Le Port

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Yuimen
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Le Port

Message par Yuimen » jeu. 4 janv. 2018 15:21

Le port

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Le port d'Oranan est un grand port de commerce. Oranan exporte ses céréales de par le monde et importe ce dont elle a besoin pour vivre.

Le port est protégé par une grande jetée et un grand canal permet d'accéder jusqu'au centre de la ville. Deux tours protègent l'entrée du port, elles sont gardés nuit et jour par des gardes prêts à enflammer n'importe quel intrus.

De nombreux entrepôts sont sur le port et les arsenaux fonctionnent jour et nuit pour créer les navires de combats de la marine d'Ynorie.



La demande doit être postée, avec le lien du post, dans le sujet d'Interventions GM.
Prix et explications des navires : Règle des voyages maritimes

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Vadokan Og'Elend
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Re: Le Port

Message par Vadokan Og'Elend » mer. 13 févr. 2019 17:51

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Sur notre chemin vers le port, je me permis de questionner sommairement la forgeronne elfe.

« Alors, Jila Na’alem, dites m’en plus sur vous. Quelle est cette cité d’où vous venez, et quelles sont vos motivations pour participer à cet événement en Ynorie ? L’on voit peu des vôtres, par ici… »

Tout en marchant à travers les rues de la cité ynorienne, elle répondit :

« L’on voit encore moins de vos semblables, Sieur Og’Elend, si tant est qu’il en existe. »

Je notai la pique avec humour. C’était une réponse adaptée à ma vile curiosité. Elle poursuivit néanmoins.

« Je suis originaire de la cité double d’Hidirain et Rock Armath, en Imiftil. Une cité que j’aime tendrement, mais qu’il m’arrive de quitter pour observer le vaste et superbe monde qui nous entoure, à la recherche d’inspiration pour mes pièces. Je suis forgeronne d’art, de formation, et il n’est de meilleure muse que la nature elle-même et ses formes resplendissantes. Ce concours est plus pour moi une opportunité de voyager dans le vaste monde qu’une réelle compétition faisant s’affronter des forgerons. Je suis d’ailleurs tout aussi impatiente de découvrir leurs propres réalisations et techniques pour m’améliorer que de travailler moi-même sur ce rare et magnifique métal de glace. »

L’elfe semblait être passionnée, esthète et sage. Je levai néanmoins un sourcil curieux.

« N’avez-vous donc jamais travaillé directement sur l’Helcéa ? »

Elle secoua la tête avec un sourire en coin. C’était un pari risqué, pour un concours de cette ampleur et de cette importance. Mais elle ne semblait pas inquiète de ses capacités, que j’imaginais dès lors plus que correctes. Après tout, moi non plus je ne m’étais pas embarqué dans cette aventure pour le concours lui-même, pour la compétition. Ce n’était, pour moi aussi, qu’une excuse pour sortir d’un marasme inactif, pour aller parcourir le vaste monde et me retrouver, une fois de plus, sur la voie du Sang Ancien. Nous arrivâmes au port sans qu’elle pose elle-même la moindre question sur moi. Mes origines ne l’intéressaient donc pas ? Peut-être n’était-elle pas aussi curieuse que moi, ou pensait-elle à autre chose.

Je n’avais que peu parcouru le port d’Oranan, durant mon séjour en la capitale d’Ynorie. Les effluves iodées et ressacs marins ne m’avaient jamais attirés, et je gardai un mauvais souvenir de ma dernière expérience marine, sur ce navire de « commerçants » qui s’étaient avérés être des marchands d’esclaves voulant nous ajouter à leur collection, la jeune elfe de Cuilnen et moi. Quel était son prénom, déjà ? Toute cette histoire avait fini à l’eau, et il n’en fallut que de peu pour que la mer m’engloutisse.

Les vastes bâtisses côtoyaient ici les hauts mats et les voiles des jonques tout à fait particulières de cette culture humaine. Ils cultivaient leur originalité, leur différence, malgré leur histoire commune avec les traditionnels et puissants kendrans. J’espérais que l’une d’elle avait déjà pour cap Nosveris, ou en tout cas serait disponible pour nous y mener. Nous ne tardâmes pas à nous rendre à la cabine du capitaine de port, qui saurait certainement nous indiquer ce que nous cherchions. Il s’agissait d’un vieil ynorien, aux cheveux bancs dégarnis sur le dessus de la tête, mais pendant sur l’arrière de son crâne. Il portait une fine barbe au menton, et leva sur nous deux yeux bridés sombres et plissés de rides. Je le saluai d’un signe de tête, mais il fronça les sourcils, et lança d’une voix éraillée :

« Ooh. Je ne pensais pas que la Mort viendrait me cueillir aujourd’hui… »

Interloqué, j’ouvris de grands yeux surpris, pendant que ma compagne se retournait en pouffant discrètement. Faisais-je vraiment si peur à voir ? Pensait-il que j’allais le tuer séant, ou me prenait-il carrément pour Phaïtos en personne ? Je levai les mains pour le rassurer, conscient de ne pas pouvoir compter sur Jila qui restait hilare.

« Non… non rien de tout ça, nous venons juste nous enquérir de la partance prochaine d’un des navires du port vers le Continent de Nosveris. »

Le vieil ynorien pencha la tête sur le côté, et se départit d’un « Oh. » un peu hésitant. Son regard d’ancien s’appesantit sur moi, me scrutant de pied en cap avec attention. De toute sa vie, pourtant longue, il n’avait sans doute jamais vu de tel énergumène. Par chance, je savais manier la diplomatie et la politesse. C’était ce qui me sortait souvent des situations les plus embarrassantes, venues de mon apparence. Hélas, cette fois, si le gérant du port comprit que je ne lui voulais aucun mal, son visage me fit vite comprendre qu’il ne pourrait répondre à ma demande par la positive. Il vérifia tout de même, par acquis de conscience, sans doute, dans ses carnets de vélin. En vain.

« Hmmm. Non, non. Aucun départ vers ce continent avant plusieurs semaines. Et encore… Les eaux ne sont pas sûres, en ce moment. La Chienne d’Omyre renforce ses troupes, à Pohélis, il ne fait pas bon naviguer dans ces eaux. Pas bon pour le commerce. »

Plusieurs semaines ! C’était bien au-delà de ce que nous pouvions attendre. L’helcéa n’était pas un métal simple à trouver, et nous devrions parcourir de vastes territoires pour espérer en dénicher, même sur place. Je soupirai, défait. Voilà un concours qui ne commençait pas terriblement bien. Mais puisque j’étais garant de Jila auprès du Conseiller Gale, je devais faire tout ce qui était en mon pouvoir pour qu’elle puisse remplir ses objectifs. Je questionnai le vieillard :

« N’y-a-t-il vraiment aucun moyen pour qu’un navire parte ? J’ai de quoi payer, même pour une prise de risque. »

L’elfe, qui avait cessé son hilarité à l’écoute de la mauvaise nouvelle, regardait maintenant la situation d’un air sombre. Elle posa une main sur mon bras, à la fois pour me remercier de l’initiative, et pour me retenir d’aller trop loin, de m’impliquer financièrement trop fort. Je secouai la tête, alors que l’ancêtre répondait.

« Non, non. Aucun capitaine ici ne serait assez fou pour tenter cette folie. L’argent n’achète pas la mort, savez-vous ? »

Je baissai les yeux. Évidemment que je le savais. Prudence était mère de toute vertu, et pourtant, nous n’avions pas le choix. Je serrai les mâchoires, prêt à abandonner, quand l’humain poursuivit.

« Il y a… peut-être une solution. J’ai dans le port un navire dont aucun capitaine ne veut. Une prise de la flotte auprès de pirates. Un galion qu’on dit maudit, au bois et aux voiles noires comme la nuit, sombres comme les ténèbres de la mort… Il pourrait bien vous aller… »

Je me sentis un peu malaisé. C’était une sorte de racisme plutôt innocent, mais ça valait le coup d’essayer.

« Montrez-le nous. »

Il se leva, fébrile, et nous mena d’un pas lent hors de la capitainerie. Nous parcourûmes une bonne partie du port pour nous retrouver un peu à l’écart des voies les plus empruntées, près de docks moins reluisants, quoique sans doute toujours plus propres et sécurisés que ceux de n’importe quelle autre ville du continent, exception faite de Luinwë. Là, en cale sèche, se trouvait l’objet de nos convoitises : un fier navire à la sombre apparence. Il n’avait pas menti, il faisait un peu froid dans le dos. Ce n’était pas seulement le bois, dont on aurait dit qu’il s’était changé en charbon depuis quelque incendit, tant il était noir ; ni même les voiles, ici repliées, mais dont on devinait les sombres draperies. Non, l’ambiance entière du bateau faisait peur. Sa proue était ornée d’ossements impressionnants, dont un crâne de fauve aux longues dents. Je ne m’étonnai pas outre mesure qu’aucun capitaine ynorien n’ait voulu naviguer avec. D’ailleurs, une question me vint.

« Bien… Il est… effectivement bien sombre. Et… qu’en est-il de l’équipage ? »

Le vieil homme se tourna vers moi, incrédule.

« Les pirates ? Exécutés depuis bien longtemps, que croyez-vous ? »

Je me ravisai.

« Non, non. Je voulais dire son équipage actuel, quel est-il ? »

Il secoua la tête.

