

M’exclamais-je tout en me relevant pour parcourir la distance qui me sépare de la grotte en même temps qu’Igrit qui, à bout de souffle s’affale dans un coin. La wyverne pousse un autre cri. J’entends distinctement le battement de ses ailes proche de l’entrée. Elle se pose et pousse un grognement avant de se servir à nouveau de son cri pour faire trembler les murs de la caverne. Elle décolle ensuite mais aucun de nous ne risque un oeil dehors pour vérifier qu’elle s’éloigne.

En relative sécurité, nos regards se tourne vers l’ingénieur, surtout son sac.

« Alors… est-ce que tu l’as ? »

Demandais-je tout en m’approchant tandis qu’un large sourire fait bouger sa barbe. Il ouvre grand son sac, dévoilant le trésor que nous avons réussi à chaparder. L’œuf de la Wyverne.

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Re: La Chaîne du Karathren

Posté : jeu. 19 août 2021 13:27
par Agril
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L’ingénieur récite lentement la liste de ce que nous avons pu sauver de notre chute depuis le sommet du Karathren. Quelques vivres, une corde, trois couvertures, deux pioches, une pelle, une seule tente… inutile de préciser que le voyage vers la ville la plus proche va être difficile.

« Le voyage jusqu’à la ville la plus proche va être difficile. »

Quel couillon. Il le précise tout de même, histoire de bien nous mettre le moral dans les chaussettes. Maintenant que nos blessures les plus préoccupantes sont soignées il ne nous reste rien du matériel de premiers secours. Fort heureusement l’oeuf n’a rien. A défaut d’avoir pu abattre la bête qui rugit encore dehors nous avons réussi à subtiliser son oeuf.

« Elle ne nous lâchera pas tant qu’elle ne l’aura pas récupéré… »

Explique Bergham tout en tendant l’oreille.

« Faut bien qu’elle mange non ? »

« Elle vient de dévorer notre attelage de six boucs. Mes boucs. Je pense qu’elle tiendra plus longtemps que nous. »

Conclue t-il avec rancoeur avant de s’éloigner de la sortie de la grotte pour s’asseoir dans un coin. C’est vrai que c’étaient de belles bêtes; grandes, robustes, bien en chair, sans doute délicieuses. Je cesse d’y penser quand mon estomac se met à gronder.

« Qu’est-ce qu’on fait alors ? »

Demande le géant qui a déjà du mal à rester en place. Le regard de Luvik se dirige vers le fond de la caverne avec appréhension et tous nous soupirons, conscients que les choix ne sont de toute manière pas très nombreux.

« Ça débouche forcément quelque part… »

« Non. Ça pourrait tout à fait s’enfoncer dans les profondeurs du monde. Mais peu importe nous serons morts de faim avant de l’atteindre. »

« Tu préfères affronter la wyverne avec un arbalétrier qui n’a plus de carreaux ? »

« Ils étaient beaucoup trop cher ! J’allais pas me laisser enfumer quand même ! »

Me défendais-je. Comme ci tout ça était de ma faute !

« C’était ton idée de vouloir s’occuper de cette bête ! »

« … Oui bon c’est vrai… »

« A cinq pour avoir une plus grosse part de récompense. »

« … »

« Et tu as refusé de l’aide d’un chasseur plus expérimenté parce qu’il demandait une plus grosse part. »

« … C’était un charlatan… »

« Ainsi que la location de son matériel pour chasser le plus gros gibier. »

« Six Yus d’or pour sa baliste et ses deux munitions ! Et puis quoi encore ?! »

Explosais-je.

« C’est bon ! J’vais passer devant ! Bande de froussardes ! »

Je ramasse mes affaires et m’enfonce dans la caverne en maugréant dans ma barbe. C’est vrai que j’ai un peu surestimé la valeur de mon équipe et possiblement mal évalué la force d’une wyverne. Mais j’allais pas non plus investir presque la totalité de la récompense ! Puis un oeuf c’est pas mal déjà ! Nous trouverons sûrement un acheteur ! De quoi se reprendre un peu de matériel d’occasion avant de repartir traquer une autre bête.

Nous nous enfonçons dans la galerie brut de la montagne qui nous montre désormais son premier obstacle. Une crevasse, large de deux bons mètres, infranchissable sans équipement. Profonde de quinze mètre à vue de pif. Un regard entendu suffit à nous mettre d’accord et Furim déroule la corde. Nous tendons l’oreille mais le son qui provient du fond du gouffre nous tire à tous une plainte désabusée.

