Loin des yeux...
Des cris désarticulés tirèrent l’elfe blanche de son repos. (
Qu’est-ce que…). On aurait dit que quelqu’un se débattait. Soudain ses cris furent étouffés. Avant de reprendre de plus belle. Haple envoya voler avec inquiétude la couverture qui la couvrait et se précipita à la fenêtre sur ses jambes encore engourdies par l’immobilité nocturne. Elle n’eut pas besoin d’ouvrir la fenêtre ; elle les vit immédiatement et les entendit hurler de nouveau au soleil levant :
-
La belle puceeeelllleuh ! MFFFfffff-out d’ma trueeeeeeEEEELLLLE !!!
Le goujat avait beau tituber, il parvenait à échapper à l’emprise de son compagnon qui cherchait tant bien que mal à le bâillonner. De toute évidence, ce genre de scène était fréquent à Pont d’Orian car aucune lumière ne s’alluma derrière les fenêtres des maisons voisines. Attribuant leur comportement à une nuit trop arrosée, la ménestrelle retourna s’asseoir sur son lit en attendant que le tumulte ne cesse : ils descendaient la grand-rue, sans doute après une fête au château, et dépasseraient bientôt la maison d’hôte.
Ce fut donc avec un choc qu’elle entendit tambouriner à leur porte et appeler :
-
PUCCELLLEUUS du Livre.… IVRE-hic !
L’ivrogne avait réussi une sortie et ciblé leur gîte par un malheureux tour du sort. Ou bien… ? (
… « pucelles du Livre » …) Haple eut un mauvais pressentiment et bondit pour reprendre position à la fenêtre. De sa chambre au premier étage, elle pouvait voir en contrebas la silhouette de deux hommes qui s’étreignaient devant le perron. Alors la porte s’ouvrit et baigna les importuns dans la lumière jaune d’un chandelier aux flammes vacillantes. Quelle ne fut pas sa surprise !
D’abord, ce n’était pas un couple mais bien deux amis, l’un ivre et l’autre tentant de contenir son enthousiasme. De plus, elle les reconnût immédiatement : c’était le charmant courtisan et l’adolescent malingre, lequel de toute évidence ne connaissait pas encore ses limites. Et la personne qui les accueillit ne fut autre que… Sœur Nétone en nuisette. Haple se frotta les yeux : ce tableau était surréel.
La géomancienne s’approcha du trublion et le toisa du haut de son mètre cinquante, se plaçant juste sous ce menton imberbe dont devaient émaner des vapeurs d’alcools à saouler Kubi en personne. Alors, d’un seul regard, sans un mot, elle le réduisit au silence et le regarda se déconfire devant elle. (
Respect)
Le courtisan prononça quelques mots. (
D’excuse probablement) Et Nétone lui accorda finalement son attention. A l’étonnement de la spectatrice elfique, les deux hommes ne repartirent pas la queue entre les jambes mais au contraire tendirent chacun un parchemin scellé à la religieuse. (
Intéressant…)
Les puissants oublient souvent de se sentir vulnérables… ou exposés. Ainsi, la géomancienne ne se donna pas la peine de rentrer se couvrir et ouvra séant les missives sans songer à préserver les apparences. Après tout… ce n’était qu’une nonne recevant la visite au point du jour de deux hommes richement habillés et clairement décadents… (
Rien de suspect là-dedans…)
Avec un accès d’excitation, la ménestrelle réalisa que l’angle par lequel elle espionnait la scène (
…observait la scène…) lui permettait de voir le premier parchemin que Nétone déploya à la lumière du chandelier. Que c’était enrageant d’être cependant trop loin pour pouvoir déchiffrer les caractères qu’elle apercevait apparaître et disparaître parmi les ombres dansantes.
Alors un éclair de génie la frappa ! La potion d’aquilopie, bien sûr ! C’était pour ce genre d’occasions qu’elle l’avait achetée. Se précipitant à pas silencieux vers la chaise sur laquelle ses achats reposaient encore, elle saisit le flacon au contenu tombé du ciel et repris position en toute hâte. Sans quitter les protagonistes de cette étrange rencontre, Haple déboucha la bouteille et… (
Attends…) Avant d’en verser le contenu dans sa gorge, l’adolescente au réveil vérifia l’étiquette pour dissiper le doute qui l’avait saisi… (
Non, c’est bon !) Et elle bascula la tête en arrière pour la boire cul sec.
