Le Défilé Aisunîdoru - Est Ynorien

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Yuimen
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Le Défilé Aisunîdoru - Est Ynorien

Message par Yuimen » mer. 30 janv. 2019 00:37

Le Défilé Aisunîdoru - Est Ynorien



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Ces montagnes sont la partie orientale de la chaîne qui traverse Nirtim : la Chaine du Karathren. Le relief, d’abord en pente douce, devient de plus en plus abrupt à mesure que l’on avance vers la frontière Kendrane.

Depuis les plaines, on peut déjà sentir le vent frais qui provient de ces griffes, déchirant les nuages qui ont l’idée de s’en approcher. De fait, il est courant que les sommets soient cerclés de nuages : depuis le bas des versants, ces géants semblent connecter le monde yuimenien et la voûte céleste. Les sommets sont difficiles d’accès, même en suivant les chemins prévus pour rendre l’ascension plus aisée : ces voies s’arrêtent toujours avant les pics, recouvertes par les avalanches lorsqu’ils existent. L’accès au col de la Bôdâ et aux crêtes reste d’une difficulté colossale bien que quelques pistes puissent être partiellement suivies.

Ces contreforts ont une valeur hautement stratégique – ou en tout cas, ils en ont eu une – dans les frictions opposant le Royaume de Kendra Kâr à la République Ynorienne par le passé. Les crêtes torturées servent ainsi de ligne de démarcation entre les deux entités politiques. Ce rempart naturel ne se laisse pas facilement conquérir, et il est fortement déconseillé d’en entamer l’exploration pendant une bonne moitié de l’année sans avoir un équipement et un entrainement adéquat. Le vent, glacial, souffle presque en permanence sur ces monts : les températures descendent la nuit en deçà des -20°C et la neige cache souvent des plaques verglacées. En plus de ces zones traîtresses, l’inclinaison des sommets de plus de 3000 mètres battus par les vents, fondus par le soleil en journée et glacées chaque soir créent des zones à risques qui bougent au gré des avalanches.

Si toutefois les sommets sont inhospitaliers, les vallées présentent leur lot de quiétude et de confort, même s’il reste rustique. Le vent perd en puissance et gagne un peu en température, l’eau glaciale dévalant les pentes depuis les glaciers et les neiges éternelles est idéale pour maintenir son tonus, et le gibier est abondant, tant cette zone est fuie par les chasseurs inexpérimentés. Ne soyez pas étonnés de croiser la faune habituelle des massifs montagneux, tels que les loups et leurs comparses wogers, ainsi que les savoureux gahkaïs, mais aussi des êtres plus rares : griffons, skadis, sylphes, flérustres et sektegs cornus. Certains auraient même vu une bande de centaures marauder dans la région. D’autres parlent de tyroglons dans les cavités à flanc de montagne.

C’est dans les quelques villages disséminés au creux des talwegs que des populations distinctes se sont installées : tout d’abord, les fiers artisans, mineurs, ou éleveurs qui trouvent à flanc de montagne et dans lesdits flancs de quoi créer d’excellents produits. Ceux-ci sont parfois présents depuis des générations et pourront vous en apprendre plus sur les façons d’éviter les dangers de ces montagnes que tous les guides disponibles hors du massif. Endurcis par une vie rigoureuse, ils sont fiers… et parfois rugueux, mais le plus souvent bien intentionnés ! Une autre population, beaucoup moins bienveillante, est celle des hors-la-loi, bandits et escrocs de tous poils qui sont venus se réfugier en lisière de la République d’Ynorie afin d’échapper à la poursuite des milices kendranes. Si vous croisez leur chemin, prudence…car s’ils sont assez recherchés pour élire domicile dans les forêts de résineux de hautes altitudes, c’est que leur crime est à la hauteur de ces pics !

Le paysage, sauvage, resplendit toutefois de beauté au moindre rayon de soleil. Profiter de ce panorama magique demande de longues heures voire journées d’ascension dans cet environnement définitivement hostile. Fort heureusement, si vous le souhaitez, quelques lieux permettent de prendre un peu de repos…il s’agira toutefois de les trouver !


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Vohl Del'Yant
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Re: Le Défilé Aisunîdoru - Est Ynorien

Message par Vohl Del'Yant » jeu. 18 avr. 2019 22:57

Les montagnes sont cependant longues à passer. Et si la douceur de l’air et les jours grandissants permettent d’emprunter sans réserve la route des crêtes. Par chance, les conditions sont meilleures que lors de leur arrivée à Mertar. Un vent d’ouest souffle, leur faisant parvenir les odeurs des forêts de pins qui marqueront le début du territoire Oranien. Les jours se succèdent sans incidents majeur, si l’on exclut de cette définition la cuisson plus qu’aléatoire de Hïo sur une paire de grouses au troisième jour.

Les chamailleries des deux hommes à ce sujet font long feu...jusqu’à ce que leur chemin arrive au défilé. De là où ils sont, l’Ynorie s’étale devant eux en une vaste étendue d’un vert tendre. Une émotion intense étreint leur poitrine. La dernière fois qu’ils ont vu ce paysage, la neige imposait son silence sur les plaines. Aujourd’hui, depuis leur point de vue, la vie impose de nouveau un rythme joyeux à cette terre bénie. Le vent les pousse soudain en avant. Un vent froid, pénétrant. L’hiver, qui survit toute l’année dans la chaîne du Karathren et ses recoins sombres, se rappellent à leurs sens.

La bourrasque les pousse en avant. La descente dans le défilé prendra peu de temps, aidés par la descente qui leur donne de l’allure. Les pics menaçants du massif n’abîment pas la motivation deux compagnons, papillons aveuglés par la flamme ardente que leur cœur place en la cité de la République. Les pins naissent doucement sur les côtés de la voie qui descend.

A plusieurs reprises, Hïo semble absorbé à la pensée du concours. Dans ces moments le mercenaire préfère le laisser maturer sa réflexion. L’heure n’est pas venue pour lui d’apprendre, et mieux vaut laisser le forgeron reconnu établir ses plans dans la construction de son armure. Après tout, ils échangent bien assez pour lui donner matière à penser. Le forgeron est curieux d’une foule de détails. Au début du voyage, l’assassin avait des doutes sur sa capacité à faire face aux exigences mentales d’un rôle aussi important que forgeron officiel. Non pas que le jeune homme manque de morale. C’est plutôt l’inverse, de l’avis de l’assassin. Il ne se méfie pas assez de ce qui a des allures d’ami. Et malgré une enfance passée entre les murs d’Oranan, son âme, bonne par nature, peine à imaginer des adversaires qu’il faut combattre impitoyablement.

Curieusement, Vohl a la sensation que seule la construction d’armes et d’armures tient réveillé en lui un semblant d’instinct guerrier. Un souci de l’efficacité de ses créations, en somme. Qui ne gomme pas son innocence, mais qui l’atténue au moins en ce qui concerne les façons de gagner une guerre. Le mercenaire soupire. Il s’inquiète surement pour rien. Depuis le début du voyage, le jeune homme a fait ses armes à plusieurs reprises, lui sauvant également la vie au passage. La trahison, même passagère, des thorkins, lui aura sans doute également mis du plomb dans la cervelle.

