L'Auberge de la Vieille Paulette

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Yuimen
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L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Yuimen » mer. 27 déc. 2017 17:18

L'auberge de la vieille Paulette

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"Bienvenue, nobles voyageurs, entrez donc, asseyez-vous, mangez...Comme j'aime les clients..."

Les meubles sont en bois d'acajou et les murs, couverts de tableaux, sont couleur vert terre. De la pièce centrale, on voit la cuisine où Paulette prépare de succulents repas. Au deuxième étage il y a à peu près trente-six chambres avec douches, toilettes et des lits avec une couverture de couleur mauve. Il y a deux ou trois lits par chambre. On y trouve aussi une fenêtre donnant sur la ville, un paillasson et un tapis représentant des dragons, des chevaliers, des licornes ou autres choses du même genre.

La vieille Paulette est une dame dodue mais très chaleureuse et amicale, c'est la cuisinière. Madienne et Trucilia, deux jeunes filles très belles, sont les servantes.

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Hatsu Ôkami
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Re: L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Hatsu Ôkami » jeu. 14 mars 2019 02:39

La course effrénée de la jeune ynorienne la ramena haletante jusqu'à la petite auberge accueillante où elle entra en trombe, essoufflée, attirant les quelques regards des clients et de la propriétaire, les serveuses étant occupées. Elle balaya la salle du regard, ignorant la décoration chaleureuse, les tableaux sur les murs et les plantes qui ajoutaient un cachet agréable à l’ensemble. Elle ignora tout ça, se contentant de ne pas voir le sujet de son empressement. Onoda n’était pas là ! Elle avança jusqu’à la gérante qui l’accueillit d’un sourire affable, visiblement pas contrariée du monde par l’empressement de sa cliente. Celle-ci reprit son souffle, adressant un sourire gêné à la femme corpulente, avant de demander expressément si son compagnon de route était monté dans sa chambre. Voyant que la gérante avait du mal à voir de qui elle parlait, elle le décrivit rapidement et son faciès s’éclaira.

- Ah oui, il a fait du charmes à mes filles… il est parti après s’être fait rembarré, disant qu’il trouverait bien une agréable compagnie digne de son rang ailleurs.

Hatsu soupira longuement en se massant les temps, attirant un regard attendri de la tenancière.

- Je ne connais pas la ville, vous savez où il pourrait être ?

- Et bien… le plus logique serait la rue de l’Etalon…

- Merci ! Pouvez-vous nous réserver une chambre avec deux lits pour la nuit ? Il paiera les frais.

- Oh, il a déjà réservé une chambre, mais attendez jeune fille !

Hatsu avait déjà commencé à sortir et se retourna, visiblement contrariée, pressée comme elle était.

- Vous ne devriez pas aller là-bas, ce n’est pas un endroit recommandable pour une jeune femme.

- Je n’ai pas le choix, s’il lui arrive quelque chose parce que je ne suis pas allée l’aider, je ne me le pardonnerai jamais. Merci quand même.

Elle sortit en leur souhaitant une bonne soirée. La tenancière regarda un instant la porte close et soupira.

- Si seulement elle savait ce qui l’attendait… Pauvre fille.

Hatsu courut de nouveau à travers la ville, demandant son chemin aux passants lorsqu’elle ne savait plus où aller. Elle foula les pavés aussi vite qu’elle le put, maudissant Onoda et son amour de la chair, maudissant ce fichu Tonnerre D’Omyre, se maudissant elle-même de l’avoir laissé seule alors qu’elle aurait dû s’attendre à un tel comportement de sa part. Elle commençait à en avoir sincèrement plus qu’assez du comportement du forgeron. Lorsqu’elle lui aurait mis le grappin dessus, ils auraient une petite discussion et cette fois, il allait falloir qu’il l’écoute. Elle avait une furieuse envie de lui coller son poing dans la mâchoire en cet instant et espérait juste qu’elle réussirait à se contrôler lorsqu’il apparaitrait devant elle, son éternel sourire narquois sur les lèvres.
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Hatsu Ôkami
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Re: L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Hatsu Ôkami » jeu. 14 mars 2019 02:47

Onoda, bien qu’ayant prouvé son inutilité face au mage, se révéla extrêmement convaincant face aux gardes qui acceptèrent la version qu’il leur donna, à savoir qu’un dangereux espion d’Omyre s’en était pris à lui et à la jeune femme allongée et souffrante au sol. Jeune femme qui perdit connaissance sur le dos d’un des gardes lors du trajet vers l’auberge où ils logeaient après qu’Onoda leur ait demandé escorte. La tenancière, médusée, reconnut la jeune femme et le forgeron et mena immédiatement le garde jusqu’à la chambre où il déposa la jeune ynorienne inconsciente tandis qu’il ordonnait à Onoda de rester en ville le temps qu’ils mettent la main sur l’espion d’Omyre. Onoda ne se fit pas prier et affirma qu’il ne quitterait pas l’auberge.

Hatsu dormit toute la nuit et ne se réveilla qu’une fois l‘heure du déjeuner du lendemain passée. Elle ouvrit péniblement les paupières et les referma aussitôt face à la clarté qui s’infiltrait pas la fenêtre. Le forgeron, installé à une table, releva la tête en entendant la jeune femme bouger et grogner contre la lumière qui lui brûlait la rétine. Elle finit par se redresser et ses yeux s’habituèrent à la luminosité ambiante. Elle semblait perdue et fouilla la pièce du regard d’un air inquiet avant d’apercevoir le forgeron. Ses pupilles se rétrécirent et son visage se décontracta. Elle soupira et se rallongea, rassurée de savoir qu’elle était à l’auberge et qu’il n’était pas blessé. Elle entendit le forgeron tousser et tourna de nouveau ses prunelles vers lui.

- Que… comment vous sentez-vous Ôkami ?

Elle haussa les sourcils. Depuis quand s’inquiétait-il de son état ? Elle cala l’oreiller pour s’adosser à la tête de lit et regarda le forgeron.

- J’ai l’impression d’avoir été piétiné par un troupeau de chevaux sauvages. Combien de temps j’ai dormi ?

- Pas loin d’une vingtaine d’heures, pas plus. Je vais vous chercher à manger.

Il quitta la pièce, suivi par le regard étonné d’Hatsu qui ne comprenait pas son comportement prévoyant, mais avec un air qui laissait transparaître une certaine gêne. Elle patienta en se remémorant les événements de la veille, essayant de comprendre le brusque changement de comportement chez son compagnon de route, mais sans trouver quoi que ce soit. La porte s’ouvrit de nouveau, mais ce fut une des serveuses qui lui apporta un plateau et Hatsu lui offrit un sourire en la remerciant, demandant néanmoins où était le forgeron.

- Il boit un verre en bas. Vous voulez que j’aille le chercher ?

- Non, ce ne sera pas nécessaire, merci.

Elle mangea sans grand appétit après que la serveuse soit repartie. Finalement, le forgeron était resté le même, elle s’était probablement imaginée des choses avec l’esprit ralenti par les brumes du sommeil. Elle termina son plateau, se forçant pour ne pas gâcher et pour reprendre des forces, puis décida de se lever. Ecartant les draps, elle posa précautionneusement ses pieds sur le sol et soupira de soulagement en constatant qu’elle pouvait marcher sans difficulté malgré un engourdissement léger. Elle s’étira, faisant quelques exercices pour vérifier que tout allait bien. Elle ressentait une gêne globale et voyait nettement des bandages sur des zones qu’elle supposait brûlées. Elle en ôta un, craignant un peu la vision de sa peau profondément brûlée, mais fut soulagée de constater que la brûlure était minime et qu’elle disparaitrait probablement sans laisser de traces.

(Jeune Louve, tu dois vaincre cette menace.)

L’intervention de Loup, inattendue, fit hausser un sourcil à Hatsu.

(Je ne pense pas qu’il s’en tiendra là… nous le recroiserons)

(Bien… Nous lui ferons découvrir la peur de la Chasse…)

Elle resta perplexe face au ton menaçant de Loup mais elle n’obtint pas plus de réponse de la part de l’esprit qui redevint muet après ce court échange. Elle fouilla la pièce du regard et posa ses yeux sur son arc. Elle eut un pincement au cœur en voyant l’objet. Il était cassé, brisé en deux au centre, probablement suite à sa chute et à la façon dont elle l’avait malmené. Elle prit l’objet qui l’avait accompagné pendant de nombreux mois et elle se sentit lasse. Qu’allait-elle faire sans son arme ?
Se sentant suffisamment en forme pour se déplacer, la jeune archère s’habilla et quitta la petite chambre pour rejoindre la salle où se trouvait le forgeron. Elle en avait assez de la situation actuelle et il était temps de mettre les choses au clair avec lui. Il était là, assis à une table, vidant une chope avec un empressement qu’elle ne lui connaissait pas. Elle s’installa et commanda un rafraichissement, attendant qu’Onoda daigne lever le nez de sa chope. Lorsqu’il le fit, les deux se regardèrent un instant avant que le forgeron ne soupire.

- J’imagine que vous avez quelque chose à me dire…

- En effet.

