L'Auberge de Grigwig le Beau

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Yuimen
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L'Auberge de Grigwig le Beau

Message par Yuimen » ven. 5 janv. 2018 10:51

L'auberge de Grigwig le Beau

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Chambre à l'étage

Sombre bâtisse de pierre grise trônant entre les docks et les ruelles les plus mal famées, l’auberge de Grigwig le beau est certainement l’une des moins fréquentables de la région. Rien de l’extérieur ne laisse entrevoir la nature de l’établissement, si ce n'est les relents d’alcool et d’urine, ainsi que les incessants va-et-vient de prostituées de bas étage, d’ivrognes et de trafiquants en tout genre. L’ambiance n’est pas beaucoup plus chaleureuse et conviviale à l’intérieur, bagarres, viols et meurtres étant ici monnaie courante. Même le plus courageux des miliciens ne pourrait ramener l’ordre et la masse d’arme du violent tenancier semble être la seule chose respectée dans cette auberge. Du haut de ses deux mètres, Grigwig le beau arbore un impressionnant visage purulent et aux traits grossiers, mais c’est sa carrure de troll qui convainc toujours les clients les plus réticents à payer.

Les services proposés ici sont des plus variés. En effet, quelques sinistres chambres sont disponibles à l’étage, humides et nauséabondes à souhait. Ne vous étonnez pas de trouver un cadavre sous le lit ou une flaque de sang dans un coin, Grigwig n’aime pas trop faire le ménage. Ensuite, la vaste cave vous propose combats de chiens, de coqs, voire d’ivrognes durant toute la nuit, faisant le bonheur des parieurs. La salle commune, quant à elle, vous propose bien d’autres plaisirs comme les divers petits trafics de drogues, les services de prostituées à la beauté assez relative, les sempiternelles rixes entre bandes rivales pour se défouler et, bien entendu, la bière bon marché aux relents de sueur.

Une chose est certaine, vous passerez ici un séjour dont vous vous souviendrez longtemps.

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Fromritt Verlorgot
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Re: L'Auberge de Grigwig le Beau

Message par Fromritt Verlorgot » mer. 9 janv. 2019 03:30

Âme en Peine


Il titubait, ses jambes le retenant à peine. Ses pieds se dérobaient avec maladresse sous les pavés cabossés de la basse-ville. La pluie tombait, se mêlant à la chaleur étouffante de Tulorim. L’eau infiltrait les joints au sol, de minuscules rivières dans un océan d’excréments.
Son épaule gauche racla un mur, esquintant son haut déjà trempé. Son buste tanguait à l’instar d’une bouée jetée à l’eau, abandonnée dans une tempête. Ses mains parsemées d’éraflures et de griffures poussaient chaque obstacle. Sa barbe poisseuse avait triplé de volume, recouvrant disgracieusement son menton ainsi que ses joues recouvertes de crasse et de boue.
L’averse battait son plein. Pourtant, ses yeux noisette, cerclaient de veinules rouges, laissaient couler un liquide étant le sien. Ses paupières mi-closes étaient celles d’un homme ivre, ivre de peine et d’alcool. Ses lèvres tremblaient, pas de froid, un mélange de hargne, de tristesse et de manque sévère de sucre. Ses cheveux bruns pendaient, comme les espoirs perdus d’un millier de pendus.

Ses pas instables le menèrent jusqu’à une taverne malfamée. Il peina à tourner la poignée, restant dehors à prendre la pluie. Lorsqu’il comprit qu’il fallait juste la baisser, il réussit à entrer, misérable comme un chien mouillé.
Des relents méphitiques de sueur, sang et de sperme affluèrent par vague à ses narines. Ses poils se redressèrent et plusieurs haut-le-cœur survinrent, il les maîtrisa difficilement. Sa tête penchait à droite comme à gauche pour laisser ses pupilles voir l’horrible spectacle de ce lieu de perdition.
Les gars se battaient sur la pierre moche du sol, dans un coin une femme semblait refuser les avances d’un petit groupe de racailles et les autres cuvaient sur le comptoir. Grigwig le beau essuyait une de ses coupes bon marché, peut-être même rouillée à certains endroits, avec une application digne de lui-même.
L’ivrogne fraîchement arrivé s’installa à un tabouret, manquant de choir pitoyablement. Il posa ses coudes sur le comptoir, fit d’abord tomber sa tête sur la droite, puis la gauche, avant de trouver le juste milieu. Les épaules trop remontées, le cou baissé, il regarda le tenancier quelques secondes. Celui-ci, qui observait le tumulte de son bar, daigna porter attention au nouvel arrivant.

C’est pourquoi, Verlorgot ? Demanda-t-il, visiblement au courant de son nom de famille.

Une bouteille de Rapi… Raki… Rakija. Il sortit sa bourse qui s’entrouvrit à l’atterrissage sur le bar. J’ai de… de.. de… Son esprit se perdit une poignée de secondes. de quoi payer… Il éructa en tournant le visage, laissa quelques pièces avant de reprendre sa bourse. Ça t’suffira ?

Ouais. Il prit les neuf yus déposés. Mais si tu viens à crever, fais le dehors. J’ai déjà assez de merde à nettoyer, ici ! Dit le gérant, en allant chercher l’alcool demandé. Tu sais quoi boire pour oublier, ou tout du moins te défoncer l’crâne ! Il revint en claquant la bouteille au liquide orange pâle.

J’dois… pas oublier aujourd’hui. Je veux juste… juste… Il ouvrit la bouteille d’un geste brutal. Un homme doit vraiment supporter tout ça ? Il but, pas qu’une seule gorgée. Il posa la bouteille et s’étouffa, il toussa, cracha et s’essuya la bouche. Hein ?!

Si tu veux chialer, mets-toi dans un coin et laisse-moi en paix, Fromritt. Il se tourna pour faire semblant d’essuyer de la vaisselle. Ou alors, t’es venu ici pour te défouler, c’est ça ? L’espadonneur eut l’air d’acquiescer, puis reprit une grosse lapée de Rakia. La cave, comme toujours. Le tenancier se retourna et regarda l’épave lui faisant face.

Le regard fatigué du bretteur soutint celui du colosse. À mesure qu’il le soutenait, le géant souriait. Il semblait déceler autre chose que le commun des mortels dans les iris marrons du client. Ce dernier se leva de son tabouret en faisant racler sa bouteille sur le comptoir. Il faillit tomber mais se rattrapa sur des appuis bien plus solides. Ses pas lourds s’écrasaient sur les pierres pourries, en direction de la fameuse cave où des cris d’un autre genre émanaient.
Il recula instinctivement la tête en voyant les escaliers se dédoubler à sa vue. Avec précaution, il tâta du pied pour savoir quelles marches étaient réelles et lesquelles ne l’étaient pas. Sa descente fut longue, ennuyeuse et dangereuse. En cours de route, et de gorgées, il arriva déjà à la moitié de sa bouteille, il haussa les épaules et continua de vaciller jusqu’en bas.
L’humidité dans l’air n’avait pas son pareil, la moisissure lézardait chaque mur comme les innombrables fissures causées par le temps, le manque d’entretien et les coups qu’ils avaient subis. Des tonneaux par dizaine se trouvaient dans le fond, certains fuyaient légèrement, un était ébréchait et servait à déshydrater la gorge des manants pariant et se battant là.
Fromritt avançait, ses lourds pas patauds et incertains attirèrent l’attention des soûlards.