Au fil de leurs discussions de multiples reprises, ils remarquent que des plaques d’une neige maronnasse recouvrent le chemin. En suivant du regard les coulées, Vohl confirme la déduction qui traine depuis un moment dans son esprit. Il a déjà eu l’occasion de se frotter à ces crocs glacés. Le redoux a fait fondre la fine couche de neige qui avait réussi à se poser sur les pentes presque verticales, faisant perdre l’adhérence de ces glaces. Les avalanches ici sont sans doute moins déclenchées par le poids de la neige que la fonte. Finalement, leur retard dans la capitale thorkine leur a probablement évité une ou deux péripéties. Tout en se faisant cette réflexion, il répond à Hïo sur une nouvelle question sur la vision stratégique de l’armée Ynorienne.

“La cavalerie ? Notre cavalerie est le point fort de notre armée. Tu vois la disposition des terres de la République ? En schématisant, nous sommes sur une plaine vallonée : les unités mobiles sont donc particulièrement redoutables on nous approchait.”
“Les raids garzoks seraient effectivement bien plus destructeurs sans une intervention rapide.”
“Les garzoks ne sont pas les seuls qui pourraient profiter d’une faiblesse militaire.”

Un silence suit sa déclaration. Hïo lui jette un regard étrange.

“Tu parles d’une trahison ?”
“Selon le point de vue, la trahison pourrait être décrite comme une stratégie bien ficelée.”
“Pourtant, ne sommes-nous pas tenus de faire confiance à nos alliés ?”
“Non. Bien sûr que non, Hïo. S'aveugler d'illusions ne change pas le monde : tant qu’ils ne se rendent pas véritablement compte de ce que nous coûte leur défense, peu de personnes mesurent valeur de nos actions. Même les shaakts et les thorkins, avec leur longévité et leurs sages, finissent par oublier le passé aussi bien que la race des hommes.”
“Tu parles des incursions oaxciennes ?”
“Oui. Nous connaissons la valeur de notre défense car nos vies sont directement dans la balance, que ce soit sur les champs de batailles ou dans nos villages et nos villes. Mais place toi du point de vue d’un étranger. La vie est douce, sur Nitrim, du côté de l’Alliance. Même pour nous. Ce ne serait pas surprenant que certains nourrissent l’espoir de récupérer les terres.”
“Cela pourrait passer pour des paroles de haute trahison, Kage.”
“La lucidité ne devrait pourtant pas l’être.”

Un nouvel instant de silence.

“Nous ne vaincrons Oaxaca qu’en nous serrant les coudes, pas dans une ambiance de méfiance généralisée, ne crois-tu pas ?”
“Je suis évidemment d’accord. Et pour cela, quel meilleur moyen que de marquer son appui aux efforts pour endiguer les vagues oaxciennes ?”
“On ne peut pas vraiment leur en vouloir...nous nous protégeons avant tout à leurs yeux. Est-ce si faux ?”
“Bien sûr que nous nous protégeons. Mais derrière nos murs, n’y a-t-il rien d’autre que nous ? Repose la question en ces termes, Hïo. Si Oaxaca nous propose une alliance sous réserve que tous les Ynoriens continueront à vivre en paix... que s’attendent nos chers alliés à entendre de notre part ?”
“Non, bien sûr. Mais nous sommes en conflit avec Oaxaca. Ce serait naturel, non ?”
“Mais nous étions en conflit avec Kendra Kar depuis la construction de la République.”
“Je...”
“Et dans mon exemple, Oaxaca se présente à nous comme allié. Comme Kendra Kar l’a fait avant elle. Pourquoi lui refuser la confiance que nous devrions accorder sans réserve à nos alliés actuels.”
“Pour la simple raison que tu m’as présentée en début de voyage : les différences insurmontables des principes régissant nos sociétés. Et tu es de mauvaise foi : les kendrans sont nos alliés en grande partie à cause de la pression oaxcienne.”

Vohl sourit intérieurement, heureux que le forgeron ait réfléchi aussi sur ce qu'ils ont échangé pendant leur périple. Il ne se laisse cependant pas décontenancer face à son propre argument.

“Précisément. C’est une alliance qui tient sur un pilier. La menace oaxcienne. De cette confiance à l’opportunisme, il n’y a qu’un pas, ne trouves-tu pas ?”
“C’est possible...”
“Et si un ennemi plus terrible encore, plus encore opposé à nous qu’Oaxaca, se dressait : nos adversaires verraient-ils d’un bon œil que nous fassions front commun avec les oaxciens ?”
“Tu pousses la simulation loin...”

Le déserteur balaie d'un revers de main la réflexion, comme s'il écartait une poussière insignifiante. Sa situation lui revient assez brutalement en mémoire et comme toujours, son coeur se serre en pensant à ce qu'il a perdu et ce qu'il a abandonné dans l'école militaire, en même temps que son uniforme.

“Etre menacé de mort pour une fausse raison fait beaucoup s’interroger sur les motivations des personnes. J’en ai eu le temps. Je n’irai pas plus loin que ma dernière question. Mais tu devrais garder ça en tête, si tu deviens forgeron officiel. Ceux qui se présenteront comme des alliés ne seront pas tous à la recherche d’un idéal commun.”
“Je tâcherai de m’en souvenir, en ce cas.”

La nuit est tombée depuis désormais un moment, et le sentier est désormais au milieu des bois. Les conifères partagent la place avec une végétation plus haute et feuillue, signe de l’altitude perdue. Les murmures des feuilles bruissant sous le vent, les ombres laissant voir une demi-lune qui semble sourire. Sur les longs bras d’arbres centenaires, les bruissements de chauve-souris marquent le début d’une nouvelle chasse. Pour les deux hommes, la journée n’est pas encore finie. Ils doivent presser le pas s’ils veulent rentrer dans les temps. Vohl continuera donc à marcher pendant que Hïo dors autant que possible sur l’encolure de la Cerfe, qui s’est encore élargi depuis le début du voyage. Le forgeron a désormais l’habitude de ce manège.

“Demain, nous parlerons des régiments d’armée.”

Vohl prend avec un sourire doux les dernières réflexions à moitié conscientes du jeune homme qui sombre dans le sommeil.

“Bien, sire Himatori. Alors nous parlerons des régiments maritimes et de l’importance de les doter d’un équipement qui assurera notre suprématie.”

Mais ses réflexions s’éteignent sans écho sur les tapis de mousses qui amortissent le pas de Mahô en une douce ponctuation. Il se tait, profitant du silence ambiant. Cette journée était apaisante. Et la proximité du cœur de la République le pousse en avant. Dans la nuit, ils font leurs premiers pas sur la lande ynorienne alors qu’autour d’eux la montagne crache un nouveau courant d’air froid et parfumé des odeurs de yuzu qu’émettent les bourgeons de certains conifères de basse altitude. Les sabots du destrier remuent une terre humidifiée par la saison douce et les torrents qui dévalent la montagne en rugissant, responsables d’un faible bruit de fond presque indistinguible une fois sortis des mâchoires du Karathren.