« Rhaa… putain… »

Un plouf, signifiant qu’au fond de ce trou se trouve de l’eau. Une bonne nouvelle en soit puisque l’eau peut mener à une sortie mais l’idée même d’être mouillés nous fait hésiter à faire demi-tour.

« C’est peut être là que commence le Narshass. »

Suppose Luvik tandis que je m’apprête à descendre tout en ricanant.

« J’en profiterais pour pisser dedans. Histoire de laisser un souvenir aux elfes. »

Je commence ma descente, un peu à la rustre, m’attirant les foudres de Furim qui raisonnent dans le gouffre.

« Tu peux faire doucement bordel ?! »

Je pousse un long soupire avant de poursuivre jusqu’à atteindre une cavité plus grande, immense même.

« Ouaw ! »

« Un problème ? »

Je jette un regard circulaire pour pouvoir décrire l’endroit où je me trouve. Une gigantesque cavité où demeure un lac souterrain, trop grand pour en voir le bout. Heureusement je ne me retrouve pas en plein milieu mais sur un des bords avec une corniche accessible. Plus loin, je distingue ce qui ressemble à un courant léger qui se forme. Je continue de descendre et après m’être balancé, m’attirant une fois encore la colère raisonnante de mes compères, je parviens à atteindre la corniche, bien au sec !

Ils me rejoignent un par un, Luvik en dernier, sacrifiant au passage sa pioche pour pouvoir récupérer la corde en s’en servant comme poulie. Ils prennent un instant pour contempler les lieux avant de poursuivre le chemin l’un derrière l’autre. Pendant plusieurs minutes nous ne voyons rien de spécial si ce n’est l’eau calme et la roche brute de la montagne, nous nous rapprochons en silence de l’endroit où un courant doux emporte l’eau dans un passage plus étroit.

« Hey. Regardez. »

Souffle Igrit en désignant un étrange pilier de pierre de l’autre côté du bassin devenu plus proche ici. A nouveau, un regard de chacun suffit pour prendre la décision d’aller jeter un oeil. Nous faisons donc un détour dès que nous avons la possibilité de traverser pour rejoindre l’autre côté. Nous avançons à pas prudents, à la fois méfiants et excités à l’idée de faire une grande découverte.

Nous ne pouvons retenir un frisson d’admiration en atteignant ce qui est le poteau d’une demeure, ou plutôt les ruines d’une demeure, assurément naine, voisine d’une douzaine d’autres. Nous restons silencieux, interdits devant cette découverte, n’ayant aucune explication quant à sa présence.

« Des vestiges de l’ancienne Mertar ? »

« Non… nous sommes trop loin. »

« Une cité oublié ? »

« Peut être une autre civilisation très ancienne ? »

« Non. Pas de doute, c’est d’origine Thorkine. »

Les discussions se poursuivent sur l’origine de ses ruines jusqu’à ce que nous décidions de les explorer dans l’espoir de découvrir un trésor oublié. Nous formons deux groupes pour procéder plus rapidement sans être complètement vulnérables. Nous savons tous ce qui ce cache dans les profondeurs de la montagne.

Je rentre dans la maison en ruine en compagnie du géant, découvrant l’habitat datant d’au moins plusieurs siècles. Il ne subsiste que les meubles de pierres; tables, plans de travail, bancs, armoires, lits. Le bois est tombé en poussière, rongé par les termites, le temps et l’humidité. Le fer est rouillé, en témoigne le lustre, autrefois maintenu par des chaînes solides, échoué au beau milieu du plancher. Dans les placards sans portes sont soigneusement rangés la vaisselle en matériaux immortels, de l’argent, du cuivre… plus de traces du moindre bout de tissu ou de papier hormis les livres aux couvertures de cuir qui paraissent juste poussiéreux, rangés dans la bibliothèque. Cependant nous savons bien que l’intérieur n’est sans doute plus exploitable. Nous échangeons encore quelques théories mais aucune qui n’explique comment un village souterrain Thorkin a pu être ainsi oublié.

« Hey venez voir ! »

Nous rejoignons l’autre groupe quand un bruit d’eau attire notre attention alors qu’une onde se propage sur l’eau auparavant calme et silencieuse.

« C’est quoi ?! »

Demande Igrit, pas serein.

« Y a sans doute des poissons là dedans. Ou alors juste un caillou qui est tombé dans l’eau. Commence pas à chier dans ton froque. »

Rétorquais-je agacé en gardant tout de même un oeil méfiant sur la surface de l’eau. Nous continuons ensuite notre exploration, suivant la voix de l’ingénieur entre les vieilles demeures en parcourant des ruelles étroites qui nous éloignent du lac. Nous remarquons quelques créatures tel que des pieuvres terrestres ou des ratissas mais aucune n’ose s’en prendre à un groupe de Thorkins.