Une sensation comme elle n’en avait jamais connu la saisit. Un vertige qui faillit lui arracher un cri de surprise la plongea en avant et ce fut avec le plus grand étonnement qu’elle ne sentit, ni n’entendit son corps percuter la fenêtre et s’écraser au sol dans un millier d’éclats de verre. Quelques secondes nauséeuses plus tard, Haple reprit ses repères et se concentra sur ce qu’elle voyait, repoussant à plus tard l’analyse du miracle pharmabiologique par lequel elle était en mesure de lire des pattes de mouches à dix mètres sans que ses pieds n’aient bougé d’un pouce.
La lectrice avait déjà replié la première partie de la lettre si bien que Haple ne put lire que la suite. Dans une encre turquoise et une calligraphie soignée, l’auteur, ou l’autrice comme le soupçonna rapidement Haple, de la missive apportée par l’adolescent concluait en ces termes :
… votre sœur. Je vous accueillerai avec grand plaisir au manoir et vous envoie, porteur de la présente, mon frère pour vous y conduire et avec qui j’espère vous aurez l’opportunité de faire connaissance en cours de route.
En espérant qu’il se montrera à la hauteur de vos attentes.
Votre obligée,
Oryanne Désirelle
Haple ne parvenait pas à y croire. Cette raclure de jeune premier dévergondé… le frère de la vicomtesse ? L’élu ?! Elle avait beau ne pas accorder le moindre crédit aux superstitions criminelles des deux magiciennes, il fallait admettre que l’idée faisait sourire. Honnêtement, l’existence de cet imbécile était déjà une offense à la nature humaine, alors s’il était doublé d’une erreur de casting sacrilège envers Zewen… ! Haple voulut le réexaminer pour confirmer son diagnostic péjoratif mais s’abstint dès qu’elle sentit son cœur prêt à se déverser sur la fenêtre translucide au moindre mouvement de tête. La vision lointaine avait ses désavantages…
Et heureusement, car le geste suivant de la Sœur Nétone aurait pu sortir de son champ de vision : elle déplia le second parchemin :
J’adresse cette lette au chambellan en espérant qu’elle te parvienne à temps. Notre illustre amie m’a répondu : son frère doit te retrouver à l’est du pont avant que tu n’en repartes. Ce sera l’occasion de le guider de ta lumière en espérant qu’il ne s’égare pas en chemin. Garde à l’esprit si tu as le moindre doute sur l’issue de son voyage, que notre amie préfèrerait le voir rentrer bredouille que d’apprendre sa disparition.
Je te quitte avec mon entière confiance et te rappelle que la terre sera toujours sous tes pieds le cas échéant.
La main qui avait écrit ses mots cryptiques à l’encre violette, bien qu’anonyme, ne laissait pas de doute sur sa propriétaire. (Nacota) Elle savait déjà qui cette « illustre amie » faisait allusion et déchiffra instinctivement le lieu de rendez-vous codé : « l’est du pont » (
le pont d’Orient … ou autrement : Pont d’Orian). La suite la laissait plus perplexe et Nétone aussi demeura pensive car elle prit le temps de le relire à plusieurs reprises.
Le lexique du « voyage » et du « chemin » était probablement à prendre littéralement comme la route jusqu’à Haenian mais les dangers de perdition qui menaçaient l’adolescent évoquait quelque chose de plus sombre… (
le protocole). Cette expérience mystérieuse dont Pulchinel lui avait dit que nombre d’enfants étaient sortis brûlés, noyés, écrasés… morts en tous cas.
Assurément, la vicomtesse ne souhaitait pas cela pour son frère aussi rustre soit-il… d’où l’injonction de Nacota de faire marche arrière au besoin s’il ne suffisait pas de (
… le « guider de ta lumière »…). Cette lumière pouvait simplement faire référence à un savoir, une sagesse quelconque à impartir au jeune humain mais peut-être aussi… elle l’avait sur le bout de la langue.
