Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Vous allez en perdre la face !
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Gamemaster9
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Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Gamemaster9 » mar. 8 janv. 2019 12:21

Episode 2 : Du Mauve et du Noir.



(Ce sujet fait directement suite à celui-ci sur l’ancienne base.)
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Gamemaster9
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Gamemaster9 » sam. 12 janv. 2019 13:32

Lande Noire – Grotte de Sombreroc.

Xël et Sibelle parvinrent à rejoindre la salle de l’autel. Ils durent faire une bonne partie du trajet dans le noir total, car Xël ne parvint pas à allumer son bâton. Comme si… comme si puiser de la magie de l’orbe géant pour ses intérêts propres était devenu complexe. La magie lui était ouverte, oui… Mais pour protéger l’orbe. Et uniquement ça. Comme si l’orbe lui-même était devenu l’essence de l’existence, pour lui. Dans cette grotte, tout du moins. La lumière ne semblait plus un souci, dans la salle de l’autel. L’autel lui-même, même s’il illuminait toujours l’endroit, semblait plus calme. Xël sentait toujours sa puissance bouillonnante, mais ne la percevait plus comme une menace.

Dans cette grande salle, il y avait donc comme voies la sortie, remontant vers la surface, le tunnel sombre d’où ils sortaient et le gouffre descendant dans les profondeurs de la grotte, aux reflets de feu et de lave, dont on ne pouvait voir le fond à cause de l’irrégularité de la roche sombre, saillante par endroit. Gouffre au-dessus duquel ils se tenaient (si j’ai bien compris). Mais la descente pour son exploration, si tel est ce qu’ils souhaitaient faire, ne serait pas si aisée. Elle allait demander des performances dans le domaine de la spéléologie et de l’escalade, et au moins un minimum de matériel, pour y descendre. À moins qu’ils n’aient une autre solution ?

Sirat, en tout cas, ne donnait pas signe de vie. Était-il seulement encore dehors, à la surface ?

Lande Noire – Retour vers Elscar’Olth.

La route avait été reprise de nuit. Kivan et Ariane progressaient lentement dans la lande, chargés de la civière sur laquelle reposait Endar, toujours agonisant, sentant à chaque pas sa vie s’arracher à lui un peu plus, ses nerfs se froisser davantage, ses os disloqués bouger dans sa chair dans des douleurs atroces. Le lion les escortait, silencieux, dans la nuit de la Lande Noire. Une nuit des plus noires, au ciel fermé, chargé d’épais nuages. Même la capacité de vision nocturne de Kivan ne permettait pas d’y voir très loin. Ça lui permettait de suivre la piste, la route unique traversant le pays dévasté, tout au plus.

Ils marchèrent ainsi pendant près d’une heure. Un peu plus, sans doute, quand Endar sentit un frisson glacé s’emparer de son être. Était-ce la mort qui venait le cueillir ? Ils ne tardèrent pas à le savoir. Un être apparut dans l’obscurité. Un être à l’apparence peu engageante…

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Une épée sanglante à la main, comme auréolé d’une lumière froide, de sorte que tous puissent le voir, il avançait en silence dans la direction des aventuriers. Une tête à la peau blafarde, dépourvue de tout visage, auréolée d’un cercle de métal noir. Deux ailes ténébreuses dans le dos, une armure sombre qui épousait les formes maigres de son corps… Il semblait laisser derrière lui une trainée de sang, en marchant. Une voix d’outre-tombe retentit.

« Endar de Yuimen… ne reconnaîs-tu pas la mort, quand elle approche ? »

Puis, sans doute davantage dirigé vers l’escorte de l’elfe noir :

« Pensiez-vous vraiment pouvoir le sauver en le portant ainsi à travers la Lande ? »

Lande Noire – Vers Orsan

Pour Yurlungur et Jorus, le voyage se poursuivit donc comme ça, vers la lointaine Orsan. Ils marchèrent dans ce paysage chaotique tout le restant de la nuit, jusqu’à tomber de fatigue. Là, ils firent une pause pour se reposer, dormir alternativement et, une fois le ciel reprenant ses teintes les plus sombres, reprendre la route. Ils marchèrent toute la nuit, une fois de plus, avant que le paysage éclairé d’une sombre aurore ne change. Les rivières et lacs de lave s’étaient petit à petit faits plus rares, laissant la place à de grandes étendues de roche noire et grise, toujours chaotique. À mesure que l’aube approchait, ils purent également sentir une lourdeur nouvelle dans l’air. Un parfum macabre. Une odeur, persistante, faible d’abord, mais de plus en plus présente, de charogne. Et lorsqu’il fit assez clair pour qu’ils se rendent compte de l’endroit où ils se trouvaient, ils purent tous deux voir que les pics et monts rocheux avaient laissé la place, dans le paysage, à des montagnes de cadavres en putréfactions. Corps meurtris, squelettes aux chairs pendantes verdâtres. Des silhouettes inertes par milliers. Par millions. Animales ou humanoïdes. Une voie traversait cet immense charnier, poursuivant vers la renommée Orsan.

L’odeur était horrible. La vision guère plus appréciable. Le cœur au bord des lèvres, ils durent choisir entre s’arrêter dans ce paysage néfaste, où l’air qu’ils respiraient ne semblait que poison, ou poursuivre malgré la fatigue, malgré la longue marche nocturne…

[Ariane : 0,5 (fabrication d’une civière et départ vers Elscar’Olth) + 0,5 (discussions)
Sibelle : 0,5 (discussion) + 0,5 (retour et arrivée devant l’autre passage)
Xël : 0,5 (discussion) + 0,5 (retour et arrivée devant l’autre passage)
Endar : 0,5 (discussion)
Yurlungur : 0,5 (discussion) + 0,5 (départ vers Orsan)
Jorus : 0,5 (rangement et départ vers Orsan) + 0,5 (discussions)
Kivan : 0,5 (départ vers Elscar’Olth et soins par les plantes).]
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Ariane
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Ariane » lun. 14 janv. 2019 07:06

Avec un signe de tête au sieur Kayne et à la jeune Yurlungur, je soulève doucement la civière en même temps que Kìvan, faisant mon possible pour ne pas trop secouer Endar. Avec précaution, nous nous remettons en route, en silence, tentant de deviner où nous posons nos pieds et pattes. Je laisse le semi-elfe nous guider sur la seule route où nous avons passé la journée d’hier, sentant déjà les muscles de mes jambes se plaindre de ce retour à l’action si précipité.

Al-Ayrad avance à nos côtés, allant parfois au devant de Kìvan puis ralentissant pour que nous le rattrapions, silencieux il s’applique à son rôle d’éclaireur avec soin, tous ses sens en alerte dans cette sombre nuit. N’y voyant goutte, je me concentre sur le moindre son que je peux capter, de ma simple respiration au souffle laborieux d’Endar, de nos pas fatigués sur le sol désertique de la Lande Noire au couinement de la civière, et au-delà…

J’en suis à me demander si j’ai bien fait de me séparer de Yurlungur, lorsque les poils le long de l’échine d’Al se hérissent, me transmettant sa préoccupation soudaine. Notre petit convoi s’arrête alors, à l’apparition d’un tiers des plus intriguant. Je ne peux le voir que grâce à la lueur que semble diffuser sa lame tirée au clair, si le corps sur lequel se porte mon regard dégage une certaine grâce dans sa sombre armure, je manque d’avaler de travers lorsque mes yeux s’arrêtent au niveau du visage de l’inconnu… Ou plutôt là où devrait se trouver son visage.
Après notre récente rencontre avec le colosse de lave, presque plus rien ne pourrait m’étonner sur ce monde énigmatique mais j'en arrive à me demander un instant si je ne suis pas en train de rêver depuis le début.

(Nous serions deux alors…)

Me fait savoir Al-Ayrad tout en venant se placer entre moi et le singulièrement inquiétant être ailé, je sens mon ami calme mais sur ses gardes. L’étranger continue d’avancer vers nous, posant avec élégance ses pas sanguinolents sur le noir sol de la Lande. J’échange un regard avec Kìvan et sans un mot nous posons lentement la civière sur le sol, je souhaite avoir les mains libres au cas où le nouvel arrivant serait une menace. S’il en a tous les aspects, je me dis que je ne connais encore rien d’Aliaénon et que pour l’instant le peu que j’en ai vu me fait penser que cet individu semble être tout à fait à sa place.
D’une voix impressionnante, il s’adresse alors à nous ou plutôt à Endar qu’il appelle par son nom. Je ne laisse rien paraître de mes craintes quant à la suite des évènements et lorsque c’est nous qu’il interroge, je ne peux m’empêcher de répondre machinalement.

"Nous ne pouvions sûrement pas le sauver là où nous étions, nous devons essayer."

Je suis sur un autre monde que celui où j’ai vu le jour, au milieu d’un paysage que je n’aurai pu inventer dans mes pires cauchemars et je viens d’entamer sur le ton d’une banale conversation un dialogue avec une créature qui semble totalement irréelle. C’est absurde. A qui faisons-nous face ?

"Qui êtes-vous ?"

Dis-je à voix haute pour formuler mon interrogation, espérant avoir une réponse rationnelle qui remettra un peu de sens dans cette aventure soudaine débutée il y a un jour à peine.

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Endar
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Endar » mar. 15 janv. 2019 16:47

Au cœur de la Lande Noire, Endar sentait son état s'empirer au fur et à mesure du voyage. Les aspérités du terrain n'aidaient pas, les deux porteurs de la civière sur laquelle son corps endommagé se trouvait ne semblaient pas pouvoir avancer plus rapidement. Ne pouvaient-ils pas ou ne voulaient-ils pas afin de s'assurer de sa mort, de sa disparition définitive sur cette maudite terre, sur ce monde fascinant ? La fièvre prenait le dessus, son front était ruisselant et ses pensées s'avéraient de moins en moins cohérentes. Bientôt, la haine d'être faible et la suspicion envers ses "sauveurs" prirent le pas sur l'éphémère sentiment de gratitude à leur égard. Brisé, il l'était également psychologiquement. La perte de fonction de ses membres, l'incapacité de se battre à nouveau l'effrayaient plus que la mort elle-même. Sur le dragon, il avait senti le pouvoir, il l'avait presque touché du doigt et à présent, il n'y avait plus rien. De ses rêves, il n'en restait que de la cendre. La marche à travers les Landes maltraitait son enveloppe charnelle, il sentait ses nerfs se froisser, lui occasionnant de vives et récurrentes douleurs dans tout son corps. La vue de ses membres blessés et distordus était devenue supportable, mais à présent il sentait ses os brisés s'enfoncer dans sa chair, frotter l'un contre l'autre tel un violoncelliste frottant sans précaution la corde de son instrument de musique. Il sentait perler de plus en plus les gouttes de sueur sur son front, sa mine patibulaire annonçait sa mort prochaine sans qu'il ne puisse lui échapper à nouveau. Seule sa tête pouvait bouger faiblement et si au départ il la bougeait régulièrement, à présent sa joue reposait sagement contre la toile de la civière, tâchant cette dernière de ses larmes de douleur et de frustration.

- Thimoros, implorait-il sans doute vainement.

Sa voix n'était plus que sifflement, elle était rocailleuse, moins harmonieuse et impétueuse qu'elle aurait dû l'être. Il continuait à parler ou tout du moins le pensait-il alors qu'en réalité ses lèvres se mouvaient sans qu'aucun son cohérent ne sorte de sa bouche. Il suppliait sa divinité tutélaire de lui donner sa force et sa rage pour pouvoir de nouveau participer à des campagnes militaires et guerroyer sur les champs de bataille. Le shaakt avait tant d'ennemis à affronter et à tuer, comment tout cela pouvait-il se terminer ainsi ? Il maudissait Elurien en silence. Il n'était qu'un pathétique être qui l'avait maudit après leur rencontre. Il lui avait dit de faire attention aux conséquences de ses actions et maintenant Endar en payait le prix. Ses yeux fixaient vaguement le paysage si joliment chaotique de la Lande Noire. Ce terrain aurait pu être la terre promise pour son peuple. Il n'y avait nul soleil pour les brûler, nulle lumière aveuglante, nul hinïon, humain et leurs misérables alliés pour s'opposer à eux. Gaïa était absente de cette terre et seuls les dieux sombres veillaient alors sur la Lande.

- Valshabarath…

Sa supplique ne reçut aucune réponse, pourtant il jurait avoir vu dans l'obscurité la plus totale une multitude d'yeux arachnoïdes l'observant tranquillement. Lorsqu'il rouvrit les yeux, il ne vit plus que la roche et les épieux couleur obsidienne qui composaient le paysage. Il n'y avait nulle trace de sa déesse dans les environs. Sa respiration devenait de plus en plus saccadée, ses paupières se faisaient de plus en plus lourdes et le sifflement de sa respiration comblait à présent le silence. Celle-ci était un son des plus macabres à entendre. Le shaakt perdit la notion du temps et de l'espace, mais lorsqu'il sentit un frisson glacé parcourir son échine, il sentait que la Mort était toute proche. Il sentit que son escorte déposait la civière doucement et il vit les deux formes floues se tenir face à l'apparition. Sa vue était trouble mais il percevait sans mal les ténèbres composant la maudite créature.

(Cette créature traîtresse est ainsi venue), songea-t-il sérieusement inquiet par la tournure que prenaient les événements.

Il ne l'avait jamais vu en personne mais il sentait au plus profond de son être qu'il était bien réel et qu'il était le Sans Visage. Cet être avançait sans se presser, en silence, laissant derrière son passage une trainée de sang alors qu'Endar sentait le sien se rarifier, se figer dans son corps. La voix de la divinité résonnait, elle ne provenait pas de l'absence de visage qu'il avait mais semblait provenir de la Lande elle-même. La créature prononça son nom et se moqua presque de lui en lui rappelant qu'il n'était qu'un mortel et que la mort s'approchait. Il apostropha Ariane et Kivan, cette première s'enquérant de son nom.

- Sans Visage... Promeneur... Traître...

Sa voix était fluette, cassée mais il ne semblait pas se résigner à mourir. Il n'y avait cependant plus dans le ton de sa voix ni joie, ni tristesse ni colère. Plus le Sans Visage s'approchait, plus il sentait la mort approcher à grands pas. Ses paupières se refermèrent lentement, le sifflement de sa respiration devint de plus en plus ténu et il semblait presque être mort. Autour de lui, dans son esprit, il se trouvait dans un endroit qu'il commençait à connaître, emplie de formes floues et évanescentes au coeur des ténèbres les plus profondes. Cette fois-ci, le monde des ténèbres, son monde prit vie sous ses yeux. Il se trouvait là où tout avait commencé pour lui: la bataille dans la forêt d'Eniod. Il revoyait les grands feuillus projetant leur ombre sur les soldats de chaque camp. Il était au milieu de ses hommes, bataillaient tant bien que mal contre les Taurions et les quelques Hinïons qui étaient venus les massacrer. Une partie de la troupe avait déserté sous les ordres des prêtresses, l'autre tenait la position et ils pataugaient dans les flaques de sang se mêlant à la boue environnante. Il se vit lancer un dernier assaut contre la première ligne de piquiers hinïons. Il hurlait tout en tuant ou tuait tout en hurlant. Il ne savait plus. Le sifflement des flèches des Taurions annonça la fin, les shaakts étaient mis en déroute et les flèches avaient réussi à percer sa lourde armure. Tout était perdu, et pourtant on le récupéra dans la boue, on lui retira les flèches et son armure. Les mâles shaakts le ramenaient sur une civière à Khonfas, sa belle cité natale et il entendit les mots des soldats qui l'entouraient : Votre heure n'est pas encore venue capitaine, buvez cette gourde et soignez-vous !

Sa vision disparut, les formes de ses soldats devenant à nouveau imprécises. Sa respiration saccadée avait repris de plus belle ou peut-être n'avait-elle jamais cessé et était-elle devenue presque inaudible. Ses paupières s'ouvrirent difficilement et sa vision restait imprécise, mais la lueur de vie dans son regard bien que faible restait bien présente comme pour insulter la Mort elle-même, pour la défier sans vergogne.

- Ma gourde... Boire... Boire, croassa-t-il à ses compagnons d'infortune.
[Boit tout ce qui peut lui permettre de se maintenir en vie et le cas échéant de remettre son corps en l'état]
Modifié en dernier par Endar le sam. 19 janv. 2019 15:29, modifié 1 fois.

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Sibelle
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Sibelle » jeu. 17 janv. 2019 04:27

En regardant de plus près le passage que Xël avait proposé, Sibelle constata qu’il était plutôt périlleux de s’y aventurer. Après tout, l’hinionne était né pour le combat et non pour l’exploration des grottes. Elle ne possédait pas de talents suffisants en escalade pour tenter de pénétrer dans ce sombre gouffre.
D’un commun accord, ils s’écartèrent de l’immense dépression abrupte pour se rapprocher d’un autel. La journée fut longue et il était tard. Il était insensé et imprudent de repartir en exploration. Il s’avérait plus sage de rester à l’abri dans la grotte non loin de l’autel lumineux.

Alors que Sibelle examinait le sol afin de trouver un petit coin d’aplomb afin d’y prendre place pour la nuit, Xël entama la conversation. Il s’informa de Sirat, lui demanda si l’entêtement de Sirat pourrait l’emmener à dormir à l’extérieur.

La guerrière jeta un coup d'oeil vers la sortie, lorsque Xël lui rappela l'absence de Sirat. Et elle lui rétorqua sur un ton neutre et légèrement désabusé:

« Oui, il est assez têtu... ici dans l'alcôve non loin de l'autel, on pourrait être bien. »
Termina-t-elle tout en jetant un regard interrogateur à son compagnon.

Le mage se contenta de hocher la tête avant de poursuivre son interrogatoire sur la relation entre l’humoran et Sibelle. Cette dernière avait apparemment échoué dans sa tentative de changement de sujet de conversation. Il voulait savoir s’ils étaient des connaissances de vieilles dates.
La guerrière réfléchit un instant avant de répondre:

« Non, depuis quelques semaines tout au plus... tu as dû le connaitre avant moi. »

Pour sa part, Xël avait rencontré Sirat à Nagorin sur Aliaénon. C’était à l’époque où Vallel voulait envahir Yuimen en passant par Aliaénon et Fan-Ming. Ce fut le succès de cette première aventure qui leur valut le titre de sauveurs d’Aliaénon. Puis après avoir expliquer sa propre rencontre, il revint à la charge en signifiant qu’il avait l’impression qu’elle et Sirat se connaissait depuis bien plus longtemps. Il demanda si elle l’avait rencontré en se rendant sur Aliaénon.

La guerrière trouvait son compagnon bien curieux. Tout en retirant son sac en bandoulière et en déposant ses armes au sol à portée, elle répondit tout de même.

« Je l'avais rencontré, près d'un an avant, mais ça c'était terminé par un combat... nous ne partagions pas le même...enfin bref.»

Les sourcils froncés, elle s'arrêta net, réticente à raconter davantage son passé. Elle se souvenait trop bien de cette rencontre où le petit gobelin voleur avait échappé à la colère de Sibelle en se réfugiant dans l’auberge, trouvant le soutien de l’humoran. Sibelle avait voulu éventrer le petit être vert pour récupérer la clé qu’il avait envalé, mais Sirat s’était interposé et ils s’étaient battus. L’humoran avait eu le dessus et la fière guerrière avait été blessée dans son orgueil.

Chassant du revers de la main ces pensées, elle se défit de son armure qu'elle déposa en ordre non loin de ses armes et de son sac. Elle étendit sa cape et au sol et s'y assit.

Le mage s’installa à son tour en complétant à sa guise la phrase de Sibelle et répliquant qu’il n’était pas aisé de comprendre la vision de l’humoran.

Après avoir jeté un regard circulaire et se rappelant l’intrusion agressive et soudaine de Simaya, Sibelle ne se sentait pas tout à fait en sécurité dans la grotte. Elle fit donc une proposition à son compagnon.

« On devrait peut-être se relayer pour dormir ? Deux ou trois heures de méditation me suffiront. »

Xël fut surpris du peu d’heure de repos nécessaire pour remettre en forme la guerrière, déclarant qu’il lui en fallait au moins une dizaine. Contrairement à Sibelle, il se pensait en sécurité. Il accepta tout de même de faire des tours de garde. Il se proposa pour faire le premier, prétextant qu’il devait s’habituer aux fluides magiques présents dans l’alcôve.

Sibelle savait que les humains avaient besoin de beaucoup plus de sommeil que ceux de sa race, mais elle croyait que six ou huit heures étaient amplement suffisant. Elle cacha néanmoins sa surprise et acquiesça de la tête. Elle s'allongea sur la cape qu'elle avait étendue sur la roche poussiéreuse et ferma ses yeux afin de méditer.
***
En colère, du haut du ciel, elle cherchait sa proie sans la trouver. Pourtant, ses yeux perçants scrutaient le sol noir des landes. Elle pouvait distinguer le moindre relief, mais aucune trace de l’humoran. Puis, lasse de chercher, elle reprit de l’altitude et vola sans but, profitant simplement du plaisir de voler gouttant à ce précieux sentiment de puissance et de liberté.
***
Pour qui l’avait observé dans son sommeil, elle avait d’abord été agitée, exprimant une moue de colère, avant de reprendre son calme et d’afficher un sourire béat.

Au bout de trois heures de repos, Sibelle ouvrit les yeux. En se levant légèrement sur les coudes, elle vit son compagnon non loin de l’autel, examinant ce dernier.

Tout en se levant, elle dit à Xël :

« Je prends le relais. »

Ce dernier, vraisemblablement épuisé, s’installa immédiatement, ayant tout de même la force de sourire de nouveau. Ce n’est qu’au matin, qu’il se réveilla pour demander à la guerrière si elle avait bien dormi.

Sibelle sembla hésitante un moment, puis se décida à révéler le rêve curieux qui la tracassait.

« J'ai rêvé... ce qui ne m'arrive pas souvent. »

Elle prit quelques secondes pour rassembler ses idées avant de poursuivre.

« Du haut du ciel, je cherchais Sirat en vain… J’ai finalement décidé de passer à autre chose et j’ai pris de l’altitude… je volais… pas sur le dos d’un dragon, ni entre les griffes d’une harpie, mais par moi-même, par mes propres moyens... j’étais libre. » Termina-t-elle rêveuse.

