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Re: Le Port des Pirates

Posté : dim. 29 nov. 2020 18:19
par Heartless
Vu que la capitaine comptait partir en éclaireur, il tombait sous le sens que ce serait à Eliwin d'assurer le camp pendant son départ. Ainsi, une petite division composée de Mythanorië, Mouréna, Leyna et Nahöriel se détacha du groupe principal pour explorer les contours maritimes du camp de prisonniers. Ils se faufilèrent à travers bois, et bien qu'ils tâchaient de garder un profil bas, il devint bien vite évident que cette partie du complexe n'était guère surveillée, si bien qu'ils étaient à même de le contourner sans croiser le regard du moindre garde. De même, les hauts arbres gardaient les intrus des yeux inquisiteurs des soldats postés aux tours de guet. Conformément à l'intuition de l'oudio, cet endroit souffrait d'une protection laxiste, car Sans-Pitié n'avait rien à craindre des pirates domptés et des habitants terrifiés.

Alors qu'ils se frayaient un chemin à travers les bois luxuriants, le groupe put deviner que le camp des Sangs-Pourpres était bâti sur un grand col, et que l'itinéraire qu'ils suivaient les amenait sur une pente descendante. Les murs lointain du camp cédèrent bientôt la place à la roche millénaire de la falaise sur laquelle il était situé.

Mouréna marchait aux côtés de la capitaine. Il était manifestement intrigué par la dévotion dont Mythanorië faisait preuve envers ses membres d'équipage, et bien qu'il semblait avoir envie de dire quelque chose, il restait silencieux. Une fois, il ouvrit la bouche, prêt à parler, quand il fit soudain barrage à l'oudio, l'empêchant de tomber dans la mer en contrebas.

- Prenez garde ! Nous y sommes.

Pour ceux qui s'attendaient à un bout de plage menant à un système d’égout primitif, force était de constater qu'accéder aux eaux sales des Sangs-Pourpres ne serait pas chose aisée.

- A l'exception de quelques endroits bien surveillés, comme les quais au Sud, l'Île du Serpent est cernée de hautes falaises comme celle-ci.

Le vieil éarion s'agenouilla au bord du précipice, cherchant du regard le moindre indice quant à la présence d'une ouverture dans la falaise.

- Trop bas...

Il leva les yeux vers le nord, là où devait se trouver le camp de prisonniers, une bonne vingtaine de mètres au-dessus de leurs têtes.

- Si entrée il y a, elle doit se trouver une dizaine de mètres plus haut, au nord. Il nous faudrait longer ce rebord de falaise sur une longue distance, puis le gravir.

Il se tourna vers ses compagnons d'infortune et les jaugea du regard sévère qu'il arborait éternellement.

- J'espère qu'aucun d'entre vous n'a le vertige.

Re: Le Port des Pirates

Posté : dim. 6 déc. 2020 12:23
par Mythanorië
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J'avais à peine évoqué mes intentions que, dans mon dos, la voix de la Prêtresse s'éleva. Leyna' signifia ostensiblement venir avec nous. Comme si cela pouvait expliquer sa vision des choses, elle précisa que ses pouvoirs n'étaient pas totalement épuisés et pouvaient encore être utiles. Je levai brièvement les yeux au ciel, car qui disait Leyna disait aussi Nahöriel. Et comme je l'avais pressenti, le semi-elfe s'empressa d'indiquer accompagner également le contingent, appuyant sur sa capacité à se montrer discret. Je leur dardai un lourd et long regard sans dire un mot. Me pensaient-ils si incapable et peu fiable qu'il leur fallait me chaperonner ? Ne pouvais-je même plus endosser le rôle d'éclaireur sans devoir prendre en charge la vie d'autrui ? Ils avaient enfin l'occasion de se parler, de se rassurer l'un l'autre, d'agir en bon petit couple dont l'une des moitié avait couru je-ne-savais quel péril, ou simplement de se reposer pour reprendre des forces. Mais non. Peut-être aurais-je du tourner ma phrase en un ordre de rester là pendant que Mouréna et moi allions explorer la zone. Peut-être manquais-je de cette autorité naturelle inhérente aux grands capitaines. Peut-être se moquaient-ils simplement de mon avis. Peut-être... Peut-être se sentaient-ils mieux en ma présence ?

Je poussai un bref soupir nasal, sachant pertinemment que j'avais davantage de chances d'assécher les océans en les fixant du regard que de faire changer d'avis ces têtes de mule. Je me tournai vers Eliwin. Nous échangeâmes un bref regard et, tacitement, il prit les commandes du contingent restant sur place. Je fis un bref signe à Mouréna et aux semi-elfes, puis nous nous éloignâmes de notre cachette.

Marchant prudemment, un œil en permanence rivé sur le camp, nous passâmes à travers bois. Il semblait que j'avais vu juste en estimant cet endroit caché moins gardé qu'une autre place stratégique. Je ne vis aucun garde patrouiller de ce côté. De plus, les arbres entre lesquels nous passions constituaient un obstacle à la vue, empêchant les soldats placés dans des tours de guet de nous distinguer. Une belle négligence, sans doute basée sur l'arrogance du tyran local, estimant que les habitants ne risquaient pas d'approcher et que les individus armés sous sa botte n'avaient aucune raison de s'attaquer à l'endroit. Vu son isolement, la cible était donc idéale. Quand bien même dans le pire des cas une alerte fût donnée, seuls les gardes à l'intérieur allaient poser problème. Nul renfort n'allait pouvoir être averti ni n'arriver avant un moment. Si la possibilité d'un assaut contre le camp ne faisait pas simplement hausser un sourcil incrédule aux sang-pourpres locaux.

Nos pas nous firent nous éloigner du camp en direction de la mer, là où nous étions censés trouver l'entrée vers le canal d'évacuation des eaux usées des lieux. Le sol se fit légèrement pentu, constitué de la roche des falaises environnantes. Soudain, Mouréna me barra le passage. Si au premier abord je m'étais attendue à quelque sournoiserie de sa part, je compris rapidement qu'il m'avait évité une chute possiblement mortelle depuis le rebord de la falaise. Je fermai brièvement les yeux, réalisant à quel point j'étais aussi sous tension. Je pris une profonde inspiration puis écoutai l'éarion m'indiquer que l'Île était, à quelques endroits près, cernée de ces hautes falaises. Après une courte inspection, il précisa que si entrée de ce type il y avait, elle devait se trouver plus haut et risquait fort de nécessiter un brin d'escalade. Sévèrement, il indiqua à voix haute espérer qu'aucun d'entre nous n'avait le vertige.

Nahöriel se frotta le bout du nez avec un sourire à peine masqué. Il était l'un de mes meilleurs gabiers et le savait très bien. S'il avait eu le vertige, il n'aurait jamais passé son temps à escalader les cordages et à rendre visite à Lydia au sommet du mât. Mes pensées se tournèrent vers les membres de mon équipage. Pourvu qu'ils n'eussent rien entrepris de stupide qui leur aurait couté la vie avant que nous n’arrivâmes pour eux. Je tournai les yeux vers l'étendue d'eau salée visible depuis la falaise, écoutant brièvement les vagues frapper la roche en contrebas. Si elle n'avait pas été aux mains d'un tyran et son atmosphère si lugubre, cette Île aurait pu faire l'effet d'un foyer.

"Spéculations. Trouvons d'abord cet accès puis nous aviserons... Mouréna ?"

Je fis un pas puis agrippai mon tricorne entre mes serpentins, jetant un regard à l'éarion en lui faisant un léger signe de tête.

"Merci."

Un simple mot de reconnaissance, pour m'avoir soustrait à un accident stupide et pour son soutien jusque-là. Il pouvait y puiser le sens qu'il voulait, cela m'importait peu. J'adressai un bref regard à Leyna et Nahöriel, puis m'en détournai. Il était inutile de se perdre en interrogations et hypothèses avant d'avoir atteint le cœur du problème en cours.



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Re: Le Port des Pirates

Posté : dim. 6 déc. 2020 13:46
par Leyna
La capitaine n'avait pas l'air très contente. Elle devrait pourtant bien se faire à l'idée que l'équipage ne pouvait se permettre de la perdre. C'est donc un petit groupe constitué de Mythanorië, Nahöriel, Leyna et Mouréna qui pris le chemin des falaises. Le terrain était escarpé et le chemin devint de plus en plus difficile à suivre. Son habitude de la mer ne donnait guère d'avantage à Leyna à ce niveau, aussi Nahöriel, devinant qu'elle n'était pas à l'aise, l'aidait à se déplacer, profitant de son propre sens aigu de l'équilibre. Hélas, pendant ce temps, il ne surveillait pas la capitaine.

Le chemin était de plus en plus étroit, petite sente à flanc de falaise, et elle aurait glisser plusieurs mètres plus bas si Mouréna, dont l'age n'avait pas réduit les réflexes, ne l'avait rattrapé. Elle le remercia rapidement, avant de continuer le chemin. D'après le vieux prêtre, il fallait s'attendre à ce que l'entrée d'évacuation soit en hauteur, à flanc de falaise. Voilà qui n'était pas une bonne nouvelle ! Nahöriel était bon grimpeur, la prêtresse, beaucoup moins ! Comme le disait Mythanorië, cependant, il faudrait le voir pour aviser.

Gardant le silence, la prêtresse s'efforçait d'observer au mieux les murs de la forteresse qui les dominait. Apparemment, il n'y avait pas grand monde, là-haut, mais elle voulait s'assurer que personne ne les voit et, le cas échéant, voir s'il n'y avait pas un passage, que cela soit celui qu'ils cherchent ou un autre...

Re: Le Port des Pirates

Posté : dim. 13 déc. 2020 14:59
par Heartless
Nahöriel était la personne la plus indiquée pour mener à bien cette mission de reconnaissance. Il rassura ses compagnons avant de commencer à inspecter ses points d'accroche potentiels puis, après avoir craché sur ses mains et fait un petit échauffement, il bondit sur le bord de la falaise et commença son escalade. Pendant ce temps, Mouréna regardait avec un air aussi étonné qu'inquiet les grains de poussière remués par le grimpeur effectuer une chute de plusieurs dizaines de mètres.

- Il y va sans corde ? Tout seul ?

Lorsqu'il vit qu'on le questionnait du regard, Mouréna reprit son air de rabat-joie et passa les bras derrière son dos.

- Ahem, ne comptez pas sur moi pour le suivre...

Le gabier semblait confiant de pouvoir remplir cette tâche seul, mais il était encore possible de le suivre, bien qu'il serait probablement difficile de tenir la cadence. De son côté, Leyna, qui observait le haut des murs du camp, ne parvenait pas à discerner la moindre activité de garde bien que le vent ramenait parfois vers elle les murmures incompréhensibles d'ordres aboyés.

Re: Le Port des Pirates

Posté : mar. 15 déc. 2020 20:33
par Leyna
Comme il n'y avait aucun mouvement en hauteur, Nahöriel s'élança à l'assaut de la falaise. Mythanorië le retint le temps de lui attacher une corde pour qu'il puisse les aider ensuite. Il se la mit aussitôt autour de la taille et, agile comme un singe, commença à grimper.

La prêtresse entreprit de grimper plus lentement. Prudemment, elle tentait de s'approcher des hauteurs, pour être prête à réagir avec ses pouvoirs si le garçon se trouvait menacé par une sentinelle inopinée. Hélas, à cette hauteur, elle n'était pas sûr de pouvoir agir, mais hors de question de le laisser risquer sa vie sans au moins tenter de le soutenir ! En chemin, elle veillait à enrouler la corde pour faire des points de fixations qui pourraient le retenir s'il tombait.