« Oh, mais je vous le disais : personne ne veut naviguer dessus. Pourtant, c’est un bon navire, j’ai l’œil. Vous devrez trouver vous-même le personnel naviguant, si vous le voulez. Alors, qu’en dites-vous ? »

Je me frottai la barbe d’une main nerveuse. Jila observait le bâtiment d’un air peu convaincu. Nous n’avions pourtant pas d’autre choix. Et j’étais prêt, pour elle, à relever le défi que cela représentait. Je m’exclamai :

« C’est d’accord. Ça prendra de toute façon moins de temps que d’attendre un départ. Combien ? »

Un achat compulsif. Mais je n’aurais jamais été très loin, sans moyen de parcourir les mers. C’était un investissement, que je faisais là. Que je comptais bien amortir par la suite. Cela ouvrait tout un autre champ de perspective. J’attendis la réaction du vieillard, observant le galion du coin de l’œil.


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Alfryda Bröhm
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Re: Le Port

Message par Alfryda Bröhm » jeu. 14 févr. 2019 00:24

((( [:attention:] Certaines scènes de ce RP sont à connotation brutale et parfois sexuelle. Aussi est-il recommandé aux lecteurs sensibles d'y réfléchir à deux fois avant d'en entamer la lecture.)))

><


Malgré tous mes efforts, mon client atteint le Port avant que de m'avoir laissé le temps d'identifier ce foutu guetteur qui échappe à ma vigilance. Et pourtant, mon instinct rejoint les inquiétudes de Bragarr, certaine qu'il se fait effectivement suivre par quelqu'un. Mais malgré les dizaines d'individus observés, lorsqu'ils ne disparaissaient pas de la foule, aucun n'a retenu mon attention plus qu'un autre.

(Purin, c'est ce que je voulais éviter ! Le Port est immense et la traque sera encore plus compliquée avec cette masse de monde.)

De son côté, le soleil reste toujours aussi éblouissant, même si je peux sentir le vent se lever. Je compte toujours sur un nuage bien placé pour me faciliter le travail, même si j'aurais aimé qu'il se manifeste plus tôt. Le forgeron accélère le pas et suit le long des quais, rendant ma tâche impossible dans un environnement à la foule aussi compacte. Préférant le garder en vue plutôt que de repérer une aiguille dans une botte de foin, je relâche ma vigilance et progresse derrière le Thorkin, me surprenant à jouer réellement la cliente d'étals en m'intéressant à certain d'entre eux.

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Ce n'est qu'après plusieurs minutes que Bragarr emprunte un étrange chemin, plus sinueux et à l'écart des grandes rues bondées. S'il s'agit d'un raccourci, je perçois le passage comme une opportunité d'identifier ma proie qui s'y engouffrera certainement, trahissant ainsi sa couverture que je ne manquerais pas de relever. Mimant de m'intéresser aux produits d'un maraîcher non loin du virage emprunté par mon client, je reste à l'affût tel un serpent se met en chasse et me mord la lèvre, un brin nerveuse.

(Allez, allez ! Sors de ta cachette, enflure !)

Finalement, et après de longues secondes qui m'ont parues comme des minutes, la silhouette d'un humain se détache de la foule. L'homme observe les alentours d'un air suspicieux avant de reprendre la filature, disparaissant à son tour dans le fameux passage. Il ne m'aura fallu qu'un instant pour distinguer les traits de son visage que je reconnais, au bout d'une très courte réflexion, comme ceux du tricheur de l'auberge, certainement en quête de vengeance. La nature de l'individu me somme de me presser, inquiète qu'il ne profite de l'absence de regards pour s'attaquer à sa cible. Ni une, ni deux, je me débarrasse de mon déguisement et l'enroule maladroitement dans le panier, avant de l'abandonner sous la table du marchand de fruits qui me regarde partir avec un air surpris. Je presse le pas et ferme la colonne, découvrant à plusieurs mètres de moi le dos du lapin qui ne se doute absolument pas de la présence d'un chasseur.

(Maintenant !)

L'heure n'est plus à la discrétion, désormais. J'ai eu suffisamment de mal à le trouver et mon expérience de chasseuse de primes m'a apprise que dans une traque, il ne faut jamais hésiter à frapper lorsque l'occasion se présente. Fidèle à mes principes, je me lance à toute allure vers ma cible dans l'espoir de la surprendre et de régler définitivement cette histoire, mais le bougre est plus vigilant que prévu. Dans une soudaine volte-face, ce dernier me repère dans un petit cri de surprise digne d'une pucelle qui déshabille son amant, comptant sur ses réflexes pour m'esquiver au dernier moment. Sans succès. Déjà proche de lui, je saute sur le dernier mètre qui nous sépare et écrase mon épaule sur son torse dans un choc d'une violence inouïe. Le gredin a le souffle coupé et s'échoue tête la première sur le mur de pierre, laissant résonner dans l'allée le genre de bruit que je n'aimerais vraiment pas entendre si j'étais à sa place. S'en suit un inévitable spectacle durant lequel l'humain roule dans tous les sens en se tenant l'arrière du crâne, beuglant à la mort comme un hystérique.

"GAAAAAAH ! PUTAIN ! CA FAIT MAAAAAAL !"

Je reprends rapidement mon souffle en l'observant un court instant, happée par la scène que je ne m'attendais pas voir arriver si vite. La tâche de sang qui s'écoule le long de la façade me confirme qu'il ne fait pas semblant, laissant un frisson incontrôlable me parcourir l'échine. La situation m'impressionne, mais je me reprends rapidement en main et me rappelle de ce qui m'a mené à cette situation.

(D'accord. D'accord. Je... Je dois l'attacher et après... On verra, merde !)

Guidée par l'empressement, je fouille dans mon sac et y attrape le bout d'une longue corde achetée à Mertar, quelques jours avant de partir pour Oranan. Le tricheur est encore au sol, mais ses hurlements se changent en une légère complainte qu'il répète inlassablement en restant immobile, la tête entre les bras. Regagnant mon sang-froid, je deviens à nouveau cette femme à l'air sérieux qui me caractérise si bien et pose le pied sur son ventre, prête à interroger par la force s'il le faut.

"Dis-moi pourquoi tu suivais ce Thorkin. Je te le demande gentiment, une seule fois."

Pas de réponse, juste un regard de ses yeux rougis par les pleurs. Mon pied s'appuie sur son ventre et il pousse un cri sourd et incomplet par son manque de souffle.

"Réponds ! Pourquoi tu le suivais ?! C'est à cause de ce qui s'est passé à l'auberge, quand t'as essayé de le berner ?!"

Ses dents mordent sa lèvre inférieure et je peux suivre sa vue qui fixe l'espace derrière moi. Je ne comprends que lorsque je me sens soulevée du sol, les bras bloqués le long du corps. Serrant bien plus fort que j'en suis capable, l'étreinte m'étouffe et me fait battre des jambes dans le vide, comprenant que je viens de me faire avoir comme une débutante par un complice inattendu. Mon oreille subit la désagréable chaleur d'une haleine d'homme, braillant et ricanant de m'avoir attrapée sans que je m'en rende compte.

"HAHAAAAAAA ! T'es bien baisée, là ! Tu tabasses mon pote, la puterelle ? C'est not' tour, maint'nant !"

Ragaillardi par l'arrivée de son camarade, le blessé se touche une nouvelle fois l'arrière de la tête et observe d'une colère noire le sang qui lui macule la paume. Ses doigts se resserrent et son visage se fige d'une moue hargneuse, tout ça avant de m'enfoncer rageusement son poing dans l'estomac à plusieurs reprises. La douleur est prévisible et je tente de me protéger en contractant mes abdominaux, mais force est de constater que l'enfoiré frappe brutalement. Je crache ma salive qui se colore peu à peu d'une teinte rouge et ma respiration se fait douloureuse, lâchant la corde qui tombe à terre. Là, j'avoue avoir perdu le contrôle de la situation.

"Alors, ça fait mal, hein ? CA-FAIT-MAL-HEIN ?!"

Chaque mot est ponctué d'un nouveau coup réparti aléatoirement entre mon visage et mon estomac. Sa dernière droite me pique sévèrement la joue et emplit ma bouche d'un goût de fer que je crache en face de moi, haletant comme une truie prête à être égorgée. Un mollard vermillon tombe sur sa veste et l'enflure qui m'emprisonne rigole alors que je peux sentir sa virilité se réveiller contre mon postérieur. La sensation me répugne et m'enrage, me débattant de plus belle de la prise désormais mollassonne du gaillard qui me retient. Dorénavant, ce n'est plus "juste pour le boulot", ça devient une affaire personnelle.

"Bregell, file-moi un coup de main ! J'vais pas la tenir lon... AARGH !"