Songeuse, les yeux orientés vers le ciel comme en recherche de souvenirs :

« Je ne saurais dire,... je me sentais puissante, fière, libre, comme lorsque nous montions sur le dragons, sauf que là, c'était moi qui tenait les rennes, je n'étais pas à la merci d'un être volant.. »

Puis, comme voulant chasser son rêve intriguant, elle questionna Xël à son tour : « Ton sommeil semblait agité, te sens-tu reposé tout de même ? »

Xël d’ordinaire assez volubile, haussa les épaules. Il n’avait visiblement pas assez dormi, mais déclara qu’il s’en accommoderait.
Sibelle revêtit son armure, rangea ses armes à sa ceinture et mit son sac en bandoulière et sortit de la grotte en compagnie de Xël.

Une fois dehors, ils s'aperçurent bien vite que Sirat n'était plus là. La guerrière se tourna vers Xël le questionnant du regard quelques secondes avant de lui exposer son plan.

« Il ne peut avoir disparu comme ça. Il a peut-être trouvé le dragon, mais peut-être pas. Fouillons les environs, à la recherche d'indices quelconque... trace de pas, d'objet échappé, ...»

Cela dit, elle se mit elle-même à l'action en scrutant attentivement les environs.
Modifié en dernier par Sibelle le sam. 10 oct. 2020 23:26, modifié 4 fois.

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Kívan
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Kívan » jeu. 17 janv. 2019 21:59

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Nous soulevons enfin la civière sur laquelle repose le corps brisé d’Endar pour rebrousser chemin et retourner vers Elscar’Olth. Le retour de nuit est encore plus pénible que l’aller et l’obscurité ambiante nous empêche d’avancer réellement efficacement. La faible clarté me permet juste de distinguer Al-Ayrad qui alternait entre l’avant du convoi pour nous guider efficacement et Ariane. Cette dernière ne se plaint d’ailleurs pas pour le moment de son manque de sommeil et il y a de fortes chances qu’il faille faire une pause très prochainement. L’elfe noir semble délirer de son côté, la fièvre due à son état ne devant pas faciliter la chose. Je l’entends régulièrement gémir dans sa souffrance, rompant avec le silence de notre cortège, nous autres étant bien trop concentrés sur l’endroit où nous mettons les pieds pour ne pas tomber. Je peux reconnaître entre deux sifflements les noms de Thimoros et de Valshabarath, l’incarnation shaakt du dieu de la guerre. Je pense qu’il est bien trop tard pour lui pour demander à ses dieux tutélaires de ce manifester…

Le retour est long est pénible et l’absence de luminosité fait qu’il est une fois de plus difficile d’évaluer combien de temps nous avons marché au final. Une heure ? Peut-être plus ? Je tente d’évaluer quelle distance il nous reste à parcourir quand un frisson glacial semble parcourir l’espace et perturber mes fluides. Nous nous arrêtons instantanément tandis qu’une ombre blafarde émerge des ténèbres en face nous. L’épée au clair, une silhouette décharnée et macabre à la peau pâle comme la mort, revêtue d’une armure aussi sombre que les deux ailes qui l’encadrent, s’avance vers nous, laissant une trainée de sang sur son passage. Je ne me peux m’empêcher de faire un pas en arrière quand, levant les yeux vers son visage, je me rends compte que celui-là n’existe pas…

La surprise passée, je réalise que j’ai peut-être devant moi l’être dont il m’a été fait mention dans mon dernier rêve… Tachant de me souvenir des paroles de la liseuse de rêve, je me rappelle que cet être, ce San-Visage, est capable de modifier l’ordre naturel, et pour l’instant mon instinct ne me dit rien de bon là-dessus… Une vois d’outre-tombe retentit alors m’arrachant à mes observations. Il s’adresse alors à Endar puis à nous, nous demandant si nous pensions réellement sauver l’elfe noir. D’un commun accord, nous déposons délicatement au sol le brancard avec Ariane, celle-ci et Al-Ayrad se plaçant à mes côtés, entre le nouvel arrivant et Endar. Instinctivement, je commence à faire circuler mes fluides aux cas où ceux-ci nous seraient utiles très prochainement, même si je sais pertinemment que mon contrôle aléatoire sur ma magie sur ce monde ne me sera d’aucune utilité face à un potentiel adversaire de cette envergure…

Ariane semble prendre son courage à deux mains pour parler la première et indique notre but à l’étranger, le sommant ensuite de se présenter. En tendant l’oreille, j’entends la faible voix du shaakt, désignant l’être blafard comme le Sans-Visage, confirmant ainsi mes soupçons vis-à-vis de son identité. Je me racle la gorge pour tenter moi aussi de faire face à cet inconnu.

« Nous n’avons fait que ce qui était en notre pouvoir… »

Puis, tentant de garder mon aplomb le mieux possible :

« Qu’attendez vous de nous ? »

La voix désormais chevrotante d’Endar vibre à nouveau dans mon dos, demandant sa gourde. Je fronce les sourcils. Il me semblait pourtant l’avoir entendu déclarer que rien ne pouvait l’aider dans son équipement juste avant notre départ. Si le shaakt demande sa gourde à cette instant précis, c’est qu’elle devrait lui être utile, ou tout du moins, l’éloigner encore un peu de sa fin avant d’atteindre Elscar’Olth, la silhouette s’étant elle-même désignée comme sa mort… La mission que nous nous sommes confiée est de ramener le shaakt vivant à la cité pour qu’il puisse y être soigné, et je dois donc faire tout ce qui est en mon pouvoir pour mener cet objectif à bien pour que je puisse tenir ma parole.

D’un regard désormais plein de défi, c’est sans quitter des yeux le Sans-Visage – mais sans pour autant savoir ou placer mon regard, ce trou situé au niveau la tête me perturbant fortement – que je commence à reculer pour me rapprocher d’Endar, les mains bien en évidence. J’avise le sac contenant les affaires de l’elfe noir, le vide devant « les yeux » du Sans-Visage, repère le seul contenant qui s’y trouve, m’agenouille auprès du mourant et lui fait boire sa gourde…

Modifié en dernier par Kívan le mer. 23 janv. 2019 16:37, modifié 1 fois.

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Xël
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Xël » ven. 18 janv. 2019 00:12

Malgré mes efforts. Mon bâton refuse de redevenir une torche. La magie est toujours présente, je peux le sentir. Pourtant elle ne semble pas agir comme avant ma découverte de l’orbe. Comme si je ne pouvais maintenant m’en servir que dans le but de protéger la source même de la magie. Heureusement, le couloir n’étant qu’une ligne droite, nous retrouvons facilement le chemin jusqu’à la salle de l’autel. Ici aussi, l’essence de la magie à changer. L’autel est toujours là, illuminant la caverne, sa magie est toujours aussi présente mais je ne la crains plus. Elle me fait ressentir quelque chose de pacifique, de paisible. J’avais du mal à comprendre comment je pouvais ressentir ce genre de choses, entendre et comprendre des messages que me communique la magie elle-même. Je jette un regard vers Sibelle, pouvait-elle ressentir la même chose que moi ? Je ne lui pose pas la question tandis que nous avançons dans la caverne. Ce que j’avais pris pour un passage la première fois était en fait une alcôve. Rien à explorer de ce côté donc. En revanche il existait un autre passage, un trou reflétant des couleurs rougeâtres s’enfonçant dans les profondeurs. Manquant d’équipement pour une telle descente, nous n’avons besoin que d’un regard pour nous comprendre, il valait mieux éviter ce chemin. Nous décidons de passer la nuit dans la grotte et de rejoindre la surface le lendemain.

"Je me demande ce que fait Sirat. Tu crois qu'il est assez têtu pour passer la nuit dehors ?"

Elle jette un coup d’œil vers la sortie et me répond d’un d’un ton neutre qu’en effet il pourrait être assez têtu pour prendre cette décision. Pour changer de sujet, elle désigne l’alcôve en supposant qu’on pourrait y être bien pour passer la nuit ? J’hoche la tête avant de continuer à faire la conversation.

"Vous vous connaissez depuis longtemps ?"

Elle réfléchit un instant avant de répondre que ça ne fait que quelques semaines. Elle pense même que j’ai dû le connaître avant lui.

"Je l'ai rencontré ici sur Aliaénon. A Nagorin pour être plus précis. Quand Vallel cherchait à envahir ce monde et le nôtre en passant par Fan-Ming. On a l'impression que vous vous connaissez depuis des années. Tu l'as rencontré en venant ici ?"

Je n’ai aucun mal à me souvenir de notre première rencontre. Dans le cadre de la porte du temple de Nagorin alors que j’étais suspendu par le col par l’Ouessien aux trois bras. Ténébreux avec son ton impérieux. Qui aurait cru que je m’attacherais autant à lui pour en découvrir sa partie fêtarde. Qui aurait cru même que nous partagerions le même but. Sibelle se défait de ses affaires pour les déposer près d’elle en me racontant qu’elle a rencontré l’humoran bien avant mais que ça c’était terminé par un combat car ils ne partageaient pas le même… Elle ne termine pas sa phrase, visiblement réticente à raconter ce qu’il s’est passé ce jour-là. Elle se sépare de son armure et étend sa cape au sol pour s’y installer. Je m’installe à mon tour, à même le sol en terminant sa phrase en rigolant.

"Même vision des choses... Qui peut comprendre la vision de Sirat ? Je le demande !"

Il n’y a que lui qui comprend le sens de ses actions. Je ne comprends toujours pas certaines. Pourquoi avoir réduit en poussières le mur de Fan-Ming que nous avons eu tant de mal à descendre. Si à l’époque j’avais eu les pouvoirs que j’ai aujourd’hui… Ca ne se serait pas réglé uniquement par des mots. Sibelle propose de se relayer pour dormir, précisant que deux ou trois heures de repos lui suffise.

"Deux ou trois heures ? T'en as de la chance. C'est une dizaines d'heures qu'il me faudrait pour être en forme." Dis-je en souriant avant de poursuivre.

"Je pense que nous sommes en sécurité ici mais on peut se relayer oui. Je te propose de commencer à te reposer. Je dois encore m'habituer aux flux magiques qui circulent ici."

J’avais l’impression que l’autel veillait sur nous et je me sentais en relative sécurité. Le moment parfait pour m’exercer à comprendre comment la magie fonctionne ici. La guerrière acquiesce avant de s’allonger. Je ne la dérange pas plus longtemps et me relève pour approcher de l’autel. Je le contemple d’abord. Irradier sa puissance. A quel point Simaya était capable de comprendre cette chose et l’orbe au fond de cette grotte. Etais-je seulement à un doigt d’effleurer ses compétences ? Je voulais en avoir le cœur net, je voulais me tester. Ici et maintenant. Je m’installe devant l’autel, concentré. Je ferme les yeux. Si un intrus mal intentionné se montre, je suis certain que l’autel agira en conséquence. Je laisse mes fluides magiques agir. Je les laisse se répandre autour de moi comme des branches et des racines. Comprendre la magie qui pulse ici. La ressentir pleinement. Peut-être même communiquer avec elle. Les titans communique par magie mais de quel manière ? Je peux peut être le découvrir ici. Je laisse toujours ma magie s’étendre, encore et encore, me concentrant pour percevoir chaque fragment de magie qui erre dans cette caverne, dans ses sols et dans les airs. Je laisse ma magie divaguer sans faire attention au temps qui passe ni à l’énergie que cela consomme. C’est Sibelle qui me sort de ma méditation. J’entends une voix lointaine me dire qu’elle prend le relais. Je reprends mes esprits et me tourne vers elle en souriant malgré l’épuisement causé par mon expérience. Je me relève pour me diriger vers l’alcôve ou je sombre dans un sommeil agité par la magie présente, à même le sol.

Le lendemain, un peu fourbu de m’être endormi sur la roche de la caverne, je me redresse et m’étire en poussant un long bâillement. Je me gratte le dos, le ventre, passe une main sur mon visage et reste immobile quelques instants à fixer le vide en ne pensant qu’au moment où je pourrais m’endormir à nouveau. En apercevant Sibelle je lui demande comment c’est passé sa nuit. Elle me répond qu’elle a fait un rêve ou elle se sentait voler par ses propres moyens. Qu’elle se sentait puissante, fière et libre. Je hausse un sourcil, la description collait assez avec la combattante même dans la réalité. Elle me fait remarquer que mon sommeil était agité et s’inquiète de savoir si je me suis assez reposé. J’hausse les épaules, convaincu que la fatigue allait passer.

"Je m'en accommoderais."

J’attrape quelque chose à manger dans mon sac avant de rejoindre Sibelle pour retourner vers la surface. En silence cette fois. Je ne la harcèle pas de question, je laisse seulement échapper quelques bâillement. Même dehors, je garde le silence en m’apercevant que Sirat n’est pas là et me contente de diriger un regard vers Sibelle en attendant la suite des événements.

((1140 mots))

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Yurlungur
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Yurlungur » ven. 18 janv. 2019 17:44

...

Sur ces dernières paroles, en adressant un dernier signe d'au-revoir à Kívan et Ariane, la jeune fille prit la route. Son esprit était troublé de considérations multiples, concernant la réussite de leur mission autant que son rôle au sein de celle-ci. Avait-elle bien fait de laisser le groupe se scinder de la sorte, alors qu'ils avaient eu tant de mal face à la créature de lave ? Même si elle n'était pas prête à le reconnaître face aux autres, elle aurait été bien embêtée si elle avait eu à s'en charger elle-même – dans un certain sens, l'intervention d'Endar, bien que terriblement dangereuse, avait été salvatrice pour ceux qui restaient. Face à un ennemi plus puissant, ce qui arrivait fréquemment finalement, elle préférait fuir, échapper à leurs coups par le pouvoir des Ombres d'Arothiir... mais la situation changeait dès lors qu'elle se retrouvait au sein d'un groupe plus évolué. Si encore ceux-ci s'étaient révélés meilleurs combattants qu'elle : mais ils étaient des aventuriers certes compétents, mais aux lacunes nombreuses, et auraient besoin d'elle face à des adversaires sérieux.

C'était un mot qui la faisait frissonner. On avait besoin d'elle, et elle craignait de tout faire foirer – comme d'habitude. Les yeux baissés au sol tandis qu'elle marchait en silence aux côtés de Jorus, elle se sentait percée de tous ces regards qui l'avaient jugée au cours de son existence : son père, le Gros Néral, Liniel, Aethalin, et plus récemment Elisha'a, Arsok... Et Kiyo. Que dirait-il s'il la voyait fuir encore une fois ?

La tentation de rebrousser chemin, de rentrer à Arothiir, maintenant qu'elle avait réussi à maîtriser le pouvoir des Ombres, était grande. Mais Arsok considérerait-il cela comme une véritable mission accomplie ? Elle jeta un rapide coup d'œil à Jorus. Qu'en dirait-il, lui ? Il la verrait comme une couarde sans cœur, comme tant d'autres. Elle ne savait même pas si elle en était vraiment une, ou si cette vision qu'on avait d'elle était extrapolée, nourrie de ressentiment et de haines d'origines diverses. Avec la remise en cause de ses propres capacités au sein d'un groupe croissait une autre, plus profonde, entamée par Kiyo il y avait près de six mois, à propos de la morale qu'elle suivrait au cours du restant de sa vie.

Tourmentée par ces questionnements, la marche silencieuse au milieu de la Lande noire, loin de les apaiser, contribuait à rendre la machinerie plus fonctionnelle, à développer une réflexion plus intense, moins complaisante aussi, de tout ce qu'elle était. Elle entrait dans cette phase concrète de l'adolescence où l'on doute : et si elle avait plus ou moins réussi à rejeter jusqu'ici la faute sur les autres, à changer en colère cette insécurité croissante et à troquer contre de la haine la douleur d'avoir perdu sa mère, tous ces masques de déni s'effritaient lentement, insensiblement érodés par une pernicieuse lucidité.
***
Une nuit passa, puis deux. Dormir le jour était effectivement plutôt une bonne idée. Ils progressaient plus lentement, mais Yurlungur se repérait sans peine et le plafond de nuages filtrait, même de jour, une bonne partie de la lumière, d'autant qu'ils se sentaient bien plus en sécurité. Une forme de tendresse mutuelle avait commencé à émerger entre les deux jeunes gens. Yurlungur voyait Jorus comme un ami, une des rares personnes de ce monde ou de l'autre qui évitait de la juger trop durement et cherchait véritablement à créer entre eux de bonnes relations. Ils alternaient les tours de garde le jour, vérifiaient réciproquement n'être pas trop fatigués, essayaient chacun de soutenir l'autre dans la difficile épreuve que représentaient cette aride traversée.

Il avait un côté un peu gamin qui amusait la jeune fille. Elle-même avait du mal à garder son sérieux, prenant certaines de ses paroles avec une naïveté candide. Étrangement, malgré sa jeunesse, elle avait pris le rôle de guide. Au fond, ce n'était pas pour la déranger.

Ce n'était qu'à l'issue de la deuxième nuit de marche qu'ils commencèrent tous deux à relever une senteur subtile et douteuse. Les rivières de lave, qui avaient jusqu'ici permis, par la faible lumière qu'elle rayonnaient, de voir plus facilement là où ils se dirigeaient, étaient devenues absentes : mais l'aurore révéla un paysage fantasmagorique. Yurlungur fut heureuse d'avoir le cœur si bien accroché, et de s'être progressivement accoutumée aux horreurs des charniers, depuis l'invasion oaxacienne de Dahràm, quelques sept ans auparavant, mais lança un coup d'œil inquiet vers Jorus.

Celui-ci était vraiment dégoûté. Aussi fatigué qu'elle, c'était la répugnance qui dominait chez lui, là où elle, bien plus pragmatique, se sentait finalement un peu lasse. Cette macabre mise en scène était, à y réfléchir prudemment, des plus curieuses : depuis combien de temps les charognes pourrissaient-elles ? Qu'est-ce qui avait conduit à autant de morts ? Était-ce en lien avec leur arrivée, ou le passage de Naral sur cette Lande ? Ces questions sans réponses, elle préférait les garder de côté pour l'heure, afin de prévoir d'abord une bonne nuit de sommeil. Aucun d'eux n'était en état de marcher davantage, surtout baignés d'une telle puanteur.

« Nous devrions faire une pause, proposa-t-elle. Ou bien nous rebroussons chemin pour nous installer un peu plus loin de cette odeur pestilentielle, ou bien on imbibe des tissus d'eau et on se les colle devant le visage... »

Un instant de réflexion suffit à lui faire reconsidérer cette possibilité. Si c'était sensé à Arothiir, ça l'était bien moins dans une contrée aussi peu hospitalière que celle-ci. Elle secoua immédiatement la tête pour poursuivre :

« Tout compte fait, autant conserver autant que possible nos réserves d'eau intactes. »

Elle chercha à attraper son regard : le sien était sérieux, quoiqu'on pût sans doute y lire un peu d'inquiétude.

« Nous ne sommes pas en état de continuer bien longtemps, et je pense que ce qui nous attend derrière ne sera pas nécessairement amical. » Douce litote. « Ça te va ? »

Jorus acquiesça à ses raisons, prévoyant de trouver une grotte ou en tout cas un lieu plus accueillant que celui-ci, ce qui n'était pas difficile. Mais il avait enfin mis un mot sur ce qu'il pensait d'elle et le rôle qu'elle avait joué au sein de leur petit groupe. Elle sourit faiblement à ce curieux qualificatif.

« Expérimentée ? Je ne suis jamais venue ici. »

Elle s'en serait souvenue, tout de même. Elle haussa des épaules puis ajouta :

« Retournons de, disons, cent ou deux cent mètres en arrière. L'odeur n'y était pas si forte, et il y a peu de vent pour porter ces émanations... Nous pourrons nous y reposer avant de reprendre notre marche : l'idéal serait de traverser cette portion en une seule fois. Tours de garde habituels, d'acc ? Il faudra être bien reposés pour repartir. »

C'était un plan convenable, à moitié érigé en même temps qu'elle parlait. Laissant un temps de pause, elle s'autorisa une nouvelle contemplation des cadavres entassés et grimaça. Non, tout cela n'était pas là par hasard : c'était une annonce parfaite pour prévenir les voyageurs. Certains étaient anciens, d'autres pas, et si ce qu'on racontait dans les rues de Dahràm était vrai, c'était là les restes ratés d'expériences menées à Orsan par le tristement célèbre Vallel.

« Tout ça, c'est... le signe que nous touchons au but, j'imagine. Pour le meilleur et pour le pire. »

Jorus, posant une main sur son épaule, entreprit de la rassurer. Sa voix ne cachait pas tout à fait la peur qu'il éprouvait lui-même, qui les prenait tous deux aux tripes, mais l'intention était sincère. Il prévoyait quant à lui de tomber sur des morts-vivants, peut-être semblables à la bête de Simaya. Yurlungur haussa un sourcil.

« Si c'est un territoire occupé par des troupes oaxaciennes, ça ne m'étonnerait pas qu'ils utilisent ce genre de sale magie. »

Un seul regard sur cette main, regard qu'elle aurait voulu bienveillant, lui fit la retirer précipitamment, comme s'il s'en voulait de s'être montré si direct. Elle ne comprenait pas une attitude si timide : ils vivaient ensemble depuis deux jours et elle croyait pouvoir dire que leur amitié était désormais bien enracinée.

« Très bien. Par ici, donc, reprit-elle en commençant à marcher dans l'autre sens. »

Mais Jorus semblait agité. Ses paroles semblaient indiquer qu'il n'avait évoqué la créature de Simaya sans réellement y croire, alors qu'il lui demandait si elle s'était déjà battue contre des monstres similaires.

« Euh... »

Elle leva les yeux au ciel, cherchant dans ses souvenirs. Cela remontait à un petit moment déjà, avant qu'elle arrive sur ce monde. Le souvenir le plus récent, avant la grotte après la fuite face au dragon noir, c'était celui dans la Forêt des feuilles tristes...

« Une fois j'ai affronté une Shaakt et son squelette domestique. Mais j'ai réussi à fuir. »

Elle rougit. La situation n'était, en vérité, pas tout à fait à son avantage : elle n'avait finalement réussi à vaincre son adversaire que très indirectement, par un coup de pouce du destin, ce qui l'avait placée directement nez-à-nez avec son Faera. Papillon lui manquait un peu, mais il avait prévenu : il ne pouvait intervenir dans ce monde et s'était plongé dans une sorte d'hibernation.

