Les Rues

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Yuimen
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Les Rues

Message par Yuimen » sam. 6 janv. 2018 11:38

Les rues de Lebher

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Les routes dans Lebher sont toutes identiques et relativement droites et parallèles. Elles sont faites de terre battue pour éviter de tout dénaturer et sont tranquilles, rien de spécial ne s’y passe. Les gens peuvent arriver à Lebher par ces routes sans traverser la forêt.

Lorsque les rues sont enneigées, gare à ne pas tomber car la chute pourrait être douloureuse. Heureusement, pour bien avancer, quelques gardes sillonnent toujours les rues pour éclairer le chemin, déposant même de temps à autre des petites lanternes qui brillent de jour comme de nuit.

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Kymil
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Re: Les Rues

Message par Kymil » mer. 12 févr. 2020 22:40

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Un frisson parcouru sa nuque, la paix entoura son esprit. En s’habillant à la hâte, elle sentit dans la pochette à sa ceinture une bosse. Elle sortit une perle lustrée et brillante dont la couleur changeait imperceptiblement, son regard s’y perdit un instant, les couleurs bougèrent alors pour elle seule et une vague de détermination et de confiance l’envahit. Son sourire s’étira et, les yeux clos, elle remercia sa Déesse protectrice et son auguste émissaire hivernal pour ce signe, ce don et le privilège d’avoir ainsi été écoutée.


Sa décision prise d’intégrer l’armée Earionne de Lehber, elle s’entraîna pendant plusieurs semaines. Tous les jours, avant de rejoindre son atelier, elle alla nager dans l’océan, toujours plus vite, toujours plus loin jusqu’à avoir les membres tétanisés par l’effort. Chaque soir, elle renforça son endurance en courant et participant aux entrainements prodigués par des anciens instructeurs de l’armée. Les elfes qu’elle rencontra là-bas étaient, comme elle, des civils, conscients de la volonté de leurs voisins de l’Est à envahir et exterminer tout ce qui pense différemment d’eux. Ils étaient aussi, et avant tout, les enfants de Moura et les faibles, tant de corps que d’esprit, n’avaient pas leur place ici. Aussi, elle s’entraîna, entourée de mâles et de femelles déterminés et concentrés.
Après plusieurs semaines, elle se sentit prête. Le lendemain débutera une nouvelle vie, une nouvelle carrière, une nouvelle voie dans laquelle elle s’engagera le cœur plein de courage. Elle fera la fierté de son père, elle sera une digne représentante de la lignée des Ulali.
La perle de l’océan lui avait montré le chemin.


Le terrain, de forme ovale et au sol martelé par la force de centaines de pas, se trouvaient au nord de la guilde des armuriers. Lorsque celle-ci sortit de terre, le terrain au nord n’était guère qu’une place encombrée d’outils et d’armes que les soldats testaient pour l’entrainement ; très rapidement, la demande fut forte de la part des citoyens, des artisans, des marins, des jeunes ou des nouveaux arrivants, pour apprendre de la main de ceux qui s’entrainaient.
Plusieurs fois par an, des membres instructeurs de l’académie militaire venaient ʺà la pêche aux talentsʺ. Le terme n’avait rien d’officiel mais l’expression était depuis longtemps consacrée. Ce matin, Kymil s’y présenta, déterminée à prouver sa valeur et sa détermination.
Fluette, légère et entraînée, son endurance n’était pas mauvaise ; les épreuves en demandant ne furent pas un problème pour elle. Mais ces épreuves, si tant est qu’elles fussent considérées ainsi par l’éarionne, n’étaient guère plus qu’un échauffement à la suite, plus difficile. L’épée et le bouclier étaient lourds à porter, le casque glissait sur son visage plat et écrasait ses tentacules, quant à l’armure, elle pesait presque autant qu’elle.
A aucun moment, elle ne s’en plaignit. Elle s’adapta vite et dépassa ses propres capacités antérieures malgré la douleur, malgré les blessures ou la fatigue.
Les consignes étaient aboyées en rafale à tous comme un seul homme et elle s’exécutait, parfois avec un temps de retard, parfois trop rapidement. Haletante, elle couru à s’en faire saigner les palmes. Souffrante, elle apprit à porter et soutenir ses camarades. Presque aveugle sous son casque, elle apprit à se placer en formation défensive.
Vint ensuite les épreuves dites de combat. Epées en bois remplacèrent les vraies, non moins lourdes pour autant. En rang et face à un soldat, les futures recrues reçurent les mêmes consignes et apprirent les mêmes gestes de défense et d’attaque. Dès le début, une nette différence se fit entre les participants. Kymil le vit mais ne s’en découragea pas, elle n’avait pas d’illusion quant à ses capacités et compétences martiales, elle savait en revanche que tous les soldats n’étaient pas des guerriers aguerris.
Son poignet la faisait souffrir mais qu’importe, elle levait l’épée pour parer les coups hauts. Son coude se relâchait trop vite, son épée tremblait dans sa main moite et seule l’agilité du soldat empêcha par deux fois qu’elle ne se prenne un mauvais coup à la tête. Et malgré tout, elle se redressait et avisait son adversaire d’un signe de la tête. Pendant une demi-heure qui lui sembla une éternité, elle apprit à positionner ses pieds, à placer et pivoter ses hanches, à tenir ses épaules pour gagner en force sans tétaniser les muscles noueux de ses bras. Exténuée, elle commençait à souffrir plus que de raison ; mais là encore, sa détermination ne faiblit pas.