Re: Le Port des Pirates

Posté : sam. 19 déc. 2020 10:53
par Mythanorië
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La perspective d'un brin d'escalade dangereuse ne fit que motiver un peu plus Nahöriel. Le semi-elfe usa de son sourire confiant et de quelques paroles pour assurer à la ronde pouvoir trouver un chemin à flanc de falaise, indiquant les quelques premières prises avant de se taire et de chercher du regard les suivantes. Il fit quelques mouvements que je reconnus comme une série de gestes destinés à réveiller sa musculature, cracha dans ses paumes et entreprit d'escalader la paroi. Ce fut sur sa seconde prise que j'entendis Mouréna s'étonner de voir le demi-elfe partir à l'assaut de la paroi seul et sans corde. J'alternai entre le regarder et surveiller le gabier du coin de l'oeil, constatant que quelques débris de pierre poussiéreux se détachaient par moment du mur naturel et flottaient vers le vide en contrebas. Ajoutant à ce danger-ci les échos sourds résultant du combat précédent et dont mon corps végétal se souvenait encore, la lueur décidée dans les yeux de Leyna' suivant le grimpeur et dont le corps semblait déjà attiré par la falaise, je fis un signe de tête vif.

"Nahöriel, un instant."

J'agrippai mon sac, l'ouvrant et écartant des serpentins quelques objets pour faire place à mon rouleau de corde. L'éarion avait eu raison de s'étonner. Sans son commentaire, peut-être n'aurais-je jamais eu souvenir d'avoir fait l'acquisition de ce cordage. J'en agrippai l'extrémité et commençai à dérouler la dizaine de mètres de solide lien tressé.

"Mouréna a raison. À bord où ici, rien ne saurait égaler l'importance d'un lien de sécurité."

J'attendis de voir le gabier davantage proche du sol avant de poursuivre, examinant la paroi et devinant quelques points où la corde pût être retenue contre le roc, au cas où. Je m'évertuai cependant à ne pas penser à ces éventualités.

"Nahöriel grimpera le premier, Leyna' à sa suite, moi après et Mouréna enfin. Si vous vous sentez d'attaque, bien entendu."

Je lui adressai un bref regard puis me concentrai sur le jeune couple et la corde cerclant déjà la taille du gabier. En regardant la paroi de pierre, je songeai brièvement qu'une fois notre devoir accompli sur cette île, je comptais bien dénicher un mage spécialisé dans la manipulation de la terre. Modifier le terrain n'était certes pas le plus utile en mer, mais faisait défaut dans de pareilles circonstances. Même le plus chevronné des loups de mer se devait de toucher terre de temps en temps.

J'ôtai mon tricorne et le plaçai dans mon paquetage, n'ayant aucune envie de le voir m'échapper au cours de l'escalade. Je saisis la corde et l'enroulai autour de ma taille avant de tendre l'extrémité à l'éarion sans ajouter une parole.



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Re: Le Port des Pirates

Posté : sam. 26 déc. 2020 23:37
par Heartless
Mouréna saisit la corde avec peu d'enthousiasme. Le groupe entreprit donc son audacieuse entreprise, Mouréna était clairement intimidé par les hauteurs, mais pas assez pour se décourager. L'escalade était tendue, car seul Nahöriel en avait fait sa spécialité. La cadence de ses compagnons le forçait à ralentir, mais il en profitait pour créer des points d'ancrage.

Quelques minutes passèrent, sans grand accroc, à part quelques frayeurs dues à des chutes de cailloux intempestives. L'effort continu commençait à peser sur les muscles de certains, et ils s'accrochèrent avec un peu moins de vigueur, mais une prudence redoublée. Enfin, un bruit singulier, bien distinct de celui des vagues en contrebas se fit entendre, celui d'un mince filet d'eau qui coule, très proche. Enfin, ils virent l'issue tant convoitée. Ce fut bien sûr le gabier qui la signala à ses compagnons, et quelques instants plus tard, il les aidait à se hisser jusqu'au trou circulaire et métallique caché dans la roche, duquel coulait de minuscules flots nauséabonds donc il valait mieux ne pas mettre en question l'origine.

Cependant, alors que Mouréna, dernier arrivé, se hissait enfin grâce au bras assuré de Nahöriel, il fut temps de se consacrer au constat. Ils avaient trouvé l'entrée tant convoitée, mais elle laisserait passer plus d'eau et de déchets que d'hommes tant qu'une rangée de robustes barres de fer continuait de bloquer le passage. Bien que le tunnel était assez grand et large pour laisser passer trois personnes en même temps, l'espace entre les barreaux constituait un véritable barrage. Mouréna tenta de les écarter par la force brute, comptant sur un mauvais entretien, mais il se rendit vite compte que ce ne serait pas aussi simple.

- Après tout cela, il serait bien embarrassant de s'arrêter à cause d'un obstacle aussi basique. Quelqu'un a une idée ?

Re: Le Port des Pirates

Posté : jeu. 7 janv. 2021 13:31
par Mythanorië
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Dans le plus grand des silences, à peine brisé par quelques souffles de vent et les échos de la mer en contrebas, nous entreprîmes l'escalade. Malgré son manque raisonnable d'enthousiasme, Mouréna se joignit à nous tandis que Nahöriel gravissait la paroi rocheuse aussi assurément que s'il se fusse agi d'un filet de mât. Je fis au mieux pour n'en rien laisser paraitre, mais l'effort était des plus pénibles, tirant sur mes fibres végétales meurtries quand ce n'étaient pas mes serpentins de bois qui se retrouvaient accidentellement bloqués dans de minuscules fissures. Mais l'idée était de moi, je n'avais aucune légitimité à émettre la moindre plainte. Cela ne m'empêcha guère de le faire intérieurement, pestant contre ma nature de saule pleureur et non d'autre végétal grimpant qui m'aurait bien aidée en cet instant.

La voix de Nahöriel me sortit de mes pensées, et je compris avec un certain soulagement que notre grimpette avait enfin un résultat concret. Le gabier nous aida les uns après les autres à atteindre la bouche de l'issue recherchée. Un trou circulaire et métallique, entre les barreaux duquel s'écoulait une poignée de petits flots à l'odeur nauséabonde. Je plissai les yeux à la vue de ce nouvel obstacle. Le tunnel en lui-même était suffisamment large pour nous, mais pas l'espace entre les barreaux. Mouréna s'en approcha et tenta de les écarter à la force des bras, sans résultat. Soit ces barreaux étaient assez récents pour ne pas avoir encore subi les assauts de l'air marin, soit les résidents de la forteresse avaient la curieuse idée d'en vérifier l'intégrité régulièrement. Les yeux rivés sur cette contrariété de plus, j'entendis l'éarion commenter et demander si quelqu'un avait une idée.

Sans un mot, je m'approchai du cercle métallique et l'inspectai. Les sang-pourpres avaient du creuser la pierre pour y placer les cavités retenant le tout et éventuellement utiliser un matériau pour combler les vides. La roche était résistante. Je doutais fort que les usagers des lieux eussent creusé plus que de raison pour barrer l'accès. J'apposai la main contre le sol près du cercle, ignorant le léger ruissellement jouxtant mon écorce, avant de m'adresser à mes compagnons sans les regarder.

"Si cela me sort de l'esprit... Rappelez-moi d'enrôler un terramancien aguerri avant de reprendre la mer."

Je tapotai devant moi puis les regardai par-dessus mon épaule.

"En attendant... Je pense pouvoir affaiblir suffisamment le sol pour nous permettre de le creuser une poignée de minutes. Dégager la base pour l'en déloger ou déblayer un passage assez large en-dessous devrait être envisageable."

Je pivotai sur l'avant de mon pied, attendant leurs possibles idées tout en rassemblant mes fluides de terre dans ma paume en contact avec la roche humide.


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Préparation du sort RP "Consistance - Rang 1 : Permet au lanceur de sort de donner à un sol moyennement mou (boue peu profonde) ou à un sol dur (pierre, terre compacte) la consistance du sable durant 15 minutes dans un rayon d'un mètre autour de lui. La zone d'effet du sort est fixe, ne suivant pas le lanceur de sort lors de ses déplacements."

Re: Le Port des Pirates

Posté : lun. 11 janv. 2021 20:17
par Leyna
Si le semi-elfe était de loin le plus agile, peu à peu, tout le groupe se décida à le suivre, même Mouréna, qui n'était pas des plus à l'aise. Leyna avait également un peu de mal à suivre. Elle avait recouvré quelques forces et profitait de sa vigueur de prêtresse de la force, mais les derniers jours avaient été éprouvants, et elle n'avait jamais été habile à l'escalade...

Lorsqu'ils arrivèrent devant l'entrée du déversoir, ce fut malheureusement pour tomber sur une déconvenue : si le passage était assez grand, il était barré par une grille ! L'earion entreprit de tirer dessus de sa force probablement elle aussi augmentée par la déesse, mais sans grand succès. Il se tourna donc vers ses compagnons pour demander s'ils avaient une idée. La capitaine, après avoir étudié avec soin les points d'ancrage, commença à invoquer une magie de terre pour fragiliser le sol. Leyna proposa aussitôt :

« Mouréna, coordonnons notre force ! Ensemble, nous triompherons ! »

Nahöriel se glissa de lui-même derrière elle, la saisissant par la taille avec la précaution délicate qui agaçait la jeune femme sans qu'elle ose se plaindre tant sa douceur était agréable.

« Je te tiens. Pour éviter que tu ne bascules en arrière... »

Parfait, elle allait donc pouvoir y mettre toute sa force !

((( utilisation de la marque divine )))

Re: Le Port des Pirates

Posté : sam. 16 janv. 2021 20:52
par Heartless
Mythanorië, Leyna et Mouréna agirent de concert sur les barreaux. Ceux-ci ne mirent qu'une minute ou deux à céder, car une fois que la terre autour d'un des barreaux était devenue assez molle, les deux prêtres de Moura n'eurent guère de mal à arracher l'un des barreaux et à le tordre juste assez pour laisser passer une personne à la fois. Cette réussite avait exténué les deux fidèles de la déesse des eaux, mais Nahöriel ne put retenir un rire victorieux devant le travail accompli.

La compagnie traversa ainsi l'obstacle et s'infiltra dans les égouts nauséabonds sous la prison militaire. Le réseau souterrain n'était pas des plus complexes, ils y trouvèrent sans mal leur chemin. Ils s'arrêtèrent sous une grille à l'apparence peu robuste, la seule source de lumière de ce côté du canal. Il était difficile d'y percevoir autre chose que les rayons du soleil, mais elle donnait manifestement sur une partie du camp. Cependant, comment dire si elle n'allait pas déboucher directement sur un contingent de gardes ? Soudain, un bruit inattendu fit bondir Mouréna, entre autres, ainsi que Nahöriel qui s'était rapproché de Leyna dans un soucis de la garder d'une attaque surprise. Mais ce qui était passé pour un son menaçant se révéla être quelque chose de bien plus singulier, quelque chose qui n'avait pas sa place dans cet endroit sinistre.

- On dirait... de l'ocarina.

C'était une bien timide mélodie qui se répercutait sur ces rebords crasseux. Nahöriel qui s'était retourné, remarqua que de nombreux oiseaux marins s'étaient posés à leur point d'entrée, une audience silencieuse qui semblait s'être donnée rendez-vous à cet endroit, à ce moment précis. Mouréna, lui, semblait se perdre dans la plainte étouffée de l'ocarina. De toute évidence, le son émanait d'un canal d’égout juste assez large pour faire passer un groupe en file indienne, mais qu'allaient-ils trouver ?

Re: Le Port des Pirates

Posté : jeu. 21 janv. 2021 11:18
par Mythanorië
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Le reste du groupe se contenta d'approuver, la Prêtresse s'adressant à Mouréna pour forcer les barreaux dès que ma magie eût fini de ramollir le sol. À eux deux et au prix d'un effort colossal et impressionnant, ils parvinrent à arracher et tordre l'une des tiges métalliques. Si le gabier laissa entendre une certaine satisfaction dans un léger rire, je ne pus en revanche que me concentrer davantage. Ce n'était pas parce que ce passage, même fermé, donnait sur une falaise que rien ne pouvait y avoir trouvé refuge. En particulier si le boyau de pierre était régulièrement alimenté de dépouilles et détritus en tous genres. Après avoir laissé un instant aux deux prêtres de Moura pour reprendre leur souffle, nous progressâmes dans le tunnel. Au-dessus de nous, une grille laissait filtrer la lueur déclinante du jour. Elle semblait bien plus fragile que ce qui nous avait barré l'entrée plus tôt, mais vue sa position et mon manque de connaissances concernant l'architecture du camp, impossible de dire sur quoi débouchait ce passage.