« Ah, mais sinon, il y a eu Armont ! C'était un gros amas de chair, avec une hache grande comme moi. En fait, je ne sais pas trop s'il était mort ou vivant... »

Aethelin, lui, était vraisemblablement plus proche d'un esprit que d'un mort, mais elle ne l'avait pas à proprement parler affronté. Et puis, Armont aussi, c'était un peu de la triche, remarqua-t-elle pour elle-même, précisant :

« Mais il avait peur du feu. J'imagine que c'est le meilleur moyen d'affronter un cadavre ? Enfin, sinon, une, hem, retraite stratégique est toujours une option possible s'il y en a trop, ou simplement les démembrer jusqu'à ce qu'ils ne bougent plus, ou tuer le maître qui les invoque... Un peu comme avec Simaya, quoi. »

L'exemple était mal choisi, comme le releva Jorus, pour qui tout était devenu confus lorsqu'il avait frappé l'autel. Et il craignait que, cette fois-ci, un Archisorcier n'apparaîtrait pas pour les sauver.

« Oui ! Donc la meilleure option reste la fuite, si l'adversaire est trop puissant. Disons : si le danger est trop pressant pour l'un de nous deux, pour annoncer qu'on compte se... replier, on n'a qu'à établir un code. Par exemple : “attention au dragon noir” ! »

Elle secoua aussitôt la tête.

« Non... Un peu trop long. Un mot alors ? “Patate”. »

C'était le premier qui lui était venu à l'esprit, et il n'était en rien relié au concept de fuite.

« Dès que l'un de nous se met à parler de patates, c'est qu'il est temps de se carapater. Ça te va ? »

Cela lui semblait pas mal. Elle s'attendait à ce qu'ils aient à faire face à des adversaires autrement plus malins, désireux de prévoir leurs mouvements pour les vaincre plus facilement : la seule façon de les prendre de court était d'établir un tel code, pour les cas les plus désespérés. Mais Jorus ne comprit visiblement pas la motivation, souhaitant simplement annoncer haut et clair son intention de fuir. Elle secoua la tête à nouveau.

« Parce que ça donnera des informations à l'adversaire, s'il comprend notre langue. Enfin, si tu veux... »

L'idée, remise en cause par Jorus, lui semblait bien plus bancale que ce qu'elle avait imaginé en premier lieu. Comme si sa critique cristallisait autour d'elle la nécessité pour Yurlungur de revoir ses méthodes, comme s'il avait voulu pointer qu'effectivement, elle ne savait que fuir, sans même avoir le courage de le reconnaître directement.

« Mais j'imagine qu'un ennemi sera plus interloqué qu'autre chose si l'un de nous se met à parler de patates, alors qu'il se préparera à nous poursuivre si l'on crie de fuir, se défendit-elle mollement. »

Ce mot de “patate” lui semblait de plus en plus idiot. Elle se sentait bête de l'avoir proposé, d'avoir cru que cette idée était géniale et d'avoir osé en parler à Jorus, lui faire perdre son temps comme ça, alors que ce n'était que la preuve qu'elle était une imbécile. Elle haussa des épaules.

« Après, si on tombe sur des morts-vivants... Peu importe. »

Si seulement il pouvait oublier tout ce qu'elle avait dit... Elle tentait de garder une allure fière, mais les reproches intérieures étaient cinglantes, reflétant tout ce que Jorus, par égard pour elle, n'osait pas mettre en mots, mais pensait tout de même, certainement. Il ne put néanmoins s'empêcher de rigoler en déclarant qu'il lui proposerait de l'emmener en voyage de noces s'ils avaient tant besoin de s'enfuir. Il se moquait d'elle et elle le sentait bien, tellement l'idée était incongrue : mais elle se força à sourire et à répliquer, pour avoir le dernier mot :

« T'en es même pas cap'. »

Ils finirent par arriver à un lieu propice à l'établissement d'un campement. En l'absence de lac de lave pour les réchauffer, Jorus souhaitait allumer un feu, tout en se demandant si cela ne risquait pas de leur attirer des ennuis. Quoiqu'il en soit, il faisait à présent jour, et comme toutes les autres fois, Yurlungur pensait qu'ils seraient prêts suffisamment tôt si quelque chose décidait de les attaquer.

« Pas d'objection. Mais tu as vu du bois pas loin ? demanda-t-elle en haussant un sourcil. »

Il n'y avait pas pensé et finit par abandonner cette idée – mettre le feu à un cadavre était tout simplement hors de question – pour une autre : dormir l'un contre l'autre. Yurlungur soupira. C'était gênant, non pas parce que c'était Jorus – elle lui faisait confiance et ne voyaient entre eux deux rien d'autre qu'une complicité qui se formait, une amitié profonde qui s'ouvrait. Mais un sentiment d'embarras qu'elle n'aurait pas cru éprouver à l'évocation d'un besoin si factuel de chaleur s'était substitué, alors que s'agençaient dans son esprit diverses marques du jeune homme, des paroles qui, sorties de leur contexte, disaient plus sur ce qu'il éprouvait pour elle, et quelque chose qu'elle ne voulait même pas entrevoir, même pas évoquer. Il était inutile de prononcer seulement ce mot grossier qui gâtait tout, encensé par les filles cruches et manipulé sans vergogne par les beaux parleurs. Elle consentit néanmoins d'un léger hochement de tête et commença à installer à la charger, lorsque Jorus revint à la charge, demandant sans fioritures si elle pouvait lui expliquer ce qui lui était arrivé, avec les ombres, face au golem de lave.

Il était bien trop curieux. C'était quelque chose qu'elle souhaitait garder pour elle, au moins pour un moment : et l'attitude de Jorus commençait à l'agacer. Fronçant ses sourcils, elle répondit avec humeur :

« Je suis crevée. Bonne nuit. »

C'était la façon la plus brutale de clore cette conversation, mais c'était la seule qu'elle avait trouvée. Elle se coucha et, les dos légèrement courbé, tourné vers Jorus, elle chercha à trouver le sommeil et à oublier tout, cette odeur qui imprégnait tout, les inquiétudes sur leur mission – et ses craintes sur sa relation avec Jorus.

...
Modifié en dernier par Yurlungur le ven. 25 janv. 2019 22:49, modifié 1 fois.

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Jorus Kayne
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Jorus Kayne » ven. 18 janv. 2019 22:22

Nous reprenons la route direction Orsan avec un groupe désormais réduit à moi et Yurlungur. Connaissant mieux de monde, je laisse la jeune fille prendre la tête de notre duo. La route est longue et nos efforts à marcher dans ces terres me semblent aussi fastidieux qu’éreintant, il nous faut nous reposer à plusieurs reprises pour éviter d’être incapable de faire face à un danger inattendu. Nous laissons les terres aux lacs de laves derrière nous ainsi que l’autre groupe qui, je l’espère, est non loin Elscar’Olth ou sur les terres contrôlées par notre hôte. Si j’ai malgré tout un plaisir à quitter cette zone et la créature au sang de feu liquide, quelque chose me chiffonne. Une odeur nauséabonde de charogne nous monte vite au nez et devient de plus en plus intense à mesure que nous progressons.

Ce n’est que lorsque la lumière de l’aube se fait plus importante que nous sommes capables d’apercevoir là où nous nous trouvons. J’en préférerais presque les lacs de laves et les pics chaotiques finalement. Des montagnes de corps en putréfactions, des squelettes dont les chairs arborent des couleurs verdâtres tout simplement immondes. Ce sont ces corps formant des amas importants, tant humanoïde qu’animale, par millions qui forment le paysage local. Au milieu de cela, un unique chemin traverse la vallée mortuaire et me donne cette impression que nous descendons aux enfers et avec une file d’attente mortelle.

Yurlungur prend le temps d’examiner les charognes. Son visage marque la fatigue qu’elle éprouve et malgré son dégoût, c’est surtout une lassitude qui domine son expression. Elle s’en revient à moi pour me proposer une pause. Reste à savoir où. Afin d’éviter cette odeur pestilentielle, nous pourrions rebrousser chemin vers un endroit où nous serions moins incommodés par l’odeur ou se coller du tissu imbibé d’eau. Elle secoue la tête et rejette sa propre proposition en prétextant que nos réserves d’eau doivent être conservées autant que possible.

Je suis dans le même état que ma camarade, si ce n'est pire. Un mélange de fatigue et de dégoût me donne un faciès assez unique lorsque Yurlungur se tourne vers moi. A la proposition de la jeune fille j'ai un moment d'hésitation.

"Je te l'accorde, il nous faut garder notre eau un maximum, surtout si nous devons nettoyer une plaie qu'on aurait subie ici. Rien ne me convient pour l'établissement du camp. On peut essayer de trouver un espace un peu plus loin qui soit moins...moins ici ! Avec un peu de chance on trouvera une grotte. Mais c'est toi la plus expérimentée alors je me fie à ton jugement."

Elle me répond d’un léger sourire qu’elle n’est jamais venue ici et donc pas plus expérimentée que je le pense et me propose de revenir cent à deux cents mètres en arrière où l’odeur semblait moins forte. Un repos avant de reprendre une longue marche et des tours de gardes avant de partir d’ici.

"Pour le meilleur et pour le pire." Termine-t-elle en grimaçant.

Je pose une main amicale sur son épaule. Un soutien qui se veut surtout pour le moral dont nous allons avoir cruellement besoin le temps de traverser ce cimetière.

"Que tu sois venue ou pas tu connais ce monde mieux que moi. Va pour les tours de gardes habituels. Si nous touchons au but, j'ai quelques craintes quant à ce que nous allons rencontrer. Plus nous approchons et plus la mort se présente à nous et si je devais m'attendre au pire, je craindrais que les morts se réveillent ! Un peu comme la bête de Simaya."

Elle me répond avec un haussement de sourcil que dans l’éventualité où le territoire est occupé par les forces d’Oaxaca, il est probable qu’ils utilisent ce genre de magie. Elle me sourie en regardant ma main et prend le chemin inverse.

En voyant son regard se poser sur ma main je l’enlève immédiatement, elle n’aime peut-être pas les gens tactiles. A sa remarque sur les activités que peuvent avoir les potentiels résidents je n’ai qu’une chose à ajouter : "Merveilleux !"

Je la suis en prenant le chemin inverse et reviens sur les morts qui marchent :

"Et dans l’éventualité où on aurait ce genre de rencontre, tu as déjà eu affaire à des créatures similaires ? "

Elle lève les yeux au ciel, visiblement plongée dans ses souvenirs. Elle a effectivement affronté un elfe noir et son serviteur squelette, mais elle a fuit. Puis elle m’évoque un certain Armont. Un gros tas de chair avec une hache démesurée. Encore maintenant elle ignore s’il était vivant ou mort, mais sa peur du feu l’a visiblement marqué et que c’est une possibilité à envisager si nous affrontons des êtres similaires. A défaut il nous est toujours possible de fuir ou de les démembrer, bien que le meilleur moyen soit de tuer l’invocateur comme pour Simaya.

Les détails de ses affrontements me laissent coi sachant son apparence juvénile.

"Oui enfin concernant cette affaire, je ne me souviens plus trop comment la fin s’est décidée. Je me rappelle avoir frappé l’autel, enfin je crois, mais ce qui s’est passé ensuite…c’est le trou noir ! En tout cas je doute qu’on trouve quelque chose similaire à l’autel pour nous aider, ainsi qu’une aide extérieure comme Elurien!"

Nous nous entendons donc sur la fuite en cas d’adversaire trop dangereux pour nous. Elle se met à parler de choses étranges que je ne saisis pas dans un premier temps. Il semble qu’elle veuille établir une sorte de mot de code secret pour annoncer une retraite rapide. Et le mot qui lui vient en tête pour cela est patate.

Je regarde la jeune fille avec un air des plus étranges. Comme si elle venait de m'expliquer que le meilleur moyen de remonter un fleuve c'était en bateau vent debout.

"Patate ? Pourquoi pas quelque chose de plus simple comme, je sais pas : fuis, sauve ta vie ?"

Selon elle, si l’individu ou la créature qui nous chasse comprend notre langue, cela peut le surprendre et nous laisser le temps de décamper. Si le problème est des morts-vivants, le code ne semble plus si utile.

Je regarde la jeune fille avec un petit sourire taquin. Il est bon de conserver le moral.

"Ma foi si on a un problème au point de décamper, je peux toujours te proposer de partir en voyage de noce ?"

Au campement je regarde les alentours et perds mon regard au loin.

"Il n'y a pas de lac de lave pour nous tenir au chaud cette nuit. Tu as une objection quant à la fabrication d'un feu ? Je veux pas mourir de froid, mais si on risque d'attirer les problèmes à nous je suis prêt à réfléchir à la question."

De nouveau elle hausse un sourcil et me défie de le faire un petit sourire amusé.

(D’accord donc un haussement de sourcil veut dire qu’elle est intriguée, dans le bon sens du terme, par quelque chose.)

Concernant le feu elle n’y voit pas d’objection, mais reste à trouver dans le coin de quoi l’alimenter. Je prête attention aux amas de corps, mais rien ne semble être propice à un feu de camp.

"Non rien en vue. On peut éventuellement mettre le feu aux cadavres directement, mais je crains que l'on attire des choses dont on ne souhaite pas faire la rencontre. Je pense qu'il va falloir qu'on dorme l'un contre l'autre cette nuit et je parle sérieusement !"

Elle laisse échapper un soupir mêlé d’une certaine gêne, mais finit par être d’accord avec ma proposition avant d’installer son couchage. De mon côté un détail de taraude la concernant et ma petite voix me vient en aide.

(Pourquoi tant de tracas ? Je le sens ce n’est pas ce lieu qui te perturbe.)

(Non effectivement. Je me pose des questions sur ce qui est arrivé, comment elle s’y est pris contre le monstre de lave pour se déplacer subitement de côté.)

(Le mieux reste de lui en faire la demande non ?)

(Elle n’a pas abordé le sujet et je ne sais pas comment le faire sans la brusquer.)

(Essaye un peu de tact. Elle va finir par s’apercevoir que quelque chose te tracasse alors lance-toi !)

Après quelques instants sans un mot, je trépigne et le lance finalement à sortir ce que je retiens.

"Au fait, tu ne m'as pas parlé de ce qui est arrivé face à la créature de lave. C'était...étrange. On aurait dit de la magie, mais sans en être."

(Ho non c’est pas vrai !)

(Ben quoi j’ai suivi tes conseils, j’y suis allé !)

(T’as oublié de faire preuve de délicatesse !)

(Comment ça ?)

(Le tact ! Je t’ai parlé de tact il est où ? Attends, tu sais au moins ce qu’est le tact ?)

(…)

Cette fois-ci, Yurlungur fronce carrément les sourcils. Elle rétorque qu’elle est fatiguée et me souhaite une bonne nuit avant de s’allonger. Etrangement j’ai le sentiment qu’elle me souhaitait plutôt de me faire happer la tête par un poisson atteint de reflux gastrique. Visiblement la question paraît sensible. Je me tais et me focalise sur les bruits environnants pour débuter mon tour de garde.

Installation d'un coin pour dormir.
Tours de garde dans une ambiance glaciale.

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Gamemaster9
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Gamemaster9 » dim. 20 janv. 2019 19:08

Lande Noire – Alentours de la Grotte de Sombreroc.

Éveilles et hors de la grotte, sans en avoir appris bien plus sur celle-ci en ne l’ayant explorée que sommairement et en surface, Xël et Sibelle étaient de nouveau pleins de questions. Et Sirat n’était pas là. Leur recherche de trace ne les mena qu’à conclure qu’effectivement, un dragon s’était posé pas loin de l’entrée. Mais la pierre du sol n’en révélait pas plus. Aucune trace de Sirat, ou de combat, si ce n’était celles de celui entre les deux dragons, noir et d’or, de l’avant-veille. Ils devaient donc décider, sans autre piste, d’une voie à prendre. D’un chemin ou d’un objectif à remplir. Pourquoi étaient-ils venus ici, déjà ?

Lande Noire – Retour vers Elscar’Olth.

L’être au visage absent avisa chacun des aventuriers qui lui faisaient face. Ariane, d’abord, et son lion. Kivan, ensuite. Et enfin Endar, qui l’insultait malgré son état. L’être mystérieux en sembla affecté.

« Traître ? Et qui donc ai-je trahi ? En ce monde, je suis peut-être l’être le plus sincère. Bien plus, en tout cas, que ce Conseil d’Or intéressé, que ces faux-fidèles de Nagorin ou que votre ami le Dragon Mauve tourne-veste. »

Il se tourna vers Ariane, qui eut la surprenante impression qu’il la regardait… à travers ses chairs. Qu’il la regardait au plus profond d’elle. Il répondit pourtant seulement à sa question.

« J’ai plusieurs noms, et plusieurs apparences. Ici, l’on me nomme le Marcheur de Mort. Je suis à d’autres endroits connu comme l’Unique, Vâkkar Ti… Mais l’on me nomme de plus en plus par une appellation rendue populaire par le Conseil d’Or me traquant en chaque lieu : le Sans-Visage. »

Il se tourna ensuite gracieusement vers Kivan, qui venait de verser le contenu de la gourde d’Endar entre ses lèvres sombres. Endar dût prendre une potion de soin et un élixir d’énergie pour rétablir un tant soit peu son état. Sa vie ne semblait plus directement en danger, mais son corps avait besoin de temps pour être de nouveau fonctionnel. Au moins était-il désormais pleinement conscient et apte à la parole. Le Sans-Visage parla, à nouveau.

« Je n’attends rien de vous. C’est plutôt vous qui attendez de moi, avec vos espoirs fous, vos tentatives inespérées. Car il est en mon pouvoir de rendre ses facultés à l’être que vous transportez. Il est en mon pouvoir de vous mener à l’endroit où vous souhaitez vous rendre. Orsan, n’est-ce pas ? Que comptiez-vous accomplir dans cette tour de l’horreur, dans ce duché de la mort ? »

Sans attendre la réponse, il s’approcha à pas lents d’Endar, et se pencha sur la litière.

« Je vais vous offrir un choix, « sauveur ». Vous avez fait l’épreuve de vos propres limites corporelles, au sein d’un corps frêle et fragile. Je peux réparer celui-ci, le remettre à l’identique de ce que vous connaissiez. Ou je peux me saisir de votre âme et la mener vers un corps plus… solide. Plus fort. Un corps travaillé par une vieille connaissance à vous, Vallel. Ceux-là pullulent à Orsan… »

Un curieux marché, en soi. Le Sans-Visage se releva et attendit réponse à ses interrogations.

Lande Noire – Duché d’Orsan.

Jorus et Yurlungur, après une nuit endiablée en plein jour, finirent par se réveiller alors que le sombre crépuscule masquait les environs d’une toile d’ombres. En s’éveillant, un peu vaseuse, la jeune fille put sentir contre son dos une forme dure, chaude, un peu moite. Leur plan avait fonctionné à merveille, et la chaleur humaine les avait maintenu au chaud. La main serrée de Jorus pouvait en attester.

Ils se préparèrent donc pour le voyage du jour : traverser le Duché d’Orsan en une nuit, à travers ces paysages chaotiques et putrescents. Au milieu de ces montagnes de cadavres immondes, dépecés, difformes et puants. Ils marchèrent plusieurs heures dans cet enfer en suivant la piste qui les mènerait vers une sombre tour, dont les contours se détachaient au loin, de son aura sépulcrale dans le paysage morne.

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Ils en approchaient, inexorablement, lorsqu’un événement des plus déplaisant intervint et coupa leur progression. Des silhouettes animales grognantes naissaient sur les tas de cadavres alentours. Des silhouettes qui se rapprochaient de canins, de chiens, mais qui n’en avaient qu’un aspect lointain, si on les observait mieux. Car c’étaient de vrais monstres, immondes, à la chair torturée. Une peau nue, rosâtre, couturée de cicatrices affreuses, immenses. Des broches d’acier dépassaient de-ci de-là de leur abdomen ou de leurs membres. Leur tête ne semblait qu’un ramassi écrabouillé de chairs plissées, de peau ratatinée. Ils n’avaient pas d’yeux, mais semblaient toutefois conscients de leur présence. Bien conscients, même. Et ils grognaient, ils grognaient, dévoilant des dents acérées, longues, tranchantes comme des lames de rasoir, d’où s’écoulaient de longs filins de bave visqueuse. Apparemment, ils avaient l’air appétissants.

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Ils en dénombrèrent 6, pas moins, autour d’eux, prêts à bondir…

[HJ : Petite opportunité de combat libre, ici. Ce sont des adversaires coriaces, mais pas très malins. Ils vont vouloir vous défoncer pour vous manger, sans vous lâcher. Ils sont puissants musculairement et plus rapides que vous à la course. Je vous laisse décider de l’issue du combat, fuite par ruse, victoire, etc., ainsi que de la gravité de vos blessures. La màj se poursuit ensuite.]

Après ce combat acharné, les deux aventuriers parcoururent tant bien que mal la distance qui les séparaient de la Tour d’Orsan, dont ils gravirent les escaliers de pierre verdâtre, moussue, jusqu’à l’énorme porte, close…


[Ariane : / (rien pour l’instant, la situation sera notée dans son ensemble).
Endar : / (idem que pour Ariane). Gain d’une rune aléatoire pour le coup de cœur introspection.
Sibelle : 0,5 (discussion) + 0,5 (fouille et dodo). – Pourrais-tu mettre ta fiche en lien dans ta signature ? ^^
Kivan : 0,5 (don de gourde) (pareil que Ariane pour le reste). - Pourrais-tu actualiser ta signature ? ^^
Xël : 0,5 (discussion) + 0,5 (dodo).
Yurlungur : 0,5 (discussion) + 0,5 (camping).
Jorus : 0,5 (discussion) + 0,5 (camping).]
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Xël
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Xël » mar. 22 janv. 2019 19:57

Au final, l’exploration de cette grotte n’aura pas servi à grand-chose. Nous avons découvert ce qui s’y cache au fond, c’est vrai. Mais j’ai maintenant cette étrange sensation de devoir protéger cet orbe à tout prix. A quel prix justement ? Je ne pourrais pas en apprendre plus sans Simaya. D’ailleurs je me sens un peu vexé en repensant à elle. En essayant d’en découvrir plus sur cette grotte en utilisant ma magie je n’ai strictement rien découvert. Je m’étais cru au niveau de la sorcière d’Esseroth mais il est clair que j’en suis encore bien loin. Je ricane intérieurement en pensant au fait que je n’étais même pas à la cheville de n’importe quel mage d’Aliaénon. Je me débrouille mais je suis surtout un chanceux. Atteignant presque bredouille la surface, l’origine de ce voyage me revient en tête : Interroger le dragon noir. Dragon qu’on ne voit nulle part, pas plus que l’Humoran. Sirat n’est tout simplement plus là. En revanche, un dragon s’était bien posé ici et au vu de la taille des traces présentes devant l’entrée de la grotte, ça pouvait très bien être celui qu’on recherche. Une inquiétude commence à me pincer l’estomac. Avant de faire face à ce dragon, j’aurais admis que Sirat puisse se débrouiller en cas de problèmes mais maintenant que j’ai goûté d’assez près à son souffle ardent… Je sais que l’Humoran pourrait tout simplement être de la cendre sur lequel je pose les pieds ou alors un repas, un amuse-bouche pour le lézard volant. Sibelle s’éloigne un peu, scrutant le sol des yeux, probablement à la recherche de traces. Moi, je n’ai pas son sang-froid. Malgré ma crainte de revoir ce dragon de près, je ne peux pas juste continuer ma route sans savoir ce qu’il s’est passé ici. Si le dragon sait quelque chose sur la disparition de mon ami alors il va devoir parler. De toute façon, nous sommes venus ici pour l’interroger ce dragon. Sans même demander l’avis de Sibelle, je saisi mon appeau à dragon à ma ceinture, le porte à mes lèvres et y souffle aussi longtemps que ma respiration me le permet.