Un long silence s’ensuivit, pendant lequel Hatsu bu une gorgée de sa boisson qui venait d’arriver. C’est Onoda qui, excédé, brisa le silence.

- Et donc ? Qu’avez-vous à dire ?

- J’aimerais comprendre.

- Comprendre quoi ?

- Pourquoi vous me détestez à ce point, pourquoi vous mettez autant d’énergie à me mettre en rogne et pourquoi, par Rana, vous n’êtes pas resté caché comme je vous l’avais expressément demandé ?!

Le forgeron s’adossa nonchalamment au dossier de chaise, une expression narquoise sur le visage, mais Hatsu n’allait pas céder cette fois. Elle en avait assez. Il était temps de mettre les choses au clair.

- C’est simple Onoda, je suis fatiguée de me battre chaque seconde pour essayer de vous garder en vie quand vous faites aussi peu d’efforts de votre côté, que vous me méprisez et m’insultez sans raison. Alors je vous le demande, dites-moi pourquoi. Si vous ne voulez pas, et bien nous rentrerons à Oranan et vous pourrez vous trouver un autre protecteur.

Le forgeron ne put cacher son étonnement. Jamais il n’aurait cru que la jeune ynorienne puisse abandonner de cette manière, pas à cause de la difficulté ou des blessures non, mais à cause de son comportement à lui. S’il aurait dû se sentir heureux de cette nouvelle, il sentit au contraire un pincement au cœur face au regard acerbe et fatiguée de la jeune femme. Il l’avait poussé à bout apparemment et, alors que c’était son but originel, il n’en tirait plus aucune satisfaction à présent. Mais il n’allait pas l’avouer.

- Vous abandonnez alors ? C’est une qualité de savoir reconnaître lorsque les choses nous dépassent et…

Il ne finit jamais sa phrase car Hatsu posa brutalement sa chope sur la table, faisant légèrement gicler le liquide en dehors du contenant. Et s’il s’attendait à voir de la rage dans les yeux de la jeune femme, le forgeron y vit surtout une déception et une tristesse qu’il n’aurait pas imaginées et la voix qu’il pensait chargée de colère n’était qu’un murmure de lassitude.

- J’ai eu tort de croire qu’on aurait pu s’entendre… J’espère que vous êtes fier de vous.

Et elle le planta là, sortant de l’auberge malgré le danger potentiel et son manque de moyen de défense. Abasourdi, le forgeron fixa la porte qu’elle venait de claquer. La tenancière, qui débarrassait une table proche, n’avait rien perdu de l’échange et se permit de placer une remarque, s’attirant un regard noir du forgeron.

- Vous auriez pu faire preuve d’un peu plus de tact et d’honnêteté.

- Je ne vous ai pas demandé votre avis.

- Et je n’ai pas besoin de votre permission monsieur. Mais cette jeune femme s’est inquiétée pour vous et la façon dont vous la traitez est pour le moins cruelle et inappropriée. D’autant plus que vous étiez vous-même inquiet de son sort.

- Je n’ai pas besoin de vous pour le savoir.

Un sourire apparu sur le visage de la tenancière et elle le laissa là, seul avec sa chope qu’il vida d’un trait. Il remonta dans la chambre et s’installa avec une autre chope. Ses yeux se posèrent sur l’arc brisé de sa protectrice u’il avait choisi de ramener après l’avoir découvert sous le corps endolori de la jeune archère. Elle l’avait brisé dans sa chute et ça avait été la goutte de trop pour elle. Et pour la première fois depuis le début de ce voyage, une émotion autre que le mépris ou l’indifférence brillait dans ses prunelles alors qu’il quittait la pièce.

- Et merde…
Modifié en dernier par Hatsu Ôkami le sam. 16 mars 2019 17:56, modifié 1 fois.
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Re: L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Hatsu Ôkami » ven. 15 mars 2019 18:57

Hatsu n’alla pas très loin, elle marchait d’un pas lent, l’esprit ailleurs, finissant par s’adosser à un mur, assise à même le sol crasseux qu’elle ignora, de même que les regards que certains lui lançaient. Elle soupira de lassitude, fustigeant Onoda d’être ce qu’il était, de la faire se sentir aussi minable alors qu’elle faisait de son mieux. Elle s’en voulait d’y prêter attention, mais elle n’était pas douée pour ignorer les remarques blessantes quand elle venait de lui. Elle avait pourtant appris à rester de marbre face aux insultes déguisées et aux faux-semblants qui régnaient dans les réceptions. Et c’était là tout le problème, il n’y avait aucune insulte dans les paroles du forgeron, il disait simplement ce qu’il voulait et cela la heurtait bien plus que tout le reste.

Ah il était beau ce premier voyage, sa première aventure. Elle détestait Onoda pour lui faire regretter d’être partie. N’était-elle pas supposée l’aidé, pourquoi était-il aussi malveillant à son égard ? Elle n’arrivait pas à comprendre ce qu’il pouvait lui reprocher. Elle eut beau se creuser la tête pendant un long moment, tout ce qu’elle pouvait imaginer, c’est qu’il la détestait parce qu’elle était une femme qui allait à l’encontre des préjugés d’Onoda et qu’il ne le supportait pas.

Lorsque les premières gouttes glacées commencèrent à tomber après qu’elle soit restée un moment ainsi, elle soupira de nouveau, mais se fit violence pour rentrer. Ce fut trempée jusqu’aux os qu’elle entra dans l’auberge, maudissant le temps changeant en cette saison. Elle n’aperçut pas Onoda dans la pièce et en profita, s’installant près du foyer pour se réchauffer et se sécher comme elle le pouvait. La tenancière lui apporta un lait chaud, ajoutant que c’était un cadeau de la maison, recevant un sourire empli de gratitude de la part de l’archère qui appréciait la prévenance de la propriétaire. Elle préféra rester en bas pendant la majeure partie de la soirée, ne voulant pas affronter une fois de plus les mesquineries de son insupportable compagnon de voyage.

Compagnon qui finit par descendre à son tour pour le repas du soir. Il jeta un œil à la jeune archère qui l’ignora superbement. Il sourit et avança vers elle, se postant à sa table sans qu’elle ne fasse le moindre geste pour l’y inviter ou le chasser.

- Ôkami, il faudrait qu’on parle.

Elle tourna un regard empli d’une noirceur qui donna un frisson au forgeron. Mais il ne céda pas.

- En privé, si possible. Je ne tiens pas à ce que toute l’auberge en profite.

Il attendit. Hatsu le regarda froidement et se leva sèchement, prononçant un « d’accord » peu engageant mais qu’il prit pour ce qu’il était, son accord. Ils montèrent dans la chambre et la jeune femme s’installa sur une des chaises, croisant les bras dans une attitude qui n’invitait guère à l’échange. Et un silence pesant s’installa, Onoda se curant les doigts nonchalamment tandis qu’Hatsu commençait à s’énerver à force d’attendre.

- Bon, vous voulez quoi ?

- C’est désagréable pas vrai ? De ne pas savoir ce que l’autre à en tête.

- Si c’est pour vous payer ma tête une fois de plus, ce n’était pas la peine de faire tout ce cirque !

Elle se leva, mais Onoda soupira.

- C’est bon… rasseyez-vous…s’il vous plaît. Je souhaite vraiment discuter.

Hatsu jaugea le forgeron pendant un instant, essayant de comprendre ce qu’il avait en tête, puis se rassit, intriguée par la politesse inhabituelle dont il avait fait preuve.

- Je vous écoute.

Le forgeron croisa ses mains sur la table, l’air soudainement plus sérieux, tirant une moue curieuse à Hatsu qui se fit plus attentive. Elle ne fut pas déçue.

- Je ne vous ai jamais apprécié.

- Cela a le mérite d’être clair au moins…

- Je n’ai pas fini… Bien avant que vous ne débarquiez comme une furie dans la Maison Rouge, vous m’étiez déjà insupportable lors des quelques réceptions où nous nous sommes croisés. Quelque chose en vous m’était profondément antipathique et il faut bien l’avouer, l’est toujours. Je ne saurai vous dire quoi exactement, probablement l’ensemble de ce que vous êtes, mais c’est ainsi.

Hatsu resta bouche bée devant les paroles d’Onoda, mais finit par se ressaisir.

- Très bien donc vous me détestez pour ce que je suis… C’est très révélateur, puisque vous ne me connaissez pas.

- En effet… Je n’ai pas dit cela pour me trouver des excuses, je n’en ai pas besoin, ni pour que vous vous énerviez. Ce que je veux dire, en revanche, c’est que je suis prêt à faire un effort.

- Pourquoi ce soudain revirement ?

Le forgeron posa ses prunelles dans celle de la jeune archère. Il hésitait à lui dire la vraie raison, la plus simple, mais elle amènerait des questions auxquelles il ne voulait pas avoir à répondre. Il opta pour une semi-vérité qui arrangeait tout le monde.

- Vous avez prouvé que vous pouviez me sauver, donc je reconnais vos capacités, voilà tout. Et au vu des récents événements, il serait risqué que nous soyons séparés par une dispute stérile. Je ne sais pas si nous nous entendrons réellement un jour, mais je suis prêt à tenter la chose.