Nous retrouvons l’ingénieur et l’ami des bêtes au début de ce qui semble être l’artère principale du lieu, débouchant sur le coeur de la ville. Les galeries et les bâtiments sont plus grands, le plafond de la cavité plus haut et soutenu par des piliers de roche taillés et gravés. Enfin nous avons un début d’indice pour expliquer ce qu’il s’est passé ici: des cadavres. Enfin plutôt des squelettes ou ce qui reste de squelettes. Quelques crânes brisés, des cages thoraciques, des fémurs, des colonnes vertébrales. Le tout parsemé le long de l’avenue mais plus étonnant encore la taille des os varient d’un squelette à l’autre. Il y a bien des ossements de Thorkins dans ces ruines mais pas seulement.

« Des elfes ? »

Propose Furim à mi-voix. Ces ruines seraient donc un vestige de la guerre mené contre l’Anorfain ? Un avant poste ? Une forteresse ?Un simple village ? Maintenant que nous sommes en son centre il ne paraît pas bien grand. En tout cas une bataille a eu lieu ici il y a très longtemps mais le temps a eu raison des armures et des armes qui ont servis, leur donnant une apparence de vieux tas de ferraille rouillé. Nous marchons vers le plus grand bâtiment, tout de roche, aux portes de pierres faisant deux fois notre taille. Devant s’entassent les ossements mélangés, les boucliers rouillés et brisés ainsi que des armes émoussées.

« Si y a un trésor c’est là dedans les gars. »

Un bruit plus fort d’éclaboussement se fait entendre venant du lac. Nous sursautons et dressons nos armes mise à part Luvik, convaincu qu’il s’agit seulement d’un plus gros caillou que le précédent. Furim, lui, ne se gêne pas pour me rappeler qu’il ne sert à rien de lever mon arbalète si je n’ai pas de munitions. Ce à quoi je lui rétorque de bien fermer sa grande g…

« Allez venez m’aider au lieu de rester planter là comme des pierres. »

S’agace Bergham qui me coupe la parole en se frayant un chemin jusqu’aux portes. Nous apportons notre aide, le géant préférant tout de même surveiller nos arrières. Nous grognons d’effort pour faire bouger les lourdes portes immobiles depuis fort longtemps. Quasiment vingt millénaires si nos suppositions sont exactes. Elles se déplacent en provoquant un crissement grave qui raisonne dans toute la caverne et libérant une odeur de renfermé. Nous pénétrons à l’intérieur comme si c’était un temple, contemplatif devant ces reliques d’un passé lointain. L’air lourd et la poussière qu’a soulevé l’ouverture des portes nous tire quelques toussotements qui brisent le silence quasi-religieux du lieu.

A l’intérieur nous trouvons encore des corps, en meilleur état cependant, ce sont des squelettes mais ils ne sont pas brisés et répartis dans la large pièce qui sert de hall. Ils sont prostrés, assis dans des coins, souvent à plusieurs, des Thorkins plus grands et d’autres plus petits. Peu à peu les images de ce qui a dû se passer ici se dessine dans ma tête et mes poings se resserrent. Nous sommes les témoins de l’horreur d’une guerre, des milliers d’années plus tard.

Nous avançons dans la large salle où subsistent encore les lustres de fer pendues à de lourdes chaînes de fer qui résistent encore aux assauts de l’oxydation.

« Il doit forcement y avoir des objets de valeur ici… »

« Est-ce qu’on devrait pas plutôt prévenir Mertar pour entreprendre des fouilles archéologiques ? »

« Et leur laisser tous les trésors ?! Après tout le mal qu’on s’est donné ?! »

« On est tombé dessus par hasard ! »

« Oui mais la chance sourit aux audacieux ! »

« On sait même pas si on va trouver quelque chose de valeur ici… »

« Bah justement ! Cherchons ! »

« On est quoi ? Des chasseurs ou des pilleurs ? »

« On sera bientôt plus rien vu les ressources qu’il nous reste… »

Les discussions se poursuivent plusieurs minutes et nous nous mettons finalement d’accord. On ne casse rien, on ne prends que ce qui a de la valeur et on laisse ce qui peut intéresser les historiens de la capitale Thorkin. Nous empruntons un escalier pour descendre à l’étage inférieur où se regroupent encore des familles qui y sont venus passer leurs derniers instants. Pas de squelettes elfes ici, seulement des nains, des nains et encore des nains.