Qu’est-ce t’fais là, Verlorgot ? Dit un des brigands, l’air mauvais.

Ça te regarde, sac à foutre ? Son ton était fielleux.

Peut-être avait-il eu l’air sérieux, mais le fait de s’exprimer au mauvais scélérat rendait la scène minable. Comprenant qu’on se foutait de sa gueule, sa mine se rembrunit et sa bouche se déforma d’aigreur. Il fit claquer sa langue et porta la Rakia à ses lèvres retroussées. Le liquide pâle dégageait à une vitesse folle, épatant le public présent qui regardait leur bière, presque jaloux.

J’suis pas là pour causer bande de trou-ducs! Il alla difficilement contre un mur, déposer le restant de son achat. Il défit la sangle qui retenait son espadon en travers de son dos et le posa. Vous l’savez, hein ? Il retira son long manteau noir, le fit glisser au sol et commença la tâche fastidieuse d’enlever son plastron de plates. ‘Va falloir que vous vous y mettez à combien, pour m’toucher ?

Visiblement personne n’était impressionné, mais la bonne demie-dizaine de malandrins semblait irritée. Ils se regardèrent, eux aussi avait un coup dans le nez. Ils se mirent à rire, d’un rire un peu forcé, n’annonçant rien de bon. Un autre gars, hors du groupe, l’air plus sobre s’avança. Son sourire édenté lui donnait l’air d’un mort, d’autant plus que la maladie avait bien amoché son faciès.

Allons, allons Messire Fromritt. Vous n’êtes plus aussi… vigoureux que dans votre jeunesse. Mhh, ça vous fait combien maintenant ? Trente, quarante ans ? Le Verlorgot resta muet, il ne prit que sa bourse et lui lança, crachant sur le carrelage pierreux. Vous savez comment me parler, mais je n’aime pas les défaites prévisibles. Je ne prendrais que dix pièces, et la totalité si vous mourrez, hé hé. Allez, faîtes de la place et toi Cohilde, envie d’te battre ? Son intonation changea, plus familière.

Un homme un peu plus petit et trapu que le Wiehlenois fit quelque pas, ses vêtements imbibés d’eau et troués faisaient peine à voir, mais pas autant que l’état de notre Tulorien. Sa face entrecoupée de balafres et de pustules n’avait rien à envier en termes de grâce aux viscères des animaux vidés. Il frappa du poing la paume de sa main, ses phalanges craquèrent sinistrement.
Le grand brun le dévisagea, lui et son double trouble. Sans doute un des effets de son alcoolémie avancée. Les poings de Lame-Puissante étaient serrés, au niveau de sa mâchoire crispée, ses coudes protégeaient ses côtes et ses jambes bougeaient de droite à gauche avec de temps à autre un appui incertain. À côté la petite bande pariait une, deux ou trois pièces sur l’un ou sur l’autre.

Les yeux du déprimé se durcirent d’un coup, ils étaient dorénavant aussi tranchants qu’une lame de rasoir. Ceux de son adversaire lançaient des éclairs et son rictus l’horripilait. Un direct du droit fut lancé, mais Fromritt l’évita en se déviant et en perdant l’équilibre sur sa gauche. Il faillit tomber à la renverse, mais déplaça ses pieds de sorte à se maintenir debout. Les hors-la-loi le huaient en se marrant, il y avait de quoi. Il secoua sa tête vivement et ne vit pas le second coup fuser.
Sa garde était baissée, une invitation à se faire tabasser. Un crochet avait atteint son menton, il vit des chandelles. Il recula d’un pas et tenta de reformer sa défense. Un autre coup dans la joue opposée suivi directement d’un coup de pied au niveau de la hanche l’harcelèrent.
Indigne de son nom. Indigne de son titre. Indigne de sa famille. Voilà ce qu’il pensa en se faisant ruer de coups, en essayant tant bien que mal de parer les frappes du brigand dégueulasse.
L’alcool anesthésiait ses maux, pour l’instant, il sentait juste que ça lui chauffait et sa vision ne s’arrangeait guère. Il enragea, donna un coup d’épaule pouvant toucher à la fois les deux, trois hommes qu’il voyait en trop. Il l’avait eu. Il enchaîna avec un uppercut, qu’il rata, mais il continua en utilisant son bras gauche pour envoyer à son tour un direct explosif. Il ressentit des pustules éclater, des plaies se rouvrir sur le visage de son ennemi. Il bondit en arrière, écœuré.

Bah! T’essaye de… de... Il esquiva les phalanges du lépreux, qui arrivaient lentement. Puis envoya son épaule droite pour propulser son poing dans le bide du malade. Ta chiasse m’atteindra pas, l’affreux ! La colère dissimula sa demi-inconscience, l’espace d’une seconde. Il battit l’estomac du coupe-jarret comme l'on écrasait les noix de l’amant de sa femme.

Le massacré vomit sang et restes de son repas au sol et un peu sur les atours du bretteur. Celui-ci pesta et termina le combat d’un coup ferme sur la tempe du vaincu. Il s’affala par terre, se cogna contre le carrelage et ne bougea plus si ce n’est pour respirer difficilement. L’espadonneur contempla son triomphe. Sa gloire. Sa victoire. Indigne. Il n’était pas rassasié, sa fureur en demandait plus !

Bravo, messire, bravo… Le gestionnaire des paris lui tendit les gains qu’il s’était fait, mais le barbu refusa en essuyant vite fait le jus de boyaux sur ses loques. Dois-je comprendre que vous remettez vos gains en mise, Messire ? Dit-il avec un grand sourire, mais son regard frôlait la pitié. C’est-à-dire que vous avez énervé ses camarades, n’est-ce pas fripouilles ? Il ricana discrètement.

Débarrassez cette merde de la zone de combat ! Fromritt massa ses mâchoires, elles commençaient à le lancer. Le sang battait violemment à ses tempes et l’odeur de vomissure lui donnait la nausée. Je vous prend tous si vous l’osez, enfoirés ! Cria-t-il en tanguant légèrement, les pointant de l’index.

Sa rage était clairement mal orientée, d’autant plus que les bandits le prirent au mot. Quatre solides gaillards se mirent à l’encercler : un chauve grand et fin, un blond un peu plus délicat, un roux petit et costaud et une femme aux allures de mec. Le Verlorgot y regarda à deux fois, mais c’était bien une dame à la forte carrure et au visage tatoué. Des serpents et des faux dansaient sur sa peau blême, ses yeux en amande s’étiraient de malice et son sourire fit peur à l’épéiste.
Les traits de son visage ne changèrent pour rien au monde. Il avait plongé dans cette merde et paraissait s’y plaire. La hargne était plantée sur sa figure comme les crocs d’un loup dans sa proie. Il gonfla son buste et contracta chaque muscle de son corps. La situation semblait l’avoir fait quelque peu dessaouler. Ses veines devenaient de plus en plus apparentes et ses tissus musculaires se congestionnaient. Sa vision s’affina un peu également.