La dernière phase de l’examen débuta. Les recrues furent placées en binôme selon leurs capacités respectives. Kymil se trouvait face à un mâle un peu plus jeune qu’elle, mince et sec, à la peau bleu pâle et aux traits du visage tirant vers la finesse des Hinions, son expression brute et sévère parvenait pourtant à rigidifier l’ensemble.
Au coup de sifflet, les échanges débutèrent. Son adversaire fut plus rapide qu’elle, sans doute moins fatigué et plus habitué à des efforts physiques intenses. Fougueux, il rata pourtant son premier coup, paré inutilement par Kymil qui ne put reprendre l’avantage à temps. La tranche de son épée buta contre le plat de la lame de son adversaire qui la repoussa avec vigueur. Elle trébucha et tomba sur les fesses. Ordre avait été donné de ne point attaquer l’adversaire à terre, il était ici question d’évaluation et non d’un combat contre un ennemi. D’une main ferme, il prit celle de Kymil et la releva vivement, profitant de leur proximité pour partager quelques mots … que Kymil connaissaient que trop bien.

« Tu me fais perdre mon temps l’hybride ! »
« L’unité est notre seule chance face à nos ennemis. Répliqua-t-elle avec conviction. Peu importe nos physiques, nous sommes une nation, nous sommes les enfants de la Reine mères des Océans. »
« A bien des égards, les crevettes le sont aussi … cela n’en fait pas des Earions. Alors, reste à ta place, hybride. »

Il la relâcha avant qu’elle ne réponde. Mille fois, elle avait entendu ce terme, depuis son enfance où cela la faisait pleurer jusqu’à ce jour où il ne faisait que la peiner, pour l’autre. Son peuple avait depuis quelques centenaires une tendance à rechercher l’uniformité, et l’influence des trop beaux et trop lisses Hinions y était pour beaucoup selon elle.
Mais ce qui ne changeait pas, c’était l’influence de la force. Les mots se chuchotaient et se cachaient lorsque la force grandissait. Nul Earion n’osait plus se moquer du physique de son oncle.