Nous arrivons dans ce qui semble être la pièce principale. Aux murs sont encore accrochés les barres d’acier aux quelles étaient sans doute tendues les tapisseries décoratives. Un grand siège de pierre trône au fond de la pièce, surélevé par rapport au reste. Nulle trace d’autres bancs ou tabourets, le temps aura probablement eu raison du bois qui les façonnaient. Au centre de la pièce est également présent une large table, je passe mon bras dessus, remarquant des reliefs dans la poussière. Je m’y reprends à plusieurs reprises pour enlever couche après couche jusqu’à révéler un texte entier, gravé sur toute la table.

« Hey l’intello. »

Mais l’ingénieur est déjà entrain de parcourir du regard les écrits pour réciter ce qui est, nous dit-il, les derniers instants de la ville naine.


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Re: La Chaîne du Karathren

Posté : ven. 20 août 2021 15:55
par Agril
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Les elfes sont repoussés.
Ils ont réveillés la bête au fond du lac.
Nous ne pouvons la vaincre.
Trop forte dans l’eau.
Trop forte sur terre.
Agile et puissante, elle frappe, emporte et tue.
Trop longue pour distinguer la tête et la queue.
Sa mâchoire brise le roc.
Sa queue soulève le lac.
Nous ne pouvons la vaincre.
Nous avons bloqué le passage pour l’enfermer.
Nous sommes coincés avec elle.
Nous ne pouvons la vaincre.
Gardez la enfermée.
Vous ne pourriez la vaincre.



« Rien sur un trésor ? »

« Tu t’fous de ma gueule ?! »

« Oh mais ça va ! La créature est sûrement morte maintenant ! »

« J’ai trouvé quelque chose ! »

Le flamboyant nous fait signe, désignant quelque chose au pied du fauteuil de pierre. Deux rayures espacés de la même largeur que le siège. Nous nous y mettons à plusieurs pour le pousser afin de dévoiler un escalier étroit en pierre brut qui descend sur quelques mètres. Si étroit que même le géant ne pourrait y accéder.

« Bon bah j’vous attends là… »

Dit-il, dépité. Nous nous y engageons alors et comme d’habitude j’ouvre la marche. Nous atteignons une petite salle qu’on pourrait définir comme une cave. Façade brut, pas de décorations, simplement des coffres, six coffres de pierre verrouillés par des cadenas rouillés et des crochets d’acier fixés au plafond bas. Je me frotte les mains, la chance me sourit. Enfin je veux dire… nous sourit.

« File moi ta pioche Bergham ! »

Il s’exécute et aussitôt je fais sauter le verrou du premier coffre avec un sourire radieux. Il vient ensuite m’aider à soulever le lourd couvercle pour découvrir l’intérieur du coffre.

« VIDE ?! »

Rien. Pas un Yu. Ni même un bijou ou ne serait-ce qu’un minerai d’or.

« Les autres coffres ! »

Je lance la pioche à l’ingénieur qui fait sauter un autre cadenas. Assisté d’Igrit, ils soulèvent le couvercle et après un instant me font un signe négatif de la tête.

« Fais chier ! »

J’arrache la pioche des mains de Luvik pour faire sauter chaque cadenas tandis que les autres se font déjà une raison.

« C’était sans doute le garde manger… »

« On peut toujours récupérer les couverts en argent. »

« Je refuse de le croire ! »

Pourtant c’est un fait, les trois coffres suivants sont tout aussi vides. Je m’accoude au tout dernier coffre, prenant une lente inspiration et adressant une prière aux Dieux.

« On devrait chercher un moyen de sortir de cette grotte au plus vite ou on va aussi crever de faim… »

Je saisis le couvercle de pierre à deux mains et soulève de toutes mes forces pour le laisser retomber contre la paroi de la caverne. Je baisse le regard, d’abord défait qui s’illumine alors que le sourire me revient.

« Il y a quelque chose ! »

Mes compères se précipitent alors sur les bords du coffre pour découvrir comme moi un second coffre de bois, protégé des éléments par son contenant. Plein d’enthousiasme nous le saisissons par les poignées d’acier et le sortons pour le ramener à l’étage. Au poids nous pouvons déjà assurer qu’il n’est pas vide. Furim nous aide à le hisser jusqu’en haut des marches avant de pouvoir enfin l’ouvrir.

Nos yeux s’illuminent en soulevant le couvercle. Dissimulé depuis des années, nous découvrons finalement le trésor de ce village oublié, figé dans le temps. Tout ce qu’il reste des Thorkins qui se sont enfermés dans ces grottes pour empêcher un monstre de quitter le lac. Des Yus, des bijoux, quelques joyaux. Ça n’a pas la taille des trésors légendaires dont tout Thorkin rêve mais ça reste satisfaisant de ne pas repartir les mains vides.