Son couinement, c'est simplement le résultat de mon talon qui tape juste sur l'articulation de son genou. Ses bras se détache de mon corps et l'infâme porc qu'il est s'étale sur le dos en se tenant la jambe, couinant comme il sait si bien le faire. Je tombe avec lui, mais tente de me relever aussitôt pour répondre à son compagnon qui tente déjà de me maîtriser, mais la surprise semble lui faire perdre ses moyens. Je peux sentir la pression de ses mains qui se resserrent sur mes chevilles dans le but de me tirer vers lui et de me neutraliser plus facilement, mais je me bats des jambes jusqu'à le prendre de court et lui envoyer mon pied droit dans la figure alors qu'il recule en se tenant ce qui reste de sa sale gueule. Le dos plaqué contre le mur, il parvient à reprendre ses esprits plus rapidement que prévu et se jette sur moi alors que je me remet à peine debout sur mes deux jambes, incapable de l'esquiver. La masse de son corps m'étale sur le sol et nous nous livrons à une lutte impétueuse, tous deux désireux d'en sortir vainqueur. Sa main vient griffer mes joues et mon cou à plusieurs reprises dans de détestables picotements que je contiens en serrant les dents, répliquant comme je peux malgré son poids qui se fait sentir. C'est en tentant de jouer de cet handicap que je bascule peu à peu le bougre sur le côté, usant de sa charge pour nous forcer à inverser les rôles. La tâche me demande un effort considérable et je dois lui concéder quelques coups gratuits qu'il ne rate aucunement, marquant ma peau de nouveaux hématomes. C'est à ce prix que je parviens à le renverser et à me glisser sur lui, aussi rapide qu'un serpent prêt à dévorer sa proie. J'impose ma domination au moyen de quelques gnons sur sa figure, ce qui l'oblige à la reddition pour ne pas déguster davantage.

"C'EST BON, C'EST BON ! ARRÊTE ! T'AS GAGNÉ ! T'as gagné..."

Mon nez coule encore de notre dernier échange, m'obligeant à renifler bruyamment pour recracher une morve ensanglantée sur le sol. J'ai les yeux brouillés de larmes, la respiration qui résonne jusque dans mes tympans et la main qui tremble en serrant fortement le col de sa tunique. Mais comme il l'a dit lui même, j'ai gagné.
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Re: Le Port

Message par GM Apprenti 1 » jeu. 14 févr. 2019 01:37

Intervention pour Vadokan Og'Elend

><

À ta question, le vieil Ynorien fait la moue en se frottant le menton, cherchant un prix qui ne fera pas fuir le seul acheteur potentiel d'un navire qu'il pensait invendable. C'est au bout de longues secondes qu'il lève les yeux vers le mât, comme pour demander son avis au bateau lui-même.

"Erf... J'ai pas envie de m'embêter à profiter d'votre situation, et puis vous d'vez être ma seule chance de m'en débarrasser... J'dirais quatre cents Yus et vous m'le débarrasser d'la cale sèche avant la fin d'la s'maine. Tope-la ?"

La main tendue vers toi, il attend ta réponse sans vraiment te laisser l'opportunité de négocier son prix.
.

De l'autre côté du miroir... Mais je vous aiderai sans vous décevoir !
GM en apprentissage, dégagez le passage !

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Vadokan Og'Elend
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Re: Le Port

Message par Vadokan Og'Elend » dim. 17 févr. 2019 11:25

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Le vieillard ne dut pas réfléchir bien longtemps avant d’accepter de donner son prix. Quatre cent yus pour le bâtiment, que je devrais amerrir d’ici la semaine suivante. Aucun problème, puisque je comptais partir au plus vite. Il tendit alors sa main vers moi pour « toper », comme il affirma. Peu au fait de ces pratiques, je me contentai de prélever quatre pièces d’argent de ma bourse pour les déposer dans sa main tendue, comme paiement du navire. Il me regarda d’un drôle d’air, mais les accepta sans rechigner, trop heureux sans doute de se débarrasser de ce poids mort dans son port. Je précisai néanmoins :

« Arrangez-vous pour qu’il soit à quai au plus vite, je m’occupe de recruter l’équipage. Vous n’entendrez plus parler de moi ou de ce navire de sitôt, et dès que possible. »

Il sembla satisfait de ma proposition, et entreprit les manœuvres et les ordres pour remettre ma nouvelle acquisition à l’eau. Je restai quelques minutes pour voir les hommes du port déplacer l’immense objet, fier, finalement, d’avoir fait ce choix, cet achat un peu compulsif et inconsidéré. J’en tirerais sans aucun doute de bons avantages, à commencer par une liberté de mouvement sans précédent. Une fois la coque à flots, je me tournai vers Jilan, qui semblait prise dans la même admiration que moi pour la mise à l’eau. Voyant que je la regardais, elle commenta, souriante :

« Merci, Vadokan Og’Elend. Je savais avoir fait le bon choix, en t’engageant pour ma protection. Ce dévouement ne fait que le prouver encore davantage. »

J’inclinai la tête.

« Il faut ce qu’il faut ! En attendant, il va nous falloir trouver un équipage pour ce rafiot. Et vite, si nous voulons partir. Je propose que nous nous séparions. Retrouvons-nous à quai ce soir avec les marins qu’on aura dénichés. Tu as carte blanche : il va bien nous falloir compter, pour l’heure, sur la rapidité plus que sur la qualité. »

Elle opina du chef, et s’en alla sur les docks. Je restai encore quelques minutes à observer le navire, sa sombre présence parmi les jonques ynorienne. Et là, je lui décidai un nom : Oloth Ul’ilindith. Sombre Destinée, dans ma langue natale, le shaakt. Ça lui allait comme un gant, et ça collait à son apparence lugubre. Pourquoi chasser le naturel, quand on sait qu’il reviendra au galop ? Satisfait, je m’avançai à mon tour vers les quais, sans trop savoir comment m’y prendre pour recruter un équipage. Dénicher en priorité un capitaine navigant serait une bonne solution, déjà…

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Vadokan Og'Elend
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Re: Le Port

Message par Vadokan Og'Elend » ven. 22 févr. 2019 10:57

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Je fus hélas vite déconfit dans mes recherches. Si j’avais acquis une bonne réputation aux alentours de l’Auberge des Hommes Libres, il n’en était rien dans le quartier du port. Les marins que j’abordais se contentaient, pour la plupart, de me regarder d’un œil mauvais sans répondre à ma demande, avant de retourner à leurs occupations. Certains, plus respectueux, me saluaient, sans plus, refusant mon offre de leur parler. Les derniers, plus rares encore, acceptaient de m’écouter, mais tournaient vite les talons lorsque j’évoquais le navire pour lequel j’embauchais un équipage. Il avait vraiment une sale image, ici. Sans doute aurais-je eu plus de chance de trouver des hommes d’équipage dans une autre ville, dans un autre port, où il n’aurait pas cette image de navire maudit, mais avant ça je devais toutefois trouver suffisamment de monde pour le faire naviguer. C’était un peu un cercle vicieux, un serpent qui se mordait la queue.

Alors que je commençais à perdre espoir, une personne des plus inattendues vint m’apostropher sans préambule. Une naine à la chevelure rousse et à la peau pâle, à la démarche assurée. Ses yeux clairs se posèrent sur moi un instant, comme pour jauger mon individualité, puis elle parla, sûre d’elle, me demandant si je cherchais bien un équipage pour mon navire, et si j’étais bien celui dont le capitaine du port lui avait parlé. Je restai coi un instant. Finalement, le vieillard m’était plus utile qu’il ne l’avait laissé paraître. Il voulait vraiment se débarrasser de ce navire, sans nul doute. Mais était-il vraiment en train de m’envoyer un équipage thorkin ? Ces derniers n’étaient guère de grands navigateurs. L’on disait même qu’ils nageaient comme des pierres. Je levai un sourcil, curieux, et répondit.

« Oui ? Oui, c'est exact, bien que je n'aie pas encore trouvé grand monde qui veuille bien voguer sur ma nouvelle acquisition. Vadokan Og'Elend. »

Je tendis la main vers elle, assez bas pour qu’elle puisse la saisir sans peine. Elle était petite, bien sûr, mais peut-être légèrement plus haute sur pattes que ses semblables. Une origine plus exotique que la mythique Mertar des Monts du Karathren de Nirtim ? Elle s’empara sans hésiter de ma main pour la serrer vigoureusement, et avoua être la garde du corps d’un des participants à l’Eremantarifôjï. J’eus du mal à réfréner un sourire, et m’exclamai :

« Ah ! »

Inutile de dissimuler plus longtemps la vérité à celle qui s’était présentée sous le pseudonyme d’Alfryda Bröhm, insistant pour faire partie du voyage.

« Hé bien figurez-vous que nous sommes, moi et la forgeronne elfe qui cherche également du personnel naviguant, vos concurrents pour le concours. Pour le métal de glace, l'Helcéa. »

Je la scrutai un instant, réflexif. Elle semblait en savoir plus sur moi et mes projets qu’elle ne le laissait entendre. Peut-être était-elle déjà au courant, pour mon activité auprès du Conseil de la Cité, et plus particulièrement du Conseiller Gale.

« Vous savez donc que nous nous rendons sur Nosveris. Ma foi, je suis plutôt bon joueur : j'accepte de vous emmener avec moi. J'aimerais toutefois, si vous le permettez, ajouter une petite condition : que vous m'aidiez à dénicher des marins qui voudront bien servir sur mon navire peu... conventionnel pour les ynoriens. Et que vous donniez un coup de main pendant la traversée, si nous n'en trouvons pas assez. Qu'en dites-vous ? »

Elle fit une moue ennuyée, plissant la lèvre après une surprise évidente de ma demande sur son visage. Elle annonça espérer ne rencontrer aucun problème auprès de son employeur, Gale, j’imagine, puis précisa qu’on serait les seuls à partir pour Nosveris avant des mois. J’opinai du chef, bien conscient de cet état de fait qui m’avait forcé à faire cet achat. Elle poursuivit en précisant ignorer si elle serait d’une aide efficace pour dénicher un équipage, arguant qu’elle n’était que récemment arrivée dans la ville, et connaissant bien peu de monde. Elle affirma qu’elle allait demander à son condisciple, Bragarr, le forgeron, certainement, s’il connaissait des marins susceptibles de nous servir.