Hatsu hocha la tête, un peu perplexe face au soudain changement d’attitude du forgeron. Mais celui-ci la surprit de nouveau en se levant avant de partir chercher quelque chose qu’il lui tendit en revenant. La jeune ynorienne ne cacha pas sa surprise en prenant en main l’arc flambant neuf et les flèches qui allaient avec. Elle resta un moment interdite, remarquant qu’il était identique à celui qu’elle avait déjà, quoique dans un état bien meilleur.

- Merci…

Le forgeron eut un petit sourire dénué de toute moquerie en voyant l’air de la jeune femme, visiblement touchée par ce qu’il avait fait.

- Vous ne pouviez décemment pas me protéger sans une arme. Considérez ça comme un gage de bonne foi. Veuillez juste à ne pas me tirer dessus avec.

Elle soupira en levant les yeux au ciel. Il n’avait pas vraiment changé finalement et le sourire narquois qui prit de nouveau place sur son visage l’en assura définitivement. Mais pour une fois, elle le trouva presque rassurant ce sourire qu’elle détestait tant, car les prunelles amusées du forgeron montraient pour une fois qu’il n’était pas sérieux. Elle se leva pour ranger son nouvel arc avec les flèches acquises qui remplissaient son carquois de nouveau. Elle trouva cela réconfortant. Peut-être le reste du trajet se passerait-il mieux ?

Les deux compagnons se mirent ensuite d’accord sur la suite du trajet et sur la façon dont ils allaient procéder. La menace du mage entachait cependant la suite du voyage et aucun des deux ne trouva de parade immédiate à sa présence inquiétante. Hatsu voulait sa revanche mais appréhendait quelque peu une nouvelle rencontre avec le mage de foudre dont elle avait déjà goûté la magie. Elle se souvenait très bien de la façon dont il lui avait renvoyé sa flèche, elle devait trouver une parade à cela, sinon elle ne pourrait jamais le vaincre définitivement et elle n’était pas prête à encaisser de nouveaux éclairs en se mettant sciemment à découvert.
Ils patientèrent trois jours, attendant que les gardes leur apportent une bonne nouvelle, mais ils déchantèrent lorsque rien ne fut trouvé. Ils décidèrent alors de partir au plus vite pour ne pas laisser au mage le temps de s’organiser davantage. Profitant du couvert de l’obscurité, le duo quitta la ville après avoir salué la tenancière qui leur souhaita bonne chance. Onoda semblait soulagé de quitter la ville et la menace du mage, mais Hatsu était persuadée que le plus dur était encore à venir.
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Re: L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Hatsu Ôkami » jeu. 11 avr. 2019 14:11

Bouhen. Ville que Hatsu n’appréciait pas beaucoup. Le peu de souvenirs qu’elle avait de cette ville n’était pour la plupart pas agréables, si ce n’est sa visite au sanctuaire de Rana. Les gardes les laissèrent entré sans poser de question cette fois, regardant cependant étrangement le cheval attaché à l’arrière du chariot malgré son état irréprochable. Ignorant leurs regards interrogateurs, le duo pénétra dans la ville, se mettant immédiatement en route pour l’auberge où ils s’étaient arrêtés la première fois, ayant tous les deux appréciés les lieux. Hatsu fut cependant très claire cette fois.

- Vous ne batifolez pas, vous n’allez pas vadrouiller sans moi et surtout, par Rana, vous ne retournez pas dans cette horrible rue ! Sommes-nous bien d’accord ?

Le soupir exaspéré et le roulement des yeux du forgeron la fit plisser les yeux mais il promit chacun des points soulevés par la jeune femme qui, rassurée, se détendit légèrement. L’ambiance de la ville kendrâne la rendait nerveuse sans qu’elle sache trop pourquoi. Ils avaient beau être débarrassés du fulguromancien, elle préférait rester sur ses gardes. Omyre n’était pas le seul ennemi des voyageurs dans une ville où les rues semblaient abrités toutes sortes de malandrins et de mercenaires pas toujours très regardants sur la façon dont ils arrondissaient les fins de mois. Savoir que le forgeron n’allait pas sciemment aller au-devant du danger cette fois-ci la rasséréna quelque peu.

De nouveau, alors qu’ils cheminaient dans la ville, elle se surprit à examiner les rues qui se vidaient à cause de l’heure avancée de la journée. Le soleil commençait à atteindre l’horizon et l’obscurité recouvrait doucement d’un léger voile la voute céleste. Les ombres des bâtiments s’étiraient sur les rues que le duo traversait, ne faisant que rajouter une certaine tension chez la jeune archère qui surveillait chaque ruelle transversale, chaque intersection, craignant à chaque instant une potentielle attaque. Son manège n’échappa pas au forgeron qui se garda bien du moindre commentaire avant de finalement se tourner un instant vers la jeune femme.

- Pourquoi êtes-vous si tendue ?

- Je… je ne sais pas. Je n’aime pas l’atmosphère de cette ville. Et rien ne dit que le mage était le seul sur nos traces…

- Pourtant dans la forêt vous n’étiez pas si nerveuse.

La jeune femme se contenta d’un haussement d’épaule. La forêt l’apaisait, quelle que soit la situation. Ce n’était pas le cas avant l’apparition de Loup, mais l’esprit ancestral avait eu cet effet sur elle. Elle était bien plus à l’aise dans une forêt, même inconnue, que dans cette ville crasseuse, malodorante et probablement truffée de danger qu’elle ne pouvait pas percevoir ni même envisager. Lorsqu’enfin l’auberge fut en vue, elle relâcha imperceptiblement la tension qui s’accumulait à chaque minute passée dans les rues de la ville. Elle avait hâte de quitter l’endroit, pressant le forgeron pour qu’il les amène au plus vite à l’auberge où elle pourrait se détendre quelque peu.

La gérante les accueillit avec un large sourire, souhaitant chaleureusement la bienvenue au duo qui s’installa à une table après avoir commandé un repas et demandé une chambre pour la nuit. Maintenant que l’Olath était en leur possession, ils n’avaient pas de raison de traîner, aussi partiraient-ils immédiatement le lendemain après qu’Hatsu ait effectué quelques achats.

- Je commence à manquer de flèches et j’aimerais en savoir plus sur ces fameuses runes, il y en avait une deuxième dans la bourse du mage, je voudrais les faire examiner. Vous restez à l’auberge ou vous m’accompagnez ? Onoda ?

Le forgeron, visiblement occupé à reluquer une des serveuses, lui répondit d’un ton distrait, faisant rouler les yeux de la jeune archère qui n’insista pas davantage. Elle passa le repas dans un calme relatif, un petit groupe d’hommes parlant bruyamment non loin. Le forgeron ne fut guère bavard, occuper qu’il était à retenter sa chance avec les serveuses qui semblaient habituées à ce genre d’approche et ne se laissèrent une fois de plus pas abusé, se contentant de refuser toute invitation d’un sourire poli mais d’une voix ferme qui fit sourire la jeune ynorienne. Les femmes d’ici avaient du caractère à n’en pas douter. Le forgeron plongea dans un mutisme renfrogné après les refus qu’il subit, tirant un sourire amusé à Hatsu qui but une gorgée d’un breuvage local fruité très appréciable avant de tourner la tête lorsqu’un des hommes à la table voisine se fit un peu trop insistant envers l’une des serveuses, s’attirant une gifle bien sentie. Hatsu se tint sur ses gardes, mais l’homme se contenta de maugréer sous les remarques blessantes et moqueuses de ses comparses et elle finit par se détendre à nouveau. Devenait-elle si angoissée qu’elle voyait le mal partout ? Elle soupira en se plongeant dans sa boisson, attirant le regard du forgeron qui fronça les sourcils.

- Vous êtes trop tendue, calmez-vous pour l’amour de Rana !

Reposant bruyamment la chope sur la table, elle s’essuya la bouche et fixa le forgeron sans ciller avant de soupirer de nouveau.

- Je sais, mais c’est plus fort que moi. Depuis… à cause du mage je n’arrive pas à me sentir en sécurité. J’ai été négligente, il n’est pas question que cela se reproduise.

Le forgeron n’ajouta rien mais son regard laissait entrevoir que cette conversation n’était pas terminée, loin de là. Ils finirent chacun leur repas avant de monter dans la chambre qu’ils avaient réservée. Simple mais coquette et décorée de petit tableaux et de quelques fleurs, la chambre était propre, sentait la lavande et était un confort plus que bienvenue après ce séjour dans des souterrains puants. Hatsu s’effondra avec délice sur son lit, poussant un soupir d’aise en sentant les draps frais et le sommier moelleux.

- Vous portez trop de responsabilités sur vos frêles épaules Ôkami.

Elle se retourna, dévisageant le forgeron qui s’était installé sur le bord de son propre lit, les mains croisées dans une position qui montrait clairement qu’il souhaitait discuter.

- Mes épaules ne sont pas frêles !

Un rictus moqueur apparut sur le visage du forgeron et Hatsu se fustigea mentalement d’être aussi transparente.