(Allez. Amène-toi trouduc’ qu’on discute un peu. ) Pensais-je en maîtrisant mes tremblements de peur et d’excitation.

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Ariane
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Ariane » mar. 22 janv. 2019 20:19

Comme nous venons de le jauger, le nouveau venu semble faire de même, nous… regardant tour à tour. Étrangement, malgré le manque de visage de l’être, j’ai l’impression de pouvoir tout de même deviner ses émotions comme si elles s’affichaient sur la face qu’il n’a pas. Le seul élément d’un visage humain, sa bouche, s’agite de nouveau, s’adressant à l’elfe noir.

Je suis un peu perdue par la liste de noms qu’il égraine, tentant de me souvenir des informations que m’a transmises Yurlungur. Le Conseil d’Or est à l’origine de la mission pour retrouver Naral, l’elfe à la chevelure rose. Le mot Nagorin ne me dit par contre rien. Mes réflexions sont alors interrompues par… le regard de la créature. Il a beau avoir un trou béant là où je devrais trouver ses yeux, je le sens m’observer bien plus que ce qu’un simple regard pourrait faire. Pendant un bref instant, j’ai l’impression d’être nue face à lui et même au-delà de mon corps, j’ai la sensation que mon esprit et mes pensées lui sont accessibles. Qui est-il donc ? !

S’exécutant poliment, l’être se présente, précisant qu’il peut changer d’aspect, du moins est-ce ainsi que je le comprends. J’essaye de retenir tous les titres qu’il me donne, aucun ne se rapprochant des noms que l’enfant m’a donné, à moins que je n’en ai oublié devant le flot d’informations que je dois engranger depuis hier.

Les gémissements du Shaakt agrippent un instant mon attention et sachant que Al-Ayrad, lui, ne quitte pas l’étranger des yeux, je me tourne quelques secondes pour voir Kìvan donner à boire à Endar. Il utilise la gourde que j’ai proposé il y a quelques heures. Son contenu semble avoir un réel effet, le sortant de sa léthargie. Me retenant de lever les yeux au ciel, je marmonne assez haut pour que tout le monde m’entende.

"S’il avait commencé par accepter la gourde, nous ne nous serions peut-être pas jeté ainsi sur la route..."

Entendant que l’inconnu peut soigner Endar, je ne peux empêcher une part de moi d’être soulagée, j’aurai au moins rempli mon devoir de soldat. Lorsqu’il enchaîne en disant qu’il peut également nous emmener à Orsan, je regarde Al-Ayrad et lui transmet un résumé de ce qu’il se passe, lui expliquant surtout les propositions du nouveau venu.

(Mon ami, je suis perdue sur ce monde. Qui croire, qui suivre ?)

Le lion, comprenant qu’un hypothétique danger paraît écarté, s’assoit tranquillement.

(Il semble être le premier que l’on croise avec autant de connaissances sur Aliaénon, peut-être a-t-il des réponses ?)

Al a raison, si Elurien ne m'a rien appris, peut-être que celui qu'ils nomment le Marcheur de Mort pourra éclairer ma lanterne.

"Oui, c’était notre destination avant cet imprévu." Dis-je en montrant le corps brisé du Shaakt. "Messire je suis un grain de sable emporté par le courant, vous semblez planer au-dessus et savoir où il va."

J’ai tellement d’interrogations que je ne sais laquelle choisir en premier et décide de juste exposer ma situation pour répondre à la question de l'Unique.

"Pour ma part, les gens d’Elscar’Olth ont sous-entendu que mon destin se trouvait à Orsan. Et, curieuse ou stupide, je m’exécute. D’autres m’ont dit que nous y trouverions peut-être Naral, qui je crois est recherché par le Conseil d’Or. J’ai cru comprendre que son retour faciliterait les transports sur Aliaénon. Je ne cherche qu’à rejoindre mon monde, Yuimen."

Voilà, les cartes sont posées. Je laisse à Kìvan le soin d’en dire plus sur leur mission s’il le souhaite et écoute la tirade que Vâkkar Ti adresse au Shaakt, serrant les mâchoires au nom de Vallel. Les dires du semi-elfe se confirme, Endar doit être aux côtés d’Oaxaca. Pourquoi suis-je en train d'essayer de sauver sa peau ?

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Kívan
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Kívan » mer. 23 janv. 2019 16:34

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L’inconnu au visage absent nous dévisage à tout de rôle de son absence de regard, me faisant légèrement frissonner lorsqu’il se tourne vers moi. Il considère ensuite Endar, et semble embarrassé par les paroles du shaakt. Il se défend alors contre les paroles accusatrices de l’elfe noir, se jugeant être le plus honnête sur Aliaénon. S’il fait mention du Conseil d’Or que je peux identifier comme le commanditaire de la mission qui justifie ma venue sur ce monde, je ne connais ni Nagorin, ni le Dragon Mauve. Je remarque juste qu’il s’agit de la énième personne à se juger digne de confiance sur ce monde. Le seul fait qu’Endar ne lui fasse justement pas confiance me pousserait presque à le considérer comme un allié, mais prudence est mère de sûreté... Je pense qu’il me faudra encore un peu de temps avant de croire sur parole cet individu peu engageant…

Il se tourne ensuite vers Ariane, qui est pour l’instant la seule personne rencontrée en ce monde que je peux considérer comme une alliée, et nous révèle enfin son nom. Ou plutôt les différentes appellations sous lesquelles il est connu, confirmant par la même occasion ma suspicion : nous nous trouvons face au fameux Sans-Visage dont tout le monde parle depuis mon arrivée sur Aliaénon. Mon regard se tourne à nouveau vers Endar qui est en train de boire avec difficulté à sa gourde que je tiens pour l’aider. Sa déglutition s’arrête indiquant qu’il semble avoir arrêter de boire. Je referme alors le récipient et le range dans les affaires de l’elfe. Son visage semble avoir repris des couleurs, s’il est possible de le dire pour un shaakt, mais il faudra quoiqu’il arrive des soins plus intensifs pour améliorer son état général.

Je me redresse et fais face au Sans-Visage, les bras croisés, lorsque celui-ci s’adresse à moi pour répondre à ma question. Si son apparence ne me marque désormais plus autant qu’il y a quelques minutes, son absence d’yeux fait qu’il est difficile pour moi de fixer un point sur son visage, qui consiste réellement en un trou béant, et qu’il est par la même occasion difficile de « lire » et d’évaluer les intentions et émotions de cette entité. Il me répond alors qu’il lui est possible de soigner notre blessé et nous transporter par la même occasion à la Tour d’Orsan qui était notre première destination, nous demandant par la même occasion qu’elles peuvent être nos attentes quant à ce lieu. Si la proposition de soigner Endar semble être premièrement intéressante, le Sans-Visage se rapproche de l’intéressé et précise sa pensée, offrant à l’elfe noir de troquer son corps contre l’un d’une des expériences de Vallel. Ce marché me fait froncer les sourcils et serrer les poings, n’aimant pas la mention de l’un des valets de la fille de Thimoros. Dans quel camp joue notre interlocuteur ?

Ariane est plus rapide que moi et, après une remarque destinée à Endar, elle confirme à l’entité notre destination, indiquant qu’elle y trouve des raisons personnelles en plus de la potentielle chance d’y trouver Naral Shaam. Une fois que celle-ci a donné sa réponse je m’adresse à mon tour au Sans-Visage.

« Comme vous l’a précisé ma coéquipière, nous sommes effectivement à la recherche du dénommé Naral Shaam. L’une de nos pistes se trouve être la Tour d’Orsan vers laquelle nous nous dirigions avant que survienne un événement fâcheux pour notre groupe… »

Je jette un coup d’œil vers Endar, essayant de me souvenir que c’est par son sacrifice que nous sommes encore vivants à cette heure.

« En savez vous plus concernant cet être recherché ? L’avez-vous aperçu récemment ? Car si nous pouvions éviter un passage par la Tour, je ne m’en porterai pas plus mal après avoir appris ce qu’il s’y tramait… »

Je penche à nouveau la tête vers Endar, lui adressant cette fois spécifiquement la parole, profitant de sa position de faiblesse.

« Je pense que vous connaissez très bien notre avis concernant l’offre qui vous a été faite et, même si nous vous devons la vie et si nous devons pour le moment collaborer, tachez de ne pas vous rendre plus détestable que vous ne l’êtes déjà… »

Mes yeux basculent à nouveau vers le nouvel arrivant, l’évaluant à nouveau du regard. Ma décision est de toute façon prise. Au vu des pouvoirs que semble posséder le San-Visage, capable de jouer sur la Vie et la Mort d’après ses dires, il semble parfaitement correspondre à l’entité que je cherche. Et s’il faut que je le suive jusqu’à Orsan pour continuer à en apprendre plus à son égard, alors cela sera ma prochaine destination.

Modifié en dernier par Kívan le ven. 1 févr. 2019 19:42, modifié 1 fois.

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Endar
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Endar » jeu. 24 janv. 2019 11:19

L'Unique les observe avec une attention toute particulière, Endar sent sur lui son regard inquisiteur mais n'en a cure dans son état présent. Il se sait mourir alors que sa dernière pique touche plus profondément qu'il ne l'aurait cru le Sans Visage. La trahison, voilà un point qu'il ne semblait digérer. Son laïus sur le Conseil d'Or, les Illuminés de Nagorin et Naral Shaam ne font que prouver son aveuglement face aux conséquences de son inaction. Il égrène les différents noms que les peuples lui donnaient avant d'attaquer de nouveau le Conseil d'Or, il ne savait si sa création l'énervait ou l'effrayait e nréalité. Puissant qu'il était, il n'est plus la seule entité toute puissante parcourant les terres d'Aliaénon. Les Titans l'avaient remplacé, vénérés à présent par les Ouessiens ou tout du moins ceux résidant à Nagorin.

C'est à ce moment là que le semi-elfe prit la peine de lui faire boire sa gourde, et Endar sentit le doux fluide réparer lentement son corps, le tirant in-extremis des griffes de la mort. La lueur de vie dans ses yeux prit plus d'ampleur et le voile qui cachait auparavant sa vision disparut aussi rapidement qu'il était venu. La fièvre s'était au fur et à mesure atténuée au fil de la conversation que les trois compères engageaient depuis un petit moment. Le Marcheur de mort s'adressa à eux de nouveau leur proposant de les amener à Orsan et surtout de le remettre sur pieds, l'offre était alléchante et alors que la peur de mourir s'estompait, l'entité se pencha vers lui pour lui proposer un marché des plus intéressants. L'idée d'obtenir un corps façonné par Vallel et ses sbires pour ensuite le retourner contre son créateur ne manquait pas d'intérêt et le shaakt commençait par avance à apprécier l'ironie de la situation. Cet état de liesse prit toutefois fin lorsque Kivan s'adressa à lui tout particulièrement peu satisfait de l'offre qui lui était faite et l'avertissant que même si son sacrifice les avait sauvé, leur collaboration n'était cependant que temporaire.

Endar cligna à peine des yeux en l'écoutant, songeant qu'il ne comptait guère s'allier plus longtemps à un être ayant des fluides lumineux en lui. Un être de Gaïa ne pouvait être qu'un ennemi d'un champion de Thimoros et ni l'un ni l'autre ne semblait dupe de la portée et de la durée d'une telle alliance.
S'humectant les lèvres, il se décida de répondre aux interrogations de l'entité passant pour une divinité pour certains peuples d'Aliaénon, mais avant cela, il railla ses alliés de circonstance corrompus par leur bonne conscience.

- Vous êtes des enfants bien innocents faisant confiance à une entité capable de tous annihiler sans se poser la moindre question, mais se méfiant de chacune de mes actions. Je savoure l'ironie de la situation. Vous ignorez tout de ce monde ni même la véritable raison de votre présence. L'être qui ose se faire appeler le Dragon Mauve n'est rien d'autre que Naral Shaam lui-même qui a éveillé les Titans, les ennemis de cette entité, et qui a massacré nombre d'innocents sous les ordres de Vallel. A côté d'eux je passe pour un saint…

Le shaakt utilisait à nouveau à bon escient sa plus puissante arme: sa parole. Rien que d'imaginer ce qu'ils allaient ressentir en prenant conscience qu'ils cherchaient un meurtrier le rendait extatique.
Posant à nouveau son regard sur le Sans Visage, bien qu'il était difficile de soutenir le regard très longtemps du fait du trou béant qui remplaçait son visage, il finit par consentir à lui répondre.

- J'espérais que l'odeur de ma mort prochaine t'attire jusqu'à moi. Nous avons beaucoup à discuter quant à l'avenir de ce monde.

Se raclant la gorge non pour se donner contenance mais pour recouvrer sa voix, il poursuivit sur sa lancée.

- Ton inaction est ta traîtrise, ce n'est pas un jugement de valeur simplement un constat que je fais. Tu as laissé tomber les peuples qui te vénéraient. Les Ouessiens, tes plus loyaux fidèles se sont retournés contre toi et ont emprisonné ton alter-ego l'Unique. Tu as certes construit Nagorin, mais tu as laissé leur peuple mourir à Ouesseort. Leur cité a été détruite comme celle des elfes, Hoto-Huss, et ces derniers ont dû se réfugier dans une forêt peuplée de créatures dangereuses. A Nagorin lorsque Naral a massacré avec plaisir les ouessiens, tu as déserté le temple dans lequel gisait ta prêtresse. Je l'ai relevé et aidé. Cela n'a pas été ton cas.

Le shaakt avait une longue expérience des insultes, des traîtises et des marchanges en tout genre et il ne comptait pas laisser l'entité prendre l'ascendent sur sa personne en proposant une offre aussi alléchante.

- Ton champion autoproclamé, Sirat Ybelinor, a causé plus de destruction que ma propre personne, au lieu de m'aider à vaincre Vallel en le trahissant à son tour, il s'est allié avec lui jusqu'à la toute fin. Nous aurions pu éviter l'éveil des Titans, mais ton champion s'est opposé à moi. Je n'ai nulle sympathie ni pour Vallel ni pour Naral. Le Dragon Mauve est le pire des deux en cherchant à s'accaparer du pouvoir des Titans à ses fins personnels. Le Conseil d'Or a peur et Naral s'est servi de cette peur pour les manipuler, mais nous pouvons toujours les guider pour réparer nos torts.

Même s'il était dans un piteux état, Endar retrouvait toute sa prestance d'autrefois et comptait bien mener cette conversation à son avantage.

- Tu te doutes bien du choix que je vais faire, ce n'est pas la première fois que tu m'épies je pense. Avant de le prononcer expressément, laisse moi faire preuve d'honnêté même si ce mot écorche ma bouche. Tu ne crains rien personnellement mais tes fidèles si. Je peux les protéger si tel est ton désir, tuer les Chevaliers d'Or sans avoir le moindre scrupule. La seule contrepartie que je te demande c'est de laisser les Ouessiens vivre leur vie et ne pas déclencher une guerre avec les Titans au risque de détruire ce monde et tout ceux qui le peuplent. Si je convaincs les ouessiens du bienfondé de mes actions, que je me débarasse de Naral au moment opportun alors nous pourrons discuter d'un nouvel équilibre du monde. Cela ne sera pas l'équilibre que tu imposais jadis, ni le nouveau que veut imposer Naral mais un équilibre où tous les peuples pourront s'épanouir. Pour cela, je désire prendre possession d'un corps façonné par mon vieil ami Vallel.

Lorsqu'il prononça son nom, son visage exprimait tout le mépris qu'il avait pour l'agent d'Oaxaca, montrant clairement qu'il n'y avait aucun lien amical entre les deux. Ils se détestaient à l'origine, Endar doutait fortemment que l'eau ait coulé sous les ponts depuis tout ce temps.

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Sibelle
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Sibelle » ven. 25 janv. 2019 12:54

Les terres de cette région d’Aliaénon s’avéraient très hostiles. Aucune végétation ne couvrait ce sol et avec raison puisqu’aucune terre meuble ne s’y trouvait. Seuls des pics rocheux, de la pierre calcinée et des cendres constituaient ce triste paysage.

Décidée à retrouver le têtu humoran, Sibelle scruta scrupuleusement le sol poussiéreux afin d’y trouver des indices de son passage . En commençant près de l’entrée tout en s’éloignant progressivement, elle vit assez rapidement d’énormes empreintes de pattes qui ne pouvaient correspondre qu’à celles d’un dragon. Un peu encouragée, mais paradoxalement inquiète, elle poursuivit son inspection, en vain. Il ne vit aucune trace de l’humoran, pas même un poil de la dense fourrure orangée.

Persévérante, mais également très têtue, elle s’éloigna davantage dans l’espoir de retrouver la trace de son compagnon. Le sol étant inégal, il pourrait se trouver à quelques mètres de là, blessé ou endormi et dissimulé derrière un pic rocheux. Ce fut donc avec application qu’elle poursuivit son exploration s’éloignant davantage de l’entrée de la grotte, contournant les obstacles rocheux. Elle finit par voir d’autres empreintes, mais à moitié effacées, de deux dragons différents. La guerrière en conclut qu’il s’agissait sans doute de celles laissées par le dragon noir et celui d’or lors de leur altercation en début de journée.

Lorsque Sibelle leva enfin sa tête en direction du mage, elle se rendit compte qu’elle s’était éloignée de lui de plusieurs centaines de mètres. Plissant les yeux, elle se surprit de pouvoir distinguer précisément les expressions et les moindres détails de son visage et ce malgré l’importante distance qui les séparait.

Puis, elle vit avec horreur le naïf mage sortir un sifflet de sa besace. Elle n’avait aucun doute sur la nature de l’objet, il s’agissait sans s’y tromper d’un appeau à dragon. Ce petit instrument leur avait été offert un peu plus tôt afin de leur permettre d’appeler le dragon d’or. Par contre, ce sifflet n’était pas exclusif à un seul dragon. Et Sibelle craignait que si le Xël l’utilisait, que le dragon noir, cet être hostile, apparaîtrait.

Ce fut donc au pas de course que Sibelle décolla en direction de son compagnon tout en lui criant : « Non »
Elle aurait voulu être aussi rapide que le cheval afin de rejoindre le mage et l’arrêter avant qu’il fasse l’irréparable. Et puis, progressivement, sans cesser de courir, elle sentit les muscles de ses jambes se gonfler et sa puissance augmenter. Elle perçut de forts picotements derrières les omoplates, et enfin son rêve lui revint en mémoire et lorsqu’elle comprit ce qui lui arrivait, elle était transformée, non pas en dragon, ni en harpie, mais en magnifique hypogriffe à la robe rousse parsemée de rémiges bleues.

Elle n’avait pas rejoint Xël, mais voler plutôt en rase motte au-dessus de sa tête, l’évitant de peu. Elle n’avait pas pu empêcher le mage de porter l’appeau à sa bouche et de souffler dedans.

Enivrée par la sensation de légèreté et de liberté que lui procurait cette escapade dans les airs, elle en oublia le danger de parcourir ainsi le territoire du dragon. Tout de même prudente, elle se contenta de tourner en rond, ajustant ses ailes.

Puis lorsqu’elle se décida à retourner sur le terrain des vaches, elle piqua un peu trop rapidement, et termina son atterrissage par une chute non contrôlée, sans heureusement se blesser.
Modifié en dernier par Sibelle le mer. 30 janv. 2019 00:32, modifié 3 fois.

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Jorus Kayne
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Jorus Kayne » ven. 25 janv. 2019 21:09

Nous nous réveillons finalement. Ce n’est certainement pas ma meilleure nuit sur Aliaénon, mais au moins nous sommes en vie sans l’ombre d’une menace planant sur nous. Le campement sommaire facilite notre départ. Un peu d’eau et de quoi manger et nous sommes de nouveau sur le chemin pour Orsan. J’ignore combien de temps nous avons passé à errer sur cette…route, vais-je dire. Tout ici n’est que mort et désolation et ce n’est pas le paysage local qui me fera changer d’avis. Finalement, après une énième et longue marche, la silhouette d’une montagne non, d’une tour se détache de l’horizon. J’ignore si c’est bien notre destination finale, mais cela me réconforte dans l’idée que tout n’aura pas été vain et puis, nous sommes indemne !

Ce n’est que peu de temps après que je regrette cette pensée. Si au début j’émets intérieurement la possibilité de voir des chiens errants chercher de quoi se nourrir, je comprends bien vite que je n’ai qu’en partie raison. Ce ne sont clairement pas des chiens, au mieux ça y ressemble. Cependant il semble évident qu’au long filet de bave qu’ils affichent, leur du repas est sonné. Ces animaux possèdent des caractéristiques qui leurs sont propres : une peau rose recouverte de cicatrices comme si on les avait dépecés et rafistolé par la suite avec des broches d’acier, ainsi qu’une tête principalement composée de plie de chair. La rencontre promettait d’être mouvementée.

L’assaut est lancé tandis que moi je dégaine ma dague de glace. Les six canidés courent jusqu’à nous, la gueule grande ouverte. La force qu’ils déploient en chargeant démontre qu’ils possèdent éventuellement la capacité de nous arracher les membres s’ils venaient à nous nous mordre. Je suis fou, mais mon instinct me pousse à aller à leur rencontre. En me calant sur leur rythme de vitesse je saute au-dessus d’eux en pivotant afin de me réceptionner le danger en face. Je ne fais pas vraiment attention à Yurlungur, mais elle parvient elle aussi à éviter la charge. Dans la gourmandise d’un bon gueuleton, ces…choses…ont pris trop d’élan et s’emmêlent les pattes pour faire demi-tour. Ca me laisse le temps de saisir mon boomerang et de leur lancer. L’arme de jet décrit une belle courbe et atteint l’un d’eux. Malheureusement, la lame ne s’enfonce que peu dans la chair.