« Je doute qu’il puisse s’agir d’un vice de procédure : le concours ne porte que sur les réalisations des forgerons, non sur la manière dont ils s'approprient le métal. Bragarr, donc. un thorkin, comme vous ? Ils ont vraiment balayé large pour ce concours. Les humains n'ont aucune chance face à un maître forgeron nain. »

Après un instant de courte hésitation, elle avoua toutefois ne guère être coutumière des mers, même si elle ferait son possible pour m’aider à la tâche. Je la rassurai sur tous ces points, ne pouvant empêcher un sourire dévoilant mes crocs :

« Nul doute que vous puissiez être aussi utile que moi sur un navire, voire plus. Je n'ai jamais vogué activement. Quant à trouver un équipage... ma foi vous aurez peut-être plus de chance que moi. C'est entendu. Je vous propose que nous nous retrouvions ce soir, au crépuscule, avec nos recrues, au quai abritant mon bateau. L'avez-vous déjà aperçu ? »

Elle confirma l’ascendance Thorkin de Bragarr, et leur origine commune de Mertar. Comme quoi, elle n’était finalement pas si exotique que ça. Elle avoua ne pas vouloir tenter le faire gagner à tout prix, et même tout ignorer de ses compétences. Mercenaire, elle souhaitait seulement le ramener vivant à bon port, muni de suffisamment de Xiuhl, le métal du feu, pour œuvrer à son art. Elle accepta ensuite de faire son possible pour rameuter le plus de monde possible, et demanda si j’avais des conditions de recrutement avant de chercher le navire du regard, avouant ne l’avoir pas vu encore. Je lui désignai aussitôt du doigt, en train d’être mis à l’eau, à quai. Ce sombre navire à la coque noire et osseuse. Je précisai, honnête :

« C'est celui-là. Et ma foi, je ne vais guère faire le difficile. Ceux qui voudront bien sont rares. Il est dit ici qu'il est maudit, même si je pense qu'il n'en est rien. Une ancienne prise à des pirates. J'imagine qu'une expérience sur un navire est quand même un minimum, ceci dit. »

J’étais dans une situation un peu désespérée, mais pas au point de prendre le dernier ivrogne paysan qui aurait envie de larguer sa femme et ses gosses pour le merveilleux et inconnu monde des vagues. La thorkine me rassura en disant ne pas croire aux fables, mais précisa toutefois qu’elle n’en ferait pas mention à ses hypothétiques recrues. S’ils étaient d’Oranan, ils le sauraient sans doute déjà, très certainement. Notre plus grande chance restait de dénicher des marins en transit, des voyageurs venus d’ailleurs, ou des ynoriens non originaires de la capitale. Alfryda poursuivit en arguant que nous étions sans doute aussi pressés qu’elle de partir, et poursuivit en se frottant les doigts l’un contre l’autre que je saurais convaincre les indécis en les arrosant de promesses de richesses. Je toussotai à cette idée.

« Je suis sans doute aussi pressé par le temps que vous, oui. Et moi non plus je ne suis pas superstitieux. Encore moins sur une apparence dite ténébreuse. »

Je levai les mains pour souligner l’évidence. Qui d’autre que moi serait plus mal placé pour juger sur une sombre allure ?

« Ma foi, mes économies ont souffert de cet achat... Je préfèrerais davantage titiller la fibre aventureuse, voyageuse des candidats. L'appel de la mer, des contrées lointaines... Je doute avoir grand-chose à leur proposer comme paiement pour l'heure. »

J’avais préféré la sincérité. Je préférais éviter qu’elle leur promette monts et merveilles, et paiements généreux alors qu’il n’en serait rien dans un premier temps. Je n’avais rien d’un riche mécène. Elle sembla ennuyée par la précision, et précisa qu’elle ferait son possible. Elle me tendit une main d’au-revoir, que je serrai tout en saluant de la tête, et écoutai sa promesse de me retrouver comme convenu, en soirée devant le navire pour faire le point sur les marins dénichés.

« Bien. J'espère vous y voir avec suffisamment de monde. Et, si jamais il y en a trop - on peut rêver - je ferai alors la sélection. Bonne chance ! Et de rien pour l'aide : c'est bien naturel... Ou ça devrait l'être plus. »

Elle s’éloigna en saluant de la main, et je me retrouvai de nouveau seul, sans personne à recruter. Au moins m’étais-je déniché deux nouveaux aides de camps. Où pourrais-je trouver des marins, ailleurs que sur les quais ? Dans des auberges, tavernes et quartiers mal famés… Mais ceux-là existaient ils, à Oranan ? Je devais me renseigner…


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Alfryda Bröhm
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Re: Le Port

Message par Alfryda Bröhm » sam. 23 févr. 2019 21:43

"Allez, bouge-toi ! Faut qu'on arrive avant qu'le port soit blindé !"

Bragarr semble pressé, ce matin. J'ai comme l'impression qu'il est bien plus enthousiaste à l'idée de partir avec moi pour ce voyage en Nosvéris. Il faut dire que le bougre avait une sacré tête d'ahuri en me voyant rentrer hier soir, le visage tuméfié par les coups et les lèvres rouges. Je m'étais contentée de lui dire qu'il n'y aurait plus de problèmes avec celui qui le filait avant de monter dans ma chambre et m'affaler dans mon lit. Le lendemain, il ne souhaitait pas en savoir davantage, mais le ton avait changé. Le forgeron ne me demandait plus si j'étais partante pour l'accompagner ou si j'étais capable de telle chose, il avait confiance en moi désormais. Toute cette histoire ne reste qu'une supposition, mais je m'en contentais parfaitement. De toute manière, il est trop tard pour revenir en arrière, maintenant. Mon sac est fait, Bragarr a récupéré tout ce qu'il lui faut pour le voyage et si nous parvenons à trouver un bateau à destination de Henehar dans la matinée, nous partirons ce soir-même.

(Nosvéris... J'en ai beaucoup entendu parler dans les histoires des Longues-Barbes de Mertar. Je n'ai rien retenu de particulier, à part qu'on y caille et que les bestioles bouffent autant qu'un Thorkin à un banquet.)

Quoi qu'il en soit, nous arrivons au Port avant l'heure du déjeuner, suivant inlassablement les pas du forgeron qui semble savoir ce qu'il fait. C'est pourtant lui qui fouille brièvement les quais des yeux avant de me donner ses consignes tout en rajustant son sac sur son dos.

"Bon, j'ai pu voir le Capitaine du port hier et y'a aucun bateau Oranien en partance de Nosvéris qu'est prévu avant un sacré bout d'temps. Par contre... Y m'a parlé d'un drôle de type qu'aurait acheté une coque réquisitionné par l'armée et visiblement, il aurait b'soin d'matelots. Et vu que t'es douée pour repérer les gars bizarres..."

Son regard s'attarde sur moi et je décèle un très léger étirement sur ses lèvres, comme un sourire qu'il tente de dissimuler. À moins que je me trompe ?

"Bref, tu trouveras c'type plus facilement qu'moi. Pendant qu'tu fouilleras les quais, j'irais voir à son navire s'il a déjà trouvé du monde, histoire de l'convaincre de nous embarquer avec lui."

"Et ce type, il ressemble à quoi ?"

"Y m'a dit qu'c'était un genre de... Shaakt à la gueule de Garzok dégueulasse. Et qu'il aurait un air de cul-lisse qui parle avec des mots qu'la bourgeoisie connaît bien. 'Fin bref, tu l'trouv'ras facilement. J'me sauve, à tout à l'heure."

Sur ces mots, Bragarr se faufile déjà au travers des Grands-Gens qui animent le Port et disparaît aussi rapidement qu'une bière dans son gosier. Ce n'est qu'alors que je me demande où et à quoi ressemble le bateau sur lequel je dois retrouver le Thorkin, mais je me démotive rapidement à lui courir après, surtout quand je sais qu'il marche plus vite que moi. On dirait que je vais devoir me débrouiller seule.
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Alfryda Bröhm
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Re: Le Port

Message par Alfryda Bröhm » dim. 24 févr. 2019 21:37

Un jeu d'enfant. Il faut dire qu'il fait assez tâche avec son teint cendré, au milieu de tous ces Oraniens à la peau blanche. Et dire qu'il ne m'a fallu qu'une poignée de minutes pour le trouver près des quais, s'adressant aux marins qui passent. Le bougre semble avoir bien du mal à se faire entendre et j'avoue me ranger du côté des Grands-Gens. Après tout, il est de ceux qui tuent, pillent et violent et son ascendance Shaakt ne m'aide pas à oser franchir le pas. Un dilemme s'installe dans mon esprit, rapidement résolu par mes obligations professionnelles.

(Je ne vais pas commencer à faire ma Thorkine de bonne souche et cracher sur son dos. Il est surement notre seule chance d'atteindre Nosvéris dans les temps.)

À mesure que je m'approche, j'observe rapidement les traits de l'individu qui vient tout juste de se faire envoyer balader par un marin. Je décèle ses ascendances sans grande difficulté, harmonieusement réparties sur son visage. Son teint de charbon est éclairci d'une mine sage et sévère qui traduit ce que j'appellerais "l'expérience des livres". Cela s'accorde parfaitement avec ses légers traits de Garzoks, à savoir une mâchoire qui cachent des dents de loups, un nez qui rendrait jaloux un Sekteg et des oreilles en pointe. Oscillant entre deux espèces réputées pour leurs méfaits, il s'adapte pourtant au diction préféré de mon grand-père, "Juger un inconnu, c'est comme goûter une nouvelle bière. On ne connait jamais le goût qui se cache sous la mousse.". Ma foi, essayons.

