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Voyage en Aynore entre Tahelta et Kendra Kâr

Posté : lun. 8 juil. 2019 10:29
par Yuimen
Voyages en Aynore entre Tahelta et Kendra Kâr

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Informations à prendre en compte :
  • Un voyage simple coûte 722 Yus.
  • La distance qui sépare les deux villes est de 4815 km, soit 12h de voyage.
  • Le voyage s'effectue en Aynore, géré par la compagnie Air Gris.

Re: Voyage en Aynore entre Tahelta et Kendra Kâr

Posté : mer. 10 juil. 2019 11:33
par Akihito
Dans le chapitre précédent...
Deuxième Arc : L’art de faire parler la Foudre

Chapitre XIII.2 : Retour instructif

Akihiko était assis en tailleur sur la couchette de sa cabine, l'Aynore filant à une vitesse folle. Par il ne savait quel moyen, Aile Grise lui avait obtenu un moyen d'embarquer sans passer à la caisse, lui assurant qu'elle s'était occupée de tout jusqu'à son retour à Oranan. Ne sachant que dire, il était resté bouche bée alors qu'elle se dirigeait vers le cockpit, sans lui cette fois. Elle fit décoller l'énorme astronef et sachant qu'il avait une douzaine d'heures devant lui, Akihiko alla se réfugier dans sa cabine pour y apprendre le fameux sort de Transfert Magique.

(Le sort est on ne peut plus simple dans son principe : il consiste à transférer un sort dans un objet solide pour que n'importe qui puisse utiliser le sort emmagasiner dedans.)

(Je pourrai stocker n'importe lequel de mes sorts ?)

(C'est ça. De plus, leur puissance n'est limité que par ta propre capacité : tu peux donc d'or et déjà stocker le sort le plus puissant de ton arsenal dedans.)

(C'est vraiment pratique. Est-ce qu'il y a une restriction sur les objets pouvant stocker un sort ?)

(Mmmh...) Réfléchissant un instant, la Faëra fini par secouer la tête. (Non, pas que je sache. Il faut juste choisir un objet suffisamment résistant pour contenir le sort. De manière général, on utilise les bijoux, les armes ou les pièces d'armures.)

Instinctivement, Akihiko baissa les yeux vers la manchette offerte par sa mère. Un objet qu'il portait depuis le début de son périple, un bijou dont il mesurait enfin la réelle valeur. Bien qu'il avait beaucoup de valeur sentimentale pour lui, il n'était pas d'une grande valeur. Mais s'il pouvait y stocker un Choc de Valyus, cela lui permettrait d'avoir toujours sur lui un sort à envoyer tant qu'il l'avait sur lui, et sans dépenser de fluides sur le moment. Un investissement certain donc.

(Très bien, alors allons y !)

Sous les instructions d'Amy, Akihiko rassembla ses fluides dans sa main comme pour lancer son sort favori, le Choc de Valyus. Des éclairs se mirent à crépiter et danser sur le bout de ses doigts, près à faire feu. La suite s'avéra plus difficile : le concept était d'emprisonner le sort dans une sphère, puis de la faire intégrer l'objet en question. Fort de sa maîtrise désormais poussée de la magie, l'enchanteur agrégea l'ensemble des fluides qu'il avait utilisé pour le sort sur le bout de son doigt. Il lui donna la forme d'une boule de foudre compacte et délicatement, la mit en contact avec le bijou. Immédiatement, la partie de la sphère en contact avec la manchette se brisa et la foudre se déversa dans le métal du bijou. Pourtant habitué à la sensation de picotement de la foudre, c'est un vrai éclair qui parti dans une direction complètement aléatoire, le touchant à la main gauche et le faisant grogner de douleur. Blessé par sa propre magie, c'était un comble. Il inspecta rapidement la brûlure qu'il avait : douloureuse, mais pas très importante. Il porta donc à sa bouche sa gourde magique et bu la dernière dose de potion de soin qui lui restait, ne souhaitant pas courir le risque de voir la blessure s'infecter ou s'aggraver.

Mais Akihiko ne se découragea pas. (Après tout, qui a dit que ça serait facile ?)

