Le Village en Cendres

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Yuimen
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Le Village en Cendres

Message par Yuimen » jeu. 4 janv. 2018 16:02

Le village en cendres



Ce village est situé entre la forêt des Faera et le lac. Il a été victime d'un raid d'une horde d'Orques d'Omyre qui a pris en esclavage les habitants ou tué ceux qui résistaient. Le village était une petite bourgade de fermiers et d'artisans. Il ne reste que les murs noircis des maisons de pierre, les toits de chaumes et les poutres ont été réduits en cendres.

Vous pouvez trouver quelques squelettes humaines jetés là sans sépultures. Le village ne semble pas intéresser la république...

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Nhaundar
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Re: Le Village en Cendres

Message par Nhaundar » ven. 22 mars 2019 20:55

VI.11 La ville en cendre.

Comme à l’accoutumé, ma période de repos est plus courte ce qui permet à Sylve, ma camarade guerrière, de se reposer plus longtemps après son tour de garde. La nuit noire ne me gêne pas, elle est même propice à la réflexion. Je suis à ma première mission pour la milice d’Oranan et me voilà déjà loin des murs de la cité. J’étais loin de me douter que ces étranges allées et venues au sein de la bibliothèque de la ville m’amèneraient ici. Pourtant après notre rencontre avec Ashiro le vieil archéologue que nous avons accusé à tord, les deux individus que nous avons débusqués nous ont parus moins sympathiques. Même s’ils nous ont échappés, l’aide d’Ashiro s’est révélée salvatrice puisque nous sommes parvenus à déterminer les raisons de leurs incursions, à savoir la recherche d’une relique nommée la chevalière en diamant du néant purgatoire, l’un des objets appartenant à une mage particulièrement connue de son temps pour être capable de manier la magie sans être à court de mana. Il nous a fallu toute une nuit de recherche et surtout une chance folle en la présence d’un des livres offerts par la guilde Equilibrium, pour mon apprentissage magique, ainsi qu’un tableau représentant les parents de Sylve près d’un lieu de culte d’une ville précise. Nous avons voyagé jusqu’à celle-ci, cependant les ruines dont ma camarade semi-elfe nous a prévenues se sont révélées exactes. Le village s’est fait attaquer, réduit en cendre tandis que ses habitants sont désormais esclaves des Garzoks d’Omyre, ou morts pour les plus chanceux. Les premières investigations n’ont rien donné et j’espère que nous pourrons mettre la main sur la relique, avant ces hommes. Qui sait ce que peut donner la bague entre de mauvaises mains. Une fois en notre possession, nous seront à même de leur tendre un piège.

Après une nuit de repos et un repas goûteux, nous reprenons nos recherches dans les ruines. Comme la veille, l’état des habitations nous rend la tâche difficile. Les boutiques, les habitations, les espaces de la milice locale et même le bâtiment du dirigeant local, tout a pris feu. Nous arrivons finalement à un bâtiment qui a bien moins subit l’incendie puisque son sol est en pierre.

"Il s’agit vraisemblablement de la demeure d’un vieil homme d’après ce que j’ai trouvé ici. Il n’y a pas grand-chose de valeur et la plupart des objets encore présents semblaient déjà bien usés avant l’incendie. Rien d’une grande utilité pour nous." Nous explique Ashiro.

Lui et Sylve se dirigent vers la sortie, mais quelque chose me dérange ici.

"Un problème Nhaundar ?" Me demande la semi-elfe.

"Rien, juste que…quelque chose cloche. Cette demeure semble trop…riche. Je crois même que c’est la plus riche que l’on est visitée. Regardez la pierre ! Fais-je en désignant le sol. C’est la seule demeure ainsi construite. Ca me donne l’impression d’un…d’un tombeau." Finis-je en examinant le sol d’un regard neuf.

Si je regarde brièvement les pierres au sol, guettant une éventuelle différence, je pose finalement mon dévolue sur la cheminée, le seul autre équipement de la maison à être également en pierre et ayant survécu à l’incendie. Je l’examine et la tâte à la recherche d’une interstice ou d’autre chose encore.

"Je comprends parfaitement votre impatience jeune elfe, mais je connais bien les caches secrètes et croyez-moi si je vous dis qu’elles ne sont pas si…"Commence l’archéologue avant que je ne l’interromps.

"Ce symbole, ce n’est pas celui représentant la magicienne ?" Dis-je en grattant la poussière sur un dessin en haut de la cheminée.

J’exerce malgré-moi une pression sur le symbole qui s’enfonce dans la pierre. Une série de cliquetis et de roulement mécanique se fait entendre un peu partout et finalement, une trappe s’ouvre en lieu et place du foyer pour la cheminée.

Je regarde le vieil homme et lui lance d’un petit air narquois : -Vous disiez l’ancêtre ?

"Hum, la chance du débutant !" Rétorque-t-il.

Nous rassemblons nos affaires tandis que Sylve fabrique quelques torches de fortune. Mon contrôle du feu ne me permet d’éclairer que sur une courte durée et je ne peux passer mon temps à générer de la lumière encore et encore. Nous pénétrons finalement à l’intérieur du passage avec moi en tête et l’avantage de ma vue dans l’obscurité. Même moi je ne perçois rien dans ces ténèbres. Du bout des doigts j’allume la torche et la lumière nous dévoile un étrange chemin sinueux entre deux parois rocheuses, très près l’une de l’autre. Je me saisis de la torche et m’avance le premier dans ce défilé de pierre.

Le chemin semble nous éloigner de la ville bien que cela semble faire une bonne heure que nous marchons ainsi, nous progressons très lentement sur un chemin parsemé d’obstacles naturels. Si la main de l’homme a forgé cet accès, la nature désire visiblement reprendre ses droits. Nous arrivons enfin dans un espace plus large. Face à nous, une imposante bâtisse taillée dans la montagne se dresse dans la lumière d’une faille provenant du plafond. Aucune porte, seule une entrée sombre de plusieurs mètres de haut entourée par d’imposantes colonnes, bien qu’inutiles puisque tout est creusé dans la roche.

"C’est…c’est…l’antique cité de d’Eprat." S’exclame Ashiro.

Je le regarde l’espace d’un instant et le dévisage. Il arbore une expression mitigée entre le bonheur et la stupéfaction. Malheureusement je me dois de recentrer notre attention. "Pour les néophytes qu’est-ce que la cité d’Eprat ?"

"Eprat est une très vielle cité qui a disparu de l’histoire de Yuimen. Elle n’avait aucune utilité en tant de guerre que ce soit militairement ou en termes d’approvisionnement de ressources. Elle n’était qu’une étape de pèlerinage pour beaucoup, mais elle avait un lien secret avec l’ordre magique dont je vous ai parlé la veille de notre départ d’Oranan." Détaille-t-il.

Je regarde les portes de la cité d’un œil neuf. "Vous voulez dire, celui que vous avez recherché toute votre vie ?"

Pour simple réponse il s’avance avec une vigueur toute nouvelle vers l’entrée d’Eprat et nous le suivons de près avec ma camarade.

VI.13 Eprat.
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Nhaundar
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Re: Le Village en Cendres

Message par Nhaundar » ven. 22 mars 2019 21:06

VI.12 Un bâtiment étrange.

Passé la grande ouverture de la cité, nous faisons face à une architecture intérieure impressionnante. L’antichambre où nous nous trouvons possède trois passages. Deux sont sur les côtés tandis que la dernière nous fait face. D’importants piliers sont présents pour supporter le minage de la montagne et empêcher le tout de sombrer, bien que le temps a démontré la preuve de sa force avec des dégradations dû au temps. La pièce possède de nombreuses fresques qui ornent murs et piliers, et certain pans de murs ont visiblement cédés. Les gravures évoquent des batailles, d’autres mettent en avant des personnages particuliers sur les piliers ou encore un étrange rituel avec des individus portant le même ensemble au plafond.

"C’est incroyable. J’avais entendu parler des évènements majeurs gravés à même la roche, comme imprégnés et figés à jamais dans le temps." Déclare Ashiro en tâtonnant les murs.

Je le regarde, circonspect, et le pousse à parler davantage.

"Que représentent ces gravures pour les ignorants ? Vous semblez y voir une importance qui m’échappe totalement."

"Mmm oui. Il est vrai que ces moments de notre histoire ont été totalement effacés des livres recueil historiques, où transformés en mythes et légendes improbables." Répond l’archéologue avant de détailler la principale fresque sur le mur au-dessus du passage de gauche. "Bien que la moitié de celle-ci soit tombé, il est aisé de retrouver son origine. La première représentation est la bataille du gouffre rond. Il y a plusieurs centaines d’années, avant même la fondation d’Oranan, les troupes d’Oaxaca exerçaient de nombreux raides pour le contrôle de la région. Il y avait en ce lieu, une formidable accumulation des énergies telluriques que convoitaient les troupes de la reine noire. Pour la même raison, les plus grands magiciens s’étaient rassemblés pour perfectionner leurs maîtrises magiques. Unis sous la même bannière, les gardiens de ce lieu sacré ont affronté les hordes du nord et sont parvenues à les repousser au prix de nombreuses pertes. Dès lors, le petit bourg magique s’est fortifié pour lutter contre les assauts qui se sont répétés au fur et à mesure du temps pour finalement se nommer Eprat et devenir la cité qui a brillé par son savoir."

Il se déplace sur la droite et arrive vers le premier pilier que nous rencontrons. Il prend le temps d’examiner le personnage qui s’y trouve avant de nous renseigner sur l’identité de l’homme.

"Il s’agit d’Aorim Melkiar. L’un des mages les plus puissants à la fondation d’Eprat. C’est lui qui est parvenu à rassembler tous les magiciens sous la même bannière. Il a acquis une renommé sans égale dans l’ordre magique en plus d’être à la charge de la formation des meilleurs éléments de la cité."

Il continue son chemin jusqu’à la seconde illustration de la pièce. Encore une fois il s’agit d’un homme, ou plutôt d’un elfe. Il porte un étrange couvre-chef avec des plumes, ainsi qu’un ample bâton à la main. Il possède également une multitude de petits objets portés en broche et bien que ses vêtements soient relativement sobres, il se dégage quelque chose d’intriguant de lui. Ashiro regarde intensément la fresque. Ses yeux vont et viennent sur les éléments propres au personnage et ses mains cherchant à déchiffrer en tâtonnant la pierre.

"C’est étrange…j’ignore complètement de qui il s’agit. Malgré toutes les informations recueillies durant de nombreuses années, je n’ai jamais trouvé la moindre indication de qui peut être cet homme qui m’est apparu à quelques reprises. Pourtant, pour être ainsi illustré en compagnie de celui qui est le fondateur de l’ordre, il doit être aussi important que lui." Marmonne-t-il.

Un point m’interpelle sur la désignation qu’il fait du groupe de magicien.

"Vous dites qu’il s’agit d’un ordre visiblement composés uniquement de mages, comment le savez-vous ? Pourquoi n’est-ce pas dirigé par un roi ou un régime électif gérant à la fois les mages et le reste de la population ?"

"Tout simplement car les mages ont refusé tout pouvoir ayant une possibilité de s’opposer entre eux et leur quête du savoir." Répond-il. "Je ne suis pas parvenu à comprendre comment fonctionnait leur système hiérarchique malheureusement. Cependant, il est clair qu’ils sont parvenus à trouver un moyen de s’entendre. Peut-être que la réponse se trouve plus loin dans les ruines. Selon les traductions que j’ai pu faire, il semble qu’ils se nommaient eux-mêmes, les mages savants, les chercheurs magiques, enfin quelque chose de similaire."

Il continue sur la fresque de droite dont le passage est bouché par un amas de pierre.

"Qu’est-ce que ceci ? Donnez-moi la torche j’ai besoin de plus de lumière." Il me la prend des mains et je sens monter en lui une certaine nervosité. Par tous les dieux. S’exclame-t-il finalement.

"Vous pourriez prendre le temps de me donner des détails." Finis-je par m’impatienter.

"Il s’agit du rituel qui a mené à l’oublie total d’Eprat." Dit-il enfin avant d’enchaîner. "Avec le temps, l’ordre a acquis un savoir sur la magie qui occultait tous les autres cercles magiques sur Yuimen et un grand nombre d’individus ont tenté de s’en emparer. Malheureusement il y avait des espions venant des cités elles-mêmes opposés à Oaxaca, une quête de puissance qui pousse les alliés potentiels à se nuire mutuellement. De nombreux conflits internent se sont répandus à l’intérieur de la cité et des assassinats ont été perpétrés. Face à un ennemi de l’intérieur, plusieurs magiciens ont accepté de pratiquer un rituel visant à faire oublier toute existence d’Eprat de l’histoire et à dissiper les énergies convergentes pour que personne ne mette la main sur son pouvoir."

