Voyages en Aynore entre Kendra Kâr et Lebher

Répondre
Avatar du membre
Yuimen
Messages : 2483
Enregistré le : mar. 26 déc. 2017 19:17

Voyages en Aynore entre Kendra Kâr et Lebher

Message par Yuimen » sam. 12 mars 2022 16:16

Voyages en Aynore entre Kendra Kâr et Lebher

Image


Informations à prendre en compte :
  • Un voyage simple coûte 650 Yus.
  • La distance qui sépare les deux villes est de 4335 km, soit 11h de voyage.
  • Le voyage s'effectue en Aynore, gérés par la compagnie Air Gris.

Avatar du membre
Sibelle
Messages : 266
Enregistré le : jeu. 20 déc. 2018 00:32

Re: Voyages en Aynore entre Kendra Kâr et Lebher

Message par Sibelle » sam. 12 mars 2022 16:32

Une fois à l’intérieur, je choisis une place plus isolée et m’installai près du hublot. Si je ne pouvais sentir l’air frais sur mon visage, je pourrais au moins profiter de la vue.

Peu de temps après, un long soupir attira mon attention. Il s’agissait d’Ezak qui assis de l’autre côté de l’allée commentait à voix suffisamment haute pour que j’entende :

« Bien sûr… Il fallait que cette guerre se rappelle une énième fois à moi. »

Je levai ma tête dans sa direction et d’un ton neutre je déclarai :
« Si me voir vous déplait, vous pouvez toujours changer de place.... moi, j'ai rien contre vous. »

Ezak s’avérait être un bel humain possédant les cheveux blonds et la peau claire des Kendrans bien agencé aux yeux en amande des ynoriens. Malheureusement, l’air méprisant qu’il affichait coupait le charme qui aurait pu se dégager de lui. La dernière fois que je l’avais rencontré, c’était tout de suite après la guerre. Il était venu nous voir, moi, Sirat et Sirius afin de parler de son père. C’était sur un ton condescendant qu’il m’avait reproché de ne pas avoir fait mon rapport au général Bogast. Nous lui fîmes alors un compte rendu, qu’il n’avait pas apprécié. Réfutant l’idée que son père avait pu être de mèche avec le camp ennemi, ce fut avec mépris qu’il prit congé de nous, nous considérant comme de vulgaires commères.
Cette fois, il me parut plus calme. Il prit d’abord le temps de me jauger, puis contre toute attente, il haussa ses épaules, se cala confortablement dans son siège et répondit :

« Moi non plus… »

Au moins, j’étais fixée, il n’affichait plus la même attitude que quelques jours auparavant.
Après un bref moment d’hésitation, curieuse de connaître les raisons de son voyage en Nosvéris, je lui demandai.

« Nosveris n'est pas une destination, si commune. Y allez-vous tout comme moi pour répondre à l'appel du messager ? »


L’humain hocha la tête avant de rajouter.

« On peut dire ça. J’y vais pour réaliser… quelque chose au nom de mon Royaume. Disons que cet appel n’est qu’un moyen de plus pour moi de réussir ma mission. »

Il était demeuré vague, mais sa réponse me satisfit. Je détournai brièvement la tête vers le hublot et vit que nous survolions présentement les nuages. Sûrement habité par la même curiosité, il questionna à son tour :

« Qu’est-ce qui peut bien vous pousser vous autres à accourir à la demande d’aide de continents éloignés ? C’est pour l’argent ? L’appel de l’aventure ? »


Je reportai mon attention sur lui, le regardant droit dans les yeux, comme si je cherchais vainement à percer son âme.

(Vous autres ? Est-il question de mon genre, de ma race, de ma profession ?)

Perplexe, les sourcils froncés, je demandai, intriguée :
« Qu'entendez-vous par vous autres ? »

Apparemment, il considérait sa question suffisamment claire puisque ce fut en élevant un sourcil, marque de sa surprise qu’il rajouta :

« Vous n’êtes pas une sorte de mercenaire ? Ce que certains appellent des aventuriers ? »

J’esquissai alors un léger sourire.

« Je me considère comme une aventurière. Pour ma part, c’est l’appel à l’aventure, il n’y a pas de doute. J’ai besoin d’action. »

Certes, je ne dédaignai pas les yus. J’en avais besoin pour m’équiper convenablement et subvenir à mes besoins, mais il ne s’agissait pas pour moi d’une priorité.