« On va pouvoir bouffer l’oeuf de wyverne sur le chemin ! »

Plaisante Furim entre deux rires de joie. Il se trouve autre chose parmi les richesses du coffre. Un étui en cuir cylindrique dont Luvik s’empare avec curiosité pour l’ouvrir. Il en sort un bout de parchemin qu’il déroule sur la table avant de l’examiner.

« Qu’est-ce que c’est ? »

Demande Igrit avec curiosité. Je m’approche également, en compagnie des autres. Sur le parchemin est dessiné une sorte de plan, le plan d’un objet étrange. Je ne sais ni ce que c’est, ni à quoi il peut bien servir et je n’ai pas l’air d’être le seul. Même l’intellectuel du groupe se lisse la barbe avec un regard surpris tout en suivant du doigt les lignes inscrites sur le bout de papier.

« A priori… c’est une arme. »

« Un gourdin ? un truc comme ça ?»

En effet, d’après le dessin, le résultat final ressemble à de bêtes morceaux de bois sertis de fer. Mais Luvik secoue la tête en précisant:

« Non… ce serait plus comme… une arbalète…»

Il plisse les yeux, poursuivant sa lecture à voix basse.

« Jamais vu une arbalète avec cette gueule... »

Il n’y avait même pas de corde. Simplement un tube de bois avec une gâchette, c’est tout.

« Encore un prototype merdique. »

« Il est écrit que sa portée est supérieur à n’importe quel arc et que sa puissance est inégalée. »

Il marque une pause, continuant de glisser son gros doigt sur les lignes.

« Il est dit que les Thorkins s’en sont servi durant la guerre contre les elfes… »

« On peut en tirer quelque chose ou pas ? »

« Du plan ou de l’arme ? »

« J’sais pas ! Les deux ? »

« Le plan devrait pouvoir se vendre oui… quant à l’arme… hm… disons… que ça vaudrait vingt fois le prix du plan… »

Nous poussons un hoquet de surprise pendant que Luvik s’explique:

« C’est un exemplaire unique, à priori très puissant qui demanderait un fort investissement… Oui je dirais plusieurs milliers de Yus, au bas mot. »

« Et il est où ce... truc !? »

« C’est tout le problème justement… »

Il désigne une partie du parchemin tout en récitant d’une voix haute et clair que le fusil, c’est comme ça qu’ils l’appellent, a été brisé en cinq morceaux pour ne pas qu’il tombe entre les mains des elfes.

« Maudits blancs culs aux oreilles pointues ! »

Il poursuit, expliquant que les morceaux sont maintenant dispersés sur tout Nirtim et que seul ce plan permettrait de le remonter une fois les morceaux réunis.

« Faire le tour de Nirtim à la recherche de pièces détachés pour un truc qui ressemble à un gourdin ? Ça me parait risqué comme pari. »

« Je propose d’emporter le coffre et d’y réfléchir une fois qu’on aura une bonne bière entre les mains. »

A l’unanimité nous sommes d’accord pour procéder de cette façon. Nous remettons tout dans le coffre, le refermons soigneusement et nous redistribuons le matériel pour alléger ceux qui vont porter le trésor. Les deux plus costaud sont chargés de le porter, le géant et l’ami des bêtes. Le flamboyant et l’ingénieur ferment la marche tandis que je me charge encore de passer devant. Nous quittons le bâtiment et remontons l’avenue principale d’un pas rapide jusqu’à ce qu’un nouveau bruit d’eau encore plus fort que les autres parvienne à nos oreilles, suivi d’un long grognement…


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Re: La Chaîne du Karathren

Posté : sam. 21 août 2021 11:02
par Agril
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Une vague d’eau surgit d’entre les ruelles pour nous atteindre, engloutissant nos jambes jusqu’aux chevilles.

« Sa queue soulève le lac. »

Récite Igrit avec une voix tremblante.

« C’est juste une autre pierre qui est tombée dans l’eau. »

Dis-je. Moi même n’étant pas vraiment convaincu je continue d’avancer pour ouvrir la voie.

« Et le grognement ? »

« Juste un écho du bruit de la pierre qui s’est décrochée. »

« Marrant ces pierres qui se détachent sans secousses. »

« La ferme. »

Nous entrons dans une ruelle, prenant un détour pour ne pas se précipiter directement vers le lac et être emporté par le courant de la vague qui retourne vers son lit. Puis plus rien, le calme laisse la place au bruit de déplacement des flots.

« Voyez. Juste une grosse pierre. »

Puis comme pour me donner tort un long rugissement secoue toute la caverne.