(Il faudrait que je l’affûte. Dommage, je n’aurais pas été contre une tête ou même une patte en moins.)

Les molosses reviennent à la charge, toutes dents dehors. Dans ces circonstances je n’ai aucune chance de fuite, et encore moins à me battre frontalement. Souvent il m’est arrivé d’utiliser l’environnement alentour, mais que faire de tas de cadavres putréfiés ? Bien que n’ayant pas de réponse je fonce que le tas mortuaire le plus proche, rapidement suivi par trois d’entre eux. Une position plus élevée m’offrira peut-être un avantage et ma capacité à escalader me laissera le temps de réfléchir avant qu’ils n’arrivent sur moi. Le…sol…n’est pas des plus stable, mais j’ai connu plus ardu en haut des mâts. Techniquement l’idée n’est pas mauvaise, le problème est que j’ai oublié qu’ils sont pourvus de quatre membres ce qui les rend plus stables et compense leur manque d’agilité sur ce terrain si particulier. L’un d’eux est déjà sur moi. Je n’ai que le temps d’attraper quelque chose à mes pieds de la main gauche et le tire dans un bruit de sucions visqueux juste répugnant. Je fais mine de sauter de nouveau et lance à la place nouveau bras droit au-dessus de la bête.

"Allez va chercher !"

Ce n’est que là que je m’aperçois qu’ils sont dépourvus d’œil. Croyant m’attraper, la créature saute en l’air et dévoile sa poitrine. Je frappe de toutes mes forces à l’aide de ma dague de glace. Le coup aurait pu être fatal si je n’avais pas perdu mon équilibre dans ma hâte. Je laisse néanmoins une jolie blessure et tombe en avant sur la bête qui fait de même en arrière. Non loin, les deux autres sont déjà prêts à ma sauter à la gorge. Je fais donc la seule chose qui me reste à faire : je saute dans le vide. J’use de toute ma force pour me projeter tandis que les deux autres molosses font de même. La mâchoire de celui de gauche fait plus que me frôler et me plante plusieurs de ses dents dans le mollet. Heureusement pour moi il ne parvient pas à fermer la gueule sur ma jambe et je poursuis ma chute. J’atteins rapidement de bas de cette colline et me penche sur le côté dans le but de me laisser porter par la pente et réduire ainsi le choc. Je tourne sur moi-même quelques mètres plus loin et tente de reprendre mes esprits avec ce tournis qui me suit. Les deux monstres encore intactes reprennent leur poursuite et dévalent rapidement la montagne morbide.

L’un d’eux se précipite trop et s’emmêle dans la multitude de corps pourrissants tandis que son compère se rue sur moi. Je n’ai que le temps de saisir mon shoge de la main gauche. Au tout dernier moment je m’aide de mon ki afin de m’extraire de la charge en bondissant sur la droite. Aveugle, la bête réagit trop tard et tente en vain de tourner la tête dans ma direction et claque ses dents dans le vide. Mon grappin en revanche vient faucher la bête dans à la base de la mâchoire et je tire d’un coup sec, arrachant une bonne partie de chair dans une giclure de sang.

(Et de un !)

Je n’ai pas le temps de voir le second arriver qu’il me percute de plein fouet et me projette au loin. Je me relève aussi vite que possible pour voir la bête attaquer de nouveau. Bien qu’aveugle, il sent le froid de mon arme et la menace de ma dague parvient à le tenir à distance. Le sang qui ruisselle sur ses pattes avant me démontre être celui que j’ai déjà frappée. Le canidé tente un bond dans la direction, mais je me décale in extremis et frappe mon opposant un poil trop tard. Le monstre à quatre pattes réitère son attaque, mais cette fois-ci il parvient à me prendre de court en sautant plus haut. Au lieu de chercher à me mordre, il se dresse sur ses pattes postérieures et use de ses membres avant pour me griffer au bras droit. Je suis obligé de reculer face à la brutalité dont il fait preuve et malheureusement pour moi il est rejoint par celui tombé en redescendent trop rapidement. Je parviens avec difficulté à tenir à distance mes opposants en faisant tourner mon grappin. Les assauts continuent, bien que celui que j’ai blessé à la poitrine commence à montrer des signes de fatigue. Désespéré, sa charge manque de force et m’offre une ouverture à saisir. Je me déplace de sorte à placer celui-ci entre moi et son dernier compère. Le forçant à craindre ma dague, je le frappe avec le grappin au niveau de la nuque et tire sur la corde pour m’offrir la chance de lui transpercer le coup.

(Et de deux !)

L’absence de sang et de force le fait lentement tomber au sol, c’est l’opportunité que prend le dernier encore debout. Il bondit jusqu’à et ne pouvant retirer mon grappin, je suis obligé de lâcher prise. Je multiplie les sauts défensifs contre les assauts de la bête. Je recule de plus en plus, ne prenant pas le temps de regarder derrière moi. Fatalement je finis par marcher sur quelque chose qui me fait perdre ma stabilité et me fait choir en arrière. Le monstre profite de l’occasion pour bondir sur moi les crocs bien ouverts et je ne dois mon salue temporaire qu’à un bras que je parviens à saisir et placer dans sa gueule. Je ne gagne qu’à peine le temps de reprendre mon souffle. Le molosse brise le membre déjà mort comme un vulgaire bout de bois sec et s’en vient planter ses crocs dans mon avant bras, placé au dernier moment afin de sauvegarder ce si doux visage qu’est le mien. Malheureusement l’armure ne semble là que pour faire décoration. Les crocs se plantent rageusement dans le brassard de cuir et pénètrent dans la chair. Je hurle à m’en faire mal à la gorge tant la douleur est atroce. Pire que cela, j’ai droit à un relent d’haleine fétide en plein visage. Tant bien que mal je surmonte ces deux agressions physiques et agrippe fermement le manche de ma dague. D’un coup rageur je plante une première fois la lame dans sa gorge. Le sang qui pénètre dans sa gueule doit l’exciter car il essaye de secouer la gueule pour accentuer la blessure. Mon arme vient de nouveau l’atteindre et cette fois-ci dans la mâchoire et diminue la prise qu’il a sur moi. Je multiplie les coups à la tête jusqu’à ce que sa gueule ne ressemble plus qu’à une vieille pomme trouée par les vers et son corps finit par se laisser tomber sur moi, me pesant de toute sa masse.

Malgré les blessures je m’apprête à savourer ma victoire. Cependant un bruit vient me rappeler la situation où je suis. Un grognement profond atteint mes oreilles. Une colère, mêlée d’une soif de sang que je ressens sans peine. Le premier, dont je pensais lui avoir arraché la tête, se dresse sur ses quatre pattes et me fixe un moment qui me semble une éternité. Sa gueule, arrachée en partie, ne lui apporte guère plus de charme que la moitié de sa mâchoire qui pend. J’essaye de repousser le monstre sur moi, mais son poids et ma blessure à la main gauche m’empêche de recouvrer ma liberté. Ainsi emprisonné, je n’ai aucune résistance à lui opposer et avec sa gueule ainsi ouverte, il va mettre un moment avant de pouvoir m’achever. Une longue agonie m’attend et c’est lentement que le monstre s’avance vers moi, comme s’il savourait chaque instant avant de saisir sa proie complètement à sa merci.

Ma rédemption vient de Yurlungur. Elle arrive de nulle part et se lance sur la bête comme on dresse un cheval sauvage. Un rodéo s'en suivi où la jeune fille parvient à rester en place grâce aux broches de métal disposées sur un côté tandis que de son autre main elle multiplie les coups de dague à la nuque et la tête jusqu'à ce que la bête s'effondre. Rapidement, elle arrive auprès de moi et entreprend de pousser le corps de l’animal qui m’empêche de me relever. La masse pesante qui s’écarte de moi me libère d’un poids lorsqu’une nouvelle menace arrive et je préviens rapidement la jeune fille.

"Attention derrière toi !"

Une énième créature venait de faire son apparition. Moi qui pensais que ma sauveuse était parvenue à terrasser les trois autres bêtes, l’une d’entre elle a survécu et attaque d’un coup de croc. Yurlungur réagit trop tard. La bête ferme la gueule sur la jeune fille et…et rien. Les dents de la bête claquent à l’intérieur de son adversaire qui s’extrait sans difficulté ni blessure apparente. Elle tombe sur moi, visiblement aussi surprise que je le suis et porte de multiples coups de pieds pour désorienter le molosse. La jeune fille se relève et adopte une posture de face, une attitude de guerrière qui contraste avec son style plus fluide. Il est clair qu’elle se met volontairement sur le chemin entre la bête et moi. Aussi vite qu’il m’est possible, je roule en arrière et me place juste derrière le monstre qui était affalé sur moi peu de temps auparavant. Tandis que je rapproche mon bras meurtrie contre moi, je serre le manche de ma dague si le dernier de ces salopards venait à me prendre pour cible. Même si dans mon état il me sera difficile de faire face, je ne mourrais pas en fuyant. Reprenant mon souffle, je remercie ma sauveuse.

"Merci, je vais mieux. Tues cette saloperie et je t’invite à notre prochain repas !"

Une brève réponse à peine audible à mon égard et Yurlungur disparaît dans les ombres pour réapparaître derrière son adversaire, comme durant notre combat avec la créature de lave. Cependant en agissant de la sorte, la bête me fait face et me prend pour cible. Alors qu’elle s’avance vers moi, la jeune fille profite de sa position pour frapper au mollet. Le molosse devient incapable de se mouvoir correctement. Le train arrière pris de spasme et j’en déduis que ce n’est pas sa première blessure de la sorte. Elle vient jusqu’à moi, évitant sans problème un coup de crocs aussi désespéré qu’inutile et me propose de l’achever si je le désire. Je sens dans le ton de sa voix une sorte de mise au défi. Savoir comment je m’occuperais de la bête dans ces circonstances. J’ai failli mourir à cause de ces saloperies, alors il est tout à fait normal de les achever, même si ce faisant, je lui permets d’éviter une longue agonie qu’elle mérite. J’avance jusqu’à la bête, et inverse l’orientation de ma dague dans ma main. J’accélère soudainement avant de l'atteindre et effectue un salto avant, hors de portée des crocs du monstre. J’arrive derrière cette dernière et alors qu’elle peine à tourner pour me faire face, je frappe en biais de haut en bas et l’atteint à la base du cou, la lame remontant dans son crâne. Ainsi le dernier est tombé.

Je préfère quitter ce lieu au plus vite. Je ramasse mes armes et laisse le soin à la jeune fille de prendre les devants pendant que je bois l’une de mes potions. Je mange un bout ne sachant pas si nous aurons à nouveau de la visite imprévue et fait passer le tout avec une rasade d’eau. Le chemin jusqu’à l’édifice me semble long, même s’il me semble si proche. Néanmoins, je remercie le destin de ne pas avoir découvert d’autres formes de vie. Les escaliers verts de mousse m’indiquent qu’il n’y a pas eu beaucoup de passage ces derniers temps, mais dans un monde où des êtres se transforment en dragon volant, puis-je vraiment me fier à cela ? Nous arrivons finalement à la base de la tour. Si c’est Orsan, il ne semble pas y avoir d’écriteau.

(Chez Orsan, la meilleure bière d’Aliaénon !)

C’est trop beau pour être ne serais-ce être possible. La porte est close et je ne me vois pas vraiment toquer pour entrer. Je ne suis guère en état pour gravir la tour, mais avons-nous le choix ? Je vais avoir besoin d’un coup de pouce pour l’ascension. Je m’attache avec la corde et laisse un bon mètre de moue jusqu’au grappin. Celui-ci va compenser ma faiblesse en s’accrochant dans les failles qui s’offriront à moi. J’entreprends d’escalader le mur en assurant chacune des prises quitte à prendre plus de temps que nécessaire.
Bilan du combat :
-1 blessure grave au bras gauche.
-1 blessure légère à la jambe gauche.
-1 blessure légère au bras droit.
-1 estafilade bénigne au torse.

A la tour, je tente de gravir le mur avec mon grappin et m'attache avec la corde pour m'assurer une sécurité.
Capa RP : escalade et tolérance à la douleur.
Modifié en dernier par Jorus Kayne le sam. 26 janv. 2019 05:17, modifié 1 fois.

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Yurlungur
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Yurlungur » ven. 25 janv. 2019 22:48

...

Jorus avait-il simplement oublié de la réveiller pour prendre son tour de garde ? Quoiqu'il en soit, lorsque Yurlungur se réveilla, il faisait déjà trop sombre pour que ce soit encore la journée, même en pleine Lande noire. L'esprit encore embourbé dans la fange d'un sommeil crispé, comme tous ceux qu'elle avait connus depuis qu'elle parcourait ce désert noir, elle sentit néanmoins dans son dos une forme dure et entendait nettement le souffle de Jorus. Son sang se glaça à l'idée de ce que cette chose pouvait être qui se frottait contre elle, chaude et élancée. Le souvenir de l'accueil de la Trinité, à Arothiir, lui revint en mémoire et relativisa un temps la situation pour qu'elle daigne s'écarter un peu, se retourner et constater la main de Jorus serrée.

En réveillant le jeune homme, l'excuse pour sa mauvaise humeur empreinte d'une certaine gêne était naturellement qu'il avait oublié de la réveiller pour son tour de garde, ce qui somme toute n'était rien. En fait, la gravité de l'oubli avait été complètement éclipsé par le besoin flagrant de sommeil de la jeune fille et cet événement... particulier au matin. Elle préférait ne pas y penser.

Bien sûr, elle avait déjà vu des hommes excités. Elle savait que c'était normal : quiconque sait se faufiler et passer inaperçu peut tout à fait se gausser des ébats si peu naturels dans les bordels de Dahràm... mais là, c'était quand même autre chose. De toute façon, le sexe, à ses yeux, c'était bon pour les putains ou pour les mariés, du moins pour son propre sexe : il n'y avait guère d'autre raison pour coucher avec un homme. L'idée en elle-même était répugnante, comme si elle avait voulu frotter ses parties intimes contre les siennes... Non, décidément, c'était un loisir qu'elle préférait s'éviter, autant que possible, incapable de saisir pourquoi les grandes personnes affectionnaient tant cela. Elle ne comptait pas se marier et être soumise à quelqu'un d'autre qu'elle-même : et quant à la possibilité de vendre son corps, elle méprisait secrètement ceux qui avaient embrassé cette voie, justement parce qu'elle était si fréquente à Dahràm et qu'elle-même avait réussi à s'extirper de cette morne destinée.

Ils reprirent la route au milieu des cadavres. Yurlungur, l'esprit passablement dérangé par ses dernières réflexions, essayait de comprendre comment certains individus pouvaient apprécier le coït avec d'autres races humanoïdes, telles des Garzoks, des Sinaris ou même des Thorkins. S'il y avait bien quelque chose de répugnant, c'était ça : et les corps verdâtres qui reposaient çà et là, donnant une bien piètre image du physique de leurs races respectives, achevaient de la dégoûter de tout ce qui pouvait se ramener à ce mot si sensible et si méprisé qu'était le sexe.

Bien sûr, elle désirait à moitié connaître ça, tout comme elle regardait les bouteilles de rhum des bars, réservés aux fiers marins, avec une envie paradoxale, mêlée de dégoût de tous les effets que ces choses-là pouvaient induire. C'était une fascination perverse, comme si elle sentait qu'on lui cachait quelque chose. Était-ce seulement possible que tant de personnes soient à ce point obnubilées par le sexe et qu'il soit en même temps si repoussant ? Face à ses propres règles morales, édictées selon le mépris qu'elle accordait à telle ou telle occupation, son inconscient s'élevait en rebelle de l'ombre, la poussant à toujours cultiver des idées là-dessus, à chercher dans son imagination qui, à mesure qu'elles se faisaient plus répugnantes pour sa chaste âme effarouchée, n'en devenaient que plus marquantes et plus récurrentes à se présenter à son esprit.

Au loin, une longue forme élancée finit par se dresser, émergeant sombrement de l'obscurité qui régnait en ces lieux. L'image d'un phallus dressé disparut promptement de l'esprit de l'adolescente, qui tentait autant que possible de ne pas croiser le regard de Jorus, ni même de penser à lui. Il n'existait plus, tout comme ces réflexions absurdes : et pourtant l'ensemble revenait sans cesse, s'imposant à elle en vérité monolithique qu'elle refusait de reconnaître, que c'était tout ce qu'elle désirait – et aussitôt l'idée disparaissait face à la répression terrible contre ce genre de pensées si peu morales.

Au fur et à mesure qu'ils s'approchaient, le jour commençait à poindre à l'horizon, éclairant faiblement la tour et les volutes de brouillard qui dansaient autour d'elle tels des spectres maudits. La nuit fuyait, et avec elle toute ces formes imaginées qui profitaient des ombres pour se rendre plus dégoûtantes, plus grandes et... plus grosses. Avec la lumière du jour, c'était comme une forme de raison nouvelle qui venait aider l'assassine à se recentrer sur son environnement direct : et c'était finalement bien nécessaire.

Car il commençait à y avoir des formes qui bougeaient dans les ombres. Des animaux de la taille de chiens s'approchaient petit à petit, se dévoilant aux yeux des deux téméraires aventuriers qui avaient osé pénétrer sur leur domaine. Yurlungur, consciente que Jorus observait lui aussi avec un intérêt marqué ces nouveaux adversaires qui se présentaient, se sentait envahir d'un calme nouveau. Cette situation était tellement plus facile à gérer que d'affronter sa propre imagination.

Elle en comptait six. L'obscurité qui se retirait lentement ne semblait pas souhaiter en cracher d'autres : mais c'étaient des formes absurdes, monstrueuses, des sortes de chiens de chairs coupées, taillées comme des buissons puis vaguement raccordées par des épingles métalliques, des pantins amorphes d'un serviteur d'Oaxaca. Bien qu'elle ait vécu au sein de l'empire de la Reine noire, Yurlungur n'avait finalement qu'une expérience toute relative des expérimentations des treize lieutenants – qui pour la plupart servaient dans des cas très spécifiques et n'étaient guère dévoilés à la populace – mais ne parvenait pas à ressentir la moindre surprise à la vue de ces chiens de garde.

Il était évident qu'ils souhaitaient manger. Ils n'avaient pas d'yeux, probablement guidés par leur seul odorat comme les molosses qu'employait parfois la garde de Dahràm pour retrouver des criminels fugitifs, et deux individus de chair fraîche devaient avoir l'air bien plus appétissants que tous leurs repas des trois derniers mois cumulés.

Ils s'étaient tous deux arrêtés, en plein milieu de la voie, dégainant silencieusement leurs lames. Ces monstres présentaient des muscles à vifs mais probablement très puissants et, surtout, une gueule immense qui aurait pu engloutir d'un coup la tête de Yurlungur. Celle-ci comptait bien ne pas leur rendre la tâche aisée et attendit patiemment que l'un d'entre eux fasse le premier geste d'agression. C'étaient des bêtes sauvages : il n'y avait guère à parlementer, simplement à les abattre, un par un – il était même probable que la mort de l'un d'entre eux n'affecte en rien le moral des autres.

Ils finirent par charger, tous les six d'un seul coup. Deux sur le côté droit, que Jorus semblait vouloir prendre, deux de face, deux à gauche. Observant avec un regard des plus tranchants les muscles des prédateurs qui les faisaient bondir sur les corps décharnés, elle en laissa trois s'approcher, avant de se fondre en un nuage d'ombres et d'esquiver miraculeusement la charge cumulée qui convergeaient sur elle, la proie faible.

Toute l'animosité qui couvait dans son cœur depuis un moment semblait se réveiller et se déverser intérieurement sur ces êtres pourtant dénués de toute raison. Elle les considérait avec dédain, consciente de n'être à leurs yeux, comme à ceux de tant d'autres êtres tout aussi aveugles qu'eux, une cible menue, appétissante, inoffensive. Dans son dos, les trois monstres se rentrèrent dedans, grognant de confusion alors qu'elle se retournait lentement vers eux, l'expression carnassière.

Puis, sans attendre, elle se précipita sur l'un d'eux, qui se retournait à peine, et d'un coup fulgurant de la lame de la Trinité, elle vint taillader le mollet d'une de ses pattes arrière. Il s'effondra sur le choc dans un couinement pathétique, alors que les autres se rapprochaient – mais la rage de la jeune fille croissait, imperturbable. Elle souhaitait les décimer, les anéantir. Il n'y avait en elle nul désir de les faire souffrir outre mesure, d'ailleurs, si elle avait su lire en son propre cœur, elle aurait su que sa fureur n'était même pas réellement dirigée vers ces bêtes-là, sur lesquels elle la reportait par hasard, parce qu'ils faisaient des cibles faciles.

Elle se translatait sur le côté et ils semblaient la suivre de ce regard qu'ils n'avait pas. Sous ses pieds, il commençait à y avoir des membres, des corps et des os, le charnier mouvant ; mais elle se sentait à l'aise, ses membres répondant instinctivement et gardant en toutes circonstances son équilibre qui aurait pu être si précaire.

Alors que l'un des monstres se décida à lui bondir dessus, elle se jeta au-dessous de lui pour lui échapper, se relevant d'un mouvement preste tandis qu'un autre s'avançait vers elle : esquivant sa mâchoire qui claqua, elle lui donna un violent coup de pied avant de se déporter à nouveau en arrière pour éviter les crocs du dernier qui, blessé, se mouvait avec moins d'aisance. En reculant, elle faisait à nouveau face aux trois chiens monstrueux : mais ceux-ci semblaient déjà moins certains d'eux, quoiqu'ils bavassent toujours autant.

C'était à proprement parler répugnant. Prenant une grande inspiration, la jeune fille rugit toute sa haine. C'était un son à peine humain, bestial, qu'elle avait inspiré dans cette partie d'elle-même qui se révélait face à ces bêtes affreuses ; c'était un cri de fureur, de rage et de souffrance qui, sur le coup, sembla stopper les bêtes dans leur avancée – ou ne fut-ce qu'une illusion ?

Quoiqu'il en soit, elle se précipita sur eux et, dans un effort surhumain, ses muscles se tendirent pour porter une multitude de coups sur les trois bêtes rassemblées devant elle, indistinctement. Celles-ci furent à peine capables de riposter face à la violence de l'assaut : elles subirent chacune une touche mais leurs tentatives de riposte étaient si pathétiques et se gênaient mutuellement que l'Ombre les esquiva sans problème.