"Dites-moi, vous êtes bien celui dont le capitaine du port a parlé ? C'est vous qui cherchez un équipage pour votre bateau ?"

Il se retourne vers moi, gardant un œil légèrement surpris avant de se présenter sous le nom de Vadokan Og'Elend. Par la même occasion, il me confirme qu'il ne parvient pas à trouver de volontaires pour rejoindre son navire. Nos mains se rencontrent en une poignée amicale et je me présente à mon tour.

"Alfryda Bröhm. J'accompagne l'un des participants à l'Eremantariföjï en tant que garde du corps. Nous aimerions faire partie du voyage, si vous l'acceptez bien entendu."

Sans qu'il ne le montre clairement, je le sens amusé. Le Garzok qui n'en est pas totalement un explique qu'il accompagne lui aussi un des forgerons de la compétition. Une forgeronne, même, celle qui s'occupe de... l'Helcéa ? Jamais entendu parler. Notre concurrence ne semble pas le déranger et il se propose même pour nous emmener en Nosvéris si nous nous joignons au recrutement, quitte à aider à bord si les recrues sont insuffisantes. Le marché me semble honnête, mais je n'ai jamais posé les pieds sur un bateau. Mais pour l'heure, je m'inquiète surtout de la réaction de Bragarr à l'annonce de cette nouvelle inatendue.

"Ho. C'est...surprenant, je dois bien l'avouer. J'espère que mon employeur n'en feras pas tout une histoire. Après tout, vous êtes visiblement les seuls à partir pour Nosvéris avant plusieurs mois... Et bien, je ne sais pas si je vous serais d'une grande aide pour recruter un équipage, je ne suis arrivée à Oranan que depuis hier. Je peux cependant demander à Bragarr s'il connaît des marins susceptibles de vous rejoindre, il est là depuis plus longtemps que moi."

Pensive, j'hésite à lui dire la vérité avant de me résoudre à lui annoncer, inquiète qu'elle ne provoque un refus de sa part.

"Je ne suis pas non plus habituée à voguer sur les mers, mais je tâcherais de vous être utile."

Vadokan hausse les épaules pour seule réponse, préférant me rassurer sur mes inquiétudes au sujet de mon client. Il précise que le concours ne se joue pas sur ce qui se passe avant la création des pièces d'équipements et qu'aucune règle n’empêche les participants de voyager ensemble pour récupérer leurs minerais. Sans sa forgeronne à ses côtés, il se permet même de vanter les capacités des Thorkins en matière de forge, avant de me proclamer comme bien plus utile que lui sur son navire. Son parler est agréable à entendre et je me surprends à apprécier la conversation.

"Un Thorkin, c'est exact. Lui et moi sommes originaires de Mertar, même si je n'ai entendu parler de lui que dernièrement. Je ne saurais vous dire s'il est meilleur que les autres concurrents, je ne l'ai jamais vu à l'œuvre. Pour tout vous dire, je ne cherche pas à le faire gagner à tout prix. Ma seule préoccupation, c'est de le ramener vivant avec le métal qu'il recherche, le...Xiuhl, si je le prononce correctement. S'il sort vainqueur du concours, tant mieux pour lui."

D'un hochement de tête, j'accepte son marché et lui demande quelques précisions sur son navire.

"Très bien, je vais faire mon possible pour vous trouver du monde. Vous avez des conditions particulières, au sujet de l'équipage ? Et je n'ai pas encore pu voir votre navire. Ou est-il ?"

Nous nous rapprochons du bord du quai et son doigt pointe un navire plutôt lugubre, s'accordant bien avec son nouveau propriétaire. Vadokan me précise que n'importe qui fera l'affaire, tant qu'il sait quoi faire une fois en mer. Je hausse les yeux au ciel quand il m'indique que le navire est maudit par je-ne-sais-quelle-connerie, ne manquant pas d'y réagir.

"Maudit ? Je ne me prête pas à ce genre de fables, mais j'éviterais d'en faire mention à ceux que ça intéresse. Ils se feront leur propre avis sur la question. Et puis, j'imagine que vous devez être aussi pressés que nous de partir. Et puis... Vous saurez certainement convaincre les indécis qui se présenteront."

D'un hochement de tête, il me rejoint sur la nécessité de partir au plus vite tout en m'avouant ne pas se prêter à ces histoires de malédictions, malgré l'impact quelles semblent avoir ici, à Oranan. Cependant, le bougre m'avoue ne plus être capable de financer son personnel d'or et d'argent, sa bourse ayant souffert de son récent achat. La nouvelle rend la tâche plus ardue, mais je compte sur Bragarr pour me tirer de ce mauvais pas. Je conclus notre échange d'une nouvelle poignée de main, prête à rejoindre le Thorkin qui m'attend près du navire "maudit".

"Et bien, nous verrons. Comme je vous l'ai dis, je vais faire mon possible. Pour l'heure, je vais rejoindre Bragarr et lui détailler notre rencontre avant de chercher des marins. Je vous dis donc à ce soir, devant votre navire. Merci encore pour votre aide."

Non sans rester réaliste sur le nombre de volontaires, Vadokan m'indique qu'il fera le tri si trop se proposent. Nous nous saluons une dernière fois et je m'éloigne, le laissant avec la satisfaction d'avoir rentabilisé son temps passé sur les quais.
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Madoka
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Re: Le Port

Message par Madoka » mar. 19 mars 2019 21:24

En cette heure de la journée le port est moins fourmillant, moins vivant, mais il y traîne une odeur que je n’arrive toujours pas à supporter, même après tant d’années à vivre dans une ville portuaire, celle qui persiste des heures après les dernières ventes de poissons frais, l’odeur des viscères qu’on jette dans les caniveaux, attendant que les animaux ne les mangent ou que la pluie n’emporte tout dans l’océan. Il n’y a que les jours de fort vents ou de tempête que l’odeur se dissipe au profit de senteurs salées.

Dans mon dos, Sam Gadgo attire les regards curieux et quelques remarques indiscrètes fusent de part et d’autre, liées principalement à son origine ou son accoutrement. Il ne semble pas s’en offusquer et j’aurais tendance à penser qu’il en a autant à leur encontre.

Quand nous parvenons enfin au bord des quais, les regards diminuent car les habitants qu’on croise maintenant travaillent et ne s’occupent guère des civils. Les ordres lancés à la chaîne et les grincements des caisses ou des cordes rythment notre pas cadencé. L’odeur de goudron, de bois mouillé, d’algues, de sel et de sueur remplacent peu à peu l’odeur de poisson du petit marché à l’entrée du port.
Je m’arrête brusquement lorsque je l’aperçois enfin. Je craignais un peu de ne point réussir à le reconnaître mais, le voir une fois suffit à ne pas l’oublier. Un bateau à voiles assez petits comparé aux autres navires destinés aux transports de passagers, mais il est magnifiquement ouvragé et taillé pour fendre les flots. Les hommes armés de hallebardes au pied de la passerelle ressemblent aux gardes du temple des plaisirs, habillés de leur habit rouge éclatant. Ceux-ci en revanche sont moins accueillants.

« Halte Mademoiselle. Personne ne monte sans autorisation. »

Je joins mes mains devant mon sourire et incline légèrement la tête sans les quitter des yeux.
« Messieurs bonjour. Nous n’en ferons rien, n’ayez crainte. Le capitaine Tiercevent est-il à bord ? Je souhaite lui parler d’une affaire importante.»

Les deux hommes ne se formalisent pas à poser plus de questions, n’étant là que pour repousser les trop curieux ou les trop indiscrets. D’un geste, l’un me fait signe que oui tandis que l’autre ordonne à un matelot proche d’aller quérir le capitaine pour une demoiselle et un Sinari.

Il n’a pas beaucoup changé depuis la dernière fois. Ses cheveux blonds mi-longs, son bandeau dans les cheveux. Il se tient droit et fier, les épaules hautes et le menton de l’homme sûr de lui. Sa peau est plus dorée et son visage bien plus serein. Lorsqu’il s’approche et nous aperçoit, je me rends compte à quel point les filles de la maison rouge avaient sacrément raison sur un point, son sourire est ravageur.
Je le salue d’un geste ample par-dessus la tête et Sam en fait autant.

« Capitaine Tiercevent ! Vous vous souvenez de moi ? La chasse au trésor. »

D’une voix fluette et amicale je le hèle la première, comme une vieille connaissance venue en visite à l’improviste. Il est habile pour dissimuler son hésitation et qui pourrait lui en vouloir de chercher le nom d’une personne qu’il n’a fait que croiser en plein combat au cœur de l’océan. Moi-même je ne connais le sien que grâce à dame Pulinn du temple des plaisirs, un bon ami à elle m’avait-elle avoué à l’époque, qui avait à sa demande voler les registres d’identité des volontaires à une course au trésor fallacieuse.

« Bien sûr, la jeune femme du bateau pirate. Comment oublier un si beau visage ! »
((Bien rattrapé !))

Dans sa bouche, cette phrase facile et éculée sonne élogieuse et sincère.