« Une sacré grosse pierre celle-ci. »

Ironise Bergham alors que je lui rétorque de la fermer et de courir. Nous pressons le pas pour s’éloigner des ruines et atteindre le couloir étroit qui suit le courant. Mais une autre vague plus puissante que la précédente renverse les deux derniers de la file. Complètement trempés et étourdit ils peinent à se remettre debout. Sans attendre nous faisons le nécessaire pour les redresser alors que nous percevons du mouvement venant du bout de la rue.

« Vite ! Dépêchez vous ! »

Dis-je en poussant Igrit vers le coffre. Rugissement à ma gauche tandis qu’au fond de la rue une forme s’approche rapidement.

« Courez ! »

Je bondis en arrière, m’étalant de tout mon long dans la flotte avant qu’une immense mâchoire ne tente de me gober en provoquant un grondement terrifiant.

« Agril ! »

Beugle le géant de l’autre côté du corps qui serpente entre nous, m’empêchant de les rejoindre.

« Fuyez ! Pauvres fous ! »

Je me redresse alors que la bête du lac continue de faire passer son immense corps dans la rue juste assez large pour elle. Je sprint, redoutable sur une courte distance, en revenant sur mes pas pour ensuite tourner vers le lac. Si la bête est encore entrain de s’enfoncer dans les ruines elle ne pourra pas m’atteindre si je rejoins sa queue. Du moins c’est ce que je crois car les gravures sur la table ne semblaient pas exagérer la taille du monstre dont la gueule surgit soudain à ma gauche alors que j’aperçois encore sa queue à ma droite.

« Mais c’est pas possible ! »

Je plonge encore une fois pour ne pas me faire avaler. Le courant qui revient vers le lac m’emporte en partie, me mettant la tête sous l’eau.

« Fais chier ! »

Dis-je entre deux quintes de toux pendant que la créature se redresse pour se hisser au dessus des habitations. Je peux enfin la distinguer plus clairement. Une tête de serpent immense qui frôle le plafond de la caverne, des écailles noires, des yeux rouges perçants, des dents ressemblants à des centaines de pioches parsèment ses mâchoires grandes ouvertes d’où dépasse une longue langue fendue.

« Oh putain… Oh… putain ! »

Soufflais-je en reprenant ma course effréné avec le souffle court.

« OH PUTAIN ! »

Jurais-je encore en entendant un nouveau rugissement de la bête et le son de sa queue qui frappe l’eau devant moi. Je change de direction pour tourner à gauche, m’éloignant petit à petit des autres et je comprends qu’il s’agit du plan de la créature, me séparer de mon groupe pour me dévorer. Une autre déferlante d’eau nettoie les rues menant au lac.

« Agril ! »

Rugit encore Furim avant que la créature ne pousse un rugissement de douleur. C’est sûr qu’un coup de hache venant du géant fait rarement plaisir.

« Mais tirez vous avant qu’elle nous bouffe tous ! »

Le serpent géant me coupe la parole, brisant un pan de mur au dessus de moi avec sa gueule. Les pierres tombent à proximité, soulevant une nouvelle vague qui manque de me faire chuter. Je braque mon arbalète vers l’oeil qui me fixe avant de me rappeler que je suis à court de munitions.

« Maudit soient ces Fujoniens et leurs carreaux hors de prix ! »

Crachais-je avec hargne avant de me remettre à courir. Je suis forcé de passer sous le cou de la bête qui claque des mâchoires juste au dessus de mon crâne alors que je me fraye un chemin entre les gravats, l’eau jusqu’aux genoux, en hurlant des injures peu élogieuses sur la profession de sa mère. J’atteins le coin de la rue et me jette à plat ventre pour éviter un nouveau claquement de dents. Le courant m’emporte et m’empêche de me faire écraser par son museau qui frappe le sol avec violence. Je me rapproche cependant dangereusement de la corniche, si je tombe dans le lac s’en est fini de moi. Je saisis la pioche que je porte à ma ceinture pour la cogner contre le sol, espérant attraper quelque chose qui pourrait ralentir ma course. J’y parviens avant d’atteindre la rue adjacente au lac, m’arrêtant sèchement en rudoyant mon épaule. Je saisis le manche à deux mains et essaie de garder la tête hors de l’eau qui tente de m’emporter. Suivant le courant, c’est la tête du monstre qui se rapproche, je lève la pioche et roule sur moi même, évitant un nouveau claquement de mâchoire. Le serpent ne cesse pas sa course et se jette dans le bassin alors que je remarque avec effroi que le bout de sa queue est toujours dans l’eau.

