Les Bouges

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Capitaine Hart
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Re: Les Bouges

Message par Capitaine Hart » sam. 26 avr. 2025 01:12

Alors que nous nous approchions furtivement des lumières, nous avons pu entendre au loin que ces ruelles n’étaient pas moins lugubres que l’entrée des Bouges. De temps en temps, les échos d’un hurlement lointain parvenaient à nous oreilles, ainsi que les bruits à peine perceptibles de chaînes qui n’étaient pas les nôtres. Notre chemin s’est arrêté au pied d’un bâtiment inconnu. Au-dessus de nos têtes, les porteurs de torches échangeaient des murmures.

En essayant de les déchiffrer, nous avons vite compris qu’une troupe s’approchait de nous, et elle était forte en métal. Ce que j’avais d’abord pris pour une patrouille du Soleil Noir avait une apparence plus lugubre, un régiment de guerriers aux armures d’ébènes et aux casques cornus, avec à leur tête une femme jeune d’apparence.

Elle nous toisait de ses yeux découverts, le visage impassible. Sa voix était empreinte d’un calme singulier, celui d’une personne qui avait une totale confiance en ses talents martiaux.

« Que voilà de curieux personnages. Nouveaux venus ? »
« Oh, en vrai, on est juste de passage. »

Je faisais mine désinvolte, mais j’étais peu rassuré par le silence spartiate de ses camarades, qui devaient être plus d’une trentaine, difficile à dire dans la pénombre, bien que certains d’entre eux nous éclairaient de leurs lanternes.

« … Jolis casques. »
« Merci. De passage. Comme nous tous, j’imagine. »
« Pouvez-vous nous expliquer ce qui se passe, ici ? »
« Il se passe que vous avez croisé une bande de maraudeurs noirs dans une ruelle des Bouges. Vous êtes nouveaux, je ne vous tiens pas rigueur de votre ignorance. »
« Vous n’semblez guère surpris de voir de nouvelles têtes. J’imagine que c’est monnaie courante ici ? »
« Il arrive souvent de nouveaux gredins de là-haut. Mais peu ont votre tête. Vous vous êtes pris une porte incendiée dans la figure, pour être à ce point disgracieux ? »
« Plusieurs portes incendiées en fait. Et des poutres aussi. Longue histoire. Mais vous vous d’vez voir passer de sacrés cas pour être aussi brute de décoffrage. Voyez l’bon coté des choses: on est pas des gredins, ça vous chang’ra d'vos visiteurs habituels. »

Elle ne semblait pas tenir rigueur de la familiarité de Dracaena. Son approche franche avait l’air de lui plaire.

« Je vais vous expliquer brièvement la chance que vous avez eue de tomber sur nous : contrairement à d'autres clans à l’intellect réduit, ou à des solos cinglés, nous avons une manière toute à nous d’aborder les récents arrivants. Ainsi, nous vous proposons plusieurs options dont certaines, je n’en doute pas, saurons vous convaincre. Un, vous avez une envie d’aventures et de solidarité, de batailles vaillantes et de fraternité. Vous pouvez alors songer à nous rejoindre. Nous saurons vous accueillir au mieux. Deux, vous êtes fragiles et pleutres, mais futés. Nous pouvons vous proposer notre protection au sein des Bouges, contre paiements divers et variés en fonction de vos qualités et ou possessions. Trois, vous êtes stupides et refusez tout accord avec nous. Je vous laisse deviner les conséquences d’un tel choix. »

J’ai regardé Leyna, puis bombé le torse devant la recruteuse.

« Ha, je dois bien avouer que je suis titillé par la première option ! »
« La bataille et la fraternité sont des choses que nous connaissons bien. »
« Si j'ai bien compris, plusieurs clans se disputent les Bouges, et vous êtes l’un d'entre eux. J'aimerais en savoir plus sur le vôtre. Qui prend les décisions, qu’est-ce qui vous différencie du reste, et quels genre de paiements vous demandez à vos protégés. »
« Oh, des nouvelles recrues potentielles ! Merveilleux. »

Son ton n’avait pas le même entrain, il frisait même le sarcasme. Et il me semblait de mise. Nous étions en train de nous faire ramasser par une bande locale à la recherche de nouveaux troufions. Leurs armures avaient l’air trop propres, et pourtant un terrible affrontement semblait s’être déroulé ici récemment. Je n’aurais pas été surpris d’apprendre qu’ils avaient envoyé leur « nouvelles recrues » en première ligne pour ne pas se fatiguer.

« Comme je le disais, nous sommes les Maraudeurs Noirs. Des éléments triés sur le volet qui possédons le meilleur équipement offensif et défensif des Bouges - si l’on exclut les chevaliers du Soleil Noir. Nous suivons les préceptes de notre guide, Dame Evanie la Sombre. Nous sommes une force guerrière notable et œuvrons en qualité de mercenaires contre des paiements en or ou en services. Ou tout autre ressource qui pourrait nous intéresser. »
« Passons pas par quat’ chemins : on bosse pour vous, et vous nous offrez gîte et couvert si j’comprends bien ? Z’avez du terreau et d’la flotte dans vot’ territoire ? »

Son regard glacial s’est attardé sur l’oudio. Ce n’était pas son ton qui semblait lui déplaire, mais sa manière de poser des questions sans tergiverser. Elle devait être habituée à ce qu’on avale son pamphlet sans oser la questionner.

« Si vous nous rejoignez, vous aurez la protection du Clan pour vous, et un endroit où vivre en sécurité ici-bas. Pour ce qui est du couvert... il faut gagner sa croûte. La nourriture est chose rare, ici. Seuls les plus vaillants combattants en sont dignes. Nous n’avons aucun... terreau ? Mais l’eau ne vous manquera pas. »

Ils devaient avoir établi leur camp près d’une source pour qu’elle puisse affirmer ceci avec une telle confiance dans les Bouges.

« Avons-nous un accord ? Vous souhaitez bien nous rejoindre ? Suivez-nous alors, et nous vous mènerons vers notre camp actuel. »
« Nous n'avons pas peur de nous battre, alors avec votre permission, capitaine, je pense accepter leur proposition. Cela devrait nous aider à comprendre ce qui se passe ici... »

Comme s’ils nous laissaient le choix. Travailler pour eux, accepter de se mettre sous leur influence, ou subir leur courroux. C’était un ultimatum digne des groupes criminels qui sévissent à Exech. Ils comptaient nous utiliser d’une manière ou d’une autre, et j’espérais fort que notre viande ne serait pas sur le menu. Cela dit, c’était peut-être la ressemblance avec les brutes des bas-fonds qui me rassurait. Leur méthodes sont cruelles, mais prévisibles.

En soi, leur offre n’était pas un simple piège, juste un accord dont le sens se révélerait au fur et à mesure, sans doute en notre défaveur, mais la possibilité de gravir les échelons dans leur organisation n’était pas à exclure. Mais pour gagner la confiance d’un tel groupe, nous allions sans doute devoir jouer les toutous pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, et je n’en avais pas la patience. Il allait falloir s’entretenir directement avec cette Evanie.

« Les Maraudeurs Noirs, ça a l’air chouette... Mais je suis un peu déçu, je dois dire. »

J’ai fait la moue devant la femme aux cheveux noirs.

« Raaah, quel dommage. Avec ta dégaine, j’aurais parié que c’était toi, la cheffe… Si ça avait été le cas, j’aurais déjà mon casque à cornes pour marauder dans le noir comme vous semblez aimer le faire, mais il faut plus qu’une jolie recruteuse pour m’avoir de son côté. »

Avant qu’elle ne puisse s’indigner, j’ai levé un doigt avec grand sourire.

« Cela dit ! Je pense que c’est vous qui avez de la chance ! Si votre cheffe répond à mes questions avec au moins la moitié de votre charisme, vous ne trouverez nulle part un meilleur allié. Laissez-moi la rencontrer dans votre camp ! Vous comprendrez pourquoi le capitaine Hart n’a pas l’habitude de choisir la première option, ni la seconde, ni la troisième. Il trouve toujours la quatrième. »

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Dracaena Paletuv
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Re: Les Bouges

Message par Dracaena Paletuv » sam. 26 avr. 2025 03:11

Post squelette:

-Drac réponds aux remarques et questions de la mystérieuse femme.
-Après sa proposition, il laisse parler Sirius et Leyna, puis ajoute:
"J'doute pas qu'vous savez utiliser vot' lame m'dame, z'inquietez pas, j'ai pas l'intention d'vous chercher des noises. La protec'tion d'vot' clan m'intéresse, et z'allez m'apprécier si la bouffe s'fait rare ici: j'suis pas difficile, me faut juste des choses très basiques. Mes compagnons et moi on est plus qu'efficace dans plein d'domaine, malgré les apparences.

Votre offre m'intéresse."

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Cromax
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Re: Les Bouges

Message par Cromax » sam. 26 avr. 2025 13:54

La Cité des Ombres



Les Bouges



Jour 2 – Mi-journée.




La cheffe de raid des maraudeurs noirs opina sentencieusement du chef aux dires des trois nouvelles recrues potentielles de son clan. Elle se permit tout de même de répondre à Hart, avec ce flegme qu’ils lui connaissaient désormais :

“Je vais vous mener à elle. Faites attention, cependant, qu’elle ne trouve une cinquième solution en rejetant votre quatrième. Cela me briserait le cœur.”

L’ironie perçait encore dans sa voix. Elle fit un geste de la main et sa troupe fit volte-face alors qu’elle entreprit de la remonter en passant au milieu.

“Suivez-moi. Et ne tentez rien de stupide.”

La troupe avança au même rythme que le trio coloré, les encadrant alors qu’ils marchaient derrière la “recruteuse”, comme ils l’avaient appelée. En partant, Leyna et Drac aperçurent subrepticement un visage penché vers la ruelle où ils se trouvaient, depuis les hauteurs des toits. Apparemment, leur discussion avait été épiée par ceux qu’ils auraient aimé rejoindre dans un premier temps.

Ils furent menés à travers des ruelles sombres et tortueuses, véritable labyrinthe de passages ressemblant parfois à de hautes habitations sans portes ni fenêtres au sein de grottes larges, parfois à des couloirs directement creusés dans la roche sombre de l’endroit. Ils atteignirent une cave plus grande et vaste, où se dressaient une trentaine de tentes montées militairement en cercles concentriques, entrées tournées vers un grand feu central. Des tentes simples, sans fioriture. Spartiates, même. Pratiques avant toute chose. Ce camp pouvait être démonté en très peu de temps, et remonté ailleurs tout aussi vite. Des nomades, sans aucun doute.


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L’endroit était peuplé, mais le silence pesant. Ça n’avait rien à voir avec la vigueur d’un camp militaire sur Yuimen. Ici, les mines étaient graves, les regards tournés avec méfiance vers les nouveaux arrivants. Avec une curiosité pesante. Une couleur prédominait les habits de tous : le noir. Armures de cuir, de métal ou habits amples de tissus, aucune couleur ne marquait le style de ces gens. Ils avaient tous l’air de combattants aguerris, fendus à l’art de la guerre. Des cicatrices en témoignaient. Arrivés au centre du cercle de tentes, ils furent présentés à l’entrée d’une tente plus ornée que les autres. Pas plus grande, mais arborant de lourdes décorations macabres en argent sombre. L’entrée était gardée par un colosse chauve à la peau pâle et marquée de stigmates inquiétants.


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La meneuse d’hommes s’approcha de lui et affirma :

“Il veut parler à la Dame.”

L’homme tourna un regard noir et vide de toute humanité vers Hart, lui cédant le passage. À lui seul. Il put pénétrer la tente sombre, faiblement éclairée d’une lueur pâle. Au bout de celle-ci, une femme, seule, assise en tailleur. Sa peau était grise, ses yeux teintés de larmes noires, et de longs cheveux blancs dégoulinaient d’une coiffe de tissu noir et d’argent jusqu’à une robe décolletée aussi suggestive que funèbre. Elle gardait les yeux fermés, silencieuse, comme si elle laissait au pirate le soin de commencer les pourparlers. Ou comme si sa présence l’insignifiait au plus haut point.

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À l’extérieur de la tente, leur guide licencia ses hommes, qui s’éparpillèrent dans le camp. Elle précisa à Leyna et Drac :

“Si vous voulez une tente, allez demander à Dragh, notre intendant.”

Elle pointa la silhouette d’un homme sombrement vêtu se tenant non loin, à côté du feu de camp.


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Elle reprit sans attendre.

“Sinon, vous pouvez rencontrer des gens dans le camp. Chercher une compagnie ou une mission pour faire vos preuves. Si vraiment vous ne trouvez rien... venez me voir moi. Je vous indiquerai qui aller voir.”

Et elle alla se poster non loin de la tente de leur mystérieuse dirigeante, laissant à l’elfe et à l’oudio le soin de choisir leur voie.



______________________________



Huyïn avait choisi d’espionner le duo, sans les suivre cependant lorsqu’ils retournèrent vers Xël et les deux dames. S’enfuyant vers ses propres horizons, il se reperdit dans le dédale de couloirs sombres aux murs pulsant d’une lueur rougeâtre. Ses pas le menèrent jusqu’à une place étrange, à l’apparence sans nul autre pareil. Circulaire, cernée d’arches de pierre. Des veines internes au roc luisaient d’un rouge intense, semblant provenir d’un énorme cristal écarlate posé en hauteur. Sa vision seule donna mal au crâne au félin.


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Au centre se trouvait un chevalier à l’armure intégralement rouge, arborant une épée ensanglantée à la main. Il était debout dans une flaque de sang, qu’il semblait manipuler à l’envi, le faisant tournoyer de sa main libre autour de lui. Un gardien ? Il ne semblait pas avoir vu Huyïn. Pas encore, du moins.
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Ezak et la sorcière étaient revenus vers Xël et ses deux compagnes. Les regards croisés d’Ezra et de Blanche semblaient dégouliner d’une haine mutuelle intense. La muette, elle, entendant les mots d’Ezak, opina du chef et se mit en mouvement subitement, comme sortie d’une transe silencieuse. Elle continua de leur montrer la voie.

Après de nouveaux détours, ils arrivèrent dans des quartiers surprenants. Les murs étaient entièrement rouges et humides, ce qui leur donnait un aspect ensanglanté inquiétant. À ceux-ci étaient suspendus, de plus en plus nombreux à mesure qu’ils avançaient, des masques rieurs qu’on eut dit fait d’os. Des masques aux sourires crispés, effrayants. Au regard vide et noir.


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Lyrie les mena à travers ce décor inquiétant sans sembler s’y attarder. Ils ne tardèrent pas à rejoindre une porte, gardée par une étrange personne. Une femme (?) totalement chauve, vêtue de carmin, encapuchonnée. Son visage hâve était marqué du même sourire crispé, forcé à l’excès, que les masques qu’ils avaient croisés.


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Son regard était humain cependant, et elle s’adressa aux arrivants :

“Bienvenue dans le Quartier Rouge. Qu’est-ce que le Clan Carmin peut faire pour vous être agréable ?”

Un premier contact plutôt positif, donc. Bien qu’étrange. Ezra semblait trop retournée par l’aspect des lieux pour parler. Blanche, elle, se contenta de sourire d’un air mauvais en regardant les réactions des deux mâles du groupe. Lyrie, forcément, ne dit mot.



____________________________



Mathis, après une marche plutôt longue, parvint à son objectif en compagnie du Chevalier Thyers. Une vaste bâtisse cernée d’une foule ivre. L’intérieur se confondait avec l’extérieur, l’ambiance rappelait la folie, la débauche. Les ébats envahissaient l’univers sonore et visuel. Publics ou privés, les danseuses et prostituées se tortillaient contre des client(e)s nombreux et serrés. Ça avait beau être grand, on eut dit que l’endroit dégueulait de monde. L’obscurité était percée de lueurs de couleurs différentes et nombreuses, qui éclairaient çà et là des scènes de stupre, des filles dénudées, des alcôves vides, des sourires hagards et des regards enivrés. L’air était saturé de musc, de lascivité, de moiteur. Aussi écœurant que désirable, aussi repoussant qu’irrémédiablement attirant.

C’était le bordel. Dans tous les sens du terme. Thyers frappa l’épaule de Mathis.

“J’te laisse là, le bagnard. J’rentre pas là-dedans.”

Mathis devrait se débrouiller comme un grand. Qu’était-il venu chercher là, déjà ? Ça allait être compliqué de retrouver une personne ici.



_____________________________



Akihito s’était posté en bordure de la zone contrôlée par le Soleil Noir. Peu après qu’il se soit installé, et sans nouvelle de Khalor, l’être qui ressemblait à un shaakt qu’il avait croisé en compagnie de Médalie et de Laédia se pointa dans son dos, soufflant :

“Partez tant que vous le pouvez. Ils interrogent Laédia aussi. Khalor Somnis ne sortia pas de sitôt : c’est dans les geôles qu’ils l’interrogent. Qu’importent vos crimes, ils ne méritent pas ce qui vous attend ici si vous les laisser vous prendre. Fuyez. Fuyez loin, et priez la lumière qu’on ne vous retrouve pas.”





[HJ : Hart : on peut aparter dans ton sujet discord. Leyna et Drac, indiquez moi (par mp ou sur le blabla) ce que vous comptez faire. À deux ou chacun de votre côté. On pourra ensuite ouvrir ou non un chan discord. Huyïn : soit tu vas lui parler, auquel cas aparté, soit tu tentes autre chose (fuite, attaque surprise, etc.) auquel cas tu l’indiques dans ton RP. Xël et Ezak, on peut régler la rencontre dans une partie discord commune. Mathis, je te laisse réaliser une action dans ton post. SI tu veux parler à Thyers, go sur le chan RP discord. Aki, je te laisse toi aussi choisir : action dans ton post ou discutaille avec le noir via ton sujet discord.

[XP :
Mathis : 0,5 (papote), 0,5 (voyage vers les putes)
Xël : 0,5 (papote). Début d’apprentissage pris en compte.
Akihito : 0,5 (papote)
Ezak : 0,5 (papote)
Huyïn : 0,5 (espionnage et départ)
Leyna : 0,5 (papote)
Hart : 0,5 (papote)
Drac : noté quand complété.]

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Huyïn
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Re: Les Bouges

Message par Huyïn » jeu. 1 mai 2025 10:00

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-37-


Le Tigre poursuit son exploration de ce quartier rouge, réfléchissant aux dires de la femme en noir tout en gardant les oreilles tournées çà et là, au cas où d'autres auraient la même idée de déambulation que lui. Les lieux commencent à s'ouvrir, prendre un peu de hauteur de plafond et bientôt il découvre une place. Un lieu circulaire, large, bordé d'arches de pierre. Et si le roc est également veiné du coloris des environs, cette fois-ci, il semble provenir d'un cristal présent en hauteur. Quand les yeux vert pâle du Félin se posent dessus, une sensation de pression crânienne se fait. Encore une fois. Et les lieux ne sont pas vides. Au centre du cercle, un chevalier arborant cette même couleur que tout le quartier se tient. Une lourde armure intégrale, une lame possiblement à deux mains couverte de sang et une flaque de ce même liquide à ses pieds. Fait surprenant, une partie de celui-ci tournoie autour de lui, la position de sa main indiquant qu'il s'agit d'une manipulation délibérée. Comment s'y prend-il ? Est-ce lié à une magie d'eau spécialisée ? Ou quelque chose de typiquement ashaari ?