Il décida de procéder autrement, sous le regard interloqué de sa Faëra. Il rassembla encore une fois la magie dans sa main gauche, mais en une quantité deux fois moins importante : un sort lancé avec une aussi faible dose n'aurait aucune chance d'aboutir, mais il devait d'abord réussir à intégrer durablement ses fluides à un objet. Sa main recommença à crépiter, puis doucement, il la posa sur la manchette, non sans appréhension. Dû à ses propriétés étranges, la foudre attira la manchette à sa main lorsqu'elle fut sur le point de la toucher. La foudre circula naturellement dans le bijou, sans chercher à s'échapper ni à s'y fixer. Elle passait librement de sa main au métal, comme si pendant un moment, la manchette devenait une partie de son corps. Il décida alors de repousser mentalement cette énergie pour la contenir dans le métal ouvragé. La foudre se plia rapidement à la volonté de son propriétaire et se cantonna au bijou, tourbillonnant nébuleusement dans le métal. L'enchanteur en retira lentement la main, les quelques arcs électriques liant encore les deux mourants les uns après les autres en un déluge de petites étincelles. Le bijou était désormais chargé de foudre.

(C'est un bon début.) félicita Amy. (Maintenant, il faut pouvoir libérer ce pouvoir.)

(Comment les autres Porteurs s'en sortaient ?)

(La plupart utilisaient des "activateurs". L'un d'eux sculptait des baguettes de bois qu'ils entaillaient en leur milieu : lorsqu'il les brisaient, il pouvait libérer le sort contenu dedans. Les autres, plus rares, arrivaient à dompter suffisamment leur magie pour qu'elle s'active sur la volonté du porteur de l'objet enchanté.)

Le mot enchanté fit tiquer l'Ynorien. Il était un enchanteur, intégrer un sort dans un objet était en effet ce que l'on pouvait qualifier d'enchantement. Il n'y avait donc pas de raison qu'il rate ! Enfilant la manchette, il grimaça en sentant les picotements chatouiller douloureusement son avant-bras. Installant le Marteau de Valyus à l'autre bout de sa cabine, soit deux bons mètres, il tendit la main vers sa tête et imagina la foudre se libérer de sa prison. Aussitôt, la foudre se libéra du bijou et des arcs partirent dans tout les sens. Comme prévu, le sort n'avait pas la puissance d'un vrai Choc de Valyus, mais il en avait surtout pas la forme. Répétant plusieurs fois l'opération avec de petites doses de fluide, l'effet s'améliorait de plus en plus à mesure que Akihiko comprenait que si les fluides avait la forme désirée dans l'objet, à savoir de la foudre pure pour un Choc de Valyus, il fallait encore la canaliser pour l'envoyer dans la direction voulue. En fin de compte, il parvint à envoyer des jets d'éclair en direction du marteau, non sans avoir manqué à plusieurs reprises de mettre le feu à sa cabine -et surtout, manqué sa cible-. Plusieurs étincelles des tentatives ratées étaient tombées sur la mince couverture recouvrant son couchage, constellant le tissu de marques de brûlures qui ne partirait probablement pas.

Se renfonçant sur sa couchette, Akihiko prit le temps de souffler un peu, la migraine commençant à le guetter à force d'avoir utilisé ses fluides. S'il arrivait maintenant à lancer quelque chose se rapprochant du Choc de Valyus via un objet, mais plusieurs choses restaient à résoudre : d'abord, le sort en lui même. Pour une raison qu'il ignorait, il n'arrivait pas à toucher son marteau. Son sort était certes diminué, mais à ce point ? Il n'en était pas sûr, mais il pensait que le souci principal venait surtout qu'une partie de la puissance était utilisée pour maintenir le sort dans l'objet. Ainsi, Pour lancer un Choc de Valyus d'une puissance standard, il devait infuser la même dose de fluide pour pouvoir contenir et canaliser son sort. La méthode était gourmande en fluide, mais c'était un prix raisonnable aux yeux de l'enchanteur. Ces derniers se baissèrent sur son poignet droit, rougit et engourdit, qu'il tenait dans son autre main. Là était le principal problème : il ne pouvait pas se parer de bijoux ou d'armes qui lui enverraient constamment des chocs électriques en les portant. Et même si lui avait apprit à dompter quelque peu cette sensation, il ne pourrait pas enchanter d'équipement pour quelqu'un d'autre avec un contre-coup aussi gênant.