Mon vis-à-vis détourna son regard un court moment avant de reprendre.

« Personnellement j’ai toujours haï cette vie d’errance. Je n’ai pas ce besoin d’aventure que vous avez et à vrai dire je ne le comprends pas. Si je pouvais, je ne quitterais plus ces terres. »


Le ton de sa voix s’avérait agréable, la conversation était détendue et nous avions plusieurs heures à perdre, je lui rétorquai donc de bon cœur.

« Je ne peux expliquer ce besoin. Il est là, tout simplement. Je pense aller d'aventure en aventure, jusqu'à ce que j'en sois plus capable... alors je serai mieux morte. Je ne ressens pas le besoin d'avoir un chez-moi. »

Du peu que j’avais vu de lui, avec sa fière allure, son orgueil mal placé par rapport à son paternel, je m’étais bien doutée que nous étions différents, mais pas à ce point. Ce qui équivalait pour lui au bien-être deviendrait bien vite pour moi une prison.

Surpris de ma réponse, il me questionna :

« Vous n’en avez jamais eu ? Vous venez bien de quelque part, vous avez bien des attaches ? Des parents, une culture… »
Cette remarque me fit rire bien malgré moi. Beaucoup de gens percevaient les aventuriers comme des personnes n’ayant que connu la vie d’errance depuis leur enfance, ou encore de la maltraitance de leur parent ou de leur entourage, ce qui n’était pas du tout mon cas.

« Oui, oui, j'avais un chez-moi étant jeune. Et non, je ne vous raconterai pas d'histoire triste. J'ai eu une belle enfance et des parents aimants. Mais j'avais ces fourmis dans les jambes, le besoin de bouger. »

Mes parents avaient eu la sagesse de comprendre ce qu’il fallait à leur fille pour être heureuse. Très tôt, ils avaient accédé à ma demande de combattre à l’épée.

Me gratifiant d’un sourire dévoilant de belles dents, Ezak fit allusion à ma longévité de loin supérieure à la sienne.

« J’imagine que quand on a une aussi longue vie que vous autres, elfes, on finit par vite s’ennuyer… Ma vie sera courte alors, de mon côté j’essaye de me concentrer sur ce qui est vraiment essentiel à mes yeux. Les miens… »


(Vous autres les aventuriers, vous autres les elfes...) Je ne prie aucunement ombrage de ces remarques, mais je constatai qu’elles ne faisaient qu’accentuer le fossé entre lui et moi.

Je hochai la tête à sa dernière phrase tout en rajoutant :

« Ça rentre souvent en ligne de compte oui. » En vérité, je n’en étais pas tout à fait certaine, mais je n’étais pas de nature à pinailler sur ce genre de détails.

Ayant observé des signes de fatigue chez mon interlocuteur, je reportai mon regard vers le hublot. J’en profitai pour méditer deux ou trois heures pour ensuite reprendre l’observation du ciel.

Puis alors que le silence habitait tout l’espace, je perçus un léger bruit à ma gauche. Sans bruit, je tournai lentement la tête pour apercevoir une silhouette mâle penchée au-dessus de Ezak. Bien habillé, de stature et de corpulence moyenne, il n’y avait aucun doute quant à ses intentions.

Je me redressai, puis silencieusement, je pris le siège près de l’allée, puis d’une voix assez forte, mais surtout ferme teintée d’une légère agressivité je lui dis :

« Si vous voulez conserver vos bourses intactes, ne touchez pas à la sienne. »

L’homme sursauta. Puis adoptant un air innocent, il se tourna vers moi, bredouillant des excuses bidons :

« Heu… les apparences sont trompeuses chère dame… un petit soubresaut de l’aynore m’a fait perdre l’équilibre… je me suis retenu à temps pour ne pas tomber sur ce gentilhomme. »

Je le fixai ardemment de cet air qui ne nécessite aucun mot pour signifier que je ne crois pas un traître mot de ce qu’il me racontait.

De sa main droite manucurée, il repoussa une mèche blonde rebelle, ce qui mit en évidence son beau visage, dévoilant aussi des yeux apeurés et une peau blêmie par l’émotion. Il décida sagement de ne pas se justifier davantage et partit rapidement vers l’avant de l’aynore.