- Vous savez très bien de quoi je parle. Vous vous sentez responsable d’une mort qui n’est en rien une injustice, vous pensez avoir failli parce que j’ai été blessé et vous vous sentez faible parce qu’à chaque affrontement vous êtes alitée pendant au moins une journée. N’ai-je pas raison ?

Hatsu ouvrit la bouche, mais aucun mot ne lui vint et elle la referma, baissant légèrement la tête comme pour affirmer les paroles du forgeron qui se massa le haut du crâne.
- Ecoutez. On trouve toujours plus fort que soit et vous avez agi au mieux. Par Rana, Ôkami, nous sommes tous les deux vivants, cessez donc de vous comporter comme si vous aviez failli à votre mission. Je déteste votre côté arrogant, mais par Rana je le préfère à votre mine défaitiste. Je n’ai rien dit jusqu’à présent, mais là, il faut vous ressaisir !

- J’ai failli échouer et…

- Mais ce n’est pas le cas ! Bon sang vous êtes vraiment une Ôkami ? Je pensais que vous étiez une famille fière et puissante, pas des pleurnicheurs qui s’apitoient sur des erreurs imaginaires.

Le ton d’Hatsu se fit menaçant. Elle n’aimait pas que l’on dise du mal de sa famille.

- Attention à ce que vous dites Onoda…

- Sinon quoi ? Vous vous êtes vue ? A vous lamenter pour des conneries ?! J’ai hâte de raconter à tous que les Ôkami sont faibles et de sacrés…

Il ne finit pas sa phrase, la dextre de l’archère lui empoignant le col, ses yeux lançant des éclairs de rage vers un forgeron qui soutint son regard.

- De quel droit parlez-vous ainsi ? J’ai fait de mon mieux ! J’ai fait le maximum et vous avez été blessé, vous auriez pu mourir. J’ai fait de mon mieux et je me suis quand même sentie impuissante. Et … et merde tuer un agent d’Omyre ne devrait pas me faire autant d’effet ! de quel droit… merde !

La jeune femme tomba à genoux sur le sol, secouée de légers sanglots face au forgeron qui soupira. Il lui laissa quelques instants avant de la prendre par les épaules et de lui relever la tête.

- Vous n’avez pas à vous sentir coupable, impuissante ou à vous dire que vous avez échoué. J’ai sans aucun doute participé à votre trouble depuis notre départ et j’en suis navré. Vous m’avez surpris Hatsu, vous êtes plus forte que vous ne le pensez ou que je ne le pensais… Vous êtes une insupportable gamine trop gâtée, mais vous avez aussi de bons côtés.

La dernière remarque tira un sourire à la jeune femme qui, consciente de s’être un peu trop laissée aller, se frotta les yeux et se calma, soufflant pour retrouver son calme.

- Et vous êtes un insupportable prétentieux que j’ai envie de frapper au moins dix fois par jour, mais vous avez aussi de bons côtés… parfois.

Le forgeron ricana tandis qu’elle se relevait, lançant un regard empli d’une émotion que le forgeron n’avait encore jamais vu, de la reconnaissance.

- Par contre, m’appeler Hatsu… plus jamais.

Le sourire du forgeron s’élargit et se fit plus narquois.

- Cela vous gêne ? Ou alors vous réservez cela pour votre fiancé… ou votre ami protecteur ?

- Ah non, vous n’allez pas vous y remettre !

Le forgeron s’esclaffa, rapidement rejoint par la jeune femme. Les deux compères évacuèrent ainsi la tension accumulée depuis leur arrivée dans les souterrains. Une fois les rires atténués, Hatsu reprit un air plus sérieux, se leva et s’inclina, surprenant le forgeron.

- Merci Onoda…

- Ne vous y faites pas trop non plus, je ne vais pas vous consoler au moindre bobo infligé à votre petit cœur fragile.

- Vous voulez toujours avoir le dernier mot…

- C’est ma plus grande qualité.

Hatsu soupira en levant les yeux au ciel face au sourire toujours plus narquois du forgeron. La conversation s’arrêta là, mais elle sentit à nouveau un poids l’alléger de ses épaules. C’est légèrement apaisé qu’elle se coucha, plongeant au cœur du pays des songes, ne remarquant pas le regard du forgeron posé sur elle. Un regard empli d’une tristesse nostalgique accompagné d’un murmure qu’il fut le seul à entendre.

- Ai-je enfin bien agi, Kimiko ?
Hatsu Ôkami, Chasseuse Ynorienne
Première Née des Ôkami
Réceptacle de l'esprit de Loup
Image
Armoiries des Ôkami:
l'Or pour la fortune, le Loup pour la noblesse d'âme et la flèche pour le passé guerrier.

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Yliria
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Re: L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Yliria » dim. 2 août 2020 14:54

<< Précédemment

Avec un certain soulagement, j'observai l’impressionnant armurier prendre les deux armes et les examiner. Il en saisit une et s’employa à l'essayer, testant son équilibre avant de faire un coup qui m'aurait touché si je n'avais pas eu le réflexe de me baisser. Ma main alla immédiatement sur la poignée de mon arme, mais il ne sembla même pas avoir remarqué qu'il m'avait presque frappé avec l'arme et essaya la suivante de la même manière. Prudente, je reculai avant qu'il ne me donne la somme totale que valaient les deux lames. Je hochai la tête, ne pouvant qu'accepter. Il s'éloigna un instant, jetant la lame la moins chère sur le côté, mais posant l'autre, coûtant deux fois plus, sur son établi, comme pour s'assurer de ne pas l’abîmer. Je l'observai compter avec difficulté les pièces qu'il sortit de sa bourse et lui vint en aide. Je m'étonnai de le voir bafouiller une excuse et m'écouter, je l'aurais imaginé plus méfiant, mais non, il me tendit l'argent que je rangeai avec un léger sourire. J'étais un peu déçue qu'il ne puisse pas réparer lui-même la tiare et la rangeai également avant de lever un sourcil, surprise par le soudain débit de parole qui émergea de sa bouche lorsqu'il parla de ses casques qu'il pourrait me vendre.

- Euh.. merci, mais j'ai vraiment tout ce qu'il me faut...

Cela ne sembla pas entamer son enthousiasme et ce fut avec peine que j'arrivai à lui faire comprendre que je n'étais vraiment pas intéressée, même si je reconnus que ses travaux étaient de qualité. Cela sembla lui suffire et je pus enfin me concentrer sur mes runes. Après un certain temps, j'en compris finalement la signification. « Fermer » pour une et « Dompter » pour l'autre. Cela me laissa perplexe, car je voyais mal dans quels contexte j'allais pouvoir m'en servir. Alyah remarqua intelligemment que la deuxième pouvait être utile avec les runes animaux que je possédais déjà, mais d'ici à ce que je tombe sur un loup ou un taureau... Je m'éloignai quelque peu du comptoir en remerciant le colosse qui retourna à ses affaires lorsque deux clients entrèrent. Les deux humains me jetèrent des regards suspicieux mais je fis de mon mieux pour ne pas réagir et baissai la tête pour ranger mes runes. Finalement, le milicien revint d'un pas pressé, salua le colosse et me fit signe de le rejoindre.

- J'ai discuté avec le prêtre. Tu as dit la vérité.

Il avait dit cela comme si c'était une surprise et je fronçai les sourcils. Je n'aimais pas vraiment qu'on remette en doute ma parole simplement parce que j'avais du sang shaakt dans les veines. Je soupirai de dépit et remis mon masque, bien décidée à quitter les lieux et espérai que cette journée soit productive, au moins jusqu'au coucher du soleil.

- Je ne saurai trop te conseiller de ne pas traîner en ville. Ta présence pourrait en énerver certains et il nous sera difficile d'intervenir...

J'avais parfaitement compris le message. Personne ne lèverait le petit doigt pour aider une shaakte si elle se faisait attaquer. Je remis mon sac et après un bref hochement de tête pour tout salut, sortis en vitesse de l'armurerie, peu désireuse de traîner ici trop longtemps. Ma présence serait désormais connue des autorités de la ville et cela me plaisait très peu. Kisp avait tellement le bras long que je n'aurais pas été étonnée d'apprendre qu'il avait des relations ici, à Bouhen. Moi qui pensais passer inaperçue, c'était salement raté.

(Tu retournes au bateau alors?)

(J'imagine...)

(Dis-toi qu'au moins tu as ton miel!)

Je soupirai mais hochai la tête avant de prendre la direction du port, guidée par Alyah qui voulait visiblement me remonter le moral. Je ne traînai pas trop cette fois, n'ayant nullement envie de croiser des miliciens un peu trop zélés.Les rues débordaient toujours de monde et traverser la foule devenait pas moment un peu plus difficile. Profitant d'une rue transversale, je m'éclipsai et continuai mon chemin avant de bifurquer et trouver finalement les quais. Avec un certain soulagement, je montai à bord du navire et déposai mes affaires avant de profiter du soleil depuis le pont, assise sur la rambarde sur le château arrière, face à la mer. Quelques marins s'affairaient, réparant les quelques dégâts, stigmates du combat contre Malfred.