(Amy, tu sais comment ils faisaient pour sceller en sus la... puissance élémentaire de leur magie ?) demanda Akihiko, pas vraiment sûr d'employer les termes exactes.

(Non, je n'ai jamais réussi à comprendre comment : ils n'arrivaient pas à mettre de mots dessus eux non plus, alors tu penses bien que moi c'était encore plus compliqué. Du coup, tu devrais plutôt...)

(Attend attend, répète ce que tu as dit ?) interrompit brusquement le fulguromancien.

(...Que je ne comprenais pas comment ils faisaient ?)

(Non, juste après.)

(Qu'ils n'arrivaient pas à mettre de mot dessus ?)

"Des mots.. C'est ça !" s'écria à voix haute le fulguromancien. Se précipitant vers son sac, il en tira la bourse de cuir usée qui contenait toutes ses runes. Il déversa son contenu sur sa couchette, en se rappelant des significations de chacunes. Les runes objets furent rapidement écartées, de même que la rune "toujours". La rune élémentaire "feu" suivit également ce chemin et ainsi de suite jusqu'à ce qu'une seule rune ne se trouve devant lui : la rune Ten, ou "Maîtrise".

(De la même manière que j'utilise des runes pour former mon cercle protecteur, je pourrais peut être également en faire de même pour maintenir en place mon sort en le "maîtrisant".)

Akihiko savait qu'il ne pouvait pas utiliser des runes Ten à chaque fois qu'il voudrait transférer un de ses sorts : mais il pouvait se baser sur le symbole de la rune.

(Et pourquoi ça marcherait ? Ce n'est pas parce que tu dessines le symbole d'une rune avec un peu de magie que ses effets seront similaires. La magie runique, ça n'est pas aussi simple.)

(Je le sais. Mais j'ai tout de même la conviction que ça pourrait marcher, comme pour mon cercle protecteur. Une sorte d'auto-persuasion en soit.)

Une nouvelle fois, la magie se condensa dans sa main. Il y mit cette fois le double d'un Choc standard, pour vérifier au passage son hypothèse sur la surconsommation de fluide. Il injecta alors la majeure partie des fluides dans la machette encore tiédit par ses utilisations récentes, intégrant le sort dans sa totalité ainsi que son fonctionnement, bien que basique. Une petite sphère de foudre composée des fluides restant se forma à la pointe de son index et de son majeur et sur le dessus de la manchette, là où commençait la brise de vent stylisée, l'enchanteur traça la rune Ten. Une barre oblique tranchant de la droite vers la gauche, surmontée au deux tiers de sa longueur par une autre barre oblique allant de la gauche vers la droite.
Le symbole tracé en lettre de foudre se mit à briller de plus en plus avant de perdre rapidement de son éclat, ne laissant plus qu'une faible luminescence violette. La sensation de picotement venant du bijou disparut alors instantanément, comme contenue dans la marque nouvellement créée. Emplit d'une soudaine excitation, le jeune homme pointa la manchette en direction du marteau et libéra son contenu. L'éclair surgit avec force et frappa de plein fouet l'arme, la faisant chuter sous l'impact. Au même moment, Aile Grise ouvrit la porte et poussa un cri de surprise en voyant la foudre frapper juste à côté d'elle.

"Nom de... Par Sithi ! Akihiko, qu'est ce qui t'es passé par la tête ? Tu veux ma peau ou quoi ?! explosa la Sindelle une main sur la poitrine, comme pour empêcher son coeur de s'échapper sous l'effet de la surprise. A quoi tu joues ??

- Eh bien... commença le jeune homme en s'étalant sur sa couchette, épuisé mais un sourire étirant largement le coin de ses lèvres. Disons que j'apprends à faire des cadeaux magiques."