Sagesse issue des rencontres précédentes se heurte à la curiosité qu'il lui inspire. Le Tigre s'avance donc d'un pas pour traverser l'une des arches tout en tendant la main dans son dos, faisant tinter une corde pour signaler sa présence. La réaction est immédiate : le chevalier laisse choir son jouet liquide et tend la main vers lui. Immédiatement, une impression de fièvre saisit le Woran. S'amuse-t-il avec son sang ? Huyïn hésite brièvement entre rapidement reculer pour se mettre possiblement hors d'atteinte et user de son état à son avantage. C'est cette seconde solution qu'il choisit, s'avançant avec aplomb en direction du chevalier sanguin. Peut-être que l'informer qu'il risque de faire plus que de grièvement blesser le Tigre lui fera cesser son petit jeu.

"Attention avec ça. Qui sait quelle zone sera affectée quand sautera la 'bombe' que les carmins ont implanté en moi."

L'individu hausse un doigt, le sang manipulé par ce dernier filant dans la direction du Woran et dessinant un cercle à ses pieds autour de lui. Etrangement, la montée en température de son corps se stabilise. Toujours présente mais moins menaçante. À haute voix, il suggère que c'est une façon de dire un halte-là puis il demande qui il a interrompu. Huyïn comprend rapidement qu'il a affaire à un autre ashaari n'utilisant pas ses mots pour parler, parce que ce dernier secoue la tête puis il les indique l'un après l'autre. Sans doute pour que des présentations se fassent en bonne et due forme. Voilà quelque chose de presque déstabilisant, de ne pas être verbalement agressé ou physiquement menacé d'entrée de jeu par un inconnu. Quoique... Avoir une emprise directe sur son fluide de vie compte-t-il comme une menace implicite ?

Huyïn croise les bras puis en relève un pour se frotter le menton, quelque peu curieux. Il pivote légèrement pour demeurer dans le cercle et laisser apercevoir son instrument -de musique-.

"Mon identité est principalement la sienne, Bois-Carmin. Si c'est là votre question.", annonce-t-il avant de faire face à son muet interlocuteur. "Vous semblez avoir un contrôle fin sur le liquide sanguin. Assez pour écrire un nom ou une façon de vous désigner ?"

L'armure lève un pouce dans un geste... Approbateur ? Puis manipule le sang au sol, écrivant 'Strix'. Si ces dernières heures ont déjà impressionné le Tigre avec toutes les découvertes qu'il y a faites et lui ont appris à quel point ses certitudes étaient limitées, force est de constater qu'il n'en a pas terminé. Il ne peut qu'admirer la précision avec laquelle l'armuré trouve le moyen de lui répondre. D'autant que contrairement à d'autres à l'apparence plus avenante, lui semble enclin à le faire.

"Effectivement. Mes salutations, Sieur ou Chevalier Strix. Vu votre geste précédent, je suppose que votre art est la cause de cette sensation de fièvre.", déclare-t-il en décroisant les bras et en pivotant la main. "Dans quel but ?"

Il opine puis il pointe le cristal d'un doigt. Il rédige ensuite le mot 'attention'. Là, la chose n'est pas exactement claire dans l'esprit du yuiménien. Mais loin d'être frustré par la barrière de cette communication simplifiée, il tente de rester concis dans les idées pour pouvoir rapidement dresser le tableau de la situation. Il tend sa main gauche sur le côté.

"Le cristal est dangereux pour moi et vous m'en protégez...", fait-il avant de tendre la main droite de l'autre côté. "Ou c'est moi qui cause une perturbation pour lui ?"

Le chevalier silencieux hésite puis il lève deux doigts. Interprétation un peu ambiguë en somme. Sa présence aurait-elle éveillé le cristal et il le tient à distance pour protéger ce dernier, ou lui-même de l'influence du minéral ? La chose n'est pas très claire, et la question de savoir si l'objet suspendu est destiné à protéger les lieux donc le considérer comme un intrus ne lui apporte qu'un geste de la main suggérant que ce n'est pas exactement cela. Huyïn propose son matériel d'écriture pour communiquer plus efficacement, mais un signe de tête négatif accueille son offre. Vouloir connaître le rôle du cristal et s'il est la source de ces visibles veines rouges ne lui apporte aucune réponse. Si ce n'est la désignation du chevalier entre lui-même et l'objet en question. Cristal rouge, chevalier rouge. Se pourrait-il...

"Vous êtes lié à ce cristal. Son gardien ou... Son extension peut-être ?"

Une, deux, trois. Trois réponses positives d'un coup. Le Tigre est de plus en plus curieux quant à cette situation. Une myriade de questions lui vient. Ce minéral rouge est-il ici depuis longtemps ? Le chevalier a-t-il été ashaari un jour ou est-il comme une excroissance de l'objet, qui lui sert comme lui-même emploie son luth à ses propres fins ? Est-ce que le flux sanguin dans la roche émane de lui ou au contraire le sustente ? Et ce sang au sol vient-il de récentes victimes ou de volontaires qui s'en sont séparés de leur plein gré ? Il opte pour demander si le cristal a besoin de protection parce qu'il est convoité ou est au contraire une sorte de prisonnier. Réponse négative. Le Tigre a encore bien des choses à demander, mais il retient son envie de tout savoir. Il propose à la place de laisser son interlocuteur lui poser lui-même des questions.

Il fait apparemment bien, parce que le chevalier le désigne puis montre les alentours, le sang au sol formant un 'pourquoi' que le Woran interprète comme de la curiosité quant à ce qui motive sa présence.

"Pourquoi suis-je ici ? Parce que, ironiquement, je ne suis pas d'ici. J'ai eu quelque... Mésaventure avec le clan Carmin, je suis parti à l'opposé de leur terrier dès que j'en ai eu la possibilité. J'ai simplement... Erré."

L'individu porte la main à son menton casqué et lève les bras pour désigner les alentours avant d'écrire 'Carmin' au sol. L'appendice caudal du Tigre fait un bref à-coup. Il incline la tête sur le côté, suspicieux.

"Vous n'êtes pas en train de me dire que j'ai faussé compagnie à ce clan pour simplement pour me retrouver dans une autre de leur propriété, j'espère ?"

Fort heureusement, le chevalier sanguin secoue la main en un geste de négation. Il pousse un soupir peiné, preuve qu'il y a peut-être un corps doté de poumons sous cette carapace carmin, avant d'écrire le mot 'quartier' au sol. Huyïn comprend cela comme de la curiosité quant à sa présence persistante dans la partie des Bouges abritant ceux qu'il ne veut pas approcher, quand il pourrait aller voir ailleurs s'il y est.

"Oh, ce sens là... J'y suis encore parce que je cherche mon partenaire. Nous avons été séparés suite à nos déboires avec le clan. Mais il est habile. Je suis persuadé qu'il a quitté leurs locaux depuis un moment.", répond-il honnêtement. Il inspire et souffle lentement par la truffe, se doutant déjà de la réponse mais tentant néanmoins le coup. "Auriez vous aperçu un elfe blanc, grand, longs cheveux mauves, regard d'or, habits noirs. Possiblement une sacoche semblable à la mienne et le rictus de qui peut se permettre de s'en parer ?"

Comme il s'en doutait, Naral Shaam n'a pas été aperçu par ici non plus. Subitement, les mains du chevalier se mettent à trembler. Le muet individu le désigne du chef puis tend l'une d'elles dans sa direction. Au-dessus, le cristal commence à pulser à une vitesse de plus en plus rapide, comme un cœur qui aurait décidé de s'emballer. Au sol, le sang se met à former le mot 'danger'. Immédiatement sur le qui-vive, Huyïn papillonne des oreilles à la recherche d'un bruit trahissant une approche, son regard lorgnant alentour en quête d'un recoin où se replier. Il demande alors qui est la cible de cette menace et est désigné d'un doigt. L'armure sanguine a une expressivité suffisante pour indiquer sa fébrilité. Le sang au sol coule vers son manipulateur. Un danger pour le yuiménien ? Comment ce minéral peut-il le savoir ? Qui cela peut-il être ? Aurait-il été suivi alors qu'il s'est déplacé de façon totalement aléatoire dans ce dédale carmin ? Impossible, à moins que... Que le liquide ingéré permette à ses geôliers de le pister ? Ce qui ne serait pas spécialement compatible avec la présence d'un chaperon, mais qui sait ?

Il n'a pas le temps de s'enquérir davantage des détails que tout devient rouge. Un rouge uni, comme une chape de couleur lui tombant dessus. Désorienté pour la troisième fois dans des circonstances similaires, Huyïn s'accroupit immédiatement et tente de poser une main au sol pour garder son équilibre, conserver le moindre repère, la plus petite tangibilité. Son souffle accélère, ses oreilles papillonnent, sa queue s'agite avec le retour d'un brin de nervosité. Il se retrouve impuissant et face à l'inconnu, encore. Jamais deux sans trois, finalement. Mais une fois de plus, il ne panique pas vraiment.

Bénéficier de l'immortalité a tendance à faire pas mal relativiser.



-- >
Modifié en dernier par Huyïn le jeu. 8 mai 2025 09:55, modifié 1 fois.

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Mathis
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Re: Les Bouges

Message par Mathis » ven. 2 mai 2025 18:36

Notre marche vers le bordel fut paisible et sans aucun incident ou mauvaise rencontre. La présence du chevalier Thyers à mes côtés y était sûrement pour quelque chose. Les résidents de ces quartiers devaient le connaître ou du moins par réputation. Ne sachant pas ce que j’allais trouver, je pris soin d’être attentif au chemin emprunté, si jamais j'avais à retourner en arrière, malgré le mauvais accueil que j’y avais eu.

Nous arrivâmes enfin au bordel, une grande bâtisse cerclée de gens amochés par l’alcool et peut-être bien autre chose, apparenté de près ou de loin au Thiir d’Aliaénon. L’ambiance qui y régnait n’était pas de tout repos. Tous mes sens étaient agressés. Le bruit des gens ivres, de ceux qui copulaient sans pudeur, des autres qui criaient à gorges déployées confondant leur cri à un chant que leur ivresse croyait mélodieux. Ma vue n’était pas en reste. Des corps à moitié ou complètement nus qui tentaient de s’unir avec plus ou moins de violence. Des femmes qui dansaient lascivement autour de clients aux yeux exorbités dans le but bien arrêtés de leur extirper quelques biens. Même si je pouvais détourner mon regard de cette piteuse scène, il m’était difficile d’ignorer les odeurs malsaines qui parvenaient à mes narines et qui me provoquaient des maux de cœurs intermittents.

Un coup sur mon épaule m’extirpa de mes réflexions, il s’agissait de Thyers qui m’annonça qu’il avait rempli sa part du marché et qu’il retournait au Bastion. Il semblait aussi dégoûté que moi et n’avait pas l’intention d’entrer dans cet endroit insalubre.

Après avoir jeté un regard autour, je m’adressai à Thyers

"Pouvez-vous me nommer quelqu'un à qui je peux m'adresser, quelqu'un qui saura répondre à mes questions, pour trouver ce que je cherche ? "

Affichant un sourire mauvais il me répondit:

"Ca dépend c'que tu cherches, mon vieux. T'es plutôt minettes ou minots ? Des blondes, des rousses ? Du plus original ? T'façon y'a rien de mieux que d'aller voir par toi-même."

Évidemment, il n’avait pas compris mes intentions.

"Je ne cherche pas une pute...Je devais retrouver des gens ici "

Vraisemblablement, il ne pouvait m’aider davantage.

"Hé, si tu me dis pas qui, je peux pas t'aider ! De toute façon, tu ferais mieux d'aller voir par toi-meme. Je vais pas trainer longtemps dans le coin."

Je décidai donc de le remercier, lui expliquant tout de même la raison de ma question.

" Je te remercie de m'y avoir reconduit. Je croyais que tu connaissais le tenancier de ce bordel, mais ca va je vais me débrouiller "

Il me répondit alors agressivement, me précisant que je l’avais, une fois de plus, tutoyé et que c’était une fois de trop.

"Recroise plus jamais ma route. Ça a été le tutoiement de trop. T'es définitivement pas fait pour les bouges, la bleusaille."

Je n’ajoutai pas un mot. Je n’avais pas à me justifier. Mon tutoiement avait été involontaire de ma part, j’avais sans doute tutoyé par réflexe au tutoiement de mon interlocuteur à mon endroit.

Heureusement, lorsque j’avais rencontré Ahikito avant mon jugement, ce dernier m’avait précisé la raison de cette venue au bordel. Il s’agissait du lieu de rencontre que certains autres yuimeniens, notamment Xël et Yliria, avaient convenus. Il me restait à les trouver, supposant que je n’étais pas le premier arrivé.

Je jetai d’abord un regard circulaire autour, puis je décidai de rentrer dans l’établissement, cherchant du regard, Xël, Yliria, ou un des autres yuimeniens ou non, rencontrés à mon arrivée dans ce monde.

((( Mathis observe bien les rues empruntés pour se rendre au bordel à partir du Bastion.
Mathis rentre dans le bordel et cherche du regard des visages familiers. )))

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Leyna
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Re: Les Bouges

Message par Leyna » ven. 2 mai 2025 21:43

Le capitaine demande à rencontrer leur chef afin d'en apprendre plus. Leur interlocutrice accepta alors de les conduire vers son camp. Il s'agissait d'un camp d'aspect très militaire, nomade, et manifestement peuplé de bon nombre de rudes combattants. Assurément, il valait sans doute mieux avoir ces gens avec soit que contre soit... Encore qu'il restait à comprendre le pourquoi dans un monde où nul ne pouvait mourir.

Hart devait rencontrer la chef, Leyna et Drac décidèrent de suivre les conseils pour aller explorer le camp. Ils n'avaient pas encore de logement, mais pour l'instant, mieux valait peut-être essayer de faire connaissance. Leyna adressa un signe de tête à l'oudio et parti à la recherche d'un point d'intérêt. Un groupe particulier, quelqu'un qui aurait besoin d'aide... ou simplement des gens discutant autour d'un feu. Tout ce qui pourrait lui permettre d'en apprendre plus sur ces gens, et d'essayer de se faire bien voir.

(((recherche des gens participant à une activité à laquelle elle pourrait se joindre, un repas, la préparation d'une expédition future...)))

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Dracaena Paletuv
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Re: Les Bouges

Message par Dracaena Paletuv » sam. 3 mai 2025 01:47

Bon ben, ce camp était presque aussi moche que ce à quoi j'm'attendais: ça r'semblait aux camps d'bandits que je croisais un peu trop souvent dans ma jeunesse, mais avec une once de désespoir différente de l'habituelle.
Sirius, qui n'avait pas pu s'empêcher de risquer un coup d'bluff, était visiblement parti pour un tête à tête avec la grande chef locale. Avec un peu d'bol, il arriv'rait à s'la mettre dans la poche. Qui sait? C'était ptet son genre les mecs mi géniaux mi crétin qui proposait des pratiques chelou sur l'corps des autres...

En tout cas, moi, j'me retrouvais coincé avec Leyna, la bleuté qui avait un peu trop le nom d'Mourra à la bouche à mon gout. Je connaissais son panthéon aussi bien qu'ceux des autres dieux, et j'en tirais la même conclusion: c'était une déesse, et comme toutes les déesses, on pouvait pas lui faire confiance. N'était pas Sans-visage qui voulait.

Mais la Leyna, par contre, m'avait aidé sans être obligée, donc, toute décérébrée qu'elle était, elle avait ma sympathie. Ayant un peu peur de la voir démarrer sur un discours de quatre heures à propos d'la grandeur de sa déesse, j'avais limité les conversations avec elle jusque la, me contentant de parler des points qui m's'emblaient important, à commencer par le fait de n'surtout pas quitter le camp pour l'instant: j'en voulais à Sirius encore pour ses propositions outrageuses et son incapacité à dire "désolé, j'ai été un sac de viande stupide", mais le gars avait un certain degré d'compétence, des ressources, m'avait protégé, et même, c'était pas mon genre d'abandonner une personne à qui j'devais la vie dans une situation d'merde: si son entretien avec la marraine du coin s'passait mal, j'irais voler à son secours, bien malgré moi. Et la bleuté semblait du même avis.

Nous nous mirent tous les deux d'accord pour faire le tour du camp pour le moment, à la recherche d'une personne ayant besoin d'aide: autant s'faire bien voir et s'occuper en attendant. Plus, c'était l'occasion de glaner quelques informations...
Avec de la chance, j'aurais quelques indications sur où on atterrit Xël et Akihito... Si les pignouf en armure noire n'avaient pas menti et qu'ils trainaient bien dans les Bouges, ces deux la...



[Drac suis Leyna en observant le camp, tendant l'oreille pour chopper des infos, et à la recherche de gens ayant besoin d'aide pour quelque chose. Son attention s'attarde particulièrement sur les gens ayant l'air de transporter des choses.]

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Ezak
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Re: Les Bouges

Message par Ezak » sam. 3 mai 2025 04:33

ël, légèrement mal à l’aise, lança en observant tour à tour les masques et l’individu au sourire figé :

« Voilà un accueil qui fait chaud au cœur ! Nous avons subi quelques blessures et comme nous sommes nouveaux ici, nous voulions en profiter pour rencontrer des guérisseurs dont la réputation n’est plus à faire. »

Je complétai simplement, allant directement à l’essentiel :

« Quel est votre prix ? En or. »

L’être nous observa chacun à tour de rôle, affichant toujours son large sourire crispé, et répondit d’un ton amical :

« Cela dépend de vos maux, de ce que vous souhaitez soigner, du nombre de personnes concernées… Et bien sûr, de vos moyens. Pourrais-je voir cet or ? Mais ce serait un plaisir pour nous d'accéder à votre requête. »

Xël intervint :

« Oh, rien d’insurmontable pour vous, j’imagine. Pas de membres à recoller en tout cas. Plutôt des os fêlés ou cassés et des plaies assez profondes risquant l’infection. »

Exaspéré par ces détours inutiles, je tranchai immédiatement :

« Vous ne verrez rien du tout. Je dois soigner les os de ma jambe, de mon nez, de mes côtes, et ma plaie à la gorge. »

L’être souriant me fixa, gardant son calme :

« Comment être certain que vous ne nous leurrez pas, si vous ne montrez pas votre paiement ? Pensez-vous que je vais m'enfuir avec ou vous truander ? On ne bâtit pas une réputation en faisant ce genre de choses, sieur. »

Iel opina toutefois du chef :

« Ces blessures ne sauraient vous coûter trop cher. Les côtes et les os à souder seront l'opération la plus complexe, forcément. L'équivalent d'une dent par os à réparer, et une pour le reste. Enfin, ça, c'est le tarif habituel pour les dons d'organes. »

Son regard balaya l’ensemble du groupe :

« Ces messieurs-dames ont-ils d'autres plaies à soigner ? »

Ezra grogna légèrement, avant d’avouer :

« Oui. Des plaies, rien de plus grave. »

Lyrie secoua négativement la tête, tandis que Blanche, silencieuse, observait la scène avec intérêt.