Peu à peu, le soleil se mit à descendre et avec lui l'activité du port et de la ville s'atténua. Alyah me rappela la propositon de Makan et je hochai la tête, toujours un peu réticente malgré tout. La ville serait bientôt plongée dans la nuit, au moins j'y serai un peu moins repérable, mais les dangers rôdaient bien plus facilement la nuit. J'hésitai avant de finalement adhérer aux paroles d'Alyah. Je pouvais me défendre en cas de besoin, et je n'aurai que l'aller à faire, les autre pirates seraient là au retour. Toute équipée, mais en laissant mon sac en sécurité sur le bateau, je me dirigeai vers la fameuse auberge mentionnée par Makan. Je commençai honnêtement à avoir faim, ayant complètement oublié de manger avec ce qu'il s'était passé dans la journée. Alyah me guida et je sentis et entendis l'auberge avant même de la voir.

En entrant dans l'auberge, mes yeux parcoururent la grande salle, s'arrêtant sur les décorations en bois, les tableaux et les quelques convives déjà attablés. Je repérai assez vite Makan et ses hommes qui braillaient à l'autre bout. Ils me firent signe en me voyant entrer, attirant tous les regards sur eux, puis sur moi, ce dont je me serais bien passée. Se faire interpeler à grand renforts de "gamine, viens grailler avec nous" était particulièrement gênant. Je leur fis signe que j'allais commander et m'installai au comptoir. Cette auberge semblait bien entretenue et la bonne odeur qui émanait de la cuisine me mit l'eau à la bouche. je jetai un oeil sur les boissons et jetai mon dévolu sur de l'hydromel que je demandai à une des serveuses en retirant mon masque. L'alcool ce n'était pas mon fort. Le miel en revanche... Je restai dubitative face aux plats proposés et commençai à marmonner pour moi-même en essayant de choisir.

- Tartare de boeuf ? C'est quoi ça... Gigot à la menthe... Je devrais peut-être essayer ça...

- Mmh, si je peux me permettre... vous ne semblez pas du coin, alors je préfère vous mettre en garde : le gigot à la menthe, c'est le repas idéal si vous souhaiter passer une mauvaise nuit. Et je parle en connaissance de cause.

Toute à mes réflexions, je sursautai en entendant la voix qui me parvint soudainement. je tournai la tête pour rencontrer le regard bicolore d'un parfait inconnu qui me conseillait de prendre autre chose que le fameux gigot. Un humain, blond, portant des traits fin d'un visage à la peau mat, il avait des yeux en amande et une certaine stature. Je pouvais voir qu'il portait d’impressionnants bandages sous son manteau et une épée à la ceinture. Un guerrier, à n'en pas douter, et qui avait dû participer à un combat plutôt brutal il n'y avait pas si longtemps. Je le fixai un instant, partagée, puis hochai la tête en esquissant un sourire. Il n'avait pas l'air agressif après tout, il me recommandait juste de ne pas goûter à la nourriture locale.

- Euhm... merci. Vous... vous avez une recommandation ? Je ne suis effectivement pas d'ici, j'imagine que ça se voit, je n'y connais pas grand chose.

Je vis les yeux de l'humain me scruter lorsque je tournai la tête vers lui. Il haussa un sourcil, visiblement surpris et je me tendis légèrement, un peu inquiète. Ses yeux passèrent de mon armure à mon fourreau, mais il ne fit pas le moindre commentaire sur cela et continua de parler repas, m'informant sur la spécialité locale, le harney cuit, une volaille cuite dans l'hydromel, ou bien un poulet Praijo et du riz Oranais, apparemment une spécialité de chez lui. Le cuisinier passa justement, portant deux assiettes de ce fameux plat, répandant une délicieuse odeur de volaille et d'amande sucrée. Il passa commande pour trois personnes pendant que je réfléchissais, me mordant la lèvre. Les deux me donnaient envie, honnêtement.

(Je pourrais toujours commander le second demain...)

(Oui ou les deux d'un coup, histoire de remplumer ce corps maigrichon de crev...)

(Alyah, un mot de plus et je te jure que ça va mal finir.)

Elle ricana, mais n'ajouta rien. je me retins de lever les yeux au ciel, ne voulant pas paraître impolie face à l'inconnu qui allait penser que cela lui était destiné. je levai la main pour interpeller la cuisinière qui me lança un drôle d'air. La serveuse qui m'avait apporté mon verre n'avait rien relevé, mais elle n'avait pas été particulièrement aimable, aussi je ne m'attendais pas vraiment à un meilleur traitement.

- Je vous prendrai un coq Praijo avec du riz oranais, s'il vous plaît.


Elle me fixa une seconde avant de hocher la tête. Je soupirai légèrement. Au moins elle me servait. Je me tournai à nouveau vers l'humain et lui sourit, reconnaissante.

- Merci pour le conseil ! Je reste quelques jours, j'aurai le temps d'essayer leur spécialité. Je vous souhaite bon appétit m'sieur et bonne soirée.

Je sautai du tabouret et me dirigeai avec mon verre vers Makan et ses hommes qui m'accueillirent bruyamment, prétextant mon arrivée pour commander une tournée d'alcool fort que je refusais malgré leur insistance. Hydromel, pas plus fort, j'avais suffisamment donné avec leur alcool de malheur.

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Yliria
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Re: L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Yliria » dim. 2 août 2020 14:59

<< Précédemment

- Il te voulait quoi le blondin ?

Je levai le nez de mon verre pour croiser le regard de Georg qui fit un signe de menton envers l'humain qui m'avait conseillé le plat. Je terminai ma gorgée avant de hausser les épaules, répondant simplement la vérité. Cela le fit hausser un sourcil, mais la discussion sembla close puisqu'il partit sur une grande conversation avec son capitaine concernant la suite de leurs affaires. Une route maritime prometteuse, apparemment, mais je n'écoutai pas davantage car mon plat arriva et je salivai rien qu'à l'odeur. Je remerciai la serveuse qui sembla surprise et m'offrit un sourire avant de repartir en vitesse face aux regards des pirates qui lorgnaient sur les courbes généreuses de la jeune femme. Je levai les yeux au ciel et commençai à manger. La nourriture était tout bonnement délicieuse et je lâchai un soupir de contentement. Rien que pour ça, ça valait le coup de venir à l'auberge.

Mon regard dériva sur la salle, tombant finalement sur le jeune humain qui m'avait conseillé. Il n'était pas seule. Une jeune femme aux cheveux blonds et à l'air espiègle était à ses côtés, ainsi qu'un humain plus vieux. Un trio assez hétéroclite, je me demandai s'ils étaient une famille en voyage. Ils semblaient en grande conversation et je me surpris à détailler encore un peu l'humain entre deux bouchées, sans trop savoir pourquoi.

(Il te plaît?)

Je me sentis rougir et détournai le regard en entendant la voix d'Alyah ainsi que son ricanement face à sa réaction. Cela n'échappa pas à Georg qui était à côté de moi et qui jeta lui aussi un œil au blond, un sourire aux lèvres.

- Il est pas mal pour un Ynorien... On peut t'offrir une chambre si tu v..

- Non ! Arrête de dire n'importe quoi ! Comme si c'était mon genre...

Il répondit d'un large sourire, mais s'abstint heureusement de tout commentaire malgré les regards interrogateurs des autres pirates qui avaient tourné la tête lorsque j'avais haussé le ton. Je ne pus m'empêcher de jeter de nouveau un œil au jeune homme. C'est vrai qu'il était agréable à regarder... Je grognai intérieurement contre Alyah qui ricana de plus belle avant de reprendre enfin son sérieux, m'informant sur le trio qui était visiblement peu ordinaire.

(Si ça peut t'aider, le plus âgé est un fulguromancien, visiblement très puissant, le blond aussi, bien que possédant moins de fluide, et la femme... une pyromancienne. Une collègue à toi ! Et...)

(Oui ? ça fait déjà beaucoup d'informations, mais continue.)

(Je sens une Faëra...)

(Une Faëra ? Vraiment ? Comme avec Tanaëth ?)

(Oui.. mais je n'essaie pas d'entrer en contact.)

(Tu sembles inquiète... et un peu énervée.)

(Tu te fais des idées. Alors ce coq ?)

Je fis la moue, pas dupe pour un yus, mais je n'insistai pas, profitant plutôt pleinement du repas en ne laissant absolument rien dans l'assiette malgré la portion conséquente, lâchant un soupir de contentement que Georg qualifia de « bien peu féminin », ne récoltant qu'un geste obscène de ma part, amusant les autres. Je me levai et ramenai le plat vide sur le comptoir, remerciant la cuisinière avant de déposer l'argent pour le tout, plus un autre verre d'hydromel que la serveuse me servit en souriant cette fois. Je passai non loin de l'humain blond et m'arrêtai une seconde, attirant trois paires d'yeux. Je leur offris un sourire contrit pour les avoir dérangé.

- Euh... je voulais juste vous remercier pour le conseil sur le coq, c'était vraiment bon.