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Le voyage était sur le point de se terminer. Aurora s'était éclipsé à deux reprises de la cabine de pilotage prétextant des envies pressantes et passa voir son passager "personnel" comme elle l'appelait. Ce dernier se reposa pour reconstituer ses réserves de fluides et son état physique général encore un peu souffrant de son passage à Nessima. Ils discutèrent ensemble une poignée de minutes à chaque fois, notamment des prix prohibitifs et proprement scandaleux de la nourriture vendue à bord. A son ultime passage, Akihiko demanda à Aurora de lui confier quelques instants le bracelet nacré qu'elle portait au poignet. D'abord suspicieuse, elle finit par le déposer dans sa main, tout en lui indiquant d'un ton des plus sérieux que si il abîmait d'une quelconque manière se bracelet, elle lui ferait rejoindre la terre ferme avant même qu'ils n'atterrissent. La mise en garde fit hésiter un instant l'enchanteur qui acquiesca néanmoins avec détermination. Condensant plus de fluides qu'il ne l'avait encore jamais fait dans sa main, il injecta le Choc de Valyus le plus puissant qu'il pouvait lancer, avant de "graver" magiquement le symbole de la rune Ten sur son dessus. La marque brilla fortement avant de se reduire à une simple lueur violacée.

"Aurora, je ne sais pas comment te remercier de m'avoir tiré de ce bourbier. Tu ne veux pas être payée et j'ai fini par abandonné cette idée, mais laisse moi au moins te faire ce cadeau, déclara le jeune homme en rendant le bracelet à la jeune femme qui le regarda d'un air interloqué mais amusé également. J'ai passer les premières heures du voyage à essayer de maîtriser un sort, dont voici le résultat. J'ai mit le sort le plus puissant que je connaisse dans ton bracelet, un sort de foudre. Il te suffira de l'avoir sur toi et de penser au sort contenu dedans. Il faut également que tu penses à ta cible pour que le sort se dirige vers lui. Malheureusement, tu ne peux le lancer qu'une seule fois, alors utilise le en dernier recours. D'ailleurs, voilà ma manchette : j'y ai mis une version très réduite du même sort pour que tu puisses essayer une fois et voir comment ça marche."

Sans un mot, la Sindelle prit dans ses mains le bijou et le tendit vers la tête du marteau que Akihiko tendait en guise de cible. Aurora fronça les sourcils et focalisa son attention sur sa cible. Dans un crépitement, un timide éclair partit de l'objet enchanté et frappa le marteau sans lui faire le moindre dommage ou trace. Sa lanceuse sursauta par surprise mais se reprit bien vite, un sourire naissant au coin de sa bouche.

"Voilà un présent des plus intéressant... C'est avec joie que je l'accepte dans ce cas. Mais ne t'y trompe pas, tu me dois encore un service, ajouta-t-elle en se rapprochant du jeune homme.

- Bien entendu... Et quel genre de service devrais-je te rendre ? répondit le jeune homme en soutenant son regard.

- Il y a un objet qui m'intéresse... Il faudra que tu le trouve pour moi. Quand tu auras le temps, passe à la Corporation des Chasseurs de Trésor, à Kendra-Kâr. J'y ai mit un contrat, pour une certaine boussole. Trouve la moi et nous serons quittes.

- Ca me va.

- Il y a intérêt, ria légèrement la jeune femme. Bon, je dois aller préparer l'atterrissage. Mon collègue pilote est compétent, mais ça demande la présence de deux personnes pour l'effectuer. C'est donc ici que nos chemins se séparent... Pour l'instant, ajouta-t-elle avant de déposer un léger baisser sur la joue de l'Ynorien, qui se contenta de sourire.

- A bientôt Aurora."

A suivre...

Re: Voyage en Aynore entre Tahelta et Kendra Kâr

Posté : mer. 4 sept. 2019 15:28
par Yurlungur
...

Elle avait pu prendre le trajet en aynore depuis Kendra Kâr sans difficulté. Personne ne semblait prêter attention à elle : d'ailleurs, si les gardes paraissaient un peu plus agités qu'à l'ordinaire et qu'il se murmurait vaguement qu'il y avait eu un meurtre sanglant à l'auberge du Lion d'or, le manque d'indices et de suspects les contraignaient à laisser passer toute la foule d'individus qui pénétraient et sortaient de Kendra Kâr quotidiennement, selon un mouvement de va-et-vient qui aurait été fort marri de se voir imposer une fouille systématique à la sortie. Leur seule piste, songeait Yurlungur, c'étaient les bijoux volés : mais ils n'en possédaient probablement pas une description précise. Arrêter tous les voyageurs pour vérifier ou non la présence de bijoux dans leurs affaires étaient une solution bien maladroite et peu efficace. Par ailleurs, au sein de la populace, la rumeur restait faible : seuls quelques individus très bien renseignés en avaient entendu parler, et il semblait que l'auberge tentait d'étouffer au possible l'affaire. La répercussion sur sa réputation serait terrible, sans doute.