"Le rituel n’a donc pas fonctionné puisqu’il existe les traces que vous avez dénichées." Dis-je. "Et pourquoi utilisez-vous le terme « d’alliés potentiels » ?"

"Tout simplement parce que l’ordre s’est voué aux connaissances, ni plus ni moins. Il n’a pas cherché à s’étendre ou même à protéger les cités lointaines. Les mages se sont fixés un but et ils ne l’ont jamais dévié. Enfin avant l’apparition des espions. Quant au rituel, il a fonctionné bien au contraire ! La cérémonie a été un succès au-delà de leurs espérances. Les textes, les souvenirs, les cartes, tout ce qui indiquait l’existence d’Eprat a été balayé sur l’ensemble de Yuimen, même le savoir acquis au fil du temps. Il est dit que même les dieux l’on oubliée. Seuls les mages ayant pratiqué le rituel ont été préservés. Ils se sont disséminés partout, enseignant à ceux qui avaient un grand potentiel et une âme dévouée pour la magie. Ainsi le savoir et l’histoire se sont transmis de maître à apprentis en semant ici et là des bribes d’informations que j’ai dénichées. D’après ce qui est écrit, le nexus aurait engloutit toute la cité lorsque la dernière parcelle de magie a quitté Eprat. Maintenant que j’y pense, il me semble que des dispositifs ont été mis en place pour dérouter les visiteurs indésirables hors des ruines. Peut-être que ce qui les animait est devenu inefficace avec le temps." Raconte le vieil homme.

Alors que nous regardons les traces du passé, Sylve nous fait sursauter.

"Il n’y a rien dans l’accès de droite !"

"Parbleu, je vous prierais de ne plus nous faire une telle frayeur mademoiselle." S’exclame l’archéologue entre deux grandes inspirations.

Il est vrai qu’Ashiro possède un talent particulier pour compter les histoires, j’en ai complètement oublié pourquoi nous sommes présents.

"C’est quoi ça ?" Demande-t-elle en désignant des dessins au sol.

Il s’avance encore un peu jusqu’à rejoindre la semi-elfe au centre de la pièce. Une importante fresque désigne clairement un objet particulier et je lui demande de plus ample information.

"Qu’est est cet objet au centre d’attention de cet élément ? Il semble sacré aux yeux de l’ordre."

Ses yeux s’agrandissent comme je ne l’avais encore jamais vu, même lorsque nous avons mis le doigt sur la localisation probable de la relique. Il se baisse au sol pour tâtonner la gravure.

"Ce n’est pas un objet, c’est le nexus !" S'exclame-t-il. "Rappelez-vous je vous ai parlé du rassemblement des énergies telluriques, le nexus est simplement le puits qui permet de faire usage de cette énergie."

Je lui rétorque en le voyant trembler de tous ses membres.

"Cela n’explique pas votre état. Vous semblez hors de vous-même !"

"Mais vous ne voyez donc pas ? Ceci est une carte ! Une carte amenant au nexus. C’est dans cette direction !" Clame-t-il après quelques minutes pour déchiffrer l’ensemble en pointant vers l’accès face à l’entrée.

Au-dessus du passage se trouve un étrange dessin, là où il se trouve les fresques sur les passages latéraux et je lui demande :

"Vous pouvez nous expliquer ce que représente ces dessins étranges ? "

"Ce n’est pas un dessin, c’est l’écriture de l’ordre." Répond-il simplement. Il est écrit… "« Il n’y a pas de raccourcis menant à la sagesse, car ce sont les obstacles qui repoussent nos limites ! Entrez et arpentez le chemin des anciens. »"

"C’est marrant, on dirait presque une mise en garde." Dis-je alors que l’archéologue s’avance sans nous.

"C’est exactement ce que vous vous imaginez ! Mais avec un mage, une guerrière aguerrie tel que vous et mon expérience, nous ne craignons rien. Surtout si comme je le pense les mécanismes de défenses ne sont plus aussi efficaces." Lance-t-il avec un ton déstabilisant comme s’il allait cueillir des fleurs.

VI.14 Rolling Stone.
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Nhaundar
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Re: Le Village en Cendres

Message par Nhaundar » ven. 22 mars 2019 21:18

VI.13 Eprat.

Il nous est difficile d’avancer en toute sérénité, sauf pour notre guide. D’un pas assuré et avec une énergie digne de ses vingt ans, Ashiro arpente les couloirs sans aucune peur, armé d’une simple torche. De temps à autre il dévie un peu de sa trajectoire, préférant longer les rebords des murs et à d’autre moment il regarde un objet, hésite à le déplacer pour finalement le prendre sauvagement sans qu’aucun mécanisme de défense ne se déclenche, sauf peut-être un soupir de déception du vieil homme.

Exaspéré par l’attitude inconsidérée de l’archéologue, je tente une once de diplomatie.

"Loin de moi l’idée de calmer vos ardeurs, maître Ashiro, mais pourriez-vous ralentir un peu ? Nous n’avons pas le temps de vérifier si les pièces sont sécurisées."

"Ho arrêtez un peu vos simagrées, ces ruines sont comme le nom l’indique : des ruines. Je vois que vous ne me croyez pas." Me dit-il. "Vous voulez un exemple ? Venez !" Ordonne l’archéologue en pénétrant soudainement dans une pièce sur la gauche.

Nous le rattrapons rapidement tandis qu’il inspecte les murs de la pièce. Il enlève de la poussière sur un texte gravé dans la roche, tâte les pierres avant de se retourner vers nous.

"Vous êtes prêt ?" S’exclame-t-il en enfonçant un autel sur un côté de la pièce que nous n’avons pas remarqué au premier abord.

Un vrombissement se fait entendre et soudainement l’accès à la pièce se referme derrière-nous. Rapidement une trainée lumineuse apparaît sur le pan de mur opposé à l’autel. Après un rapide examen il s’avère que c’est un filet d’eau qui s’en échappe. Le filet grossit rapidement pour se projeter à quelques centimètres du mur. La curiosité devient frayeur lorsque brusquement l’écoulement devient une puissante projection aqueuse qui remplit rapidement la pièce.

Je hurle au vieil homme qui garde son sourire malgré le danger.

"Mais qu’avez-vous fait ? "

Sylve me devance et l’attrape par le col en le menaçant.

"Arrêtez immédiatement votre petit manège c’est clair ?"

Sous la colère saisissante de la guerrière, Ashiro s’exécute immédiatement. Il enfonce plusieurs pierres et le jet d’eau s’estompe.

"Cette pièce est un piège basique. Ceci ressemble à un autel qui renferme en général des esprits avec lesquels communier. Cela permet d’entrer en phase avec…"Commence-t-il à expliquer avant de s’arrêter devant la mine patibulaire de la semi-elfe. "Quand on l’active, en lieu et place de l’esprit de l’eau s’écoule et il faut connaître une combinaison de symbole pour l’arrêter souvent en rapport avec l’esprit recherché. Je vous rassure ce genre de dispositif est censé être pédagogique."

"Pédagogique ?" Dis-je choqué par ce que je viens d’entendre. "Comment une telle chose peut être pédagogique ?"

"L’eau n’apparaît pas par magie, c’est un système mécanique qui gère ça. Il en est de même pour vider l’eau. Lorsque le niveau devient critique tout est évacué, l’eau comme les personnes présentes dans un lac à proximité. Ca impose le calme de l’esprit durant une situation d’urgence à laquelle on ne s’attend pas."

Les dernières traces d’eau disparaissent et l’accès pour sortir s’ouvre. D’un geste brusque mais maîtrisé, Sylve malmène le vieil homme dehors. La poigne ferme transmet une menace sourde, mais bien réelle. Après un échange si bas que j'en ignore la teneur, nous reprenons notre marche. Bien que cette fois-ci nous progressons plus lentement, nous sommes plus serein dans notre avancée au sein d’un couloir qui s’élève en une petite pente. Nous passons un fossé vide au beau milieu du chemin assez petit pour le franchir avec un simple élan. C’est plus loin que les choses se compliquent lorsque nous faisons face à un cul de sac. Ashiro examine de nouveau l’ensemble et y découvre un texte.

"Il semble s’agir en réalité d’une énigme. On nous demande de choisir entre notre l’intelligence ou la connaissance." Décrypte-t-il. "Mais qu’est-ce que… ?"

Un cercle magique lumineux apparaît sur le mur nous faisant face. Lentement le cercle diminue comme si une corde enroulée se consumait par un bout.

"Ce doit être un compte à rebours, nous avons un temps limité pour répondre à l’énigme." Explique l’archéologue.

"Je n’aime pas ça ! Nous devrions faire demi-tour et trouver un autre chemin." Dis-je en examinant autour de nous.

"Ne soyez pas idiot jeune mage. La réponse est pourtant simple, l’intelligence sans connaissance n’est rien !" Déclare le vieil homme et met fin au cercle magique qui disparaît.

Je me rapproche de lui et l’attrape par le col.

"Qu’avez-vous fait ? Je comprends que vous avez passé votre vie à votre quête, mais vous n’avez même pas pris le temps de réfléchir à la question. Comment pouvez-vous trancher si vite à un choix impossible ?"

"Cela fait trop d’années que je recherche cette cité et ce n’est pas cette stupide énigme qui m’arrêtera. Pensez-vous que je ne sais pas ce que je fais ? Je vous ai prouvé que je maîtrisais les pièges alors fiez-vous à mon jugement !" S’offusque Ashiro.

Le mur de l’impasse vrombi et s’incline en une pente qui monte vers l’étage supérieur.

"Vous voyez !" S’exclame-t-il fier de lui.

Pourtant le vrombissement ne cesse pourtant pas, il prend même de l’ampleur. La torche en main je la brandie vers le nouvel accès et ma vision dans le noir fait le reste. Je leur hurle ce que je vois.

"Courez ! Quelque chose approche et ce n’est pas bon !"

Je crois que l’expression de mon visage fait le reste car je n’ai pas besoin de plus d’arguments pour convaincre Sylve. Elle se saisit de l’archéologue et l’emporte avec elle sous les contestations de ce dernier. Finalement il cesse de geindre lorsqu’une énorme boule de pierre surgit de l’ouverture pour nous menacer d’une fin cruelle et plate. Si nous avons réagi à temps, la pente accentue la vitesse de la sphère qui nous rattrape. Je fais rugir ma magie pour lancer une boule de feu qui n’a pas plus d’effet qu’une vulgaire étincelle.

(Mon sort de feu n’a pas suffisamment d’impact. Si j’ai bien fait d’apprendre de nouveaux éléments je crains de n’avoir assez de magie en moi !)

Cette fois-ci j’anime le fluide terrestre. Un amas de terre se forme en une colonne qui se rue sur la pierre. L’impact est plus important que ma boule de feu et s’il parvient à avoir un effet, la boule ne fait que ralentir à cause de l’élan accumulé. D’instinct je sais qu’il me faudra plus d’une frappe du golem pour l’arrêter. Je cherche dans mon sac une de mes potions de mana avant d’être arrêté par mes camarades d’explorations.

"Mais courrez bon sang !" Leur dis-je affolé.

"On ne peut pas ! Le fossé de tout à l’heure, il s’est élargie, trop pour que nous puissions sauter." Me répond Sylve.

Effectivement, nous en sommes incapables. C’est désormais plusieurs mètres que nous avons à franchir. Sylve pourrait bien le franchir, mais avec un minimum d’élan et sans être encombrée de tous ses équipements et armures.

Je me tourne vers la boule qui continue d’accélérer et fais vibrer la magie terrestre en moi tout en leur hurlant des ordres.

"Descendez maintenant !"

"Vous êtes sot jeune elfe. Nous allons nous finir écrasé par cette chose et il n’est pas né celui qui me poussera dans la fosse !" M’invective le vieil homme.

Maniant mon fluide terrestre je crée une nouvelle colonne de terre sur la boule pour la ralentir autant que possible et supplie ma camarade à se fier à moi.

"Sylve, fais-moi confiance ! J’ai un plan mais il nous faut descendre ! Reste juste à niveau pour surveiller l'avancée de la boule."