L’adrénaline se diffusait dans son organisme. Les battements de son cœur s’accéléraient grandement. Les œillades nerveuses qu’il faisait s’intensifiaient. Encore un peu maladroit, il restait mobile. Ses jambes n’étaient pas parfaitement ancrées sur la roche, mais c’était plus regardable. Soudain, il prit l’initiative en faisant un grand coup circulaire tout en avançant. Il profita de l’élan que lui avait donnait sa frappe pour faire voler son autre bras dans la garde du blondin qui grogna.
Le chauve tenta de toucher ses côtes, mais Fromritt se protégea d’instinct. Il mit son poignet libre devant son nez pour encaisser le frêle direct du blond. Tout à coup, une grosse pression se fit sur l’intérieur du genou gauche, le pied de la combattante. Le Verlorgot céda, surpris, et chuta à moitié au sol. S’énervant sans cesse toujours plus, il se jeta en avant, fauchant les jambes du jeune homme frêle. Il se releva en trombe avec les quatre malandrins à vue.
Il boitillait d’un côté, toutefois, il rassembla ce qu’il avait dans ses tripes pour ignorer la douleur. Les coups qu’il avait déjà pris continuaient de se manifester. D’un rapide coup d’œil, il entraperçut des marques violâtres de tailles différentes sur ses membres tremblotants. Le petit roux s’était rapproché, sur son flanc gauche, poing armé. Le blondinet, lui, avait préparé un sacré coup de pied. Les deux frappèrent en même temps, heurtant respectivement le rein gauche de Fromritt et son épaule droite. Le regard écarquillé, la victime fit des gargouillis étranges et resserra sa défense, trop tard, comme figée dans son mouvement.

Ses bras furent mis dans son dos en un éclair. Ses jambes étaient entravées, impossibles à dégager. Un rire grotesque et un autre presque identique mais un poil plus féminin résonnèrent dans la cave. Le gérant des paris détourna doucement le regard, présageant soit une belle raclée, soit un viol collectif ou une exécution lente et terriblement douloureuse. L’espadonneur ne pensait pas à cela, des larmes coulèrent, discrètement, son cœur souffrait, hurlait.

Allez, qu’on en finisse ! Vous retenez pas, pompes à drisse ! Tempêta-t-il, possédé.

S’en suivit moqueries, quolibets et coups. D’innombrables coups. Ne pouvant retenir ses cris, le Verlorgot en profitait pour extérioriser sa haine viscérale, que même les malandrins ne comprenaient pas. Il eut le droit à des coups de genoux dans les burnes, des coups de coudes dans le foie, coups de poings dans les côtes, coups de pieds dans les mollets…
Des secondes paraissant durer des heures et des minutes semblant s’écouler plusieurs jours s’en suivirent. Après un certain moment, que nulle personne pouvait chiffrer, le noir absolu, le néant s’empara de l’esprit de Fromritt. Il avait froid. Il était triste. Il voulait juste mourir.

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Fromritt Verlorgot
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Re: L'Auberge de Grigwig le Beau

Message par Fromritt Verlorgot » mar. 22 janv. 2019 18:42

Inconscience Onirique

Le Néant.

Formé de froideur, fragile comme les frontières entre réel et imaginaire. Fruit d’un esprit fracassé par la fureur et la souffrance. Le vide s’enfermait dans un enfer de ténèbres, une sphère de souvenirs éphémères. Un amas de matières fantomatiques aux reflets améthyste se morphait en toile de fond. Des formes floues, confuses, fabriquaient une effigie fantaisiste de Tulorim. Fief des fous, l’environnement foldingue proliférait jusqu’aux confins du subconscient de Fromritt. Un soufflement, un souffle de sons indistincts flânait dans l’atmosphère funeste des songes.

Le Cauchemar.

Étreignant sa gorge serrée, des sensations désagréables lacéraient son corps et ses viscères. La tristesse s’installait. La colère le rongeait. Et la peur le déchirait. Sur le devant de Tulorim, dos aux voyageurs qu’il venait de quitter, le Verlorgot fut interpellé part un garde éthéré. Ses paroles se réverbéraient sans fin sur les murs immatériels du royaume obscur. Les dires, au fur et à mesure, paralysaient le rêveur.
L’univers autour se brisa en d’innombrables fragments. Les morceaux à terre se transformèrent en une mer sombre et tourmentée. Le brun effrayé se frayait désespérément un chemin à travers les vagues mortifères. Ses poumons s’imprégnaient de l’eau impure, rendant sa respiration plus dure encore. La panique traversa ses membres lorsqu’un éclair lézarda le firmament cauchemardesque. La foudre toucha l’Onde et la fit complètement s’évaporer, faisant choir le Verlorgot dans les abysses marines.
Il atterrit sur le pont délabré d’un navire marchand. Le sol se fissura puis se craqua laissant Fromritt sombrer plus profondément. Il se trouvait dorénavant dans une chambre où deux cadavres boursouflés, bleutés et gonflés d’eau se tenaient la main. Notre Tulorien les reconnut, tomba en pleurs sur ses genoux en répétant inlassablement d’un timbre tremblotant :

Père, mère. Père, mère. Père, mère. Père, mère. Père, mère…


Réveil Douloureux

AAAAAAAH !

Le hurlement de l’espadonneur fit chavirer un gars édenté, assis juste à côté. Le cri fut suivi de gémissements, de râles et de grognements de douleur. Fromritt serra les mâchoires puis regarda autour de lui. Un simulacre de chambre à coucher se révélait à lui. Le plancher était troué, pourri, souillé même à plusieurs endroits. L’odeur âcre et forte attaquait ses narines, soulevait son estomac. Les meubles étaient grignotés par des crocs de rongeurs et en parlant de ces vermines, leurs déjections parsemaient le sol.
La couette ainsi que les draps dans lesquels se trouvait le Verlorgot était imbibé de sueur, de sang et de vomis. Il se sépara de sa couverture d’un geste sec, empli de dégoût.

Eh bah, alors Fromritt ! Dit une voix de vieillard qui mâchait trop ses mots. Oh putain, j’crois qu’mon cœur est r’parti ! Mais cha va pas de gueuler comme cha ?! Se plaignit-il.

Les yeux désabusés du Tulorien prirent quelques secondes pour se poser sur le vieux. Les traits du grand brun se délièrent, un presque-sourire fendit son visage tordu de douleur.

C’est dingue, Gloktt, quand tu, gnn, tu paris pas ou qu’t’es pas avec deux, trois racailles… Tu relâche beaucoup ton parler !

Qu’êche tu veux, hein ? Faut avoir l’air crédible. Puis toi tu fais chier, hein. Vu qu’t’es un nobliau, j’dois t’faire belle causette ! Il soupira, l’air sifflait entre les espaces de ses dents. Enfin pachon… Bordel de merde, tu voulais crever p’tit con ? Reprit-il avec une énergie qu’on le lui soupçonnait guère.

Aaah ! Beugle pas comme un âne, vieux fou ! Dit Fromritt en se tenant les tempes. Je… je… J’sais pas. Ils se regardaient dans le blanc des yeux, en silence, pendant un long moment. Je voulais juste me défouler, cracher tout c’que j’vais en moi, tout c’venin ! Son regard se perdit dans le vide.

T’m’as fait peur, j’ai crû qu’tu parlais d’aute choche ! Il rit avant de reprendre son sérieux. T’m’as obligé à prendre choin d’toi, t’chais. Donc j’ai bien allégé ta bourche. Le prix de la chambre pour deux jours, le combat qu’t’as perdu… Bon et j’ai pas toujours été là. Des putes che chont un peu occupé d’toi. On a pas trouver le tarif pour cha, mais on t’a pas fait payé trop cher. Puis merde, tes affaires chont là. Il désigna du menton le plastron et l’espadon de Fromritt, dans le coin potable de cette porcherie. Du coup, il t’reste 150 yus. Et crois-moi, c’d’jà pas mal !