Loin de la blesser ou de la faire douter, les mots de ce pêcheur en quête de gloire l’exhortèrent à repousser plus loin encore ses limites. A ses hoquets haletants se succédèrent des cris motivés. Elle répliqua la première d’un coup d’estoc. Une fente presque parfaite, son bras armé tendu et ferme, elle toucha le haut de la cuisse de son adversaire qui riposta aussitôt en balayant l’épée de Kymil d’un mouvement brusque. Elle se souvint des consignes, elle ne perdit pas de temps à regarder l’arme tomber, un geste instinctif qui pourtant l’aurait fait perdre du vue les mouvements de l’adversaire. Moins handicapée par le poids de l’arme, elle réussit à échapper au coup suivant.
Le pêcheur, plus vif et plus agile, l’empêcha à plusieurs reprises de récupérer son épée, en se plaçant devant ou en la repoussant du pied. Kymil en perdit sa concentration. Chercher l’épée, suivre et anticiper les mouvements, réfléchir à une stratégie ; tout cela était éprouvant pour une éarionne habituée à de la technicité dans sa vie de tous les jours.
Elle prit le coup de plein fouet ; une vraie épée lui aurait valu d’être estropiée à vie, et dans un véritable combat d’être achevée sans états d’âme. Ce combat-ci était fini. Ou, du moins, ce fut ce qu’elle cru. Son adversaire, la voyant se redresser avec hauteur et dignité, persuadée qu’elle était d’avoir fait ses preuves ; retourna à la charge, bien décidé à abattre d’une toute autre manière celle qui ne baissait pas le regard sous la défaite. Les cris d’avertissement de leurs soldats référents la firent tourner la tête à temps. Pas tout à fait à genoux ni tout à fait debout, elle traîna du pied pour s’affaisser, et donner un coup de coude dans l’aine de son adversaire plié en deux au dessus d’elle. Cela lui arracha un grognement de douleur, son bras invalide lui ayant servi d’appui. Le pêcheur lui donna un coup de genoux dans la mâchoire avant d’être soulevé sans douceur par les instructeurs venus stopper les deux ʺbagarreursʺ.


Groupe après groupe, les participants revinrent sur les bancs, attendant patiemment la fin des délibérations. Les blessés furent auscultés, l’épaule de Kymil enduite d’un baume et bandée. De l’aveu amusé des soignants, les blessures étaient courantes, en raison notamment de l’amateurisme des candidats mais surtout de leur fougue à prouver leur valeur. Ils y voyaient une force, bien sur, de même que les gradés les jugeant ; un Earion ne cède pas.

((Je n’ai pas cédé.)) se dit-elle en gardant le menton haut.

Plusieurs minutes plus tard, aussi sobrement que cruellement, des noms furent aboyés, et les nommés purent rejoindre les rangs en face. Aucun discours, aucun jugement, aucune critique ni encouragement : ceux qui avaient échoués aujourd’hui repartirent comme ils étaient venus, certains sinon tous avec la ferme intention de retenter leur chance.
Kymil fut de ceux là. Elle avait échoué.
Modifié en dernier par Kymil le jeu. 24 févr. 2022 18:32, modifié 3 fois.

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Kymil
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Re: Les Rues

Message par Kymil » jeu. 24 févr. 2022 18:15

Elle ne resta pas assise longtemps, déçue de ne pouvoir annoncer la bonne nouvelle à ses parents. Devait-elle d’ailleurs leur en parler dès maintenant, demander conseil à son père. Persuadée que sa motivation et sa détermination seraient suffisantes à un bon entrainement, elle se questionnait maintenant sur les raisons de son échec. Son père saurait lui en dire plus, saurait la conseiller ; mais une part d’elle-même restait hantée par un doute conséquent : et s’il refusait qu’elle le fasse, que ferait-elle ?

Elle choisit donc de rentrer directement à l’atelier, dans la petite chambre qu’elle louait aux propriétaires de la boutique. Et, dès le lendemain, recommença à s’entrainer plus longtemps, plus durement.

Un soir, alors qu’elle s’entraînait à l’épée sur un mannequin articulé, un Earion vint à sa rencontre.

« Puis-je vous interrompre ? »
D’une ondulation des ses palmes, elle l’y autorisa. L’elfe avait les yeux foncés, une peau claire marquée par des tâches plus sombres ressemblant à un pelage animal. Il portait un uniforme en cuir et une cape où était cousu l’emblème de la ville. Son visage lui était familier, il était là le jour du recrutement, elle se souvint l’avoir vu s’entretenir avec les instructeurs avant que le verdict ne tombe. Il lui posa des questions sur son entrainement, ses méthodes et ses connaissances tant martiales que sur la carrière d’un soldat de l’armée Earionne. Sur la réserve, elle répondit succinctement.