Je la sens hésiter dans mon dos. Elle a peut-être une idée en tête, mais l’absence d’initiative prouve qu’elle-même doute de ses chances. J’entends l’archéologue geindre de douleur et du coin de l’œil les deux corps disparaissent engloutis dans le sol. Je me saisis d’une potion de mana que je vide d’une traite et aidé par la guerrière, je rejoins mes deux camarades dans notre fosse commune tandis que mon fluide terrestre s’anime pleinement en moi.

"Qui aurait cru que je finirais mes jours ainsi, si près du but de ma vie ?" Se lamente Ashiro.

Je pose les mains au sol et cherche à ressentir la terre autour de moi, à ne faire qu’un avec elle, mais pour cela je vais avoir besoin de calme. Subtilement je fais part de ce souhait.

"Vous ne mourrez pas ici vieil homme et nous non plus. En tout cas tant que vous la fermerez !"

Je me plonge corps et âme dans mon fluide magique. J’insuffle dans la terre tout ce que j’ai en magie de cet élément.

"Elle est sur nous !" Me prévient Sylve forcée de quitter son point d’observation.

Les mains toujours posées au sol, je lève la tête pour voir ce bloc de terre arriver sur nous et use de toute la magie terrestre en moi. Entre mes mains, un puissant bloc de pierre qui s’extrait du sol. Le pilier magique frappe la boule alors qu’elle s’apprêtait à nous tomber dessus et l’envoie voler un peu plus haut. Si frapper la pierre roulante dans le sens opposé à sa vitesse ne la ralentit qu’un peu, l’atteindre par le bas permet de la maintenir en hauteur plus longtemps, juste assez pour qu’elle atteigne le bord opposé. Cependant par manque d’impulsion suffisante, elle frappe l’autre côté en perdant une grande partie de sa vitesse. Nous l’observons se maintenir en équilibre quand une fissure se créer sur la paroi soutenant la boule. Elle se propage largement jusqu’à arriver à nos pieds fragilisant l’ensemble.

"Remontez ! Vite !" Hurle la semi-elfe qui nous sort de notre léthargie.

Je la force à monter la première avant de pousser le vieil homme à faire de même. Il saisit les bras de la guerrière qui le lève rapidement avec mon aide. Derrière-moi le sol où repose la boule cède de plus en plus et l’équilibre précaire est en train prendre une décision finale.

"Saute !" M’ordonne Sylve.

Je pousse aussi fort qu’il m’est possible sur mes jambes, mais la main tendue est encore trop loin. Je n’ai pas les capacités physiques nécessaire pour monter et plus personne pour me donner la poussé suffisante pour palier à mon manque de force.

(Je n’ai que ma magie, alors usons de ça jusqu’au bout !)

Je fais vrombir mon fluide incandescent en moi et une boule de feu s’extrait que je lance sur la paroi à mi-hauteur que je tente de gravir. Un léger trou se forme, mais suffisant pour y placer mon pied. L’onde de choc de mon sort a accéléré l’affaiblissement du sol sous la boule ne me donnant pas l’opportunité d’un deuxième point d’appuis. Je place mon pied et me propulse en hauteur. Cette fois-ci je parviens à attraper la main de la semi-elfe, mais elle peine à me soulever à elle seule. Je regarde la boule de pierre amorcer son ultime descente que la poigne se resserre soudainement. Soudainement, je suis soulevé rapidement par Sylve aidé d’Ashiro et manque de peu de perdre une jambe coincée par la pierre roulante. Le soulagement nous étreint tous. Nous nous éloignons rapidement lorsque le sol tremble refermant le trou où nous étions il y a peu.

"Je savais bien que je pouvais compter sur vous !" Déclare l’archéologue.

Nous prenons un peu de temps pour souffler puis nous reprenons la route jusqu’à l’impasse. De nouveau le système magique se déclenche et Ashiro est sommé de se taire tandis que le choix entre l’intelligence et la connaissance est proposé. Je fixe le cercle magique matérialisant le compte à rebours. Je ne dis mot pendant que le temps passe et que derrière-moi le vieil homme trépigne d’impatience. Le cercle se consume de lui-même complètement et toutes les indications magiques disparaissent. Nous craignons que la boule nous charge à nouveau quand le mur devant nous s’élève en prolongeant le couloir.

Je me tourne vers Ashiro qui reste pantois.

"Il n’existe pas de bonne réponse à cette question. Sans la connaissance l’intelligence n’est rien, mais il faut savoir faire preuve d’intelligence pour faire usage de la connaissance. Il faut subir l’échec pour comprendre cette signification, mais ceci devrais vous aider à comprendre." Appuyant mon explication, je relève ma manche droite pour y montrer une brûlure démarrant au poignet et se propageant en direction de l’épaule et Ashiro baisse la tête face à cette vision.

Nous avançons un peu plus loin où nous attends un espace plus large qu’Ashiro décrit comme une pièce de recueillement pour l’esprit. C’est précisément ce donc nous avons besoin après ces derniers énervements. Nous établissons de quoi nous restaurer dormir avant d’entamer la suite de notre périple.

VI.15 Tourner en rond.
Modifié en dernier par Nhaundar le ven. 22 mars 2019 21:28, modifié 1 fois.

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Nhaundar
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Re: Le Village en Cendres

Message par Nhaundar » ven. 22 mars 2019 21:27

VI.14 Rolling Stone.

Les architectes de ce lieu sont surprenants. Ils sont capables d’installer des pièges magiques sophistiqués pouvant rester conservés plusieurs siècles. La salle où nous sommes reposés n’est en rien confortable, mais elle a l’avantage d’être sûr. Il y règne une atmosphère chaleureuse avec le foyer mit à notre disposition activé magiquement à notre arrivée, nous procurant une douce chaleur. La tension accumulée nous est tombé dessus d’un coup. Nous prenons le temps de nous restaurer avant de nous endormir dans l’un des fauteuils présents. Quittant ma méditation bien avant les autres, je profite de l’occasion pour observer les lieux.

Il y a sur place de nombreux textes dans la langue des anciens propriétaires. Je m’exerce à une tentative de décryptage avec l’un des livres d’Ashiro, mais je suis loin d’égaler ses compétences. Ajouté à cela l’agencement chaotique des caractères retranscrits et ma patience est rapidement mise à rude épreuve. Malgré tout je répète mes tentatives et mon exaspération à finalement raison du sommeil de l’archéologue.

"Pouvez-vous me dire ce que vous trafiquez avec mon livre ?" Me demande-t-il.

"J’essaye de comprendre la signification des textes comme j’avais un peu de temps. Malheureusement je n’arrive à rien." Lui dis-je en lui rendant le livre.

"Ha, cela ne m’étonne guère. J’ai passé presque toute ma vie à étudier leur langage ! Vous ne pallierez pas mes années de travaux simplement avec mon livre. Laissez-moi le temps de manger un morceau et je vous traduirais vos textes." Termine-t-il en se s’étirant.

Sylve à son tour se réveille avec l’air de celle que l’on a dérangé dans un repos encore trop court. Nous mangeons tous ensemble et tandis que la guerrière s’affaire à s’occuper de ses lames, Ashiro vient à moi en ouvrant son livre. Je lui montre les quelques symboles que j’ai reconnus et ce que j’en déduis.

"Il s’agit de ceci. De ce que je comprends il est question d’un chemin et d’une décision à prendre. En revanche je n’arrive pas à trouver celui-ci ni à faire le lien."

Intéressant ! Vous êtes parvenu à presque tout retranscrire cette section." Me complimente-il en examinant l’inscription. "Je n’ai pas souvenir d’avoir vu un tel symbole, laissez-moi quelques instants il me faut un autre ouvrage."

Il se met à fouiller ses livres les uns après les autres et je ne peux m’empêcher une remarque.

"J’ai eu l’occasion de parcourir vos archives, c’est un vrai foutoir. Pourquoi après toutes ces années n’avez-vous pas compilé vos informations ?"

"Parce que cela me rappelle ma défunte femme." Répond-il en s’arrêtant brusquement. "Elle aussi n’aimait pas mon organisation particulière. A chaque fois que je fais ce même constat je repense à elle. Il reprend ses recherches et dégote finalement l’information. Ha ! Le voilà ! Si nous regroupons le tout il semblerait que le passage ait besoin d’une forte volonté pour être franchi ou quelque chose de similaire."

"Et qu’est-ce que c’est censé vouloir signifier ?" Dis-je perplexe.

"Aucune idée !" S’exclame-t-il simplement. "Prenons simplement le chemin et nous verrons."

Le temps passe alors que Sylve termine de manger et que je range les affaires de l’archéologue pendant qu’il passe d’une inscription à une autre. Lorsque ma camarade semi-elfe a terminé de s’occuper de ses effets personnels et de préparer la torche, le vieil homme nous entraîne vers la seule sortie sans même un merci à mon attention. Nous franchissons un long couloir pour arriver à une pièce très similaire à celle d’où nous venons. Rien ne semble être d’un intérêt particulier donc nous continuons d’avancer. Un même couloir et une même pièce nous attendent et les esprits s’interrogent.

"Regardez, des traces de passages nous ne sommes pas seul... !" S’exclame Ashiro avant de se faire taire par la semi elfe qui le force au mutisme avec sa main plaquée sur la bouche.

"Si nous ne sommes pas seuls il serait mieux de ne pas hurler comme vous le faites. On ignore si ces personnes sont hostiles ou non." S'agace-t-elle.

Elle s’avance jusqu’à une multitude de traces au sol et les examines.

"Que voyez-vous jeune dame ? Voir l’avenir dans les crottes de lapins n’est en rien une science !" Se moque le vieil homme.

"Je vois trois personnes. Un mage, une guerrière et un érudit particulièrement pénible." Détail sérieusement Sylve.

"Par tous les dieux vous êtes capable de voir tant de choses avec de simples marques ?" Fait l’archéologue subjugué avant de se prendre mon bâton sur le crâne.

"Non imbécile ! Ce sont nos marques ! C’est la même pièce où nous nous sommes endormis. J’ai raison ?" Dis-je à la semi-elfe qui me confirme mes soupçons.

"Cessez de vous moquer de moi c’est purement impossible !" S’offusque le vieil homme.

Dans les affaires de l’archéologue je prends de quoi écrire et pose mon message sous une pierre que j’installe au milieu de la pièce et m’exclame :

"Alors essayons d’en avoir le cœur net."

Nous prenons de nouveau le passage et arrivons dans une pièce similaire avec une pierre au milieu du chemin.

"Je crois qu’il y a un mot sous la pierre qui vous est adressé." Dis-je à l’archéologue.

Il s’y rend et lit ce qu’il y a inscrit sur le papier sous la pierre.

"« Vous n’êtes qu’un vieux sénile ! » Espèce de sale petit…" S’énerve-t-il avant que je ne l’interrompe.

"Cessez vos jérémiades nous devons trouver un moyen de sortir."

Par mesure de précaution nous prenons le chemin inverse, mais bien entendu nous sommes visiblement coincés. Je m’en retourne vers le vieil homme pour lui demander.

"Que disait le message que nous avons traduit ?"

"Quelque chose comme, le chemin s’ouvrira par la volonté des choix !" Nous révèle-t-il.

"Pourquoi ne pas tout simplement dire que nous désirons la bague ?" Lance simplement Sylve.

"Qu’entends-tu pas là ?" Lui dis-je.

"Mon père avait l’habitude de me dire qu’en répétant oralement une tâche ardue, on l’atteignait plus facilement que cela poussait l’esprit et le corps dans un même objectif." Explique-t-elle.

"C’est absurde !" Rétorque Ashiro.

"Très bien essayons !" Fais-je.

"Comment ?" S’étonne l’archéologue.

Je le toise de toute ma hauteur et lui répond.

"A moins que vous n’ayez d’autres idées à nous soumettre ?"

Il se met à grogner dans son coin et s’oblige à nous suivre. Arrivée à la porte je clame haut et fort : Chevalière en diamant du néant purgatoire ! Je me tourne vers la guerrière qui semble ne pas comprendre. C’est le nom complet de la bague. Heu…vous devriez vous aussi dire son nom. Il serait bête d’arriver dans des lieux différents.

"Chevalière en diamant du néant purgatoire." Dis-je en avançant. J’entends dans mon dos Sylve faire de même.

"Pfff grotesque !" Déclare Ashiro seul dans la pièce. "Chevalière en diamant du néant purgatoire !" Fait-il avant de lui aussi s’avancer.