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Faëlis
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Re: Le Défilé Aisunîdoru - Est Ynorien

Message par Faëlis » ven. 17 mai 2019 18:03

Grâce aux conseils de Madoka, forts avisés au demeurant, ils traversèrent l'Ynorie au plus vite que leurs jambes, ou leurs ailes pour Aliéna, pouvaient les porter. Après les plaines, les hautes montagnes du centre de Nirtim élevèrent leur masse écrasante devant eux, et ils durent ralentir le rythme devant la pente de plus en plus abrupte.

Faëlis était perpétuellement tourmenté à l'idée de dépasser accidentellement leur cible en prenant ces raccourcis, mais étant donné son avance, c'était peu probable. De plus, bientôt, ils n'eurent d'autres choix que d'emprunter des vallées et des passes de montagnes qui ne laissaient guère d'autre route possible. Leur guide tenait le rythme sans peine, même si, évidemment, Aliéna avait le temps de partir en avant, de revenir, et de jouer les éclaireurs. La femme aux cheveux blancs n'avait cependant guère de conseil à apporter sinon confirmer que la route de Madoka semblait bien être la plus rapide.

Plus ils s'élevaient, plus l'air devenait froid. Faëlis n'avait, finalement, jamais connu de vrai neige, ni de véritable froid. Il était donc un peu surpris par cet état de fait, mais cacha au mieux les premiers tremblements, histoire de ne pas être la risée de ses compagnes. Toutes deux semblaient relativement habituées à ces conditions climatiques. La forêt disparaissait, remplacée par des herbes basses et des lichens. Un décor assez triste mais, finalement, possédant une beauté austère tout à fait appréciable. Il remarqua même quelques animaux au loin qu'il n'était pas sûr d'identifier. Heureusement, il avait une guide pour lui parler des marmottes ! Ils virent aussi quelques bouquetins, et, au loin, de grandes ailes que l'elfe identifia comme étant probablement celles d'une wivern. Heureusement, ils ne firent aucune rencontre dangereuse pendant le trajet.

Alors qu'ils entraient dans la dernière passe avant le palais de la roseraie de la soie, et que l'elfe commençait à se demander s'il n'allait pas falloir faire demi-tour pour trouver l'usurpateur, Aliéna revint d'une mission de reconnaissance en s'exclamant :

« Je crois que j'ai trouvé ton petit ami ! Même pas un kilomètre devant ! »

Sans hésiter, mais jetant des regards prudents autour de lui, Faëlis hâta le pas pour prendre les devants. En effet, un homme en blanc marchait devant eux. Alors qu'ils s'approchait, l'homme mit une main prudente à son arc. C'était un elfe. Manifestement un militaire, blond, élégant, pour ne pas dire séduisant. Bizarrement, Faëlis se sentit presque soulagé de voir qu'il n'avait pas vraiment son visage. C'était bien quelqu'un d'autre, mais quelqu'un d'autre qui lui ressemblait néanmoins de manière troublante. Quand il vit son suiveur, ses yeux s'agrandirent :

« Vous... Faites demi-tour ! »

« Non, répondit Faëlis. Nous allons faire demi-tour ensemble. Vous avez des choses à m'expliquer. »

L'usurpateur s'approcha d'un pas prudent, jetant des regards inquiets autour de lui.

« Vous ne devriez pas être là ! Partons, vite ! »

« Expliquez-moi d'abord ce que vous faites ici... »

« Je vous protège, imbécile ! Croyez-vous que votre mère... »

Faëlis relâcha un instant son attention sous l'effet de la surprise. Sa mère ! Il aurait dû se douter qu'elle était derrière tout ça. Mais dans cet instant, l'usurpateur se jeta sur lui ! Il bascula et roula dans les pierres de la montagne. Le temps qu'il retrouve ses esprits, son agresseur avait tiré une arme...

Les yeux du véritable de Faëlis accrochèrent alors une flèche qui s'était brisée un peu plus loin, contre un rocher. Ce n'est qu'à ce moment-là qu'il vit plusieurs silhouettes en tenues sombres qui étaient apparues un peu plus haut sur la route. Ils étaient en parfaite position pour une embuscade, ou du moins ils auraient été en parfaite position si le groupe avait été plus avancé d'une centaine de mètres. Ils étaient déjà en train d'encocher de nouvelles flèches.

« Fuyez ! » cria d'usurpateur en saisissant son propre arc.

Mais Faëlis avait déjà fait de même, tout en criant :

« À couvert ! »

Les deux femmes s'avancèrent prudemment. Madoka passait relativement inaperçu, sachant parfaitement se cacher entre les rochers. Aliéna, en revanche, avait toutes les peines du monde à progresser. Sa robe colorée n'était sans doute pas la meilleure dissimulation ! Mais Faëlis et l'imposteur étaient sur le qui-vive et lâchaient des flèches précises qui forçaient les tireurs ennemis à garder le couvert autant que possible. Il y avait trois archers, en face, et, malgré ses efforts, l'elfe ne parvint pas à en toucher un seul. C'était de toute évidence des meurtriers professionnels...

Il enfila son casque et se précipita pour se glisser derrière un rocher plus gros et plus proche. Au passage, une flèche éclata contre son épaulière de métal. Il recommença à tirer alors que Madoka arrivait au contact. Mais à ce moment là, alors qu'elle allait passer à l'attaque, un quatrième tueur surgit de sa cachette pour l'attaquer par surprise ! Elle parvint de justesse à parer l'attaque. Aussitôt, les archers, surpris d'avoir un adversaire aussi proche, tentèrent de se redéployer, mais Faëlis et l'imposteur les criblèrent de flèches. Aliéna prit le risque de se transformer en oiseau pour parcourir les derniers mètres et fondre sur eux. Avec une vivacité hors du commun, l'un des hommes décocha une flèche qui la rata de peu. Elle reprit aussitôt forme humaine pour lui sauter dessus, l'épée à la main. Un duel féroce s'engagea, mais l'attention de Faëlis était retenu par les autres archers.

Madoka était en difficulté face à l'épéiste. Elle ne tiendrait pas longtemps ! L'elfe prit alors les devant et, plutôt que de tirer sur les agresseurs, il invoqua son pouvoir pour créer une flèche de lumière qu'il décocha sur la guide. Une vieille technique de protecteur... Maintenant, il sentait avec exactitude la présence de la jeune femme, et sentit également les premières blessures. Elle avait finalement été désarmée par le bandit, et les deux autres archers avaient tirés à courte distance, lui transperçant la cuisse et l'épaule. Mais le protecteur était déjà paré. Il invoqua le souffle de Gaïa et le projeta à distance pour soigner les plaies qu'il percevait si finement !

Dans la foulée, il invoqua une flèche aveuglante qu'il tira sur un des archers. Si ce dernier esquiva au dernier moment, il en fut tout de même un peu désorienté. Les deux elfes archers se précipitèrent en avant, tirant coup sur coup. Faëlis abattit l'homme aveuglé, et son double toucha l'autre. Il se retourna vers eux. À cette distance, le jeune homme pouvait voir ses yeux qui allaient de l'un à l'autre, cherchant lequel était le vrai Faëlis. L'hésitation ne dura qu'une seconde, mais elle indiquait clairement qu'ils avaient affaire à des assassins professionnels... L'usurpateur tira à nouveau, en même temps que l'assassin, qui avait finalement choisi la bonne cible. L'homme s'effondra en grognant, mais Faëlis trébucha en gémissant. La flèche s'était logée juste dans le défaut de l'armure, au niveau de l'épaule ! Heureusement, il sentait que la blessure ne devait pas être bien grave.