Je repris alors ma place près du hublot.

Cette courte et légère altercation avait réveillé Ezak qui, l’esprit encore embrumé, ne réalisa pas immédiatement ce qui venait de se passer.

« Attendez… Ne me dites pas que cet homme voulait me voler ? » Me dit-il au bout de quelques secondes.

Ce fut avec le sourire que je commentai :

« Je crois qu’il soupçonnait que votre bourse soit pleine. »

Secouant la tête d’un air désespéré, il répondit :

« La vermine se trouve vraiment partout… Il a pas intérêt à recroiser ma route celui-là. »


En effet, de la vermine, il y en avait partout et des biens plus dangereux que celui-ci.

« Je crois que je dois vous remercier. J’aurai été bien mal sur un continent inconnu et austère sans un sou. »


Je le regardai un instant avant de répondre. Il me semblait moins arrogant que lors de notre dernière rencontre, et puis il avait assez d’humilité pour reconnaître que je l’ai sauvé d’un cambriolage. Cela peut paraître un détail, mais j’en avais connu plus d’un incapable d’admettre sa vulnérabilité ou encore de prononcer un simple remerciement.
Je finis par lui répondre :

« Je crois que vous auriez trouvé moyen de vous en sortir… Mais, en effet, c’est une bonne chose de ne pas être seul, surtout sur ce continent, comme vous dites ... »

Il y eut une légère méprise de ma dernière affirmation puisqu’il me demanda :

« Vous connaissez les lieux ? »

« Aucunement. » Dis-je tout en hochant la tête. En fait, cela ne me déplaisait pas de me rendre dans un lieu qui m’était totalement inconnu. J’aimais l’aventure, le risque, le dépaysement.

Le silence s’était installé à peine quelques secondes lorsque Ezak reprit la parole, mais dans un tout autre contexte.

« J’y pense. Vous êtes partis sur l’île des dieux, avec les autres ? »


Je me contentai d'un simple signe affirmatif de la tête avant de rajouter : « Cela ne vous a pas tenté ? »

Sa réponse ne se fit pas attendre :

« Pas un instant. Ma place était auprès des kendrans pas avec les divins.»


Puis avant que je n’eus le temps d’émettre un commentaire il questionna :

« Vous les avez vus ? Vous leur avez parlé ? »

Rencontrer les dieux s’avérait une expérience unique qui risquait de ne plus se présenter. Je comprenais cependant qu’il préférait demeurer près des siens. J’avais moi-même hésité à m’y rendre. Je lui répondis donc :

« J'ai vu leur résidence respective, mais je n'ai parlé qu'à Gaïa... Je suis allée sur cette île pour avoir des réponses, pour comprendre la non-implication des dieux dans cette affaire. Pour comprendre pourquoi, ils n'étaient pas intervenus plus tôt... Et puis Gaïa m'a expliqué qu'ils avaient les mains liées. »

La discussion avec Gaïa avait été beaucoup plus longue, mais je n’avais pas le goût de m’étendre dans les détails. Je réalisai un peu trop tard que j’en avais trop dit. Sa curiosité piquée, Ezak voulut en savoir plus.

« Les mains liées ? »


Je tâchai donc d’être plus claire :

« Zewen leur avait interdit de se mêler des affaires des mortels. »

Un peu songeur, il me dévoila ce qui le dérangeait dans la discussion que je lui rapportais.

« Donc vous êtes en train de me dire, que les dévots prient leurs Dieux en vain et qu’ils n’intercèderont jamais en leur faveur, car Zewen leur interdit d’intervenir dans leur vie ? »

Je poussai un soupir d’exaspération. Non pas que j’avais quelque chose à cacher, mais cette discussion avait eu lieu et j’avais eu mes réponses et je m’en étais accommodée, je n’avais pas poussé plus loin ma réflexion et je n’avais pas l’intention de le faire. Ce fut donc sur le même ton de la conversation que je finis par répondre :

« Je ne sais pas ce qu'il en est des dévots et de leur prière... Je ne me fais pas la défenderesse des Dieux... mais dans ce cas précis, elle m'expliquait qu'ils n'avaient à intervenir entre deux clans de Yuimeniens,… et je la comprends…pourquoi favoriser les Ynoriens au profit des Liykors ou d’une autre race ? »

À peine prononcée, je regrettai déjà cette dernière phrase et je m’en mordis même les lèvres. Si cette question n’en était pas vraiment une, elle invitait par contre à poursuivre la discussion, ce qu’il fit :

« Le problème était pas tant d’intervenir pour un camp ou un autre, mais d’intervenir face à des créatures divines, comme elles, et qu’elles ont créé. Le Dragon Noir et Oaxaca…Et bien qu’ils aient finalement fait quelque chose pour la Reine noire, sans Brytha, je ne suis pas sûr que vous et moi serions là à déblatérer... »

Je partageais son opinion et je lui en fis part.