VI.16 Chemin de travers.
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Nhaundar
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Re: Le Village en Cendres

Message par Nhaundar » ven. 22 mars 2019 21:37

VI.15 Tourner en rond.

Guidés par une torche de fortune nous pénétrons dans le couloir. Cette fois-ci il est plus long, mais aussi plus froid. Petit à petit les murs du couloir se changent en pierres plus importantes avec le froid qui s’intensifie. Finalement nous débouchons dans une vaste pièce possédant un halo bleu au plafond. Sûrement une autre manifestation magique due à notre arrivée. Formant une paroi circulaire, tout n’est qu’un amas de pierres gelées de taille humaine tandis que le sol est extrêmement lisse. La fumée de nos souffles traduit un froid important. Aucune inscription, de marque ou même d’accès. Une impasse en somme.

Nous examinons les parois en quête d’un indice lorsque la semi-elfe nous fait part d’une remarque grotesque.

"La pierre…elle a vibré !" S’étonne-t-elle en gardant son regard fixe contre une portion du mur.

"Jeune fille veuillez cessez vos bêtises. J’avoue avoir commis des erreurs, mais jamais au grand jamais une pierre ne vibre." Se moque Ashiro.

Ignorant désormais les remarques de l'archéologue, je m’en vais voir ma camarade et m’inquiète de son état.

"Comment te sens-tu ? Un peu fatiguée, tu as mal dormi ?"

"Je vais parfaitement bien et je ne suis pas folle, la pierre a belle et bien vibré. Regarde !" S'exclame-t-elle.

Elle me désigne un bloc de pierre ou de glace c’est difficile à dire avec tout ce gel. Effectivement la pierre semble ronronner comme un chat, puis elle se détache du mur tout en restant collée à une pierre adjacente. Rapidement d’autres pierres alentours font de même. Désormais c’est un important amas de bloc de glace qui s’extirpe et la forme qui se dessine m’inquiète.

"Nhaundar, c’est…toi aussi tu vois une…une…" Tente vainement de décrire Sylve alors je termine le constat à voix haute.

"Oui c’est…une main !"

Nous nous reculons, forcés par le nombre croissant de roche qui s’extirpent du mur. Ashiro nous rejoint au centre de la pièce tandis que se dresse devant nous un…

"Par tous les dieux c’est…un golem !" Déclare le vieil homme.

La créature fait dans les cinq ou peut-être six mètres de haut. Composée de morceaux de roches gelées les un aux autres, ses bras ainsi que toute la partie tête et épaules est recouverte de pics acérés. Sa gueule à peine ouverte laisse entrevoir une myriade de crocs capables de sectionner un membre aussi facilement que les ailes d’une mouche et ses yeux sont d’un bleu à vous glacer le sang. Une fois complètement extirpée de la paroi, la créature baisse la tête dans notre direction. Subjugués par la vision qui nous est offerte, Ashiro et moi-même ne bougeons pas lorsqu’elle lève le poing pour nous frapper. C’est la guerrière qui nous sauve du choc en nous poussant tout deux et si elle se protège avec son bouclier, elle encaisse un puissant coup qui l’a projette au loin tandis que je hurle.

"Syyylve !"

Bien que le coup a été lent, bien plus lent qu’une flèche ou une boule de feu, la force qu’il est capable de déployer est conséquente, impitoyable, c’est littéralement un mur qui vous frappe. De nombreux morceaux de pierres se détachent du mur et plusieurs d’entres-eux bloquent l’unique issue. Au sol comme tétanisé, Ashiro regarde l’implacable créature.

"C’est pas le moment de se reposer vieux fou ! Eloignez-vous d’ici au plus vite !" Lui dis-je alors que je me relève.

Malheureusement la créature semble s’intéresser à l’archéologue. Elle dresse de nouveau son bras et abat son poing. Je manipule le fluide terrestre en moi et crée une colonne de terre qui vient percuter la main et la dévie in-extremis de sa trajectoire. Si le vieil homme se prend quelques morceaux brisés du golem, cela a au moins le mérite de le sortir de sa léthargie.

"Prenez garde, il s’agit d’un golem de glace. Votre magie de feu sera peut-être plus efficace." Me dit-il alors qu’il s’élance vers ce qui reste de l’entrée de la pièce, le point le plus éloigné du monstre.

Je me retourne pour surveiller notre menace. Le golem ne semble pas avoir apprécié mon intervention et ses yeux froids se posent sur moi. Cette fois-ci au lieu d’un poing fermé, sa main ouverte s’élance jusqu’à moi pour me saisir. Je saute sur le côté et me réceptionne en roulant. Je profite de ma position pour lancer une boule de feu sur le bras qui me rate. La taille imposante et sa lenteur me facilitent la tâche et le coup porte sans trop de difficultés. Je parviens à frapper au niveau du poignet, cependant je ne fais guère plus qu’un léger cratère. La créature elle grogne de douleur. Elle se redresse avant de balancer sa tête en arrière puis en avant, la bouche ouverte. Je profite de l’occasion pour lancer une nouvelle fois ma magie infernale sur lui et plutôt que de me cracher dessus, elle lance une multitude de pic dans ma direction. Les sorts de feu et de glace se croisent et continuent leur chemin. Si je parviens à éviter la majorité des pics mortels, je suis tout de même blessé à la jambe et au bras droit. Le golem de glace aussi accuse le coup de mon sort. De nouveau un léger cratère se forme sur son épaule droite, pourtant à cette vitesse je ne serais pas capable de mettre à mal la créature avant d’être à court de mana. Alors que je cherche une solution, une voix venant de derrière me surprend.

"Dans quel merdier on est ?" Me demande Sylve.

La jeune femme semble s’être remise du choc bien qu’ayant un peu de mal pour tenir son bouclier. Elle n’est pas au mieux de sa forme, mais puis-je me permettre de refuser une aide inespérée ? Revenant sur le golem je lui fais part de ma brève analyse.

"Un sacré merdier ! Elle est lente mais puissante et tout aussi résistante, tu l’as certainement sentie. Ma magie n’a qu’un effet léger sur la créature."

"On essaye de le prendre sur deux flancs ! Prends à gauche je fais le tour à droite." Indique la guerrière.

Nous nous séparons sur les côtés sous le regard incrédule de la créature qui ne sait pas quelle cible frapper. Elle se décide finalement sur celle qui lui pose le plus de problème : moi. La semi-elfe profite de cet instant pour frapper sans craindre de riposte. De mon point de vue je vois la lame s’enfoncer légèrement dans la glace, cependant le coup ne semble pas faire plus de mal qu’une grosse piqûre d’insecte. Au mieux cela retient l’attention du golem sur l’autre moustique qui le harcèle. Il frappe le mur derrière et décroche des morceaux de glaces qui manquent d’atteindre ma camarade.

"Fais quelque chose, réagit !" Me hurle-t-elle alors que je suis inactif.

"Je réfléchis. Lancer des boules de feu ne sert à rien à part lui faire des p’tits trous !" Lui dis-je.

"Alors réfléchit plus vite !" Me répond-elle.

"Merci, heureusement que tu es là pour me prodiguer tes conseils si précieux !" Fais-je ironisant.

"Il n’y a pas de quoi." Me lance-t-elle avec rage alors qu’elle tente d’éviter un nouveau coup de poing de haut en bas. "Atèle-toi à viser une partie vitale comme sa tête !"

J’essaye de me rapprocher de face pour lui asséner un tir de feu, mais bien que je ne sois pas la cible prioritaire de la créature, viser sa tête est plus compliqué que le reste et ma tentative force son regard à se poser sur moi.

(Si mes tirs sont inutiles alors tentons une autre approche. Le mur de feu ne sera pas d’une grande aide car il s’estompe rapidement.)

"Sylve, il faut que tu lui plantes la lame dans l’articulation." Fais-je en stoppant les mouvements de la guerrière, incrédule. "Prépare-toi je vais l’occuper !"

"Tu veux que je fasse quoi ?" S’étonne-t-elle.

"Plante ta lame dans son genoux !" Dis-je en insistant.

Je guette les mouvements du golem. Ses yeux de glaces sont rivés sur moi, tandis que les miens fixent les moindres vibrations de pierre qui annonceront un assaut. De son côté, Sylve attend une ouverture que je provoque en me rapprochant de lui. Plutôt que de me frapper de son poing comme précédemment, c’est son pied qui s’approche de moi. La surprise est totale et en essayant de partir sur le côté je trébuche au sol à cause d’une fine couche de gèle au sol. La masse gelée passe juste au-dessus de moi sans plus de dommage qu’une grosse frayeur. Je me relève précipitamment pour voir la semi-elfe planter aussi profondément que possible sa lame derrière le genoux gauche. Je profite de ma proximité pour lancer mon sort. Mon fluide de feu s’agite en moi pour finalement s’extirper de mon corps. Rapidement un lien se créer de moi à la lame et mon fluide profite de ce pont pour s’accumuler dans le métal et le chauffer. Pourtant cela ne suffira pas si seul le bout de l’épée fait effet et je pousse Sylve à faire plus.

"Enfonce-là jusqu’à la garde !"

Habituée à mes propositions aussi inattendues que soudaines, ma camarade comprend immédiatement mon intention. Désarmée, elle se rue pourtant vers sa lame serrant son bouclier et use de celui-ci en bondissant pour enfoncer l’arme. La chaleur générée par mon sort a fragilisé la glace, permettant d’enfoncer l’acier jusqu’à la garde. Je n’ai malheureusement pas la possibilité d’observer les effets de ma magie ainsi utilisée. Le golem de glace ramène son pied jusqu’à moi et je me prends le coup de plein fouet. Ma tête sonne et ma vision se trouble. J’ai l’impression qu’une montagne m’est tombée dessus tant je suis déboussolé. Je peine à me relever et lorsque je parviens au bout d’un effort à me remettre sur mes jambes c’est pour voir la semi-elfe face à la créature. Elle semble en mauvaise posture en esquivant encore et encore les coups, mais elle ne tiendra pas longtemps à ce rythme.

Je m’extirpe de ma position. J’avance en me rapprochant de la créature qui me tourne le dos. Toujours bloquée à l’intérieur du membre, l’épée restreint les mouvements du golem. Ma vision est amoindrie, mais je parviens néanmoins à percevoir une faiblesse dans le genou. Alors qu’il ne fait pas attention à moi je lance une boule de feu au point de rupture. Cette fois-ci, mon sort ne se limite pas à un simple cratère. La boule de feu traverse l’articulation de par en par et fait choir le colosse de glace. Avec une moitié de jambe, l’équilibre du monstre est complètement rompu et il doit poser un bras au sol pour ne pas s’étaler complètement.

Ma magie s’est complètement vidée de mon corps, Sylve n’est armée que de son bouclier et le gardien est toujours en place. Malgré son évidente faiblesse, il reste encore capable de nous aplatir sous un bon gros poing de glace. Au vu de notre situation, il ne me reste plus beaucoup d’options disponibles. Je me saisis de ma dernière potion de mana que je vide d’une traite et rallume mon feu intérieur. Mes tentatives de m’initier à un nouveau sort se sont soldées par des explosions de flammes et j’espère que cela suffira pour complètement le faire fondre. Je m’élance sous le monstre ou du moins j’essaie. Un vertige me prend soudainement et je me retrouve à quatre pattes, la sueur perlant sur mon front. La créature se trouve juste au-dessus de moi, une erreur et je finirais à l’état de tapis.

Pourtant dans la position du domestique qui frotte le sol, un détail déchaîne en moi la recherche du savoir magique qui m'anime depuis mon apprentissage dans la guilde Equilibrium. Le sol est lui presque recouvert d’une fine couche de gèle par endroit et cela me donne l’idée pour compléter mon sortilège. Plutôt que d’user de ma magie comme je le fais habituellement pourquoi ne pas répandre mon fluide sur une surface au point d’en saturer le sol ? Au lieu de concentrer ma magie en un même point pour un sort plus puissant, manipuler ma magie ainsi me permettrait de prolonger mon sortilège sur une durée bien plus longue, bien que sans générer de blessures plus conséquentes. Non lion de moi, Sylve se fait acculer et ne parvient pas à trouver un chemin pour passer derrière la créature. Le gardien de glace ayant désormais une position plus basse, il lui est plus facile de porter des coups au sol. Ne voulant pas attendre de voir ma camarade subir un sort funeste, je fais rugir ma magie en moi et l’insuffle dans le sol.