Yurlungur n'en avait pas grand-chose à faire. Il était encore tôt le matin, quoique la ville fût déjà bien agitée, et après l'euphorie de la veille, elle ne s'était endormie qu'après s'être longuement remémoré la scène en se retournant dans son lit, pleinement satisfaite, si bien qu'elle était à présent dans un état hagard de demi-vie. Embarquée à bord de l'aynore, elle dormit une bonne partie, puis regarda longtemps la mer sous les vitres épaisses. (Cette fois-ci, elle avait eu une place à côté de la fenêtre.) On voyait à peine les vagues, à la hauteur à laquelle ils voguaient. Ce n'était qu'une vaste étendue bleue. Ça ne faisait même pas peur.

Mais les aynores étaient dotés de propulseurs bien plus efficaces que ceux des cynores et ils furent déposés à Tahelta en milieu d'après-midi. Là, ils ne disposèrent guère de temps pour explorer un peu la cité – chose qui leur fut par ailleurs déconseillée, à eux rares humains voyageant par Air Gris jusqu'ici – car le vol en cynore pour Nessima partait immédiatement.

...

Re: Voyage en Aynore entre Tahelta et Kendra Kâr

Posté : mer. 25 sept. 2019 12:56
par Tanaëth Ithil
Une grosse heure de marche plus tard, nous parvenons à l'immense place d'où atterrissent et décollent Aynores et Cynores. Je me dirige aussitôt vers le guichet d'Air-Gris où je présente mon abonnement et règle une somme faramineuse pour que ma garde puisse m'accompagner, mais il nous faut cependant encore attendre près de trois heures pour que l'Aynore assurant la ligne Tahelta-Kendra Kâr arrive, dépose ses passagers et que l'on nous invite à embarquer.

C'est avec une sourde nostalgie que je contemple ma terre natale alors que l'appareil prend son envol. Ai-je pris la bonne décision en quittant mon pays en ces temps troublés? N'aurais-je pas mieux fait d'épauler mon épouse et les quelques Danseurs d'Opale qui vont devoir résoudre une situation que je sais complexe et périlleuse? L'avenir le dira...

Après une bonne dizaine d'heures de voyage, alors que l'aube se lève, nous apercevons enfin les côtes de Nirtim. Une heure de plus est nécessaire pour longer le comté de Bouhen, vision qui me rappelle douloureusement mon échec sur Izurith puisque c'est là que se trouvait le fluide spatial qui nous a conduits sur ce monde perdu. Puis c'est le littoral de la Principauté de Kendra Kâr que nous suivons, jusqu'à finalement apercevoir la tentaculaire cité de ce puissant Royaume. Le grand Aynore se pose en douceur au nord de la cité, en bordure de la route menant vers le Duché de Luminion, qu'il nous faudra encore près d'un mois de marche pour atteindre. Peinant de plus en plus à tenir mon fauve qui s'ennuie ferme dans l'espace somme toute restreint, je descends de l'appareil dès la passerelle déployée, suivi comme toujours de mes gardes du corps. Une préséance que nul ne s'avise de nous contester, étrangement...