Putain quel rapia ! Arg. Il se tenait un peu partout, chaque mouvement le faisant souffrir. Et ma Rakija, tu l’as bu aussi ? Insinua-t-il en se relavant difficilement.

Ha non ! Pas chette merde coupée à la piche.
Il mirait les efforts monstres du Wiehlenois, un peu amusé. Cha on ch’en est chervi pour nettoyer tes plaies. Enfin, churtout les catins, quoi. Elles étaient contentes, pour une fois qu’elles avaient l’aschandant. Ha ha ! Puis on va pas ch’mentir, t’es plutôt bel homme comparé aux taches qui viennent là.

Tu veux m’passer la bague au doigt ? En réponse, il n’eut qu’un gloussement bête. Vieillard, ma femme, ma fille, mon fils sont morts. Le ricanement s’arrêta net. J’ai eu du mal à accepter ça. J’ai fait des conneries. J’ai haï le monde entier. Et j’suis parti. J’ai quitté mon poste, ma ville. Les muscles de sa mâchoire se contractèrent davantage. À mon retour ici, avec une troupe de gitans, un garde que j’avais formé m’a reconnu. Mes parents ont mal vécu mon départ, ils ont décidé de changer de pays, de s’en aller à leur tour, en bateau… Leur navire a sombré, il y a six mois. J’ai dû identifier les corps après avoir monté une expédition à la hâte !

Le visage de Gloktt prenait une teinte de plus en plus grave, au fil des mots du blessé. Les rides sur son front dessinaient des vagues irrégulières. Les commissures de ses lèvres se creusaient et ses traits se rembrunissaient. Petit tic nerveux, sa paupière gauche vibrait. Il passa sa main sur son crâne chauve où un bouton de fièvre trônait.

Ch’pas normal tout cha… Déjà l’achachinat d’ta p’tiote famille et cha… En pluche, ils ont dû bien payer, donc les vérificachions ont été faites. Gamin, ils ch’étaient parti quand ? Sa mine réfléchie contrastait énormément avec sa façon de parler, comme la lune et le soleil.

J’sais pas… Y a huit mois peut-être. Ils avaient à peine embarqués, aaaah ! Un de ses os craqua sinistrement, une douleur intense implosa dans on corps.

Bouge pas petiot. Pire qu’un goche ! La dernière tempête digne de ch’nom doit pas remonter d’au moins, cha, ouais. Il comptait plusieurs fois sur ses dix doigts crochus. Cha doit bien faire un an, chi ch’n’est pluch ! Ch’était comme comme rafiot ?

Euh… Bordel, comment veux-tu que. L’intense regard du vieux lui fit détourner le sien. Il n’osa pas terminer sa phrase. Le nom j’saurais pas dire, mais c’était un galion marchand.

Un galion ! Marchand avec cha ! Putain, chuis chûr qu’en plus, le capitaine état chobre pour toute la traverchée. Et crois-moi gamin, c’est auchi rare qu’une bonne femme dans les parages !

Un mutisme sembla d’un coup s’emparer des deux hommes. L’atroce souffrance de Fromritt s’accentuait alors qu’il allait rechercher ses biens. Seules leurs respirations saccadées troublaient le silence de mort.

J’ai déjà cherché, j’ai rien trouvé. Son ton montait. Bordel de merde ! Dans les rues y avait aucune info. Les p’tites frappes, pareil ! J’ai même fait une descente chez une grosse tête, mais rien ! Rien j’te dis. Il criait maintenant. J’ai fait tout c’qu’il fallait. Pourtant aucun n’a parlé, pas un nom, pas une adresse, pas une seule piste ! Sa voix s’éteignit de désespoir.

Tu t’y es mal pris petiot. Un gradé d’la garde peut pas avoir che genre de chose. Gloktt gratta sa chair abîmée, ses ongles raclaient ses joues. Y a dix huit ans tu venais tabacher des connards et te faire défoncher ichi. T’chavais pas comment cha fonchionnait. J’tai pris chous mon aile, gamin. Et j’vais t’dire, j’tolère pas qu’on maltraite mon poulain ! Ses yeux s’affûtèrent, ils brûlaient d’une détermination sans égale. Sa voix se métamorphosa, elle s’assombrissait d’une colère insondable. J’vais te retrouver ces bâtards, Fromritt. Reviens ici dans trois semaines, un mois. Sobre. Faudra aussi qu’tu sois en forme. D’ici là mange bien, muscle ce tas d’os qui te sert de corps, pardi ! Son expression redevint normale. Il se leva droit comme un i puis partit en faisant claquer sa canne joliment ornée.

Le Verlorgot, silencieux, les paupières grandes ouvertes, la bouche entrouvertes voulut protester. Mais il fut n’y parvint pas. Il ferma ses lèvres et enfila son plastron. Des bandages de fortune habillait son corps, comme à l’accoutumée devait-il penser. L’espadon dans le dos, il sortit dans le couloir où des péripatéticiennes lui souriant tristement en passant à côté, chienne de vie.
Ses bottes usées tombaient lourdement sur les marches esquintées. De la poussière virevoltait à chaque pas, le bois tremblait, menaçant de céder. Il ignorait les serpents de douleur qui rampaient dans son organisme. Des décharges crispaient crispaient ses muscles par à-coups. Ses mâchoires se contractaient, se déliaient de manière irrégulière.
Sa carcasse avait atteint le rez-de-chaussée, presque vide en cette fin de matinée. Grigwig lui fit son plus beau sourire, qui se résumait à un simple rictus en coin. Le bretteur le salua d’un geste poli de la tête, sans plus de cérémonie. Il alla appuyer sur la poignée de la porte et réussit à l’ouvrir du premier coup. À peine dehors qu’il se fit agresser par les rayons du soleil, accentuant son mal de crâne horrible, qui intensifia les maux qui le parsemaient.

Trois semaines, un mois, hein ? Ce vieux fou arrivera peut-être à trouver quelque chose… En tout cas, je sais où aller. Il protégea ses pupilles en mettant sa main en visière. Son regard portait sur le quartier riche. Il souffla puis partit vers un lieu qu’il ne connaissait que trop bien. Ma maison...


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Yliria
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Re: L'Auberge de Grigwig le Beau

Message par Yliria » mer. 25 mars 2020 03:55

Prologue


- Approchez ! Approchez ! Un combat de titan à l'arène ce jour, les paris sont ouverts ! Approchez ! Jeune fille, une place ?

Je regardai le colporteur avec un mélange de surprise et d'agacement. J'avais une tête à regarder des types s'écharper volontairement dans une arène ? Je passai mon chemin en secouant la tête, m'éclipsant en slalomant vivement entre les badauds. Quinze jours que j'étais de retour à Tulorim, et les déboires commençaient déjà. Enfin pas encore, mais cela n'allait visiblement pas tarder. J'avais reçu un message la veille. Pas d'expéditeur, juste le nom de la taverne de Grigwig, une heure et un morceau de tissu rouge. J'étais presque étonnée que les ennuis ne soient pas arrivés plus tôt. Quinze jours de paix, c'était presque trop beau. A force je commençais à presque les anticiper, les ennuis. Et avec les deux indices en ma possession,je savais qu'il allait y en avoir.