Jetant un regard vers l'agresseur, il vit alors quelque chose d'inquiétant : un liquide sombre coulait de son carquois. Il avait versé un liquide à l'intérieur ! Sentant son sang se glacer, Faëlis invoqua aussitôt son sortilège anti-poison. Dans un instant de panique, il échoua à la première tentative. Effet psychologique ou poison foudroyant, il sentait déjà la morsure brûlante qui se répandait dans son bras ! Le deuxième essai fut plus concluant, et il banni le venin de ses veines.

Un peu plus loin, Aliéna enchaînait quelques passes d'armes qui lui permirent finalement de passer sous la garde de sa cible, armée d'une dague, pour la transpercer d'un coup décisif. Le dernier ennemi tomba.

« Bon sang c'était qui ces types ? » grinça-t-elle.

Des hinïons. Les assassins n'étaient pas légions à Cuilnen. Qui pouvait bien les avoir envoyés ? Alors que Madoka les rejoignait, Faëlis se tournait vers l'imposteur pour l'interroger quand il vit un mouvement. Tout se déroula trop vite. Il lança un cri d'alerte et encocha une flèche en voyant le cinquième assassin qui sortait de sa cachette pour le viser. L'échange de flèche qui suivit fut si vif que bien peu auraient pu le suivre. Seul le regard averti du jeune elfe lui permit de voir plusieurs traits partir presque en même temps, criblant l'air là où il était, mais aussi autour. Il n'aurait eu aucune chance d'esquiver sans son double, qui se jeta devant lui et reçut deux tirs. Faëlis avait déjà décoché, et une flèche traversa la gorge du dernier agresseur. Il tomba au sol, presque en même temps que l'imposteur.

Faëlis se jeta sur celui-ci, prêt à mettre en jeu ses pouvoirs de guérison. Son cœur battait la chamade alors que la sinistre prophétie de l'oracle résonnait dans ses oreilles. Il pouvait guérir le poison ! Il pouvait...

… il ne pouvait guérir l'artère touchée, qui répandait du sang à gros bouillons. Pourtant, il essaya. Avec un cri de rage, se battant comme pour sa propre vie, ce qui était le cas, en un sens, il invoqua tout le pouvoir de la lumière. Il déversa sa magie sur la plaie tout en essayant de retirer progressivement la flèche au fur et à mesure que la chair se ressoudait. Mais le flot qui se déversait par l'artère était trop important. Chaque battement de cœur rouvrait ce que la magie tentait de refermer.

Il sentit les yeux de l'hinïon se poser sur lui, emplis d'un mélange inextricable de sentiments. Il savait qu'il était condamné. Il murmura :

« Je savais... que Faëlis devait mourir sur le chemin des roses... Il valait mieux que ce soit moi... »

« Non ! Rugit le véritable Nyris'Kassilian. C'est à moi et à moi seul d'assumer mon destin ! Pourquoi ? Qui sont ces gens ? »

« Les hommes du Roi-serpent... le Roi Noir... Ta mère savait... »

Ses yeux se perdaient dans le vague.

« On ne peut rien contre le destin... Faëlis devait mourir ici... »

Le serrant avec plus de force encore, tandis que les dernières gouttes de sa magie s'épuisaient, celui qui devait mourir savait que c'était la fin. Le destin avait triomphé. À moins que...

« Quel est ton nom ? Ton vrai nom ? »

Il eut l'air troublé, comme s'il cherchait au fond de sa mémoire.

« Je... cela fait si longtemps... Kyrlin... »

« Meure en paix, Kyrlin. Tu as vaincu le destin. »

Alors, l'ombre d'un sourire passa sur ses lèvres... avant qu'il ne trépasse.
Modifié en dernier par Faëlis le sam. 25 mai 2019 18:08, modifié 3 fois.

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Madoka
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Re: Le Défilé Aisunîdoru - Est Ynorien

Message par Madoka » dim. 19 mai 2019 22:31

Je devine rapidement que l’oiseau est en fait Aliéna. Une transformation qui paraît complètement banale pour l’Hinion mais qui ne l’est pas du tout pour moi, déjà peu habituée à côtoyer la magie, encore moins à voir un humanoïde se transformer en animal et vice-versa. Pendant cette première journée, je ne cesse de réfléchir à la sensation de sentir des plumes pousser dans la chair, ressentir son corps s’allonger et se disloquer pour devenir un oiseau et inversement ; le silence pesant de nos trajets me pousse même à me demander où disparaissent les vêtements et le matériel de la jeune femme, et les premières idées ne sont pas élégantes.
C’est définitif, je suis aussi hermétique à la magie qu’à la poésie. Tout cela me dépasse mais en même temps, je ne peux arrêter d’admirer le caractère primitif et sauvage de cette magie là.

Lorsque le soir venu, nous prenons le temps de nous sustenter, je lui avoue que je trouve son pouvoir surprenant et lui demande si elle est ce qu’on appelle une shaman. Un nom souvent entendu dans la bouche des ménestrels et qui semble assez proche de son don, même si elle se contente de me dire qu’on peut voir ça comme ça. Le sourire hautain qu’elle arbore perd peu à peu de sa substance ; elle n’est pas volubile mais elle ne coupe pas court à la discussion et à la fin du repas, je la sens légèrement touchée par l’intérêt que je lui porte. Ma curiosité quant aux sensations en vol n’est cependant pas assouvie car de son aveu, il lui est impossible de décrire qui ne peut qu’être vécu.


Les jours passent et se ressemblent, nous marchons vite, nous courrons dès que j’en suis capable et la jeune femme ne quitte quasiment plus le ciel, à part pour venir confirmer de temps à autre qu’on est bien sur le chemin le plus rapide. Son caractère sanguin s’exprime sans réserve et pourtant, paradoxalement, elle semble constamment sur la défensive. Elle accepte de me parler un peu de son lien avec le célérian et j’apprends qu’elle peut leur parler, à tous. J’en déduis qu’il s’agit peut-être d’un lien plus fort qu’une simple transformation en animal et cherche à savoir si leur lien est du à un choix ou à quelque chose de plus grand, quelque chose de l’ordre de la destinée. Elle se braque et se fâche, me demandant en quoi la question me regarde avant de se transformer et de s’envoler.
Je souris en l’observant disparaître derrière un bosquet.

((Qu’est-ce que ça doit être fatiguant d’être ainsi colérique et spontanée.))


L’elfe, lui, semble de plus en plus préoccupé par le terme de notre voyage et de moins en moins à l’aise à mesure que nous approchons de vallées montagneuses. Pour ma part, sentir le froid sur ma peau me fait du bien ; après des semaines passées à subir l’intense chaleur du désert, j’aime plus encore qu’avant avoir froid. Ce voyage est comme un recueil visuel de tout ce que j’avais oublié d’apprécier à sa juste valeur ; entre autre le paysage changeant et le ciel orageux. Plus de sable à perte de vue, plus d’horizon troublé par le feu du soleil … alors peu importe les états d’âme de mes voyageurs.