« Ce n’est pas la force qui vous manque, dit-il alors après l’avoir écoutée. C’est la discipline. Vous entraîner ainsi ne rime à rien, vous n’avez pas les bons gestes et même si vous parveniez à vous endurcir pour réussir les épreuves de force, vous échouerez. Vous n’avez pas fait vos classes et n’avez plus l’âge pour les entamer, vous ne prenez conseil de personne pour combler ce manque crucial. Ces recrutements ne sont pas destinés aux amateurs, ils recherchent l’élite parmi les guerriers d’autres régions et surtout, ils recherchent l’uniformité, l’obéissance et la rigueur.
- Rien de tout cela ne m’est inaccessible.
- Pas dans l’immédiat.
- Que me voulez-vous à la fin ? Vous ne réussirez pas à me convaincre d’abandonner.
- Comme nous tous. Nous sommes les enfants de Moura, l’abandon n’est pas une option envisageable. Permettez-moi une dernière question : pourquoi voulez-vous à ce point intégrer l’armée à votre âge ? »

Ses raisons n’étaient point confidentielles mais elle s’abstint de lui raconter les moindres détails sur sa famille. Cet homme avait un franc parlé déstabilisant, il s’était invité pendant son entrainement sans même se présenter et Kymil n’était pas encore prête à divulguer quoi que ce soit de personnel à un inconnu trop curieux. Elle lui dit l’absence de mâle dans sa fratrie et son devoir de suivre la voie de son Père ; qu’il n’y avait plus grande fierté dans son avenir.

« Je comprends. Vous me parlez de devoir, de fierté mais dans quel but ? »

Kymil ouvrit la bouche puis réfléchit quelques instants. Intégrer l’armée n’était effectivement pas un but en soi, elle s’en rendit compte dès que ces mots frôlèrent le bout de sa langue.

« A-t-on besoin d’autre but au devoir de chacun que le devoir lui-même ?
- Intégrer l’armée n’est point un devoir, intégrer l’armée n’est point le seul moyen de servir son pays. Les mères qui élèvent ceux qui construiront notre avenir ne sont pas moins honorables que les ingénieurs, les pêcheurs, les guerriers ou même nos dirigeants.
- Que me voulez-vous à la fin ?
- Je suis recruteur pour la milice de la ville, ancien membre de l’armée moi-même, je suis autorisé à observer et recruter les âmes déterminées à combattre pour défendre notre cité, notre peuple et notre culture. Je suis ici pour vous certifier que vous ne pourrez jamais intégrer l’armée, ni demain, ni jamais. Je vous l’ai dit, il vous manque l’essentiel.
Mais point l’essentiel pour faire votre devoir. »

Kymil l’observe avec hauteur, pensive.

« La milice de la ville ? Je connais votre réputation, que feriez-vous d’une personne comme moi ?
- Vous vous sous-estimez, ou peut-être nous méconnaissez-vous. Puis-je vous faire part de mon avis ?
- Vous ne vous êtes point gêné jusque-là, faites donc.
- Vous êtes déterminée, personne ne pourra vous l’ôter mais tous vos entraînements ne servent en rien votre véritable potentiel.
- Et quel est-il ?
- Votre potentiel magique bien sûr. Je le sens en vous, il ne demande qu’à éclore.
- Sottises que cela. Tous les Earions possèdent l’Eau de Moura en eux, mais cela ne fait de nous des magiciens pour autant.
- Cela est vrai, Moura est en chacun de nous. Et Moura sait reconnaître la valeur des Siens. Permettez-moi de vous prouver que je ne me trompe pas en voyant en vous l’un d’Eux. »

L’œil expert de l’Earion frémit imperceptiblement, il était parvenu à toucher la corde sensible de sa jeune proie. Sa volonté assez subite de faire son devoir cachait une volonté plus secrète, à peine assumée par l’elfe elle-même : celle de faire ses preuves, d’être reconnue. Dernière née d’une grande fratrie, sa place en tant de fille n’était pas écrite dans le marbre ; la grossesse de sa mère était pour elle un événement plus difficile à vivre qu’elle se l’avouait. Sa vie, son quotidien ordonné, son métier pointilleux, l’affinité qui la liait à son père, tout cela lui convenait. Une part d’elle enfouie sous tout cela savait pourtant que si l’enfant à venir était un mâle, sa vie en serait fatalement bouleversée.
Alors, elle accepta l’offre de cet inconnu malgré toute la suspicion qu’elle ressentait envers ses manières cavalières.