Je mobilise tout le fluide qui me reste et le répands dans le sol. Le sol réagit visuellement et sur un cercle de deux bons mètres de rayon autour se moi, des émanations de feu jaillissent tandis que le gèle de la zone fond très rapidement. Moi qui craignais un sort de glace pouvant annuler mon propre sortilège, cela ne devait être qu’un effet de la température basse de la pièce. Je m’extirpe rapidement de la zone avant que la créature ne fonde littéralement sur moi. Le golem ne comprend que trop tard la situation critique où il se trouve. Il tente de s’extirper, mais touché par la zone de mon sort, sa demi-jambe ne répond déjà plus au reste du corps. Elle se détache du corps et le bassin vient à son tour toucher le sol où mon sortilège se trouve. Il tente de se relever à l’aide de ses deux bras, mais il finit par céder. Une bonne moitié de son corps à fondu lorsque l’eau qui s’est dégagé et les blocs de glace deviennent suffisant pour noyer les flammes que j’avais créées. Avec prudence, je m’approche du gardien accompagnée de Sylve qui a retrouvé sa lame. Les yeux pleins de fureur, elle transperce le crâne de la créature qui disparaît dans une multitude de blocs de glace.

"C’était pourtant pas compliqué de viser la tête non ?" Me fait-elle complètement exténuée.

Je lui décroche un sourire avant d’entamer les recherches de la bague qui selon moi, se trouvait bien gardée à l’intérieure du corps du golem.

VI.17 La gardienne.
Modifié en dernier par Nhaundar le lun. 19 août 2019 22:05, modifié 1 fois.

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Re: Le Village en Cendres

Message par Nhaundar » lun. 19 août 2019 22:03

VI.16 Chemin de travers.

Comme je le soupçonnais, la bague est belle et bien présente sur le gardien. Au milieu des morceaux de glace un éclat scintille, une pierre montée sur une élégante monture. J’extrais la bague et la pose dans ma main et la surprise est totale. Bien qu’il s’agisse d’une bague, ou plutôt d’une chevalière en l’occurrence, il ne m’est pas possible de la porter à mon doigt, bien trop gros pour un tel objet. Je crois même qu’un enfant n’en serait pas capable non plus, ou alors un nourrisson. La question qui se pose est comment Erézia est parvenue à s’en équiper, elle qui était la précédente maîtresse de cette relique ? Après notre réussite, Ashiro revient vers nous. Son expression montre qu’il était loin de se douter de notre victoire face au gardien, mais je perçois également des certitudes s’effondrer en lui, comme un conflit intérieur brisant les fondations de ses connaissances. Les obstacles que nous avons surmontés et la façon dont nous sommes parvenus à les franchir, sont autant de preuves de sa vision erronée des vestiges de l’ordre magique auquel il a voué son existence.

"Je…je dois m’excuser auprès de vous pour mon comportement." Commence-t-il. "Je me rends compte des erreurs que j’ai commises et des mauvais choix que j’ai faits. C’est juste que je perds pieds lorsqu’il est question des secrets auxquels j’ai passé toute ma vie et qui ont couté la vie de ma femme."

Je le regarde gravement. Même s’il a été d’un grand secours dans ces ruines, il a été une gêne voir un danger dans des circonstances plus dramatiques. Pourtant je ne parviens pas à lui en vouloir. Je m’approche de lui et cherche calmement à le réconforter.

"Cessez de vous blâmer de la sorte. Nous sommes parvenus à atteindre nos objectifs en restant indemne. Tirer les enseignements de nos erreurs est la meilleure façon de progresser."

"Non c’est…que ce soit la pièce inondée à laquelle je vous ai fait peur, l’énigme que je n’ai su résoudre, ou même ce chemin si particulier qui mène vos pas selon la volonté de celui qui l’arpente pour l’emmener là où…"Dit-il en s’interrompant brusquement.

Je perçois en lui une trace de son tempérament impulsif, voir même irréfléchie remonter à la surface. Il n’en faut pas moins pour que mes soupçons se confirment. Ashiro nous tourne le dos et quitte la pièce du pas de celui ayant la mort aux trousses.

"la porte…les secrets…c’est une chance inespérée qui se propose à moi !" Lâche-t-il avant de disparaître dans l’ombre de l’accès.

Dans l’accès par lequel nous sommes venus, les chemins se mêlent à d’autres par le biais du désir. Sylve et moi-même le suivons d’un pas pressent pour ne pas le perdre. Nous retrouvons la pièce précédente, celle où les chemins conversent visiblement. La pièce à la croisée des chemins et là où tout commence. Là, Ashiro qui malgré une impatience palpable nous a attendus.

"Ha tout de même ! J’ai bien cru que vous ne viendriez jamais !" S’impatiente-t-il en se positionnent devant la porte aux directions multiples.

"Mais où allez-vous ainsi ?" Fais-je incrédule.

"J’ai la possibilité de découvrir ce que j’ai tant convoité durant mon existence. Vous pouvez être sûr que je ne laisserai pas passer l’occasion qui m’est offerte !" Déclare-t-il avant de prendre une grande inspiration et se s’exclamer haut et fort : "Même-moi aux secrets de l’ordre auxquels j’ai voué toute ma vie !"

Avant qu’il ne s’avance, je vois Sylve qui se rue sur lui. Je l’arrête soudainement dans son élan, laissant le vieil homme disparaître dans les ombres du chemin.

"Laisse-le y aller, il a le droit d’obtenir les réponses qu’il souhaite." Dis-je à la semi-elfe.

"Non ce n’est pas ça." S’affole-t-elle. "Tu crois quoi, qu’il va juste tomber sur une bibliothèque où un grimoire magique ouvert ? Si la bague était gardée par une créature comme celle que l’on a affrontée, tu penses qu’il va y avoir quoi pour quelque chose de plus précieux ?"

(Ha…flûte !)

La remarque me frappe comme une gifle. J’ai l’impression d’avoir laissé Ashiro à une mort certaine. Qui sait quels dangers l’attendent là-bas et le pire, c’est que je n’ai plus de magie en moi pour parer aux éventualités.

"Même-moi aux secrets de l’ordre !" Me devance la guerrière, plantée devant l’accès.

"Non attends !" Fais-je soudainement en l’arrêtant. "Ashiro a demandé des secrets qu’il a cherchés toute sa vie. C’est une demande bien précise et à moins de savoir exactement ce qu’il attend de ces fameux secrets, nous pourrions arriver dans un tout autre endroit."

"Alors que proposes-tu ?" Me demande-t-elle déboussolée par ma remarque.

Je réfléchis aussi rapidement et efficacement qu’il m’est possible de faire dans une situation aussi angoissante, car plus nous tarderons à rejoindre l’archéologue et plus il court de danger.

(Non rappels-toi l’épreuve de l’inondation. Il faut calmer son esprit afin de trouver la solution.)

Je cherche dans ma mémoire des références précises concernant les désirs profonds du vieil homme. J’ai en tête des sortilèges puissants perdu, mais cela reste trop vague encore. Il me faut un moyen plus direct pour trouver Ashiro.

(Plus direct ?)

Je m’avance face à l’entrée et m’exclame :

"Mène-nous à Ashiro !"

"Tu penses que cela suffira ?" S’inquiète ma camarade.

En la prenant par la main je lui rétorque.

"Il n’y a qu’un moyen de le savoir !"

Nous pénétrons à notre tour dans le couloir et celui-ci change rapidement pour une ambiance plus ancienne. L’air sent le renfermé avec une pointe d’humidité plus forte et une température bien plus basse. Ashiro ayant notre torche, je guide la semi-elfe grâce à une lueur au loin, non sans emporter avec moi les nombreuses toiles d’araignées invisibles sur ma route. Nous pénétrons enfin dans une large zone. Ici les parois forment un demi-cercle dans lequel nous serions en milieu de course. Les murs s’élèvent plus loin que porte ma vision et le terrain face à nous est plat. Plus loin, un homme marche une torche à la main. Ma capacité innée de voir dans l’obscurité me permet de m’apercevoir qu’il se dirige vers un précipice. Je prends quelques secondes pour le détailler le chemin qu’il s’apprête à parcourir et un frisson glacé me parcours le dos.

"Sylve fonce et empêche-le d’avancer. Il s’apprête à franchir un pont étroit et s’il progresse trop loin nous ne pourrons plus l’arrêter sans prendre de gros risques."

Sans plus de cérémonie, la semi-elfe s’élance, bien plus rapide que moi. Je la vois atteindre le vieil homme alors qu’il a déjà un pied sur le chemin étroit. Elle l’agrippe fermement par l’épaule et le fait basculer en arrière. L’archéologue atterri lourdement sur le dos à deux bons mètres du bord en hurlant des insanités à la guerrière.

"Mais vous êtes complètement folle ma parole, vous m’avez fait une peur bleue ! Ecartez-vous de mon chemin !" Ordonne-t-il.

Arrivant à mon tour je fixe le vieil homme d’un œil mauvais et lui répond, non sans cacher ma colère.

"N’en fait rien Sylve !"

"Et pourquoi donc jeune elfe ? De l’autre côté de ce pont se trouve les secrets de toute une vie, ma femme a perdu la sienne et vous osez m’empêcher de les atteindre ?" S’offusque-t-il.

Je délaisse Ashiro pour examiner le pont. Il s’agit d’une bande de terre lisse assez large pour y mettre deux pieds. Fait notable, l’épaisseur me semble trop fine pour qu’il n’y ait aucune magie soutenant l’ensemble. En revanche il n’y a rien d’autre, pas le moindre support auquel s’accrocher en cas de perte d’équilibre. Comme je le soupçonnais il est possible de le franchir en étant adroit, mais le risque d’une chute mortelle est bien trop élevé pour cela. Reste à lui faire comprendre cela et à sa réaction ce n’est pas gagné. Je prends donc une bonne inspiration avant de prendre un ton calme et posé.

"C’est hors de question. Même si vos désirs se trouvent de l’autre côté, vous risquez de mourir et vous n’aurez rien obtenue. Je ne sais même pas si ce chemin est capable de supporter votre poids à mi-chemin."

"Je me moque bien de ce que vous pensez. J’ai presque atteint mon but et je ne veux vivre avec aucun regret !" S’emporte-t-il en se relevant.

"Justement les morts n’éprouvent pas de regrets !" Lui dis-je sans me démonter.

" Quitte à revenir seul, je franchirai ce pont vous pouvez en être sûr !" Continue-t-il.

Je regarde sans ciller l’homme déterminé face à moi. Ses traits sont figés et sont regard semble sans faille. Il est clair qu’Ashiro est résolu à mettre sa menace à exécution. Je me saisis de mon bâton que je tiens fermement dans mes mains.

"Si je ne peux vous faire entendre raison, je vais m’assurer que vous ne vous mettrez pas en danger." Lui dis-je en me rendant vers l’étroit chemin.

Une fois devant l’unique accès, j’entreprends de frapper avec mon bâton la base de la fine route. Ce qui fait bien entendu régir Ashiro.

"Mais vous êtes malades arrêtez !" Crie-t-il tandis que ma camarade l’empêche de me déranger. "Je vous en conjure arrêtez !" Continue-t-il en suppliant désormais.

Malheureusement pour lui je n’ai que faire de ses remarques. Je termine ma tâche, jusqu’à ce qu’enfin la bande de terre cède et que le reste du ponde s’effondre par son poids, a moins que la magie tenant le pont ne cesse de faire effet. Libéré de l‘emprise de la guerrière, l’archéologue arrive à mon niveau et contemple mon œuvre genoux à terre.

"Mais qu’avez-vous faits ?" Murmure-t-il presque imperceptiblement.

"Je vous ai sauvé la vie tout simplement ! Peu importe ce qui se trouve de l’autre côté, votre vie est bien plus précieuses." Dis-je en faisant demi-tour.

"Intéressant. Très intéressant même !" Fait une voix inconnue qui semble provenir de partout à la fois.

Affolés, nous tentons tous les trois de chercher la source de la voix. En vain. Il n’y a qu’un gouffre d’un côté et une imposante paroi rocheuse de l’autre.

"Qui est là ? Montrez-vous !" Fais-je en me préparant à faire face à un adversaire alors que sans magie, je suis présentement aussi dangereux qu’un poisson hors de l’eau.

"Un Shaakt qui fait équipe avec une semi-elfe et qui sauve la vie d’un autre humain !" Continue la voix éthérée. "Même si c’était ton maître, ce qui n’est clairement pas le cas, tu aurais la possibilité de te libérer de ses chaînes."