Alors que j'essayais de m'en faire une idée, un son soudain et inattendu fit écho dans le boyau, me faisant porter la main à la garde de ma lame tandis que Nahöriel se tenait sur les siennes. Mouréna sursauta avant de faire un commentaire sur le son. Ce qui avait ressemblé à une tonalité menaçante de bête s'avérait en vérité être la voix d'un instrument, un ocarina. Les notes se succédèrent en une mélodie timide, se répercutant sur les parois de pierre. Au son étonné que fit le gabier, je me tournai vers lui et découvris comme lui qu'un large groupe d'oiseaux marins s'était donné rendez-vous à l'entrée du tunnel. Nous ne les avions pas dérangé en arrivant. Venaient-ils tout juste de se poser ? Pourquoi maintenant ? Y aurait-il eu un lien avec la musique ? Si c'était le cas, alors l'individu jouant de cet instrument devait avoir pris cette habitude depuis longtemps. Peut-être que le son était joué en même temps que le rejet de détritus, d'où le lien fait par les animaux entre la musique et un repas offert.

Je jetai de nouveau un œil à la grille nous surplombant puis au canal qui nous faisait face et d'où semblait émaner la musique. Laissant ma lame au fourreau, j'apposai mes serpentins de bois contre la paroi et m'engageai en premier dans le passage étroit. Je devais évaluer si cela représentait un danger. Toutefois, j'étais également curieuse. Les Sang-pourpres laissaient-ils une telle liberté à un de leurs prisonniers ou s'agissait-il de l'un d'entre eux ? J'hésitai également à faire appel à ma magie de lumière pour y voir plus clair, mais estimant que nous étions encore trop proches de la grille, je m'en abstins. J'aurais eu le temps de le faire plus tard, au besoin.

Si je savais ce qu'était la musique au sens général, j'étais en revanche incapable de nommer la plus petite mélodie ou d'en fredonner une, en-dehors de celles jouées par Leyna' ou Nahöriel. J'étais donc incapable de dire si je connaissais ce qui était joué ou, plus simplement encore, si je trouvais cela agréable à entendre. Mes yeux clairs se tournèrent brièvement vers ceux qui me suivaient un à un, essayant de déterminer si eux, oui.



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Re: Le Port des Pirates

Posté : ven. 22 janv. 2021 12:15
par Leyna
La grille céda sans problème, car tel était la volonté de Moura ainsi que la force qu'elle leur avait donnée. Force qui, dans le cas de la capitaine, s'était manifestée par une ruse efficace. Nahöriel, ravit, se proposa néanmoins de rester près de la prêtresse, ses mains n'étant manifestement pas pressée de s'éloigner de sa taille. Ils s'avancèrent donc dans le sinistre tunnel puant. Si issue il y avait, il allait falloir la trouver et s'assurer qu'elle soit sécurisée. C'était ce deuxième point qui risquait le plus de poser problème...

Alors qu'ils avançaient, une étrange mélodie se fit entendre. Une musique qui se glissait parmi les canalisations, et ils virent avec surprise des oiseaux se poser près de l'entrée pour écouter. Mouréna, tout aussi surpris que les autres, reconnut de l'ocarina. Sans attendre, la capitaine se glissa dans l'étroit passage pour découvrir la source de la musique... Leyna lui saisie doucement un serpentin :

« Il y a de la tristesse dans ce chant. La vie sous le règne de Moura peut être difficile, les séparations douloureuses, quand retentit l'appel de la mer. Voilà ce que cela dit... »

Elle suivit la capitaine, se demandant qui pouvait être cette âme fidèle et pourtant si triste.

Re: Le Port des Pirates

Posté : dim. 24 janv. 2021 16:31
par Heartless
Mythanorië avança la première, se rapprochant de plus en plus de la triste mélodie, jusqu'à remonter sans grand-mal jusqu'à son origine, ou du moins, au plus près possible. Il pouvait être déroutant de constater que la seule chose qui la séparait de la source du son était une sorte de trappe en bois primitive avec un trou circulaire au milieu. Son utilité pouvait être mystérieuse pour l'oudio qu'elle était, mais ceux qui pouvaient voir par-dessus son épaule reconnurent la forme typique, ainsi que l'odeur, d'une latrine solitaire.

Cependant, personne ne se risqua à le préciser à la capitaine, pas tant par respect, mais surtout par peur de se faire entendre du joueur d'ocarina. Des regards sérieux furent échangés, allaient-ils risquer de faire irruption dans ce qui semblait être une pièce isolée du camp, ou allèrent-ils plutôt tenter leur chance dans les couloirs silencieux à l'autre bout du tunnel ?

En faisant l'échelle, ils purent avoir un aperçu de ce qui se trouvait de l'autre côté de cette issue peu glorieuse. En ouvrant légèrement le couvercle, il était possible de distinguer les murs humides de ce qui semblait être une cellule particulière, probablement la seule avec un système d’égout semblable dans les environs. Car c'était sans aucun doute une cellule, sinon comment expliquer que le seul rayon de soleil qui se languissait sur le sol était scindé par les ombres de lourds barreaux en fer ? Quoi qu'il en soit, il y avait fort à parier que cet endroit était réservé à des prisonniers spéciaux, que ce soit par leur dangerosité ou bien leur rang. Ce niveau de confort était sans nul doute bien supérieur à celui qu'on accordait aux autres détenus du camp. Le joueur d'ocarina, probablement adossé à l'un des murs, continuait de jouer avec morosité, mais il n'était pas visible d'ici.

Re: Le Port des Pirates

Posté : mer. 10 févr. 2021 13:08
par Mythanorië
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Mon avancée fut brièvement ralentie par la Prêtresse, qui se saisit de l'un de mes serpentins de bois. Je tournai la tête sur le côté, lui montrant qu'elle avait mon attention. Elle m'apprit qu'il y avait dans ce chant une certaine tristesse. Visiblement la mélodie était en lien avec Moura, évoquant de douloureuses séparations quand retentit l'appel de la mer. J'acquiesçai puis poursuivis mon chemin dans le tunnel, me laissant guider par le son pour m'en approcher. Bientôt, nous fûmes au plus près, pratiquement en-dessous. Une trappe de bois percée d'un trou au milieu semblait le seul obstacle entre nous et l'origine de la mélodie. D'abord intriguée par cette étrange forme, il me fallut un moment pour la visualiser dans mon esprit depuis un autre angle. Ah. Oui. Si je n'avais pas vécu autrefois avec des humains, jamais je n'aurais reconnu la forme de latrines sommaires. Nous échangeâmes silencieusement un regard, hésitant entre nous manifester ou poursuivre notre chemin dans le boyau.

Finalement, nous prîmes le parti d'en savoir un peu plus et nous fîmes une échelle. Le couvercle à peine soulevé nous permit de distinguer l'ombre de barreaux et des murs humides. Une cellule. Et dotée d'une sortie par la trappe si la grille que nous avions démolie n'avait pas été là, ni que la ou les personnes retenues ici ne fussent entravées. Mais quel genre de prisonnier avait droit à de telles commodités ? Non seulement le ou les captifs ici pouvaient évacuer leurs déchets corporels pour maintenir leur prison relativement propre, mais personne ne semblait vouloir interrompre la mélodie jouée. La pensée m'amena à revoir la volée d'oiseaux venus au rendez-vous musical. Cela ayant du prendre du temps, nul doute que le détenu musicien devait être là depuis un moment. Un possibilité certaine de glaner quelques renseignements, s'il ou elle se montrait coopératif. J'avisai mes compagnons et soufflai plus que parlai.

"Occupant de cellule. En attirant discrètement son attention, nous pourrions obtenir quelques informations sur le camp. Ou être repérés dans l'instant si son attitude devient suspecte."

Mes yeux clairs balayèrent les visages à peine perceptibles dans la pénombre. C'était un pari risqué. Si le musicien était surpris, il avait de fortes chances d'interrompre sa mélodie et de rompre brutalement sa routine. Cela ne pouvait qu'attirer l'attention de possibles gardes en faction. Peut-être pouvions-nous piquer sa curiosité sans nous faire trop remarquer, au moyen de cette même mélodie qui nous avait attiré à lui. J'avisais Nahöriel, me rappelant qu'il gardait toujours sa petite flûte à trois trous sur lui.

"Nahö', as-tu toujours ton instrument avec toi ? Penses-tu pouvoir copier la mélodie ?"

Je lui jetai un regard avant d'orienter mon attention sur le passage fermé au-dessus. La flûte du gabier avait une tonalité un peu plus aiguë que l'ocarina. Si la chance était de notre côté, le son piquerait la curiosité de l'individu et le rapprocherait de nous.

Toutefois, je ne comptais pas prendre cette décision pour tout le groupe et patientai, les laissant me faire part discrètement de leurs propres avis.


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Re: Le Port des Pirates

Posté : dim. 14 févr. 2021 10:55
par Leyna
Au-dessus, il y avait une trappe. Ils avaient visiblement trouvé... les sanitaires d'une cellule. C'était de là que venait la musique. La capitaine proposa alors à Nahöriel d'utiliser son ocarina pour jouer le même son affin d'attirer l'attention de la personne. Leyna hocha la tête... et tendit la main en souriant. Le semi-elfe comprit aussitôt : elle connaissait cette musique et était la mieux à même de la reproduire. Il lui tendit l'ocarina, et la jeune femme entreprit de commencer sa musique.

Elle connaissait l'air, issu des profondeurs du passé de son peuple. Le chant monta en elle dans toute sa tristesse, une tristesse qui n'avait pas besoin de parole. Elle avait, après tout, elle-même souvent été seule et elle avait rencontré un marin au destin pire encore.. Elle le savait mieux que quiconque...

Alors elle se mit à jouer, juste sous l'ouverture calquant ses notes sur celles de prisonnier, assez forte pour être entendue dans la cellule mais, elle l'espérait, pas au-delà.

Re: Le Port des Pirates

Posté : jeu. 18 févr. 2021 00:09
par Heartless
La mélodie de Leyna se mêla à celle de l'inconnu. Pendant quelques secondes, il y eut comme un duo impromptu, puis le prisonnier cessa sa mélodie. Il y eut un bref silence empli de confusion, puis la porte de la cellule s'ouvrit subitement. Un soldat de Sans-Pitié à la démarche impérieuse entra et s'arrêta au milieu de la cellule. Vêtu d'une armure noire et légère similaire à celle portée par les Raies Sanglantes, son visage était caché sous une visière, de sorte à ce que l'on ne pouvait discerner que le bas de son visage. L'homme à la peau bleue souriait comme un sadique.

"T'es obligé de faire tout ce boucan, Mared ?"

Son nom révélé, le prisonnier, toujours hors de vue, ne faisait aucun bruit. L'homme en armure se retourna lentement, fit quelque pas dans la cellule, soupira... puis revint se rua vers le mur. À en juger par le cri de douleur qui s'ensuivit et l'élan prit par l'agresseur, ce dernier venait de lui affubler un violent coup de pied dans l'abdomen. Le prisonnier se mit à genoux et son ocarina tomba au pieds du garde. Il était désormais possible de voir son visage. Mythanorië, qui avait été la cible de son lasso auparavant, le reconnut un peu avant Leyna. Ce Sang-Pourpre à la longue chevelure blonde n'était autre que le chef des Raies Sanglantes qui avaient attaqué la Rascasse à son arrivée. Il avait cependant perdu son air fier et semblait abattu, à la fois physiquement et mentalement. Il regardait son tourmenteur avec une rage silencieuse.