La vérité cherchait encore à émerger de son esprit déductif lorsque, soudain, elle s’imposa à son esprit par une fulgurante association d’idées. Ô épiphanie jouissive ! Les bribes d’informations glanées ces derniers mois comme autant de pages déchirées du Livre de Zewen s’assemblèrent sous son souffle divin :
« l’Elu saura réunir les fluides »,
« guider de ta lumière »,
« ses fluides d’ombre »,
« 100 yus pour la fiole de fluide de lumière »,
« brûlés, noyés, écrasés » …
(
Non…)
Elles expérimentaient avec les fluides ! Les folles croyaient en l’existence d’un enfant qui pourrait contenir des fluides opposés ! Malgré ses connaissances fragmentaires sur la mythologie zewenite, elle savait que le père des dieux avait séparé les fluides deux par deux et que leur coexistence était fatale à la personne qui s’y essayait. Leurs recherches transgressaient les fondamentaux de leur communauté spirituelle et étaient voués à l’échec. Des échecs qui avaient coûté leur vie à de nombreux innocents ! Et demain peut-être serait-ce le tour de …
Haple fut soudainement interrompue dans ses pensées par un œil colossal qui apparut dans son champ de vision et la fit tomber à la renverse ! Le cœur battant et les fesses endolories, l’espionne ferma les yeux pour éviter de perdre ses esprits à la vue de la pièce qui tournait dans son cristallin magiquement augmenté. Elle ne pouvait cependant pas l’effacer de l’écran noir de ses paupières : cet œil, pur et bleu comme l’azur. Cet œil, qui la fixait posément et qui la reconnut comme la gueuse aux apparences trompeuses.
***
Haple avait le cœur qui battait la chamade. Elle avait été repérée ! Elle en était sûre… Les yeux fermés pour limiter le tournis que sa vision hypermétrope provoquait, l’indiscrète tendait son ouïe elfique à la recherche d’un signal d’alerte. Elle avait les nerfs à vifs. Elle était prête à bondir et à… rien. Elle ne pouvait rien faire tant que la potion d’aquilopie ferait effet.
Très vite, elle entendit la porte du bas se refermer. Suivi de bruits de pas. (
Plus d’une personne). Nétone avait donc invité au moins l’un des messagers à entrer. Des voix lui parvinrent à travers le plancher vermoulu… Ils continuaient donc leurs échanges à l’abri des regards et oreilles indiscrètes. (
…) Haple était partagée : elle était encore sous le choc mais d’un autre côté elle ne voulait pas manquer cette occasion d’obtenir des informations qui pourraient s’avérer rien de moins que vitales. (
Et le courtisan m’aurait déjà dénoncé si c’avait été son intention)
Après de longues minutes d’hésitation, Haple finit par entrouvrir les yeux. Ses cils ! Elle n’avait jamais été aussi soulagée de voir le rideau de ses cils se lever en ouvrant les paupières et le plafond de sa chambre, harmonieusement proportionné et à distance respectable d’elle, ne lui avait pas paru, il y avait seulement quinze minutes de cela, si admirablement… normal. Haple soupira – sa vision était redevenue … normale.
Dans le même souffle, l’adolescente se releva en silence et se dirigea vers la porte de sa chambre. La main sur la poignée, elle marqua une pause, le temps de se remettre dans son personnage. (
Bien, je suis prête). Elle ouvrit la porte et descendit les marches pieds nus, flottant dans sa nuisette comme un esprit nocturne et se frottant les yeux avec naturel.
-
Qu’est-ce que… marmonna-t-elle à d’une voix où l’irritation semblait pointer derrière l’engourdissement résiduel du sommeil.
J’ai entendu des cris.
La géomancienne rangea subrepticement les parchemins dans une poche de la robe de chambre qu’elle avait enfilée entretemps, passa devant le courtisan adossé contre un mur observant curieusement l’elfe et se dirigea finalement vers l’adolescent attablé. Celui-ci, affalé sur la table, peina à redresser la tête pour accepter le gobelet que lui tendit la religieuse. (
Non !)