« Aujourd’hui je serais simplement Madoka. Aucune piraterie dans mes intentions je le promets, dis-je à l’attention des gardes qui me scrutent avec insistance. Un brin d’aventure tout au plus. Puis-je vous présenter mon compagnon de route : Sam Gadgo. Un maître forgeron Sinari qui participe à l’Erementarīfōji. Sam, je vous présente le capitaine Logan Tiercevent. »

Le Sinari lève une main à son front et d’un geste simple et éloquent exprime en « enchanté de vous connaître », renvoyé amicalement par Logan. Il me signe l’instant d’après qu’il me laisse discuter avec mon ami pendant qu’il s’installe à quelques pas de là pour prendre un « goûter ». Le mot m’est inconnu mais il s’avère être un synonyme de manger.

« J’escorte Sam pendant son voyage. Nous devons nous rendre dans le désert de l’ouest afin qu’il puisse extraire de lui-même le métal de lumière. Vous sachant en ville, je me demandais si vous pourriez nous mener à Exech. J’ai de quoi payer naturellement. Dame Pulinn m’a brièvement parlé de vous et semble avoir une grande estime pour vous … »

Son sourire ne cesse de grandir à mesure que je parle. Il m’écoute et s’intéresse visiblement à mes propos mais quelque chose dans son regard, une lueur pétillante mâtinée d’amusement m’incite à penser que ma demande est sur la bonne voie.

« Haha, une grande estime dis-tu ? Alors, tu as rencontré Pulinn … »
Je lâche un soupir à peine contrôlé. Rencontré Pulinn … peut-on parler de rencontre quand on a l’impression d’être son propre spectateur face à elle. Peut-on parler de rencontre quand une étoile filante passe devant nos yeux ? Car c’est là le souvenir que j’en garde.
« Oui. Elle est sidérante. Si mes souvenirs sont bons, elle a plutôt dit : connaissance des plus intimes.»

Mon clin d’œil complice ravive le sourire du capitaine qui rit de bon cœur, pas le moins du monde gêné que deux femmes puissent discuter de lui entre elles. Le naturel de cet homme me plait, je me sens déjà plus libre de penser et dire ce que je pense. Il a cette attitude dégagée des hommes sans attaches qui profitent de ce que leur offre le présent.
Il hèle le Sinari afin qu’il nous rejoigne sur le pont de l’Allégresse où nous sommes les bienvenus. Un nom original pour un navire, un nom qu’une connaissance intime du capitaine aurait pu lui donner, me dis-je à part moi.

« Joli nom. » Dis-je en passant mon bras sous celui qu’il me tend.

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Nam
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Re: Le Port

Message par Nam » jeu. 25 avr. 2019 16:57

Nam avait marché bon train pour rejoindre le port et c'était donc relativement reposé depuis sa course-poursuite avec le bichon. Il s'était arrêté à une fontaine pour boire et s'était barbouillé le visage d'une rafraîchissante éclaboussure. Son visage gouttait encore tandis qu'il arrivait aux docks du port d'Oranan. Son regard furetait à droite à gauche, tâchant d'apercevoir une touffe de poils blancs. Ses oreilles tâchaient de faire le point entre les cris des marchands, des badauds et des commerçants et ceux des animaux présents. Le bichon avait un aboiement aigu, très caractéristique et il ne serait pas trop difficile de le différencier de la masse. Mais encore fallait-il l'entendre. Encore fallait-il le voir.

Le colosse se rappela de ce que lui avait dit l'homme qu'il avait bousculé dans les ruelles quelques minutes plus tôt. Le chien aimait fréquenter le port et chiper quelques maquereaux, harengs ou sardines aux honnêtes travailleurs du coin. On pouvait le comprendre. Enfant, Nam avait maintes fois salivé devant les étals des poissonniers lorsque sa mère, tenancière d'une taverne, faisait les provisions pour la journée. Il avait appris à choisir le poisson en observant la rutilance des écailles et la transparence limpide de leurs yeux, signe d'une fraîcheur incontestable. Ces simples souvenirs lui mirent l'eau à la bouche. Si le chien qu'il traquait avait faim, il s'avérait que lui aussi.

Il passa à côté d'un navire de moyen tonnage, l'Allégresse, où il vit s'embarquer à son bord une somptueuse femme accompagné d'un homme d'équipage. Obnubilé par le soyeux des cheveux de cette fille dont il ignorait le nom, il fut un instant distrait de sa mission.

C'est alors qu'un cri familier vint à ses oreilles : le jappement du bichon était de retour. Du coin de l’œil, il aperçut la petite forme blanche mais fit mine de l'ignorer tandis qu'il se dirigeait vers l'étal le plus proche. Le chien, bien décidé à ne pas laisser indifférent, continua son manège en se rapprochant du géant. Nam acheta deux sardines au commerçant, se délestant d'autant de yus nécessaires. En faisant bien attention à se faire voir du bichon, mais en faisant semblant de ne pas remarquer sa présence, il croqua le poisson frais avec délectation, accentuant son geste en se pourléchant les babines et suçotant chacun de ses doigts après avoir englouti la nourriture. Il devinait que le petit canidé devait baver à le regarder comme ça. Puis, comme si de rien n'étant, Nam continua son chemin pour se rapprocher des docks. Il s'assit, et profita du doux clapotement des vagues contre la coques des navires amarrés que les aboiements ne parvenaient pas à souiller.

Il s'allongea ensuite, tenant dans sa main la deuxième sardine, suffisamment ouverte pour laisser paraître le poisson et assez fermement pour ne pas le laisser échapper. Simulant une sieste, il ferma presque totalement ses yeux. Le bichon continua d'abord à aboyer pendant de longues minutes, mais finit par se rapprocher. très prudemment d'abord puis avec plus d'audace. Bientôt, Nam sentit sa petite langue lui lécher l'index puis sa gueule tenter de libérer la sardine de la poigne du géant.

C'est alors que Nam agit avec la vitesse d'un serpent.

- Coup-fourré de la mante religieuse ! s'écria-t-il en se roulant sur la côté.

Il lâcha la sardine et sa main attrapa le cou du petit chien, qui, passé un bref instant de stupéfaction, cria à tue-tête, furieux de s'être fait prendre au piège.

- Et voilà, je t'ai eu ! Gagné ! Hahahaha ! Tiens-toi tranquille, maintenant ! Mais, non tranquille j'ai dit !

Le bichon se remuait dans tous les sens, tandis que Nam avait attrapé son collier. Le but n'étant pas de pendre le petit animal, Nam alla directement à l'essentiel : manqua de peu de se faire mordre, il détacha le petit rouleau de papier et lâcha immédiatement le bichon. Le canidé, une fois à terre, détala de plus belle en aboyant tout aussi fort.

Conscient que l'une de ses mains puait la sardine, il la rinça dans l'eau et l'essuya sur ses affaires. Il bouillait d'impatience. Il tenait entre ses mains le fruit de ses efforts. Son grand-père avait raison : la patience payait ! Le rouleau était maintenu par un fin ruban, qu'il défit. Et se prépara à lire son contenu....

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Gamemaster8
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Re: Le Port

Message par Gamemaster8 » sam. 27 avr. 2019 14:13

Intervention gmique pour Nam

Sur le parchemin déroulé courrait une écriture fine et habile, petite aussi, étant donné le peu d'espace dont disposait son auteur.

À vous qui lisez ces quelques lignes : Aidez-moi !

C'est bien en désespoir de cause que je m'en remets à un étranger, jeune, moins jeune ou vieux, qui aura été assez habile et intelligent pour contrer la ruse de mon petit Sushi afin de mettre la main sur ce petit mot que vous parcourez à présent. Je vous en prie, ne jetez pas ce message, lisez-le jusqu'au bout. Si vous ne pouvez m’aider vous-même, transférer ce message à quelqu’un en qui vous avez confiance.

Cela fait à présent huit jours que je suis enfermée dans ce trou qui ressemble à s'y méprendre à un vieux puits à sec et désaffecté. Je me suis réveillée ici, avec mon matériel d’écriture et mon petit chien, avec en sus une bosse derrière la tête. Dans ce trou exigu, je n’ai droit qu’à un matelas improvisé de pailles, une couverture de facture modeste, mais propre et en bon état, un seau pour faire mes besoins, et un autre dans lequel de la nourriture m’est apportée une fois par jour. Chaque matin, je vois un petit rayon de lumière, lorsque la trappe du haut s’ouvre pour faire descendre et remonter à l’aide de cordes et de poulies, les seaux de nourritures et de besoins.

Je ne vois jamais mon agresseur ou ses acolytes, ni les entends, je n’ai aucune idée de la raison de mon emprisonnement. J’ai d’abord crié, appeler à l’aide, j’ai tenté de communiquer avec mon agresseur, mais je n’ai jamais reçu de réponse.

Demain, lorsqu’ils remonteront le seau vide de nourriture, j’y mettrai mon Sushi. Ce dernier est assez malin, enfin je l’espère, pour demeurer silencieux jusqu’à ce qu’il atteigne la sortie afin de s’échapper par la suite.

Je suis consciente que je dois vous aider à me retrouver. Par contre, je n’ai aucune idée de l’endroit où je suis enfermée, mais j’espère que Sushi saura vous y conduire. Avant cette mystérieuse prise en otage, j’étais au marché de Tulorim comme à tous les matins à aider les gens illettrés. Installée derrière une petite table de bois improvisée, je proposais mes services aux habitants dans le besoin. J’écris les messages ou je lis ceux reçus pour quelques yus. Je gagne bien ma vie, sans être riche pour autant. Je ne comprends pas pourquoi je suis enfermée ici.

Mon bichon Sushi est malin et sait trouver une cachette lorsqu’il est poursuivi. Mais à présent que vous connaissez son nom, il sera plus facile pour vous de l’approcher.