« Cette fois, je suis bien d'accord, et c'est également ce que je lui ai mentionné. Et elle m'a assuré qu'ils n'avaient aucune idée des intentions du dragon. »

Agacé, il leva les yeux au ciel tout en commentant.

« Pour des dieux censés symboliser la toute-puissance, ils ont l’air extrêmement faillibles… »

Je ne fis aucun commentaire, laissant cette discussion prendre fin.

Cela faisait plusieurs heures que nous volions en aynore lorsque l’employé vint nous annoncer que nous nous préparions à atterrir. Ne connaissant aucunement ce continent nordique et ses dangers, j’évaluai qu’il serait préférable de se rendre à Pohélis en compagnie plutôt qu’en solitaire.

« Une fois sur Lebher, j'ai un achat à faire et ensuite je partirai pour Pohélis,.. Seriez-vous intéressé à faire cette dernière portion de voyage en ma compagnie ? »

Accompagnant ses paroles d’un haussement d’épaules, il me répondit :

« Compte tenu du fait que nous allons au même endroit, je n’y vois aucun inconvénient. »


Cette question réglée, il me restait à poursuivre vers une un peu plus délicate.

« J'avais l'intention de faire la dernière portion du voyage avec un autre moyen de transport. Auriez-vous une réticence à la faire à dos d'hippogriffe ? »


Affichant d’abord un air sceptique, il répondit positivement à ma demande rajoutant qu’il avait déjà monté des créatures ailées. Il aurait pu légitimement me demander comment je pensais trouver un hippogriffe sur un continent dont je ne connaissais rien. Mais il n’en fit rien, ce qui m’arrangeait en fait. Je préférais faire mes emplettes d’abord et ne lui montrer ma forme ailée qu’au moment de partir.

L’aynore amorça sa descente et j’observai à travers l’hublot le paysage qui s’offrait à moi…Blanc… tout était blanc.

Avatar du membre
Ezak
Messages : 212
Enregistré le : mar. 22 déc. 2020 06:18

Re: Voyages en Aynore entre Kendra Kâr et Lebher

Message par Ezak » mar. 15 mars 2022 16:31

J’embarquai dans l’appareil et allai me placer au fond, prenant place sur une rangée seule. Lorsque je m’assis, je sursautai en remarquant une silhouette familière de l’autre côté du passage, sur la même rangée que la mienne. C’était l’elfe blanche, Sibelle, l’amie de Sirat et de cet étrange pirate Hearthless. Les fameux aventuriers envoyés pour sauver mon père durant la guerre. La voir ne me fit pas plaisir. Cela réactiva en moi les sentiments négatifs de cette guerre que j’essayais pourtant de laisser derrière moi. J’expirai bruyamment ne pouvant me retenir de lâcher à voix haute.

« Bien sûr… Il fallait que cette guerre se rappelle une énième fois à moi. »

Elle leva sa tête et déclara :

« Si me voir vous déplait, vous pouvez toujours changer de place.... moi, j'ai rien contre vous. »

Je la jaugeai un instant. Lors de notre première rencontre je l’avais presque détestée pour avoir fait partie de ceux qui m’annonçaient la trahison de mon père. Là, alors que mon esprit n’était plus animé par les sentiments négatifs de la bataille je voyais les choses de manière plus objective. Ce n’était pas sa faute, et elle avait juste été quelqu’un sur qui j’avais déversé gratuitement mes frustrations. Il était de bon ton d’entériner la hache de guerre, alors je m’enfonçai dans mon siège.