Je soufflai à nouveau par le nez, agacé, avant de sortir ma seule et unique pièce d’or, que je tenais fermement entre mes doigts :

« Je réitère donc ma question : votre prix, en or ? »

Xël sortit lui aussi une pièce d’or et l’exposa à l’individu :

« Je pense avoir quelques fêlures aux côtes, moi aussi, ainsi qu’au bras. »

À la vue de l’or, notre interlocuteur sembla étonné :

« Oh, messires ! Une seule de ces pièces suffirait pour que votre trio complet bénéficie d'une année entière de soins de ce type. Rangez-les vite afin que nul autre ne puisse les voir : vous seriez exposés à de grands risques. Entrez plutôt dans mon humble boutique, à l'abri des regards indiscrets. »

Je rangeai ma pièce et suivis l’individu en palabrant :

« Ça fait quand même pas mal de gaspillage pour une denrée rare. Vous auriez de quoi séparer les pièces ? »

Xël rangea à son tour sa pièce, invitant d’abord les dames à passer devant lui avant de fermer la marche :

« Ou alors nous pourrions partir sur un paiement d’avance. Au cas où l’on se blesserait à nouveau… »

Notre hôte répondit avec ironie :

« Oh, je crains que nous soyons davantage spécialisés dans ce qui sépare la chair et les os que les métaux. »

Puis, s’adressant spécifiquement à Xël :

« C'est précisément ce que je proposais : une sorte d'abonnement annuel pour toutes vos blessures mineures, jusqu'aux os fendus. Une pièce d'or pour vous cinq, cadeau de la maison. Mais pas de remplacement d'organe ni de fracture ouverte… Ça, c'est plus cher. »

Piqué par la curiosité, je demandai :

« Combien, par curiosité ? »

Notre interlocuteur précisa en nous observant attentivement :

« Voyez-vous, il existe des organes en double dans notre corps. On peut vivre confortablement avec un seul exemplaire. Certains organes sont aussi… d'une utilité dont on peut se passer. S'en séparer permet à un autre d'en profiter et sert de paiement si vous-même avez besoin d'un soin majeur. »

Son sourire devint encore plus crispé tandis qu’iel regardait Lyrie :

« Mademoiselle ici présente pourrait vous en parler. Enfin… aurait pu. »

Lyrie sembla nerveuse mais ne dit rien. Notre hôte poursuivit :

« Après, si donner de votre propre corps vous pose problème, nous acceptons aussi les dons d'organes prélevés ailleurs, tant qu'ils sont en bon état bien entendu. »

Exaspéré, je repris plus sèchement :

« Et l'or ? Combien de ces pièces faudrait-il pour remplacer un organe ? »

Xël ajouta aussitôt, tempérant mes propos :

« Je pense qu’aucun de nous ne souhaite se séparer d’un organe, ni même en ramener un de quelqu’un d’autre. Votre proposition de soins sur un an me paraît intéressante sachant que nous allons beaucoup voyager dans la cité inférieure et rencontrer des individus peu recommandables. Mais peut-être que certains parmi nous sont moins intéressés. Si c’est le cas, nous pourrions augmenter le palier de soins ? »

Tous semblaient cependant plutôt enclins à profiter de l’abonnement annuel. Notre interlocuteur précisa avec patience :

« Ça dépend. Vous savez combien nous avons d'organes dans le corps ? Vous croyez qu'on a un prix déterminé pour chacun ? Ici, dans les Bouges, il y a bien peu d'or, alors le troc d'organes est bien plus courant. À vue de nez, je dirais… une pièce pour un organe précieux mais non indispensable, comme une jambe, un bras ou un poumon. Deux pour des organes essentiels : le cerveau, l'estomac, la colonne vertébrale… Puis ça dépend de l'état de la blessure initiale. Je n'ai aucune liste de prix fixes à vous fournir. Quand nous effectuons un travail, nous le faisons, et le prix est fixé selon les efforts fournis. »

Son regard revint vers moi :

« Comme précédemment dit : nous n'avons pas bâti notre réputation sur des transactions excessives ou frauduleuses. »

Je changeai alors de sujet :

« Dites-moi… Par hasard, vous n’auriez pas reçu des corps inhabituels après la dernière bataille sur la place ? Des… coquilles vides ? »

Surpris, notre interlocuteur répondit :

« Non. C'est trop récent : je ne m'occupe pas de la récupération des corps et je n'ai rien entendu de ce genre. »

La boutique était assez simple et petite, ses murs rouges étaient ornés de nouveaux masques aux sourires dérangeants.

« Bien. » me contentai-je de répondre, attendant la suite.

Xël reprit avec curiosité :

« D’où viennent tous ces masques ? »

Avec un regard malicieux, l’être rétorqua simplement :

« Je les fabrique. »

Puis, nous invitant à le suivre derrière un drapé rouge, iel ajouta :

« Veuillez me suivre. Ceux qui nécessitent des soins uniquement. »
Modifié en dernier par Ezak le sam. 24 mai 2025 16:18, modifié 1 fois.

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Akihito
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Re: Les Bouges

Message par Akihito » sam. 3 mai 2025 10:01

Squelette :

Discussion avec (porte) Jaer'thel.

Se rend à la chaumière et attend, sur le qui vive, une potentielle embuscade.

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Xël
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Re: Les Bouges

Message par Xël » sam. 3 mai 2025 11:03

Elle se nomme Blanche. Un nom qui ne colle pas vraiment à sa tronche pas plus que le fait qu’Ezak assure qu’elle va nous aider. Cependant j’accepte de lui laisser le bénéfice du doute. Tant qu’elle ne s’approche pas de ma bite. Pour l’instant, même si ça me titille, je respecte l’accord qui est d’éviter les provocations. J’incline la tête et me présente brièvement avant de suivre la muette qui nous guide dans les galeries des Bouges, gardant à l’oeil les deux autres femmes qui nous accompagnent. L’idée pour l’instant est simple: soigner nos bobos et trouver les mages du SOMA grâce à l’aide d’un contact que Blanche connait.

Nous arrivons dans un autre quartier aux murs rouges et humides, me donnant l’impression d’abord qu’ils sont couverts de sang. A nouveau j’essaie de ne pas me contenter de ma vue. J’écoute, je sens, je touche. Je perçois alors des bruits de chaînes, le tapement mat de quelque chose qui touche le mur. C’est un peu plus loin que j’en découvre la raison. Des masques d’os, figés dans des sourires inquiétants, sont suspendus aux murs. Plus nous avançons et plus ils sont nombreux et cela se poursuit jusqu’à ce que nous atteignons une porte gardée par une personne au sourire semblable aux masques.

Elle nous souhaite la bienvenue dans le Quartier Rouge et demande ce que le Clan Carmin peut faire pour nous être agréable.

« Voilà un accueil qui fait chaud au coeur ! »

Lançais-je un peu mal à l’aise en passant avec une certaine fascination son regard des masques à l’individu souriant. Difficile de se sentir à l’aise, observé par les regards noirs des masques autour et surtout la gueule de notre interlocuteur ou interlocutrice.

« Nous avons subis quelques blessures et comme nous sommes nouveaux ici nous voulions en profiter pour rencontrer des guérisseurs dont la réputation n’est plus à faire. »

S’ouvre alors une étrange phase de négociation. J’ai l’impression que l’individu en rouge préférerait avoir des morceaux de nous plutôt que de l’or mais si il serait prêt à l’accepter. Il demande quand même à le voir et moi et Ezak sortons tous les deux un Yu d’or après avoir fait un rapide descriptif de nos blessures. Elle s’étonne et nous presse de les dissimuler de peur que quelqu’un d’autre puisse les voir. A priori l’or est une chose encore plus rare et plus précieuse ici que sur Yuimen car il précise qu’une seule pièce suffirait pour soigner les plaies que nous décrivons, pour tout le groupe et pour une année entière.

Il nous invite à entrer dans sa boutique à l’abri des regards tout en répondant à Ezak qui s’interroge sur le coût de soins plus importants.

"Voyez-vous, il existe des organes en double dans notre corps. Et l'on peut vivre confortablement avec un seul des deux. Certains sont aussi... d'une utilité dont on peut se passer. S'en séparer permet à un autre d'en profiter, et sert de paiement si vous-même avez besoin d'un soin majeur."


Son sourire se crispe d’avantage en regardant Lyrie.

"Mademoiselle ici présente pourrait vous en parler. Enfin. Aurait pu."

La muette semble nerveuse, mais se contient. Je me demande ce qu’elle a soigné en échange de sa langue. L'être en rouge poursuit.

"Après... si donnez de votre propre corps vous pose problème, nous acceptons aussi les dons d'organes prélevés ailleurs, tant qu'ils sont en bon état bien entendu."

Une invitation à voler des organes sur d’autres, voilà qui est formidable. Je me sens obligé de préciser la situation tandis qu’Ezak, exaspéré, insiste pour avoir le coût en or.

« Je pense qu’aucun de nous ne souhaite se séparer d’un organe, ni même en ramener un de quelqu’un d’autre. La proposition de soins sur un an me paraît interessante sachant que nous allons pas mal voyager dans la cité inférieure en croisant des individus peu recommandables. Mais peut être que certains parmi nous sont moins intéressés. Si c’est le cas nous pourrions peut être augmenter le palier de soins ? »

Dis-je en interrogeant du regard les autres membres du groupe. Mais ni Lyrie ni la sorcière ne semble vouloir passer à côté de soins offerts.

"Ca dépend. Vous savez combien nous avons d'organes dans le corps ? Vous croyez qu'on a un prix déterminé pour chacun ? Ici, dans les Bouges, il y a bien peu d'or, alors le troc d'organes est bien plus courant. A vue de nez, je dirais... L'une de ces pièces pour un organe précieux mais non nécessaire. Une jambe, un bras, un poumon. Deux pour des essentiels : le cerveau ou la tète, l'estomac, la colonne vertébrale... puis ça dépend l'état de la blessure initiale, il ne s'agit pas juste du remplacement, mais aussi du nettoyage des chairs, et j'en passe. Je n'ai aucune liste de prix fixes à vous fournir. Quand nous devons faire un travail, nous le faisons, puis le prix est donné en fonction des efforts fournis."

Je grimace, cela me semble bien onéreux et surtout être un peu une méthode d’escroc, même si au final le résultat est au rendez-vous. J’inspecte la boutique qui est assez simple et servant surtout d’exposition pour d’autres masques. Curieux, j’interroge le propriétaire des lieux sur leur provenance.

"Je les fabrique"

Répond-il avec un regard malicieux qui me fait froid dans le dos. Par hasard, ne serait-ce pas là le visage des mauvais payeur ? J’ai l’impression d’être dans un guet-apens.

"Veuillez me suivre. Ceux qui nécessitent des soins uniquement."

Il nous invite à entrer dans l’arrière boutique, dissimulée par un drap rouge. Je jette un regard à la muette. Je ne pense pas qu’elle nous attirerait dans un piège. Je pense avoir compris comment fonctionne la Horde et nous en faisions désormais partie. Et pourtant, je suis inquiet à l’idée que mon crâne devienne un masque qui se balance aux murs du Quartier Rouge. Ezak, lui, semble assez confiant pour entrer en invitant Ezra à le faire également, proposant même de payer notre année de soins. Je jette alors un autre regard à Blanche, car si quelques chose dérape ce sera à elle de prouver qu’elle peut nous venir en aide. Je soupire et passe à mon tour dans l’arrière boutique, tout de même prêt à devoir me défendre.

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Capitaine Hart
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Re: Les Bouges

Message par Capitaine Hart » dim. 4 mai 2025 01:17

Nous avons été menés jusqu’au campement des Maraudeurs Noirs, un endroit spartiate où régnait un silence de mort. C’était semblable aux camps de mercenaires qu’on pouvait trouver près des champs de bataille sur Yuimen, mais en bien plus morose. Tout le monde semblait avoir le moral jusqu’aux chaussettes. On m’a montré la tente de leur cheffe, et je ne me suis pas fait prier pour y entrer.
En pénétrant dans la tente, je suis tombé face à face avec la cheffe, une mystérieuse femme à la peau blanche et vêtue d’une longue robe noire, calmement assise, les yeux fermés, comme si elle m’ignorait. Elle me faisait penser à Silmeria avec un plus gros décolleté. Mais elle avait été prévenue de mon arrivée, je n’allais pas timidement demander son attention.

« Eh bin, c’est la fête, ici. Quand j’ai entendu le mot « fraternité », je m’imaginais plus de verres levés et de chansons paillardes. »

Elle a répondu sans ouvrir les yeux.

« Fraternité n’est pas convivialité ou vulgarité. »
« De ce que j’en ai vu, elle a quand même tendance à égayer. En tout cas moi, si j’étais entouré de mes frères et sœurs, j’aurais envie de faire la fête tous les jours. »
« Les Bouges se prêtent à la guerre, pas aux fêtes. »

J’ai inspecté la tente, se retenant à peine de toucher aux affaires d’Evanie à ma portée.

« J’ai vu ça, l’entrée des Bouges est une rivière de sang, j’ai complètement niqué mes bottes préférées. Pour ce qui est de la guerre, vous avez l’air au point, vous. Armures complètes, armes en bon état, des gars disciplinés... Et pourtant quand je suis tombé sur vos maraudeurs ils avaient l’air tout propres et je n’ai pas remarqué de fruits écrasés sur le chemin du camp. Vous avez loupé le réveil pile le jour du Don ? »
« Non. Seuls se sont battus le nécessaire. Le groupe rencontré avait une autre mission : isolés et blessés faire prisonniers. »
« Disciplinés ET malins, je vois. Et vous faites quoi, de ces prisonniers ? Pas du ragoût, j’espère. J’ai cru comprendre que toute viande était bonne à prendre dans ce petit coin de paradis, mais j’ai l’estomac fragile. »
« Non, pas de cannibalisme. Ailleurs. Cannibales deviennent des monstres. Leur corps et leur esprit. »

Elle a marqué une courte pause.

« Ils se vendent. Pour leur liberté, pour leurs organes, pour leurs chairs. Et s’ils sont prometteurs, pour le recrutement. »
« Mh. J’imagine que dans ces circonstances, c’est une approche raisonnable. Et qu’en est-il des mages ? »
« Lesquels ? »

Ah, comme si j’allais vendre la mèche aussi facilement.

« Je veux dire, c’est quoi, votre position sur la magie ? Après tout, certains dans vos rangs ont déjà dû s’en servir s’ils ont fini dans les Bouges. »
« Aux Tréfonds finissent les mages imprudents. Ici, la mesure est de mise. La magie est une arme comme une autre, elle n’est ni rejetée ni adulée. Du moment que l’œil des Chevaliers ne se pose pas sur nous, elle ne pose pas de souci. »
« Je vois... »
Tout en me grattant le menton et faisant mine d’être gêné, j’ai décidé de changer de rythme, arborant un grand sourire :
« Je vous ai posé question sur question, et vous avez eu la gentillesse de me répondre à chaque fois. Posez-moi donc une question, pour changer. »
« Quels sont vos buts ? » a-t-elle soudainement demandé.

J’avais compris qu’elle ne posait pas cette question à la légère. Chacun de ses mots semblait pesés, ses phrases laconiques. Elle allait à l’essentiel sans détournement. J’ai fait de même, lui répondant avec une total sincérité.

« Démolir cette prison et retrouver ma confrérie. »
« Les Maraudeurs seraient vos outils ? »
« Mes frères, s’ils veulent changer Ashaar, ou la quitter. Ma confrérie ne s’arrête pas à de petites choses comme les frontières entre les mondes. »
« Changer Ashaar... »

Elle est restée silencieuse un instant, avant d’ouvrir ses yeux, dévoilant deux abysses d’obscurité complètes, presque dénuées de reflet.

« Oui. Changer Ashaar ou la quitter. »

Je dois avouer que même si j’ai vu mon lot de choses bizarres, j’étais un peu pris par surprise. Nous nous sommes regardés pendant ce qui m’a semblé être deux bonnes minutes avant que je ne brise le silence à nouveau. J’avais son attention maintenant, autant en profiter !

« Je ne sais pas exactement comment fonctionne la barrière, ou de quoi elle vous protège. Mais je trahirais les idéaux de mes camarades si je laissais Ashaar telle quelle sans rien y faire. Dites-moi, si vous deviez changer ce monde, à quoi il ressemblerait ? »
« Tout serait comme dans les Bouges : ici, nous sommes libres. Mais nous manquons de tout. »
« Et si vous pouviez être libre dans un monde meilleur que les Bouges ? Où les ressources ne dépendent pas du dessus, et combattre est un choix ? Où vous pourriez vivre au lieu de survivre. »
« Alors nous serions forts. »

Devant de telles réponses, je n’ai pas pu m’empêcher d’éclater de rire. En y pensant, ses buts ne semblaient pas si différents de ceux de ma Confrérie, bien que l’emballage était tout de même bien plus lugubre.

« J’aime cette manière de penser ! On va bien s’entendre ! »

Je lui ai tendu la main.

« Evanie, c’est ça ? D’où je viens, on scelle les alliances en se serrant la main. »
« Ici, souvent, quand deux personnes se serrent la main, l’un des deux la perd. »

Oui, bon, vachement lugubre quand-même, mais je blâmais Ashaar pour ça.

« Eh bien que ça soit notre premier changement ! » lui ai-je répondu, espérant très fort qu’elle n’allait pas essayer de m’arracher la main.

Mes doutes étaient infondés. Nous avions échangé une poignée de main normale. Essayant de contenir un soupir de soulagement, j’ai estimé qu’il était temps de me retirer.

« Bon, il y a plus qu’à se mettre au travail ! J’aimerais commencer par parler à vos prisonniers, si vous en avez. Je veux en apprendre le plus possible sur les Bouges avant de réfléchir à un plan. »

Sans lui laisser le temps de répondre, et connaissant à force son goût pour le silence, j’ai quitté sa tente.

« Ah, j’oubliais ! »

J’ai rapidement passé ma tête.

« Je suis le grand capitaine Hartingard, mais vous pouvez m’appeler Hart ! »

Je l’ai ensuite laissée à ses pensées.
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Modifié en dernier par Capitaine Hart le dim. 11 mai 2025 12:07, modifié 2 fois.

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Cromax
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Re: Les Bouges

Message par Cromax » dim. 4 mai 2025 15:33

La Cité des Ombres



Les Bouges



Jour 2 – Après-midi.




Huyïn se réveilla après un temps qu’il ne parvint pas à déterminer. Il était toujours au même endroit, mais à part la pierre rouge qui pulsait calmement d’une lueur intense, il n’y avait plus rien de coloré ici. Ni sang ni vagues d’énergie dans la pierre. Le chevalier Strix était toujours au centre, mais “éteint”. Toute couleur l’avait abandonnée, et son armure terne et grise reposait, genou en terre, mains jointes sur le pommeau de sa lame. Comme une statue prêtant serment, totalement immobile. Non loin de lui, dans son dos, un bruit l’attira. Une respiration rauque, essouflée, sifflante. Penchée sur le sol, une silhouette rampait sur la pierre. Maigre à l’excès, hâve, exsangue. On eut dit que tout le liquide de son corps avait été drainé.


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Elle avait laissé derrière elle un habit que le chat reconnut fort bien : une coule rouge, ample robe munie d’un capuchon large. La tenue du clan Carmin. De ses anciens geôliers. L’être si faible qu’il ne pouvait lever vers lui sa tête n’avait plus qu’une sous-robe grise terne, et rampait péniblement dans sa direction. Comme aux portes de la Mort, si elle avait existé.

Qu’est-ce qui s’était passé ici ? Difficile à dire en l’état. En tout cas, Huyïn se sentait mieux. Plus de pression sur les parois de sa tête, plus de fièvre dans ses veines. Comme s’il avait été... purgé de ce mal ? Il eut l’impression que seul lui possédait encore du sang. Lui et cette pierre battant lentement.



_______________________________



Ezak, Ezra et Xël pénétrèrent l’arrière boutique. Il s’agissait d’un couloir muni de plusieurs portes solide, éclairés de chandeliers dont les flammes étaient aussi rouges que le sang, rendant une étrange apparence au lieu. Comme unique décoration, une nouvelle cascade de masques souriant de manière crispée, riant de leur paralysie totale. Enchainés l’un à l’autre.


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La personne qui les avait reçus leur indiqua :

“Chacun une salle. Vous paierez à la sortie. Je vous souhaite de bons soins.”