Au matin du dernier jour avant d’arriver en vue du palais, je préviens Faëlis que nous arrivons bientôt à destination. Son visage plus préoccupé que jamais jette des regards incessants en arrière, sans doute par crainte d’être arrivé trop tard malgré la rapidité du trajet sans aléas.
Aliéna donne un tournant différent à la journée en revenant à tire d’aile pour annoncer à l’elfe que son "petit ami" n’est qu’à moins d’un kilomètre devant. Une drôle d’expression dite sur un ton sarcastique et dont la signification m’échappe et m’échappera encore à n’en pas douter.

Sans précipitation hasardeuse, l’Hinion inspecte les environs proches en avançant à grands pas. Nulle hésitation cependant de sa part malgré le danger qu’il sait présent, il avance et saute par-dessus les cailloux du sentier escarpé.
Peu concernée par leurs affaires mais curieuse d’en connaître le dénouement, je le suis en prenant soin de rester à l’écart afin de ne point être découverte. Il s’approche de quelqu’un habillé en blanc, grand et assez large d’épaules pour être un homme ; sur le qui-vive de toute évidence car il perçoit rapidement la présence de Faëlis derrière lui et porte la main à son arc avant de se retourner. Son regard ne trompe pas. Si Faëlis n’avait réellement aucune idée de l’identité de l’elfe qu’il poursuivait, ce dernier sait exactement qui se trouve devant lui … et il est surpris de le voir ici et maintenant. D’une voix affolée, il le somme de faire demi-tour immédiatement tandis que ses yeux sondent les alentours. La situation lui échappe, il tente de faire entendre raison à Faëlis en l’implorant de nouveau de repartir mais il ne trouve qu’un mur face à lui, un mur lancé à sa poursuite depuis trop de jours pour repartir sans une once d’explication. Le ton monte soudain et l’hinion avoue enfin qu’il est là pour protéger Faëlis à la demande de sa propre mère. Un retournement dans le canevas de l’histoire du noble rebelle que je n’imaginais pas. Il savait cet homme en danger mais de toute évidence, ce dernier se met en danger volontairement pour le protéger lui. Un fouillis d’acte de bravoure, de témérité et de devoir les uns envers les autres qui ne semble pas perturber que moi.

L’annonce laisse le noble protecteur sans voix et le regard soudain absent … au point de ne pas réagir lorsque l’envoyé de sa mère ; protecteur lui aussi par la force des choses ; se précipite vers lui et le pousse d’un coup d’épaule pour lui éviter de finir perforé par une flèche.
Presque simultanément, les deux Hinions hurlent, à celui et celles qu’ils connaissent, de fuir et de se mettre à couvert. Je ne vois déjà plus Aliéna dans les parages, sans doute n’a-t’elle-même pas quitté sa forme d’oiseau pour survoler la scène sans éveiller leurs soupçons. Cachée derrière mon mur de roche, je me décale légèrement afin de regarder l’origine de la flèche. Au loin, plusieurs personnes de très grandes tailles barrent la route. J’en compte pour l’instant trois, tous encapuchonnés avec un foulard sur le nez et emmitouflés dans des manteaux sombres et tous armés d’arc. Sans un bruit, je dépose mon paquetage à mes pieds et dégaine mes armes à mon tour.


Toujours hors de vue de ses agresseurs, je penche la tête pour me faire voir de Faëlis, arc à la main et à la recherche de ses alliés. De là où il se trouve, il repère Aliéna et nous fait signe à tour de rôle d’avancer vers les trois individus masqués, en restant à couvert le plus longtemps possible.
Le chemin s’y prête moyennent mais je parviens à me rapprocher de quelques mètres sans me faire repérer. Ils avancent lentement en pointant leurs flèches vers la position de Faëlis et son acolyte. Aucun mot n’est prononcé, ils ne sont pas là pour négocier quoi que ce soit. Les flèches tirées ne sont pas là pour faire peur, elles sont là précisément pour assassiner. Ils s’approchent et guettent de leurs positions enviables en hauteur et dos au soleil, ils attendent que leurs proies tentent l’impossible pour parvenir à viser juste. Les Hinions ont besoin d’une diversion conséquente pour faire ce pour quoi ils sont là tous les deux … se protéger l’un l’autre.

J’avance encore de quelques mètres sans me faire repérer par le trio. Je suis assez proche pour qu’ils soient à portée de mes lames lancées à la seule force de mes bras. Ils ont stoppé leur avance prudente et se concertent, sans doute pour établir un autre plan visant à déloger le gibier planqué, car l’un d’eux bande son arc tandis que les deux autres s’écartent du sentier rocailleux.
Les aspérités du rocher peuvent me servir d’appui pour me hisser suffisamment haut afin de tirer sans être vue. Je sors deux lames et calcule mes chances d’arriver à tirer et me déplacer jusqu’au tronc d’arbre plus loin, avant qu’ils détectent ma présence. C’est osé et la probabilité d’en blesser un est faible mais si ça marche, les Hinions auront une chance d’ajuster leur visée. Je hisse mon pied sur le rocher lorsqu’un bruit dans mon dos me fait tressaillir. Le grincement de cailloux déplacés par autre chose qu’un gros coup de vent. Je pousse en arrière au lieu de m’élever et échappe de justesse à la flèche qui se brise sous mon nez.

Un quatrième homme en manteau noir a échappé à ma vigilance et se rue sur moi à une vitesse folle. Je lance les lames vers lui pour faire diversion afin d’empoigner le cimeterre. Il sautille tel un lapin pour les éviter et saute par-dessus des branchages morts, ayant déjà échangé son arc contre une épée courte. Je pare son attaque et ressens sa force jusque dans mon avant-bras. Après plusieurs et rapides échanges qui nous valent chacun quelques ecchymoses, je commence à entendre les voix du trio au-dessus de nous, parlant dans une langue étrangère. Si l’un d’eux arrive dans mon dos, je suis foutue ; mais garder un œil vers le sentier pour les voir venir et me concentrer sur mon adversaire est presque impossible. Je ne fais que retarder le moment où je vais devoir choisir quel risque est le moins grand, celui de détourner le regard d’un danger mortel imminent ou celui de relâcher mon attention d’un assaillant que je suis loin de dominer.

Il devine mes craintes. Son regard ne trompe pas et ses gestes non plus. A deux reprises, il tente d’empoigner mon bras pour m’attirer du mauvais côté. La première fois, je suis parvenue à m’en défaire en attrapant le cimeterre de ma main gauche. Il s’est reculé d’un pas leste en esquivant adroitement mon coup hésitant. Cette fois, il bloque ma main dans la sienne et je lâche mon arme sous la pression et la douleur. Un coup de coude dans le nez l’empêche de me briser les doigts de sa poigne de fer mais la seconde perdue à ressentir la liberté de mes doigts engourdis me vaut un coup de poing dans la mâchoire, qui me fait valser en arrière. Un mal pour un bien cependant car je suis toujours du bon côté, du moins pour l’instant.