L'auberge de Grigwig... si du moins on pouvait appeler ça une auberge, était située dans les pires quartiers de Tulorim. Étonnamment, personne ne vint me chercher de problème. A vrai dire, je me baladai sans masque et en armes sans le moindre problème depuis mon retour. Une chose qui m'avait surprise, mais que j'avais rapidement appréciée. Il restait des regards en coin et quelques murmures par moment, mais personne ne venait m'inquiéter. Alyah disait que c'était l'attirail martial qui repoussait les emmerdeurs, et je la croyais sur parole. De toute façon la seule chose qui m'importait, c'était qu'on me laisse tranquille pour le moment. Peine perdue, visiblement, peu importait où j'allais, il fallait que les ennuis suivent.

(Tu ne sais pas, elle veut peut-être juste t'offrir un verre.)

(Vu le contenu du dernier liquide offert, je m'abstiendrai...)

En entrant dans l'auberge, l'odeur me prit aussitôt et je retroussai le nez, peu habituée à ce mélange d'alcool, de sueur et de... autre chose, qui traînait là. Je balayai l'espace d'un rapide regard, sentant ceux des présents se poser sur moi. J'en vis un me fixer, puis poser les yeux sur mon arme et remonter sur mon visage en souriant d'un air moqueur. Je l'ignorai et m'approchai du comptoir. Gigwig était toujours le même, de même que son établissement. je me demandais comment on pouvait fréquenter cet endroit au vu des autres disponibles. La réponse était simple, il n'y avait pas de questions posées ici. Un peu d'argent réglait bien souvent le moindre problème. Le barman me fixa en plissant les yeux avant de grogner. Je ne pensais pas qu'il se souviendrait de moi après tout ce temps, mais il avait visiblement une bonne mémoire.

- Elle est déjà là. Deuxième chambre à droite.

Je hochai la tête avant de me diriger vers l'escalier menant à l'étage. Chaque pas me donnait envie de rebrousser chemin, mais je voulais savoir ce qu'elle avait à me dire. J'étais prête à toute éventualité et posai la main sur ma rapière avant d'ouvrir la porte. Pas d'hommes musculeux prêts à me sauter dessus, un bon début. Assise sur une chaise non loin de la fenêtre, la Vipère caressait doucement le reptile qui pendait à son bras, l'air vaguement ennuyée, deux verres et une bouteille posés sur la table. Elle tourna son visage vers moi et un sourire orna ses lèvres minces, me faisant grimacer. La dernière fois qu'elle avait sourit comme ça, j'avais avalé du poison et faillis en mourir. J'étais certaine de ne pas aimer la suite.

- Cela faisait longtemps. Assieds-toi, tu n'as rien à craindre.

Je ne pus m'empêcher d'exprimer mes doutes d'une moue dubitative qui la fit sourire à nouveau, mais je m'exécutai, m'asseyant en face d'elle, les mains prêtent à agir en cas d'agression. Si elle s'en aperçut, elle n'en fit pas mention et se contenta de me proposer à boire, faisant ricaner Alyah dans mon esprit. Je refusai poliment et elle en vint à la raison de ma présence ici. Au moins elle allait droit au but, c'était un bon début.

- J'ai besoin... d'un service.

- Et pourquoi je vous aiderai ? La dernière fois nous avions un objectif commun et vous avez joliment essayé de me tuer.

- Allons allons, je n'ai pas essayé de te tuer. Si je l'avais vraiment voulu, tu serais morte, jeune fille. Et les enjeux étaient totalement différents. La demande ne vient pas de moi, mais de quelqu'un de plus... influent.

- Cela ne change rien au fait que je n'ai pas de raison de vous aider.

- Je crains que si, malheureusement pour toi. Vois-tu, ton nom est peu commun... et il est apparu plusieurs fois, récemment, de la bouche d'un homme très influent. Un certain Kisp, cela te dit quelque chose ?

Mon regard se durcit aussitôt et je la fixai en fronçant les sourcils. Elle sourit, comme si elle avait gagné un pari particulièrement juteux.

- Visiblement tu le connais... Il a été enchanté d'apprendre que la pègre locale avait... quelques différends avec toi et n'a pas lésiné sur les promesses pour que nous le prévenions de ton retour. Enfin promesses.. menaces surtout. C'est un homme puissant et influent, et la pègre n'a guère envie de se le mettre à dos. Mais nous avons un autre souci tout aussi urgent et... Quelqu'un est prêt à oublier de le prévenir en échange d'un... petit service.

Je savais que les ennuis allaient finirent par me tomber dessus, mais là c'était clairement au-delà de tout ce que j'avais pu imaginer. Kisp ne me faisait plus peur, mais je n'avais pas envie de le voir débarquer et potentiellement mettre en danger des personnes qui me côtoyaient. La pègre je m'en fichais, mais la famille de mon père ou l'Opale...

- Très bien, quel est ce service ?

- Ce n'est pas moi qui vais te le dire, on m'a juste demandé de t'amener... tu connais le Purgatoire ?

Le ton avec lequel elle dit ça et la lueur amusée dans son regard ne me plurent absolument pas. J'appréhendais déjà la suite.

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Kitaï
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Re: L'Auberge de Grigwig le Beau

Message par Kitaï » sam. 4 sept. 2021 17:41


Première Mission : Le tour du proprio

II. Carte au trésor

Ou la meilleure façon de s'attirer des ennuis pour un bout de papier.



L'auberge de Grigwig. Je disais ne pas vouloir aller au Purgatoire, mais cette taverne me répugnait presque autant. Pour y avoir passé une tête à quelques reprises, la plupart du temps les principales animations de ce trou à rat était les bagarres, le viol et le meurtre. Parfois les trois en même temps. Je poussai un profond soupir de dépit en pénétrant dans la salle commune. Les autres tavernes buveurs des tavernes que je connaissais n'avaient rien eu à m'apprendre.

L'ambiance était lourde. Sale. Du coin de l'oeil, je voyais une femme dans un coin de la pièce, jupes relevées, en train de se faire... Besogner, par un client visiblement aviné. Consentante ou non, la malheureuse avait le visage vert. L'ivrogne devait sentir le fennec ou avoir une haleine à réveiller Kubi après une cuite. Ah, et voilà qu'elle vomissait, provoquant rires gras et juron du responsable de cette régurgitation. Elle allait sans doute passer un sale quart d'heure et j'avais pas trop le choix de rester spectatrice. Si les rixes étaient pleines de coups bas et de tactiques vicelardes, les saoulards avaient au moins la décence de respecter l'issu d'une bagarre tant qu'on se mêlait pas de leurs affaires. En clair, si j'intervenais, j'avais un paquet de chance de me retrouver avec quatres larrons abrutis par l'alcool sur les bras.
Le bar était tenu par un colossal type à la tronche burinée, aux traits grossiers et au nez tordu. Il me mettait presque deux têtes et ses bras aussi épais que des jambons m'arracheraient le crâne si l'envie lui prenait de jouer à "Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette" avec moi. Ses petits yeux me jaugèrent alors que je m'approchais de lui.

"C'pour travailler ?