"C'est ça, fais le fier. Je te garantis que ça va pas durer."

Il força Mared à fixer son regard sur le sol en lui piétinant la tête.

"T'as de la chance que le chef t'aie à la bonne. J'aurais été à ta place, ma tête serait déjà au bout d'une pique. Tandis que toi, t'as juste perdu du galon. Tout ton galon, à vrai dire."

Il écrasa lentement le visage de Mared contre le sol.

"Tu me débectes. T'auras pas le vie facile quand tu sortiras d'ici, tu peux me croire. Tu m'as toujours traité comme un moins que rien. Mais maintenant..."

Il releva son pied et le déplaça lentement au-dessus de l'ocarina tombé par terre.

"... C'est moi, ton supérieur."

Si le Sang-Pourpre déchu n'avait pas fait barrage de sa main, l'ocarina aurait volé en morceaux sous la botte du soldat. Il retira son pied, visiblement furieux, puis il remit un coup dans la poitrine de Mared.

"La prochaine fois que j'entends ce bidule, ta main part avec."

Sur ces mots, il quitta la cellule, laissant Mared seul et battu. Le blond fit glisser son instrument contre le sol et le serra contre lui. Il s'allongea sur le dos, examinant chaque recoin de l'ocarina pour en essuyer la poussière. Puis enfin, il tourna son attention vers les latrines. Pouvait-il les voir ?

Re: Le Port des Pirates

Posté : ven. 23 avr. 2021 19:54
par Leyna
Cela sembla faire effet, car le prisonnier cessa subitement sa mélodie pour écouter. Mais à ce moment-là, un geôlier entra dans la pièce, visiblement agacé par le bruit. Les infiltrés se tassèrent du mieux qu'ils purent pour être sûr de ne pas être vu tandis que la brute jetait le prisonnier à terre, ce qui leur permis de voir son visage ! C'était l'ancien chef des raies sanglantes ! Apparemment, il avait perdu son rang pour sa défaite, et l'autre entendait bien le lui rappeler. L'homme ne sauva que de justesse son ocarnia, avant d'encaisser un ultime coup de pied. Puis, le geôlier se retira...

La capitaine semblait indécise alors que l'homme inspectait son instrument, puis les latrines, le visage curieux... Que faire ? Il s'agissait d'un ennemi, et un ennemi qui pouvait encore espérer remonter dans les bonnes grâces du Sans-pitié... mais ils n'avaient pas de meilleur interlocuteur en cet instant. Comme Mythanorië hésitait encore, Leyna prit les devants... et se mit à chanter la chanson dont l'homme avait joué la musique. Sa voix était basse, pour être sûre de ne pas être audible de l'extérieur de la cellule, mais elle devait être assez forte pour être entendue de l'homme...

Re: Le Port des Pirates

Posté : mar. 4 mai 2021 15:51
par Mythanorië
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*47*

Dans un silence étrangement clair de sens, les deux demi-elfes échangèrent un regard puis la jeune femme tendit la main, récupérant l'instrument de son compagnon. Mes yeux clairs se rivèrent un instant à la silhouette de la prêtresse et à l'impression d'immense tristesse qui émanait d'elle. Etait-ce son ressenti pour le prisonnier ou plutôt en lien avec la mélodie ? Ma méconnaissance de cet art ne me permettait pas de me forger une opinion assurée. Je me contentai d'écouter, percevant les deux instruments jouer de façon harmonieuse pendant une poignée de secondes. À l'arrêt abrupt du son et au silence étrange qui suivit, je n'eus aucun doute sur le fait que l'occupant de la cellule avait perçu l'étrangeté de l'événement. Mes yeux se plissèrent au soudain grincement des gonds de la lourde porte de la cellule, et au pas puissant de l'arrivant. Un individu vêtu d'une armure noire que je ne pouvais que mépriser puisque faisant partie des équipements notables arborés par ces méprisables Raies Sanglantes. Son visage était à moitié masqué par une visière, n'empêchant donc nullement une voix forte de se faire entendre dans la pièce. Il sermonna le prisonnier du nom de Mared pour le boucan occasionné. Mared... Mared... N'avais-je pas déjà entendu un nom similaire auparavant ?

Ma langue claqua légèrement d'elle-même tandis que j'assistai silencieusement au brutal coup de pied donné au musicien, qui le fit plier en deux et lâcher son instrument. J'eus un moment de compassion pour l'individu, jusqu'à ce que son visage fusse visible par l'ouverture. La flammèche empathique ayant pris naissance dans mon torse de bois fut soufflée d'un coup. La tête blonde m'était familière puisque celle du meneur de ces Raies à la toute origine de notre situation. Mared, chef des Raies sanglantes. Ou plutôt ancien chef, puisque son emprisonnement et son air abattu indiquaient visiblement sa déchéance. Mais par Moura, encore une autre énigme que cet homme. J'avais vu comment le Sans-Pitié avait fait s'ôter la vie au prisonnier Raie Sanglante que nous avions fait. Pourquoi lui mais pas le meneur de cette opération humiliante ? Un chef de troupes était évidemment important, mais s'il était confiné en cellule, à quoi bon le garder en vie ? Est-ce que, comme la soi-disant fille du tyran, il pût avoir un lien privilégié avec le dirigeant de l'île ?

Les paroles de l'arrivant confirmèrent certaines choses tandis qu'il lui piétinait la tête au sol. Le tyran l'avait effectivement à la bonne, ne faisant que le rétrograder au plus bas des échelons. Il allait également sortir un jour ou l'autre, et allait alors être aux ordres de l'individu brutal qui aurait réduit l'ocarina en miettes si le blondinet n'avait pas fait barrage de ses mains. Je pris note dans un recoin de mon esprit que l'instrument semblait avoir de l'importance pour ce type. Sitôt le type en armure sorti, le sang-pourpre bascula sur le dos et laissa son regard se poser sur les latrines.

J'hésitai. D'un côté, cet individu était directement responsable de notre calvaire et j'avais eu du mal à retenir un souffle nasal satisfait de le voir s'en prendre plein la figure. D'un autre côté, qui de mieux placé que lui pour détenir des informations utiles ? Et je pouvais parfaitement me souvenir de la coordination de ses troupes sous son commandement. On ne pouvait obtenir pareil fait d'armes sans avoir entrainé et peaufiné ses techniques. La brute devenue chef n'avait pas déjà pu obtenir la loyauté des Raies restantes. Alors que je réfléchissais, Leyna' se mit à fredonner la mélodie jouée plus tôt. Je n'étais vraiment pas certaine de la manœuvre.

J'avisai l'ensemble de la cellule, pensant au destin que lui et ses sbires avaient compté nous faire subir.

"Oh, la douce ironie..."

Je lorgnai ensuite brièvement vers la Prêtresse.

"Plus tard la berceuse, pas la peine de le cajoler davantage."

Je reportai froidement mon attention sur le faciès du blondinet, notant les traces de saleté masquant la marque qui avait du lui être faite lorsque son casque avait volé sous la force de l'attaque. J'esquissai un sourire cruel et amer.

"Attendez qu'il ait fait tous les gestes obscènes possibles avant de possiblement lui faire perdre sa main."

Mes yeux clairs restèrent rivés à l'individu allongé, mon sourire en coin persistant sur mes lèvres de bois.

"Confortable ?"



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Re: Le Port des Pirates

Posté : sam. 8 mai 2021 21:32
par Heartless
Lorsque Mared entendit le chant de Leyna, son expression se figea. Les yeux écarquillés, il laissa un nom s'échapper de ses lèvres tremblantes :

"Je deviens fou ? Malyinn ?"

Mais la voix qui lui répondit ensuite, la voix acide de Mythanorië, fit à nouveau se durcir ses traits. Il n'était pas parvenu à discerner l'identité de ses interlocuteurs, seulement d'où provenait leur voix, mais son ton indiquait clairement sa méfiance.

"Il n'y a qu'un terrestre pour s'occuper de confort... Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ?"

Sa voix restait cependant assez basse pour ne pas attirer l'attention. Toujours en train de se demander s'il n'était pas en train de perdre les pédales, il fit glisser son précieux instrument sur le sol jusqu'à lui.

Re: Le Port des Pirates

Posté : dim. 27 juin 2021 17:39
par Mythanorië
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L'attitude du sang pourpre, passant de l'incrédulité à l'évocation d'un nom aux sonorités féminines à la méfiance en m'entendant, me laissa de marbre. Ou presque. Malyinn... Le nom de la soi-disant fille du tyran. En d'autres circonstances, ma curiosité aurait eu le dessus quant à son lien véritable avec elle. Mais là, non. Une trop grande rancune faisait barrage à mon naturel. Dire que cet individu qui avait été à l'origine de l'attaque ayant coûté la vie de plusieurs de mes hommes se vautrait dans la fange sous nos yeux. En prime, il se permettait de m'insulter, indiquant que seuls des terrestres pouvaient se préoccuper futilement de confort. Pathétique.

Un sourire mesquin orna mes traits et je me laissai aller à lui répondre.

"Entre celui qui se roule dans la boue de sa cage et ceux qu'un chevaucheur de poisson a contraint à s'échouer ici, qui est entre nous le plus terrestre des deux, très cher ?"

Je durcis mon expression et jetai brièvement un œil à mes compagnons avant de poursuivre.

"Mais aux bouses de drakkarn cette petite conversation. Faisons-la courte, Mared. Mes hommes sont comme vous du mauvais côté des portes de cet endroit. Moi, non.

Je fis lentement jouer mes épaules, m'efforçant de refouler la rancune typique des vivants à sang chaud et de reprendre une attitude rationnelle. Depuis quand devais-je consciemment faire ce genre de choses ? La fréquentation des humains et autres non-boisés devait m'influencer, tout comme le nombre de contrariétés et dangers auxquels ceux sous ma responsabilité étaient soumis.

Je continuai de façon factuelle.

"On laisse nos rancunes de côté comme de bons capitaines en pleine tempête, et on coopère pour remettre les importuns irrespectueux des gens et des ocarinas à leur place. Pour ma part, j'envisage de... "

Je pris une courte inspiration, émettant un court son de réflexion puis tapant légèrement dans mes serpentins, j'ajoutai avec un brin d'enthousiasme.

"Les laisser utiliser leurs boyaux fumants comme pinceau pour faire de jolis portraits du tyran sur ces murs, ou plus simplement garnir les parois avec le contenu de leur crâne. Intéressé ?"

Si mes compagnons posèrent sur moi des regards particuliers, je n'en tins absolument pas compte.


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Re: Le Port des Pirates

Posté : mar. 29 juin 2021 18:58
par Heartless
Tous, à la suite de la capitaine, finirent par pénétrer dans la cellule et se massèrent autour de Mared. Celui-ci fulminait devant l'arrogance de l'oudio.

"Tu crois vraiment que je vais trahir-"
"Tu penses avoir le choix, petit ?"

Mouréna sortit des rangs, le visage impassible.

"Sans-Pitié t'a déjà jeté aux ordures."
"Mouréna ? Qu'est-ce qu'il fiche ici ?"
"Écoute."
"Non, Sans-Pitié m'a placé ici pour..."
"Pour faire de toi un exemple ! Il veut te voir perdre jusqu'à ta fierté. Il a peur que tes hommes se rebellent. Quand il t'aura brisé, ils n'auront d'autre choix que de le suivre."
"Il a pas besoin de faire ça, je lui ai juré ma loyauté !"
"Il s'en fiche."
"Qu'est-ce que t'en sais, vieillard ?!"
"Parce qu'avec moi, tu es le seul à savoir, pour Malyinn."


Mared se tut. Son regard en disait long sur la réalisation qui lui dardait l'esprit.

"Non..."
"Et tant que tu resteras sur cette île, tu seras un danger pour elle, comme pour lui. Il a exagéré l'humiliation de ta récente défaite parce que c'était l'occasion rêvée de se débarrasser de toi tout en s'assurant la loyauté de tes hommes."