Finalement une humaine, d’une taille impressionnante, apparaît devant nous. J’ignore si c’est le côté translucide de son blanc fantomatique ou bien sa capacité à léviter au-dessus du gouffre, mais il semble évident que nous avons affaire à un esprit. Elle arbore une longue robe ainsi qu’une cape qui s’attache à l’avant. Je ne suis pas rassuré face à une telle manifestation. C’est nouveau pour moi et l’absence de magie en moi me pousse à une attitude modérée. Sylve doit penser la même chose car elle s’interpose naturellement entre moi et l’esprit.

"Comment te nommes-tu jeune Shaakt ?" Demande l’esprit qui ignore les autres.

(C’est la première fois que je suis face à une telle manifestation. Mieux vaut ne pas l’offenser, qui sait ce qu’elle est capable de faire !)

Plutôt que de la ranger, je préfère baisser mon arme pour signifier mon souhait de ne pas combattre tout en restant près à agir. J’inspire à plein poumon pour reprendre esprit et me présente.

"Je suis Nhaundar Zanakfein. Voici Sylve Feuilleargent et Ashiro, maître archéologue. Et vous qui êtes vous ?"

"On m’a donné beaucoup de nom et de titre de mon vivant, mais vous devez me connaître sous le nom d'Erézia l’indomptable. Je suis la gardienne de ce lieu. J’ai suivi votre progression jusqu’ici. Tu as fait preuve d’astuce pour échapper à la boule de pierre. En revanche, je déplore le gardien de la bague. Ma magie est puissante, mais le temps l’est davantage. Néanmoins c’est ta récente intervention qui m’a le plus surprise. Penser qu’un elfe noir sauverait un autre être vivant d’une mort certaine…c’est un spectacle rare que tu m’as offert là !" Détail-t-elle.

"Ce pont, c’était un piège ?"Demande l’archéologue.

"Non ! Il s’agissait d’un simple pont et l’autre côté renferme des choses au-delà de votre imagination." Répond-elle. "Pourtant vous n’auriez pas été à même de le traverser. D’autres ont essayé par le passé, bien plus capables que vous. Ils font désormais parti intégrante de ce lieu."

VI.17 La gardienne (suite)
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Nhaundar
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Re: Le Village en Cendres

Message par Nhaundar » mar. 20 août 2019 11:19

VI.17 La gardienne.

La réponse le laisse sans voix. Il oscille entre la frustration d’avoir été près du but et celle d’être incapable d’y parvenir. Plutôt que de se morfondre, il cherche finalement le moyen de retrouver le moral en se focalisant sur d’autres éléments à sa portée.

"Ces ruines, il s’agit bien d’Eprat non ?" Demande-t-il avec une ardeur renouvelée.

""Non !" Répond simplement l’esprit avant de poursuivre devant son incrédulité. "Ce lieu est une réplique réduite de ce qu’aurait pu être la cité, modelée par magie. C’est la raison qui m’a permise de vous observer, tout comme je le fais actuellement avec ces autres intrus."

Bien qu’un détail me chiffonne, il est vite balayé par sa révélation. Je prends les devants et lui demande sans attendre.

"Ces autres intrus, mais de qui parlez-vous ?"

"De ceux venus pour la même chose que vous : la chevalière. Désormais vous en êtes le propriétaire et vous subirez sa malédiction." Tonne-t-elle impérieuse.

"Sa malédiction, mais quelle malédiction ? Il n’est nullement question de ça dans les écrits !" Interroge Ashiro.

"La chevalière possède un grand pouvoir et c’est aussi sa malédiction car nombreux sont ceux qui l’ont convoitée et l’a convoite encore. Pourtant aussi grand que puisse être ce pouvoir vous ne serez pas en mesure de l’exploiter jeune Shaakt." Explique l’esprit.

(Nous avons eu beaucoup de chance d’avoir mis la main sur l’emplacement de la relique. Peut-être que d’autres éléments ont permis de trouver la trace de la relique. Il est même possible que ces éléments s’associent avec la chevalière en un mécanisme magique. S’ils nous trouvent, ils mettront la main sur la relique et son pouvoir.)

Alors que ma camarade remarque mon questionnement intérieur, je lui explique ce que j’ai en tête.

"En raison de sa taille je présume. Peut-être qu’elle fait partie d’un ensemble de reliques qui ont un effet une fois réunis. Ces hommes semblent avoir recherché cette relique depuis un bon moment. Il n’est pas impossible qu’ils aient connaissance de sa taille et pourraient avoir ces autres pièces avec eux. Ainsi ils auront la possibilité d’accomplir ce qu’ils souhaitent s’ils nous mettent la main dessus. Et avec mes réserves de magie, ils ne rencontreront qu’une unique résistance en ta présence Sylve."

Je me tourne vers l’esprit de la gardienne et tends la bague que je cachais dans mes effets personnels. Je cherche quelque peu à la provoquer pour m’assurer que personne ne puisse mettre la main dessus.

"Des personnes sont à sa recherche et au vu des risques qu’ils ont pris et des personnes qu’ils ont mis en danger, je doute que leurs intentions soient bonnes. Si vraiment vous avez un pouvoir en ce lieu alors cachez-là et protégez-là mieux cette fois-ci !"

Malheureusement pour moi, l’esprit de la gardienne prend mal mes propos, bien plus que prévus et son visage s’agrandit et se colore dans des teintes rouges sang.

"Que je la protège mieux ? Misérable petit vermisseau comment oses-tu me parler de la sorte ? Je vais te…" Commence-t-elle à clamer lorsqu’un petit être apparaît au niveau de son cou l’interrompant.

Il émet une lumière qui m’éblouie, mais j’arrive à percevoir l’esquisse d’un petit visage. La lumière que la créature irradie diminue lentement au fur et à mesure qu’elle s’approche de moi. Arrivée à ma hauteur, il est nettement moins éblouissant pour mes yeux habitués à l’obscurité. Il s’agit d’un petit lutin, non, d’une lutine en réalité. C’est toujours un peu difficile à déterminer avec cette petite race. Montant une manifestation magique en la présence d’un oiseau, il se positionne au niveau de la bague. Je comprends finalement comment la bague peut être utilisée.

(Donc il n’y a aucun mécanisme particulier. Cet objet est fait pour être utilisé par un lutin !)

"Ainsi donc vous n’agissiez pas seule Erézia. C’est certainement un point que l’histoire a oublié à moins que vous n’ayez caché cette information. En tout cas je suis rassuré, je suis presque sûr que même ceux que nous sommes parvenus à devancer l’ignore aussi et ne s’attendent pas à cette taille, tout comme nous !" Dis-je avec un léger sourire.

Je confie la bague à la lutine alors qu’elle m’offre un large sourire en retour. Elle enfile la bague à son petit doigt et sa magie irradie de nouveau m’obligeant à fermer les yeux. Pourtant je sens en moi comme un renouveau. Lentement je sens s’agiter mes fluides jusque dans le bout de mes doigts et mes forces magiques me reviennent pleinement. Lorsque j’ouvre les yeux de nouveau, la lutine s’en est retournée se lover vers la nuque de la gardienne qui s’est visiblement calmée et arbore sa couleur blanche fantomatique.

"Ainsi Gaënelle t’as offert sa bénédiction ! Elle sait user des pouvoirs sans subir la perte de vitalité. De plus elle est capable de confier son mana à autrui. Pourtant elle a toujours su discerner les bonnes personnes des mauvaises." Déclare-t-elle en me jugeant.

Je m’incline devant les deux esprits pour les remercier de leur bienveillance.

"Je comprends mieux d’où vient votre si grande capacité à manipuler la magie. Gaënelle vous avez toute ma gratitude. Grâce à vous je vais être en mesure d’affronter ces individus. Dommage que je ne puisse recouvrer ma magie de la sorte, c’est une capacité idéale pour quelqu’un qui se voue aux arts magiques."

Lorsque je me relève je vois la lutine parler dans l’oreille d’Erézia. Celle-ci semble contrariée par ce qu’elle entend.

"Oui, oui. J’ai compris." Fait-elle à la lutine avant de revenir vers moi. "Gaënelle t’aime bien ! C’est d’autant plus troublant qu’elle n’accorde pas sa confiance à n’importe qui et encore moins aux Shaakts qui étaient du temps de l’ordre, ses principaux ennemis. Bien ! Elle est très timide, c’est pourquoi elle me demande de t’offrir des connaissances qui te seront utiles."

Elle scintille de nouveau et se rapproche de moi avec une taille désormais bien plus en adéquation avec ce qu’elle était de son vivant.

"Primo ! Il existe une technique autrefois réservée aux chamanes pour recouvrer ses réserves magiques en faisant appel aux esprits qui nous entourent à chaque instant. Secundo ! A force de pratiquer une discipline les êtres développent des aptitudes et des capacités particulières. Tu sembles faire partie des psychomanciens, des mages capables de manipuler la perception et l’esprit de leurs adversaires. Ils peuvent même faire croire convaincre que leurs adversaires ont subi une blessure extrêmement grave. Rien de plus surprenant pour un Shaakt. Il n’est pas rare que ces derniers obtiennent une telle aptitude reflétant leur sournoiserie intérieure. Tertio ! Avant que tu ne me le demandes, je suis capable de déterminer les aptitudes des individus et non je ne t’enseignerai rien de ceci. Je suis magnanime, mais il ne faut pas exagérer. Quaro, quartio…finalement, il est temps pour vous de repartir. Je n’aime guère les invités indésirables et je vais m’assurer qu’ils fassent demi-tour, alors faites de même !"

Je reste coi devant tant d’informations d’un coup et tout se mélange en moi : cette étrange magie chamanique, cette aptitude que j’aurais développée sans le savoir, les pouvoirs de la gardienne ainsi que ces individus suivant nos pas. Pris entre l’excitation et l’inquiétude, je ne bouge pas d’un pouce et mon visage reste de marbre tant il ne parvient à choisir un faciès adapté à la situation.

"Comment ça j’ai été trop soudaine ?" Reprend de nouveau la gardienne à sa camarade lutine. "Je suis tout ce qu’il y a de plus efficace voilà tout ! Pardon ? Non c’est hors de question, ce genre de présent est destiné à ceux qui le méritent véritablement !"

"Aurais-tu agis différemment s’il n’était un Shaakt ?" Demande la lutine en parlant pour la première fois devant tous. "C’est justement parce qu’il s’agit d’un elfe noir que ses actes ont plus de valeurs."

Erézia se tourne vers moi et m’affiche son visage le plus déçu. Bien que la lutine soit d’une grande timidité, elle possède une forte influence sur la magicienne. Il devait en être de même lorsqu’elle était encore en vie. Alors que tout son être désapprouve la chose, la gardienne tend le bras et une lumière scintille devant moi révélant de nombreux présents.

"Bien qu’ils possèdent un pouvoir que tu peux qualifier d’inutile, tous ces objets sont puissants s’ils sont utilisés à bon escient." Explique-t-elle en enchaînant sur un descriptif plus précis. "Le bonnet confère une protection exceptionnelle contre le froid qu’il soit magique ou physique. Ce sucre d’orge te permettra de guérir intégralement de tes blessures à trois reprises. Utilise-le sagement. Une fois renversée, la fiole fera tomber la neige sur une très grande zone pendant une semaine. La graine est magique bien entendu. Plante-là dans le sol et un arbre de ton choix y poussera rapidement. Secoue la boule lorsque tu seras en proie au doute. Elle te redonnera courage en rappelant tes meilleurs souvenirs. La chaussette est elle aussi magique. Si tu la poses contre une cheminée à une date précise quelque chose se passera, mais je te laisse le plaisir de connaître quoi par toi-même. Elle prend une pose et me fixe intensément. Bon, tout ceci reste tout de même gentillet. Je vais t’offrir ceci." Elle me tend une étrange gemme qui scintille d’une lueur mauve.

Je prends la gemme dans ma main, mais elle ne donne aucune information.

"Qu’est-ce que ceci ? Je suppose que ce n’est pas là uniquement pour faire joli ! Comment fonctionne-t-elle ?"

"Comprendre son fonctionnement sera ta première épreuve." Me répond-elle simplement et cela me surprend assez.

"La première ?" Dis-je assez désemparé.

"Tu comprendras le moment venu." Elle lève le bras prêt à donner l’ordre à un bourreau imaginaire de trancher dans cette aventure qu’est la nôtre. "Bien, vous avez vos récompenses et moi j’ai assez perdu de temps avec vous."

Alors qu’elle s’apprête à clore tout débat je l’arrête brusquement.