Son sourire crispé était toujours inquiétant mais... son ton presque maternel. Derrière chaque porte, où ils furent invités à entrer seul se trouvait une salle sobre. En longueur, avec pour seul ameublement un lit de pierre froide, comme un autel, dans le sens de la pièce. Des murs gris, haut et longs. La seule lueur provenait d’une coupelle de ce qui semblait être du sang posée en tête de lit, sur un tissu carré. Sa surface était troublée par ce qui ressemblait à un crâne, émettant des volutes rouges. Comme s’il fondait en fumant.


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Derrière l’autel se trouvait une unique silhouette encapée de rouge, visage dissimulé dans les ombres d’une coule écarlate.


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La silhouette indiquait d’un signe de main l’autel, invitant son visiteur à s’y allonger.



______________________________



Mathis, dans cette bâtisse aux milles plaisirs, fête de la luxure et du stupre, de toutes les débauches possibles, ne trouva aucun visage familier. Aucun yuimenien ne trainait là, à part lui. Les effluves sensuels lui donnèrent chaud, le mirent dans un état second, comme une transe humide qui appelait à la lascivité. Le ballet des corps qui se touchaient le cernait de toutes part, si bien qu’il eut l’impression que sa vision ne pouvait plus se focus que sur des personnes qui l’entouraient directement. Il ne percevait plus les personnes, mais uniquement des parties d’eux : une épaule dénudée, une bouche charnelle, un regard lubrique, une chevelure soyeuse... tout occultait même la présence des mâles qu’il avait aperçus en approchant. Ses yeux étaient attirés par les charmes féminins et suaves.

Puis, il accrocha un regard. Celui d’une femme aux cheveux écarlates, à la peau pâle et aux lèvres marquées d’un bordeau sombre. Un robe noire échancrée, décolletée, aux voiles translucides. Une peau pâle, des traits fins, un regard dévorant qui ne le lâcha plus.


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La créature approcha de lui.

“T’es nouveau ici, mon mignon. Tu cherches quelque chose de particulier ?”



_____________________________



Dans le campement des Maraudeurs Noirs, Hart avait noué un contact solide avec la cheffe des lieux. Il l’avait quittée à la recherche des prisonniers, alors que ses compagnons semblaient avoir pas mal hésité sur la marche à suivre, sans vraiment avancer de leur côté.

Le pirate fut conduit par de vagues indications vers un enclot non loin du campement, sur l’extérieur de celui-ci. Des êtres en sale état étaient ligotés à des pieux montés sur de lourds poids de bois. Sales, blessés, affamés, ils ne faisaient pas plaisir à voir. Certains cherchaient de la pitié dans son regard, d’autres se détournaient. Les derniers ne semblaient même pas lui prêter la moindre attention. L’un d’eux l’apostropha en soufflant, pour attirer son attention.

“Hey. Hey toi, t’es pas avec eux. T’es qui ? Viens. Viens nous libérer.”

La surveillance était bien entendu accrue, et il était inenvisageable de les libérer si aisément. L’homme en question avait l’air d’avoir été tabassé. Cocards, oeil poché et arcade fendue.


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Leyna et Dracaena se baladèrent un peu dans le camp, sans aller voir les personnes conseillées. Drac ne parvint pas à entendre la moindre rumeur passante. Au contraire : lorsque le duo passait quelque part, les rares murmures se taisaient et des regards soupçonneux se tournaient vers eux. Leur apparence, très certainement. Ou leur non-appartenance au clan, en tout cas.



Le feu central rassemblait quelques personnes, dont l’intendant qui leur avait été indiqué. L’ambiance générale était froide à leur égard, les regards sévères. Personne ne vint directement à leur rencontre.


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Drac, dans ses observations, ne nota aucun transport particulier, mais une tente paraissait mieux gardée, close et peut-être plus vaste que ses voisines. Un garde caparaçonné en surveillait l’entrée, immobile.


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Leyna, elle, parvint à apercevoir quelqu’un qui les guettait depuis les ombres. Un borgne qui ne cessait de les regarder, mystérieux et sombre, restant à bonne distance.


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C’étaient à eux de décider quoi faire.



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Akihito était dans sa planque. Il attendit un bon quart d’heure avant que quelqu’un ne se pointe. Laéria Russelle, munie d’un paquet. Un sac bien rempli. Elle le vit seul et grimaça.



“Vous vous êtes fait remarquer. Je vous avais prévenus, pourtant. J’ai apporté de quoi vous nourrir, mais il va falloir abandonner l’idée de suivre Khalor pour le moment. Thyers ne devait pas vous mener au Bordel ? Jaer m’a dit que je vous trouverais là. J’ai les rations que vous aviez demandées. Mais... je prends des risques en vous fournissant de la sorte. Peut-être vaudrait-il mieux que je m’éloigne un moment du Bastion. Partir en mission, tout ça... Vous avez besoin d’une guide ?”



[HJ : Huyïn : note dans ton post ce que tu fais. Ezak et Xël, chacun dans votre partie RP, indiquez moi ce que vous faites, et je vous donnerai des consignes pour votre RP. Mathis, aparté. Hart, aparté. Leyna et Drac, cette semaine j’aimerais que vous suiviez les consignes données la semaine passée : venir me trouver sur le blabla ou par MP pour indiquer ce que vous faites ou qui vous aller voir afin d’avoir un aparté (à deux ou seul), ou des consignes supplémentaires. Aki : aparté.]



[XP :
Huyïn : 0,5 (discussion)
Mathis : 0,5 (discussion), 0,5 (recherche)
Leyna : 0,5 (recherche)
Drac : 0,5 (recherche)
Ezak : Noté quand complété.
Aki : noté quand complété.
Xël : 0,5 (discussion)
Hart : 0,5 (discussion), 0,5 (recherche)]

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Xël
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Re: Les Bouges

Message par Xël » mer. 7 mai 2025 22:51

Ces masques, toujours ces masques qui se moquent. Ils couvrent les murs, éclairés d’une lumière rouge sang venant des flammes des chandeliers. Je suis mené dans une salle sobre, meublée simplement d’un lit de pierre sur lequel une silhouette en manteau rouge m’invite à m’allonger. Je m’y installe avec une certaine réticence, guidé par une lueur amarante venant d’un bol posé en tête de lit. Je distingue dedans une étrange forme troublant la surface. Je suis mal à l’aise et comment m’en vouloir ? Rien ici n’est fait pour me détendre. Des masques qui ricanent, des silhouettes inquiétantes, une atmosphère de sang. Le Clan Carmin tient bien son nom. J’oserais même dire qu’ils en font un peu trop.

Une fois couché, c’est une voix de femme qui me demande de décrire mes blessures. Je lui indique mes côtes, mon bras ainsi que mon visage en retirant mon casque. Elle écoute attentivement et me demande si je suis prêt. J’ai le sentiment que je vais le regretter mais j’incline la tête et ferme les yeux, m’attendant à souffrir mais il n’en est rien, je m’endors, tout simplement.

« Il faut les détruire ! »

Entendais-je avant d’être inconscient.

« Je le savais. »

Me voilà à la porte de l’orphelinat de Kendra Kâr avec la sale impression que quelqu’un trifouille dans mes souvenirs. Cauchemar ou vision ? Difficile à dire. Mais l’ambiance est insupportable, loin de la réalité. La cité blanche de Kendra Kâr est silencieuse, teintée d’une couleur cramoisie. Les rues, les murs, le ciel, tout transpire d’une teinte rouge, si bien que je décide de pousser la porte devant moi pour entrer dans le bâtiment. Là aussi, tout est carmin et je m’avance dans un couloir que je reconnais à peine, plongé dans un silence inhabituel. Remuant une brume écarlate qui stagne au sol et qui descend depuis l’escalier au fond du couloir. Je monte à l’étage tandis que la brume se fait plus épaisse pour finalement s’écarter et révéler les murs couverts de masques rieurs mais venant de crânes d’enfants. Tout mon corps se crispe, tétanisé par cette crainte profonde qu’un jour quelqu’un s’en prenne à l’orphelinat.

« Ce n’est pas réel. »

Lâchais-je entre mes mâchoires crispées. Un mouvement à ma droite attire mon attention vers une pièce adjacente au couloir. J’ai simplement le temps d’apercevoir un bout de cape rouge avant qu’à nouveau la brume ocre se fasse plus épaisse, me laissant juste un passage vers ce que j’ai vu, engloutissant les masques d’enfants. Je suis ce chemin pour rejoindre la chambre pour me tétaniser une nouvelle fois. Au fond de la pièce sont crucifiées Méli, Alenna et Satina à des croix rouges, le visage implorant et pleurant du sang, portant d’épaisses toges carmins dans lesquelles leurs larmes se perdent.

« Ce n’est pas réel ! »

Répétais-je avec plus de vigueur.

« Ça l’est. »

Me répond une voix à ma droite. J’ai à peine le temps de tourner la tête pour apercevoir une armure rouge qu’un violent coup me frappe le ventre et me soulève de terre pour me renverser dans le couloir. La brume s’agite autour de moi alors que je me redresse en me tenant les côtes et que l’armure se rapproche, entouré de flaques de sang flottant autour d’elle. Casquée, je ne peux pas voir son visage mais c’est bien une voix d’homme que j’ai entendu. La brume se refait plus épaisse, dissimulant mon agresseur que je vois faire voleter le sang autour de lui. Je saisis mon bouclier avant qu’à nouveau une attaque me frappe brutalement au bras. J’use de ma magie et évite une attaque qui vient du plafond, semblable à une lame faites de sang, m’égratignant seulement le visage. La fumée au sol s’écarte, me laissant percevoir un parquet vibrant. Je cours, évitant une première lame sanglante qui perfore le sol en voulant m’embrocher. Je freine brusquement évitant un autre pieux rouge qui perce le sol devant moi et un autre qui surgit à ma gauche, puis à ma droite, me coinçant peu à peu dans des barreaux carmins. L’armure réapparait au fond du couloir, manipulant des trainées de sang pour en former des lames qui pointent dangereusement dans ma direction.

« Tu n’es pas réel ! »

Lui criais-je. Déclaration à laquelle il répond solennel.

« Je le suis. »

Et les lames foncent vers ma direction. Je rassemble mes fluides et les laissent exploser, repoussant le sang autour de moi pour en éclabousser les murs avant de foncer vers le chevalier. La brume s’élève et à nouveau il disparait, me laissant seul dans le couloir avec ces masques qui rient de ma détresse. Je ferme les yeux et inspire profondément, humant à plein nez les effluves de sang qui imprègnent les lieux. A juste titre, car quand je réouvre les yeux des litres et des litres coulent le long des murs et du plafond. Nouvelle attaque venant d’à travers le mur que je bloque à l’aide de mon bouclier. Je l’ai senti ?

L’attaque prend une forme liquide puis se glisse derrière moi pour prendre la forme d’une épée et m’attaquer à nouveau. Nouveau blocage avant de foncer à travers le mur bouclier en avant pour surprendre le chevalier mais personne n’est là. A droite ! Je laisse ma magie s’échapper pour contrer un autre sort. Je l’ai senti !

Je me baisse, évitant l’épée de sang qui me poursuit encore avant de la détruire d’un sort d’air. Je ferme les yeux. Est-ce que c’est ça le secret ? La magie aurait comme l’odeur, comme le bruit, comme le goût, son propre sens ? Est-ce que c’est comme ça que fait le Soleil Noir ? Je ne dois pas essayer de sentir ou d’entendre mais plutôt de trouver le sens que la magie vient déclencher.

J’ouvre les yeux alors que toute la maison tremble, écrasée par le poids du sang qui recouvre tout. J’en ai à présent jusqu’aux chevilles et celui ci s’anime, s’élevant autour de moi comme autant de serpents hostiles. Je dois reconnaître l’émotion que cette magie me procure. Un premier serpent m’attaque, s’écrasant contre mon bouclier. J’en esquive un second avant de le trancher d’une épée façonnée par magie dans ma main. Sentir, je dois le sentir, rien qu’une seconde. Un autre serpent parvient à s’enrouler autour de mon bras, je le chasse lui et les autres d’un ouragan qui projette des flots de sang à travers la pièce. Je laisse mes sens s’éparpiller à la recherche de la présence du chevalier rouge tandis que mon corps combat les nuées de volutes rouges qui veulent m’engloutir.

Soudain je perçois quelque chose ! De l’autre côté du couloir. Ce n’était qu’une seconde mais j’ai senti une magie différente de la mienne. Je façonne un portail pour y bondir, emportant le sang autour de moi, pour me retrouver derrière l’inconnu et le frapper de mon sort. Tout face à moi vole en éclat, les murs, le sol, le plafond, tout sauf le chevalier qui façonne une sphère semblable à la mienne en soulevant le sang autour de nous. Je l’ai raté ? Non, il l’a évité.

La sphère me percute de plein fouet et je suis projeté à travers le mur pour atterrir dans un décor different. Toujours dans la même atmosphère carmin se dessine les remparts d’Esseroth, parcouru par un lierre aux feuilles rouges liant encore des masques d’os. Mon grognement brise le silence qui règne encore dans cette vision, suivi par le bruit des pas du chevalier rouge qui me poursuit. Il s’approche, les mains dissimulées dans des sphères sanguine alors que je me redresse pour entourer les miennes de volutes Zephyrienne. Sa première attaque s’écrase contre mon bouclier tandis que mon poing atteint son torse. Il recule puis riposte, parvient à me déséquilibrer et s’apprête à me frapper encore. Un coup de vent l’en empêche et il est déséquilibré à son tour, me laissant une ouverture pour lui asséner un coup de bouclier sur son casque, le sonnant suffisamment pour lui en mettre un second dans le torse. Et pendant que nous échangeons des coups, autour Esseroth s’effondre, bâtiment par bâtiment, soulevant une épaisse fumée qui tourne autour de notre combat jusqu’à former une tornade qui nous force à faire une pause.

Une pause de courte durée car je me fais percuter par les débris que soulève le vent et suis emporté à mon tour pour tomber sur les bords d’un lac de sang, au pied d’un château éclairé par une lune grenat. Sur la berge, patiente l’armure rouge avec un pavois et une épée de la même couleur. Encore une fois, je me relève, dressant à nouveau mon bouclier et laissant apparaître une lame magique dans ma main avant de m’avancer vers lui.

Le combat recommence et j’attaque avec la ferme volonté de me débarrasser de cette vision tout comme il est clair que son but est de me blesser. Je cherche une ouverture et parvient à l’aide d’un portail à lui asséner un coup assez violent pour fissurer son casque. Il prend un instant pour s’en remettre avant de jeter son bouclier et de saisir son épée à deux main pour me charger avec un cri de colère pendant que le château à côté de nous s’effondre. Lorsqu’il me frappe, le décor autour de nous change et nous voilà téléportés sur la place de Nagorin et ainsi à chaque coup que nous échangeons nous parcourons le monde d’Aliaénon et de Yuimen, faisant s’effondrer les cités rouges sur notre passage en produisant cette épaisse poussière qui recouvre tout. Elscarl’Olth, Luminion, la Tour d’Or, Ouesseort, Bouhen, pour finir dans le désert de Thiir au pied d’Arothiir ou le combat se fait plus intense encore. Nous crions notre rage, notre volonté de vaincre, soulevant du sable pourpre à chaque coup échangé et dont nous ne comptons plus le nombre qui ont touchés. Nos armures sont en piteux état et nos corps aussi.

Le casque de mon adversaire s’effrite pour laisser apercevoir le visage lunaire de Finarfin, les yeux et les cheveux écarlates.

« … Non … »

Son plastron s’effrite à son tour, révélant son torse complètement écrasé. Je recule, abasourdi et il dresse une main vers moi alors que je fais encore un pas en arrière. Je me sens chuter, tomber à travers son portail dans un trou sans fond ou des volutes de sang viennent m’arracher mon armure avant que je n’atteigne une plaine pluvieuse. Je pousse une plainte de tristesse et de colère tandis que mes bras s’enfoncent dans la boue vermillon pour me remettre sur mes pieds. Je suis nu dans les plaines de Kochiii, entouré de silhouette encapuchonné qui me juge de leurs regards invisibles alors que la pluie de sang s’abat toujours plus fort sur moi. Elles s’approchent pour me saisir et je n’ai plus la force de me défendre.

((Suite d’apprentissage ))

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Huyïn
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Re: Les Bouges

Message par Huyïn » jeu. 8 mai 2025 09:54

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Troisième perte de repères, troisième résultat identique. Ou presque. Quand Huyïn ouvre les yeux cette fois, il est allongé sur le flanc, la main ayant servi d'appui coincée sous son torse. Mais au même endroit, même si l'évidence n'est pas immédiate puisque nul trace résiduelle de ce coloris écarlate dans la roche ou sur l'armure du chevalier Strix. Le Tigre s'assoit puis se relève lentement, s'attendant à quelque surprise désagréable, mais non. En-dehors du léger engourdissement de son bras, tout semble aller normalement. Quoique, là encore c'est inexact. Sa sensation de pression crânienne et de fièvre ont disparu. Il se sent plutôt reposé, à dire vrai. Son regard se rive à son muet interlocuteur, pour le voir dénué de toute trace sanguine et dans une posture d'un profond respect, genou au sol et mains sur le pommeau de sa lame. Plus la moindre trace de rouge, si ce n'est au cœur du cristal qui pulse avec lenteur maintenant.

Les oreilles du Woran se tournent dans son dos à la perception d'un bruit, puis c'est lui-même qui pivote. Il découvre alors un individu au sol, maigre à l'excès, d'une pâleur maladive, une chevelure à l'aspect cassant aussi. Cette personne semble littéralement desséchée, comme un corps abandonné dans le froid et drainé de tous ses fluides. Un humain à première vue, dont le genre est difficile à déterminer à cause de son apparence. Mais ce qui interpelle le plus le Félin, c'est l'habit que la forme exsangue a laissé derrière elle. Soufflée ou juste tombée parce que plus assez de chair pour la retenir ? Une coule et capuche qu'il a déjà trop vus, appartenant aux carmins. Ses yeux se plissent à la vue de ce spectacle, l'individu continuant de ramper dans sa direction, comme suivant un but malgré son état.

Son attention tourne vers le minéral rougeoyant. Est-ce de ce potentiel détonateur que le cristal l'a protégé ? Acte volontaire ou simple collatéral heureux de sa collecte sanguine ? Et pourquoi lui n'a-t-il pas été affecté ? N'est-ce que partie remise et le rouge objet se recharge le temps de lui faire la même chose ? Beaucoup de questions dont il doute obtenir la réponse facilement. Il pourrait aussi demander à l'être rampant. Ce n'est pas comme si ce dernier pouvait aller bien loin dans son état. Et puis, voir qui arbore les couleurs de ce clan dans une posture aussi vulnérable a un côté réjouissant. Il tourne alors son regard pâle vers l'armure, curieux de savoir s'il y a bien un être vivant sous le métal ou s'il ne s'agit que d'une enveloppe vide, manipulée par l'art sanguin du cristal lui-même. Ses yeux passent de l'un à l'autre, ne sachant pas trop à quoi s'attendre. Est-ce que le minéral en question sera en mesure de communiquer sans son intermédiaire ?

"Chevalier Strix ? Faites-moi savoir quand vous serez en mesure de reprendre notre agréable conversation."

Huyïn va ensuite à l'encontre des sentiments que lui inspirent la présence du carmin décharné et lui fait face de toute sa hauteur, s'évertuant à demeurer hors de portée des mains squelettiques de l'individu. Il se doute que la chose ne sera pas aisée vu son état, mais il est le plus évident interlocuteur des environs.

"Membre du clan Carmin, n'est-ce pas ? M'avez-vous pisté ou n'est-ce qu'un malencontreux hasard ?"