Le Sang-Pourpre se mordit les lèvres. Une douleur immense transparaissait dans son regard. La douleur d'une trahison. Il devait être comme les autres soldats du maître de l'île : il l'avait craint et respecté comme un père. Mais il n'y avait aucune réciprocité. Il n'était qu'un outil du pouvoir, et ces sentiments étaient des chaînes invisibles, moteurs de dépendance et de fanatisme, les armes d'un habile dictateur.

"... Qu'est-ce que je suis censé faire, maintenant ?"

Mouréna indiqua le groupe hétéroclite du regard.

"Tu les as blessés. Mais ils sont prêts à te laisser une seconde chance. Vous avez désormais un ennemi commun."

Le Sang-Pourpre jetait des éclairs à son entourage, et en particulier à ceux qu'il reconnaissait de la Rascasse. Il éprouvait pour eux un mépris considérable, mais il dût se résigner. Il ne pouvait pas juste croupir ici jusqu'à mourir dans le déshonneur. Il se releva avec difficulté, car les coups qu'il avait subis l'endolorissaient encore, mais il finit par se tenir droit devant Leyna et Mythanorië.

"Qu'on soit clairs sur un point. Je ne réponds aux ordres de personne."
"Comme tu voudras. Maintenant, si un voleur serviable pouvait s'occuper de cette porte..."
"Déjà d'ssus, l'ancien."
répondit Makkar.

Les doigts agiles du vaurien ne perdirent pas de temps et la serrure fut vite forcée.
Derrière la porte de la cellule se trouvait un long couloir. Aucun garde ne semblait passer par là pour le moment. De part et d'autres de ce corridor, de nombreuses Raies Sanglantes, condamnées pour leur échec à écouter les cris pathétiques de leur leader, croupissaient dans des geôles. Leur surprise fut grande de constater la trahison et l'échappée de Mared, mais ils firent bien vite savoir que c'était envers lui que se trouvait leur loyauté. Libérés à la demande du Sang-Pourpre, les Raies Sanglantes, bien que dépouillées de leur équipement habituel, restaient des guerriers entraînés, capables de neutraliser tout garde qui croisait le chemin du groupe.

"Vite, c'est qu'une question de temps avant qu'ils ne donnent l'alerte."

Mared guida le groupe dans le dédale souterrain du terrain d'entraînement, libérant tout détenu qu'il trouvait, jusqu'à ce qu'ils arrivent enfin devant un visage connu de Leyna et de Mythanorië. Lydia leva les yeux, choquée de voir des camarades de l'autre côté des barreaux. Elle se rua jusqu'à eux.

"Qu'est-ce que vous fichez ici ? C'est du suicide !"

Elle se calma lorsqu'on ouvrit la porte de sa cellule. Elle avait été enfermée dans une cellule commune avec les autres femmes de l'équipage, probablement pour être vendues comme esclaves plus tard. Une femme restait isolée dans un coin, refusant de se lever pour rejoindre les autres à l'extérieur.

"On était retenues dans des conditions exécrables. Elle a... son fils..."

"Mathias", murmurait la mère brisée. Une indignation silencieuse montait devant cet énième crime de Sans-Pitié. Lydia la prit sous son bras pour qu'elle suive le groupe. Dans ce même couloir, ils trouvèrent tous les membres de l'équipage de la Rascasse Volante encore vivants, bien qu'amochés. Enfin au complet, ils avisèrent qu'il était enfin temps de sortir de ce guêpier. Mais, bien qu'ils aient réussi à retarder le son de l'alerte, celui-ci finit par retenir et les gardes du camp, vétérans comme recrues, se ruèrent dans toutes les directions pour réprimer les évadés.

Cependant, l'équipage entier de la Rascasse Volante et les rebelles des Raies Sanglantes avaient fini par trouver leur équipement confisqué. Après une lutte ardue, ils parvinrent à effectuer une percée et à sortir des souterrains. Mais que pouvaient-ils faire désormais, piégés sur une île mortelle, au beau milieu d'un camp rempli d'ennemis ?

L'affrontement ne fut pas facile. Il y eut des morts de chaque côté, et chaque minute semblait rapprocher les évadés restants de leur exécution, lorsque soudain, un bruit assourdissant de roche percée se fit entendre sur les murailles du bord de mer. De grands grappins avaient été lancés depuis la mer en bas de la falaise. Eliwin guida tout le monde jusqu'aux murailles, car le navire qui leur avait envoyé ce secours n'était nulle autre que le leur, la Rascasse Volante.

Sans avoir le temps de se soucier de la personne à son bord, les rescapés se saisirent chacun d'un bout d'étoffe ou d'un morceau de cuir pour glisser le long des cordes tendues, une manœuvre dangereuse qui permit à tous les survivants de joindre la Rascasse, non sans difficulté. Lorsque des acharnés du camp de Sans-Pitié tentèrent d'emprunter ces mêmes cordes pour poursuivre les évadés, elles furent promptement coupées et ils moururent tous d'une chute vertigineuse.

Les ordres furent donnés dans l'urgence et tous se mirent au travail d'une seule voix. Lorsque la Rascasse fut assez éloignée du conflit, son équipage eut pour la première fois depuis une éternité l'occasion de réfléchir à tête reposée.

Mais cette sérénité ne dura pas longtemps. L'homme qui avait récupéré la Rascasse et qui leur avait porté secours n'était autre que Gallion Thunderhead, porteur d'un message important.

"Navré, les morveux. J'sais que vous brûlez d'envie d'vous venger, mais y'a une guerre comme y'en arrive que tous les cent ans qui se prépare, au Nirtim. Oaxaca entoure Oranan. Mazhui est sur place, il m'a dit où vous trouver."
"Et ? J'vois pas en quoi ça nous concerne."
intervint Samrik, qui semblait plus intéressé par la situation sur l'île.
"Vous, en particulier ? Pas grand-chose. Mais c'est une occasion en or pour que la Confrérie d'Outremer se démarque et devienne une véritable organisation aux yeux du monde. C'est pour ça que Sirius Heartless s'en est mêlé."

Eliwin fronça les sourcils à la mention d'Heartless, étant l'une des rares personnes présentes à l'avoir fréquenté.

"Ouais, Eli. Il est là-dedans, il est là-dedans jusqu'au cou, même. Bon, écoutez, j'vous force pas à venir, z'êtes indépendants. Mais prenez ça comme une manière de me rendre la pareille. Z'imaginez pas à quel point ça a été chiant de piquer ce rafiot. D'ailleurs, vous allez sans doute pas me croire, mais j'ai croisé un piaf géant en venant ici, il avait l'air d'être fait de brume. J'ai ptèt trop forcé sur la boisson. En tout cas, c'est pas comme si l'île du Serpent allait s'évaporer du jour au lendemain. Réfléchissez-y bien."

Ce qu'il se passerait ensuite était du ressort des hommes et femmes de la Rascasse. S'ils décidaient de quitter l'île, Mouréna, ainsi que Makkar, se sépareraient d'eux. La guerre ne les concernait pas, et cette île était pour eux pleine d'affaires en suspens. Cependant, Mared choisirait de la quitter, au moins momentanément, pour le bien de ses hommes et de Malyinn. Après avoir récupéré leurs montures au terme d'événements qui ne concernaient qu'eux-mêmes, les Raies Sanglantes étaient opérationnelles à nouveau, bien qu'à leur propre compte, désormais. N'ayant nulle part où aller, ils resteraient avec la Rascasse. Gallion Thunderhead insistait pour rejoindre le front kendran, mais il avait plus de respect qu'avant pour Mythanorië et son équipage, après leurs mésaventures. S'ils décidaient d'aller autre part qu'au Nirtim, il demanderait à ce qu'on le dépose au premier port rencontré.


((( Vous êtes libérés du dirigé à partir d'ici, accompagnés par Thunderhead, Mared et le reste des Raies Sanglantes. Considérez que vous avez récupéré la Rascasse en bon état ainsi que tous les membres d'équipage importants, à l'exception du petit Mathias. )))

Re: Le Port des Pirates

Posté : mer. 30 juin 2021 17:08
par Leyna
La capitaine alpaga le fameux Mared, se moquant presque de sa situation, et lui faisant savoir qu'il n'avait guère d'autres choix que d'aider les pirates. Elle comptait bien libérer le reste de l'équipage et décrivit en termes fort imagés ce qu'elle comptait faire aux sang-pourpres qui lui résisteraient. La prêtresse la regarda avec surprise, décidément, la capitaine avait été sacrément secouée par les derniers événements. L'homme semblait furieux, mais Mouréna intervint à son tour. Il connaissait Mared, et savait également tout de la traîtrise du Sans-pitié. Apparemment, ils savaient également tous les deux quelque chose sur la mystérieuse fille cachée du pirate, et celui-ci semblait avoir voulu se débarrasser d'eux pour cette raison.

Finalement, l'homme sembla se reprendre et accepter de mauvaise grâce de les aider. Il se releva, et Leyna, sans hésiter, saisit les planches et invoqua la force de Moura. En quelques minutes, elle les avait arrachées et ainsi ouvert le chemin de la cellule. Aussitôt, Makkar se précipita à l'assaut de la porte et, de ses doigts agiles, fit sauter la serrure.

De là, ils commencèrent à ouvrir toutes les cellules qu'ils trouvaient. Ici étaient détenus les passagers de la Rascasse, mais aussi nombre des Raies sanglantes de Mared, de sorte qu'ils se trouvèrent bientôt avec une petite armée mal équipée, mais féroce. Les gardes, pris par surprise, furent submergés, tués, et leurs armes récupérées.

Dans une cellule, ils trouvèrent Lydia et la femme qui avait accouché à bord. L'enfant était pourtant absent, et la mère livide et silencieuse. La cruauté du Sans-pitié avait encore frappée, brisant une vie... Cette même vie dont Leyna avait assisté à la naissance. La prêtresse s'immobilisa, saisie d'incompréhension. Pourquoi ? Pourquoi faire une chose pareille ? Cela n'avait aucune utilité... Elle se joignit à Lydia pour aider la femme à se lever, et entonna une douce chanson apaisante, autant pour elle-même que pour la mère brisée.

Mais à ce moment-là, les cris d'alerte commencèrent à tomber du dehors. Les sang-pourpres allaient arriver en masse ! Malgré la fatigue, la prêtresse rejoignit ses compagnons, en position de combat.

Les sang-pourpres s'organisèrent spontanément pour former un front uni. La prêtresse se porta aussitôt au-devant, alors que les gardes s'assemblaient également, et elle cria :

« MOURAAA ! »

Une vague se forma dans son dos et le propulsa en avant ! Portée par la fureur de la déesse, elle frappa de plein fouet un soldat qui fut violemment projeté en arrière, percutant ses camarades au point de briser la tentative de début de formation. Les autres l'avaient suivi, et le choc terrible fit des victimes dès le début du combat. Leyna frappait férocement de sa dague, bondissant et louvoyant au milieu des ennemis pour esquiver les coups, quitte à ne point trop attaquer. Malgré cela, elle reçut une estafilade au bras et un coup de bâton qui lui amocha sérieusement l'épaule au point de laisser son bras pendant, engourdi. Dans son état, un tel combat était risquée, mais c'était le moment ou jamais de frapper de toutes ses forces. Des geysers jaillirent alentours pour renverser les ennemis. La première vague, désorganisée, trempée et lourdement amoindrie, fini par reculer pour se reformer. Des renforts arrivaient déjà pour se joindre à eux...

Cette fois-ci, certains se placèrent avec des boucliers pour bloquer la charge. Qu'à cela ne tienne. Leyna invoqua une nouvelle fois son pouvoir :

« MOURAAA ! »

Et du sol, une formidable marée jaillit, une vague féroce qui balaya toute l'armée ennemie. Dans la foulée, les anciens prisonniers leur tombèrent dessus et firent un massacre... Mais cette fois, la prêtresse n'était pas avec eux. Elle était épuisée, un genou à terre, et ses forces commençaient à la lâcher.