Elle se sentait lasse. Ces adversaires étaient là pour affaiblir leur groupe, avant d'arriver au véritable ennemi qui les attendait à la Tour d'Orsan... Elle ne voulait pas épuiser ses forces mais contrôlait à peine ses émotions qui bouillonnaient et la pousser à attaquer, à se déchaîner contre ces monstruosités qui lui bloquaient le chemin.

Le coup suivant atteint l'un des monstres à la gorge et se révéla fatal. Celui-ci fit un pas puis s'effondra lamentablement, alors qu'une de ses artères devaient se déverser sur le sol sombre. Ils n'étaient plus que deux à lui faire face, blessés à leur proto-visage, et l'un à la patte. Elle haussa des épaules, se retourna et s'enfuit.

C'était une semi-fuite : elle avait bien vu que les deux chiens étaient bien plus rapides qu'elle à la course, mais elle comptait les séparer et les achever séparément. Ce serait bien plus simple : ce qui l'avait gênée jusqu'ici était surtout le fait qu'ils étaient à trois, et l'élimination de l'un d'entre eux rendait la manœuvre d'autant plus facile. Elle entendit rapidement un galop effréné derrière elle, qui se rapprochait, bien qu'elle gagna quelques secondes par quelques feintes et changements soudains de directions. Enfin, d'un seul coup, elle se retourna et s'évanouit en une ombre intangible, comme la première fois, le molosse lui passant au travers. L'autre était encore à une dizaine de mètres : elle opina du chef, satisfaite, et se rua sur le chien qui restait, esquivant ses coups en lui en portant d'autres, jusqu'à ce qu'il s'effondre au sol, inerte.

Le dernier chien avait entre ses crocs une portion de chair aussi rose que la sienne, qui provenait vraisemblablement de la première victime de l'assassine. Cela lui avait procuré un répit certain : mais, alors qu'elle s'apprêtait à éliminer de même cet adversaire-là, elle entendit un hurlement, un hurlement humain : Jorus. Son attention se détourna immédiatement du canidé et elle lui fonça à travers, profitant encore une fois du pouvoir des Ombres, avant d'entamer une course contre la montre vers le lieu de provenance de ce cri.

Arrivant à toute allure, elle le vit coincé sous l'un des monstres, tandis qu'un autre s'approchait dangereusement, tournant le dos à la jeune fille. Sans ralentir sa course, elle sauta sur son dos et, s'agrippant tant bien que mal aux échardes d'acier qui lui transperçaient les flancs, elle entreprit un rodéo surprise, tout en assénant avec une hargne barbare des coups de dague dans sa nuque et sur son visage défiguré. La bête finit par tituber et elle en profita pour lâcher prise et se jeter au sol, se relevant d'un seul coup pour aller pousser le cadavre qui bloquait Jorus sous sa masse. Mais il avait trop de muscles sans doute : alors qu'elle s'efforçait de repousser le corps, alors que celui-ci commençait enfin à basculer, Jorus lui cria un avertissement désespéré et elle eut seulement le temps de se retourner en continuant à pousser le monstre qu'elle vit le dernier restant, d'une charge clopinante, ouvrir une gueule béante au niveau de son torse.

Ce fut alors qu'un miracle se produisit. Alors que ces crocs auraient dû lui entailler les chairs, ils passèrent purement et simplement à travers son armure, comme si cette dernière était devenue, pendant ces quelques instants, aussi intangible qu'un rêve. Ce n'était pas le pouvoir des Ombres – celui-ci nécessitait un minimum de concentration, et elle l'aurait senti à travers la marque d'Arsok.

Mais cet événement impromptu, aussi salvateur fût-il, lui fit néanmoins perdre l'équilibre et chuter en arrière, sur le dos, sur Jorus. Improvisant dans ces circonstances et profitant de la surprise de l'affreux, elle lui décocha une volée de coups de pieds en se cramponnant à son compagnon : repoussant ainsi la bête loin d'elle – tout en évitant ses crocs -, Yurlungur finit par rouler sur le côté et se relever d'un agile saut.

Jorus était toujours au sol, probablement encore sous le choc : il était possible qu'il ne soit pas aussi prompt qu'elle à se relever et, dans ces circonstances, alors qu'il était lui-même déjà blessé, il formait sans doute une cible de choix pour la bête. Si bien que Yurlungur n'eut d'autre choix que de prendre le problème à bras le corps et de s'approcher autant que possible de ses crocs, évitant les coups autant que possible pour l'occuper sans chercher à en porter aucun pour l'heure. Elle était trop proche et la bête trop furieuse pour qu'elle puisse songer à autre chose qu'à sa propre survie, mais il lui aurait suffi d'un signe de Jorus, un signe qu'il était en sécurité, relevé, pour qu'elle reprenne face à la bête une posture plus distante, plus naturelle.

Il finit par laisser échapper quelques mots à quelques mètres. Prise dans le feu de l'action, elle les entend à peine, et répond d'un vague : « Bien... »
Avant de disparaître à nouveau dans l'ombre et de réapparaître juste derrière la bête. Si Jorus souhaitait lui échapper, c'était peine perdue : car c'est à présent lui qui se trouve dans sa ligne de mire. L'assassine ignorait bien si sa disparition dans les ombres laissait ou non une trace olfactive de son passage, mais ne comptait pas vérifier cela par des expériences débiles : alors que la bêtes commençait à s'avancer vers le jeune homme, elle lui taillada le second mollet arrière et celle-ci perdit tout à fait l'équilibre, tentant de se retourner vers la jeune fille en traînant misérablement derrière elle ses deux pattes tremblantes, secouées de spasmes, grattant le sol en tentant d'avancer alors que les nerfs avaient définitivement lâchés.

À y regarder rapidement, Yurlungur se félicita de la netteté des coups. Elle avait visé juste et avait suffisamment incapacité cet adversaire pour rendre la victoire risible. Rangeant ses dagues elle trottina jusqu'à Jorus en esquivant nonchalamment un mollasson coup de crocs et lui indiqua :

« Je te le laisse, si tu veux. »

C'était une cible facile : ils auraient tout aussi bien pu le laisser là. Ses pattes arrières n'allaient probablement pas cicatriser facilement, ni cicatriser du tout ; il était devenu incapable de courir, se traînant, rampant presque. Mais elle n'avait pas beaucoup vu le style de combat de son compagnon jusqu'ici, ni la précision des coups qu'il était capable de porter, et souhaitait intérieurement, sans pour autant le mettre véritablement en danger face à un tel adversaire incapable de se mouvoir, qu'il se prête au jeu et lui démontre ce qu'il savait faire.

Il s'approcha de la bête et, faisant fi de ses blessures, effectua une acrobatie pour atterrir derrière elle et lui porter un coup fatal. Elle sourit faiblement. Ce n'était pas si mal. Il était plus aérien qu'elle, en quelque sorte : ça ressemblait bien à son caractère.

Elle ressortait de ce combat avec comme seules séquelles quelques bleus et les muscles qui la tiraient. L'utilisation du pouvoir des Ombres, bien que fort utile, avait pompé son énergie, d'autant plus qu'elle commençait à peine à le maîtriser. Peut-être que, après s'être entraînée à l'employer plus souvent, elle saurait se montrer aussi agile et aussi mortelle qu'Elisha'a... Ou aussi terrible qu'Arsok. Pour l'heure, une fois que Jorus eut consommé une potion pour se remettre, ils finirent le trajet jusqu'à la Tour.

C'était le matin et, devant eux, une porte close se dressait. Jorus entreprit d'escalader : elle, restant en retrait, observait avec une certaine appréhension cette approche pour le moins audacieuse, sur le qui-vive. Ils n'avaient aperçu personne dans la Tour, mais elle était prête à parier qu'on les avait déjà repérés...

...
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Gamemaster9
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Gamemaster9 » sam. 26 janv. 2019 15:46

Lande Noire – Alentours de la Grotte de Sombreroc.

Survolant les alentours de la grotte sous sa nouvelle forme surprenante, Sibelle ne détecta pas âme qui vive. Ce ne fut que lorsqu’elle se posa… un peu violemment, qu’un rugissement fendit les airs, depuis les hauts nuages mordorés. Une ombre apparut dans les cieux, qui se dessina petit à petit à mesure qu’elle descendait du couvert nuageux. Un dragon. Un dragon noir, qu’ils connaissaient bien, qu’ils avaient déjà vu. Celui-là même contre lequel Xël avait voulu, inconscient, se dresser. Le même qui avait rudement malmené le Dragon d’Or à leur arrivée en ces Landes. Il se posa au sol près des deux aventuriers, non moins délicatement que Sibelle, mais de manière plus contrôlée, et rugit terriblement, la gueule remplie de crocs tranchants, vers ces derniers. Il n’avait pas l’air très content. De sa forte voix grave, il s’adressa ensuite à eux, courroucé.

« Rhaaa, quand vous autres, inférieurs, comprendrez que vous n’avez aucun droit de nous appeler de la sorte, comme de vulgaires chiens. Devrai-de détruire un à un ces maudits appeaux pour que cela cesse enfin ?! Rhaaa. »

Il trépignait, sur ses grosses pattes écailleuses.

« Je ne vous mènerai nulle part, sachez-le, sinon à votre mort si vous tentez de m’en convaincre. Posez ces sifflets au sol, pour que je les détruise séance tenante, tous deux. Votre ami poilu a bien compris qu’il s’agissait de l’unique solution, pour survivre. Et ne tentez pas plus de me soutirer des informations en me posant de puériles questions. Là aussi il a compris que votre quête était vaine, et s’en est retourné dans son monde. Cessez de croire en cet être que vous recherchez, il n’est plus capable de la moindre influence sur mon peuple, désormais. Maintenant, donnez-moi une bonne raison de ne pas vous réduire en cendre, vous qui m’avez fait face avec tant d’effronterie avant que la raison ne vous fasse fuir. »

Il faisait sans doute référence à la témérité de Xël, lors de son affrontement contre le dragon d’or, mais semblait mettre les deux dans le même panier. Mais alors que sa gorge noire se gonflait déjà d’une incandescence inquiétante, un nuage d’ombre éclata à côté de Xël, laissant paraître un être qu’ils avaient déjà vu : une liche inquiétante, qui semblait bien plus dans son élément ici qu’à la tour d’Or : Thensoor Val’Crooh. Il semblait avoir capté leur appel, finalement, et avoir fait vite pour les rejoindre. Sans sembler les considérer, dans un premier temps, il s’adressa au Dragon en s’inclinant.

« Moi, Thensoor Val’Crooh, Membre du Conseil d’Or et anciennement Archi-sorcier de cette Lande, vous conjure de les épargner, ô Seigneur des Cieux Sombres. Considérez ça comme une faveur personnelle que je vous demande. »

Le Dragon renifla bruyamment, et sa voix tonna une fois de plus.

« Leur sort leur appartient. Votre faveur est acceptée, mais ne leur donne guère la vie sauve. Juste un peu plus de temps pour me convaincre du bienfondé de leur misérable survie. »

C’était à eux de jouer.


Lande Noire – Près du Sans-Visage.

Une fois encore, l’être sombre à la peau pâle et au visage remplacé par un néant inquiétant écouta patiemment les réponses et questions des trois aventuriers. L’épée à sa main n’était pas pointée vers eux, plus un symbole qu’une arme, sans doute. Aux interventions d’Endar, il secoue cependant la tête un instant avant de répondre.

« Je pourrais vous expliciter longuement la nécessité pour un être puissant de ne pas intervenir à tout bout de champs quand un danger menace ses protégés, pour le bien de leur indépendance, de leur développement et de leur épanouissement, mais vous ne comprendriez pas. Je vais mettre cette insulte sur le dos de l’ignorance, dont vous semblez continuer d’en être le chantre affirmé. De même, je ne peux être tenu responsable des actes d’un être qui parle en mon nom sans que je ne lui aie rien demandé. Sachez toutefois que ce sont les ouessiens qui m’ont tourné le dos, et non l’inverse, arrachant une partie de mon être pour la tenir enfermée dans ce temple qui me sert de cellule, depuis. Mais je ne leur en tiens pas rigueur, et ma volonté n’est en rien celle d’une revanche à leur égard, ou même d’une guerre. Pareillement, je ne souhaite en rien de guerre avec mes frères et semblables, ceux que vous appelez Titans, dont j’ai tenté en vain de protéger ce monde et ses peuples du réveil… dont vous, sauveurs, leurrés par Naral Shaam, êtes la cause. Mais là encore, les peuples doivent assumer ce choix, et je n’irai pas contre. En revanche, je n’admets effectivement pas que ceux qui me sont restés fidèles soient chassés comme des vulgaires rats par le Conseil d’Or soi-disant bien-pensant. Eux, je tâche de les protéger, maintenant qu’ils sont résolument en danger. Enfin, Endar, je ne peux que prendre peur quand vous dites détenir la clé d’un équilibre pour un monde qui n’est pas vôtre et que vous ne comprenez qu’à peine, en surface, et souvent erronément. À tel point que ma proposition ne tient plus, vous concernant. Je ne vous offrirai pas de corps muté par Vallel. Si vous en voulez un, vous devrez l’acquérir vous-même. Mais je vais cependant tenir parole : je vous mènerai à Orsan, quel qu’y soit votre but, tous les trois. Là, Endar, vous pourrez choisir en âme et conscience de devenir un monstre… ou de rester vous-même. Alors, nous pourrons parler de l’avenir de ce monde… Et du vôtre. »

Il se tourna ensuite vers Kivan et Ariane pour leur répondre à leur tour.

« Dame, ne faites pas l’erreur de croire que je survole le vent. Je suis le vent. Un de ses courants, en tout cas. Et à ce titre je me dois de vous répondre. Si les gens d’Elscar’Olth ont dit que votre avenir était à Orsan, je doute de leur bienveillance à votre égard. Là-bas, ils mènent d’ignobles expériences sur les vivants, sur la chair. Et, depuis peu, font des essais sur… les liens spécifiques entre âmes héroïques, humanoïdes ou… animales. »

Il sembla tourner un instant la tête vers Al-Ayrad, puis revint sur Ariane.

« J’espère, pour ma part, que vous y trouverez un tout autre sort, bien moins funeste. De même, détrompez-vous si vous pensez que Naral Shaam pourra vous faciliter les transports ici. Certes il a la confiance de quelques dragons, qui peuvent aider à voyager rapidement, mais rien ne dit qu’il vous aidera en ce sens. Loin de là. Et si j’entends votre désir de rejoindre votre monde, et pourrais vous y aider, je mets cette aide en réserve, car je vous sens suffisamment altruiste pour ne pas abandonner vos compagnons à un destin tragique sans leur apporter votre soutien. Aussi vais-je vous faire une proposition : Si vous êtes vraiment sûre de vouloir les abandonner à leur sort, vous pourrez me demander de partir, une demande claire et officielle et je vous mènerai à l’endroit qui vous ramènera chez vous, plus rapidement que quiconque ne le pourrait en ce monde. Vous pouvez prendre le temps qu’il vous faudra, quelle que soit votre décision. »

Puis, vers Kívan.

« Fuir les horreurs ne les arrange pas, en êtes-vous conscient, sieur ? Je crains devoir répondre par l’affirmative à vos demandes : Naral Shaam se trouve bien dans la Tour d’Orsan, bien qu’il ne m’appartienne pas de vous en révéler la raison. C’est là qu’est votre destin, si vraiment vous le cherchez, mais là où il se trouve, même moi je ne peux aller. Vous devrez vous débrouiller, une fois là-bas. »

Il s’approcha, encore, et leva les mains aux cieux sombre, épée dressée… Une sorte de nuage sombre vint entourer le quatuor au centre duquel il se trouvait… Les formes s’effacèrent, les sensations aussi… Et vous vous réveillâtes… ailleurs. (Suite dans la màj pour la Tour d’Orsan).

Lande Noire – Tour d’Orsan.

La potion de Jorus, si elle apaisa nettement sa blessure à la jambe, ne guérit pas du tout celle, bien plus grave, à son bras gauche, ni même celle, moins importante, à son bras droit. Dans ces conditions, il se rendit bien vite compte, tentant d’escalader la tour, qu’il n’irait pas bien haut avant de manquer de force. Il dut redescendre, pour s’assurer de ne pas choir. Le vertige dû au manque de sang de sa plaie se faisait légèrement ressentir, et n’irait pas en s’arrangeant : la plaie n’était pas belle à voir, et une potion ne suffirait sans doute pas à la réparer. Pas les siennes, en tout cas.

Yurlungur, elle, ne perçut pas âme qui vive à l’intérieur. Peut-être les résidents s’étaient-ils aperçus de leur arrivée, mais ils ne s’en manifestaient pas pour autant. Pour l’instant du moins.

En revanche, l’un comme l’autre ne purent s’empêcher de sursauter lorsque derrière eux, un nuage noir éclata, laissant apparaître, aussi surprenant que ça puisse paraître, Ariane, Kivan, un Endar partiellement retapé et, surtout, un être à l’apparence des plus inquiétante.


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Ce dernier, pour tout commentaire, sembla lorgner l’adolescente d’un regard inexistant, au milieu de sa face vide, et commenta.

« Vous avez changé, jeune fille. Je m’en veux presque de n’avoir pas suivi de plus près votre évolution… »

[Xël : 0,5 (sifflet).
Ariane : 0,5 (discussion avec le Sans-Visage) + 4 (voyage)
Kivan : 0,5 (discussion avec le Sans-Visage) + 4 (voyage)
Endar : 0,5 (discussion avec le Sans-Visage) + 4 (voyage)
Sibelle : 1 (première transformation) + 0,5 (survol)
Jorus : 4 (voyage) + 3 (combat difficile) + 0,5 (restauration et tentative d’escalade). Remarque : Attention, il n’existe plus aucune notion de Ki sur Yuimen. Attention à ta relecture aussi, y’a beaucoup de fautes, et c’est parfois difficile à comprendre à cause de celles-ci.
Yurlungur : 4 (voyage) + 3 (combat difficile) + une rune aléatoire pour la mise en abîme et le ressenti de toute la première partie. Fort agréable à lire.]
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Yurlungur
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Yurlungur » dim. 27 janv. 2019 17:07

...

D'un côté, la Tour était sinistre, lugubre, un lieu idéal pour des pièges nombreux et des embuscades retorses ; c'était un fief ayant appartenu à Oaxaca, on y menait probablement des expériences morbides ; le décor alentours n'aidait guère à s'y sentir en sécurité. Mais elle avait beau scruter les meurtrières et les coins d'ombre où des ennemis auraient pu se loger, attendant patiemment un faux pas de Jorus, elle n'y trouvait rien d'autre que du vide, une absence totale de protections et de vigies. Étrangement, cela ne la rendit que moins sereine. Si encore elle avait vu où se trouvait l'adversaire, précisément, ç'aurait été facile : le plus difficile, c'était lorsqu'on ne savait pas réellement quand, ni d'où viendrait l'agression, et qu'il fallait rester sans cesse sur le qui-vive, de peur de se faire attaquer dans le dos...
Non, décidément, la position inverse était tout de même sa préférée.

Alors qu'il n'avait pas atteint le haut du rempart, Jorus commença toutefois à faire marche arrière et redescendre. Elle haussa un sourcil, surprise. Il ne s'était rien passé : avait-il découvert quelque chose ? Mais il semblait ne rien tenir de plus, ni clef, ni message. Une fois redescendu, son teint plus livide que tout à l'heure et sa démarche moins assurée frappèrent l'adolescente. Si elle avait réussi à se tirer de l'affrontement avec les trois affreux chiens sans énormément de blessures pour sa part, ou en tout cas rien qui puisse réellement la gêner ni demander un certain temps de rétablissement, ce n'était pas le cas de son compagnon, dont les potions, quoique très utiles, n'en restaient pas moins ordinaires. Une guérison n'était pas à espérer et, dans l'état actuel des choses, elle se retrouvait bien embêtée avec lui, à des lieues d'Esclar'Olth et dans l'incapacité de lui prodiguer le moindre soin.

Quand soudain, un éclat dans son dos la fit sursauter et elle dégaina aussitôt ses deux dagues, se retournant vers ce danger qui rôdait du côté du chemin qui montait vers la Tour. Elle perçut d'abord une sorte de vaste nuage noir et ses sourcils se froncèrent. Ça ressemblait légèrement aux ombres qu'elle manipulait elle-même, mais leur texture était plus dense, plus sombre encore que la sienne - en un mot : de cette obscurité émanait une funeste puissance et, aussi loin d'Arothiir, elle craignait que ce soit davantage l'effet de quelque magie noire plutôt que d'un allié impromptu de la Trinité.

Elle écarquilla les yeux en voyant apparaître devant elle ni plus ni moins qu'Ariane, Al-Ayrad, Kĩvan et Endar, dont les blessures semblaient avoir été à moitié soignées. Quant à l'explication de ce phénomène surnaturel, de cette téléportation à travers la moitié de la Lande, elle se fit bien vite connaître lorsqu'un homme auréolé d'une sombre couronne et doté d'une paire d'ailes aussi noires que la nuit se dévoila. Il portait dans l'une de ses mains une épée dont le manche semblait suinter du sang, tandis que la texture même de cette lame métallique et de l'armure noire qu'il arborait ne présentaient rien de tout à fait humain. Cela provenait tout droit d'un autre monde, à proprement parler : elle n'avait jamais vu de tels équipements et doutaient fortement qu'un mortel puisse s'en procurer aisément.

Car l'absence totale de visage au milieu de la figure de l'inconnu révélaient sans mal son identité. Enfin, elle rencontrait cet être dont on lui avait tant parlé, l'accablant tantôt de tous les maux de ce monde, ou l'estimant au contraire symbole d'une prospérité et d'une paix perdues depuis l'éveil des Titans. Il avait une majesté souveraine en ces lieux et elle serrait à s'en faire blanchir les phalanges ses deux dagues, se tenant aussi droite que possible et répondant à son regard inexistant par le sien, fier et presque provocateur, dont le courroux apparent n'était présent que pour camoufler une peur viscérale face à l'apparition d'un dieu.

Même ses rêves les plus fous ne l'avaient pas préparée à une telle rencontre. La présence d'un dieu, là, devant elle, capable de l'annihiler en un instant et ne daignant même pas utiliser une parcelle de son pouvoir face à l'insecte qu'elle devait représenter, était un événement incroyable, inimaginable : divin. Si encore elle n'avait pas su de qui il s'agissait, elle aurait pu croire à un puissant mage, tel Thensoor : mais le doute n'était plus permis, et cette rencontre la tétanisait, la figeait dans une posture de défiance absurde, face à un être qui pouvait l'écraser sans bouger un orteil, face à un être qui emmagasinait en lui une puissance telle qu'elle se sentait soudainement insignifiante, ridicule, aberrante. Elle ne pouvait même plus fuir, captivée par ce trou béant au milieu de la tête du Sans-Visage, attendant avec une hardiesse souveraine qu'il daignât l'anéantir.