Avec un large sourire, il répondit, assurant être ravi d'aider quelqu'un à ne pas succomber face à l'aberration qu'était le fameux gigot, me tirant un léger rire. Cela sembla agacer ses compagnons, probablement des locaux et la femme échappa son prénom en lui frappant l'épaule. Cherock. Un Ynorien apparemment. Je n'y connaissais rien, mais je me promis de me renseigner, c'était probablement une ethnie du coin. La jeune femme lui tapa l'épaule, le faisant s'esclaffer et il me souhaita finalement la bienvenue en Nirtim. Dommage que ma présence fusse pour de mauvaises raisons.

- Merci, je v...

- Oh Yliria, arrête un peu de draguer ce blondin, Akram va être jaloux. Vient goûter cette bouteille, plutôt.

Je roulai des yeux, un peu exaspérée par cette histoire qu'ils ne pouvaient s'empêcher de ressortir. Comme si j'avais voulu qu'il s'intéresse à moi, ce satané Sang-Pourpre. Une légère gêne fit chauffer mes joues et je leur lançai un regard noir, les faisant exploser de rire, particulièrement Georg qui était à l'origine de ma gêne. Je toussotai pour me reprendre, essayant de ne pas paraître trop gênée.

- Hrm... Désolée, ils ont un peu trop tendance à croire que je suis une des leurs. Bref, merci en tout cas et peut-être à une prochaine fois. Bonne soirée à vous.

Sans rien ajouter, je leur offris un dernier sourire et me hâtai vers la table où je foudroyai Georg du regard, refusant catégoriquement de toucher à la bouteille de rhum qu'il avait en main alors que les autres, qui avaient déjà bien bu, se resservaient en entamant une chanson. C'était une belle soirée, et j'étais bien contente qu'Akram n'ait pas souhaiter me gâcher la vie cette fois. Je me tournai pourtant vers Georg, les sourcils froncés.

- Et pour ta gouverne, je ne draguais pas, je le remerciais !

- Ouais, ouais, si tu veux.

- Mais c'est vrai !

- A ton âge c'est normal tu sais... éveiller son esprit, penser à sa petite fleur et aux hommes...

- Non mais.... mais ça suffit !

- Si tu as besoin de conseils pour séduire un homme, je peux...

- Georg ! Ça ne m'intéresse pas. Et tu es saoul ! Arrête de parler !

- Une jolie fille comme toi ! Ce serait dommage de ne pas t'amuser de temps à autre !

Je ne répondis pas, préférant nettement noyer ma gêne dans mon hydromel que de lui répondre. Alyah se payait aussi ma tête et je n'arrivais pas à la calmer. A me calmer non plus d'ailleurs. J'avais encore son regard dans ma tête. J'avais envie de passer ma main dans ses cheveux... je me secouai pour me sortir ses idées de la tête. Tout ça à cause de ces deux-là qui se moquaient de moi ! Je me concentrai sur ma boisson J'attendis simplement que Makan décrète qu'il était temps de rentrer au vaisseau pour ceux qui le voulait. Certains parlèrent de la rue de l'étalon et en sortant je les vis afficher des airs enthousiastes. Je posai la question à Makan qui me fixa une seconde avant de sourire largement.

- Une rue connue et reconnue pour ses maisons de passes et ses demoiselle peu farouches. Intéressée ?

Évidemment... Je me détournai sans remords, reprenant bien vite le chemin du navire. Je ne comprenais pas cet intérêt qu'avaient les gens pour ce genre de choses.

(Tu changeras d'avis...)

(C'est pas demain la veille.)

(Nous verrons...)

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Akihito
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Re: L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Akihito » sam. 15 août 2020 18:40

Dans le chapitre précédent...
Interarc : Apprendre des meilleurs.

Chapitre XI.2 : Arrivée à bon port.

L’auberge de la Vieille Paulette tenait son nom de la propriétaire et cuisinière à ses heures perdues de l’établissement. De loin considérée comme la plus chaleureuse et la plus douillette des auberges de Bouhen, c’était donc la plus connue et celle dans laquelle Frans avait ses habitudes. Il avait donc tout naturellement pris des chambres pour eux trois, en prenant bien soin d’en prendre deux dont une pour les deux tourtereaux. Akihito prit le temps de s’assurer que toutes ses affaires étaient bien là, puis sentant son estomac grondé, descendit dans la salle commune de l'auberge pour rendre un festin de fin de voyage des plus mérité. Quelques minutes après qu’ils eurent pris place à une table avec quelque breuvage, un groupe particulièrement bruyant d'hommes fit irruption. Des types grands, solides, et a la peau tannée par le soleil. Des marins, à n'en point douter. Akihito fronça les sourcils en voyant néanmoins les quelques sabres qui pendaient aux ceintures de certains, et Frans lui confirma : plus que des marins, c'étaient des pirates. Mais à la vue de l'ambiance bonne enfant et simplement festive du groupe, le vieux mage lui expliqua qu'à l'exception des sangs pourpres, tous les pirates n'étaient pas toutes les ordures que l'on lui avait apprises.

« La preuve, j'ai été pirate moi aussi.

- Vous ? Frans ?

- Eh oui. Mais ça peut attendre le repas, va nous prendre à manger s'il te plaît et je me ferai un plaisir de te raconter ça en mangeant le succulent harney cuit de la paulette. »

Akihito obtempéra et au moment de se lever, aperçu une silhouette assez petite et élancée pénétrer dans l’auberge. Il ne fut pas le seul à l'apercevoir car instantanément, des vivats de la part des pirates éclatèrent et appelèrent la nouvelle venue, dont la curieuse cape mauve cachait les traits. La "gamine" leur indiqua qu'elle allait commander, puis se dirigea vers le bar. Quand Akihito approcha du comptoir pour commander lui aussi, il ne put qu'entendre la voix de la jeune fille. Une voix claire, étonnamment douce bien qu'encore teintée de la hauteur de voix de la jeunesse.

« Tartare de boeuf ? C'est quoi ça... Gigot à la menthe... Je devrais essayer ça… »

(Oh Valyus tout-puissant. Une étrangère à la cuisine Kendrane.)

Akihito, pendant son voyage, avait fait les frais de goûter à ce plat qui tenait plus du cataclysme culinaire que de la nourriture. Il n'hésita pas plus longtemps et s'appuya sur le comptoir à côté d'elle.

« Mmh, si je peux me permettre... Vous ne semblez pas du coin, alors je préfère vous mettre en garde : le gigot à la menthe, c'est le repas idéal si vous souhaitez passer une mauvaise nuit. Et je parle en connaissance de cause. »

La jeune fille sursauta et tourna son regard vers Akihito, qui haussa un sourcil et retint un mouvement de recul en découvrant son interlocutrice. Une Shaakte ! Rien de moins !

(Mmmh... pas vraiment Akihito. Sa peau est bien trop claire pour qu'elle soit une Shaakte de sang pur. Et je ne crois pas qu'ils puissent avoir des yeux comme les siens...)

Les yeux en question étaient d'un bleu profond, insondable, qui lui rappelait une couleur qu'il avait déjà vu sans parvenir à mettre le doigt dessus. Des traits fins et juvéniles, une crinière blanche cascadant sur une armure rougeoyante qui fit hausser le sourcil d’Akihito encore plus haut : une armure en Xhiul, rien que ça. Et même s'il le voyait mal et n'en était pas sûr, il était prêt à parier que son fourreau de lame à sa taille était en Olath. La jeune fille n'était décidément pas ordinaire, mais il se contenta de répondre à sa sollicitation de conseil : qui quelle soit, son regard n’exprimait rien d’autre que de la curiosité et il ne décelait pas la moindre animosité chez elle. Si le visage de la Shaakte qui l’avait attaquée se superposa au sien un instant et que l’envie de poser la main sur la garde de la Kizoku bouillonna en lui, il se fit violence pour ne rien laisser transparaître.

(On juge une personne qu’à ses actes... On juge une personne qu’à ses actes...)

« Cette auberge est connue pour le harney cuit, une volaille cuite dans de l'hydromel. Et à voir votre verre, ça semble être un bon choix. Mais si ça ne tenais qu'à moi... »

Le cuisinier passa avec deux assiettes fumantes à ce moment-là, répandant une succulente odeur d'amande sucrée.

« ... Je vous recommanderai les yeux fermés ce plat. Coq au Praijo et riz Oranais, une spécialité de chez moi. Et le cuisinier à l'air de savoir ce qu'il fait avec... »

Akihito hêla alors le cuisinier au retour et passa sa commande : deux harneys cuits pour ses compagnons et un coq au Praijo.

(Pour une fois qu'on a du choix de plat dans une auberge, je vais pas me priver de choisir.)

« Merci pour le conseil ! Je reste quelques jours, j'aurai le temps d'essayer leur spécialité. Je vous souhaite bon appétit m'sieur et bonne soirée. »

Le remerciement candide de la semi-Shaakte le surprit, agréablement. Il avait bien fait de ne pas la juger trop vite, il n’aurait pas vu son visage qu’il l’aurait pris pour n’importe quelle jeune fille d’une quinzaine d’années. Elle était partie rejoindre le groupe de pirates d’un pas vif, après avoir suivi son conseil et commandé un coq au Praijo.

« M'sieur... Ah ouais, sacré coup de vieux.