« Moi non plus… »

Elle reprit :
« Nosveris n'est pas une destination, si commune. Y allez-vous tout comme moi pour répondre à l'appel du messager ? »


J’hochai de la tête. Alors elle répondait à l’appel de ce cryomancien. Ce devait être elle la fameuse elfe blanche qui était passé par le marché avant moi. Je lui répondis alors sans lui en dire trop.

« On peut dire ça. J’y vais pour réaliser… quelque chose au nom de mon Royaume. Disons que cet appel n’est qu’un moyen de plus pour moi de réussir ma mission. »

Après une pause je repris.


« Qu’est-ce qui peut bien vous pousser vous autres à accourir à la demande d’aide de continents éloignés ? C’est pour l’argent ? L’appel de l’aventure ? »


Elle fronça les sourcils avant de reprendre.

« Qu'entendez-vous par vous autres ? »

Je levai un sourcil.


« Vous n’êtes pas une sorte de mercenaire ? Ce que certains appellent des aventuriers ? »


Elle eut un léger sourire.

« Je me considère comme une aventurière. Pour ma part, c’est l’appel à l’aventure, il n’y a pas de doute. J’ai besoin d’action. »

Je ne rebondis pas sur le fait que les aventuriers étaient des mercenaires qui ne disaient pas leur noms et je détournai mon regard un instant avant de révéler les pensées qui m’animaient avant de monter dans cet appareil. Cela faisait du bien d’en parler et d’échanger nos avis contraires.

« Personnellement j’ai toujours haï cette vie d’errance. Je n’ai pas ce besoin d’aventure que vous avez et à vrai dire je ne le comprends pas. Si je pouvais, je ne quitterais plus ces terres. »

Elle m’affirma qu’elle n’avait jamais eu ce besoin d’avoir un chez soi ce qui pour moi résultait du mensonge. J’avais pu l’observer, si Omyre avait réussi à accueillir tant « d’exclus » c’était parce que ces personnes cherchaient un chez soi, ou du moins un lieu où on ne les rejetterait pas pour ce qu’ils étaient.
« Vous n’en avez jamais eu ? Vous venez bien de quelque part, vous avez bien des attaches ? Des parents, une culture… »
Elle ria, ce qui eut l’effet de me détendre encore plus. La conversation n’était pas désagréable.
« Oui, oui, j'avais un chez-moi étant jeune. Et non, je ne vous raconterai pas d'histoire triste. J'ai eu une belle enfance et des parents aimants. Mais j'avais ces fourmis dans les jambes, le besoin de bouger. »
Je comprenais maintenant que nous étions différents. Personnellement je n’avais pas eus de parents aimants, et je n’avais pas eus le temps d’avoir des fourmis dans les jambes que l’on me mettait déjà à la porte. Nos urgences n’avaient pas été les mêmes, nos trajectoires étaient divergentes. Je lui souris.

« J’imagine que quand on a une aussi longue vie que vous autres, elfes, on finit par vite s’ennuyer… Ma vie sera courte alors, de mon côté j’essaye de me concentrer sur ce qui est vraiment essentiel à mes yeux. Les miens… »

Elle acquiesça à mes propos reconnaissant que ça pouvait être déterminant. Nous entrâmes alors dans un long silence qui me fit me rendre compte à quel point j’étais épuisé. Je n’avais cessé de courir à droite et à gauche à travers la cité pour répondre aux sollicitations de tous et tenter de mettre en place les bases d’un renouveau pour le Royaume. Insidueusement, cette charge mentale m’avait affecté et sans prévenir, ce qui devait être un battement de paupière m’envoya dans les songes.

Je ne sais pas combien de temps je dormis, mais la voix de Sibelle menaçante me réveilla.
« Si vous voulez conserver vos bourses intactes, ne touchez pas à la sienne. »
J’ouvris les yeux pour voir un homme, proche de moi se confondre en excuse et partir et s’en aller dans les couloirs. Je mis du temps à comprendre ce qui se passait et l’information mis de longues secondes à parvenir à mon cerveau.

« Attendez… Ne me dites pas que cet homme voulait me voler ? » Me dit-il au bout de quelques secondes.

Elle me répondit sur le ton de la plaisanterie.

« Je crois qu’il soupçonnait que votre bourse soit pleine. »
Je secouai la tête de dépit. Même dans un moyen de transport extrêmement cher on trouvait tout de même des êtres assez malhonnêtes pour s’emparer du bien des autres.