Car qu'est-ce qu'un dieu pouvait faire d'autre, lorsqu'il venait en personne se confronter à un mortel ?

Mais ce furent des mots, issus d'une bouche éthérée, qui vinrent briser l'éblouissement de la jeune fille. Des mots qui s'adressaient directement à elle. À elle. Elle essaya de ne pas rougir, mais ses joues étaient déjà sanguines et son front écarlate : un dieu venait de lui adresser la parole. Son cœur, à l'intérieur, battait à tout rompre : elle tentait autant que possible de contrôler sa respiration pour garder un semblant de superbe, mais ses sens mêmes la lâchaient peu à peu. Il n'y avait plus que lui : l'univers disparaissait alors qu'il n'y avait plus que le sang qui cognait dans ses tempes, les mots du dieu qui résonnaient dans son esprit, sa silhouette qui se dessinait sur un fond flou et toutes ses protections, toutes ses dagues et tous ses artifices qui disparaissaient, comme s'il la dénudait d'un seul regard, un regard d'outre-tombe qui par ailleurs n'existait pas vraiment. Mais elle n'était pas capable de raisonner correctement et cette scène surréaliste qu'elle vivait à présent, de cauchemar se changeait en utopie.

Que venait-il de dire ? Venait-il de la... flatter ?

Toujours aussi rouge, elle ne disait toujours rien, béate et surprise. Un dieu... Un dieu venait de la complimenter, indirectement. Un dieu venait de dire qu'il avait perçu sa venue sur son monde, et qu'il aurait aimé l'observer davantage. Elle, la petite fille de Dahràm, sans père, sans mère, sans famille, elle, misérable mortelle que tant d'hommes avaient méprisée, bafouée, frappée, se trouvait être digne de l'attention d'un dieu.

Elle ne se trouvait plus réellement dans le monde sensible : son orgueil prodigieusement gonflé par cette marque subtile de vigilance divine l'avait emportée dans un monde aux contours tremblants et où elle se sentait lentement agoniser, mais d'une formidable agonie, qui lui faisait frémir tous les nerfs de son corps, la caressait de frissons extatiques et venait ensevelir son âme sous cette flatterie si mince et pourtant si massive, puisqu'elle venait d'un dieu. Sans même réfléchir, essayant seulement de continuer à faire bonne figure face à cet être suprême, elle lâcha d'une voix vacillante :

« Il n'y a guère que les dieux qui soient immuables... »

Et aussitôt, son visage se crispa d'une légère grimace de regret. Et s'il prenait mal cette simple phrase ? Et s'il ne la trouvait pas assez spirituelle ? Et s'il se révélait finalement déçu de ce qu'elle ne savait rien dire de mieux, face à lui ? Et si...
Les possibilités s'accumulaient, affreuses et terribles. Elle restait donc pétrifiée face au Sans-Visage, incapable de bouger le moindre muscle, dans un état de terreur totale mais dont, curieusement, elle n'espérait même pas la délivrance future. Son regard n'exprimait plus qu'une sorte de tristesse profonde, un regret coupable mais elle restait droite, fière, attendant la sentence comme une peine inévitable.

...
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Xël
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Xël » lun. 28 janv. 2019 13:04

Une ombre volante s'approche. Pas assez grande pour que ce soit le dragon noire mais d'une taille suffisamment imposante pour attirer mon attention. Une grande bestiole volante rousse ressemblant à un oiseau me fonce dessus. Je me jette à terre pour éviter la décapitation. Je relève la tête pour la voir s'élever dans les cieux et faire quelques ronds dans le ciel. Je souffle un coup, soulagé d'avoir évité la mort une fois de plus. La créature redescend sans sembler parvenir à contrôler son atterrissage, je l'entends s'écraser au sol. Je me redresse lentement et m'approche, tenant fermement mon bâton dans mes mains. Je ne m'intéresse pas longtemps à ce qui se trouve au sol car un rugissement strident me fait relever les yeux. Je me redresse fièrement en voyant l'ombre approcher. Je souffle encore, inspire et expire pour garder mon calme. Tandis qu’il approche, je suis témoin d’une chose extraordinaire. La créature qui avait manqué de m’arracher la tête se transforme en belle jeune femme rousse. Sibelle ?! Je ne retiens pas un juron de surprise avant d’afficher un large sourire. Elle est capable de se transformer, comme le dragon d’or de Kiyo ! Mon ravissement s’efface vite quand un autre rugissement fend les cieux. Le sol tremble quand le dragon se pose au sol d'une manière bien plus contrôlée que Sibelle. Il rugit dans ma direction et je suis forcé de détourner la tête face à son haleine de souffre. Il n'était visiblement pas content et il ne tarde pas à nous l'expliquer. Trépignant, râlant, il en a assez de se faire siffler comme un chien. Il précise qu'il ne nous mènera nulle part excepté à la mort si on ose insister. Il ordonne de poser les appeaux au sol pour qu'il puisse les détruire. Il parle d'un ami poilu. Sirat j'imagine. Ils se sont donc bien rencontrés mais d'après lui il ne lui a fait aucun mal. L’Humoran aurait tout simplement abandonné, comprit que notre quête est vaine. Il nous demande d'arrêter de rechercher Naral qui n'a plus aucune influence sur les dragons d'Aliaénon. Il exige ensuite une bonne raison de ne pas me réduire en cendres. Il doit sans doute m'en vouloir personnellement de m'être dressé entre lui et le dragon d'or et je peux clairement lui dire que je ne le regrette pas. Que si c'était à refaire, je referais de la même manière. Mais je n'ai pas le temps de souffler un mot que lui s'apprête déjà à me carboniser. Je renifle. Fronce les sourcils. Puise dans les fluides magiques à proximité. Mais une ombre noire éclate à côté de moi, laissant apparaitre Thensoor, le conseiller de la Tour d'Or. Il a entendu mon appel et nous a rejoints. Il s'incline sans tarder devant le lézard volant pour lui demander la faveur de nous laisser en vie. Le dragon renifle avant de nous laisser juste un peu plus de temps pour le convaincre de nous laisser en vie.

Je m’avance d’un pas, saisissant l’appeau à ma ceinture pour le jeter à ses pattes.

" Tenez. Je ne voulais pas m’en servir pour vous utiliser en tant que poney volant vous où les autres de vos semblables. Je tenais simplement à vous parler. M’excuser de vous avoir forcé à vous mettre à terre mais je ne pouvais pas laisser un compagnon de route dans la tourmente même si il traversait sans votre accord votre territoire. J’espère qu’il se porte bien. Vous venez de répondre à deux questions que nous voulions vous poser moi et mon amie. Vous n’avez pas dévoré Sirat et vous ne savez pas où se trouve le dragon rose. Je voulais préciser que nous ne le cherchons pas pour l’influence qu’il a eue sur votre peuple. Je le cherche car sa disparition pourrait causer un trouble sur Aliaénon, les chevaliers d’or pourraient devenir hors de contrôle et mettre la population en danger. Plus personnellement, je pense qu’il a encore des comptes à rendre pour les crimes qu’il a commis. J’ai une dernière question à vous poser avant de vous jurer que vous ne verrez plus jamais ma tronche par ici. "

Je décroche de ma ceinture la pierre de vision et la lève au-dessus de ma tête pour qu’il puisse bien la contempler.

" Ceci est une pierre de vision, je cherche une créature capable de la détruire car celui qui a enlevé ce trou du cul de Naral Shaam a brisé la sienne. Est-ce qu'un dragon en serait capable ? Ou alors connaissez-vous quelqu’un ou quelque chose qui aurait la puissance de détruire une de ces pierres ? "

Je reste fier malgré l’inquiétude de finir en poulet rôti. La présence de Thensoor me rassure et j’ai hâte de l’emmener au chevet de Simaya pour lui venir en aide.

((800 mots. Se débarrasse de l'appeau à dragon))

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Ariane
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Ariane » mar. 29 janv. 2019 06:40

J’écoute Kìvan confirmer que la mission de la troupe envoyée par le Conseil d’Or est de retrouver le dénommé Naral Shaam. Le semi-elfe profite également de l’occasion pour interroger Vâkkar Ti. Après tout, le nouveau venu semble savoir beaucoup de choses, peut-être pourra-t-il mettre les aventuriers dans la bonne direction concernant l’elfe recherché.
Un froncement traverse brièvement mes sourcils lorsque Kìvan paraît s’exprimer pour nous deux à l’attention d’Endar. Je n’ai aucun avis sur ce que le Shaakt veut faire de sa peau et n’apprécie guère que l’on pense à ma place mais je reste silencieuse, observant les traits de l’elfe noir. La potion qu’il a refusé plus tôt semble avoir insuffler un peu de vie dans son corps disloqué. Si je pouvais être sûre que ses jours ne soient plus en danger, mon devoir envers lui pourrait s’arrêter là.

(Même si la mort s’écarte, il n’ira nulle part avec ses os brisés.)

Je jette un coup d’œil à Al-Ayrad, installé sur son postérieur tout près de la civière. Avec calme, le félin suit souvent le fil de mes pensées, toujours prêt d’un coup de museau ou d’une idée à me remettre dans le droit chemin. Je lui souris intérieurement, je crois que je ne vaudrais pas plus qu’un sbire d’Oaxaca si je ne l’avais pas retrouvé.
Les bonnes intentions en train de renaître à l’égard du Shaakt s’estompent aussitôt lorsqu’il ouvre la bouche pour nous sermonner. En plus de son ton dédaigneux il se permet, comme Kìvan, d’exprimer ce qu’il croit que je peux penser, ravivant mon agacement. Mais lorsqu’il poursuit sa tirade, les informations qu’il révèle font que ma curiosité prend le dessus de mes émotions.

Yurlungur m’avait parlé d’un dragon accompagnant le sieur Shaam, mais d’après Endar ils ne seraient qu’une seule et même personne. Je commence à peine à retenir les informations que m’a livrées l’enfant que voilà de nouveaux protagonistes entrant en jeu : je n’avais encore jamais entendu parler des Titans. Mais des dires d’Endar, je garde surtout l’impression que pas un être sur Aliaénon n’ait un moment combattu pour Oaxaca, réveillant mon envie de simplement rentrer sur Yuimen et de laisser là ces tourne veste.

Je ne suis, hélas, pas encore au bout de mes peines, ni pour retourner sur mon monde, ni même dans l’instant présent. Endar n’en finit plus de parler, jetant de nouveaux noms inconnus, l’ensemble me donnant envie de soupirer. Fatiguée par la marche d’hier et celle que nous venons juste de faire alors que j’ai eu à peine le temps de me reposer, je finis par m’asseoir à même le sol aux côtés de mon ami à quatre pattes.
J’entends que Naral Shaam semble être responsable de plusieurs morts et me rends compte d’ailleurs que je ne suis pas sûre de savoir pourquoi le groupe d’aventuriers le recherche. Je hausse les sourcils et, intriguée, observe l’elfe noir qui poursuit son monologue. Ai-je bien entendu ? Il aurait combattu Vallel ? Tout cette histoire me semble encore plus complexe que les intrigues d’une cour royale. Il m’achève en dévoilant ses souhaits pour les peuples d’Aliaénon, un équilibre entre tous… S’il est un fidèle de Thimoros, est-ce pour ensuite mieux faire souffrir ces gens qui auront cru retrouver la paix ? !

Mes yeux se posent de nouveau sur le seul élément humain du visage de celui qui n’en possède pas, sa bouche, alors qu’il répond longuement à Endar. Qui il est vraiment reste un mystère, au-delà de ma simple humanité. L’ombre d’un demi-sourire passe sur ma figure à l’idée que je suis peut-être en train de rencontrer une déité et que sans autre forme de procès, j’ai posé mes fesses sur le noir sol de la Lande. Aussi impressionnant soit son aspect, aussi inconnue sa personnalité, ses paroles renforcent mon sourire lorsqu’il remet, de quelques mots bien sentis, l’elfe noir à sa place. Voilà pour celui qui nous traitait d’enfants ignorants.
La suite de la réplique de Vâkkar Ti fait alors disparaître toute trace d’amusement, le peuple nommé par le Shaakt, dont les rangs auraient été décimés par Naral Shaam, aurait mutilé l’être qui se tient devant nous. J’apprécie sa réaction empreinte de sagesse face à ce fait et écoute la suite de son récit avec plus d’attention, quoi que chaque nouveau bout d’information parait assombrir l’image que je me fais de l’ensemble. Plus j’en apprends, moins j’en sais.

Lorsque le Marcheur de Mort nous englobe dans la conversation, retirant sa proposition d’aide à Endar, je me relève poliment, me demandant comment cet être compte nous faire parvenir à la Tour d’Orsan.
Il reporte sur moi ce regard invisible et m’apporte avec courtoisie des éléments de réponse quant à ma propre destinée. Je suis de plus en plus impressionnée par sa présence et l’aura qu’il dégage. Ses paroles me font réaliser que si j’étais enfermée à Elscar’Olth, il n’y avait pas de raison pour que le destin dont parlait Elurien ne soit pas dans les geôles d’Orsan, même si le sieur d’Assamoth ne semblait plus servir Oaxaca d’après les dires d’Erthog. Je frissonne à l’idée de nous retrouver de nouveau enfermés et que l’on puisse torturer Al-Ayrad. A mes pensées, mon ami se décale juste un peu pour se rapprocher de moi mais n’émet aucune image, me laissant me concentrer sur les dires de Vâkkar Ti. Ce dernier éteint une à une les lueurs d’espoir que j’ai pu nourrir, rien de bénéfique ne peut m’attendre à Orsan, retrouver Naral Shaam ne me permettrait pas de rallier la Tour d’Or plus rapidement…
Mais comme il nous propose de nous amener à Orsan, il me fait une seconde proposition : me ramener sur Yuimen, tout du moins m’amener à la Tour d’Or ou quelque autre passage qui me permettra de rejoindre mon monde. Ma bouche s’entrouvre, plus de surprise que pour m’exprimer. Je n’en aurais de toute façon pas eu l’occasion, l’être poursuivant sa tirade, cette fois-ci à l’intention de Kìvan.

Retourner sur Yuimen, ma première intention, puisque je n’avais jamais prévu de le quitter, je ne savais même pas qu’il était possible de le faire ! Et Vâkkar Ti a présenté cette possibilité comme s’il s’agissait pour lui d’un simple claquement de doigts. D’abord presque euphorique à l’idée de pouvoir laisser ce cauchemar derrière moi, j’ai du mal à suivre ce qu’il répond au semi-elfe mais deux noms résonnent assez fort : l’elfe aux cheveux mauves se trouve bien dans la maudite tour d’Orsan.

J’ai tout juste le temps de reporter mon attention sur Kìvan qui, malgré ses manières parfois un peu rustres, m’a plu, et de repenser à Yurlungur que je devais accompagner à Orsan lorsque le Marcheur de Mort se rapproche de nous, levant son arme vers les nuages. Un réflexe guerrier me fait porter la main au pommeau de ma lame mais je le relâche aussitôt, surprise par l’apparition d’un nuage autour de nous. Que se passe-t-il ? Je ne distingue plus mes compagnons ni l’Unique, mes sens semblent s’engourdir... J’ai la vague impression de sombrer dans un étrange sommeil ou coma mais ne saurais dire combien de temps cela dure. Une fraction de seconde, une éternité ? Il m’est impossible de comprendre ce qu’il vient de se passer, je n’ai pas le temps de l’intellectualiser que le nuage disparaît aussi soudainement qu’il est venu. Je manque tomber sur le sol de par le choc psychique que je reçois en voyant devant moi les silhouettes de Yurlungur et Jorus. Ils ont du marcher aussi longtemps que nous mais à l’opposé, comment peuvent-ils être là ? !

Perdant un peu ma contenance habituelle, je scanne rapidement les environs et les personnes autour de moi. Nous sommes tous là, intacts ou presque, mais le paysage alentour a changé, ce ne sont pas nos deux compagnons qui nous ont rejoints, c’est nous qui avons… voyagé. Vâkkar Ti a tenu sa parole et nous a mené à la Tour d’Orsan.
J’ai un moment de flottement en me rappelant notre réveil dans les cellules d’Elscar’Olth, est-il possible que quelqu’un nous ait... transportés… de la même façon ? Je prends une large inspiration pour calmer le malaise mental plus que physique qu’a provoqué notre déplacement et fais quelques pas pour m’écarter légèrement du nouveau groupe formé. M’accroupissant face à Al-Ayrad, je pose une main dans sa crinière, le regardant droit dans les yeux.

(Le Marcheur de Mort est sans aucun doute doté d’une grande puissance. Il vient de nous faire voyager des lieues en une durée qu’aucun moyen de transport ne pourrait battre. Je ne sais pas si nous pouvons lui faire entièrement confiance mais jusqu’à présent il a été civil et honnête. Il peut nous amener aux portes de Yuimen.)

Mon ami me contemple en silence puis tourne sa lourde tête vers Yurlungur, Endar et enfin Kìvan avant de reporter sur moi ses grands yeux tranquilles.

Je soupire et fais la moue avant de me recomposer un visage neutre. Je ferme un instant les yeux, visualisant Tulorim que je n’ai pas vu depuis des années, les visages d’Hargartt ou Talic, le goût de leurs bières, la tranquille ou animée ambiance de leurs établissements, les balades dans la crique, les missions simples et courtes autour de la ville… Et Al-Ayrad, pas celui qui me fait face mais celui que j’ai perdu il y a si longtemps. L’ai-je abandonné ? Devrais-je être encore dans le Désert Bleu, le parcourant sans fin de long en large ?

(Reste ici.)

J’ouvre les yeux sur la truffe du félin, mon visage s'étant rapproché de lui jusqu'à le toucher. Il ne m’ordonne pas de rester sur Aliaénon, il me rappelle juste à l’instant présent, divaguer dans mon passé ne m’aidera pas à prendre une décision maintenant.
Je me relève et porte mon attention sur la jeune Yurlungur qui fait face à Vâkkar Ti. Si ce n’était pas une promesse, je lui ai tout de même dit que je l’accompagnerais à la tour d’Orsan, je me dois d’honorer ma parole.
Mon regard dérive sur Endar allongé dans sa civière, malgré tout son égo, c’est une place qu’il occupe suite à son action folle qui nous a débarrassée de la bête de feu. C’est mon devoir de veiller à ce qu’il soit pris en charge par quelqu’un de compétent et bien intentionné.
Je relève mon visage et observe Kìvan. Je resterais encore un peu à ses côtés juste pour sa jolie gueule, mais il s’est également avéré un être sensible et calme, soucieux comme moi de voir le Shaakt hors de danger malgré son sentiment à son égard. Il ne mérite pas d’affronter les horreurs d’Orsan sans aide.
En dernier, je jette un coup d’œil au sieur Kayne et vois alors avec inquiétude que celui-ci est blessé. Je me maudis intérieurement de ne pas avoir fait le plein d’onguents et potions à Mertar avant de prendre la route de Kendra-Kâr.

Vâkkar Ti tourné vers Yurlungur, je ne me permets pas de les interrompre pour faire part de ma décision à l’Unique. Au vu de ses capacités, je n’aurais peut-être pas besoin de formuler mon choix de rester avec ce nouveau groupe de compagnons à voix haute. Je fais quelques pas vers Jorus et m’adresse doucement à lui.

"Sieur Kayne, avez-vous besoin d’aide pour nettoyer et bander vos plaies ?"

Pas qu’il ne soit pas capable de prendre soin de lui-même mais bander son propre bras n’est jamais tâche aisée. Analysant le corps du jeune Jorus, je vois en plusieurs endroits ses habits imbibés de sang mais c’est surtout la plaie à son bras gauche qui a l’air inquiétante.

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Jorus Kayne
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Jorus Kayne » mer. 30 janv. 2019 16:11

Mon ascension est difficile le long du mur de la tour. Les multiples blessures que j’ai eues contre ces monstres font preuve de toute la cruauté dont elles sont capables dans un moment aussi critique. Si j’arrive tant bien que mal à supporter la douleur, c’est la perte de sang qui est un véritable défi. Plus encore que la tour, les effets secondaires de ma principale blessure sont un mur qui m’est impossible à gravir. La faiblesse physique se fait ressentir en première et bien que j’insiste à vouloir grimper la tour, les vertiges s’imposent à moi comme la vague prête à engloutir un navire : implacable.

(JORUUUS !)

La voix de ma faéra me donne se sursaut de conscience qui m’empêche de perdre complètement pied. Finalement je me résigne, à trop vouloir atteindre le soleil je vais m’en brûler les ailes. En prenant mille précautions je fais machine arrière, quitte à reprendre mon souffle lorsqu’un autre vertige se fait sentir. Contrairement à Yurlungur qui est parvenue à sortir indemne de notre combat contre les bêtes, j’ai l’impression d’être de plus en plus un poids à mesure que le temps passe. Aucune de mes potions ne sont efficaces et je n’ai rien à me mettre pour bander correctement la plaie.

(Je risque tout de même une infection. Devrais-je déchirer mes vêtements et les nettoyer avec de l’eau ?)

C’est alors que je réfléchie à ce problème que nous sommes surpris par l’apparition d’un nuage noir dans notre dos. Si nos compagnons que nous avons quittés pour qu’ils viennent en aide à Endar sont présents, ils arrivent accompagnés d’un être unique en son genre. Deux ailes, sombres comme les ténèbres dans le dos. Un corps fin bien que pourvu d’une aura de puissance. Ddans ses mains réside une lame au manche maculé de sang, tout comme le sillage qu’il laisse dans les quelques pas qu’il effectue dans notre direction. Pourtant, bien davantage que ces détails c’est bien son visage qui concentre toute mon attention, ou du moins, le trou béant qui y a pris place. Une simple bouche est néanmoins présente et une étrange couronne se dresse autour de sa tête. Une créature sans expression, un être sans regard et au-delà de son apparence un nom résonne en moi : le sans-visage.

Le sans-visage, l’Unique, le marcheur de mort, tant d’appellations pour un être considéré comme divin aux yeux de bon nombre de personnes. Nos compagnons étaient-ils ses prisonniers ? Sommes-nous les suivants sur sa liste ? La possibilité d’un danger immédiat me ramène à la réalité. Je pose ma main sur ma dague, prête à dégainer tandis que dans ma tête c’est une préparation de pot-au-feu qui mobilise ma concentration.

(Poireaux, oignon, céleri. Bordel c’était quoi son mot à la con ?)