- Dites voir... Vous la connaissez la noiraude ? »

Le cuisinier était revenu visiblement, et s'adressait à Akihito en jetant des coups d'oeil à la jeune fille qui venait de rejoindre la table des pirates brailleurs.

« Pas le moins du monde. Pourquoi ?

- J’aime pas trop que ce genre de truc traîne chez moi...

- Je sais que les Shaakts n'ont pas très bonne presse ici, mais regardez la : c'est encore une jeune fille, vous croyez qu'elle est forcément comme tous ses congénères ? Je viens d’en affronter une de Shaakte agressive, et cette petite n’a rien avoir avec la garce qui a manqué de m’étriper.

- Tout ce que je vois, c'est que c'est une Shaakte qui est avec des pirates. À la moindre esclandre, je la fous dehors. »

Akihito soupira, mais ne dit rien de plus. S'il ne partageait pas son jugement, il ne pouvait qu'admettre que les apparences ne jouaient pas en la faveur de la jeune fille. En ça, il ne pouvait pas en vouloir à l’homme, pour qui la haine des Shaaktes devait être naturelle. Il se contenta donc de récupérer les écuelles de bois et rejoignit ses camarades, prêt à écouter les aventures de Frans sur les mers. Apparemment, même chez les pirates, on pouvait trouver une certaine forme d'honneur et d'humanité dans le sens où ils ne pillaient pas tous les navires ni ne tuaient tout leur équipage. Le vol restait quelque chose qui dérangeait Akihito, mais il garda cela pour lui : dans la bouche du vieux mage, ce jeu du chat et de la souris entre les pirates et les marchands était presque devenu la norme. Un concept qui dépassait le jeune homme.

(Dis, tu veux savoir quelque chose d'amusant ?)

(Mmmh ? Quoi donc ?)

(J'observe la petite Shaakte depuis un moment pendant que tu manges, et elle te jetait de temps en temps des coups d'oeil, alors je me suis un peu intéressé à elle. Et devine quoi ? Elle a une Faëra !)

(Mais non ? Comme Tanaëth ?)

(Exacte. Et c'est une mage aussi, à peu près de ton niveau. Mais il y a trop de fluides en grande quantité pour que j'arrive à les identifier correctement.)

Akihito sourit en l'écoutant dresser son portrait. Et alors qu'il finissait son assiette...

« Euh... je voulais juste vous remercier pour le conseil sur le coq, c'était vraiment bon. »

La semi-shaakte passa à proximité de sa table et le remercia, attirant les regards curieux et surpris de Frans et Anthelia. Aucun d'eux ne montra d'hostilité apparente, malgré le fait qu'ils avaient affronté une Shaakte qui avait voulu les tuer. Akihito se contenta d'un grand sourire, la boisson aidant à le détendre.

« Y a pas de quoi. C'est toujours un plaisir de sauver quelqu'un d'une aberration culinaire kendrane comme le gigot à la menthe. »

A sa remarque, Frans haussa un sourcil dans sa direction alors que Anthelia levait les yeux au plafond avec un air désespéré peint sur le visage. Son poing fermé vint gentiment cogner l'épaule de son amant.

« L'ouvre pas trop Aki, vous autres Ynoriens avez aussi des plats infâmes.

- Particuliers, pas infâmes. Nous, on n'essaye pas de tuer les gens avec une sauce aussi... »

Il éclata de rire en voyant la femme serrer son poing une nouvelle fois avec la ferme attention de taper plus fort sur son épaule cette fois, malgré son sourire en coin. Il s'adressa de nouveau à la jeune fille.

« Dans tous les cas, bienvenue en Nirtim. »

L'un des compagnon héla la jeune fille, qui rougit sous la remarque qu'on lui fit en la voyant lui parler. Akihito s'amusa de remarquer que sans l'avoir demandé à l’autre, ils connaissaient chacun le nom de l'autre par le truchement de leurs compagnons. Son petit rire fut remplacé par un rougissement de ses joues, ce qui était assez amusant à voir sur une peau aussi mate.

Elle s'excusa, leur dit au revoir avant de repartir vers ses compagnons qui n'étaient apparemment pas vraiment les siens. Akihito se contenta de sourire à cette scène.

(J'l'aime bien elle. Elle a l'air sympathique.)

(Tu sais que tu vas sûrement jamais la recroiser ?)

(Et alors ? Ça m'empêche pas d'apprécier une rencontre pour ce qu'elle est.)

« Tombeur, commenta Frans en sirotant son vin.

- Mais bien sûr Frans. Pour l'instant il n'y en a qu'une qui compte, et elle essaye de me démolir l'épaule avec ses petites mimines.

- Tu te la joues un peu trop, monsieur le Héros.

- Et toi, tu prends un peu trop la mouche pour de la nourriture kendrane, madame la tatoueuse de Wiehl. »

Les deux jeunes gens continuèrent de se chamailler sous le regard du vieux mage, qui finit par demander le silence avant d’entamer la partie la plus importante de la soirée : la conclusion de cette livraison.


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Re: L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Akihito » mar. 18 août 2020 17:27

Dans le chapitre précédent...
Interarc : Apprendre des meilleurs.

Chapitre XII : Le fruit d’un dur labeur.



« Bien. Tout d’abord, merci à vous deux de m’avoir accompagné. Sans vous, j’aurais été dans une sacrée panade. Mais avant qu’on ne parle de tout ça, je voudrais que tu nous racontes ce qui s’est passé avec la Shaakte. »

Le concerné dépeignit brièvement le combat, les différents pouvoirs de la fugluro-psycho-nécromancienne qui l’avait mis en grande difficulté. Lorsqu’il arriva au coup de grâce porté grâce à Conductivité, Frans hocha la tête d’un air satisfait. Il poussa d’ailleurs un bijou devant lui, dans un style que Akihito reconnu bien : il ressemblait beaucoup à ceux qu’il avait dû porter durant l’incident Ökami durant lequel il s’était fait passer pour un membre du Tonnerre d’Omyre. Il ne fut pas surpris donc quand Frans lui raconta qu’ils l’avaient trouvé sur le corps de la Shaakte décédée et que comme c’était lui qui l’avait affronté, c’était à lui de décider ce qu’il comptait en faire. En attendant de se décider il e le rangea et questionna son professeur quant à la façon dont il lui avait enseigné la technique de Conductivité : pourquoi ne l’avait-il pas fait avant ? Comment le faisait-il ? Le vieux mage déclara que c’était une de ses capacités qui lui était propre : il avait enseigné à de nombreux disciples et avait fini par développer cette méthode d’apprentissage qu’il était le seul à maîtriser à sa connaissance. Et s’il ne l’avait pas utilisé avant…

« C’est pour que tu apprennes par toi-même. Cette méthode de transmission est bien trop facile : la facilité mène à la paresse et à la stagnation. Si je l’ai utilisé là, c’est avant tout parce que la situation l’exigeait. D’ailleurs, pour ça et la potion que j’ai dû te donner… Je pense que trois pièces d’argent, ce n’est pas cher payé. »

Akihito donna sans broncher lesdites pièces, qui valaient bien le sauvetage que l’enseignement de Frans avait permis.

« Pendant que tu te remettais de tes blessures Akihito, j’ai livré le chargement de Keraunos au Prélat de Bouhen. Vous ne le savez peut-être pas, mais il n’existe pas encore de temple de Valyus ici… Ce qui est un comble, quand on sait qu’un des Prélats y est. Enfin il y a bien un petit temple, mais rien qui ne soit à la hauteur du poste de la religion. Ce Keraunos va servir à transformer la bâtisse en quelque chose de respectable et digne d’un Prélat. Il ne sera pas à la hauteur de celui de la capitale, mais il aura au moins la stature nécessaire pour l’appeler réellement un temple.

- Je comprends mieux pourquoi on devait transporter autant de Keraunos.

- Les artisans de Bouhen vont avoir du pain sur la planche, ajouta Anthelia en finissant son verre.

- Le Prélat est trop occupé pour vous recevoir dignement : le chantier a déjà pris trop de retard, alors il m’a chargé de vous remercier en son nom. »

Frans souleva le rabat de sa besace et posa tout d’abord deux insignes qu’il fit glisser sur la table : ils représentaient un éclair traversant une lettre. En argent, les seules touches de couleurs étaient la dorure courant autour de l’éclair et le lapis-lazuli qui représentait le cachet de la lettre.

« Ce sont des badges des Messagers de la Foudre, qui ne sont offert qu’à ceux ayant faits leurs preuves. Comme vous. Il ne vous donne pas de droits particuliers, mais vous aidera à être bien accueillis dans les temples de Valyus.

- Seulement les temples kendrans non ? Vu que tous les peuples n’ont pas la même vision que nous. Comme Nizzre’ et les Shaakts, par exemple…

- Il arrive que nous soyons aussi envoyés pour transmettre des messages à d’autres temples vénérant d’autres versions de Valyus, comme c’est le cas pour les Thorkins. Alors évidemment les plus petits temples ne sauront pas identifier ce badge, mais les prêtres des principaux sauront reconnaître sa valeur.