« La vermine se trouve vraiment partout… Il a pas intérêt à recroiser ma route celui-là. »
dis-je amer avant de retourner mon attention sur l'elfe.

« Je crois que je dois vous remercier. J’aurai été bien mal sur un continent inconnu et austère sans un sou. »


« Je crois que vous auriez trouvé moyen de vous en sortir… Mais, en effet, c’est une bonne chose de ne pas être seul, surtout sur ce continent, comme vous dites ... »

« Vous connaissez les lieux ? »

« Aucunement. »
J’étais déçu, j’imaginais qu’elle aurait pu m’en dire un peu plus mais alors que je retombai dans le mutisme, je me rappelai d’un détail. Si elle ne pouvait pas me parler de Nosveris il y avait bien un lieu sur lequel elle pouvait me renseigner.

« J’y pense. Vous êtes partis sur l’île des dieux, avec les autres ? »

Elle l’affirma du chef avant de reprendre.
« Cela ne vous a pas tenté ? »

« Pas un instant. Ma place était auprès des kendrans pas avec les divins.»

Bien plus pressé d’en savoir plus que je l’aurais voulu, je repris.
« Vous les avez vus ? Vous leur avez parlé ? »
« J'ai vu leur résidence respective, mais je n'ai parlé qu'à Gaïa... Je suis allée sur cette île pour avoir des réponses, pour comprendre la non-implication des dieux dans cette affaire. Pour comprendre pourquoi, ils n'étaient pas intervenus plus tôt... Et puis Gaïa m'a expliqué qu'ils avaient les mains liées. »

« Les mains liées ? »

« Zewen leur avait interdit de se mêler des affaires des mortels. »
Je réfléchis un instant, tentant d’analyser les informations.

« Donc vous êtes en train de me dire, que les dévots prient leurs Dieux en vain et qu’ils n’intercèderont jamais en leur faveur, car Zewen leur interdit d’intervenir dans leur vie ? »
« Je ne sais pas ce qu'il en est des dévots et de leur prière... Je ne me fais pas la défenderesse des Dieux... mais dans ce cas précis, elle m'expliquait qu'ils n'avaient à intervenir entre deux clans de Yuimeniens,… et je la comprends…pourquoi favoriser les Ynoriens au profit des Liykors ou d’une autre race ? »

Je ne pus m’empêcher de rebondir devant ce qui, pour moi, était un ramassis de conneries et traduisait mal ce qui s’était passé durant cette guerre qui avait été tout sauf une classique bataille entre mortels.

« Le problème était pas tant d’intervenir pour un camp ou un autre, mais d’intervenir face à des créatures divines, comme elles, et qu’elles ont créées. Le Dragon Noir et Oaxaca…Et bien qu’ils aient finalement fait quelque chose pour la Reine noire, sans Brytha, je ne suis pas sûr que vous et moi serions là à déblatérer... »

« Cette fois, je suis bien d'accord, et c'est également ce que je lui ai mentionné. Et elle m'a assuré qu'ils n'avaient aucune idée des intentions du dragon. »

Je levai les yeux aux ciels, agacé par cette réponse un peu facile. Le mythe des dieux omniscients et tout-puissants venait de prendre un sacré coup.

« Pour des dieux censés symboliser la toute-puissance, ils ont l’air extrêmement faillibles… »

Elle ne répondit rien à ce sujet, et la conversation se tua d’elle-même. Elle reprit néanmoins quelques secondes plus tard.

« Une fois sur Lebher, j'ai un achat à faire et ensuite je partirai pour Pohélis,.. Seriez-vous intéressé à faire cette dernière portion de voyage en ma compagnie ? »

Je levais les épaules, montrant que cela ne me dérangeait pas. Sa compagnie ne semblait pas trop désagréable.

« Compte tenu du fait que nous allons au même endroit, je n’y vois aucun inconvénient. »


Elle renchérit :

« J'avais l'intention de faire la dernière portion du voyage avec un autre moyen de transport. Auriez-vous une réticence à la faire à dos d'hippogriffe ? »


Je l’observai de manière dubitative. Je ne savais pas qu’il y avait des hippogriffes d’élevage permettant le transport. J’imaginais que ça devait être une spécialité Nosverienne que je méconnaissais.