Je ne m’attarde pas, si il y a un moment où filer c’est celui-ci. Je beugle pour prévenir les autres que je suis au bord du lac et que je vais les rejoindre. Une réponse lointaine me parvient, signe qu’ils ne sont plus dans le coin. En partie rassuré j’accoure vers le corps qui me bloque le passage et entreprend le pari risqué de grimper dessus. Je saisis le bord d’une écaille à la couleur d’olath pour me hisser sur le serpent qui fait bien une tête de plus que moi. Mais le gredin continue de s’avancer, me ramenant à l’intérieur de la ville plus rapidement que je ne le pensais. Je saute du haut de son corps, un peu trop tard pour réussir à éviter un mur contre lequel je m’écrase avant de tomber à nouveau par terre.

Je jure tout en me relevant, ignorant mon corps douloureux qui vacille contre les murs pour ne pas chuter encore. Je reprends la direction du lac et presse encore le pas en voyant Igrit me faire de grands signes au bout de la corniche.

« Allez Agril ! Grouille toi ! Vite ! Vite ! »

« Je fais *souffle* ce que *souffle* je peux ! *souffle* »

Crachant mes poumons, j’arrive quand même à augmenter la cadence quand j’entends le monstre sortir de l’eau en rugissant.

« Lâche tes affaires ! »

« JAMAIS ! »

Rétorquais-je avec hargne. Une arbalète à 50 yus et du matériel qui doit en valoir autant, je vais pas le donner en pâture à un gros serpent ancestral.

« COURS ! »

« JE FAIS QUOI *souffle* GROS *souffle* DEBILE ?! DES *souffle* GAUFRES ?! »

Je galope pourtant aussi vite que mes jambes peuvent me porter, percevant le raclement du long corps écailleux qui glisse sur la roche et qui se rapproche dangereusement. Mais j’y suis presque, le corps carré du flamboyant se rapproche, la main tendue. Je la saisis et il me tire hors de la trajectoire du monstre alors que sa langue siffle à côté de mon oreille. La bête percute d’ailleurs la paroi de la cavité avec violence, faisant trembler toute la caverne. Des stalactites millénaires se détachent du plafond pour s’enfoncer dans l’eau glacée sous les rugissements de rage du monstre.

« On se grouille ! »

Igrit et Furim me saisissent par les épaules pour me relever alors que je peine à reprendre mon souffle. Heureusement pour nous, le choc a étourdit le monstre, nous laissant un peu de répit pour avancer dans le tunnel qui se fait de plus en plus étroit.

« Allez encore un petit effort ! »

Rugit le géant en me poussant en avant, le passage devenu trop serré pour me soutenir sans tomber dans l’eau, toujours présente, le courant de plus en plus fort. Derrière nous le serpent s’enfonce dans la galerie en poussant un rugissement terrifiant.

« Si c’est un cul de sac nous sommes morts ! »

S’alarme l’ami des bêtes alors que le passage rétrécit encore et encore, l’eau prenant le pas sur la roche. Bientôt le bruit du courant se transforme en bruit de cascade, présageant du pire. Le bruit de nos bottes qui clapotent remplissent la galerie pour faire concurrence au corps immense qui s’immisce dans le passage et commence à lui frotter les écailles. Elle rugit à nouveau, sa progression ralentit tandis que nous avons de l’eau jusqu’aux genoux.

« Nous avons bloqués le passage pour l’enfermer. »

Récite encore Igrit entre deux souffles lourds. A l’unisson nous lui répondons d’avancer et de la fermer. Et nous avançons encore, l’eau jusqu’à la taille, le coffre maintenu au dessus de la surface par Bergham et Luvik qui mènent la marche. Derrière nous la bête sauvage du lac se débat pour avancer mais la galerie devient bien trop étroite, nous laissant souffler un peu. Un dernier rugissement et le monstre se retire, abandonnant sa chasse. Il n’y a plus qu’à espérer que ce passage mène quelque part.

« C’est quoi ce bruit ? »

Nous tendons l’oreille pour entendre un son de déferlante alors que l’eau monte de plus en plus vite et que nous peinons à résister au courant qui devient trop fort. Devant nous le vacarme de la cascade devient assourdissant et malgré tous nos efforts le courant nous emporte dans le passage qui se réduit encore. Mon corps cogne contre les parois de la galerie et je suis emporté sous l’eau. Je prie pour que mes deux compères ne lâchent pas le coffre. Une bouffée d’air dont je profite avant d’être plongé à nouveau dans l’eau froide, balloté comme une barrique de bière au milieu d’une tempête, assourdit par la cascade qui se rapproche encore jusqu’à ce qu’enfin je puisse la voir dans ma chute, accompagné du cri des miens.