- Dans tes rêves. j'suis là pour boire. Une rougette patron."

Je soutins son regard, avant qu'un rictus édenté n'orne son visage et qu'il me donne une chope de bois remplis d'un liquide trouble, vaguement rougeâtre, avant de se désintéresser de moi.

(Audace, aplomb. Y a que ça qui marche avec ces types.)

Le moindre signe de faiblesse, et c'était la porte ouverte à toutes les brutes du coin. la serveuse qui se relevait dans son coin l'avait appris à ses dépends, essuyant sa lèvre tuméfiée. Elle allait garder un sale cocard demain, mais mieux valait ça qu'un coup de surin. Et même si ça me désolait, j'étais pas là pour cette pauvre fille. Balayant du regard l'assemblée, j'avisai les différentes tablées pour déceler celle la plus à même de m'offrir des informations. Que des marins étaient présents, ou des gars des docks, donc tous feraient l'affaire. Ne restait plus qu'à trouver ceux qui étaient les moins avinés. Et l'une d'elle avec deux types habillés comme des dockers me sembla la plus prometteuse. Gérables si ça partait en queue de bouloum, et avec seulement trois chopes devant eux. Sans m'arrêter, je rejoignis leur duo et m'installai sur un tabouret.

"Salut les gars. j'me permets, vous avez l'air de manquer d'un peu de compagnie de boisson."

Deux regards. L'un suspicieux, l'autre curieux. Bien. Aucun d'eux n'avait de lueur lubrique, et un lent hochement de tête après une concertation visuelle entre eux me confirma que ma présence était acceptée. Je leur offrit un petit sourire reconnaissant, avant de vider un bon quart de ma chope. Je savais pas avec quoi cet enfoiré de tavernier avait coupé sa bière, mais je ne sentais presque plus le goût fruité du breuvage. Je grimaçai en reposant ma chope.

"Rougette, hein ? C'est une boisson de gonzesse, affirma le plus taciturne des deux.

- Laisse la mam'zelle boire ce qu'elle veut. Et je sais pas si t'as remarqué, mais c'en est une, de gonzesse. A la tienne. Moi c'est Iram.

- Kit', répondis-je en trinquant, avant de trinquer avec le second qui tendit sa chope sans grande conviction et prononçant son prénom : Marv. Je vais être directe, je cherche du boulot.

- Et quel genre de boulot au juste, Kit' ?

- Le genre qui me fera quitter ce trou à rats. Vous avez l'air de deux types qui travaillent sur les docks non ? Bah moi je cherche à me barrer. Prendre le large.

- Et en quoi on peut t'aider ?"

J'allais répondre, quand une explosion de rire éclata à notre droite. Une autre table garnie de marins aux mines patibulaires, qui buvaient comme des trous. L'un d'eux venait de se planter un couteau dans la main, après avoir tenté ce célèbre jeu d'adresse consistant à frapper avec la pointe d'une lame entre ses doigts écartés, le plus vite possible. Lui était visiblement trop bourré et avait été assez stupide pour se lancer ce petit défi aussi débile que lui.

"... Peut être que vous pouvez me donner des noms de bateaux ou de cap'taines qui recrutent en ce moment.

- J'vois. Et nous, on y gagne quoi dans c't'affaire ?

- HEP ! PATRON ! apostrophai-je Grigwig en faisant un cercle de notre tablée de l'autre main. Vous gagnez les prochaines tournées de ce soir."

Un sourire amusé et satisfaits orna leur visage, défroissant presque le Marv qui semblait presque amical. Terminant à l'unisson nos chopes pour accueillir les suivantes, j'en profitai pour détailler mes deux nouveaux amis. Marv était du genre épais, avec une barbe brune et des yeux noirs. Un homme de wiehl comme il y en avait dans toute la ville, quand Iram semblait lui plus venir du grand désert de l'ouest, avec sa peau bronzée et ses cheveux frisés. Moins imposant que son comparse, il devait cependant être assez fort malgré son apparence. Le métier de docker n'avait rien d'une plaisanterie.

"Tu m'plait bien Kit'. OK v'là les bateaux qui pourraient avoir besoin d'bras en plus, dit-il avant de m'énoncer quelques noms de navires et de capitaine.

- Mmmh, la Garik m'a pas l'air trop mal. J'avais déjà posé quelques questions à un autre type, mais il était complètement torché alors j'savais pas si je pouvais lui faire confiance.

- Son capitaine, Ulric Portloin, est pas trop mal. J'ai entendu un de ses membres dire qu'il payait pas mal, pendant qu'ils déchargeaient les caisses.

- Wow, Marv. première fois que j't'entends aligner autant de mots à la fois.

- Ta gueule, grogna-t-il en plongeant son nez dansa chope sous les ricanements d'Iram.

-L'autre bourré m'avait aussi parlé d'un autre bateau, la Volante, avec un type à sa tête. Helmar, Helmer, un truc comme ça.

- Ah ouais ? Bah en fait..."

Moi qui avait enfin mené la conversation où je le voulais, il fallait qu'un truc vienne tout faire foirer. L'autre table en l'occurrence, qui avait décidé de repousser les limites du bruit possible par un seul groupe en un seul éclat de rire. Un truc tellement poilant qu'un des types tomba à la renverse, bousculant une serveuse qui tomba à la renverse vers nous, son plateau remplis de bières pleines. Inutile de dire que nous fûmes copieusement arrosés avant de foudroyer du regard les responsables de ce carnage et gaspillage de boissons. Un borborygme douteux émergea de la tablée, ressemblant à un "Kesqui ya" en plus pâteux et hostile. Iram et Marv muni de sa chope se levèrent, furieux, et se placèrent à côté de moi.

"Tu sais t'battre, Kit' ?

- Y a que les abrutis et les suicidaires qui rentrent ici sans savoir se battre. Et j'suis ni l'un, ni l'autre.

- A la bonne heure," commenta sobrement Marv avant de lancer sa chope au visage du premier type et de lui rentrer dans le lard.

J'ai un peu d'expérience dans les bagarres de tavernes. Je n'irais pas jusqu'à dire que je suis la plus redoutable des combattantes, mais mes adversaires ont un peu trop tendance à me sous-estimer. C'est pour ça que le premier ne s'attendit pas à voir mon poing remonter brusquement vers son menton en un uppercut violent qui le sonna un temps, avant de me fixer avec les yeux écumants de rage. Juste à temps pour voir le tabouret que je lui balançait au visage, le faisant tituber. Je crochetai son genou de ma jambe et poussai de toute mes forces pour le faire chuter lourdement au sol et me placer au-dessus de lui, l'agrippant par le col pour le frapper de mon poing. Une fois, deux fois. La troisième fois fut interrompue par un de ses copains qui m'attrapa par les cheveux avant de me tirer en arrière, et me faire durement cogner une table avec l'arrière de mon crâne. Je poussai un cri de douleur avant de tomber au sol sonnée. Un coup de pied dans les côtes me ramena bien vite à la réalité, et je roulai sous la table pour échapper au deuxième assaut.

(Bravo Kitaï. Tu viens à peine d'être guérie par Aendel que tu te fais déjà ramasser la gueule. Bordel mais ce con continue de vouloir me choper ! Tiens ! Ah bah oui, une fourchette dans la main ça fait mal !)