« Hé bien. J’ai déjà voyagé à dos de créatures ailées. Pourquoi pas »

Dis-je en évoquant les nombreuses fois où j’avais pu voler sur le dos de Naral Shaam…Une pensée qui suffit à me renvoyer dans les songes des mes aventures passées.

Avatar du membre
Ezak
Messages : 212
Enregistré le : mar. 22 déc. 2020 06:18

Re: Voyages en Aynore entre Kendra Kâr et Lebher

Message par Ezak » mer. 28 août 2024 01:59

e plan était clair : rejoindre le village que la Gardienne avait indiqué à Freida. Son peuple d’origine se trouvait dans le Duché de Luminion. Le plus rapide était donc de prendre un Aynore pour Kendra-Kar depuis Lehber et ensuite embarquer dans un cynore pour Oranan, et enfin finir la route à pied pour joindre le Duché dont la région montagneuse jouxtait les plaines ynoriennes. Nous avions encore beaucoup à faire mais après avoir arpenté certains des mondes les plus dangereux de ce monde, rien n'était un jeu d’enfant.

Lorsque nous arrivâmes à la zone d’embarcation de Lebher, le regard de Freida sembla s’illuminer lorsqu’elle aperçut l’aynore. C’était la première fois qu’elle voyait un tel engin de ses yeux.

Je commentai :
« Pas mal, n’est-ce pas ? Cela m’a fait pareil la première fois que je suis monté dans l’une de ces choses. Et ça a plutôt mal fini… Mais je garde cette histoire pour une autre nuit au coin du feu. », conclus-je en souriant.

Alors nous pénétrâmes dans l’engin. Retour aux origines pour elle et pour moi. Je n’étais pas mécontent de revenir en Nirtim. Le voyage promettait d’être long comme à l’aller alors je m’installai confortablement pour dormir quelques heures lorsqu’une voix m’interrompit.

« Ça alors ! D’Arkasse ? »

J’ouvris un œil. C’était le Sieur de Maisonneuve. Je fus surpris de la voir là.

« Hé bien ! Vous ici ? On est bien loin de chez nous. »

« Oui ma famille a quelques possessions en Nosveris et pas que ! Nous avons su… nous diversifier et nous offrir de solides relations hors des régions kendrannes de génération en génération. C’est peut-être la raison pour laquelle notre nom n’a jamais quitté l’entourage de la Cour. »

Comme à son habitude, le sieur de Maisonneuve paraissait totalement fier de l’histoire de sa famille et sa position dans l’échiquier kendran. Je pris un peu sa réflexion pour moi, dont la famille venait de refaire son apparition à la Cour à travers moi. Je contre-attaquai donc.
« Dommage que ces relations extérieures ne nous aient pas offert plus d’alliés face à Oxaxaca. Peut-être que plus d’hommes et femmes seraient rentrés chez eux vivants. »

Xander de Maisonneuve lâcha un grand sourire.
« Direct ! Voilà ce que j’aime chez vous, d’Arkasse ! Et vous, que faisiez-vous en Nosveris, cela fait longtemps que nous n’avons pas eu l’occasion de vous apercevoir que ce soit à la Cour ou même dans les rues de la capitale », dit-il en jetant un regard à une Freida endormie puis à son ventre.

« Je sauvais le monde. » dis-je simplement.

Il sourit un instant, croyant sans doute à une plaisanterie puis à la vue de mon expression il comprit que je ne blaguais pas.

« Oh ! Encore des prouesses à mettre à votre actif ? Et si vous veniez dîner chez moi ce soir ? Vous pourriez nous raconter tout ça ! Ma femme et mes filles sont de grandes amatrices de vos récits. Vous pourriez venir avec votre… ? » dit-il en jetant un regard à Freida.

« Amie. »

« Oh pardonnez-moi, mais au vu de sa situation je croyais que… »

« Et vous aviez tort. »

Il se baissa vers mon oreille et me chuchota : « Vous savez on a tous un ou deux bâtards par-ci par-là. Je serai discret sur cette ..
Je soufflai un peu exaspéré :

« Xander je vous en prie ! Et malheureusement je vais devoir décliner votre invitation, je ne m’arrête pas à la cité. Je repars pour le nord, j’ai quelques affaires à régler. Mais… si vous voulez vraiment être au courant de ce qui s’est passé, vous pouvez peut-être vous rendre utile. Je comptais juste écrire un rapport aux régents. La Cour a le droit de savoir ce que le monde a évité. »

L’œil de Xander brilla ! Je compris qu’il était heureux car il aurait des nouvelles à rapporter à la noblesse de robe dont il faisait partie, et qui se réunissaient pour partager leur oisiveté commune.