Le Tigre en profite pour observer avec davantage d'attention l'apparition en question, d'en identifier des anomalies par rapport à ce qu'il sait de ses anciens geôliers. Le fait qu'il aperçoive une chevelure sur ce cadavre ambulant dénote déjà avec la plupart des membres du clan.



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Modifié en dernier par Huyïn le ven. 16 mai 2025 22:04, modifié 1 fois.

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Mathis
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Re: Les Bouges

Message par Mathis » jeu. 8 mai 2025 13:58

Même si j’évitais d’appesantir mon regard sur les corps à demi-dénudés, je remarquai une anomalie anatomique. Enfin, une différence plutôt intrigante. Les seins des femmes et la poitrine des hommes étaient dépourvus de mamelons. Ce fait me laissa perplexe et m’obligea à revoir mes hypothèses au sujet de ce monde. Les femmes soldates rencontrées aux étages supérieures m'avaient dit naître adultes. Je n’en avais pas cru un mot, pensant qu’Ashaar était une sorte de prison et que leur mémoire avait été effacée, leur faisant ainsi oublier leur état de prisonnier. Cependant, cette absence anatomique sur les poitrines convergeait avec l’idée que les habitants d’Ashaar naissaient adultes, d’où l’inutilité de posséder des mamelons destinés à servir de tétines pour nourrir un nouveau-né. En ce qui concernait les seins, ils étaient sûrement dépourvus de glandes mammaires et leur rôle se résumait à la séduction.

En entrant dans la bâtisse, sans surprise, je fus confronté à un spectacle similaire à l’extérieur, mais plus intense. Les effluves ainsi confinés augmentaient en intensité, et même si ma venue n'avait pas pour but d’assouvir mes désirs charnels, mon corps réagit positivement à ces stimuli venant de toutes parts. Malgré cela, je regardais de tout côté, cherchant un visage familier… En vain, aucun yuimenien de ma connaissance ne se trouvait en ces lieux, j’étais arrivé le premier. Considérant tous les dangers des bouges, j’espérais ne pas être le seul à parvenir à cet endroit de débauche.

Puis, mon regard en croisa un autre , celui d’une splendide femme à la chevelure auburn sombre. J’oubliai alors tout ce qui se trouvait dans la pièce, obnubilé par cette enivrante créature aguichante qui avançait d’un pas gracieux digne d’une féline, dans sa robe noire, tout juste assez décolletée, pour me donner l’envie de la déshabiller.
Lorsqu’elle fut tout près, je pus admirer sa peau pâle, ses lèvres rouges charnues et son regard ensorcelant.

D’une voix suave, elle m’adressa la parole.

“T’es nouveau ici, mon mignon. Tu cherches quelque chose de particulier ?”

D’une voix que je voulais décontractée, je lui répondis:

" Oui, je cherche quelque chose, et j'espère que vous pourrez m'aider à le trouver."

Cherchant à me titiller davantage, elle passa langoureusement sa langue sur ses lèvres, et me demanda:

"Le plaisir ? Pour ça je peux t'aider."

Sans la quitter du regard, je souris tout en lui répondant:

"Oui, le plaisir, mais pas tout de suite. J'aimerais faire soigner mes blessures d'abord, j'ai de quoi payer."

Il n’était pas facile de résister à ses avances, mais je devais avant tout me protéger et voir mes priorités. Dans ce lieu rustre et violent, je ne pouvais me permettre d’être blessé.

"T'as cru que tu étais dans un hôpital mon chou ? J'peux jouer l'infirmière, mais j'suis pas une vraie soigneuse."

Sa voix sensuelle ne me laissait pas de marbre, mais je me devais d’insister.

"En fait, je croyais que dans un tel rassemblement, il pouvait y avoir toute sorte de gens, et pas que ceux compétents pour offrir du plaisir... Et je vous assure que vous trouverez plus agréable de jouer à l'infirmière avec moi, si je suis au sommet de ma forme et pas diminué par mes blessures."

Lui montrant mon attirance réelle à son endroit, j’espérais pouvoir la convaincre de m’aider à me faire soigner.

"Il y a toutes sortes de gens, mon chou. Bon, t'es mignon, et t'as de quoi payer. On va aller voir la patronne. Elle pourra peut-être t'aider. Suis-moi."

Je poussai un soupir de soulagement, mais je demeurai tout de même à l’affût, il n’était pas impossible qu’elle tente de me piéger, de m’emmener dans un lieu plus sombre et obscur afin de me détrousser de tous mes biens.

Tout en traversant la foule à sa suite, je lui répondis:

"Merci. Je me prénomme Mathis. J'aimerais bien connaître votre nom afin de vous retrouver après ma rencontre avec votre patronne."

Cette fois, ce n’était pas ma raison qui m’avait poussé à lui faire cette proposition, mais plutôt mes besoins primaires.

"J'reste près de toi, t'inquiète. Mais tu peux m'appeler Rubis."

Rubis, un joli nom que je n’étais pas prêt d’oublier. Je suivis donc cette envoutante femme, à travers la foule tout en demeurant à l’affût des gens qui pourraient chercher à m’attaquer.

(((Mathis suit Rubis à travers la foule et regarde tout de même autour de lui, à l’affût de Yuimeniens, ou de gens n’étant pas là pour se procurer les plaisirs de la chair.)))

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Capitaine Hart
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Re: Les Bouges

Message par Capitaine Hart » ven. 9 mai 2025 22:07

Il m’a fallu plusieurs essais pour trouver l’enclos aux prisonniers. Il faut dire que les Maraudeurs n’étaient pas habituellement bavards ou avenants. Devant moi se trouvait un certain nombre de prisonniers, tous attachés à des pieux lestés. Certains semblaient me supplier du regard de les sortir de là, d’autres refusaient de reconnaître ma présence. L’un d’eux, un gringalet qui semblait encore plus mal en point que les autres, le visage orné de coquards et le nez sanglant, m’a apostrophé :

 « Hey. Hey toi, t’es pas avec eux. T’es qui ? Viens. Viens nous libérer. »

Comme s’il avait une chance d’éviter les coups dans la gueule une fois détaché. Mais j’étais venu parler, et celui-là avait l’air loquace. J’ai alors jeté mon dévolu sur lui et me suis penché à son niveau.

« Yo. T’es dans un sale état, l’ami. C’est eux qui t'ont tabassé ? »
« Eux, d’autres, qu’importe ! C'est ici qu’je suis maintenant et j’ai pas envie d'y être. »
« Ah donc tu t’es fait tabasser par d’autres alors ? Raconte-moi tout. Je voudrais pas abuser de la bonne volonté de mes hôtes pour un parfait inconnu. »

Je me suis assis devant lui pour sortir une bouteille d’absinthe de mon sac.

« Allez, faisons connaissance ! J’commence. »

Après avoir bu une gorgée de ce qui pourrait tout aussi bien être de la mort-aux-rats, je me suis présenté. J’ai évité de lui parler d’emblée de Yuimen, mais je lui ai fait comprendre que j’étais nouveau dans le coin.

« J'ai causé avec leur cheffe, belle dame. Et toi, malchanceux ? »

Je lui ai tendu la boisson. Il avait d’abord l’air en proie au doute, puis il s’est résigné à boire une rasade. Il a failli s’étouffer. Tout grimaçant, il a commencé à cracher le morceau.

Après une bonne discussion, j’ai appris que j’avais affaire avec un certain Sebastian d’Yvoir, dernier représentant d’une Maison des Voies Hautes en pleine déchéance. En manque de moyens et de talent, il s’est endetté avec la famille d’Esthalor, que je connaissais à travers les deux gradées du Soleil Noir. Incapable de payer sa dette, il a été condamné à trois mois dans les Bouges. Les biens de sa Maison ont sans doute été saisis par d’autres depuis. Dès son arrivée, il a été recruté par les Hordes, un groupe hétérogène qui semblait être là où finissaient la majorité des condamnés. Sans hiérarchie claire, aucune notion de pouvoir ou de privilège, ils envoyaient leurs nouvelles recrues au casse-pipe, comptant sur le nombre pour ramener assez de nourriture lors des affrontements chaotiques aux portes des Bouges. Ils étaient mal équipés et la stratégie n’était pas leur fort, mais ils avaient néanmoins assez de cohésion pour agir comme une seule entité. Sans chefs précis, il serait dur de faire des accords avec eux, mais c’était peut-être un vide à exploiter.

Je lui ai ai demandé de me parler des autres clans. Il en connaissait deux : le Clan des Chaînes et le Clan Carmin. Le premier groupe était selon lui une bande de sadiques qui prenaient plaisir à accrocher leurs victimes aux murs après les avoir complètement brisées, un groupe qu’il valait mieux ne jamais croiser. Le Clan Carmin était un rassemblement de soigneurs qui traitaient souvent avec les Hordes. Ils étaient capables de remplacer membres et organes, mais ils en demandaient d’autres en compensation. La survie d’une personne dans les Bouges se faisait bien souvent au détriment d’une autre. Pour ce qui était du Soleil Noir, arbitre de tout ce joli ménage, ils semblaient se contenter de larguer la nourriture lors du Don et d’observer les combats.

Sebastian avait été capturé lors du dernier affrontement par les Maraudeurs Noirs, alors qu’il essayait de fuir. Il en était à son trentième jour dans cette prison souterraine.

« Trois mois hein ? T’as déjà vu des gens revenir des Bouges ? »
« Oh, peu de ceux qui sortent des Bouges ont le loisir de monter jusqu'aux Voies Hautes, vous savez. Donc je n’en ai pas vu, mais il y en a. Ah si, il y a ce curieux personnage, aussi... d’Orthel. Saltype, Salmeck, je ne sais plus trop bien. Il habitait non loin de ma Maison, sur les Voies. On disait qu’il venait des Bouges, lui. Mais le mystère l’entourait, et il y avait surtout des rumeurs. »
« Quoi comme rumeurs ? »
« Oh... bah. Comme quoi c’était un sorcier. Qu’il avait été placé là pour espionner les Voies Hautes par des mages des Bouges. Des trucs comme ça. »
« Ils voulaient quoi, ces mages, à ton avis ? »
« Heh, voir comment les gens de la vraie société vivent, pour s'en inspirer ? J’en sais rien. Mais c’est vrai que ce type était bizarre. Avec ses yeux d’un bleu intense... Croiser son regard m’a plus d'une fois donné froid dans le dos. »

Après un petit moment, j’avais décidé de ce que j’allais faire de l’ami Sebastian. Pour jauger une fois de plus son caractère, je lui ai demandé en souriant :

« Et tu comptes faire quoi si t’arrives à revenir dans la cité supérieure ? »

Il a haussé les épaules.

« Je trouverai bien. Vivre, déjà, même parmi les pauvres. Ça sera toujours mieux que survivre péniblement ici parmi les monstres. »

Vivre au lieu de survivre. Il m’avait l’air d’être un gars peu sûr de lui, sans doute parce qu’il pensait être la raison pour laquelle sa maison n’existait plus. Mais j’avais l’impression de voir en lui une petite étincelle de détermination. Je n’ai pas pu résister à l’envie de le tester encore un peu.

Je me suis levé d’un geste et j’ai fait semblant d’être dans l’embarras.

« Rhaaaalàlà, t’as pas l'air d'un mauvais boug’, mais tu m’as donné aucune bonne raison de t’aider, jusque-là. J’essaie de survivre, moi aussi... Pourquoi je devrais t’aider toi et pas un autre ? Je suis vraiment désolé, mais voilà... »
« Heu, mais... J’ai partagé mes connaissances ! J’pourrais faciliter les choses si on rencontrait les Hordeux. Je... »

Je le regardais du coin de l’œil.

« Rha laisse tomber, tu vaux pas mieux qu’les autres de toute façon. »

Puis il s’est mis à bouder. Cette réaction m’a conforté dans l’idée que même s’il était rongé par le doute et le défaitisme, il se débattait avec ce que j’estimais être une forme de courage. Après tout, il ne m’avait pas dit « viens me libérer », il avait dit « nous ». Je me suis retourné vers lui, tout sourire.

« Ah ouiiii ? J’aimerais bien rencontrer les Hordeux, c’est vrai. Bon, t’sais quoi ? Je t'aime bien, Seb’. J’vais voir ce que je peux faire pour toi. »

Sur ce, j’ai commencé à sortir de l’enclos. En partant, j’ai croisé le regard d’une jeune femme aux cheveux blancs, portant une clé autour du cou. Tout autour d’elle, les autres détenus avaient des mines dépitées, mais quelque chose, je ne sais pas vraiment quoi, m’a accroché dans son regard.

J’ai observé mes alentours à la recherche de la personne qui était à la charge des détenus. Je me suis tourné vers le premier venu :

« Hé, j’ai une proposition par rapport aux prisonniers. Je parle à qui ? »

Faute de rien, je n’avais qu’à demander à Evanie elle-même. Nul doute que ma bourse allait être mise à contribution. Bien que j’avais décidé de m’allier aux Maraudeurs, je n’étais pas un des leurs, du moins pas encore. Il me fallait mon propre entourage, et si ça devait être une bande de bras cassés sortis du fin fond des abysses du désespoir, eh bien ça n’allait pas me changer de d’habitude !

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Dracaena Paletuv
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Re: Les Bouges

Message par Dracaena Paletuv » sam. 10 mai 2025 02:54

Tout l'monde nous regardait bizarrement, murmurant à notre approche, et cherchant à nous éviter. Une situation... incroyablement classique pour moi. J'n'aurais presque pas remarqué la différence si ç'n'était pas pour la réaction de Leyna à coté de moi. Clair'ment, les gens du coins se méfiaient. Après, si c'était à cause de nos tronche, du fait d'voir un arbre qui marche, ou simplement du fait qu'on était nouveaux, ça, j'pouvais pas encore dire.

Sur la route, j'avais essayé d'mater d'tous les côtés, histoire d'voir si j'repérais un truc suspect (enfin... plus suspect qu'tout l'reste), ou un peu original, mais nan, juste des tentes et des gens tirant la gueule. Y avait bien une des dites tentes qui semblait mieux gardée qu'les autres, avec un mec en armure qui surveillait à l'entrée, mais c'était probablement leur réserve de bouffe, d'arme, ou d'argent. Ou alors la tente d'leur grande chef. Mais bon, l'absence d'cri d'Sirius m'faisait penser que la dernière option était la moins probable.

Voyant qu'on arriv'rait à rien dans cette situation, j'décidai d'retourner voir la gugusse qui nous avait am'née ici. J'proposai à Leyna d'm'accompagner, mais quelque chose semblait avoir attiré son attention. J'étais pas enchanté à l'idée d'se séparer, mais fallait bien jouer l'jeux d'nos hotes pour le moment, et essayer d'remettre la main sur Sirius.
Je prévins Leyna d'mes intentions, lui recommandant de faire très attention à elle en mon absence, avant d'rebrousser chemin vers celle qui nous avait "recrutée".
L'apercevant dans son coin, je lui fis une courbette (n'oublions pas la politesse, même dans un dépotoir comme ça), et j'engageai la conversation:


"R'bonjour. D'solé d'vous déranger, mais j'ai chercher du taff dans l'camp, et j'y ai trouvé qu'des regards méfiants.

J'peux pas les blamer, j'ai une tronche atypique, héhé.

Du coup j'me suis dis qu'j'allais suivre vot' conseil et rev'nir vers vous. Z'auriez b'soin d'moi pour quoi? "




Elle leva un sourcil. Truc un peu rigolo qu'les êtres de chair faisaient parfois. J'arrivais pas à dire dans l'cas présent si ça signifiait sa surprise à mon propos ou à ma gestuelle.

"Rien d'étonnant. Vous viendrez en patrouille avec moi, si vous voulez vous faire un nom parmi les miens. Mais je dois d'abord m'assurer d'une chose : pouvez-vous vous battre, être de bois ?"

"Me battre?"


Un ricanement s'échappa bien malgré moi, tandis que je révélais l'un d'mes bras couvert de brulures, de trace d'entaille et autre, certaines plutôt récentes.

"Croyez moi, j'me suis pas fait tout ça en f'sant du jardinage.
Mais plus sérieus'ment, oui, j'sais m'battre. Par contre, y a un détail qui va changer pas mal de chose:"



Vu le chang'ment drastique d'ambiance dans cette zone, j'me permis d'aborder le grand sujet tabou du coin. Vérifiant que personne d'autre ne puisse m'entendre, je me mis à dire d'une voix plus discrète:

" Niveau "magie", ça s'passe comment ici, dans les Bouges?
Les boites de conserves noires m'ont traquées et presque étripées pour une étincelle, sois disant qu'ça mettait en danger tout le monde.
Est-ce la même chose ici bas?"



Après tout, mon passage à Aliaénon semblait m'avoir débloqué quelques nouvelles possibilités. Et si j'allais d'voir m'défendre , autant être sur que j'puisse les exploiter.

"Ils vous traqueront aussi, et voudront vous payer un allez simple vers les Tréfonds. Après vous avoir étripé."

Ah. Charmant. Ils y tenaient à leur pseudo immortalité...
La femme changea d'expression, affichant un air plus sérieux, plus grave. Pourtant, elle semblait vraiment détendue en continuant sa réponse.

"Il suffit de l'utiliser quand ils ne sont pas là. Toute arme est bonne à prendre."

"Oh? Ohohohoho... Je vois je vois. Comme à la maison donc..."


C'était une sacrée bonne nouvelle ça. Cacher ma magies à des abrutis fanatiques, ça allait presque me rendre nostalgique. Mais bon, autant être complèt'ment sur...

"Ils avaient l'air d'avoir un truc pour détecter que j'avais lancé des sorts, une histoire de "trace" que la magie avait laissé. Ca ne fonctionne pas ici? "


"Si."

Ok... Mais encore? Je me mis à la regarder intensément, suspendu à ses lèvres, attendant clair'ment la suite. Après un court silence, elle soupira, probablement agacée, et repris:

"Ils sont moins nombreux que là-haut, même si plus fanatiques encore. A moins de lancer un sort sous son nez, un chevalier ne va pas vous poursuivre partout. Ca serait inconscient : c'est le meilleur moyen de les attirer dans un piège, et ils le savent."

"Ah. Je vois. VRAIMENT comme à la maison. Bon, j's'rais pas perdu, merci."


J'plaisantais quand j'parlais de nostalgie plus haut, mais la... La j'allais vraiment me r'trouver dans mon ancien élément. Ce....ça n'm'enchantait guère en réalité. Trop d'mauvais souv'nir à devoir me cacher pour éviter l'courroux de crétins fanatiques, ou d'autres obsédés de gloire me voyant comme une bête de foire...
S'que j'ret'nais surtout de son propos, c'est que les boites de conserves noires étaient pas aussi bien installées ici que plus haut, et qu'en occir une ou deux allait pas rendre trop triste les locaux. Bon à savoir.
Bon, j'avais des infos, j'avais une nouvelle intéressante, et j'avais une mission pour le moment. Me restait plus qu'à m'assurer d'une chose:

"Puis-je aller proposer à mes compagnons de nous accompagner dans votre patrouille, ou vous voulez partir de suite?"


Parce qu'une fois de plus, se séparer dans cette histoire me semblait une bien mauvaise idée. Alors quitte à faire le pillard sympa et gagner des bons points auprès des mafieux locaux, autant le faire à plusieurs.

"Faites. Plus on est de meurtriers, plus on rit."

J'aimais bien la formulation, et l'envie de lacher un petit rire d'appréciation me traversa l'esprit, mais l'expression inchangée d'mon interlocutrice me fit me d'mander si c'était une si bonne idée que ça. J'imaginais qu'c'était comme ça qu'la plupart des non habitués aux oudios voyaient ma tronche: indéchiffrable et bougeant pas particulièr'ment?