Le type retira sa main en hurlant, avec la fourchette que je lui avait planté dedans alors qu'il essayait de m'extraire de mon abri de fortune. A quatre pattes, j'émergeai de l'autre côté pour sauter dessus, renversant les chopes vides des anciens clients. Mon adversaire me regardait, l'air mauvais. Il était pile à la bonne hauteur. Prenant appui sur ma jambe droite, j'envoyai un coup de pied rotatif qui frappa au visage le sale type. Il avait beau eu se protéger avec son bras pour encaisser le coup, il avait fais un pas de côté sous l'impact. Du pied, je lui envoyai une chope au visage avant de lui sauter dessus, une seconde chope à la main. La première servit de distraction, quand la seconde le cueillit à la mâchoire. Un léger craquement se fit entendre, mais étais-ce la chope ou bien sa bouche ? Toujours est-il qu'il répondit par un coup de poing lancé à l'aveugle, mais qui toucha lourdement mon épaule. Encore un bleu qui allait me rester une belle semaine. En représailles, mon genou rencontra ses valseuses. Tout était permis, dans ce genre de combat, et je n'avais pas honte. Frapper un homme à terre, les mains autour de ses bijoux de famille ? Pas de problème pour moi non plus, et l'homme l'apprit à ses dépends en mangeant mon pied en pleine face. Moi, c'est un poing que je mangeai juste après.

Ma gencive s'ouvrit sous le choc, et je crachais un glaire rouge sang sur le corps du type gémissant. En face de moi, le premier type que j'avais frappé au visage, et il avait pas l'air de très bonne humeur. Un second coup s'enfonça douloureusement dans mon ventre, à peine arrêté par ma veste de cuir. Je grognais sous la douleur, avant de saisir de mes deux mains l'avant bras qui m'avait frappé. M'enroulant autour pour me trouver dos à son torse -Seigneur qu'il puait de la gueule !-, je fléchis les genoux pour l'envoyer par dessus mon épaule, non sans lui avoir balancé un coup de tête dans le nez. Probablement que ce genre de tactique improvisée n'aurait pas marchée si mon adversaire n'était pas imbibé d'alcool, mais le résultat était là. Allongé, il fut une proie facile pour Marv qui l'acheva de sa chope, qui ne l'avais pas quitté. Ne restait qu'Iram, en prise avec son adversaire. L'enfoiré avait sorti un couteau et tenait en respect le docker, dont la tunique crasseuse s'imbibait déjà de sang au niveau de l'épaule.

(j'ai pas l'avantage, mais c'est peut être le moment rêvé de mettre en pratique le truc d'Odar.)

J'avais mordu suffisamment de fois la poussière pour me rappeler les mouvements de cette technique : feinte, chute contrôlée sur le côté non armée, roulade, et on se retrouvait dans le dos de l'adversaire. Facile à dire, plus dur à mettre en place. La chute contrôlée n'était pas le problème, ni la roulade, c'était la feinte. Odar ne se laissait jamais distraire et finissait invariablement par me mettre une tannée. Mais Odar, c'était un ex militaire. Le type en face de nous était un marin avec plus de coups dans le nez que de dents encore attachées dans sa bouche : il serait un adversaire bien moins corriace.

Bon, probablement que j'étais moi même un peu éméchée de mes visites de tavernes. Raison pour laquelle j'essayai.

Fonçant vers le saoulard qui jouait avec son canif, je lançais ma main vers son visage, surpris d'avoir une nouvelle adversaire à affronter. Je rétractais ma main juste assez vite pour ne recevoir qu'une estafilade de sa lame sur la paume, me laissa tomber sur mon genou gauche en tordant mon buste. L'impact contre mes omoplates fut rude, et je sentis le monde tourner autour de moi. Je croyais que j'allais vomir, mais les semaines d'entrainements portèrent ses fruits et mon corps réagit tout seul en effectuant une roulade arriière, balançant mes jambes par dessus ma tête pour me retrouver face au dos du type. Une action parfaitement exécutée, si on omettait ma coupure à la main, mon mal de dos et le pauvre bougre que j'avais percuté dans ma roulade. C'était un beau progrès.

(Je me jetterai des fleurs plus tard.)

Telles deux serpents, mes mains glissèrent sous les aisselles moites du bagarreur et s'entrelacèrent derrière sa nuque, l'immobilisant temporairement alors que ce dernier, surpris, tentait de me larder de couteau.

"T'attends quoi au juste Iram ?! LE DELUGE ?!"

Sortant de sa torpeur, c'est ironiquement un déluge de coups de Marv et Iram qui s'abattit sur le dernier gus qui finit par gémir un abandon. Son corps tomba au sol où il se recroquevilla, avant que la grosse main de Grigwig ne vienne le chopper par le col.

"Bruyants, et en plus vous provoquez des bastons. Donc, vous d'gagez."

Les quatre ivrognes furent ainsi dégagés manu militari de l'établissement, non sans avoir été délestés de leurs bourses par le patron. Il piocha dedans avant de nous les envoyer, grognant que c'était pour les réparations et qu'il nous tenait à l'oeil. Riches de notre nouvelle fortune, nous rejoignîmes à nouveau notre table et nos chopes. La blessure d'Iram n'était pas trop grave, aussi une simple potion de soin qu'il gardait tout le temps "au cas où" suffit à la soigner. Je me fis la réflexion que ce genre de dose d'urgence me serait bien utile.

"Bon, on en était où ?"




Morrigane
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Re: L'Auberge de Grigwig le Beau

Message par Morrigane » ven. 30 sept. 2022 16:24

Morrigane avait récupéré son dû et elle s’en était allée à a suite de Rodryk. Ils traversèrent les rues de la ville avec une relative rapidité. Rodryk savait où il se dirigeait et guidait sa sœur sans hésiter. Plus ils marchaient et plus ils s’enfonçaient dans des quartiers peu recommandables. Il y avait de moins en moins de monde dans les rues et pourtant de petits groupes de personnes trainaient, cherchant le premier méfait qu’ils pouvaient accomplir. Ils dévisageaient Rodryk et Morrigane qui ne leur accordèrent pas un regard. Dans ce genre de situation, mieux valait faire profil bas et ne pas chercher d’ennuis. Ils arrivèrent devant un établissement, une grosse bâtisse en pierre que le frère s’empressa de pénétrer pour fuir l’insécurité de l’extérieur, mais ils n’y trouvèrent guère plus de confort…

A peine eut-elle passer le pas de la porte que Morrigane sentit ses sens se faire agresser. Des effluves de toute sorte parvenaient à son odorat. Sueur, sperme, sangs, crasse, des senteurs qui donnaient une idée du genre d’ambiance que l’on pouvait trouver dans ce lieu. L’ouïe était aussi mise à contribution car l’endroit contenait une foule babillarde qui semblaient plus hurler que converser. Plusieurs fois, la magicienne elle cru qu’un combat était sur le point d’éclater mais ce n’étaient que des éclats de voix de poivrots un peu trop imbibés. Ceux-là donnaient une bien piètre image d’eux-mêmes, débraillés, au propos orduriers, d’aspect sale pour certains. Rodryk et Morrigane balayèrent l’endroit du regard, cherchant Ardur mais ils ne le virent pas.

« Il doit-être en bas. Suis moi. » dit Rodryk à l’attention de sa sœur.