Mais mon arme, elle, se trouve derrière lui. Contre un adversaire comme lui, en face à face, ma dague ne me servira à rien, je ne pourrais jamais passer sa garde. Il n’est pas un vulgaire brigand ou quelqu’un, comme moi, qui a appris à se battre dans les rues. Je crache le sang qui remplit ma bouche ; je déteste me mordre la langue, j’en ai pour des heures à remordre la plaie à tout bout de champ.
Advienne que pourra, je vais devoir passer dans son dos pour récupérer mon sabre. Je cours vers lui et feinte de l’attaquer avec ma dague noire. Je roule à terre pour éviter son coup et me rattrape en glissant puis tourne autour de lui comme une anguille entre les doigts d’un pêcheur. Il ne se laisse pas berner très longtemps, il pivote et se retrouve près de moi d’un pas chassé avant de balayer le sol de son épée pour me faucher en pleine course. Je plonge par-dessus et l’évite mais mes doigts ne font qu’effleurer le pommeau de mon sabre, trop loin de minuscules centimètres pour que je puisse m’y accrocher pendant ma roulade au sol. Un genou à terre, je m’apprête à bondir dans son dos quand un mouvement de sa part me donne soudain la chair de poule. Il vient de se retenir d’avancer …

Sans même les voir, je les sens au dessus de moi, arcs bandés et flèches encochées. Dans une ultime tentative, j’attrape une lame dans chaque main et les lance en bondissant le plus loin possible de ma position, peu importe où. Que je m’éloigne de mon sabre, que je dégringole la pente en me brisant quelque chose, que je finisse dans les pattes de mon adversaire … ça sera toujours moins pire que de rester là, offerte à deux archers comme une lapine face aux crocs d’un loup. Mais lorsque mes lames quittent mes doigts, il est déjà trop tard ; les flèches sont déjà tirées et le mouvement de recul que j’entrevois de leur part est bien inutile. La première flèche m’atteint en pleine cuisse. Ma jambe trébuche dans le sens inverse de mon élan et je me sens soudain comme en chute libre … la deuxième m’arrache un cri et me coupe le souffle. Emportée par la vitesse du projectile qui traverse le creux sous mon épaule, je tombe comme une poupée de chiffon et hurle lorsque la flèche dans ma cuisse se tortille dans la plaie à chaque secousse.

Je ne dois mon salut qu’à la rapidité de mon instinct et la faiblesse de son coup qu’il croit être un coup de grâce facile. Allongée sur le dos, j’enferme son épée entre mes mains juste à temps. Un fourreau tenu de la force du condamné et qui a au moins le mérite de faire frémir ses yeux d’émeraude. De ma jambe valide, je porte un coup rapide et lui fracasse un genou avant qu’il ne retrouve ses esprits. Il lâche son épée, qui tombe du côté de mon bras invalide et j’enrage de ne pouvoir le bouger pour l’attraper tandis qu’il tombe sur moi. Il a la force mais j’ai la souplesse … je l’empêche de récupérer son arme d’un coup de genou dans l’omoplate, me défais de ses tentatives de m’emprisonner entre ses jambes et d’une seule main je place plus de coups de poings que lui avec deux, devenues maladroites sans épée.
Pendant que je me débats, une sensation venue de nulle part m’envahit, accompagnée d’une impression de déjà vu fugace ; je panique en sentant un fourmillement dans mes plaies, craignant d’avoir affaire à une nouvelle tactique de mon adversaire. Mais mon impression ressurgit, triomphante, se remémorant l’effet de la magie curative. De la magie quand même, et bien que celle-ci réduise le saignement de mes blessures, un frisson d’effroi parcoure mon dos.
Lorsqu’il attrape une énorme pierre et la lève au dessus de ma tête, je chasse mes angoisses d’avoir été touchée par la magie et profite de mon regain de mobilité. J’arrache la pointe de flèche de ma cuisse et vise la gorge. La pierre échappe à son contrôle et glisse le long de son dos. Il est surpris, ses yeux papillonnent à la recherche d’une réponse tandis que ses mains tâtent sa gorge pour faire de même. Un mince filet de sang déborde de ses doigts tremblants. Ses magnifiques yeux verts cerclés de noir me toisent avec une agressivité qu’il n’avait pas jusque là. Il tend une main ensanglantée vers mon cou qui ne l’atteint pas, stoppé par une orbite transpercée jusqu’au cerveau par la même flèche. Il n’a pas le temps de hurler, pas même celui de réaliser.

Un coup d’œil vers le sentier me confirme ce que j’ai cru distinguer pendant le combat. Les deux Hinions se sont occupés des deux archers et la jeune femme du quatrième assassin. Je ramasse mes armes éparpillées et récupère l’épée de mon adversaire après l’avoir fouillé, mais ce dernier était de ceux qui voyagent léger. Sous son masque se cachait un visage elfique fin et juvénile, une jeunesse trompeuse très sûrement en raison de sa race.

Lorsque je les rejoins, ils sont tous les trois côte à côte à observer les corps à leurs pieds. Seule Aliéna met des mots sur ce que nous pensons tous, ou presque, en se demandant qui étaient ces hommes. L’elfe que Faëlis vient de retrouver pourrait être son frère même si de mon œil peu avisé, tous les Hinions se ressemblent. Mais le nouveau venu possède un quelque chose qui fait penser à Faëlis, un air de famille qui tient de la stature et du maintien. Et lui, comme Faëlis, savait qu’un tel danger les attendait … et s'y est risqué dans la précipitation.

Soudain, mon client réagit à quelque chose que je ne perçois qu’au dernier moment, une autre silhouette apparaît plus loin, presque entièrement camouflée dans un buisson d’arbustes épineux. Protecteur dans l’âme, il nous alerte tout en armant son arc même si, je n’en doute pas, il sait déjà qu’il est la principale cible. La première de toutes les flèches tirées lui était destinée. Le bruit des cordes qui se relâchent sonne comme un glas … impuissante, je vois plusieurs flèches traverser mon champ de vision en direction de Faëlis … et une masse traverser celle de ce dernier. Une masse grande, blanche, rapide et déterminée à protéger un homme au péril de sa propre vie.
L’assassin meurt instantanément d’une flèche en travers de la gorge.
Le protecteur lui, gît aux pieds de Faëlis qui tombe à genoux pour lui venir en aide. Sur son visage se devine une rage intimiste teintée d’échec. Sans barrière, sans faux-semblant, il hurle contre une fatalité qu’il ne veut pas accepter. S’élève alors une vive lueur qui devient une lumière aveuglante dont il est la source. Je recule d’un pas et me détourne de la scène, l’observant du coin de l’œil, mal à l’aise en présence de cette force immuable et intangible.

Ce que je prends peut être à tort pour une fraude à toute logique et source de miracles interdits, n’en est peut être pas une en l’état car bien que capable de soigner des plaies … sa magie ne parvient pas à vaincre la fatalité d’une blessure mortelle. Le condamné le sait, lui, car il porte sur son protégé le regard de celui qui part, où sérénité, souffrance, regrets et accomplissement s’entremêlent sans se confondre.
Mes vieilles habitudes prennent le dessus et mon oreille s’accapare des mots destinés à une intimité que mon passif d’espionne ne connaît et ne respecte pas. Un destin particulier a mené ces deux hommes en ces lieux … et leur destin n’avait gagné qu’une bataille en ce jour. Une petite victoire pour cet homme qui meurt le sourire aux lèvres, ayant sauvé celui qui devait mourir.