Elle allait lui faire boire le fluide de lumière qu’elle avait dû acheter chez l’apothicaire (
Non !!!) Ses fluides obscurs allaient le rejeter : l’imbécile allait y rester ! Comment le courtisan pouvait-il rester spectateur alors que son ami allait à sa perte ? Si elle n’intervenait pas, personne ne le ferait… mais en même temps, elle se démasquerait et s’exposerait elle-même à un grand danger. L’indécision la rongeait. C’était une torture !
(
…)
(
……)
Elle n’interviendrait pas. La certitude la gagna soudain, irrévocable : elle laisserait mourir cet adolescent exécrable pour se préserver. Autrement, ils y passeraient tous les deux. Apaisée d’avoir pris cette décision en dépit de son cynisme, elle se réconforta à l’idée qu’en survivant elle pourrait le venger, lui et tous les autres. Qu’elle volerait ces parchemins incriminants, qu’elle raconterait ce qu’elle avait vu et que…
L’adolescent renversa le contenu du gobelet dans sa bouche et se leva brutalement. Sa chaise tomba à la renverse et l’adolescent, comme un navire dans la tempête, fit une embardée brutale qui contrastait avec sa léthargie d’avant. Alors, il tituba maladroitement en direction de son ami (
le traître…), une main tendue en avant tandis que, de l’autre, il se couvrait la bouche comme pour retenir le grondement tonitruant qui provenait de ses entrailles suppliciées.
Un air de panique sur le visage, le courtisan saisit prestement l’adolescent sous le bras et le conduisit à toute vitesse vers la porte d’entrée qu’il ouvrit à la volée au moment où… l’autre vomit ses tripes sur le perron ! Une première giclée aussi abondante que bruyante suivie d’une seconde plus modeste mais accompagnée d’une odeur âcre et nauséabonde.
-
Plus que puissant ce vomitif ! Vous n’aviez pas exagéré, Sœur Nétone…
-
Il faut ce qu’il faut.
-
Làaaa, làaa… entonna le courtisan d’une voix grave pour rassurer l’outre à vin sous son bras.
Ça va aller, l’ami…
Après une seconde d’incompréhension, bouche bée, Haple réévalua la situation : Elle avait fait erreur. L’émotion avait eu raison de son intelligence. Evidemment que la géomancienne n’allait pas faire son expérience criminelle devant elle : (
« Pas d’interférence »). Et le courtisan n’était en toute logique pas un complice sinon il aurait déjà révélé à l’humaine que la petite fouineuse les avait espionnés de la fenêtre de sa chambre un instant plus tôt.
Toutes ces informations, toutes ces émotions et… cette odeur !... C’en était trop :
-
Je remonte dans ma chambre.
La géomancienne ne montra aucun intérêt à cette annonce. Le courtisan en revanche manqua de laisser son fardeau se débrouiller avec ses montées biliaires pour la retenir et lui parler. Il s’en abstint cependant et l’accompagna dans sa montée des marches d’un regard inquisiteur.
***
Deux heures plus tard, lorsque le soleil avait non seulement franchi la ligne d’horizon mais aussi les toits de la grand-rue, Haple rassembla ses affaires et s’habilla pour la nouvelle journée de voyage qui les attendait. Elle avait épousseté ses vêtements mais ceux-ci portaient toujours les marques des combats et accidents qu’ils avaient endurés ainsi que cette odeur aigre dont son corps en irrévocable mutation semblait vouloir imprégner tous les tissus qui entrait en son contact.
Au rez-de-chaussée, elle retrouva les autres occupants de la maison déjà attablés, pour beaucoup inconnus. Certains conversaient à voix basse, d’autres remuaient distraitement le contenu de leur écuelle ou contemplaient rêveusement les volutes de fumée s’étirer au-dessus de leur tasse. Ses compagnes de voyage, ainsi que les deux humains de la veille, étaient là eux aussi. Elle les rejoignit et Hermance l’accueillit parmi eux avec énergie :
-
Alors comme ça y a eut du grabuge cette nuit !