En tout cas, ayant maint'nant d'quoi faire, je fis une courbette d'au revoir, avant de revenir sur mes pas, essayant de retrouver Leyna pour lui annoncer la nouvelle.
En chemin, je cherchais ardemment Sirius au milieu de tout ce beau monde, espérant apercevoir sa tête mono oculaire au milieu de tous les malheureux du coin: avec de la change, il n'avait rien dit de stupide cette fois ci.

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Ezak
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Re: Les Bouges

Message par Ezak » sam. 10 mai 2025 06:06

Ezra, Xël et moi pénétrâmes dans l'arrière-boutique, un long couloir étroit percé de plusieurs portes robustes. L'endroit était éclairé par des chandeliers aux flammes rouge sang, projetant sur les murs une lumière inquiétante et diffuse. Une cascade de masques souriants, figés dans une éternelle grimace crispée, constituait la seule décoration, chaque visage enchaîné à l'autre comme les maillons d'une étrange chaîne morbide.

Notre guide au sourire figé s’arrêta devant nous, indiquant calmement :

« Chacun une salle. Vous paierez à la sortie. Je vous souhaite de bons soins. »

Malgré la douceur presque maternelle de sa voix, son expression ne cessait de me troubler profondément. Je poussai néanmoins l'une des portes pour pénétrer dans une pièce sobre et austère. Celle-ci était étroite et dépourvue de tout ornement, hormis un lit de pierre glaciale semblable à un autel funéraire, placé au centre, dans l’axe de la salle. Les murs nus et gris montaient vers un plafond obscur, donnant à l’endroit une ambiance sinistre.
La faible lumière provenait d’une vasque posée sur un carré de tissu en tête du lit, remplie d'un liquide écarlate semblable à du sang. À sa surface, flottait un étrange crâne rouge qui se dissolvait lentement, diffusant de minces volutes écarlates.

Derrière l’autel se tenait une silhouette immobile, enveloppée dans une longue cape rouge dont la capuche plongeait le visage dans une obscurité totale. Sans prononcer un mot, l'étrange figure me désigna d’un simple geste du bras le lit de pierre, m’invitant silencieusement à m'y étendre.
Je restai quelques instants immobile, scrutant cette mystérieuse apparition avec un mélange d’appréhension et de méfiance. Après un long silence, je finis par exprimer ma légère irritation devant ce mutisme :

« Pas même un bonjour ? Une explication au moins ? »

La silhouette resta immobile un court instant, avant de répondre enfin d’une voix neutre et féminine :

« Quelles blessures doivent être soignées ? En détail. Allongez-vous. »

Résigné, je détaillai précisément l’étendue de mes blessures :

« Toutes les blessures. Les os de ma jambe droite, de mon nez, mes côtes, la plaie à ma gorge et mon bras droit, pour les plus graves. Et ne touchez surtout pas à ma prothèse de jambe gauche, je suis bien comme cela… Vous pouvez aussi vous occuper de ma petite blessure au menton. »

Je pris une inspiration, puis je m’étendis lentement sur la surface froide et dure de l’autel, une pointe d'inquiétude s'infiltrant tout de même dans ma voix :
« Ce sera douloureux, long ? Y aura-t-il des effets secondaires ? »

L’individu répondit calmement, presque mécaniquement, cherchant visiblement à me rassurer :

« Douloureux, non. Long, ça dépend de la complexité. Aucun effet secondaire indésirable à noter. »

Elle laissa passer un bref silence avant d’ajouter :

« Prêt ? »

J’expirai lentement, choisissant de lui accorder ma confiance malgré tout :

« Allons-y ! »

Sans un mot supplémentaire, elle leva lentement une main vers la vasque. Le liquide rouge devint soudainement plus volatil, et le crâne reprit brièvement forme dans un éclat écarlate. Une étrange sensation m'envahit : mon esprit se brouilla, ma conscience vacilla, puis tout bascula, me plongeant inexorablement dans un profond sommeil.

Le sommeil m’envahit, mais très vite, au lieu du repos réparateur espéré, je basculai dans un univers inquiétant, plongé dans une brume rougeâtre épaisse, suffocante, à la couleur du sang versé. Je me tenais dans la grande salle du palais royal, à Kendrâ-Kâr, où j’avais autrefois reçu l’honneur de l’adoubement. Tout semblait semblable au souvenir que j’en gardais, mais à présent, les murs étaient couverts de rideaux écarlates suintant de sang. Le sol autrefois immaculé était inondé d’un liquide rouge, chaud et visqueux.

Au bout de la salle, la princesse Satina, silhouette pâle et délicate, se dressait devant moi vêtue d’une robe d’un rouge vibrant. Son visage arborait un sourire figé, terriblement semblable aux masques des Carmins. Elle s’avança lentement, le bas de sa robe s’imbibant de sang à chaque pas. Elle murmura doucement, sur un ton sinistre :

— « Ezak d’Arkasse, chevalier… Protecteur ou bourreau ? Regarde ce que tu as fait… »

Je baissai les yeux vers mes mains, couvertes de sang frais. Affolé, je reculai, mais mes pas pataugeaient dans une mare rouge infinie. Derrière moi, une silhouette massive apparut, vêtue d’une armure rouillée, l’épée levée comme pour un adoubement macabre. Le Roi, jadis fier et majestueux, n’était plus qu’un spectre ensanglanté, visage creusé par une mort récente.

— « Chevalier du sang versé… » dit-il, alors que la lame s’abaissait vers mon épaule, non pour adouber, mais pour condamner.

Avant que la lame ne me touche, le décor changea brutalement. Je me retrouvai projeté dans le sombre bagne où j’avais été retenu prisonnier. L’odeur âcre du sang et de la mort saturait l’air. Des cadavres, empilés en amas grotesques, jonchaient les lieux. Les corps étaient rougeâtres, marqués par une étrange lueur écarlate, leurs yeux vides tournés vers moi, accusateurs.

Je marchai parmi eux, le souffle court, cherchant désespérément une sortie. Des chaînes carmines, vivantes comme des serpents, s’élevaient des murs pour me saisir, tentant de m’immobiliser. Des silhouettes encapuchonnées de rouge m’observaient silencieusement depuis les ténèbres, murmurant d’une voix accusatrice :

— « Voici ton héritage, Ezak… le prix du sang… »

Je tentai de crier, mais aucun son ne sortit de ma bouche. Je me débattis, mais les chaînes m’enlacèrent davantage, jusqu’à ce que je ne puisse plus respirer. Puis, d’un coup, le paysage se transforma encore.

J’étais désormais seul, traversant péniblement une montagne enneigée familière. Le vent soufflait violemment, chargé de cristaux de glace aussi coupants que des lames, mais là aussi, la neige immaculée était tachée de rouge, comme si le sang avait remplacé l’eau des glaciers. Chacun de mes pas s’enfonçait dans ce manteau rougeâtre. Au loin, des silhouettes encapuchonnées, rouges comme le sang, observaient mon ascension silencieusement.

Epuisé, je levai les yeux vers le sommet : au-dessus de moi, sur une crête, se tenait une figure solitaire. Elle retira lentement sa capuche, révélant un visage qui ressemblait au mien, déformé par la haine et une soif de violence terrifiante. La silhouette sourit d’un air cruel et murmura :

— « Tu ne peux fuir ta nature, chevalier… Le sang te suivra partout où tu iras. »

Le vent hurla avec violence, me poussant vers le vide, m’arrachant un cri silencieux alors que je tombais, englouti par une vague rouge sang, jusqu’à perdre toute notion de réalité, submergé par la peur, la culpabilité, et un sentiment inéluctable de damnation.
Modifié en dernier par Ezak le sam. 24 mai 2025 16:34, modifié 1 fois.

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Leyna
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Re: Les Bouges

Message par Leyna » sam. 10 mai 2025 08:40

Les guerriers noirs les observaient avec suspicion. Dans cet environnement hostile, il fallait s'y attendre... Il restait toujours le langage universel... Il y avait un grand feu au centre du camp, qui rassemblait pas mal de monde. Elle s'adossa au poteau d'une tente à proximité et sortie sa lyre pour se mettre à jouer un air apaisant. Plus loin, un homme balafré les observait. Alors que les notes s'envolaient et que les visages se détendait, elle observait fixement l'homme, qui soutint son regard sans broncher. Il allait falloir éclaircir ses intentions.

Lorsqu'elle eut terminée, elle s'approcha pour demander :

« La musique vous a plût ? »

Avec un regard sombre, il répondit :

« Non. Retournez d'où vous venez. Vous n'avez rien à faire là. »

Puis, avec un air qu'elle n'avait que trop souvent vue, il ajouta :

« Pourquoi t'es bleue ? Et pourquoi ton pote il a une tête de bout de charbon ? »

Hélas, en tant que mi-sang-pourpre, elle ne connaissait que trop bien ce regard. Au moins, avait-elle appris à gérer ce genre de situation. Elle répondit avec douceur mais fermeté :

« C'est regrettable. J'espère que le prochain morceau sera plus à votre goût. Moi et mon compagnon venons de loin. Là-bas, nos apparences sont normales. Pour nous, votre troupe semble aussi fort étrange, mais j'ai l'habitude des étrangers. Je voyage beaucoup... hélas, nos voyages nous ont menés en ces lieux qui, je l'avoue, ne sont pas des plus plaisants. »

Il marmonna tristement que les bouges ne se prêtaient guère aux arts, et s'efforça de reprendre un visage grave :

« Voyager ? N'importe quoi. Vous dites venir d'hors Ashaar ? »

« D'où notre apparence étrange, oui... Quand aux arts, ils ont toujours leur place, pour peu qu'on essaie de la leur donner. »

« Hé bien les seuls arts qui puissent compter ici sont la guerre et la survie. »

À sa tête, cela devait clore la discussion. Au moins avait-elle bonne espoir d'avoir éviter une crise et même gagné quelques faveurs de ce côté... Dracaena l'appelait, plus loin. Elle fit une petite révérence à l'homme et rejoignit son compagnon.

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Akihito
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Re: Les Bouges

Message par Akihito » sam. 10 mai 2025 10:37

Sur le qui vive, prêt à me défendre au moindre geste d’hostilité qui pouvait venir de cette embrasure à moitié effondrée, je fut prompt à réagir quand une silhouette finie par se révéler : la lancière Russelle. Au moins ne m’avait-on pas menti sur la personne qui me rejoindrait ; sans me défaire complètement de ma prudence je me détendis tout de même, me permettant même la nonchalance d’un haussement d’épaule à sa remarque sur mon manque de prudence.

« Mon compatriote m'a pas faciliter la tâche pour faire profil bas. Je voulais attendre Khalor, mais bon mieux vaut que je décampe d'ici, pour le bien de tous. J'espère juste qu'il va pas croire que je l'abandonne. »

Un soupir m’échappa, agacé par la situation.

« J'aurais bien besoin d'une guide ouais, mais je veux pas vous mettre dans une situation plus délicate que vous l'êtes déjà.

- Ne vous inquiétez pas pour lui. Il est de la maison, il ne pourra rien lui arriver de grave. Pas plus qu'à moi. Mais je suis volontaire pour vous aider à remplir la mission que notre Général vous a confiée. Ainsi, quoique disent ceux du Bastion, je reste fidèle à l'Ordre.

- Si vous étiez de notre monde, vous seriez sûrement Ynorienne. De culture, du moins. »

Elle avait vraiment l’air d’être une femme droite et honorable, ce qui semblait assez rare dans son ordre. Ca me faisait culpabiliser d’autant plus de lui cacher ce que j’étais aux yeux d’Ashaar.

« Vous avez l'air d'être quelqu'un de bien, dame Russelle, alors je me dois d'être honnête avec vous. Là d'où je viens, la magie n'ai pas aussi problématique qu'ici, et je la manie. Si les généraux Somnis et Delaube m'ont bien confié la mission dont je vous ai parlé, cette maîtrise est aussi une des raisons qui vaut mon passage dans les Bouges, pour 2 semaines. Prenez ça en compte avant de vous décider à m'accompagner. »

(Je ne sais pas si je dois trouver ça honorable de ta part, ou suicidaire.)

(Probablement beaucoup du premier, et un brin du second ?)

(Un gros brin, dans ce cas.)

« Deux semaines de sanction dans les Bouges pour usage de magie dans la Cité Supérieure ? répliqua-t-elle en haussant un sourcil, et vous semblez voir ça comme quelque chose d'accablant. Cela ne fait pour moi que confirmer la confiance que nos généraux ont placée en vous, et l'importance de votre mission.

- Accablant ? Pas vraiment. Mais ça pourrait l'être pour vous si on apprend que vous escortez un mage, alors je préférais vous prévenir. J'aime pas attirer des problèmes aux personnes autour de moi. Sauf quand leur problème, c'est moi. »

Le pragmatisme dont elle faisait preuve me convenait très bien, cependant.

« Bon, je dois retrouver demain ou après demain mon amie pour qu'on fasse le point au bordel sur ce qu'on a appris. Le point qui me semble le plus suspect dans les Bouges, ca reste la zone d'ombres magiques. J'imagine que vous avez pas envie de m'y accompagner ?

- La Zone d'Ombre ? Hm. C'est plus que suspect. De ce que j'ai compris, ce sont les mages de la SOMA qui l'ont dressée pour empêcher quiconque de les trouver. Un endroit où on se perd autant de corps que d'esprit.

- La SOMA ?

- La Société Occulte des Mages d'Ashaar. Nos... pires ennemis en ces lieux. Des mages organisés qui pratiquent la magie à l'envi, risquant tous les jours un peu plus notre condamnation à la mortalité.

- Honnêtement, quand je vois les malheureux décharnés qui n'ont pas mangé depuis des semaines... je me dis que l'immortalité ressemble plus à une malédiction. »

Une souffrance éternelle, ou la douce délivrance de la mort ? Est ce qu'on pouvait vraiment hésiter ? Visiblement, oui.

« Vous avez un autre endroit en tête où on pourrait poser des... questions aux mages ?

- Si moi ou quiconque savait où des mages se situaient au sein des Bouges, ça ferait longtemps qu'on aurait détruit l'endroit et jeté ceux-ci aux Tréfonds. Peut-être que les langues des locaux se délieraient plus facilement face à quelqu'un qui n'est pas de l'Ordre...

- C'est aussi pour ça que mes confrères sont sensés s'infiltrer, moi je suis pas le plus doué pour ça. Il nous reste plus qu'à patrouiller et espérer tomber sur quelque chose d'intéressant ? C'est comme ça que vous procédés, habituellement ? »

Elle s’étonna de ma formulation, demandant combien de Yuiméniens parcouraient les Bouges. Mathis, Yliria, Xël et moi pour sûr, mais les autres ? J’ignorai où ils pouvaient bien être. Ni combien étaient arrivés, au final.

« Medalie n'a pas tort de penser qu'un avertissement aurait été bienvenu de la part de l'Entresol. Là, on risque juste de leur compliquer la tâche...

- Je sais pas vraiment, mon amie pourra nous en dire plus quand on la rejoindra au Bordel.

- Je comprends la logique hein... mais vous pouviez pas trouver un autre endroit que le Bordel pour votre rendez-vous ? Et vous disiez demain ou après-demain... Comment le saura-t-on ? »

je levai les mains paumes vers le ciel, en un signe d'impuissance.

« C'est le seul endroit reconnaissable qu'on m'a présenter comme "à peu près sûr" et dans lequel des types de l'ordre comme des condamnés pouvaient se retrouver. Pour échanger avec ceux qui doivent rester discret car infiltrés aux clans ou aux mages, j'ai pas pensé à mieux. Pour le jour, c'est surtout une marge d'erreur. On m'a vendu les Bouges comme un véritable bordel sans nom, sans moyen précis de se repérer dans le temps. alors j'ai prévu large. »

J’avais fait avec ce que j’avais, je disais pas que ma solution était la plus optimale. Revenant sur ma question des procédures des Chevaliers de l’Ordre pour enquêter, elle résuma rapidement ce que j’avais déviné.

« Patrouilles, planques, enquêtes sur les rumeurs qui nous parviennent de la part d'indics qui souhaitent une peine allégée. C'est le quotidien des Chevaliers, effectivement. Et parfois, une arrestation. Encore plus rarement, un gros coup avec plusieurs coupables.

- Faute de mieux, on part sur quoi ? Patrouille, planque ? demandai-je en rassemblant mes affaires et en incorporant une partie des rations qu’elle avait apportée à mon paquetage, lui laissant le temps de réfléchir.

- Ca dépend : autant ne pas perdre votre temps pour rien. Soit on enquête sur la Zone Noire, voire y faire une planque pour apercevoir du mouvement, soit on... cherche des informations concernant des mages isolés. Dans des endroits comme le Bordel, par exemple.

- C'est loin d'ici ? Et de la Zone Noire ?

- Le bordel est un peu plus proche, mais pas du tout sur le chemin de la Zone Noire. Donc c'est un poil plus long, de s'y rendre depuis le quartier des... enfin. Des Vivants-morts. Et... niveau sécurité, j'imagine que ça dépend un peu de son point de vue, ici bas. Le Bastion est la zone la plus sûre, pour moi. Là-bas... C'est surtout que les Dames font la loi, et que nul n'oserait user de violence de peur de se voir privé de leurs... services. »

Un sourire sardonique étira mes lèvres : même ici-bas, les vices des êtres vivants continuaient d’être « l’alpha et l’oméga », pour reprendre une expression d’Amy.

« Plus sûr, mais pas le plus discret. Vous pensez qu'on a le temps de faire une planque de un ou deux jours à la Zone puis revenir au Bordel ?

- Le temps, on l'a. Mais vous risqueriez d'arriver en retard à votre rendez-vous. Ce... prisonnier qui est venu à votre rencontre, et que Thyers accompagne, il s'y rendait déjà, non ?

- Mathis, oui.

- Il devait s'y rendre en avance ? »

j'haussai une nouvelle fois les épaules.

« J'en sais trop rien il a l'air d'avoir ses propres plans maintenant. Pas pour me voir, en tout cas. »

C’était sans compter sur s’il était effectivement arrivé au Bordel sans que ça tourne au vinaigre avec son escorte… Il savait se défendre, plus que bien même, mais survivre dans les Bouges était une autre histoire de ce que j’apercevais.

- Vous semblez un peu désorganisés, à dire vrai. Ainsi donc, vous souhaitez que l'on aille aux abords de la Zone Noire ?

- Notre arrivée a été chaotique, c'est le moins qu'on puisse dire, soupirai-je avant d'acquiescer. Sauf si vous avez une meilleure idée : c'est vous l'experte pas moi.

- C'est là que vous aurez les meilleures chances de croiser un mage de la Soma. En sachant que c'en est un, en tout cas. Mais on pourrait aussi faire chou blanc. Vous... vous avez songé y pénétrer ?

- C'est une option, oui. Mais je compte d'abord faire un point au Bordel avant de m'engager là dedans. »

Si je lui expliquait que je redoutais la réaction de mon « amie » si je prenais ce risque sans la prévenir, elle aurait encore plus de raisons de nous trouver désorganisés.

(La question se pose même : est ce que vous avez déjà été organisés ?)

(Touché.)

« Vous vous sentez prêt à affronter à nouveau le quartiers des cannibales ?

-… Pourrais-je user de ma magie que j'aurais une demi-douzaine de façons d'intimider les cannibales, ou de m'enfuir le cas échéant. Mais bon, je sens que je vais devoir repasser par là, alors autant prendre mes marques maintenant. »

Ma formulation pouvant prêter à confusion, elle fronça les sourcils.

« Absolument pas. Mais ne vous inquiétez pas : je vous protège. Et la confrontation directe n'est pas toujours la meilleure idée.