Je m’approche d’eux. La suite de notre marché dépendra de la réponse de l’elfe aux traits tirés et aux yeux pensifs. Ce qui ressemble à une prédiction l’a amené jusqu’ici, lui et l’homme envoyé par sa mère ; une prédiction aux allures de mauvais présage et aux relents de piège à vrai dire … mais qui ne les a pas arrêté pour autant. Les révélations du mourant cependant, bien que partielles, ne sont pas aussi impalpables et mystérieuses qu’une prophétie … restera pour lui de faire le choix de continuer à foncer tête baissée ou profiter ce son nouvel avantage sur eux.

« Que souhaitez-vous faire Faëlis. Voulez-vous rejoindre le Palais, ou voulez-vous partir à la recherche d’une piste à leur campement. »

Il prend le temps de réfléchir et secoue la tête avant de parler. Selon lui, il n’y aura rien à gagner à retrouver un campement désert. Ayant compris maintenant à qui il avait à faire, il sait qu’il n’y aura aucune information. Le mieux est de continuer et rejoindre le palais où il espère pouvoir donner une sépulture décente à son sauveur.

« Nous y serons avant la nuit. » Dis-je comme une promesse.

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Hatsu Ôkami
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Re: Le Défilé Aisunîdoru - Est Ynorien

Message par Hatsu Ôkami » sam. 12 oct. 2019 00:56

La vallée qui s’étendait devant les yeux de la jeune femme semblait être infinie, mais elle savait parfaitement que ce n’était qu’une illusion. Elle s’engagea sur l’étroit et tortueux sentier qui serpentait sur le versant d’une des montagnes. L’air ici y était plus frais, créant de petits nuages de vapeur devant sa bouche et elle se félicita d’avoir prévu de quoi lutter contre le froid. Le vent, pourtant léger, était glacial et semblait apporter le froid des pics qui surplombaient la jeune femme. Elle en observa un tout en avançant, admirant les neiges éternelles, le reflet du soleil qui les faisait scintiller et les rares nuages qui semblaient servir de couronne aux pointes les plus hautes. Les mains cachées dans ces gants, au chaud, elle avançait, peinait quelque peu par moment, sur le sentier qui grimpait toujours plus haut. Un petit pont de bois passait au-dessus d’un torrent et elle en profita pour remplir son outre, buvant une rasade d’eau si froide qu’elle frissonna, se sentant néanmoins revigorée. Parfois, le cri d’un animal ou d’un rapace brisait l’étrange quiétude qui semblait être la norme dans cet endroit, attirant le regard de la jeune femme qui, pourtant, ne s’arrêtait pas, continuait d’avancer. Le sentier se divisa soudainement, l’un montant vers les pics, l’autre serpentant en pente douce dans la vallée. Elle choisit le second, son but étant de traverser la zone, pas de grimper au sommet des pics.

De temps à autres, elle croisait un humain, berger menant son troupeau, bûcheron s’en allant récupérer de quoi tenir l’hiver ou pêcheur se dirigeant vers l’un des nombreux torrents regorgeant visiblement de poissons d’eau douce. Chaque rencontre se soldait par un large sourire de l’habitant et quelques mises en garde contre les divers dangers de la région. Nombreuses étaient les créatures à vivre ici, de même que les hors-la-loi, bien qu’ils préféraient apparemment la sécurité des forêts plus en hauteur, loin des éventuelles patrouilles ynoriennes ou kendrannes. Hatsu tint compte de toutes ces informations, mais refusa de s’imposer malgré leur insistance. Elle voyageait et ne voulait pas perdre de temps, même quelques heures. Les nuits étaient bien sûr froides, mais elle le supportait relativement bien, sa tente la protégeant du vent qui était le plus susceptible de la frigorifier. Elle avait appris à gérer la monotonie du voyage, réfléchissant au but de sa quête en se demandant comment elle allait bien pouvoir trouver un tel objet. Elle posait des questions aux habitants, discrètement, mais n’appris hélas pas grand-chose, les incursions garzok n’étant pas fréquentes et rarement composées de beaucoup plus qu’une vingtaine, tout au plus. Elle se résigna à marcher jusqu’au territoire de Luminion et se hâta un peu plus, se déplaçant à un rythme soutenu qui avait également l’avantage de la réchauffer.

En début d’après-midi, alors que le soleil dardait ses rayons sur la vallée, elle gravissait un petit sentier lorsqu’elle tomba sur une créature visiblement en plein repas. Elle se figea aussitôt et son arc rejoignit sa main en moins d’une seconde, une flèche prête dans l’autre. Entendant du bruit, l’immense créature poilue et entièrement blanche la fixa de son unique œil et grogna avant de claquer des dents à plusieurs reprises. Hatsu comprit très vite qu’il souhaitait l’intimider. Il était en plein repas et ne comptait pas partager avec qui que ce soit. Elle fouilla dans sa mémoire sans lâcher la créature des yeux. Poils blanc, griffes acérées au bout de long bras puissants, une gueule emplie de crocs d’où suintait le sang de sa victime. Ce fut l’œil qui lui apprit ce qu’était la créature.

(Un Flérustre….)

(Proie !)

(Du calme Loup, ils sont particulièrement agressifs si on les dérange. Je vais plutôt l’éviter.)

(Chasseresse doit chasser !)

(Je ne vais pas…)

Un hurlement du flérustre la coupa dans sa discussion avec Loup et l’obligea à reporter son attention sur lui. Il commençait à taper le sol devant lui, à sautiller tout en continuant de claquer des dents, se frappant parfois la poitrine avant de hurler à nouveau, faisant grimacer Hatsu.

(Il va attirer d’autres créatures…)

Comme pour lui répondre avec ironie, un cri étrange lui répondit, au-dessus d’elle. Elle vit un étrange oiseau au long bec pointu, curieusement humanoïde. Mais elle n’eut pas le temps de le détailler car le flérustre lui fonça soudainement dessus, précédant sa charge d’un lancer de cailloux qui heurta la jeune femme à la jambe. Celle-ci, jurant, recula sous la douleur tout en encochant une flèche. Le trait fila droit vers le monstre, se plantant dans son torse sans, semblait-il, lui faire d’autre effet que l’enrager d’avantage. Il asséna un violent coup de patte que la jeune femme évita d’une roulade, décochant un nouveau trait en riposte, qui ne fit qu’effleurer la bête qui rugit de nouveau. Elle jeta un rapide coup d’œil aux alentours et se mit à courir, malgré sa jambe blessée, vers un rocher, la bête sur ses talons. Plus rapide, elle allait la rattraper, lorsque la jeune femme changea brutalement de direction, partant soudainement sur la droite. Du coin de l’œil, elle vit le fléruste glisser sur le terrain rocailleux avant de se remettre à la poursuivre. Hatsu dévala la pente, donnant à sa course des allures de chute contrôlée plutôt qu’une vraie descente. A moins d’un mètre du sentier en contrebas, son pied heurta un caillou et sa jambe blessée la lâcha. Elle dévala le dernier mètre en tombant, touchant violemment le sol à son arrivée en grognant de douleur. Sonnée, elle mit de précieuses secondes à se relever avant de constater que le flérustre, pas plus à l’aise qu’elle, avait également chuté et s’était écroulé à quelques mètres. Se relevant aussi vite qu’elle le pouvait, elle encocha une nouvelle flèche et visa soigneusement.