-
CHHhhhuuut… protesta l’épave prophétique.
Moins fort.
-
Va falloir vous reprendre, Grégoire. On a une longue route devant nous aujourd’hui. D’ailleurs, le plus tôt on l’entamera, le mieux ce sera. Haple, prends ce que tu veux à déjeuner mais rapidement… et rejoins-nous dehors. Avec notre invité… ajouta-t-elle avec un sourire amusé que la Sœur Nétone réprima d’un regard foudroyant.
Haple se demanda l’adjectif que la jeune femme avait retenu… (
« notre invité » … de marque, à la fraîche mine…) Oui, quelque chose comme ça, assurément. L’adolescente se surprit à s’amuser de l’état pitoyable de son voisin de table tandis qu’elle attirait à elle le beurrier et se coupait une tranche de pain.
-
Comment tu t’appelles ? lui demanda-t-elle machinalement en étalant le beurre.
Grégoire, c’est ça ?
-
La gueuse me parle…
Haple s’arrêta dans son geste, les dents plongées dans sa tartine. Puis, avec un haussement d’épaule, elle avala le commentaire amer en même temps que la douceur du beurre frais sur une mie de pain délicatement sucrée-salée. Elle se servit ensuite une tasse de thé qu’elle avala au plus vite sans se bruler la langue car (
d’une part) on les attendait et (
d’autre part) la compagnie laissait à désirer puis se releva dans un raclement de chaise.
-
Allez, pas la peine de s’éterniser. Les autres seront prêtes d’un instant à l’autre.
Le déchet humain ne fit pas mine de bouger et vu ce qui était sortit de sa bouche quelques heures auparavant, l’elfe préférait ne pas mettre la main sur lui…
-
Tu pourras t’allonger à l’arrière de la… du carrosse, le tenta-t-elle.
La licence artistique de la ménestrelle paya : le prénommé Grégoire se releva, certes avec une pénibilité ostentatoire, et la suivit dehors, certes en traînant des pieds... Là, comme elle s’y attendait, la petite troupe s’était assemblée : Hermance et Nétone à l’avant, les sacs à l’arrière avec juste assez de place pour les deux jeunes gens … (
on serra serrés… chic).
Le courtisan, lui ne serait de toute évidence pas du convoi. Il se tenait sur le bas-côté et s’approcha pour assister son « ami » dans son ascension de la charrette par la face Nord. Aussitôt hissé à bord, l’adolescent s’effondra sur le dos et croisa les bras sur ses yeux. Lorsque Haple, après avoir chargé ses affaires s’apprêta à sauter à bord, une main galante s’offrit à elle. Douce et ferme (
et propre), elle ne songea pas à repousser le geste du courtisan. A sa surprise, elle sentit contre sa paume un bout de papier (
un billet secret ?) qui l’incita à prêter une attention toute particulière aux mots d’adieu qu’il lui dit ensuite :
-
Sœur Haple, ça a été un plaisir de faire votre rencontre. Vous êtes une personne remarquable que j’aurais fort plaisir à introduire dans mon cercle d’ami.
C’est alors que l’autre énergumène décida d’y mettre son grain :
-
Une autre recrue pour le bordel du Duc ? Ha !
Cette fois Haple réagit d’instinct. Avec le plus grand naturel au monde, elle balança son poing dans la tronche de son voisin et l’envoya vider son fiel dans le monde des songes. Le courtisan lui sourit aimablement.
-
Pardon, mais ça fait du bien, s’excusa-t-elle bien qu’elle n’éprouvât en réalité aucune gêne à frapper un homme à terre et sans défense.
-
Je n’en doute pas… La cour du Val d’Oriant accueille toute sorte de gens. Tous n’ont pas vos… qualités insoupçonnées, la complimenta-t-il avec un sourire sibyllin.
La charrette s’ébranla. Hermance avait visiblement décidé de couper court à ces ronds de jambes inutiles.
-
Au revoir alors, lui lança-t-il d’un air entendu.
Pour toute réponse, Haple baissa les yeux sur le bout de papier froissé dans sa main :
Eustache de Valeblan,
Conseiller du Duc.