- C'est pas moi qui vais dire le contraire. Allons y alors. »

Je laissai Laédia ouvrir la voie, l'observant de dos alors qu’elle sortait de la masure. Me « protéger »… ? Deux protecteurs se protégeant mutuellement, c’était cocasse.
Bah, on avait jamais trop de personnes prêtes à nous aider face à des dizaines de cadavres ambulants.

(Cadavres ambulants cannibales.)

(Toujours dans le souci du détail, hein ?)

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Cromax
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Re: Les Bouges

Message par Cromax » sam. 10 mai 2025 11:36

La Cité des Ombres



Les Bouges



Jour 2 – Après-midi.




Xël et Ezak s’éveillèrent chacun dans leur salle, totalement seuls. Plus aucune présence encapuchonnée de rouge. Plus de remous dans le bol carmin, plus de forme de crâne. Juste eux... Et une absence totale de douleur. De dommages sur leur corps. Ils avaient été intégralement soignés. Ils garderaient sans doute l’une ou l’autre cicatrice, mais elles ne seraient désormais plus guère que le souvenir de blessures disparues.

Quand ils sortirent de la salle d’opération, ils retrouvèrent Ezra en discussion avec leur hôte d’accueil au sourire figé.

“Nous n’avons pas souvent à faire avec les membres de votre Ordre, dame. Mais c’est un réel plaisir de faire à faire avec vous.”

Puis, iel se tourna vers les deux hommes en armure lourde.

“Ah. Voici deux hommes neufs. Alors, le prix en vaut-il la chandelle ?”

C’était une manière détournée et élégante de demander leur dû.



________________________________



Du Chevalier sanglant répondant au pseudonyme de Strix, Huyïn n’obtint aucune réponse. Son armure, figée, semblait comme “déshabitée”. Vide, creuse. Sans plus aucun mouvement de vie. La créature de l’Ordre Carmin qui rampait toujours avec peine vers lui répondit d’une voix faible :

“Mon... sang... Rendez-moi mon... sang.”

La chose regardait le chat, comme s’il lui avait volé ses propres fluides vitaux. Ses yeux vitreux tentaient de maintenir son regard, non sans difficulté. Ses doigts tremblaient dans sa direction.



________________________________



Mathis suivit la fleur de nuit dénommée Rubis à travers la foule. Il ne capta rien de plus que de la débauche autour de lui, toujours de manière détournée et imprégnant ses propres sens. Comme si les visages étaient flous, que les corps étaient liés sans qu’il les perçoive dans leur ensemble. Comme s’il était pris de fièvre et d’illusions, sans les effets négatifs.

Son esprit s’éclaircit lorsqu’il rencontra celle qui lui fut présentée comme la Maîtresse des Lieux. Assise dans un canapé confortable orné de deux prostituées aguichantes, une dame d’un certain âge et d’un certain poids attendait dans une robe bordeaux qui eut dû être élégante si elle n’avait pas été élimée jusqu’à la trame à certain endroit. Carrément trouée à d’autres. Totalement chauve, le visage couvert d’un maquillage outrancier, elle fumait la pipe et regarda le jeune homme d’un air sévère et curieux.


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“Tu es face à la Grande Maquerelle, l’étranger. N’as-tu pas trouvé ton bonheur, que tu viens me voir ?”

Sa voix était rauque, en provenance d’une gorge irritée par la fumée. Le ton peu amène.



______________________________



Au sein du camp des Maraudeurs, Leyna était retournée voir Dracaena. Tous deux avaient discuté avec des membres du clan. Peut-être souhaitaient-ils partager cette expérience ? Ils aperçurent au loin, en bordure du camp, le Capitaine Sirius près de ce qui semblait être un enclôt de prisonniers. Il s’adressait à un garde du coin, un homme au visage marqué de cicatrices qui avait sans doute vu passer de nombreux combats, malgré une apparence plutôt jeune.


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Le duo était trop loin pour entendre ce qui se disait, au contraire de Hart qui put écouter la réponse à sa question.

“A moi, ils sont sous ma responsabilité. J’t’ai vu leur parler. Qu’est-ce que tu leur veux ?”

Il n’y avait pas d’amabilité dans sa voix. Du soupçon, de la fermeté, une certaine agressivité latente.



_______________________________



Akihito se laissait mener par la Chevalière Russelle, à travers un paysage de ruelles sombres qu’il re reconnaissait que trop bien. Pas qu’ils usèrent du même chemin qu’avec Thyers, mais l’endroit était tout de même reconnaissable. Semblablement à l’odeur de charogne sans cesse plus forte à mesure qu’ils avançaient, se rapprochant et pénétrant le quartier des Vivants-Morts.



À un croisement, Russelle poussa Aki vers un mur, posant un doigt sur ses lèvres dans un “Shhht” sonore. Elle désigna du doigt, plus loin, une créature qui dut être une femme, mais désormais effrayante par la puissance qui se dégageait d’elle. L’horreur qui marquait ses traits. Une matrone costaude, au visage couru de veines saillantes, aux lèvres violettes et aux dents mal soignées. Au regard vide et à l’expression belliqueuse.


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Elle grognait, criait des borborygmes incompréhensibles face à une troupe d’êtres en piteux état : membres manquants, visages déformés, lèvres dévorées, corps meurtris. Ils n’étaient pas sans rappeler à l’ynorien la bande de... choses qu’il avait combattu la veille. Sauf que ceux-là semblaient calmes et dociles. Pour l’instant en tout cas.


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Russelle souffla à son protégé :

“C’est une mage. Elle exerce un contrôle magique sur eux. Vous voulez... l’aborder ? Mes Vœux m’indiquent de l’arrêter scéant, mais la situation a l’air complexe. Elle pourrait également apporter des réponses à vos questions... Si tant est qu’elle puisse encore s’exprimer clairement.”

Akihito devait prendre l’initiative du prochain mouvement. Foncer dans le tas ? Aborder le groupe posément, ou tenter de passer furtivement ?



[HJ : Ezak et Xël : On peut aparter ce passage et le retour vers Blanche et Lyrie. Huyïn, on peut aparter avec le Carmin-blanc. Mathis, on peut également aparter la rencontre. Drac et Leyna : indiquez moi au plus vite ce que vous faites : rejoindre Hart (auquel cas on lancera une discussion à quatre), discuter entre vous (vous pouvez librement aparter : je peux vous créer un sujet commun) ou aller voir d’autres personnes/coins du camp (auquel cas vous aurez l’un et/ou l’autre des consignes supplémentaires. Aki, dis-moi dans ta partie ce que tu fais, et je te donne des consignes plus précises en fonction.]



[XP :
Xël : 0,5 (rêve), 0,5 (soins). A ton réveil, tu auras une rune Ari (détruire) posée sur le buste.
Huyïn : 2 (événements de la Pierre de Sang).
Mathis : 0,5 (discussion), 0,5 (reach the boss)
Hart : 0,5 (discussion), 0,5 (demande)
Drac : 0,5 (inspection du camps), 0,5 (discussion)
Ezak : Noté quand complété.
Leyna : 0,5 (discussion), 0,5 (exploration du camp)
Akihito : 0,5 (discussion), 0,5 (départ vers la Zone Noire)]

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Mathis
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Re: Les Bouges

Message par Mathis » jeu. 15 mai 2025 17:32

C’est ainsi que j'ai suivi Rubis à travers ce bâtiment, véritable lieu de débauche. Peu de temps après, j’arrivai devant la patronne du bordel. Assise sur un canapé, entouré de deux prostituées affriolantes, la corpulente femme d’âge mûr, vêtue d’une robe rouge foncée ayant connu de meilleurs jours, me scruta d’un air sévère.

“Tu es face à la Grande Maquerelle, l’étranger. N’as-tu pas trouvé ton bonheur, que tu viens me voir ?”

Je saluai cette femme chauve à la voix rauque d'un signe de tête poli, et je lui répondis:

"Merci de m'accueillir ici. Je me prénomme Mathis, je viens d'un autre monde. J'ai bien l'intention de trouver le bonheur auprès de Rubis, mais j'aimerais bien d'abord pouvoir faire soigner mes blessures. J'ai de quoi payer."

L’odeur de la pipe m’incommodait légèrement, mais je fis mine de rien, il était hors de question que j’insulte la dame qui pouvait me venir en aide, peu importe son apparence ou les odeurs qu’elle dégageait. Pour le moment, ma réponse la fit rire, ce qui s’avérait un bon départ pour moi.

"Ahah ! D'habitude c'est ici qu'on va visiter d'autres mondes, on n'en vient pas. T'es un marrant, mon mignon. La Rubis t'a tapé dans l'œil, alors. Et quoi, tes blessures t'empêchent de prendre ton pied, mon chou "

Des visiteurs d’autres mondes, je sentis un espoir naître de m’en sortir. Je me dépêchai alors de la questionner davantage.

"Vous avez piqué ma curiosité, quels mondes visitez-vous et par quel moyen, ? Car je cherche à retourner chez moi... "

Après avoir jeté un bref coup d'oeil à Rubis, je répondis:

"En effet, mes blessures me contraignent dans mes mouvements, je trouverais dommage de ne pas profiter pleinement du moment. "

Mes espoirs furent vite anéantis, lorsqu’elle précisa de quoi il s’agissait.

"Ceux du plaisir et des interdits. Des mondes qui vous font vous échapper d'ici. Quant à nos moyens... voilà un secret qui ne sera pas révélé. Huhuhu."

Rubis me vint alors en aide en intervenant

"Il souhaite payer pour profiter de soins."

Reprenant son sérieux, la maquerelle m’interrogea.

"Qu'êtes-vous prêt à payer ?"

Je repensai alors à ma courte discussion avec le chevalier Thyers, celui-ci m’ayant précisé que l’or n’était pas la seule monnaie d’échange. Ayant observé que la maquerelle outre son épais maquillage, était ornée de nombreux bijoux.

Je lui fis donc une première proposition.

"Je possède quelques biens, dont ce magnifique médaillon" dis-je en le retirant de mon cou, tout en le montrant en évidence.

En se penchant vers moi afin de mieux observer mon médaillon, elle ne s’occupa guère de ce que son décolleté venait de dévoiler. Quant à moi, je n’avais pas d’intérêt pour ce dernier, mais plutôt pour celui de Rubis.

"C'est une belle babiole, ton truc. Mais c’est pas de l'or. J'suis pas une catin à qui on refile un bijou après l'avoir sautée, moi, mon gaillard. Il va falloir faire tinter de ce métal précieux si tu veux faire plaisir à la Patronne."

Voyant qu'elle n'appréciait pas le médaillon, je fouillai dans ma bourse et je lui tendis une pièce d’ or, espérant que cela sera suffisant.

"Oooooh, voilà qu'il se met à parler ma langue."

Cette fois, il n’y eut aucune hésitation, elle s’empara rapidement de ma pièce et l’enfoui dans son décolleté.

"On va prendre soin de toi mon joli. Rubis, tu l'emmènes ?"

Je la saluai, puis je suivis Rubis.

((( Mathis suit Rubis, tout en tentant d’être à l'affût du moindre danger. )))

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Huyïn
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Re: Les Bouges

Message par Huyïn » ven. 16 mai 2025 22:03

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Pas la moindre réaction de l'armure, restant à sa place comme une coquille vide. En revanche, le carmin rampant dans sa direction se fait loquace. Autant que possible vue l'absence évidente du moindre fluide dans son corps. L'être a de grandes peines à se mouvoir, et lui intime de lui rendre son sang. Le Tigre demeure à distance respectable, ne sachant pas à partir d'où l'un des membres du clan peut agir sur le cadeau empoisonné donné. S'il est toujours en lui. Huyïn lui demande alors ironiquement ce qui lui fait penser qu'il a les moyens de renverser l'acte subi. L'être pâle l'informe en avoir les capacités. Ce qui irrite le plus le Félin, c'est qu'à sa façon de le dire, il est accusé d'avoir perpétré la ponction sanguine. La chose l'agace et il se décale sur le côté, ouvrant le bras pour désigner l'armure et le cristal. Il lui intime d'aller porter ses doléances à qui de droit, parce que prendre possession du sang d'autrui n'est guère dans ses cordes. Même si le résultat est pourtant là : lui se porte plutôt bien et l'autre est sec comme un fagot.

Sa respiration rauque et sifflante ne l'empêche pourtant pas de s'exprimer.

"Maudits... vous comme lui. Les miens vengeront ma perte. Et le sang coulé de votre précepteur."

L'appendice caudal du Woran fait un bref à-coup au terme employé. Il fait alors l'effort de mettre un genou au sol pour que son cadavérique camarade n'ait pass à se rompre la nuque en prime.

"Mmh. Cryptique, mais pour une fois intéressant. Vous voulez du sang ? Dites-moi clairement ce qui est arrivé à mon précepteur."

"Le mien. Il coule... en vous. Je ne sais de votre... précepteur qu'une chose : il ne vous... accompagne pas. Gnh. Et du sang tâche vos habits."

Huyïn plisse les yeux à l'instant où il comprend que le terme de précepteur ne désigne pas du tout la même personne pour eux. Lui fait référence à l'Hinion manquant, l'autre au chaperon étêté. Le Tigre se redresse, grandement désintéressé, et se laisse aller à maugréer, mettant tous les carmins dans le même panier, à l'accuser sans rien connaître des faits. Toutefois, en se remémorant l'attitude de son muet interlocuteur, il se doute que le rampant ne devait pas avoir son bien à l'esprit.

"Vous par contre... Vous avez été de toute évidence attaqué par le cristal et pas moi. Pourquoi ?", demande-t-il, faisant un bref pas pour rester hors de portée.

L'individu au sol continue de ramper dans sa direction malgré son état d'épuisement, et Huyïn n'a guère l'intention de lui laisser aisément la possibilité de le toucher. Pourquoi devrait-il prendre le risque de croire les paroles de l'inconnu ? Il a beau prétendre ne vouloir reprendre que son propre fluide de vie, n'importe qui capable d'un tel transfert risque de ne pas s'arrêter là. D'autant plus qu'il a été question d'être vengé par ses pairs. S'il peut le faire lui-même, Huyïn est presque sûr qu'il ne manquera pas l'occasion de prendre plus que le nécessaire.

"Maudit. Et revanchard. Je... je n'accuse pas je... constate."

"Vous deviez vous douter que le cristal n'apprécierait pas votre présence. Que faites-vous ici ?"

"Gnnh. Senti votre... présence. Strix n'a... jamais attaqué, avant."

Le Tigre fronce légèrement la truffe. Est-ce que le breuvage effroyable l'a bel et bien marqué d'une façon ou d'une autre pour pouvoir ainsi être senti ? Ou alors l'être se terrait dans les environs et est resté planqué en le voyant approcher ? Non, sans doute pas. Le cristal s'est mis à battre comme un cœur emballé à l'approche de l'importun, apparemment. Pourquoi ne pas s'être fait connaître quand il l'a vu en tête à armure avec le Chevalier Strix ? Un être maudit et revanchard mais qui n'aurait jamais attaqué avant, d'ailleurs ? Pourquoi le qualifier de cette façon alors ? Et s'il est adepte de la revanche et que la chose est connue... Pourquoi ce carmin s'est-il aventuré sur cette place ?

Huyïn demeure quelque peu circonspect, mais cet échange a au moins eu le bon goût de lui apprendre quelque chose : son interlocuteur sait qu'un chaperon lui a été attribué. Il était donc potentiellement dans les parages ou même dans l'assemblée lors de sa détention. Et puisque le pâle être n'est pas spécialement en position de force pour négocier son silence, peut-être va-t-il enfin avoir une réponse en bonne et due forme quant à la situation de Naral Shaam. Le Tigre prend donc le risque de s'accroupir face à son interlocuteur, prêt à faire un petit échange.

"Répondez de façon satisfaisante à ma question suivante. En contrepartie, je m'engage à faire un geste à votre endroit et vous rendre ce qui vous appartient de droit.", fait-il, marquant une brève pause pour que l'individu comprenne bien, puis il poursuit. "L'elfe blanc à la chevelure mauve, qui fut fait prisonnier à mes côtés... Que lui est-il arrivé après que nous ayons été séparés ?"

"Le... le mage. Nous n'avons pas... pu le contraindre. Il amenait putrescence et destruction avec lui, nous l'avons laissé fuir loin d'ici. Il... il a laissé des victimes parmi... parmi nous. En pire état que... moi. Gn."

Enfin. Le Woran inspire et souffle lentement par la truffe. Enfin une réponse claire. Comme il s'en était douté, Naral Shaam s'est bien aisément fait la paire du terrier de leurs geôliers. Et en faisant des dégâts sur son chemin. Ses pensées se tournent entièrement vers le Dragon en maraude, évoquant à voix haute l'évidence qu'il était pressé, parce que sinon il aurait vidé les lieux jusqu'à dernier encapuchonné. Se pourrait-il que ces imbéciles l'aient pris pour un des mages renégat à chevelure violette et lui aient involontairement donné une piste à suivre ? Plausible. S'il faut trouver d'introuvables individus, nul doute que l'Hinïon est le plus à même d'y parvenir. Sans omettre le fait qu'il s'agisse d'un Dragon. Si les rumeurs circulent aussi vite en bas qu'en haut, peut-être ces mêmes magiciens ont perçu en lui le parfait allié à leur cause et l'ont déjà recueilli parmi eux. Aucune chance de le savoir pour le moment. Mais au moins, le Tigre n'a plus la moindre hésitation quant à s'éloigner de leur repaire.

Quelque peu satisfait par la réponse, Huyïn se met en devoir de remplir sa part de l'accord en lui restituant ce qui lui revient de droit. Et sur ce, il se redresse et va récupérer la coule rouge au sol, pour la rendre en un jet sans cérémonie sur le dos de l'autre individu. Geste fait, parole tenue. Il reprend place face à lui, l'interrogeant sur ce pouvoir de... transfusion. De façon hachée, son interlocuteur l'informe reprendre ce sang qui lui a été dérobé et, probablement poussé par un sursaut de volonté à cette idée, une main est plaquée contre la patte du Woran. Brièvement stupéfait, Huyïn ressent une faiblesse croître, comme si quelque chose aspirait effectivement une parcelle de sa vitalité. À l'idée que cela puisse faire revenir la fièvre et la migraine, ou qu'il lui soit dérobé plus que le nécessaire, il dévoile les crocs et fait un bond en arrière. Il le met en garde de ne pas insister s'il ne veut pas perdre l'usage de ses pattes, le questionnant ensuite sur la façon dont le cristal lui a donné son sang et pour quelle raison. S'ensuit alors un dialogue à double niveau où tous deux s'invectivent quant à leurs droits respectifs. À côté, ils parlent de Strix un peu plus en détails.

"Strix est... un accident de notre clan. Il y a longtemps. J'ignore comment il fonctionne, et pourquoi il a agi de la sorte."

"De ce que j'ai glané, l'armure et la pierre sont... Une seule entité ? Que cherchiez-vous à faire, au juste ? Deviser un artefact pour faciliter la récolte sanguine ?"

"Deviser un... J'étais de passage pour surveiller notre ami sanglant. Il ne doit pas commettre de vague, et n'en a pas commise depuis fort longtemps. C'est votre présence qui l'a motivé, ça ne fait aucun doute."

Le ton monte un peu au refus du Woran de restituer le sang pour le moment. L'agacement commence à poindre suffisamment pour lancer une pique à son vis-à-vis.

"Faites preuve de patience ou je me ferai un plaisir de garder le reste en dédommagement... Ou peut-être vais-je l'employer autrement. Peut-être qu'une dose réveillera notre... Ami commun. Je suis curieux de l'entendre... Le lire... S'expliquer."