- C’est un honneur que le prélat nous fait. J’aurais aimé le remercier, mais s’il est si débordé que ça…

- Je l’ai déjà remercié en ton nom Akihito, je me doutais que tu dirais quelque chose dans le genre, rassura le vieil homme avec un sourire amusé. Passons désormais à la suite des remerciements. »

Avec un effort visible, il posa sur la table un autre sac que l’enchanteur n’avait pas vu jusque-là, mais qui semblait peser son poids. Alors qu’il approchait la main, il sentit une tension émaner du sac. Une tension qui faisait bouger les pièces posées sur la table et se dresser les poils sur ses avants bras. Une tension avec laquelle il avait voyagé et qui lui était familière.

« Ce n’est quand même pas... ?

- Et si. Du Keraunos. Quand il a entendu toutes les embûches que nous avons dû affronter, le Prélat a décidé que vous méritiez bien un peu de ce pourquoi vous avez risqué votre vie. J’ignore ce que vous pourrez bien faire avec ce qu’il y a la dedans, mais prenez en soin. Les Thorkins gardent ce métal jalousement, il est suffisamment difficile comme ça à obtenir.

- Je… Je ne sais pas quoi dire. »

Akihito était content, très content du cadeau qu’on lui faisait. Frans n’avait pas besoin de lui parler de la rareté du Keraunos pour qu’il la connaisse : dans les rares livres traitant des métaux élémentaires qu’il avait pu lire, le métal de la foudre revenait toujours comme le plus rare de tous. Pas forcément le plus difficile car des métaux comme celui de feu qui se récoltait uniquement dans des volcans actifs se disputaient cette place-là, mais indéniablement le plus limité en quantité.

C’est Anthelia qui dut le tirer de ses réflexions quand vint l’heure de savoir ce que le trio allait bien pouvoir faire, maintenant que leur mission était finie. Akihito souhaitait rester avec Frans pour continuer son apprentissage, mais il avait également envie de rentrer chez lui. Les nouvelles de l’attaque d’Omyre sur le nord de l’Ynorie n’étaient pas pour le rassurer, et il y avait bien longtemps qu’il n’avait pas vu sa famille. Manifestement, Frans se sentait d’humeur à répondre aux deux souhaits de son apprenti en le suivant à Oranan, déclarant que cela faisait un certain temps qu’il n’avait pas parcouru les rues de l’écrin d’Ynorie.

« Où tu vas, je vais, » assura nonchalamment Anthelia, ce qui lui valut un baiser sur la joue de la part de son amant. Frans assura qu’il allait s’occuper de trouver le bateau qui les ramènerait chez eux, puis les trois compagnons, encore fatigués de leur voyage, montèrent comme un seul homme se coucher. Dans la chambre où les échos de la fête qui se poursuivait en bas parvenaient en un bruit étouffé, Akihito poussa un soupir de soulagement. Il allait enfin pouvoir goûter au repos, le vrai, après plusieurs semaines sur les routes qui n’avaient rien eu de reposant. Le léger ronronnement de satisfaction d’une Anthelia se blottissant contre lui le fit sourire tendrement et il attira son visage au sien dans le but de se nourrir un instant de ses lèvres. Ce qu’elle accepta volontiers avant de poser la tête contre son torse, ses doigts traçant des arabesques paresseuses sur ses bras.

« Je t’ai déjà dit que j’adorais la façon dont ton corps avait d’être tout chaud en permanence ?

- Au moins une bonne centaine de fois, oui, répondit l’Ynorien en riant un instant.

- J’aurais jamais pensé que ce voyage se passe comme ça… Et que je revienne à Oranan dans tes bras.

- C’est pas quelque chose que tu espérais plutôt ?

- Mmmh… C’est vrai aussi. Qu’est-ce qu’on va faire une fois rentré ?

- J’ai quelques personnes à te présenter à mon tour… Puis on va prendre un peu notre temps avant de voir ce qu’on fait ?

- Ooooh, déjà rencontrer beau papa et belle maman ? Tu ne perds pas de temps toi, le taquina Anthelia.

- Parle pour toi, tu m’as présenté aux tiens avant même de m’avoir embrassé. »

Leur discussion continua un temps ainsi, parlant d’avenir, de projets fantastiques ou d’autres envies. Anthelia estimait que dans un mois tout au plus, il aurait le niveau d’un tatoueur professionnel. Une durée qu’elle donnait très sérieusement en prenant en compte le fait qu’il avait un talent au-delà de tout bon sens et que si elle aurait donnée trois mois à une autre personne, Akihito pouvait faire autant de progrès en trois fois moins de temps. Ce qui ne manqua pas de gonfler son égo, évidemment. Et alors qu’il taquinait la belle blonde dans ses bras, il la sentit lentement se placer au-dessus de lui. Malgré la pénombre, il ne put rater l’éclat de son sourire malicieux et la lueur qui pointait dans son regard de jade.

« Theli… C’est pas prudent, mes blessures…

- Vont très bien aller. Il te reste encore beaucoup de choses à découvrir mon bel Ynorien, notamment ce qu’est capable de faire une femme amoureuse tout en ménageant son amant… »

Et c’est avec un sourire encore plus malicieux que la tête d’Anthelia disparue sous les draps, marquant le début d’une nuit que Akihito n’était pas près d’oublier.



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Xël
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Re: L'Auberge de la Vieille Paulette

Message par Xël » dim. 3 juil. 2022 20:38

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Mes sentiments sont partagés: colère, peine, doute. Mon avis sur Christo n’a jamais été si flou, lui qui s’était montré si emphatique, si gentil lors de mon retour. Voilà qu’il s’était encore conduit comme un fumier. Je n’ai aucune envie de retourner à l’académie et je pense sérieusement avancer mon départ à aujourd’hui. Après tout je suis en permission et je n’ai pas besoin de beaucoup d’affaires; quelques provisions et de quoi camper. Si je manque de quelque chose je pourrais user de mes pouvoirs pour le chercher, un sacré avantage. Je me dirige donc vers l’auberge où j’ai laissé Amélie la veille pour la prévenir.

Je pénètre dans le bâtiment peu fréquenté si tôt dans la journée. Je découvre les murs décorés de tableaux et les meubles d’acajou. Deux jeunes femmes me souhaitent la bienvenue d’un sourire tout en servant les quelques clients présents. Une dame plus âgé et plus dodue s’attèle déjà dans les cuisines qu’on peut apercevoir. La salle est calme, bercée par les accords doux d’Amélie sur son instrument dans un coin de la salle.

« Je chante les amants d’Ynorie même si,
L’histoire se termine mal.
Peut-être que c’est mieux ainsi même si,
L’amour a blessé leurs âmes.

Mage de foudre volontaire et brave,
Amoureux et trop protecteur,
Capable de vaincre toutes les entraves,
Mais à qui offrir son coeur ?

Bretteuse de talent aux couleurs de la nuit,
On lui souhaita du tort,
Plus aucun mot ne fut dit,
Quand elle devint la terreur des morts.

Ce sont les amants d’Ynorie et si,
Leur amour n’est pas interdit,
Ce sont eux qui le jugent ainsi et puis,
Peut être se pensent-ils maudits,
Les amants d’Ynorie … »

Une fausse note clôture son refrain et sa voix douce devient un râle gras qui déchire l’ambiance légère de sa chanson d’amour.

« Sa race la chienne ! »

Elle enchaîne quelques accords en chantant d’un air graveleux.

« Il lui montra son gros marteau !
Elle s’exclama ah que c’est beau !
En un instant ils furent tout nus !
Et il pu lui mettre dans le … »



Un raclement de gorge sévère de la vieille Paulette l’interromps. Elle défi un instant le regard sévère de la tenancière avant de saisir une plume pour griffonner sur un morceau de papier. Dans la salle les deux serveuses poursuivent au plus vite leur travail en se retenant de rire, un client plus âgé relève le papier qu’il tient devant ses yeux en grommelant quelques mots tandis que les quelques autres tables se retourne et font mine de n’avoir rien entendu.

Je m’approche d’elle pour voir qu’elle est en plein travail. Sur sa table est étalé prises de notes que je suis incapable de lire et brouillons malmenés de paroles, une plume, un encrier, un gobelet de lait de chèvre et une assiette de petit déjeuner froid et à peine entamé. Elle me remarque et son humeur se fait à nouveau plus joyeuse.

« Ah ! Bonjour monsieur Almaran. »

« Tu peux m’appeler Xël et tu peux me tutoyer aussi on va passer quelques temps ensemble après tout. »

« Oh non j’oserai jamais. »

Dit-elle en rougissant avant de m’avouer qu’elle ne pensait pas me voir avant demain. Je lui explique alors que j’aimerais avancer le voyage sans lui évoquer les vrais raisons. Elle n’y voit aucun inconvénient et me demande simplement un peu de temps pour rassembler ses affaires.

« Prends ton temps j’ai encore une course à faire. »

Mais en deux trois mouvements elle referme son encrier, range sa plume et roule ses notes pour les mettre dans son sac avant de ramasser son instrument et de se diriger vers la sortie.

« A nouveau sur la route ! »

Scande-t-elle en quittant le bâtiment.


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