Aidez-moi, je vous en prie.

Mammie



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Re: Le Port

Message par Gamemaster2 » sam. 4 mai 2019 20:41

Intervention pour Nam Song


><


Occupé à lire le message récupéré au collier du chien, tu ne remarques pas la silhouette d'un homme au physique plutôt frêle qui s'approche de toi en soufflant. Bien plus petit que toi, il semble assez impressionné par ton imposante carrure et ne manque pas de faire défiler ses yeux de haut en bas, constatant davantage le sacré spécimen qu'il a devant les yeux. D'un revers de la main, il essuie son front dégoulinant de sueur et laisse apparaître un visage éreinté qu'on donnerait volontiers à un homme d'une soixantaine d'années, bien qu'il ne semble même pas en faire trente. Sa voix est calme malgré sa respiration perturbante et c'est au gré de la fatigue qu'il parvient à formuler ses dires.

Image

"S'cuses-moi...*Hem* S'cuses-moi, mon gars, ça te dirait d'te faire des Yus faciles ? Avec les gars, on remplit les cales d'un navire marchand et on a du retard sur l'chargement. Sûr qu'avec tes bras, ça irait plus vite et on s'rait en m'sure de respecter les délais du client. Qu'est-c'que t'en dis ?"
"Bwaf Assistance, que puis-je faire pour vous ?"

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L'appel au standard "Bwaf Assistance" est taxé à hauteur de 90 Yus suivi d'une tarification de 25 Yus par minute. La discussion est susceptible d'être enregistrée s'il y a un os.

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Re: Le Port

Message par Nam » dim. 5 mai 2019 00:07

Nam tenait enfin le rouleau dans ses mains.

- Par les dieux, c'est écrit si petit et avec un style un poil alambiqué ! Enfin, j'crois comprendre que ce minuscule bichon s'appelle Sushi...

Il regarda sur le port mais le chien s'était envolé, encore une fois. Il replongea ses yeux dans le document.

- Arrrh, il va falloir que je demande l'aide d'une sœurette pour arriver à lire ce machin !

Lire une pareille écriture lui demandait beaucoup d'efforts, aussi fut-il rapidement interrompu dans son déchiffrage par un homme, visiblement épuisé. Il rangea le message dans ses vêtements.

Le colosse ne s'offusqua pas du regard appuyé que l'homme lui lança. Il avait l'habitude d'être observé comme une bête de foire depuis son enfance. Nam considéra un instant la proposition, se demandant si cela en valait la peine. Après tout, il était sur le point de découvrir le contenu du message qu'il avait enfin obtenu après tant de difficulté. Après réflexion, il se dit que s'il refusait, quelqu'un d'autre s'empresserait d'accepter cette opportunité de gagner quelques pièces facilement. Nam étant sans emploi, il ne fallait pas faire la fine bouche.

- Des Yus faciles ? Ma foi pourquoi pas, si j'peux rendre service ! Où qu'il est ton navire ?

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Re: Le Port

Message par Gamemaster2 » dim. 5 mai 2019 21:29

Intervention pour Nam Song


><


Le visage de l'ouvrier s'éclaire lorsqu'il comprend que tu acceptes, se contentant de pointer du doigt une partie du port pour répondre à ta question.

"C'est c'ui là, avec le drapeau rouge, là ! On doit charger des caisses dans la cale avant l'coucher du soleil, alors va falloir qu'on s'active, l'ami ! Viens, j't'emmène au charg'ment."

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Le navire est de belle facture et l'aisance de son propriétaire ne fait pas un doute en l'observant. Les rames sont dehors, prêtes à emmener sa coque en mer. Les mât est découvert de ses voiles qui n'attendent que le vent pour filer sur les vagues et les tapisseries variées rajoutent un cachet non négligeable à l'ensemble. En suivant le pas lent et irrégulier de l'homme, il te mène quelques centaines de mètres plus loin jusqu'à t'indiquer plusieurs piles de caisses en bois, toutes plus imposantes les unes que les autres. La première question qui viendrait à l'esprit de tout être censée serait de se demander comment des hommes aussi fins sont capables de transporter cet énorme chargement sans se briser le dos. La fatigue de l'ouvrier vient comme une évidence lorsque tu t'approches des caisses, sentant leur poids en tentant d'en pousser une. Après quelques indications, l'homme explique qu'il suffit de suivre le mouvement sur le pont et ce jusqu'à la cale où se trouve déjà une bonne partie des caisses. À vue d'oeil, le travail risque de prendre une bonne partie de la journée, mais un bon effort devrait permettre de finir avant que le soleil ne touche l'horizon.

---------------------

(((Le travail est simple, transporter ces caisses jusque dans la cale jusqu'au coucher du soleil. Je te laisse effectuer le travail comme tu l'entends, en y rajoutant une petite intrigue, un obstacle, une rencontre, ce que tu souhaites. Tu peux réussir, échouer ou les deux, c'est comme tu le sens. La récompense en Yus (et en XP par la même occasion) dépendra donc de ce que tu me proposes. Tu es libre de faire quelque chose de très simple ou de bien détaillé, de court ou de long. Préviens moi par Discord ou MP lorsque c'est posté ou si tu as la moindre question !)))
"Bwaf Assistance, que puis-je faire pour vous ?"

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Nam
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Re: Le Port

Message par Nam » lun. 6 mai 2019 12:34

Lorsque Nam et son acolyte maigrelet se rendirent à l'endroit indiqué sur les docks, le colosse fut surpris : il ne s'attendait pas à un navire d'un pareil tonnage. Il en avait vu pourtant défiler un paquet, ayant toujours vécu à proximité du Port d'Oranan. Le bâtiment, un joli trois-mâts à ne pas s'y méprendre, faisait plus de quarante mètres de la poupe à la proue. Son château se coiffait d'un grand pare-soleil, qui pouvait être bien utile lorsque le soleil dardait ses rayons ardents au beau milieu de l'océan. Il était évident que ce grand brigantin ne devait être la propriété que d'un marchand fortuné. Il jeta un rapide coup d’œil à l'équipage et constata que les marins s'affublaient tous d'une moue aussi épuisée que celle du type venu mander ses services. Il s'appelait Dae-Ho et semblait avoir une solide expérience maritime. Tout en se massant le dos, il pointa un doigt aussi mince que le reste de son anatomie vers une bâtisse un poil délabrée.

- Tu vois c't'entrepôt de stockage, là? Bah, c'est tout simple c'est de là qu'il faut tirer les caisses.

Nam fut une nouvelle fois surpris lorsqu'il découvrit le poids des colis. Même pour quelqu'un de son gabarit ce n'était pas une mince affaire. Son grand-père l'avait maintes fois mis en garde à propos de cela : la taille ne faisait pas la force. Le monde était peuplé d'individus à l'apparence et au physique fort modeste mais détenteurs d'une puissance physique considérable. Rien n'était acquis. Toutefois, il sentait qu'il avait une certaine réputation à défendre : l'homme était venu le chercher lui et pas quelqu'un d'autre. Il fallait mériter l'idée que l'on se faisait de lui. Après tout, il s'était déjà bien échauffé en coursant le bichon et déplacer ces caisses constituerait en soi, un entraînement complet. Lors de son enfance, il avait déjà déchargé maintes fois de pesants fûts de bière pour la taverne de sa famille. Il savait comment porter, en sollicitant un maximum les quadriceps de ses cuisses musculeuses. A vrai dire, et considérant la moyenne des marins autour de lui, il ne se débrouillait pas trop mal. Pour l'instant. Sur le gaillard d'arrière, sous le auvent, un homme au regard sévère dévisagea l'assemblée affairée au transport des caisses.

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- Allez, on ne mollit pas ! Tout retard sera retenu sur vos gages !

Le plus difficile était d'arriver sur le pont et de faire franchir les lourds paquetages au-dessus du bastingage. Nam se retrouva près de Dae-Ho tandis qu'il poussait chacun leur tour en direction des cales. Une fois qu'il fut à bonne distance du pont, il lui murmura :

- Il a pas l'air facile l'type qui vous emploie...

- Un vrai connard. L'équipage est à deux doigts d'la mutinerie. Mais tu gardes ça pour toi évidemment.

- A ce point-là ?

- Absolument. J'aurai pas dû t'raconter ça, après tout on s'connaît pas encore. Promet-moi que tu le répéteras pas, hein?

- Promis. Est-ce que j'peux savoir pourquoi tous les hommes sont à cran contre lui?

Dae-Ho jeta quelques regards en arrière, s'assurant que personne n'écoutait leur conversation.

- Il y a une semaine de cela, on le suspecte d'avoir jeté par-dessus bord un marin sous prétexte que ce dernier sentait trop mauvais. Le type est question venait de se choper une sale infection après s'être éraflé le pied sur la hune.

- Vous êtes sûr qu'il aurait fait une chose pareille ?

- Je ne l'ai pas vu de mes propres yeux commander à ses deux gardes du corps de précipiter le malheureux Dweng dans les flots mais d'autres gars ont entendu des bruits suspects ce soir-là. Mes tripes me disent qu'il est coupable mais je n'ai aucune preuve contre lui, c'est vrai.

- Personne n'a osé élevé la voix ?

- C'est difficile, comprend-moi. La plupart des gars ici ont besoin d'ce boulot, même si ça paye pas bien. Il faut bien mettre quelques Yus dans sa bourse de temps en temps. Vite, remontons ou on va se faire enguirlander...