"Vous vous trompez sur toute la ligne : il est l'agresseur et moi la victime. Si vous lui donnez ce sang, il ne vous en restera pas plus qu'à moi, et il nous desséchera tous deux jusqu'à ce que nous tombions en poussière. Alimentant son pouvoir, sa puissance. Comme de nombreux avant."

Huyïn est une nouvelle fois circonspect. Pour une entité qui n'est pas censée avoir attaqué qui que ce soit, il faut la surveiller pour éviter qu'elle fasse des vagues, et ne pas lui donner de sang au risque d'être bu jusqu'à assèchement complet. Et ce potentiel croîtrait à chaque... Repas ? Si c'est vrai, il est heureux que le cristal soit cantonné à cette place. Toutefois... Comment la chose peut-elle ne pas entrer en contradiction avec l'affirmation qu'il n'y a jamais eu d'attaque ? Décidément, la logique ashaari le dépasse. Il la met d'ailleurs en question, demandant pourquoi rien de tel ne s'est produit pour eux jusque-là, ce à quoi est faite réponse que c'est sans doute une lubie. Un divertissement. Que depuis sa forme minérale, il se gausse de leur rixe verbale.

Le carmin moins pâle depuis sa prise de sang demeure tendu, nerveux. Il veut le reste de son sang qui, une fois encore, lui revient de droit. Huyïn rétorque que les siens ont été bafoués par son clan sans ménagement. Un bref éclat de rire moqueur précède la réponse.

"Ah ! Vous avez pénétré sans autorisations nos fiefs les plus sacrés ! Comment comptiez-vous être traité ? Nous sommes un clan pacifique et voué aux soins, mais il y a des règles à respecter."

"Nul attente pour qui n'a pas les repères nécessaires. L'une des vôtres nous a dupé, tout simplement. La leçon est retenue désormais."

"Pourquoi l'un des nôtres vous aurait-il dupé ? Quel intérêt aurait-il eu ? Vous tirez de fort hâtives leçons de vos expériences, mutant."

Le dicton indique que personne n'est plus aveugle que celui qui refuse de voir. Mais soit, puisque le sujet est sur le tapis, le Tigre va se faire un devoir de divulguer le contexte de tout ceci. Il appose un regard froid et hautain sur l'individu affaibli, laissant filer le fiel entre ses crocs à peine dévoilés.

"Scarla de Montfort. Sauvée de sa famille des Voies Hautes par l'Elfe blanc et moi. Guide dans le quartier rouge dont nous ignorons tout, avec la promesse que les siens sauront nous accueillir. Une porte crâne ouverte par ses soins sans rien nous révéler de sa sacralité. Un échange à peine amorcé qu'une brume écarlate nous a assommé...", commence-t-il, son appendice caudal s'agitant par saccade en mouvements latéraux. "Un cauchemar. Un tribunal assemblé. Un crime que nous ignorions avoir perpétré. Une menace de démembrement ou une contrainte de rejoindre les vôtres. Et j'ai fini assujetti à vous, soi-disant pacifistes, par un breuvage susceptible de faire éclater mes veines... Alors non, cher inconnu, je n'ai pas le sentiment d'aller vite en besogne..."

Une juste colère qui n'attend qu'un zeste d'appui, un moment de réflexion pour comprendre le point de vue du Tigre. Mais comme à chaque fois qu'il tente la chose, il se heurte à un entêtement presque impressionnant.

"Hé bien que celle-là recueille vos rancœurs, plutôt que notre ordre. Elle est la seule fautive, et nous ne faisions que défendre nos quartiers sacrés. Je doute qu'ils vous aient menacés et punis de la sorte face à une demande de pardon bien exécutée."

Tournant le dos à l'irritant individu, Huyïn rappelle sans retenue ce qui a été tenté : expliquer l'ignorance de leurs règles et la justification par une nature non-ashaari, s'enquérir du sort de son compagnon pour s'y voir opposer un irrévocable déni, une certitude de ne plus jamais avoir à s'en soucier. Fâcheuse tournure de phrase si le pardon était effectivement une solution. Le Tigre émet un souffle lourd et lent puis il fait quelques pas vers l'armure inerte, jetant un regard par-dessus son épaule.

"Et vous ne sauriez dicter mes émotions, ashaari. L'entièreté de votre monde, cette prison ensevelie dans laquelle vous vous complaisez, n'en a pas le droit."

Il n'a pas atteint celle-ci que la pierre pulsante se remet à briller de son éclat sanguin. Les veines dans la roche s'activent de nouveau, poussant son interlocuteur à reculer aussi vite que son état épuisé lui permet, et à s'adosser à la pierre bordant la place.

"Vous avez raison : nourrissez-le et condamnez-nous tous les deux, vous qui croyez tout connaître."

Et encore une fois, une provocation sans justification. À quel moment n'a-t-il pas explicitement fait savoir le contraire ? Qu'il n'a connaissance de rien donc multiplie ce qui est perçu comme des erreurs par les locaux friands de règles que personne ne partage ? Par exemple, ici. Pour quelle raison le cristal deviendrait-il soudainement dangereux pour lui, alors qu'il l'a visiblement pris sous son aile quelques instants plus tôt ? Devrait-il croire le carmin blanc et s'éloigner immédiatement ? Ou plutôt miser sur les interactions qu'il a eues avec Strix et ne pas subitement le traiter en danger ? Il demeure là où il se trouve, ne se rapprochant pas et ne s'éloignant pas non plus. Il lève la truffe vers le cristal, longuement silencieux. Toutefois, il finit par rompre cette pesante atmosphère.

"Cristal, Sieur ou Chevalier Strix, j'ai bien la confirmation que mon compagnon est en maraude. Je vais donc partir de nouveau à sa recherche. Je vous aurais bien proposé de m'accompagner, mais à moins de pouvoir rétrécir ou de vous séparer d'un éclat, cela ne se fera pas.", fait-il, orientant une oreille vers l'autre vivant avant de poursuivre. "Que cela ait été accidentel ou pas, soyez assuré que je vous remercie pour l'aide apportée. Sur ce..."

Le Tigre place son avant-bras en travers de son torse et s'incline légèrement, se préparant à reprendre sa quête de l'insaisissable Dragon d'améthyste. Subitement, une puissance inattendue se met à l'accabler et de légers picotements se font sous ses coussinets. Son sang... Il fuit vers le sol, poussière sanguine par poussière sanguine. Huyïn se détourne immédiatement, pour voir le carmin au loin rire. Un rire fou, précédant un nouvel assèchement de son visage. Sauf que cette fois, la chair se fait poussière et s'effrite. Le Woran sent le processus l'attaquer pareillement, même si plus lentement. Son instinct de survie prend la relève et le pousse à s'éloigner vite. Plus vite. Toujours plus vite. En l'esprit, parce qu'en pratique son corps se meut avec une difficulté croissante. Comme piégé dans un mur, tirant sa fourrure et son être à chaque pas qu'il entreprend. Une attaque. Un assaut constant. Indéfinissable. Inarrêtable. Il va finir comme l'autre, décomposé en un tas de vulgaires particules. Et pourtant, il s'y refuse. Il n'est pas une proie et ne finira pas comme telle !

Alors que sa vision commence rapidement à perdre en définition, des mains agrippent ses épaules et le tirent. Il se sent bouger, amené ailleurs. Son cœur tambourinant à ses oreilles papillonnantes commence à se calmer, et la certitude qu'il allait perdre la vie d'un battement de coeur à l'autre s'estompe. Plus de cette oppression, de cette sensation d'être dévoré fragment par fragment. D'ailleurs, en se redressant lentement et en agitant les griffes, il se rend compte être entier. Et là, venant d'au-dessus de lui, une fois familière retentit.

"Hé bien ! Vous n'êtes pas faciles à retrouver."

Une voix féminine, appartenant à... La responsable de la cascade de leurs déboires. Scarla de Montfort. Elle se tient là, à ses côtés. Et la première chose que remarque le Félin, c'est qu'elle n'est... Plus la même. Changée. Outre sa tenue du clan carmin remplaçant la sienne, elle est visiblement plus pâle. Le visage creusé comme ayant aussi perdu de sa vitalité. Et ses yeux... Ils pulsent d'une lueur rougeoyante. Son appartenance à cet ordre coloris rouge ne fait plus le moindre doute. Son état a-t-il été causé par la punition qu'elle est censée avoir enduré pour les avoir fait entrer via la porte sacrée ? Ou Naral Shaam a-t-il suffisamment clairsemé leurs rangs pour qu'elle gagne en galons à l'occasion ?

Avec une grande prudence, Huyïn se redresse de toute sa taille, testant son équilibre et ses pattes. De toutes les personnes qu'il aurait pu croiser, pourquoi faut-il que ce soit celle à laquelle il n'a absolument plus envie d'avoir affaire qui lui prête apparemment main-forte ? L’Équilibre s'amuse-t-il à ses dépends ? Après avoir passé des heures à ne plus penser à son existence, la voilà qui arrive dans les minutes suivant l'évocation de son nom. Le Woran se masse lentement le coin des yeux avant de lui faire face.

"Vous y êtes pourtant parvenue, et en me tirant littéralement d'un mauvais pas.", résume-t-il, plissant le regard en croisant sobrement les bras, son appendice caudal encore brièvement agité de soubresauts. "Reste maintenant à savoir... Pourquoi."

Après tout, le but de la jeune femme a été atteint. Elle s'est servie d'eux pour rejoindre sa famille d'adoption, le laissant à deux doigts de penser qu'elle les a conduit là avec l'intention d'en faire don aux siens. Son clan lui a-t-il donné quelque tâche les concernant, histoire de s'amender complètement ? Les oreilles du Tigre se tournent d'un commun accord vers elle, marquant, malgré son discret ressentiment, sa complète attention.




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Modifié en dernier par Huyïn le jeu. 22 mai 2025 18:02, modifié 1 fois.

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Akihito
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Re: Les Bouges

Message par Akihito » sam. 17 mai 2025 00:32

Guidé par ma nouvelle guide, nous évoluions dans un dédale qui me semblait aussi familier qu'étranger : toutes les rues ressemblaient à celles que j'avais arpenté hier. Laédia s'avéra être plutôt silencieuse, peut être pour le mieux : je n'étais pas contre un peu de discrétion dans notre progression, surtout si cela impliquait des cannibales en meutes de quelques centaines.

Ce fut l'odeur caractéristique de charnier qui m'informa que nous venions de rentrer sur le territoire. Acre, puissante, vomitive : pourtant, je la supportais sans peine. Les plaines de Kochii que j'avais arpenté des semaines durant avaient gardé cette puanteur tenace, après le Charnier des âmes...

Un brusque mouvement de la chevalière me fit me mettre aux aguets, et je la laissai me plaquer contrer un mur, un index sur ses lèvres. Sans un mot, je suivi son regard, indiquant une place un peu plus en avant où une assemblée bigarrée et affreuse s'était rassemblée. Devant une petite vingtaine de "Vivants-Morts" comme les appelaient Laédia, une femme à la carrure.... forte, déclamait un discours. Ou ça y ressemblait, car pour moi cela ressemblait plus à un ramassis de sons gutturaux incompréhensibles. Mais un ramassis résolument vindicatif et belliqueux, renforcé par les traits déformés de l'oratrice déformés par une forte hostilité.

« C’est une mage. Elle exerce un contrôle magique sur eux. Vous voulez... l’aborder ? Mes Vœux m’indiquent de l’arrêter scéant, mais la situation a l’air complexe. Elle pourrait également apporter des réponses à vos questions... Si tant est qu’elle puisse encore s’exprimer clairement. »

Sa voix chuchotée résonna a mes oreilles, couverte par le monologue de ladite mage, me résuma plus ou moins ce que je devais savoir. Intervenir était tentant, d'autant plus que la foule placide -pour l'instant- n'était pas assez nombreuse pour représenter un grand risque. Mais c'était aussi ce qui me retint de prendre cette décision : d'une part, j'étais incapable de pouvoir affirmer s'il était présent dans la foule, et donc m'avoir vu user de la magie ; d'autre part, je n'arrivai pas à les voir autrement que comme des victimes de cette cité infernale.

« Qu'est ce qu'ils font, à votre avis ? chuchotai-je à voix basse.

- Je l'ignore, je ne comprends pas son langage. Elle... monte un groupe sous ses ordres ? Ça serait une nouveauté, chez ces mangeurs de chair humaine. Ils sont désordonnés au possible normalement.

- Observons et suivons la pour le moment. Si elle s'isole, on lui tombe dessus. »

D'un geste de la main, je désignai ses yeux puis pointait les alentours derrière nous, puis les miens en pointant le groupe pour lui faire comprendre sans un bruit mon intention.

(Je les surveille, couvre nous.)

Elle me répondit d'un hochement de tête, se tournant dans l'autre direction. La mage continua ses grognements, absorbant l'attention de son public décharné. Puis à un moment, elle s'arrêta et l'assemblée silencieuse s'en alla, prenant une rue opposée à notre position. Seule, j'étais déjà plus serein quand à l'approcher. Et... Elle faisait quoi, là ? Elle reniflait l'air ? Est ce qu'elle pouvait sentir notre odeur, dans ces bas-fonds ? je voyais autant des raisons de m'en convaincre que de penser le contraire, dans un monde aussi étrange. Autant ne pas prendre le risque.
J'attirai l'attention de Laédia en touchant son épaule.

« Je l'approche. Essayez de contourner pour la prendre à revers. Si je dis "clou", c'est que j'ai besoin de vous. »

M'assurant que mon bouclier était bien callé dans mon dos pour ne pas avoir l'emblème de l'ordre visible pour la mage, et je m'engageai dans la place.

« Oh ? Eh, vous ! Enfin quelqu'un qu'à l'air de pouvoir me parler. J'ai besoin d'un coup de monde. »

Tout en m'approchant d'elle, je me tenais prêt à faire appel à mes Bottes de foudre pour courir rapidement à son contact à la moindre hostilité de sa part.

(Quel plan...)

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Capitaine Hart
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Re: Les Bouges

Message par Capitaine Hart » sam. 17 mai 2025 00:56

Je me suis retrouvé face à un balafré peu avenant (c’est dire qu’il y en avait pas mal dans le coin) qui se disait responsable des prisonniers. Il n’était pas intéressé par mes politesses, mais il a au moins confirmé que leur liberté pouvait être achetée.

« Ça dépend comment tu paies, mon gars. Et c’est pas moi qui décide, moi j’les surveille juste. Faut en parler à un responsable si vous voulez les acheter. Dragh. Le chef d’expédition qui les a ramenés : Kothor. Kith, le gardien de la Dame. Mais la dérangez pas elle : elle n’interviendra qu’en cas de litige. »
« C’est le comportement d’un vrai capitaine... ou d’un capitaine compulsif, au choix. »

J’ai sursauté, n’ayant pas remarqué Leyna et Drac qui regardaient par-dessus mon épaule.

« Ah ! Z’étiez là, vous ? Faut pas se faufiler dans mon dos comme ça ! »

Mis dans l’embarras par ma camarade impertinente, j’ai adressé un sourire gêné alors que je laisse le gaillard vaquer à ses occupations.

« Ahem, un chef d'expédition, hein ? Dans ce cas, je vais rendre visite à ce Kothor. Merci, mon brave ! »

Il m’a regardé partir sans mot dire.

« Les gens d’ici n'ont rien d’accueillant, j’en ai peur. Avez-vous un plan, capitaine ? »
« On peut pas leur en vouloir, vu l’endroit. Faut qu’il comprennent ce qu'ils ont à gagner. Même si Ashaar est condamnée, imaginons, je pense que si on arrive à ouvrir un fluide spatial vers Yuimen, ils seront nombreux à nous emboîter le pas. Ils font la gueule mais je pense qu’on a eu de la chance de tomber sur eux. »
« Ils ne sont pas heureux de leur situation. C’est en tout cas ce que j’ai ressenti. »
« J’nous ai trouvé du boulot en attendant si vous voulez: notre recruteuse cherche du monde pour faire une patrouille. J’me suis dis qu’ça s’rait une bonne façon de chopper des infos sur le coins, et des routes importantes. Vous en êtes ? »
« Bien vu. Je pense pas pouvoir te rejoindre de suite. Garde un œil ouvert pour les autres Yuiméniens, si jamais. »
« Ouais, trouver les autres est sur la liste. Et connaissant certains de ceux qui sont censés être dans les Bouges... je suis sur qu’ils ont laissé des traces. Aussi, j’pense pas que tant d’monde que ça voudra rentrer de suite. Pas tant qu’la tête du Dragon Noir s’ra ici en tout cas… »
« Si tu le permets, je viendrai aussi. Mieux vaut rester groupés à l’extérieur. »
« Parfait alors. Par contre, j’vous préviens: visiblement va falloir s’castagner. Mais j’ai comme l’impression qu’ça s’ra pas un soucis pour vous. Et faites gaffe à vous Sirius. J’suis d'accord avec m’dame Leyna: vaut mieux rester groupés. En tout cas pour l’moment. »

Le groupe, j’y travaillais. En tout cas, j’étais un peu rassuré de savoir que Leyna allait l’accompagner en patrouille. J’avais encore un peu de mal à cerner l’hurluberlu, mais il me semblait prompt à la panique.

« Hah, t’inquiètes pas pour moi. Je reste ici pour l'instant. Ah, attendez. Vu que la magie peut vous mettre dans la merde… »

J’ai farfouillé dans mon sac, à la recherche de quelques trésors que le destin avait bien gentiment mis sur ma route. J’ai sorti la Corne des Profondeurs, un cor éclatant d’ondyria qui ressemble à un coquillage. Une relique magique que je n’ai souvenir d’avoir utilisé une seule fois sur un certain Darion Marchegris… ou bien était-ce Aerq des Treize ?

« Je te prête ça, ça balance de l’eau, en quelques sortes. Pas aussi utile que tes geysers, mais ça peut dépanner. »

Elle l’a gracieusement accepté. J’imagine qu’elle n’allait pas dire non à un objet emprunt de l’essence de sa déesse. Mon regard s’est à nouveau posé sur Drac. Je n’allais pas le laisser bredouille, ça faisait mauvais genre. Et en plus, j’avais quelque chose qui pouvait lui plaire. Une vieille cape brunâtre et noircie par endroits, avec une odeur persistante de cramé et de quelque chose qui ressemblait vaguement à du vomi.

« Elle pue un peu, mais elle porte chance. Je l’avais faite ignifuger avant la bataille de Kochii, et elle m’a vraiment sauvé les miches quand je me suis fait, euh... Enfin voilà, ça t’évitera de te cramer tout seul. »

Alors que je refermais mon sac, j’ai remarqué par terre un petit caillou à la forme singulière. Il ressemblait à ces espèces de runes que j’avais gardées sans trop savoir pourquoi. Il était peut-être tombé de mon sac. Je l’ai mis dans une poche à ma ceinture auprès des autres. Après avoir enfoncé les affaires qui dépassaient d’un coup de poing bien senti, j’étais prêt à me remettre en quête de ce fameux Kothor.

« Mettez-en-leur plein la vue, surtout. Faut qu’ils apprennent à nous faire confiance pour la suite. J’vous laisse, j’ai des affaires à mener ! »

Après m’être mis en route vers une direction complètement arbitraire, je me suis arrêté net.

« Merde, mais je sais même pas où il est ce mec. Le con, j’aurais dû demander. »

J’ai estimé que j’irais plus vite en demandant mon chemin au premier venu à nouveau. Après tout, cette fois, j’avais un nom, et ce Kothor ne semblait pas être n’importe qui.

« Hey, je cherche le chef d’expédition Kothor, quelqu’un sait où il est ? » ai-je demandé autour de moi.

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