Et alors qu’ils commencèrent à marcher une grosse mains attrapa le bras de Morrigane. La jeune femme se figea et jeta un regard tendu à celui qui l’importunait. Un gaillard grand et gros, au nez en patate et aux oreilles de choux-fleurs, avec une barbe brune imposante la guettait d’un regard lubrique.

« Tu vas où comme ça ! J’ai bien envie de t’essayer toi. C’est quoi ton prix. »

« Je ne suis pas une prostituée »
dit froidement la magicienne en tentant d’extirper son bras mais l’homme serra plus fort.

« Pourtant t’as l’air d’une pute ! Alors je vais te traiter comme une pute ! »
dit l’homme en lâchant une impressionnante odeur d’alcool et de pourriture de sa bouche. Morrigane tenta à nouveau de se dégager, pressée par l’assaut nauséabond qui lui donna envie de régurgiter ce qu’elle avait sur le vente.

C’est le moment que choisit Rodryk pour intervenir.

« Oh ! Lâche-lâ ! »

L’homme avait à peine intervenu que la grosse main libre de celui qu’il tenta d’intimider passa au dessus de Morrigane pour aller s’abattre avec une violence inouïe sur sa joue. Le chasseur ne put que subir le choc, son assaillant faisant au moins deux fois son poids. La claque raisonna tellement fort dans la bâtisse que le brouhaha baissa rapidement en intensité, détournant l’attention des clients de leurs activités. Morrigane qui n’arrivait toujours pas à se dégager de l’emprise de l’homme envoya son genou dans ses parties, tirant alors de lui un cri à réveiller la ville. Le gaillard se plia sous la douleur, relâchant la brune qui en profita pour s’écarter de quelques pas.

Elle jeta un regard à Rodryk qui avait basculé sous l’effet de sa claque sur un client de l’endroit. Furieux, le type avait empoigné le chasseur tout en lui indiquant de son index sa chopine renversée sur le sol. Rodryk essayait de s’en défaire mais son assaillant très agité ne cessait de le secouer avec vigueur, l’empêchant de porter secours à sa sœur qui pesta, car celui dont elle avait salement frapper les testicules se releva, la bave dégoulinant sur son épaisse barbe. IL était devenu rouge et son regard semblait injecté de sang. Tremblant de rage il se jeta littéralement sur Morrigane en hurlant, de tout son poids tête vers l’avant et la heurta de plein fouet. La femme tenta de se protéger de ses pauvres petits bras, mais la différence de gabarit entre les deux était si importe que la cela ne servit pas à grand-chose. La jeune femme se fit projeter en arrière sur quelques mètres, atterrissant sur une tablée de plusieurs hommes qui avaient des prostitués sur les genoux. Ces dernières se levèrent bien vite lorsque Morrigane atterrît durement sur leur petit groupe. Trop habituées à ce genre de scène, elle s’éloignèrent pour ne pas y être mêlées. Les hommes avec qui elle se trouvaient et qui semblaient eux aussi en avoir vu d’autres eurent juste un sursaut avant de se mettre à rire bruyamment. Ils s’esclaffèrent en se regardant, telle une bande de copains puant la boisson, et hilare devant un spectacle inattendu. L’un deux s’étant retrouvé avec la jeune femme sur les bras s’exprima.

« Il m’en tombe plein les bras ! »

Phrase qui eut l’effet magique de déclancher une nouvelle salve de rire chez ses comparses, avant qu’il ne repousse la femme sans ménagement, qui tomba sur le sol, étourdie de tant brusqueries. Sonnée, et en perte de repères elle tenta de se relever vivement et en trébucha. Elle fut rattrapé par son premier bourreau par les cheveux. De sa poigne féroce, il commença à la lever de sol avant de la relâcher aussitôt, vacillant sur son propre corps. Morrigane dont l’esprit se fit plus clair pu voir Rodryk, qui avait pu se libérer de l’autre ivrogne, juché sur le dos du géant, les avant-bras sérés très forts autour de son cou. Le géant essayait avec force de se débarrasser de l’homme qui l’enquiquinait. La magicienne profita de ce moment d’accalmie pour concentrer ses fluides dans son bras. Une boule de flamme rougeoyante vint se former dans la creux de sa main avant qu’elle ne se décide à l’envoyer vers le gros géant qui la reçu sur le flanc dans un cri qui sembla décupler sa force. Sans qu’elle puisse comprendre comment lui était venu cette soudaine agilité, l’homme se contorsionna pour attraper Rodryk sur son dos et l’envoyer valdinguer sur le sol sans ménagement. Le corps du Desembrumes émit un bruit sourd sur le sol en bois en le faisant trembler si fort que tous dans la bâtisse purent ressentir sa vibration. Morrigane, était de nouveau seule et il lui fallait se défendre.

Elle tenta d’exécuter son nouveau sort, concentrant ses fluides dans ses deux paumes. Deux boules de flammes naquîrent rapidement mais cette fois elles se détachèrent de la peau de la magicienne pour venir tournoyer autour d’elle. Au départ le géant ne sembla pas les voir puisqu’il avança vers la magicienne d’un pas déterminé, mais lorsqu’il tendit la main pour tenter de se saisir d’elle à nouveau, l’une des boules fonça sur son visage. L’homme s’écria, mi-surprit mi-souffrant et recula prestement en se frappant le visage comme pour tenter d’étouffer les flammes. Ahuri, il eut d’abord un geste d’hésitation, mais après avoir jeter un coup d’œil à une table qui s’était vidée de ses occupants, il envoya son bras faire voltiger son contenu en direction de Morrigane. Elle du une nouvelle fois se protéger de ses bras, et si la majorité de la table passa à ses côtés, une bouteille de verre vînt éclater contre son bras projetant aux alentours des myriades de petits morceaux de verres. Chanceuse elle ferma les yeux assez vite pour que l’un de ces projectiles acérés ne fasse que qu’écorcher sa paupière, mais son bras droit fut sérieusement entaillé. Le colosse monstrueux repris sa marche lorsqu’une main vînt fermement lui agripper la jambe. C’était, Rodryk qui mal au point, toujours couché sur le sol, tentait de le retenir. Le géant un regard mauvais yeux sur ce petit contre-temps. Un instant d’inattention dont Morrigane profita pour faire mouvoir les petites boules de feu qui tournoyaient autour une nouvelle fois vers le visage de l’homme. Au contact, une gerbe de flamme s’étala, libérant une nouvelle odeur de poils roussis dans la taverne. Et alors que l’homme furieux se frappait de nouveau le visage pour éteindre les flammes et qu’il se préparait à charger la jeune femme fou de rage une voix tonna.

« Ca suffit Grofal ! Laisse-les tranquille ! »

L’homme se tourna vers la provenance de la voix furieux. Un autre grand gaillard avait traversé la foule de curieux pour se mêler de l’affaire. Moins imposant que celui à qui il s’adressait, il ne paraissait pourtant pas moins dangereux. Grand et bien bâti, il avait un visage lisse, rasé de près ainsi que de longs cheveux bruns lui tombant sur les épaules. Seule une petite cicatrice venant couper en deux sa lèvre supérieure lui donnait un air atypique.

« Te mêles pas de ça ! Cette pétasse à … »

« Cette pétasse c’est ma sœur. Personne ne lui manque de respect ici, si ce n’est moi. Alors surveille ton langage. »

Ardur était là, arrivé à point nommé.

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