(Dame des flots, aide-moi...)

Mais Moura l'avait déjà tant aidé... devait-elle vraiment attendre plus ? Elle se releva péniblement et suivit le groupe jusqu'à l'extérieur. À la lumière du jour... ils étaient arrivés dans la cour du camp !

Cour où les attendaient toute une armée de gardes... C'était la fin, ils ne pourraient pas vaincre tant d'adversaires... Alors, la prêtresse se mit à chanter. Elle chanta la gloire, la force et la bravoure des peuples de la mer, qui ne renonçaient pas devant la tempête. La fureur des flots qui porterait les échos de leur lutte. L'océan est éternel et ne s'arrête jamais, et ainsi, à travers ses vagues, leurs âmes allaient continuer à voyager. Unis, dans le royaume de Moura.

Un choc sourd. Puis un autre ! Eiliwin leur cria de monter aux murailles et, de là-haut, ils purent contempler le miracle : La Rascasse était en bas ! Elle avait tiré des grappins qui s'étaient plantés dans le mur pour leur offrir un lien de vie. Aussitôt, pirates et raie sanglantes commencèrent à prendre tout ce qu'ils pouvaient de morceau de tissu ou de cuir pour se laisser tomber en glissant le long des cordages. Leyna n'avait pas grand-chose, et son bras blessé, l'empêchait de réaliser de tels acrobaties, mais Nahöriel avait déjà trouvé de quoi se sangler par la ceinture. Sans plus de formalités, il la saisie par la taille et la souleva ! La prêtresse s'accrocha à lui et ferma les yeux, laissant le vent siffler à ses oreilles.

L’atterrissage fut violent et elle roula sur le pont du navire. Pas mal d'ecchymoses en perspectives, mais elle était vivante ! Nahöriel, légèrement rougissant, lui demanda si tout allait bien. Il n'était pas lui-même blessé, c'était l'essentiel. Elle hocha la tête, sourit, et s'assit pour se mettre à prier. Déjà, autour d'elle, les matelots s'activaient pour fuir l'île et la colère du pirate humilié qui avait prétendu dicter sa loi. Il avait échoué. La confrérie était libre !

Re: Le Port des Pirates

Posté : ven. 2 juil. 2021 23:11
par Mythanorië
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Près de nous, des bruits de pas me firent tourner la tête vers l'entrée du boyau. À ma grande surprise, je vis le reste du petit groupe laissé en bas longer la roche, Eliwin en tête. Visiblement, ni lui, Samrik ou Makkar ne supportait plus l'idée de rester sans rien faire. La corde qui avait servi à sécuriser notre montée me fut rendue, et je haussai légèrement un sourcil puis les épaules. C'était appréciable, mais cela signifiait aussi qu'il nous serait difficile de nous replier par cet accès. J'esquissai toutefois un sourire froid. Après tout, nous n'étions pas vraiment venus pour explorer un tunnel malodorant et repartir la queue entre les jambes. Ce fut donc sans cérémonie que je me hissai dans la cellule du fulminant blondinet et aidai mes compagnons à faire de même. Persifflant, le Mared commença à rétorquer ne jamais trahir le tyran local, mais sa tirade exaltée fut tuée dans l'oeuf par Mouréna. La présence de l'éarion le figea un bref moment. Tous deux se lancèrent dans un échange intense, l'elfe âgé lui faisant rentrer dans le crâne que le Sans-Pitié l'avait envoyé ici pour le briser, malgré sa visible loyauté et simplement parce que... Le meneur des Raies Sanglantes était le seul autre individu à connaître l'existence de la dénommée Malyinn. Donc, une menace potentielle pour elle comme pour le cruel dirigeant. Son échec face à nous et sa déchéance n'étaient qu'un prétexte pour l'évincer tout en conservant la loyauté de ses troupes d'élite.

Inclinant légèrement le chef sur le côté, je croisai les bras avec une expression à la limite de la moquerie. Ce devait être franchement humiliant d'être ainsi rabroué et de voir son monde s'effondrer devant ceux qui ont causé ses déboires. Mais après tout, la faute lui en incombait à la base. En d'autres circonstances, j'aurais probablement eu un brin d'empathie pour lui. Mais là, non. Je ne fis pas le moindre geste pour l'aider à se remettre debout, même si la trempe qu'il avait reçu l'avait bien amoché. Il poignarda la Prêtresse et moi-même du regard, avant d'affirmer ne répondre aux ordres de personne. Je ne réagis même pas à sa remarque. J'avais déjà eu droit à un mutin dans l'équipage que j'avais su ranger à mes côtés après des mésaventures communes, je n'avais aucunement l'intention de perdre mon temps à amadouer ce type. Mon attention se détourna bien vite de lui quand Makkar se lança à l'assaut de la serrure de la cellule, suite à la demande de l'elfe âgé. La porte donnait sur un couloir mal éclairé, et je compris bien vite que le boyau donnant sur la falaise n'était pas le seul passage taillé dans le roc. Les geôles visibles de là devaient faire partie d'un impressionnant complexe souterrain. Sur le moment, aucun garde en vue. Mais aucun de nous ne se faisait d'illusion. Tôt ou tard, cela n'allait plus être le cas.

Je fronçai les sourcils en voyant les détenus proches, faisant partie des Raies Sanglantes arrêtées. Je fis au mieux pour laisser mes sentiments parasites de côté, tenant un serpentin sur la garde de ma lame tout en gardant un œil aux alentours. Bien vite, Mared rallia ses hommes qui semblaient effectivement lui être personnellement fidèles plutôt qu'au tyran de l'île. Nous remontâmes le couloir, libérant les autres détenus au passage, explorant rapidement les passages annexes pour faire gonfler nos rangs. Bientôt, nous trouvâmes une grande cellule. À l'intérieur, l'ensemble des femmes de la Rascasse Volante. Lydia se précipita contre la porte, surprise et inquiète de nous voir. Je ne pus retenir un sourire à sa qualification de notre sauvetage en opération suicide. Est-ce que tout ce que j'avais déjà entrepris depuis ma venue dans la Confrérie n'aurais pas pu être désigné ainsi ? Mon expression se ferma quand je constatai qu'une des femmes restait prostrée, l'air plus abattu que le reste. La vigie me fit comprendre à demi-mot que son fils Mathias, le plus jeune membre d'équipage car né à bord, avait été victime du Sans-Pitié. Une colère froide emplit mon torse. Quel avait été le besoin de ce sinistre personnage de briser ainsi les esprits d'opposants déjà vaincus ? Je me jurai alors de lui faire la peau, quoiqu'il m'en coûta.

La nouvelle sembla faire oublier les maux et galvaniser les membres de la Rascasse suivants que nous sortîmes de leurs cellules. Une porte plus loin céda, dévoilant les armes confisquées de mon équipage et des hommes de Mared. Nous venions tout juste de finir la répartition quand l'alerte fut donnée, les couloirs se remplissant de sang-pourpres lourdement équipés pour certains, ou assez jeunes pour que leurs lames paraissent plus épaisses qu'eux. Je jetai brièvement un regard à Mouréna, me souvenant de son air navré à l'idée que la jeunesse de l'île fasse les frais de tout ceci. Mais nous n'avions guère le choix. Ils se tenaient entre nous et la sortie. C'était eux ou nous.

La Prêtresse déclencha les hostilités, sa magie d'eau émergeant comme une vague scélérate et venant percuter les premiers gardes nous faisant face. Ils furent repoussés suffisamment pour se heurter, mais d'autres prirent la relève rapidement. Nombreux, dans un espace peu pratique. Mon regard croisa celui d'Eliwin et de Samrik avant de nous placer dos à dos, encadrant les éléments les plus blessés de mon équipage. Cris combattifs, bois contre bois, armes contre chair. Des sons terribles firent écho dans le passage. Je fis face à deux gardes assez jeunes, armés d'une épée courbe. Tous deux attaquèrent en même temps. Je parai la lame de droite et la repoussai vers son voisin. Ils se gênèrent un bref instant avant de repartir à l'attaque. Sur la défensive, je continuai de chercher à dévier une arme vers l'autre et à profiter de l'ouverture de leur garde. Mais ces sang-pourpres apprenaient à vue d'oeil, mon épée finissant dans le vide ou contre celle d'un adversaire. Il me fallait les prendre de vitesse ! Frapper différemment !

Leurs deux armes s'abattirent ensemble vers moi, et j'eus juste le réflexe suffisant pour les bloquer en tenant mon arme à l'horizontal. Serrant la mâchoire, je jetai un regard aux environs. La zone était des plus chaotiques, les gardes semblant cueillir les prisonniers les plus faibles ou moins attentifs comme des fruits mûrs. Je vis alors la silhouette massive du demi-garzok, ses deux armes en main, se lancer à l'assaut. Sa musculature joua, ses deux sabres s'abattant comme s'il avait plusieurs bras en direction des gardes. Quatre types visés, un qui se jette en arrière et évite le coup, deux autres recevant une lacération profonde au bras d'arme et le dernier... La giclée de sang de sa gorge aspergea les alentours, faisant se tétaniser certains combattants et aveuglant même certains dans la mêlée. Celui qui avait esquivé le coup en se propulsant à l'opposé, fut réceptionné par les dagues jointes de Leyna' et Nahöriel louvoyant dans la bataille.

Avec un cri, je repoussai les deux hommes me prenant pour cible. Frapper vite. Si vite que je pourrais les enchainer comme mon maître d'arme. Je lançai un coup d'estoc vif, cherchant à ramener mon bras d'arme assez vite pour le relancer. Pas assez. Prise de court par une riposte, je fus contrainte de pivoter pour mettre mon épaule opposée à l'abri. Un mouvement à la limite de mon champ de vision me fit rapidement tourner le regard vers Lydia, la femme d'âge mûr dos à la paroi, luttant en tenant difficilement les avant-bras d'un garde abattant sur elle une lame courte, protégeant la jeune mère éplorée courbée à ses côtés. Ma main se tendit, projetant une salve d'eau contre le crâne du sang-pourpre. L'homme fut percuté de plein fouet, ses bras furent déviés sur le côté par sa victime, et son élan fit que sa tête fut projetée si fort en avant qu'il se cognât contre le mur au-dessus de l'épaule de la vigie. Sa forme s'affaissa contre elle, et la voix irritée au langage fleuri se fit entendre.

"Eurk ! Pas l'premier soir, enfoiré !"

Je sursautai au brutal son de métal heurtant le métal, juste au-dessus de ma tête. Eliwin gronda férocement, repoussant l'un puis empalant l'épaule de l'autre des jeunes sang-pourpres contre lesquels je luttais, de deux attaques vives et fulgurantes. J'admirai brièvement sa façon de faire, ses gestes courts mais fulgurants comme ceux de Samrik. Il me jeta un regard ainsi qu'un conseil dans un grognement courroucé. Il me fallait moins réfléchir. Je n'eus pas le temps de m'attarder, ciblée par un garde à lame droite cette fois, et devant reculer vivement pour ne pas être percutée. Peu à peu, la pression des gardes croissait tandis que notre troupe hétéroclite demeurait bloquée ou contrainte à reculer. Les Raies sanglantes s'en sortaient le mieux, plus familières des formations employées.

Alors que deux autres sang-pourpres se joignaient à celui aux prises avec moi, j'entendis un appel à l'aide proche. L'instinct me fit produire un flash brutal de lumière. Des grondements surpris furent suivis de ceux de douleur quand mes compagnons sautèrent sur l'occasion d'empaler ou cogner leurs vis-à-vis. Je mis à profit cette même opportunité pour imiter mon maître d'armes et mon protecteur, armant mon bras et cherchant à frapper en rapide succession. Si je parvins à blesser la joue d'un adversaire, le coup vers l'épaule de son voisin n'eut pas le temps de l'atteindre avant qu'il se reprenne. Sa propre épée ripa le long de la mienne, venant déchirer ma manche et taillader l'écorce présente en-dessous. Tandis que ma sève s'accumulait sur la plaie, ma frustration croissait. Je voulais le frapper, lui et son voisin et celui qui allait immanquablement venir après eux !