Elle n’avait jamais vu, Rana soit louée, ce genre de créature avant, mais les lectures qu’elle avait pu trouver sur eux étaient intéressantes et, bien qu’aucun spécimen mort ou vivant n’ait pu attester son hypothèse, elle était certaine que leur œil était leur point faible. Elle se concentra, cessa de respirer. Elle avait toute les zones en têtes. Le foie, les poumons, le cœur, toutes ces zones qui assurerait une mort de la créature qui voulait sa peau. Elle lâcha sa flèche qui sembla partir au ralentit avant de violemment heurter le flérustre en pleine course, le faisant chuter lourdement sur le sol. Hatsu reprit sa respiration. Elle avait hésité une fraction de seconde et avait finalement visé le foie, de peur de rater l'oeil. Le flérustre, quant à lui, rugissait de douleur en se relevant, le trait profondément fiché dans son flanc, perforant probablement un organe vital au vu du sang qui macula rapidement sa fourrure, mais la jeune femme pesta en comprenant que le tir, pourtant précis, ne serait pas suffisant. Elle avait bien visé, mais le tir ne serait pas mortel, manquant de puissance. Le flérustre hurla et tenta de foncer de nouveau sur Hatsu, avant de finalement s’écrouler suite à un nouveau trait qui se planta dans son torse, le poumon probablement touché cette fois au vu de sa respiration qui devint difficile. Hatsu savait qu’il était condamné et, après une longue expiration, ficha une dernière flèche dans la créature, lui transperçant la gorge pour abréger ses souffrances. Elle lut la douleur dans l’œil unique de la bête avant que la vie se s’échappe et que l’œil ne devienne terne. Elle attendit d’être sûr que le monstre soit mort avant de s‘approcher en boitant. Elle récupéra délicatement les flèches qu’elle avait planté dans le monstre, faisant le deuil de celle qu’elle avait raté et se hâta de quitter les lieux. Un cadavre allait attirer les charognards et elle n’avait guère envie de traîner dans les parages lorsqu’ils arriveraient, malgré l'envie d'étudier la dépouille. Au-dessus d’elle, comme pour lui donner raison, l’oiseau à l’étrange cri morbide tournoyait, appelant ses congénères à festoyer.

***
(((HRp suite de l'apprentissage de la cc "Tir Critique")))
Hatsu Ôkami, Chasseuse Ynorienne
Première Née des Ôkami
Réceptacle de l'esprit de Loup
Image
Armoiries des Ôkami:
l'Or pour la fortune, le Loup pour la noblesse d'âme et la flèche pour le passé guerrier.

Byrnisson
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Re: Le Défilé Aisunîdoru - Est Ynorien

Message par Byrnisson » jeu. 14 janv. 2021 23:45

Partie III - En guerre


Chapitre I - La tête dans les nuages, les pieds dans l'eau - [Précédent chapitre ici ]

Voilà une semaine que nous marchons inlassablement parmi les sommets de ce monde. Notre route est une succession de pistes rocailleuses, parfois enneigées, de cols, de pics et de vallées. Loin d’être monotone, ce parcours me mène de découvertes en découvertes. Habitué, depuis mon plus jeune âge, aux contours familiers des pics bordant le duché de Luminion, je découvre chaque jour de nouveaux reliefs, plus exquis les uns que les autres. Là-haut, le contour harmonieux d’une cime enneigée, plus bas, la silhouette galbée d’une vallée encaissée, et toujours, m’encadrant de gauche et de droite, les visages familiers de Bernas et Tessy.

Jusqu’ici Bernas et moi ne nous étions que peu côtoyés. Cette marche prolongée est l’occasion pour chacun de se dévoiler un peu. Jamais très précis sur son passé, ni sur les raisons qui l'ont poussé à entrer dans l'armée, Bernas relate parfois quelques anecdotes de son ancienne vie. Il m’explique avoir longtemps officié en tant que marin sur divers navires, omettant toujours de me préciser sous quels pavillons. Il prend plaisir à me relater ses aventures les plus cocasses et ses plus éminentes conquêtes. Sur ce dernier point, son récit se meut souvent en avalanche de détails qu’il assène à coup de jargon obscène. Amusé, mais gêné, du fait de mon inexpérience dans ce domaine, je ne peux m’empêcher de rougir lorsqu’il se lance dans de tels développements. Je ris alors nerveusement, fais écho aux sourires lubriques de Bernas et jette des regards frénétiques à Tessy pour vérifier qu’elle ne suit pas nos discussions.

En façade, cette dernière affiche toujours un désintérêt total pour toute palabre dans laquelle je suis inclus. En façade seulement ; car au fil de notre excursion, il me semble parfois déceler un sourire ou une moue approbatrice lorsque je parviens à lui jeter un coup d’œil suffisamment discret. Mon cœur fait alors un bon, je repense, nostalgique, à notre amitié passée, et j’entrevois une chance de renouer un jour ces liens.

D’autres recrues de notre promotion sont présentes et viennent parfois converser avec nous, le temps d’un repas, ou d’une partie de dés. Mes relations avec elles sont des plus cordiales, d’autant plus maintenant que Bernas et moi avons noué quelques affinités. Je profite de certains de ces moments pour m’éclipser et m’exercer au fonctionnement de mes « charmes ». Je m’assois à l’écart, sur le sol, et je me concentre pour activer l’énergie qui m’habite. L’exercice est plus aisé une fois la nuit tombée, comme si l’énergie cherchait à s’échapper de mon enveloppe, à se précipiter en dehors pour combler l’obscurité de ses rayons puissants. Suivant les conseils de Jaret, je m’exerce à la contenir et à la commander. Au fur et à mesure de mes exercices, je parviens à la diffuser dans mon corps tout entier. L’énergie se loge ensuite en surface de ma peau, créant une sorte d’aura éblouissante. Un jour, intrigué par mes cachotteries, Bernas assista en douce à l’un de mes entraînements ce qui me valut le surnom de « Luciole ». À mon grand désarroi, l’onctueux visage de Tessy s’endurcit, à mesure que l’utilisation de ce sobriquet se répand parmi nos camarades.

Après l’ascension, nous longeons des massifs vertigineux dont nous n’apercevons que rarement les sommets. Une épaisse couche de nuage coagule sur les pics déchiquetés, qui semblent culminer à une altitude parfois double de la nôtre. La route, bien qu’enneigée par endroits, reste praticable et nous progressons à bonne allure. Elle finit par décliner, pour se déverser dans un long défilé. L’amorce de cette descente revigore notre cohorte. Dans quelques jours à peine, nous atteindrons le Val d’abondance. Tous trépignent, bien que certains d’entre nous aillent au-devant d’un destin funeste. J’espère bien compter parmi ceux qui fouleront cette route au retour, titubant sous le poids de la gloire qui plus est.

[La suite par ici]

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