Ils rejoignirent un endroit plus tranquille, toujours sur le terrain d’entraînement mais éloigné des bruits et des cris. Assis en tailleur l’un en face de l’autre, Kymil écouta la voix et les conseils prodigués par le recruteur de la milice.
Elle ferma les yeux et vida son esprit. Sa voix résonnait dans son esprit, la guidant vers un point isolé, entourés d’eau et de l’aura de la Déesse Moura. Fidèle croyante, Kymil ressentit aussitôt un paisible sentiment, un calme sécurisant qui lui ouvrit la voie vers un puits profond. Elle y fut attirée par l’appel ténu d’une force endormie et impalpable, une force qui s’éveillait pas à pas, liée à la conscience grandissante de sa présence d’un être en plein éveil. Tous deux, fluides et esprit se rencontrèrent alors pour la première fois et s’associèrent sans heurt, comme une évidence. Sa conscience enfin délivrée, Kymil plongea plus profondément et ouvrit la cage invisible qui enfermait ses fluides en son sein. La félicité se lit sur son visage si placide d’ordinaire. Sans ouvrir les yeux, elle apprit à sentir et guider ses fluides, à les écouter et leur montrer la voie.
Il lui demanda ensuite de se laisser guider par ses fluides, l’invita à comprendre leur pouvoir inné, ce Don de Moura offert aux Siens. Il s’offrit en adversaire et demanda à Kymil de relâcher ses fluides, d’observer et s’imprégner de leur force de vaincre, de ne point avoir peur.
Elle ouvrit son esprit à la Force émise par les fluides d’Eau, sentit leur volonté et l’accompagna si naturellement qu’elle se sentit maîtresse du geste. Le sortilège, enfin accepté comme tel, tenta alors de vider de son eau le corps de l’elfe afin de le déshydrater et fortement l’épuiser. Il fit signe à Kymil de relâcher son étreinte et le contact avec ses fluides.

Elle ouvrit les yeux.
Sans qu’un mot ne fût prononcé, la jeune elfe et son mystérieux interlocuteur s’entendirent. La première avait ce regard étincelant de reconnaissance, avait découvert une chose qui allait changer le cours de sa vie ; le deuxième le sourire énigmatique du vainqueur sans effort.

« Comment ? » Demanda enfin Kymil en rassemblant ses questions.

Habitué des effets qu’il procurait aux rares personnes comme Kymil qui n’avaient pas conscience de leur Don, il répondit directement à sa question.

« Je suis un spécialiste de la magie, je peux discerner les fluides élémentaires. Et si j’ai su le reste c’est parce que cela fait trois semaines que je t’observe t’entraîner uniquement à l’épée.
- Si je comprends bien, même avec cela, dit-elle en montrant ses palmes humides, je ne peux toujours pas prétendre à réussir ces épreuves ? »

Cela, en revanche, il ne l’avait pas prévu. Le ton fataliste de l’elfe au faciès de poisson avait quelque chose de profondément posé, comme ayant déjà réfléchi à toute une infinité de possibilité, mais suggérait surtout une amertume bien réelle. Se savoir dotée de magie avait ouvert une nouvelle voie à sa vie, aux antipodes de ses vœux les plus excentriques, mais elle savait maintenant que cette voie ne la mènerait jamais à suivre les pas de son père.

« Si l’armée recherche l’uniformité, l’obéissance et la rigueur. Que recherchez-vous ?
- La détermination, l’esprit d’équipe et l’ingéniosité. Et, voyant Kymil s’enfermer dans ses pensées, il préféra l’y laisser.
Je vous ai observé, écouté et je vous le répète, intégrer l’armée n’est point essentiel pour faire votre devoir. Mon offre n’est pas limitée dans le temps. Si votre ambition demeure, nos portes seront ouvertes. »

Sur ces mots, il se releva et partit d’un pas chaloupé et tranquille. Kymil se leva bien des minutes après et rejoignit la petite chambre au dessus de son atelier.


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