Plus vite. Plus vite ! Pourquoi par Moura étais-je aussi lente entre deux frappes ? Et quand j'étais suffisamment véloce, mon épée déviait totalement de sa cible, ouvrant ma garde de manière magistrale. Une arme manqua de peu ma jambe, et une autre perfora l'exact endroit où la lance m'avait clouée au sol dans la ruelle. Je me courbai brièvement à l'impact, revivant cette sensation de courroux d'alors. Ne prêtant plus attention où je posais les pieds ou au reste, mon attention se riva sur mes assaillants. J'avais hésité, le dépit de Mouréna retenant quelque part mon geste quand il s'agissait d'affronter jeunes pousses enrôlées depuis l'enfance. Je n'avais plus le luxe de m'y adonner. Question de vie ou de mort, et pas que pour moi. J'avais retrouvé mon équipage, hors de question de le perdre à nouveau dans cet endroit affreux !

Je m'efforçai d'oublier le poids de mon corps ou le tiraillement de mes fibres végétales, ne pensant qu'aux coups à porter. Une juste colère guida ma hargne envers eux. Baissant les yeux vers le métal fiché dans mon écorce, je grondai férocement. J'enroulai mes serpentins de bois autour du poignet cherchant trop tardivement à se retirer, poignardai du regard l'imbécile et plongeai ma lame en avant, en plein torse du peau-bleue. Retrait, décalage, plongeon vers le bras armé voisin venant à ma rencontre. Deux coups, deux touches. Non, une. L'autre n'ayant qu'effleuré du plat de l'épée sans blesser. Je voyais déjà cet échec me valoir une nouvelle et douloureuse blessure. Par instinct, je me crispai.

Un sabre fit un mouvement de bas en haut avec violence inouïe, tranchant le poignet propulsant jusque-là une arme vers mon visage. Liquide chaud sur ma joue. Opportunité. Mon épée plongea dans la gorge de l'homme fraichement amputé, lacérant la zone puis partant immédiatement sur mon côté droit, repoussant sans causer de dégâts un autre sang-pourpre chargeant dans le dos de Samrik. Le demi-garzok pivota, leva ses deux sabres et abattit avec une brutalité lui semblant anodine son duo d'armes contre le torse armuré. Le métal s'enfonça sous l'impact. Pas assez pour être percé, suffisamment pour couper son souffle à l'agresseur. Un gourdin venu de la mêlée acheva le travail en faisant tinter le casque façon cloche, étourdissant assez le garde pour le déséquilibrer. Il trébucha sur le corps d'un homme que je reconnus comme l'un des miens. Un de mes gabiers, grandement apprécié par son habitude de toujours payer sa tournée à terre, même s'il devait vendre sa chemise pour honorer sa parole. Arme tremblant un instant. Nombreuses étaient les anecdotes où il revenait en longeant les murs avec un bol sur l'entrejambe, mais la satisfaction d'avoir tenu parole.

L'esprit vengeur, je serrai fermement le manche de mon épée puis avisai ma victime froidement. J'épinglai ensuite l'intérieur de sa cuisse entre les deux plaques brillantes recouvrant avant et arrière, pile sous les attaches. L'une de ses mains essaya illogiquement d'attraper ma lame, mais je la retirai, tranchant sa paume au passage. Le fil acéré replongea ensuite, transperçant la main venue se poser contre la blessure sévère et l'aggravant sans merci. Ce ne fut qu'une fois tremblant, la main et le sol couverts de son sang que je repris et agitai ma lame, percutant sans conséquences son profil du plat avant de me détourner de cette perte de temps agonisante.

Un cri d'alerte de notre groupe retentit, prévenant de l'arrivée de renforts sang-pourpres avec boucliers. Rejointe par Eliwin et Samrik, je fis front et mis à profit cette rage, l'exemple et les conseils prodigués. Ne retenant pas mon assaut, mes compagnons faisant de même de part et d'autre de moi, je frappai avec vigueur et si vite que mon membre me parut brièvement flou. Trois attaques, trois coups au but. Un impact contre mon profil exposé fit éclater une douleur certaine et me repoussa avec brutalité. Un bref instant étourdie, je crachai une portion de salive au goût de sève, reculant pour ne pas choir. J'avais bien atteint toutes mes cibles, mais les boucliers avaient absorbé la totalité de l'attaque.

Le nom de Moura fusa soudain près de nous, et nous eûmes à peine le temps de sortir de la trajectoire que Leyna' fit jaillir une vague dont elle avait le secret. L'eau conjurée se rua sur les gardes bien plus fortement qu'une de nos charges l'eût pu fait. Elle en déséquilibra certains et renversa le reste. L'occasion rêvée ! Je levai mon arme, criant comme les autres prisonniers. En une vague humanoïde, meurtrie et apercevant la lueur au bout du tunnel après tant de souffrance, nous nous jetâmes contre les geôliers. Cette fois-ci, plus de targe ni pavois miniature en travers de mon chemin. Impitoyable, j'épinglai par trois fois des sang-pourpre à terre. J'ignorai si cela eût pu leur être fatal, mais je m'en moquai. S'ils périssaient, tant mieux. S'ils s'en relevaient, que leurs cicatrices leur confèrent le souvenir impérissable des membres de la Confrérie d'Outremer !

La voix du blondinet se joignit à la mienne en un ordre faisant écho dans le passage, nos regards tournés vers la sortie.

"En avant !"




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- Tentative d'apprentissage de la CC 'Les Cents lames'

Re: Le Port des Pirates

Posté : lun. 16 août 2021 23:58
par Mythanorië
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Dans la pénombre grandissante du jour mourant, de larges braséros offraient un éclairage aussi dangereux qu'inquiétant. Ce ne fut qu'aux premiers cris que je reconnus le claquement perçu comme celui de plusieurs arbalètes déclenchées en même temps. Un comité d'accueil auquel j'aurais du m'attendre, mais qui me prit de court tout de même. Une Raie sanglante prit un carreau en plein thorax, le tuant sur le coup. Deux prisonniers furent blessés aux flancs, et d'autres tirs se perdirent dans le groupe sans sembler causer davantage de blessures graves. Je levai les yeux, découvrant une poignée d'arbalétriers sur les remparts à l'opposé de la porte du fort, les marches pour les atteindre gardées par des sang-pourpres formant un mur de boucliers et de lances. Un autre contingent aussi impressionnant nous flanquait de l'autre côté, interdisant le passage vers la sortie. Par Moura, d'où venaient-ils tous ? Avions-nous à ce point sous-estimé leur nombre, mettant cela sur le compte de l'isolement des lieux ?

Peu à peu, mais inéluctablement, les piquiers s'avançaient. D'intrépides prisonniers tentèrent de filer sur le côté, mais leur tentative se solda par une paire de carreaux se plantant devant leurs jambes. Il y eut une invective, venant d'on ne savait où, nous intimant de cesser de résister. Derrière moi, j'entendis Mared ordonner à certaines Raies de faire demi-tour, quelques-uns de ses hommes replongeant dans le souterrain. Mon regard clair se posa sur les arbalétriers puis, entendant un bruit de course, je regardai vivement par-dessus mon épaule. Les Raies sanglantes avaient saisi les targes et boucliers des premières vagues et semblaient prendre de l'élan. La tactique me sauta aux yeux et je concentrai mes fluides de lumière, attirant délibérément l'attention sur moi en émergeant des rangs. Les armes à longue distance se braquèrent sur moi. Je réitérai la même stratégie qu'au village, aveuglant de mes pouvoirs ceux qui m'avaient pris pour cible. Dans la nuit tombante, le contraste fut saisissant, mais il n'empêcha pas une poignée de projectiles de filer vers moi. L'un d'entre eux se planta dans l'ourlet de ma botte, la pointe piquant l'écorce de mon mollet et la traversant assez pour épingler mon pied au sol. Un autre se ficha dans mon manteau, le traversant de part en part sans m'affecter.

Le blondinet sonna la charge, ses hommes parés des boucliers se précipitant en deux groupes distincts vers les piquiers. Samrik et quelques membres de la Rascasse suivirent le mouvement vers la porte, Eliwin et les autres optant pour le côté opposé. Des cris guerriers firent écho dans le fort, les pièces de bois renforcées se percutant contre les lances, repoussant certaines, s'empalant sur d'autres. Grimaçant, je retirai le projectile de ma jambe, dardant un regard meurtrier sur les combattants à distance. Il me fallait les déloger de là, mais ma projection aquatique était trop fine pour frapper plus d'une cible à la fois. Les sang-pourpres attaquant de loin allaient avoir le temps d'aligner les nôtres à loisir. Je réfléchis vivement, cherchant une solution. Un raz de marée ? Je risquais d'affecter mon équipage et nos alliés temporaires. Mes yeux tombèrent sur la Prêtresse affaiblie, me faisant songer à sa façon de combattre. Un sort puissant, pouvant renverser plusieurs personnes. Je l'avais déjà vue faire. Un effet de projection, mais surgissant directement sous les pieds.

Je concentrai mon attention sur les jambes des arbalétriers, poussant mon fluide à frapper de là. Ma magie se manifesta, mais depuis ma main étendue. Je jurai dans un souffle, mon habitude de ce sort m'influençant au point de rater totalement ma tentative. Devant moi, la mêlée gagnait en intensité. Les Raies poussées à utiliser les targes pour se défendre des carreaux se faisaient repousser par les sang-pourpres en mêlée, voire attaquées par surprise quand les piquiers troquèrent leurs armes gênantes pour des équivalents plus courts. Je réitérai mon essai, visant l'arbalétrier le plus proche de moi quand l'assaut d'un garde contre une de mes membre d'équipage me fit changer ma trajectoire. L'homme reçu la projection d'eau en pleine figure, le faisant suffoquer suffisamment pour que Lydia lui rentre dans le torse coude en avant et récupère son arme. Je clignai des yeux deux fois en voyant la dame en robe violette armer son bras avec javeline. Le pic fut lancé avec puissance et précision, venant presque se ficher dans l’œil d'un arbalétrier retendant son arme. Le sang-pourpre fut achevé par le tir précis du pirate Makkar.

Dans mon dos, le Semi-garzok fit écho au cri précédant de la Prêtresse, scandant le nom de la déesse en faisant virevolter ses deux lames. Concentration. Faire comme autrefois. Pour parvenir à mes fins, duper mon instinct. Je connaissais un autre sort me permettant de faire jaillir de l'eau depuis un point éloigné. Penser raz-de-marée et utiliser la projection à la place. Je tendis ma main libre une nouvelle fois vers les remparts, canalisant mon énergie magique. Concentrée, je pouvais sentir mon fluide jouer, mais au moment de matérialiser mon sort, celui-ci fit une bulle aqueuse à l'aplomb de ma paume. Je n'eus pas le réflexe d'enrouler mes serpentins, et une brusque lame d'eau vint percuter ma main par en-dessous. Ramenée contre mon torse, je la secouai en persifflant. Très vite, j'oubliai mon douloureux inconfort, me jetant en avant pour détourner une épée courte destinée au flanc de Mared. Il répondit en assénant une brutale charge d'épaule contre son agresseur, puis il me jeta un bref regard. Nos deux têtes se détournèrent en même temps et je me courbai juste à temps pour éviter un trait destiné à ma cime.

Enroulant et déroulant les serpentins, je fis de nouveau appel à ma magie aqueuse. J'y étais presque, je pouvais le percevoir ! Un point de départ plus clair, plus défini, sous leurs pieds ! Mon sort fut lancé sur un arbalétrier penché et tirant sur son arme pour la recharger. Un éclat d'eau sur ses bottes. Il émit un juron, tapant du pied dans une flaque formée sous ses appuis. Une simple flaque.