L’unique se tourne vers Yurlungur. En tout cas c’est l’impression que j’ai. Impression renforcée lorsqu’il parle de l’évolution d’une jeune fille. Etrangement je me sens moins concerné. Ma camarade fait bonne figure, malgré qu’elle soit face à une divinité. Je les regarde tous les deux et parle plus à moi-même.

"Oui donc, le voyage de noce n’est plus d’actualité j’imagine."

Sans vraiment être rassuré, j’ai toujours la main sur le manche de mon arme tandis que mon esprit cherche ce fichu mot codé. Ariane, loin d’agir comme une prisonnière, vient jusqu’à moi et me propose son aide pour soigner mon bras meurtrie. Soudain, une parcelle de mémoire s’allume dans mon cerveau.

"Patate !" Dis-je haut et fort en regardant la dompteuse de lion.

Conscient des retombés probables lorsqu’on insulte le physique d’une femme même par mégarde, surtout celles qui ont comme ami proche un lion, je tente péniblement de me rattraper, alliant une gestuelle hasardeuse et le débit vocal d’un hystérique.

"Oui…heu non. Je veux bien de ton aide patate. Pardon non, t’es pas une femme t’es une patate. Heu non, c’est l’inverse, une patate pas une femme. Si, si, t’es une femme. Très belle, très charmante, avec de jolies formes. Non pas que tu sois grosse, ni une patate d’ailleurs…"

(Mais comment arrives-tu à te mettre dans des situations aussi grotesques ?)

Finalement l’intervention de ma faéra me stop dans mon élan. Soucieux de l’image je dois donner de moi-même je fais un tour visuel des personnes présentes et affiche un sourire gêné. Je reviens sur Arianne et tends enfin le bras ensanglanté.

"Excuse-moi. Si ta proposition tient toujours, je veux bien un peu d’aide."

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Kívan
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Kívan » ven. 1 févr. 2019 19:40

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Endar prend la parole, se déversant alors à nouveau dans un flot de paroles, mentionnant et ressassant divers noms, événements, lieux, et peuples à me donner le tournis. Je ne saisis rien d’intéressant dans son flot de parole qui est en réalité plus à une accusation dirigée vers l’entité sans face plantée devant nous. Je peux enfin seulement comprendre que le dénommé Naral Shaam et le Dragon Mauve mentionné un peu plus tôt dans la conversation ne sont qu’une seule et même personne. Je tourne la tête tout en gardant les bras croisés pour continuer à montrer ma désapprobation concernant l’attitude de l’elfe noir. Si seulement nous avions pu atteindre Elsar’Olth, nous nous serions débarrassés de lui pour qu’il soit soigné sur place, nous allégeant de notre mission par la même occasion. Je jette un coup d’œil vers Ariane et mon visage se décrispe quand je vois que cette dernière est assise sur le sol à côté de son compagnon. Elle doit être épuisée, le manque de sommeil dû à l’attaque de la nuit dernière ainsi que la marche avec la civière étant sûrement les principales causes. Si seulement la magie avait été moins aléatoire sur ce monde, j’aurais tenté quelque chose, mais de peut d’un nouvel effet aléatoire, je préfère ne rien essayer pour le moment…

Une fois le shaakt a bout de venin, le Sans-Visage prend enfin la parole, s’adressant plutôt directement à Endar, justifiant en partie ses actes passés. Toutes ces paroles commencent à me donner la migraine. Trop de questions. Trop d’incompréhensions. J’ai l’impression d’être un vulgaire pion jeté sur l’échiquier du pouvoir, uniquement utile pour faire infléchir la balance de la domination d’un côté ou de l’autre. L’impression d’être balloté comme un fétu de paille pris au piège dans des vents violents soufflés par des camps que je ne cerne pas. Au moins sur Yuimen tout est plus simple. Et encore… Ænarion m’a fait comprendre que tout était une question de point de vue… Tout cela me dépasse. Je n’ai qu’une seule envie, m’acquitter de la tâche pour laquelle je me suis engagé, pour laquelle j’ai donné mon nom et ma parole, et partir. Partir loin d’ici. Rentrer sur Yuimen. Retrouver ce monde que je ne connais guère plus mais sur lequel je me sens bien. Rejoindre la forêt et abandonner ces terres stériles… Je dois admettre que Sarenrae commence aussi à me manquer…

Je secoue la tête pour tenter de revenir dans l’instant présent et reprends l’écoute du discours du Sans-Visage. Devant la réticence finale de cette entité à donner un corps issu des expérimentations de Vallel à Endar, je ne peux m’empêcher d’esquisser un sourire de contentement. Notre interlocuteur se tourne désormais vers Ariane et je note la proposition faite à cette dernière concernant le fait qu’il peut la faire facilement rejoindre Yuimen. Cela aura sûrement son importance au moment voulu.

Je fronce les yeux pendant la déclaration du Sans-Visage me concernant. Fuir ne permet certes pas d’arranger les horreurs, mais cela permet de survivre plus longtemps. Je pense l’avoir suffisamment expérimenté à la milice de Bouhen. Fuir pour mieux se cacher et observer silencieusement ses adversaires… Fuir me paraît être encore plus une solution quand on se retrouve catapulté sur un monde que l’on ne comprend pas, quand on doit affronter des forces qui nous domine de tout leur être… Je secoue à nouveau la tête. La mission reste prioritaire. La seule bonne nouvelle des déclarations du Sans-Visage est que Naral Shaam est à la Tour d’Orsan et qu’il peut nous y conduire.

A ces mots, l’être se rapproche de nous, sa lugubre épée pointée vers les cieux et notre petit groupe se retrouve encerclé par une noire brume, qui me fait perdre conscience. Combien de temps cela dura-t-il ? Je n’en ai aucune idée… Toujours est-il que lorsque je retrouve la vue, le décor a changé et que nous faisons désormais face à une tour. Sûrement la fameuse Tour d’Orsan. En tournant légèrement la tête je peux apercevoir non loin de nous Yurlungur et Jorus, ce dernier semblant mal en point.

Pendant qu’Ariane se rapproche du jeune humain pour s’enquérir de son état de santé, de nombreuses questions se bousculent dans ma tête, destinées à l’être qui vient de nous faire voyager de nombreuses lieues quasiment sans effort : pourquoi ne pouvez vous rentrer dans cette tour ? Qu’est-ce qui nous y attend ? Y a-t-il moyen de vous appeler une fois Naral retrouvé ? Comment faites-vous pour contrôler vos fluides ? En tournant la tête vers le Sans-Visage, je constate que celui-ci nous a déjà oublié et s’est rapproché de la jeune fille. Mes questions devront donc attendre…

Je me rapproche alors du trio formé par Ariane, Al-Ayrad et Jorus, abandonnant Endar, seul, ce qui lui permettra peut-être d’éviter d’agresser verbalement quelqu’un à nouveau. Je constate que les bras de Jorus sont dans un sale état mais Ariane s’étant déjà proposée pour le soigner, je décide de ne pas intervenir. Les remarques de Jorus et Yurlungur concernant ma magie m’ont de toute façon fortement refroidi concernant mon avis à leur égard et je ne m’inquiéterai véritablement d’eux au point de tenter d’utiliser mes fluides que lorsqu’ils se trouveront dans un état critique, tout comme je l’ai fait pour Endar. De toute façon mon absence de contrôle sur mes fluides sur ce monde ne me rendra pas plus utile qu’un autre concernant les premiers soins.

« M’est avis qu’il faudrait nous reposer ici… Jorus, vous semblez mal en point et un peu de repos ne vous fera sûrement pas de mal. Quant à vous Ariane, vous n’avez pas, ou très peu, dormi la nuit dernière et l’heure de marche à porter la civière n’a pas dû arranger votre fatigue… Quelques heures de sommeil seraient peut-être indispensables aussi avant d’attaquer notre nouveau périple… Je peux prendre le relai concernant les premiers soins, si besoin est… »

Je jette un œil en arrière, avisant la silhouette d’Endar, toujours allongé sur sa civière.

« Il faudra aussi sérieusement discuter de ce que nous faisons d’Endar. Dans son état, nous ne pouvons pas nous permettre de l’emporter dans une tour dont nous ne connaissons rien… Mais nous ne pouvons pas non plus le laisser seul ici, ce qui immobilise forcément quelqu’un à l’extérieur de la Tour… »

Modifié en dernier par Kívan le jeu. 7 févr. 2019 17:55, modifié 1 fois.

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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Endar » ven. 1 févr. 2019 22:41

Les paroles du Sans Visage attisèrent sa haine à son égard, il se prenait pour une entité supérieure et en était peut-être une, mais il ne valait guère mieux que Naral Shaam qui avait déjà fustigé son manque de connaissance d'Aliaénon. Pourtant il avait vu Aliaénon de ses propres yeux, il en avait humé le parfum de traîtrise et l'odeur capiteuse de la guerre. Toute cette guerre n'avait été en réalité qu'une simple vengeance perpétrée par Vallel en personne. Les deux camps ne valaient pas mieux l'un que l'autre, seule la guerre totale intéressait le shaakt. Que cela soit les Ynoriens et leur prétendu honneur ne servant qu'à faire paravent pour mieux dissimuler leurs vices ou les troupes d'Oaxaca espérant naïvement conquérir Yuimen et tous les mondes reliés à celui-ci. Si la guerre se propageait, le dieu qu'il servait à présent pourrait se délecter des nombreux conflits qui en découlaient et Endar n'était nullement opposé à provoquer un certain chaos. S'il écoutait plus ou moins le Sans Visage clamer son innocence et son refus de faire la guerre aux Titans, ses frères, son refus catégorique de lui offrir un nouveau corps plus puissant le mit dans une rage indescriptible. Son corps tremblait d'une colère à peine contenue, ses yeux luisaient d'une haine tenace envers l'entité qui se laissait vénérer tel un dieu, un dieu toutefois n'intervenant jamais pour sauver les peuples le priant. Si l'Ouessien l'avait prévenu à propos des propositions miroitantes du Sans Visage qui s'avéraient n'être que des cadeaux empoisonnés, il n'aurait jamais cru qu'une telle entité reviendrait aussi rapidement sur sa parole. Endar n'avait fait que révéler sa vérité, elle était amère et sans doute ne plaisait-elle pas au Sans Visage mais ce dernier ne se trouvait que des excuses pour justifier ses inactions passées.


Passablement énervé par ce faux dieu, il eut du mal à écouter tranquillement la conversation que ce dernier entretenait avec l'humaine et le semi-elfe. Seules quelques brides de phrase lui parvenaient comme étouffés, aveuglé comme il était par sa haine. Ces brides lui suffisaient à comprendre ce qu'il désirait savoir. Naral se trouvait enfermé dans la Tour d'Orsan et c'était loin de le rassurer. Les sorciers d'Elscar'Olth les menait tout droit vers un piège à ce qu'il semblerait. De plus, les occupants d'Orsan commençaient à effectuer des recherches sur les âmes héroïques, étaient-ils devenus si ingénieux et avancés depuis les cinq dernières années. Cela lui laissait au moins une chance d'obtenir un corps viable pour poursuivre ses missions sur Aliaénon.

Lorsque le Marcheur de Mort s'approcha d'eux et leva son épée ensanglantée vers les sombres cieux, il nota bien mentalement ce que cette entité pouvait faire. Lorsqu'il sentit ou plutôt arrêta de sentir son environnement, il ne sut s'ils se déplaçaient ou non jusqu'à ce qu'ils finissent par apparaître magique derrière un Jorus et une Yurlungur bien surpris par leur arrivée. La Tour était là, juste devant lui et c'était tout ce qui comptait à présent. Sa colère s'était atténuée, surtout du fait des propos absurdes de Jorus qui l'avaient momentanément perturbés. Elle était aujourd'hui remplacée par une avidité sans borne. Cette avidité disparut elle-aussi pour ne laisse place qu'à une profonde tristesse lorsqu'il sentit que son corps n'était pas encore tout à fait capable de se mouvoir. Il pouvait bouger sa tête, ainsi que le bout de ses doigts même si très faiblement. Son corps était devenu une cage dans laquelle son âme tournait en rond tel un fauve emprisonné. Il ne pourrait pas se battre dans la Tour et il sentait déjà de nombreux regards se poser sur son corps. Sa paranoïa monta d'un cran, s'imaginant déjà rester devant la Tour sans jamais pouvoir y pénétrer. Il ne souhaitait guère attendre sa mort à l'extérieur, l'odeur pestidentielle des cadavres lui donnant une petite idée de la dangerosité des lieux. A l'intérieur se trouvait son corps qui l'attendait.


Sa tête se tourna à nouveau en direction du Sans Visage qui complimentait la fillette. Il attendit patiemment son tour avant de lâcher une nouvelle fois son venin, même si cette fois-ci il parlait plus calmement.


- Tu as perdu une occasion de te faire un allié, Sans Visage, à la place tu ne te fais qu'un autre ennemi. Nous reparlerons du destin de ce monde, mais je doute que la conversation sera agréable. Je vais continuer à en apprendre plus sur ce monde et je choisirai mon camp en conséquence...


Il ricana légèrement en regardant le Sans Visage avant de conclure :


- Je suis déjà un monstre, je n'ai pas besoin d'un nouveau corps pour le devenir.


Il attendit que l'entité les laisse, penchant la tête pour remarquer que Jorus avait subi de sacrées blessures qui nécessitaient des soins rapidement.
S'éclaircissant la voix, il s'exclama assez fort pour que tout le monde l'entende.


- Dans mon sac, il y a une gourde qui permettra de te guérir Jorus, je suis cruel et arrogant mais pas stupide, je n'ai aucun intérêt à vous laisser mourir ici. Je n'avais ni cet intérêt avant ni maintenant d'ailleurs. Kivan... Ariane.... Vous savez ce que je cherche dans la Tour, j'en ai besoin et personne ne m'arrêtera. Vous pouvez bien me tuer sur place ou me laisser moisir devant la Tour d'Orsan, je ne doute pas que beaucoup d'entre vous y aient pensé, dans ce cas je vous souhaite bonne chance pour affronter ce qui se trouve à l'intérieur. Après tout, sans moi vous aurez sans doute vaincu l'élémentaire de lave, n'est-ce pas ? Je suis sûr que vous serez de taille face à des choses plus terribles que cela, car c'est bien ce qui nous attend tous.


Il laissa un léger silence s'installer avant de reprendre doucereusement:


- Ou j'ai une bien meilleure idée... Vous m'aidez à acquérir le nouveau corps que je désire tant et cela me permettra d'enfin pouvoir me battre à nouveau et vous aider avec les occupants oaxiens d'Orsan. Je ne suis pas en état d'imposer d'ultimatum, mais dans ce cas précis, je vous serai plus utile de votre côté que simplement laisser de côté.

Un léger sourire malicieux orna ses lèvres.

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Sibelle
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Re: Episode 2 : Du Mauve et du Noir

Message par Sibelle » sam. 2 févr. 2019 01:11

La guerrière apprit bien malgré elle que l’atterrissage constituait une manœuvre plus complexe qu’il n’y semblait au départ. Elle avait entamé un piqué à un angle trop élevé, avait négligé de ralentir et avait redressé la tête trop tardivement. Lorsque ses sabots touchèrent trop abruptement le sol, sa vitesse était telle qu’elle ne put ralentir. Par réflexe, elle écarta ses ailes et la résistance de l’air diminua un peu sa vitesse, mais elle ne put tout de même retenir une rude chute sur le sol.

Malgré cet abrupt retour sur la terre noire des Landes, ce fut la tête haute et les oreilles bien dressées sur sa tête que l’hypogriffe se releva. Elle regarda le mage qui s’avançait prudemment vers elle son bâton bien en main. Satisfaite de la mine ahurie de celui-ci, elle se cabra sur ses pattes arrières avant de retrouver peu à peu sa forme elfique. Un sourire élargi et des yeux brillants illuminaient son visage, malgré sa vaine recherche, elle était une femme comblée.

Malheureusement pour son compagnon, le visage de la belle se renfrogna et prit donc une expression plus familière lorsqu’elle entendit un rugissement inquiétant venant du haut des cieux.

N’ayant pas perdue la vision de l’aigle malgré son retour dans son corps d’origine, Sibelle discerna peu à peu le dragon noir qui descendait du couvert nuageux. Cette ténébreuse présence lui rappela qu’elle avait échoué dans sa tentative d’empêcher le mage d’utiliser l’appeau à dragon. Le terrible rugissement de l’énorme créature noire recouverte d’écailles épaisses ne laissait aucun doute sur son humeur. Le mage l’avait dérangé et ils allaient payer pour.

Le dragon se posa donc lourdement sur le sol tout en présentant son immense gueule ouverte et pleines de dents à Sibelle et Xël. Non besoin de connaître plus à fond le comportement des dragons pour deviner qu’il les menaçait de les dévorer.

Ce fut d’une grave voix emprunte de colère qu’il s’adressa à eux, les affublant d’un titre non flatteur d’être inférieur. Il leur fit bien comprendre qu’il n’était pas à leur service et qu’ils n’avaient aucun droit d’utiliser ainsi ce sifflet à dragon. Sibelle n’appréciait pas ce prétentieux reptile, mais devait admettre qu’il était tout à fait dans son droit de s’en prendre à eux. Le visage fermé, les sourcils froncés, elle rageait intérieurement. À la place du dragon, elle aurait ruminé autant. Elle en voulait Xël à d’avoir utilisé ce maudit sifflet afin d’appeler cet arrogant dragon. Elle s’en voulait également d’avoir échoué dans sa tentative de renverser Xël ou de lui retirer l’appeau de la bouche. Mais Sibelle, fière et loyale, encaissa les reproches du dragon et ne dit mot. Elle n’avait aucunement l’intention de défendre sa peau en prétextant d’y être pour rien.

Trépignant de rage, le reptile noir les prévint qu’il ne les conduirait nulle part et ne répondrait pas à leurs questions. Il leur ordonna ensuite de poser leur sifflet au sol afin qu’il les détruise sans attendre. La colère le rendant plus volubile, il leur avoua avoir discuté avec leur compagnon poilu et que ce dernier avait obtempéré à sa demande et avait eu la vie sauve. Sibelle poussa alors discrètement un soupir de soulagement : Sirat était encore vivant. Sur sa lancée, le dragon leur fournit plus amples informations, notamment que l’humoran était reparti sur Yuimen. Et pour ce qui était de l’être qu’ils recherchaient, il n’avait désormais plus d’influence sur son peuple. Il termina en leur ordonnant de trouver un motif valable pour qu’il les épargne.

Mais Sibelle n’était pas dupe, voyant son énorme gorge se gonfler et rougir, elle comprit qu’il n’avait vraiment l’intention de les épargner. Il était prêt à les rôtir sur place peu importe ce qu’ils allaient dire.

Alors qu’elle réfléchit à la façon qu’ils pourraient fuir avant d’être calciné, un nuage ombrageux apparut tout près de Xël. Thensoor Val’Crooh, celui qu’ils avaient contacté un peu plus tôt arrivait à point nommé.

Vaquant au plus urgent, le membre du conseil d’Or, aussi l’ancien Archi-sorcier, porta son attention sur le dragon. Tout en s’inclinant respectueusement, il se nomma puis supplia le dragon de laisser la vie sauve aux deux aventuriers. L’honorant du titre de seigneur des Cieux Sombres, il lui demanda de lui accorder cette faveur toute personnelle.

Tirant bruyamment l’air de ses naseaux, le dragon accepta la faveur demandée en leur octroyant un peu plus de temps, mais sa demande demeurait. Sibelle et Xël devrait prouver qu’ils méritaient la vie sauve.

Xël plus rapide que Sibelle, approcha bravement d’un pas et décrocha l’appeau de sa ceinture pour le jeter aux pattes du dragon. Sibelle sourcilla légèrement, craignant que le dragon interprète ce geste comme de la provocation. Ayant bien observé le membre du conseil d’or, Sibelle avait compris qu’il lui faudrait tempérer son caractère et démontrer un certain respect envers cet être qui régnait en roi et maître sur ces terres arides.

Alors, sans perdre une seconde, elle fouilla dans son sac à la recherche de l’appeau. Ses mains tombèrent sur une gemme mauve qu’elle garda dans sa paume tout en poursuivant sa recherche. Rapidement, elle mit la main sur l’appeau et le sortit. En vitesse, sans la regarder, elle mit la pierre dans sa tunique pour l’observer plus tard. Puis, tête inclinée au sol en signe de déférence, elle fit quelques pas symboliques en direction du dragon. Elle mit ensuite un genou à terre et déposa l’appeau au sol.

Xël prit la parole le premier, d’une manière familière qui lui était coutumière, puis terminant sur une question portant sur la pierre de vision. Sibelle jugeait que la liche aurait été plus apte à répondre à cette question, mais elle garda pour elle ce commentaire.

Prenant la parole à son tour, Sibelle expliqua :

« Cet appeau nous avait été remis afin d’appeler le dragon d’or qui avait accepté de nous accorder cette faveur de son propre gré. Je comprends parfaitement votre réaction et implore votre pardon pour notre geste indélicat. »

Bien qu’elle considérait important de faire attention à ses gestes et paroles, elle n’était pas lèche-botte pour autant. Ayant d’abord fait ses excuses, elle donna enfin la raison qui devrait lui permettre de rester en vie.

« En quittant mon monde d’origine, je me suis engagée auprès des membres du conseil d’Or afin de mettre mes talents à leur service pour les aider et aider les habitants d’Aliaénon, peu importe leur races, leur origine ou leur ambition. Je fais partie des gens qui tiennent parole, et je tiens donc à honorer la promesse que j’ai faite en me rendant ici. Voilà pourquoi ma vie est importante. »

Elle prit une petite pause puis poursuivit avec la demande qu’elle avait en tête.

« Tout allons dorénavant parcourir ces terres selon nos propres moyens. Par contre, puisque vous êtes le seigneur des cieux, je dois vous demander la permission pour voler dans votre ciel lorsque j’emprunterai la forme de l’hippogriffe. Et je respecterai l’horaire, l’altitude ou autre restriction que vous m’imposerez. »

La guerrière avait prononcé ces dernières paroles tout en regardant le dragon dans les yeux. Elle avait été honnête et avait obtempéré aux demandes de ce dernier, elle ne pouvait en faire plus. Si ce dernier se montrait raisonnable, elle se tournerait vers le conseiller qui venait d’apparaître afin de lui poser quelques questions et lui montrer ce gemme qui s’était retrouvée dans sa besace sans qu’elle sache pourquoi.
Modifié en dernier par Sibelle le dim. 3 févr. 2019 15:29, modifié 1 fois.

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