"Non attendez !"

"Comment cela ? Vous n’en avez pas eu assez ? Vous êtes bien un Shaakt pour être aussi cupide. Vous avez intérêt à ce que cela vaille le coup." S’insurge-t-elle.

"Je ne désire que des connaissances magiques !" Dis-je de tout l’aplomb dont je dispose.

"Tu m’intéresses petit être, cependant ne sois pas sûr que je réponde à ta question. Certains savoirs sont trop dangereux pour être divulgué à un apprenti magicien comme toi." Me répond-elle.

Satisfait d’avoir attisé son intérêt je continue.

"Vous avez parlé de la magie de l’esprit des psychomanciens. Qu’elle est-elle ?"

Elle prend le temps d’une brève réflexion puis tend la main vers moi, annonçant sa réponse comme une sentence.

"Je ne voulais pas perdre de temps à l’expliquer, mais soit. Cependant une démonstration vaut mille explications !"

Je ne vois pas un brin de magie dans l’air, pourtant c’est bien de cela qui doit s’agir puisqu’elle s’apprête à une démonstration. Celle-ci n’attend guère plus de temps pour se manifester. Surgissant de nulle part, une lame invisible me tranche la jambe nette à moitié de la cuisse. La douleur est si forte et si soudaine, que je ne peux m’empêcher de tomber au sol, hurlant comme un damné. Sortant du plus profond de mes entrailles, mon cri de souffrance est si fort qu’il me blesse la gorge et la douleur sonore se propage jusqu’à mes propres oreilles. Je ne me connaissais pas une telle puissance vocale. Prostré au sol, mes mains attrapent ma jambe blessées pour la trouver intacte, loin de la coupure nette que j’ai subie. Alors que Sylve accourt jusqu’à moi, la douleur s’estompe aussi vite qu’elle est arrivée.

"Voilà un bref exemple ce que vaut la magie des psychomanciens et encore, si l’esprit est submergé par la douleur, le corps lui-même peut en subir des blessures. Maintenant partez et prévenez les prochains visiteurs de ne pas me déranger avant trois ou quatre siècles !" Clame-t-elle en disparaissant dans une lumière éblouissante pour ne laisser plus une once de sa présence.

"Non attendez !" Hurle l’archéologue qui s’est contenté jusque-là de mémoriser la scène, vraisemblablement pour prendre des notes par la suite. Pourtant plus aucune manifestation de l’esprit gardien ne refait surface.

"Comment te sens-tu ?" Me demande la semi-elfe sous le choc visiblement de ce qui m’est arrivé.

Accusant le contrecoup de la blessure fantomatique, je me relève péniblement bien qu’aidé par la guerrière, mais la rassure tout de même.

"Rassure-toi je vais bien ! Tu devrais plus t’inquiéter pour ceux qui nous feront face le jour où je serais capable de maîtriser la psychomancie. Pour l’heure nous devrions partir au plus vite. Des hommes en ont après nous, mais en usant de notre connaissance des lieux, on peut espérer leur fausser compagnie."

Nous partons, non sans difficulté avec le maître archéologue qui peine à quitter ce lieu.

VI.18 Rencontre fort déplaisante.
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Nhaundar
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Re: Le Village en Cendres

Message par Nhaundar » mar. 20 août 2019 11:26

VI.17 La gardienne (suite)

Nous revenons enfin à la pièce précédente, celle où il est possible d’atteindre chaque endroit de ce lieu créé par la gardienne. Pas de temps à perdre, nous faisons face à la porte par laquelle nous venons de traverser et je m’exclame haut et fort.

"Mêne-nous à la sortie de la cité !"

Nous pénétrons à l’intérieur et alors qu’un noir complet nous engloutit malgré la présence d’une torche, une lumière lointaine éclaircie notre chemin pour nous emmener aux portes de la cité. Cette fois-ci, aucune porte ne nous y a emmenés, nous sommes tous simplement apparu dans le tout premier couloir par magie.

(Ceci est la création de la gardienne et notre apparition soudaine tient probablement sa source de son désir de nous voir partir au plus vite.)

Malheureusement pour nous, nous ne sommes pas seuls. Les hommes qui semblent nous suivre sont eux aussi présent. Ne sont-ils pas encore entrer ou ont-ils pénétré dans la cité laissant une arrière-garde ? Je ne peux me prendre le temps de la réflexion que plusieurs d’entre eux nous ont aperçus et s’avancent. L’un d’eux, habillé de vêtements de cuir sombre prend la tête de leur petit groupe.

"Vous êtes en infériorité numérique. Remettez-nous la chevalière et vous aurez la vie sauve." Nous propose-t-il.

(C’est mauvais ! Il est clair qu’ils nous étriperont dès que nous ne leurs seront plus utiles. S’ils chargent, je doute même que nous ayons le dessus et Ashiro sera une victime de choix. Nous n’avons plus la chevalière et c’est le seul moyen pour nous de rester en vie. Quoiqu’il ignore ce détail, tout comme ils ignorent d’autres informations sur elle vu qu’ils n’avaient certainement pas connaissance de sa taille réelle. C’est notre seule chance de survie !)

Loin de me laisser intimider je tente un coup de bluff.

"Qu’est-ce qui nous dit que vous ne nous tuerez pas dès que vous aurez la bague ? Seul le vieil Ashiro sait comment débloquer le sceau confinant les pouvoirs de la relique. Cependant vous n’avez aucune raison de nous garder en vie, n’est-ce pas ?"

"Quoi mais qu’est-ce…"Commence Ashiro avant que je ne l’interrompe.

"Les pouvoirs sont protégés par un sceau ancien et il va falloir des recherches approfondies ainsi que les notes de son bureau pour en trouver la clef."

"Tu bluffs peau noire et quand bien même se serait vrai, nous avons déjà notre propre expert à ce sujet." Ricane-t-il.

(Donc ils ont quelqu’un avec des connaissances magiques anciennes ? Leur commanditaire a donné des informations importantes concernant les ouvrages nécessaires à la découverte de l’emplacement de la relique. J’estime fortement que ces deux individus soient la même personne ou alors fortement lié. C’est peut-être le meilleur moyen d’obtenir des informations. Ils semblent entraînés au combat, mais il y en a forcément un dans le lot un peu plus idiot que le reste.)

De mon bâton je tape le sol pour marquer davantage mes propos et ébranler les esprits.

"Je doute fort que votre commanditaire ait suffisamment de savoir à ce sujet. Ashiro n’a pas de titre de maître pour rien. De plus, votre patron aura bien d’autres problèmes avec la milice une fois que j’aurais révélé son identité !"

"L’indendant kayeko, mais comment sait-il ?" Déclare l’un d’eux prenant le meneur de vitesse.

"Parce que tu viens de le lui révéler crétin !" S’insurge celui-ci.

(L’intendant ? Donc c’est lui qui serait derrière tout ça ? Dans un sens ça paraît logique, il connait le passage secret de la bibliothèque par lequel les hommes ont pénétré pour dérober les documents. Mais pourquoi n’a-t-il pas fait ses recherches lui-même alors ? Il y a un élément qui manque à cette affaire !)

"Bon, maintenant il est clair que je ne puis vous laisser en vie. Livrez-nous la relique ainsi que le vieux cinglé !" Exige le meneur.

(Parfait, maintenant ils le veulent vivant !)

"Il est vrai qu’il est vieux,…"Dis-je alors que j’entends les protestations sourdes du principal intéressé… "cependant, s’il s’agit d’être cinglé vous êtes loin du compte et j’en vaux deux comme lui !"

Je lance une première boule de feu sur l’un d’eux, mais le coup semble amoindri à l’impact.

"On est équipé de protections élémentaires. Ta magie est inutile face à nous." Chargez les gars ! Ordonne le chef.

L’assaut est rapide et les attaques synchronisés. Sylve et moi-même avons combattus ensemble à de multiples reprises, mais ici c’est d’un tout autre niveau. Je pare les coups autant que je peux et use de ma magie de terre avec plus de réussite, mais je n’aurais jamais assez de mana pour tous. Sylve quant à elle repousse tant bien que mal les assauts usant plus de son bouclier pour parer les coups. Pourtant le pire reste encore à venir. Surgissant de nulle part, un fouet passe entre moi et ma camarade pour attraper le vieil homme. Celui-ci est tiré de force sans que nous ayons la possibilité de le retenir et rejoint les lignes ennemies.

"Il faut qu’on se replie !" Dis-je en hurlant à ma camarade

(Des protections élémentaires ? Soit, mais qu’en est-il du plafond ?)

Je fais de nouveau rugir ma magie, mais cette fois-ci je la lance en l’air pour atteindre le plafond. Comme je m’y attendais, les débris de roches s’extirpent du couloir où nous sommes et tombent, forçant nos adversaires à rebrousser chemin le temps que la cascade de roche se tarisse. Je profite de ce moment de répit pour attirer la guerrière en arrière.

"C’est le moment, partons !"

"Non nous ne pouvons partir sans Ashiro !" Me rétorque-t-elle. Je force sur le bras que j’empoigne et lui répond aussi fort que possible pour que nos adversaires nous entendent.

"Ils ont besoin de lui autant que nous, ils ne lui feront rien. Allez ne traîne pas !"

Nous reprenons le chemin à l’intérieur des ruines. Le même qu’à notre arrivée, bien que cette fois-ci, nous savons à quoi nous attendre en terme de piège. Alors que nous arrivons à la pseudo salle de recueillement je stoppe la course de la semi-elfe.

"Non arrête toi !"

"Mais comment ça, c’est une salle sans issue !" Me répond-elle, mais elle semble déstabilisée par mon sourire en coin.

"Pas selon Ashiro. Il ne s’est pas trompé sur pas mal de choses, j’espère que cela ne fera pas exception !"

Je cherche le fameux symbole que l’archéologue à utiliser, mais il me faut du temps pour me rappeler comment il a fait, le cas échéant cela pourrait nous tuer tous les deux. Malheureusement, alors que j’active le mécanisme qui piège l’ensemble de la pièce et ferme l’unique accès, notre fâcheuse rencontre pénètre au dernier moment.

"Remettez-moi la relique-sur-le champ et je vous promets une mort rapide !" Clame-t-il avec un fouet à la main.

"Et comment ferez-vous pour sortir d’ici vivant sans nous ?" Lui dis-je alors qu’un filet d’eau s’extirpe du mur comme la dernière fois."

"Mais vous êtes complètement…"Commence-t-il avant que je ne l’interromps.

"Cinglé ? Absolument et ce n’est pas faute de vous avoir prévenu."

Le mince filet d’eau grandit pour devenir un écoulement de plus en plus important, Augmentant avec lui le niveau d’eau de la pièce. L’homme est dangereux et je maintiens la guerrière loin de son influence. Lui de son côté semble perturbé. Il ne s’attendait certainement pas à ce que nous soyons dans une situation pareille, mais il semble être certain que nous ne sommes pas entrés dans ce piège sans savoir comment en sortir. Le niveau de l’eau a désormais presque atteint les épaules et il va être désormais difficile de se frapper mutuellement. Seule Sylve possède un avantage avec son épée, mais dans l’éventualité où il serait capable de la retourner contre nous, nous serions dans une fâcheuse posture.

"Arrêtez de jouer à ce jeu et faites-nous sortir d’ici !" Hurle-t-il nerveusement.

Sa colère monte d’un cran alors que je ricane ouvertement sans arrêter cette mort imminente. Du moins c’est ce qu’il croit encore alors que nous peinons tous à nous maintenir au niveau du plafond, là où se situent les dernières parcelles d’air. Ce n’est que lorsque l’intégralité de la pièce est complètement submergée qu’un tourbillon nous emporte sans ménagement. Attirés par la puissance du courant, nous ne pouvons que nous laisser emporter jusqu’à atteindre une large portion d’eau beaucoup plus froide et où le courant s’estompe. Complètement désorientés, je me fie à une lumière qui étincelle pour estimer le haut du bas. Une main s’agrippe à ma jambe droite. Je tente un coup de botte bloqué par un bouclier, celui de la semi-elfe. Arrivée à mon niveau je saisis sa protection et l’oriente sous mes pieds. Elle doit certainement se demander pourquoi j’agis ainsi et pour toute réponse, j’anime ma magie en une colonne de terre qui vient nous frapper et nous propulse jusqu’à atteindre un niveau plus propice à des êtres respirant hors de l’eau. Une première grande bouffée d’air frais pénètre dans mes poumons avec un bien fou, tandis que les suivantes m’aident à calmer mon esprit et observer les alentours.