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Re: La Chaîne du Karathren

Posté : sam. 21 août 2021 22:25
par Agril
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« Debout gros lard ! »

La lumière aveuglante m’empêche d’ouvrir les yeux. Etourdit, je parviens juste à pousser une plainte rauque.

« Allez réveille toi ! »

« C’est toi Skaldon ? »

Un coup de botte dans le gras du bide me ramène à la raison tout en ajoutant une plainte de douleur à la précédente. Je sens la neige froide contre ma joue et le bruit d’un courant d’eau calme non loin de mes oreilles.

« Allez Agril ! Réveille toi ! »

Second coup de botte dans la cuisse. Je pousse un râle avant de signifier que je suis réveillé. Le géant m’aide à me redresser avant d’aller voir les autres. Nous sommes tous trempés, l’air épuisés, le corps couvert d’ecchymoses, au bord d’une rivière de montagne. Mais nous sommes tous présents, en vie.

« On s’en est sorti ? »

Demandais-je, étonné.

« Ouais. Valyus nous a à la bonne on dirait. La cascade était juste assez large pour nous laisser passer, ensuite on s’est fait amener par le courant jusqu’à l’extérieur. »

« J’avais raison. » ajoute l’ingénieur en regardant l’horizon avant de désigner du doigts des directions en contre bas. « Là c’est la forêt des rancunes et le fleuve descend vers l’Atha’Ust. C’est bien ici que commence le Narshass. »

« Super. »

Dis-je en me remettant debout pour m’approcher du cours d’eau, me passer de l’eau sur le visage et remplir ma gourde. L’ingénieur poursuit en expliquant qu’en marchant vers l’ouest on devrait retomber sur Amarock ou au moins la route du col blanc. Alors qu’il explique la route à suivre je défais ma ceinture pour me soulager dans le ruisseau comme je l’avais promis.

« J’allais remplir ma gourde ! »

Râle Bergham, forcé de monter plus en amont, me provoquant un rire gras avant de me rappeler qu’il portait le coffre.

« Où est le coffre ?! »

« Détend toi. On l’a toujours. Luvik a eu la présence d’esprit de l’attacher à notre corde pendant que tu t’amusais avec la bête du lac. »

« Ah ! Le génie ! »

Dis-je en tapant dans l’épaule de l’ingénieur, profitant pour m’essuyer discrètement la main avant de remonter mon pantalon et remettre correctement ma ceinture.

« On en a pour combien de jours de marche ? »

« Je dirais trois ou quatre jours pour rejoindre Amarock, un jour de plus si nous rejoignons directement le col. »

Je me tourne pour contempler le massif montagneux qui nous surplombe.

« Il me semble qu’on est déjà trop bas pour tomber sur Amarock. »

« Moi aussi. Mais si tout se passe bien nous devrions être rentré à Likhranen d’ici une dizaine de jours.»

Nous entamons alors le voyage à flanc de montagne, nous traçant à tour de rôle un chemin dans la neige, heureusement assez solide pour ne pas qu’on s’y enfonce jusqu’à la poitrine. Encore mouillés, nous subissons les premières heures les rudesses du froid de montagne. Nous marchons jusqu’à la mi-journée avant de faire une pause pour nous réchauffer, manger un morceau et nous reposer en attendant que la lumière du jour soit moins éclatante. C’est quand celui-ci commence à disparaître derrière les sommets à l’ouest que nous reprenons le voyage, frais et réchauffé pour braver avec difficultés les intempéries de haute montagne malgré notre robustesse innés.

Régulièrement nous scrutons les cieux de peur d’apercevoir la wyverne voulant récupérer son oeuf. Nous nous reposons l’après midi pour marcher le soir, la nuit et le matin sans croiser âme qui vive dans ce désert de glace, de neige et de roche. Mais au moins le voyage se passe bien, le temps est clément. Pas de tempête, pas de brouillard, pas de chute de neige, pas d’avalanche… Difficile de se plaindre dans ces conditions. La seule difficulté réside dans le manque de vivres, la majeur partie ayant disparu avec notre chariot. C’est par petites rations que nous mangeons et rationner un Thorkin ce n’est jamais bon pour son humeur. L’ambiance devient lourde, tendue, mais nous tenons bon et parvenons à atteindre au bout de quelques jours la route du col.

Une fois sur une route balisée et moins couverte de poudre la progression devient moins difficile et cela nous évite de nous battre entre nous jusqu’à rejoindre la ville minière de Likhrannen.


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