« Vraiment ? Je suis honoré ! »

« Oui d’ailleurs je vais l’écrire tout de suite », dis-je en sortant mon matériel à écriture du sac.

Votre Altesse, vos Seigneuries,

C'est avec une une grande fierté que je vous annonce que votre tout récent Chevalier a contribué à mettre fin à une menace qui nous guettait tous. Un demi-dieu a été vaincu, sur les terres de Nosveris. Yuiä-Turé, création de Yuïa, qui risquait de se libérer et de détruire tout ce que nous chérissons. Après Oaxaca, Kendra-Kâr peut s'enorgueillir d'avoir participé directement à la défaite d'une nouvelle divinité par le biais de votre serviteur et une fois de plus, d'avoir sauvé le monde d'une menace qui guettait tous ses habitants. Les Académiciens de Pohelis m'ont assuré que la cour recevra bientôt tous les détails et preuves de cette affaire. En attendant je continue à parcourir nos terres, veillant au bien de notre peuple et à la paix sur nos régions. Vous aurez bientôt de mes nouvelles.

Recevez mes plus respectueuses salutations,


Ezak d’Arkasse

Une fois écrit je la lui tendis :

« Tenez, vous pouvez la lire si vous voulez. »

« Oh ! » dit-il après avoir parcouru la lettre. « Il semblerait que la noblesse kendranne ait de la chance de vous compter parmi ses membres. Bientôt on vous écrira des chansons : Ezak d’Arkasse le fléau des divins, le vainqueur de deux divinités ! C’est une jolie lettre, d’une autre teneur que celle qui fait fort bruit dans la société en ce moment. »

J’haussai les sourcils.

« Quelle lettre ? »

« Celle de Xel Almaran, vous le connaissez non ? »

« Évidemment ! C’est l’un des braves kendrans qui a participé à la bataille de Kochii. Un homme de valeur. »
Contrairement à vous autres les planqués manquai-je de rajouter.

« Il est peut-être un peu trop brave justement, à la limite du téméraire. Il aurait envoyé à Ybelinor une lettre grossière, insultante, mensongère dans laquelle il s’affirme avec force contre sa légitimité concernant le trône. Cette lettre fait grand bruit ! Inutile de dire que la noblesse n’a pas apprécié… »

« Ah oui ? » dis-je intéressé.

« Oui, et vous voulez savoir quoi ? Il paraîtrait qu’il sera fait Chevalier. Vous vous doutez bien que ce serait embarrassant pour une partie de la société. »

Je souris.
« J’imagine… »

Il me jaugea un instant. « Et qu’en pensez-vous ? »

« Rien… » mentis-je. « C’est de la politique. J’ai juré allégeance à la Cour. Tant qu’elle ne s’entre-déchire pas je n’ai pas à prendre un parti ou un autre. Ça porte un nom : le complot et c’est un crime grave. N’est-ce pas ? »
Je vis le sourire de De Maisonneuve s’élargir devant cette phrase tout à fait politique.

« Bien sûr, d’Arkasse ! Ah et quant à vos projets. Ils ont bien été mis en place. La… propriété que vous m’avez permise de récupérer sert de lieu de repos et d’entraînement pour les jeunes que vous avez recrutés et qui sont entraînés en ce moment par le Général. Sans doute qu’avec la nouvelle de vos nouveaux exploits, d’autres viendront ? »

« C’est tout ce que nous souhaitons ! »

Et nous continuâmes à discuter de ces conversations à la fois politiques et légères qu’adorait Maisonneuve jusqu’à l’arrivée à Kendra-Kâr. Nous avions tous deux de précieuses informations. Lui pourrait se faire mousser auprès de la noblesse d’être le premier au courant. Moi, j’avais une nouvelle confirmation d’avoir un allié puissant en la qualité de Xël. Et s’il se dévoilait lui, pour le moment, il était inutile que j’en fasse de même.

Répondre

Retourner vers « Voyages aériens »