"Par toutes les épaves des tréfonds !"

La mêlée recula finalement jusqu'à moi, et je fis au mieux pour épauler Eliwin aux prises avec deux gardes. Bousculée par un prisonnier repoussé, je manquai de peu choir. Une trace sanguine macula mon manteau, et je réalisai soudain l'ampleur des blessures des uns et des autres. À ce rythme, nous n'allions pas tenir longtemps. Plaquant mes serpentins contre mon torse, je mis en suspend mon objectif. Si tous les prisonniers s'effondraient, peu importât ma réussite contre les assaillants à distance, nous allions échouer à nous sortir d'ici. J'enveloppai mes plus proches compagnons d'une lueur curative, résorbant les plaies gênantes aux environs. Soudain, une clameur venant de l'autre côté me fit tourner la tête vers les portes, et je vis avec une terrible inquiétude le groupe opposé reculer vers nous, repoussé par les gardes. L'étau commençait à se refermer sur nous. Je fis jaillir ma magie d'eau, percutant les jambes des présents, comprenant aussi bien les adversaires que nous. Ceux en armure avaient du mal à reprendre leurs appuis, tanguant ou se penchant pour ne pas choir. Mais ce faisant, nous fûmes exposés aux carreaux meurtriers. Plusieurs d'entre nous tombèrent, rudement touchés voire tués sur le coup. Mes membres d'équipage... Abattus comme des bêtes enragées. La situation allait de mal en pis, les forces des prisonniers diminuant de minute en minute. Le moral chutant aussi de cette salve sanglante. L'issue devenait de plus en plus sombre pour nous.

Soudain, une série de bruits sourds s'accompagnant d'exclamations provenant des remparts attira l'attention de la plupart des présents. Les pierres du mur donnant sur la mer avaient été cible de grappins, les percutant avec assez de force pour projeter des éclats contre les tueurs des hauteurs. Eliwin donna de la voix, ordonnant un repli vers la muraille. Exhortant les survivants à prendre d'assaut les escaliers jusque-là défendus, relevant et poussant les trainards, je fis front avec le maître d'arme à reculons pendant que le meneur des Raies sanglantes et mon Second se ruaient contre les arbalétriers. Deux d'entre eux furent jetés à bas des murailles, un autre binôme tentant de ralentir mes compagnons pendant qu'un dernier alignait son arme sur la tête de mon protecteur. Réagissant plus que réfléchissant, je visualisai un raz-de-marée partant à la verticale, surgissant sous les pieds du garde. Enfin, un puissant jet d'eau se matérialisa, mais dans une précipitation telle qu'elle ne fit que percuter son arbalète, la déviant assez pour faire se perdre le carreau engagé. Des cris courroucés dans mon dos, la chute d'autres combattants des murailles. Bientôt, le rempart fut vidé des meurtriers les plus efficaces de ce maudit fort.

Un ordre de saisir ceintures et bandes de tissu, de s'accrocher et de sauter retentit dans la cour. Le son de cordages frottés me fit comprendre que, un par un, les survivants se laissaient glisser le long du filin. Une issue, mais la réaction adversaire fut immédiate, les geôliers restants se ruant vers les escaliers encombrés. Samrik tentait de tenir les premiers arrivés en respect mais nombre de ses coups heurtaient de solides boucliers. Lydia et Makkar lançaient à la main ce qu'ils pouvaient trouver, une fois les arbalètes abandonnées déchargées. Trop proches. Ces foutus sang-pourpres étaient déterminés. Ils n'allaient pas manquer de tuer les retardataires ou nous emboîter le pas si nous ne parvenions pas à les faire reculer. Une fois de plus, sachant qu'ils ne pouvaient pas éviter les coups d'épée s'ils regardaient ailleurs, je fis une nouvelle fois éclater mon énergie lumineuse. Même si le premier garde avait eu le réflexe de lever son bouclier pour protéger sa vue, son choix ne lui permit pas de s'attendre au coup de pied féroce du demi-garzok. Le bois de la pièce craqua sous l'impact, fit décoller l'homme et le propulsa contre ceux qui avaient amorcé l'escalade.

Le gain de temps permit à la plupart des prisonniers de fuir, mais les plus vindicatifs des soldats du fort prirent la place de leurs camarades. Je me ruai vers le grappin, constatant qu'au bout, ma fidèle Rascasse Volante attendait. Je grimpai sur le rebord, rengainai mon épée et me saisis de la traine de mon manteau. Le tissu était à peine posé sur le cordage que deux gardes surgirent des dernières marches. Un peu plus concentrée, rassurée de savoir mon entourage parti vers la sécurité, je mis toute ma volonté dans la manifestation de mes fluides. Enfin, grondant et écumant, une puissante colonne d'eau émergea des abords du passage, soulevant et repoussant les premiers de nos poursuivants. Je me lançai dans le vide, tenant fermement le tissu de mes serpentins. Le long des cordes voisines, mon maître d'arme et mon protecteur s'étaient aussi lancés. L'atterrissage sur le pont fut brutal et désagréable, mais certainement moins que ce qui arriva aux fous assez stupides pour nous suivre. Les filins tendus à leur maximum furent tranchés, précipitant les sang-pourpres qui avaient eu le malheur de s'y risquer au pied de la falaise.

Les voiles furent hissées et la Rascasse fila sous le vent, s'éloignant de ce lieu de carnage. De longues minutes d'un silence meublé par les râles de douleur ou d'effort hantèrent le pont. Lorsque nous fûmes suffisamment éloignés de l'endroit, une vision inattendue me fit écarquiller les yeux. Gallion Thunderhead, le pirate qui avait douloureusement mis mon implication et ma place de capitaine à l'épreuve, était celui qui avait arraché mon navire aux pattes des hommes de Sans-Pitié. Mazhui lui avait indiqué où nous trouver, mais pas pour nous apporter un quelconque soutien, non. Pour nous faire naviguer en direction d'Oranan, la cité assiégée par la Reine noire. Le but ? Se faire un nom dans ce conflit, et signifier à tous qu'il fallait compter avec la Confrérie. Preuve de plus, le fondateur Sirius Heartless était déjà mêlé à ce conflit.

Dans les cœurs, ce que nous venions de vivre appelait à la vengeance contre le tyran de cet île, mais le grand pirate avait raison sur un point : l'île ne risquait pas de s'évaporer. Nous pouvions laisser croire au Sans-Pitié que nous avions fui la queue entre les jambes pour revenir le poignarder dans le dos une fois nos forces revenues. La décision fut prise de faire voile vers la capitale ynorienne. Si Mared et ses Raies survivantes nous accompagnèrent, Mouréna et Makkar avaient encore des desseins à accomplir sur l'Île du Serpent.

Puisse Moura veiller sur eux, et sur tous ceux qui avaient perdu la vie dans ce fort maudit.


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À la lueur de la lanterne, je regarde la liste des noms jointe à mes écrits sur ce registre et les quelques adjectifs permettant de vaguement cerner leur personnalité. Je savais que cette mission comportait son lot de dangers, mais en voyant ces noms glisser sous mon index déroulé, je réalise à quel point j'ai sous-estimé la chose. Et d'ici quelques jours, je vais mener ceux qui restent en pleine guerre. Au nom de la Confrérie. Pour la gloire et pour Mazhui à qui je compte passer un sacré savon. En regardant ce tome que j'ai passé du temps à remplir de nos différentes péripéties en mer, je me demande un instant pourquoi je m'en suis donnée la peine. Peut-être pour revivre certains moments, peut-être pour occuper le voyage. Peut-être pour soulager mon âme de ce fardeau en le couchant par écrit.

Me coiffant de mon tricorne, je sors sur le pont et lève les yeux vers le ciel étoilé. Le vent est frais, la mer calme, et les mouvements à bord grandement réduits. Pas de Nahöriel dans les cordages à discuter ou jouer de sa flûte. Il doit encore être au chevet de la prêtresse. J'oriente mon regard vers le bastingage où Eliwin est adossé, Gallion se tenant près de lui. Je n'entends pas ce qu'ils se disent, et je n'ai pas envie de le savoir. Samrik est aussi là, debout, les bras croisés, à scruter les flots comme à son habitude. Sauf que cette fois-ci, il tourne la tête vers moi et m'adresse un signe du chef. Je lui rends en attrapant ma coiffe, notant qu'un jeune sang-pourpre loyal à Mared observe intensément le maître d'arme. S'il y a le moindre grabuge, je n'ai aucune intention d'intervenir en faveur de ce peau-bleue. Ce n'est pas parce que nous coopérons avec la troupe du blondinet que je vais oublier ce qu'ils nous ont fait. Pour le moment, mes hommes et femmes tolèrent leur présence, parce qu'ils ont été emprisonnés, ont lutté et péri ensemble. J'ignore combien de temps cela durera, et je sens déjà poindre une certaine fatigue à l'idée de gérer les futures rixes.

Je repousse ma tresse de lianes de mon épaule et hausse les sourcils en apercevant notre populaire dame en violet descendre les filins en faisant la moue, s'arrêtant à mi-parcours quand elle comprend que je l'ai vue. Son expression se change en un sourire ravi.

"Eh, Capitaine. Vous tombez bien, j'aurai pas à toquer à votre porte et entendre d'aller m'faire voir. Dites, j'en fais quoi d'cette merde ? J'la crame ?"

Elle me montre le pavillon du Sans-Pitié, qui avait souillé le mât de ma Rascasse Volante. Ma première réaction est un criant 'oui' retentissant dans ma cime, mais mon jugement prend le dessus. Je ferme brièvement les yeux, fais grincer mes épaules puis m'avance pour récupérer l'étoffe.

"Laissez. Cette horreur va nous servir quand on reviendra récolter notre dû."

Je replie le tissu, décidée à le caler sous le pied d'un meuble ou laissant un petit coin émerger d'un tiroir poussiéreux. Aucun besoin de l'avoir en permanence sous les yeux pour me rappeler à quel point j'ai le sentiment d'avoir failli à ma tâche. La femme d'âge mûr ne remonte pas tout de suite, me scrutant avec attention. Elle finit par me faire un petit signe d'approcher. Mes bottes m'amènent aux abords du filet.

"Juste comme ça... Z'avez déjà vu l'ciel depuis mon petit nid ? Ça vaut l'coup d’œil."

Un bref instant, je me demande pourquoi elle me pose la question. Et puis je me souviens des derniers jours. J'ai passé mon temps et ma magie à panser les blessures, discuter de limites avec nos nouveaux passagers, rassuré mon équipage et promis qu'ils prendraient leur revanche. Je me suis investie autant que possible pour rester leur pilier dans la tourmente, et je ne me rends compte qu'à travers sa petite attention anodine à quel point je suis tendue. Combien j'ai besoin d'un peu de temps, moi aussi.

Un petit sourire au coin des lèvres, j'appose ma main contre le cordage et commence à me hisser.

"Faites-moi voir ça."

Lydia émet un petit rire puis grimpe à toute vitesse pendant que je prends prudemment mon temps, admirant l'agilité des gabiers et vigies qui se déplacent dans les hauteurs à vive allure. Je l'entends remuer des choses dans le nid de corbeau et quand j'y parviens, elle est adossée au rebord, une couverture à ses pieds et son arbalète démesurée contre elle. Elle tapote à côté d'elle et je m'installe, levant le nez vers les constellations. Sans rien dire, elle se met à tapoter le bois de son arme et faire teinter la corde, jouant un petit air tranquille. Aucun trouble dans le rythme, aucune parole prenant le pas sur les sons de la mer fendue par la Rascasse Volante. Mon regard demeure rivé aux points luisants sur fond noir, les échos de voix désormais éteintes commentant les formes dessinées du bout du doigt entre les lueurs. Ma vision se retrouve embuée. Je me laisse aller à fermer les yeux.

Sur un son lent et familier, un discret fragment d’océan trace son chemin le long de mon écorce.



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- Tentative d'apprentissage du sort d'eau "Geyser"