Re: Voyage en Aynore entre Tahelta et Kendra Kâr

Posté : lun. 30 août 2021 17:47
par Mya Elei-Dhâom
ARC I : Les elfes Bruns

Chapitre I : Retour au pays


Le ciel est resplendissant. Bleu, avec quelques nuages cotonneux comme je les aime, parsemés comme quelques moutons dans une grande pairie. C’est un jour magnifique, comme on n’en voit qu’en Naora, grâce aux mages météorologues.
Tahelta m’a manqué. Le Naora entier m’a manqué. L’Anorfain est différent, et Kendrà-Kar… n’en parlons pas. J’y ai appris beaucoup, que ce soit par l’entourage, ou par mon instructeur et guide rituel. Leurs manières de vivres sont complètement différentes de la notre et cela se ressent quand on discute et négocie avec eux.
Almach, mon instructeur, est rodé à l’exercice et m’a expliqué les ficelles du métier. Mais c’est l’expérience et la connaissance qui font tout dans ce milieu, et c’est ce dont je manque le plus. Je suis assez douée pour m’en sortir fasse à la plupart des humains, trop éphémères pour acquérir le savoir nécessaire.
Pour les elfes c’est plus complexe. Il faut être plus subtil, c’est là que c’est intéressant. Durant ces cinq dernières années, j’ai beaucoup plus écouté que parlé, beaucoup appris, et beaucoup compris. Mais il me reste tellement à assimiler.


Un coup de gong retentit et me sort de mes pensées. Je tourne la tête vers la porte de ma chambre, par réflexe, puis retourne le regard vers le grand hublot. Le ciel bleu au dessus de l’Aynore, et le Naora, magnifique dans sa diversité, en dessous, loin en dessous. Je soupire d’un plaisir que je n’avais pas ressenti depuis longtemps, celui d’être chez soi, puis me lève de la longue banquette sur laquelle j’étais à moitié allongée.
Après avoir défroissé ma robe et vérifié que mes cheveux étaient toujours impeccablement coiffés en une longue tresse Nessa, je réajuste la couronne de fleurs rose pâle que m’a offert mon guide lors de mon départ et inspire une grande bouffée d’air.
Malgré mon bonheur je suis stressée, le passage à la vie d’adulte s’approche à grand pas. Et même si ça fait quatre-vingt cinq ans que je m’y prépare, c’est impressionnant. En face de moi, un grand miroir reflète l’image d’une jeune Sindel, belle et élégante, fine et droite, et pourvue d’un léger sourire qui trahit son excitation.
Une fois n’est pas coutume, je n’essaie pas de me contrôler. Je ne travaille pas, je vis l’instant, et c’est agréable de se laisser aller parfois. Je souris d’autant plus, et me fais un clin d’œil avant de pouffer. Près d’un siècle et toujours aussi espiègle.


(Il faudra grandir un jour, ma belle), me dis-je en souriant.

Une dernière vérification quant à mon maquillage subtil et j’ouvre la porte de la chambre pour m’avancer vers le pont.

L’Aynore a ralenti depuis longtemps et le pont a été rendu accessible il y a plus d’une demi-heure. Mais je voulais rester au calme, ce qui m’attend sera bien assez épuisant. Je croise sur le trajet d’autres elfes, principalement des commerçants et quelques nobles. Une famille ou deux aussi, groupées et pleines de vie. La majorité des gens étaient d’une élégance toute Sindel, même si je sentais certains regards se tourner vers moi à mon passage.
Ne pas ralentir, ne pas détourner le regard, et sourire, subtilement, simplement pour paraître polie sans perdre élégance et appui visuel. Les règles de présentation sont légions pour avoir l’avantage avant même que le premier mot ne soit prononcé. Et ma mère m’a appris à être la plus belle où que je sois. Mes yeux, ma démarche, mes lèvres sont des armes silencieuses plus efficaces que de nombreux discours. Et dans quelques siècles, elles seront encore plus aiguisées. Je ne suis encore qu’une enfant.
Je m’avance vers l’avant du pont, une douce brise se glissant dans mes cheveux et dans les voiles flottants de ma robe. Je me sens bien, apaisée. Mon cœur bat cependant plus vite que d’habitude. Je regarde par dessus la rambarde enluminée, mais ne les vois pas encore, nous sommes trop loin. Mes parents doivent déjà attendre l’atterrissage, le retour de leur unique fille, du bijou qu’ils chérissent plus que tout. Ils m’ont manqué, plus que je n’aurais osé me l’admettre en partant. Leur gentillesse, la douceur de ma mère, la sagesse de mon père. La prestance m’incombe de ne pas leur sauter dans les bras, mais je ne suis pas sûre de pouvoir retenir la larme qui voudra couler le long de ma joue…

Doucement, l’Aynore s’approche du sol, et de ma nouvelle vie. Doucement, mon enfance vit ses dernières heures. Doucement, je deviens celle qui changera les choses en Naora. Du moins, je l’espère...

Retrouvailles