Nous sommes arrivées dans un lac souterrain. J’aperçois l’unique source de lumière indiquant la sortie de cette grotte. Bien que sombre, j’arrive à voir une sorte d’escalier très incliné. Soudain quelqu’un s’extirpe à son tour de l’eau. Pas besoin de réfléchir pour savoir de qui il s’agit. Nous nous dépêchons, Sylve et moi, d’atteindre une bande de terre aux pieds de l’escalier rocheux. Avec un temps de retard, mais non sans efficacité, l’homme rattrape la distance avec une nage aussi efficace que rapide et rejoint lui aussi une bande de terre à plusieurs mètres de nous. L’ascension est un autre problème. Si nous avons un chemin taillé dans la roche, nous facilitant la montée, notre poursuivant fait preuve d’une adresse formidable sans le moindre chemin tracé. A ce rythme nous ne serons pas capables d’éviter un affrontement une fois arrivée en haut.

(Si seulement nous pouvions lui faire subir une douleur insoutenable à l’un de ses bras. Mais oui ! Erézia, m’en a fait même une démonstration. Pourtant utiliser une magie qui m’était inconnue il y a peu reste assez difficile à appréhender. Selon la gardienne la psychomancie permet d’atteindre l’esprit lui-même, c’est ainsi qu’elle est parvenue à me faire croire que ma jambe était coupée. Il n’y a plus qu’à essayer moi-même !)

Je m’arrête net et tend ma main vers l’homme qui monte. Je concentre une partie de mes fluides restant pour l’atteindre. Je sais pertinemment être incapable de réussir du premier coup. Il va donc falloir y aller à tâtons sachant que mes réserves de magie ne me permettent pas plus de quelques essais. Je projette mes fluides vers l’individu comme je sais le faire depuis que je suis capable de faire chauffer les armes à distances. Je cherche à atteindre quelque chose de nouveau, incomparable avec mes capacités habituelles. Une nouvelle sensation se faire ressentir. Comme si l’homme possédait une sorte d’aura invisible, mais palpable avec ma magie. J’ai l’impression d’être un aveugle capable d’admirer une œuvre d’art avec ses autres sens. Je poursuis mon exploration à l’aide de mes fluides à l’intérieur de cette aura et comprends qu’il s’agit-là de sa psyché.

Avec le peu de mana que j’y ai mis, mon sort de même que mon exploration s’arrêtent là. Je replonge de nouveau dans cet aura invisible en projetant de nouveau mes fluides. Cette fois-ci, je sais où je vais et grâce à la démonstration de la gardienne je sais également ce dont je suis capable de faire. Je m’enfonce davantage dans mon exploration et concentre mon mana sur le bras en plein effort. J’y ressens une étrange structure composée d’une myriade de liens, parfois quelques uns se relient et à d’autres endroits les liaisons sont très importantes. Au final, tout est connecté les uns aux autres, étendus sur l’intégralité du corps. J’y incruste mon mana que je transforme de manière à ce qu’il réagisse avec l’aura psychique du corps, pour surcharger la partie du bras avec des fluides parasites et donner l’impression que le bras n’est plus présent. Alors que mon mana s’engouffre selon ma volonté, il se concentre dans le bras et se fait tout simplement absorber. L’homme ne semble pas réagir à mon sort, tout au mieux cela lui chatouille le bras. Malheureusement pour moi notre poursuivant est prêt d’atteindre le sommet et je vais atteindre la fin de mes réserves magiques.

Je n’ai plus qu’une dernière tentative. Erézia a usé de sa magie pour me faire croire que ma jambe était sectionnée. Plutôt que générer mon fluide en une sorte de parasite, je devrais simplement sectionner le membre comme je l’ai senti. Rapidement, je monopolise l’intégralité de mes forces restantes et les projettes de nouveau sur cette étrange aura. Je focalise ma magie sur un des bras et alors que celui-ci se tend pour saisir une nouvelle prise, je manipule mes fluides en une lame aussi fine que possible que je condense, pour éviter que ma lame de fluide ne se brise au contact. Assez fier du résultat obtenu, j’abats ma magie matérialisée par une lame psychique pour couper les liens entre le bras et le reste de l’aura.

La conclusion ne se fait pas attendre. Tandis que l’homme saisit une nouvelle prise, il hurle de douleur. Alors que son esprit complètement désarçonné est persuadé d’avoir le membre tranché, il lâche sa prise. Il entame une chute terrible jusqu’en bas, incapable de reprendre le dessus sur la situation périlleuse donc il est victime. Il termine sa douloureuse descente au sol où un bruit d’os brisé se joint à ses hurlements plaintifs. Alors que ma camarade reste sans voix devant ce spectacle, je termine de mon côté mon ascension.

"Mais que c’est-il passé ?" M’interroge-t-elle alors qu’elle m’aide à franchir le dernier mètre.

Je prends le temps de respirer avec ce qui reste tout de même un effort important de ma part et lui répond avec satisfaction.

"Disons qu’il a eu, l’espace d’un moment, l’impression que son bras était coupé. C’est problématique durant une escalade, critique lorsque c’est soudain et particulièrement dangereux au plus mauvais moment."

VI.19 Un présent peu ordinaire.
Modifié en dernier par Nhaundar le mar. 20 août 2019 12:55, modifié 1 fois.

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Re: Le Village en Cendres

Message par Nhaundar » mar. 20 août 2019 12:55

VI.18 Rencontre fort déplaisante.

Dépourvu de magie et désireux de trouver un endroit plus sûr, nous quittons la grotte pour retrouver un air plus chaud qu’à proximité du lac souterrain. Supportant mieux les efforts physiques que moi, Sylve s’avance à l’intérieur de la végétation jusqu’à un point d’observation.

""J’arrive à voir le reste de ses hommes, ils sont venus si nombreux !" Détail-elle alors que j’arrive à son niveau.

Nous sommes non loin de la ville à l’orée d’un bois assez dense. La végétation nous offre un bon couvert contre les hommes qui surveillent le périmètre de la ville en ruine. Malgré le soleil qui m’éblouit, je parviens à distinguer des formes mobiles et je fais part de mes craintes à ma camarade.

"Tu penses qu’ils ont nos montures ?"

"Je ne parviens pas à le déterminer avec certitude, mais notre campement était assez bien visible malheureusement. Je doute qu’ils se soient aventurés à proximité sans les avoir aperçus et surtout sans avoir mis la main sur elles !" M’explique-t-elle.

"Plus de monture, de vivre et je n’ai plus une once de magie disponible ! Je m’en remets à ton expertise." Dis-je assez décontenancé par notre situation.

"Je pense qu’ils garderont Ashiro en vie, du moins je l’espère. Mais il en sera tout autre lorsqu’ils arriveront en ville, donc nous devons y arriver avant eux. La première chose à faire est de trouver un autre point d’observation pour trouver les failles de leur surveillance et surtout ne pas se faire…"S’interrompt-elle alors qu’elle lève le bras pour me dissuader de tout commentaire. Soudain, un bruit de flèche se fait entendre et manque de peu son joli minois…"repérer par des sentinelles !" Fini-t-elle.

Elle met la main sur son arme, mais la présence d’autres hommes venant dans notre direction la dissuade d’un combat rangé. Pas de temps à perdre, nous prenons la direction opposée qui nous éloigne davantage de nos montures, en prenant soin d’user de la végétation pour nous protéger des projectiles.

"Mince ! J’entends des bruits de sabots venant dans notre direction." Me détaille-t-elle

Alors que face nous quelques buissons un peu plus touffus nous bloquent la vue de l’ennemi qui arrive, un homme armé se rapproche par l’arrière. Prêt à un combat sur deux flancs nous serrons fermement nos armes, Sylve face à l’homme et moi devant l’inconnu. Surgissant soudainement des buissons, c’est une étrange créature qui apparaît armé d’énormes cornes. Elle nous frôle et envoie valser l’homme d’un bon coup de tête. L’étrange bête est une sorte d’hybride entre le cheval et le rêne. Il possède un pelage principalement marron très foncé, avec des parties de la tête ainsi que la queue d’un noir ébène.

"Le cavalier est descendu, mais où diable est-il ?" Déclare la semi-elfe en désignant l’équipement nécessaire à une monture sur le dos de l’animal.

Elle pointe son arme partout et nulle part à la fois, guettant le moindre signe de présence étrangère. Le rêne quant à lui s’avance vers moi et basse la tête pour chercher dans mes mains certainement de quoi manger.

"Nul besoin de t’affoler, je doute qu’il appartienne aux hommes qui en ont après nous !" Dis-je à ma camarade.

"Si c’est l’étrangeté de la monture, j’ai déjà vu plus loufoque !" Me rétorque-t-elle.

"Non je faisais référence à ceci. "

Je désigne sur le front de l’animal, la marque d’Erézia que nous avons vu sur la cheminée, donnant au passage secret. Je caresse l’animal à cet emplacement précis et celui-ci semble apprécier la chose.

"Erézia doit nous faire une dernière faveur. C’est l’occasion ou jamais de partir." Dis-je en empoignant les rênes de l’animal pour y monter.

"Faveur ou pas, on a toujours des hommes à nos trousses." Surenchérit la guerrière qui monte à son tour.

Alors qu’une nouvelle flèche se plante non loin de nous, je dirige l’animal pour poursuivre notre fuite. Une écriture sur la selle m’informe de son nom.

"Direction Oranan, Scrooge !"

Alors que j’énonce avec plaisir notre destination finale, le rêne change brutalement de direction pour se diriger vers la ville en quittant le bois, révélant ainsi notre position. J’ai beau tirer sur les reines, rien n’y fait, notre monture n’en fait qu’à sa tête. Quelques flèches passent non loin de nous, mais notre soudaine apparition avec cette monture étrange doit perturber les archers. Les hommes équipés pour le combat au corps-à-corps se précipitent vers leurs montures. Nous sommes déjà assez loin lorsqu’ils quittent finalement les ruines de la ville en cendre. Cependant, être à deux sur la même monture possède un inconvénient majeur sur les longues distances. Continuant sa chevauché sans suivre les ordres que je lui indique, nous atteignons le pied d’une haute colline que commençons à gravir.

(Rha, si seulement j’étais capable d’invoquer les esprits comme l’a mentionné Erézia, je regagnerais ainsi ma magie et ne serait pas un poids !)

Notre ascension se fait plus lente, les hommes commencent déjà à avaler la poussière que nous laissons derrière-nous. Nous atteignons le sommet lorsqu’ils sont à portée d’arme. Je sens Sylve qui s’agite derrière-moi et aux bruits d’impact, je comprends qu’elle s’acharne avec difficulté. Tandis que notre monture continue inlassablement sa course sur terrain plat, moi je suis tétanisé d’effrois. Le chemin s’arrête brusquement pour laisser une falaise vertigineuse. Si nos poursuivants stoppent leurs montures, je m’efforce de faire de même, mais la nôtre semble avoir choisi son propre destin. Sylve qui se demandait pourquoi nous n’étions plus poursuivis comprend désormais la raison, mais il est trop tard pour réagir. Je ferme les yeux et commence à peine une prière à Gaïa lorsque l’étreinte de ma camarade se resserre fortement. Etrangement, en lieu et place de la chute, je continue de ressentir les muscles de ma monture qui perdure dans un galop silencieux. Il me faut rouvrir les yeux pour comprendre pourquoi. Nous sommes toujours sur le rêne et sous les pattes de celui-ci, un grand vide est présent. La monture a stoppé son galop en faveur d’un trot au beau milieu du ciel. Nous volons littéralement dans les airs. Même si après réflexion, nous semblons chuter lentement tout en avançant, guidé par la queue de la créature qui lui sert de gouvernail dans ce genre de situation.

C’est un véritable cadeau qu’Erézia nous a fait-là ! En plus de nous avoir permis de semer nos poursuivants, nous avons le droit de voir un panorama à couper le souffle. A l’ouest, ce sont les plaines d’Ynorie où l’on peut apercevoir le léger reflet bleu de l’océan. A l’est, la forêt de Nostyla s’étend jusqu’aux pieds du massifs des jumeaux. Face à nous au nord, c’est le splendide lac de Nostyla, une vaste étendue d’eau dont l’ondulation des vagues est, de notre point de vue, un hymne à la douceur. Nous continuons notre longue descente, en nous laissant diriger par notre monture qui semble connaître le chemin.

VI.20 Esprit es-tu là ?

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