En rejoignant le pont, Nam jeta un bref regard sur le gaillard d'arrière et vit que le marchand était effectivement encadré par deux solides gros-bras à la mine patibulaire. Mieux valait rester sur ses gardes. Il rejoignait Dae-Ho à l'entrepôt sur les docks et saisit une nouvelle caisse. Le pauvre était rouge et suait à grosses gouttes.

- Laisse-moi celle-ci, si tu veux.

- C'est pas refus, admit Dae-Ho avec un soupçon de honte et de soulagement.

- Qu'est-ce que c'est qu'on trimbale au fait? J'ai pas encore d'mandé...

- De la résine de Shishpuish, un produit médicinal dont la demande explose, notamment à Kendra-Kâr. Paraît que ça s'fume, c'est pratique et c'est moins dégueulasse qu'les potions amères qui donnent la gerbe.

- Et ça soigne quoi, au juste?

- Euh... bah j'sais pas vraiment en fait. J'te répète juste c'que j'ai entendu.

Il ressortirent de l'entrepôt avec deux nouvelles caisses lorsque le marchand les interpella.

- Hey, les deux, là ! Oui le gros et l'autre. Arrêtez de bavassez et bossez un peu ! J'vais quand même pas vous menacez de vous retirer un Yus par mot prononcé quand même !

Nam se demanda combien de temps il lui faudrait pour broyer la tête du marchand entre ses doigts de pied. Il se ravisa, n'ayant aucune envie de finir dans les geôles d'Oranan jusqu'à la fin de ses jours. Ils continuèrent donc à acheminer les caisses jusqu'en fin d'après-midi. C'est alors que dans un grand fracas, Dae-Ho laissa tomber une caisse et s'écroula au sol, terrassé par une vive douleur aux lombaires. Certains marins s'arrêtèrent, dévisageant leur collègue avec une forme de pitié sans étonnement.

- Arrrh ! Mon dos ! Par les dieux, je suis complètement cassé !

Nam déposa sa caisse sur la trajectoire et courut à la rencontre du blessé.

- Courage p'tit gars ! Allonge-toi sur le dos, 'faut qu'il soit sur une surface bien dure !

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Gamemaster2
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Re: Le Port

Message par Gamemaster2 » lun. 6 mai 2019 16:02

Intervention pour Nam Song


><


Il ne fallut pas longtemps pour que l'accident attire l’œil des travailleurs adjacents, tiraillés entre l'envie d'aider et d'en payer le prix ou de faire comme si de rien n'était. Tous choisirent d'ignorer l'événement, certains se mordillant la lèvre de remord et d'autres se permettant quelques coups d’œils curieux pour s'enquérir de l'état de leur collègue. C'est pourtant toi qui t'empresses de venir en aide à ton camarade blessé, laissant ta caisse sur le passage pour le secourir et t'attirant rapidement les foudres de ton employeur.

"Hey ! HEY ! C'EST QUOI, ÇA ?! VOUS ABÎMEZ LA MARCHANDISE ?!"

Le ton indique que la situation ne lui plaît pas du tout. L'homme s'approche, fulminant et inspectant la caisse partiellement détruite et son chargement sans même poser les yeux sur Dae-Ho qui gémit à terre. Visiblement rassuré de son état, il se tourne vers le blessé et daigne enfin demander.

"Ce sera retenu ! RETENU, J'AI DIS ! Relève-toi ou je te vire ! Tu m'écoutes ?..."

Dae-Ho semble incapable de répondre, faiblissant progressivement dans l'inconscience sous la douleur qui lui démange le corps. Les yeux grands ouverts de ton employeur se posent finalement sur toi, conscient qu'il faudra faire sans lui pour continuer le travail.

"Toi, dégage-le du chemin ! Et reprends le travail, tu gênes les autres, en restant au milieu du passage !"

Fulminant, il s'écarte d'un pas rapide sans te laisser répondre, avant de s'arrêter en cours de route. Grattant la barbe qui lui recouvre le menton, il se retourne une nouvelle fois et te propose un marché malhonnête qui ressemble davantage à du chantage, le tout couronné d'un sourire narquois.

"S'il ne reprend pas, il est viré, tu m'entends ? Mais si tu te sens capable d'assurer son travail et le tien, je pourrais lui laisser sa place dans l'équipage. Qu'en dis-tu ?"
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Nam
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Re: Le Port

Message par Nam » lun. 6 mai 2019 22:55

Nam n'était pas quelqu'un de colérique. Toutefois, il imagina ses deux mains frapper de concert les tempes du marchand avec assez de force pour lui faire sauter la cervelle. Mais il n'en fit rien.

- Je vais faire sa part. Laissez-le dans l'équipage et embauchez-moi à bord. Je m'occuperai d'effectuer son travail tandis qu'il se remettra.

- Vous êtes sûr de pouvoir tenir le rythme? Sachez que vous ne serez point majoré dans votre paye !

- Sûr, répondit gravement Nam.

- C'est de pire en pire le personnel ces derniers mois ! Du temps de mon père les marins étaient deux fois plus vigoureux !

Nam ne savait pas exactement dans quoi il s'embarquait. Ses connaissances navales étaient en somme très rudimentaires. Toutefois, il ne pouvait se résoudre à abandonner le pauvre hère dans son état. Il se tourna vers Dae-Ho, qui gémissait encore sous la douleur.

- Essaye de t'allonger et de te reposer. Je vais tâcher de finir ça vite fait.

Il ne reçut qu'en guise de réponse un son qui traduisait la souffrance de son émetteur. Nam se concentra un bref instant, relâchant et contractant ses muscles dorsaux et ceux de ses bras. "Endurance et force du buffle !" se murmura-t-il comme une incantation. Sa volonté s'en trouva renouvelée et il se remit à l'ouvrage de plus belle.

Les marins achevèrent le transport des caisses en début de soirée, Nam suant à grosses gouttes mais honorant sa part du marché. Tandis que l'équipage se reposait, massant leurs bras douloureux, le marchand quitta enfin le pont.

- Il se fait tard, et je meurs de faim. Mangez et reprenez des forces pour demain, vous en aurez besoin. Nous lèverons l'ancre à six heures du matin. Aucun retard ne sera évidemment toléré. Erg, (il se tourna vers l'un de ses gardes du corps) distribuez les gages de la journée avec une retenue d'un tiers sur l'estropié qui m'a brisé une caisse.

- Le chargement n'était même pas abîmé, monsieur, s'insurgea Nam.

- Je ne crois pas t'avoir demandé de l'ouvrir, le gros. Encore une phrase de travers et je reviendrai sur ma décision de t'accepter à notre bord. Il en ira de même pour celui que tu sembles protéger. Bonne soirée.

Le marchand pivota sur ses talons et quitta les docks, probablement pour rejoindre une coquette taverne ou l'un des bordels du port d'Oranan. Les marins se mirent en file indienne pour récupérer leur dû et chacun partit de son côté, avide de se saouler ou simplement s'affaler sur une couche, aussi miteuse fut-elle. Nam s'approcha de son compère qui semblait paralysé sur le bois des docks, un bras tenant fermement une bitte d'amarrage. L'ombre que projetait le géant rivalisait avec celle qu'apportait la nuit naissante.

- Te tracasse pas pour moi, va, dit Dae-Ho dans ce qui ressemblait davantage à un râle. Ça ira.

- Tu sais que non, l'ami. Un mal de dos comme ça, ça se répare pas en une nuit et tu le sais.

- Chut, tais-toi. Je suis au courant. Arrrh... Si je ne monte pas à bord de ce navire, je n'aurai aucune chance de gagner le moindre Yus avant des semaines. J'ai une femme et une fille à nourrir. Je n'ai juste... pas le choix. Aaarrrh.

Il marqua une pause.

- Merci pour ce que tu as fait aujourd'hui. Je ne sais pas encore pourquoi tu l'as fait mais merci.

- Aie-je besoin d'une raison autre que celle d'aider quelqu'un en difficulté?

-Si tu veux aider tous les vauriens dans mon genre, tu mourras sous la tâche bien assez tôt, Nam.

- Pour l'instant, on va se contenter de toi. On va te coucher dans la taverne la plus proche et garder ton dos au chaud. Tu peux marcher ?

- Mal mais oui, j'peux marcher. J'serai incapable d'effectuer la moindre manœuvre nautique demain, j'en suis persuadé. Peut-être que j'ai une chance en d'venant l'apprenti du coq mais il faudra persuader cet enfoiré d'Akino de bien accepter.

- Ça semble être un bon plan. En attendant, allons manger et nous r'poser.

Dae-Ho gémit de plus belle lorsque Nam l'aida à se relever. Ils se dirigèrent ensemble vers un établissement de petite taille, "Le Wok Siffleur". Le géant n'avait aucune envie d'emmener le blessé dans l'auberge de ses parents où son père ne manquerait pas de lui faire tout un tas de remontrances, comme à son habitude.

- Le truc marrant dans tout ça c'est que ça fait deux fois aujourd'hui que j'aide un type amoché.

- C'est vrai ? 'Faudrait t'appeler le héro d'Oranan, en fait ?

- Pas vraiment... le premier type, c'est moi qui l'avait amoché. Enfin... j'avais pas fait exprès.

Après leur départ, quelques cormorans prirent place sur le bastingage du navire piaillant dans l'air nocturne pour inviter leurs congénères à se délecter des restes de poissons oubliés sur les docks. La nuit serait courte.

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TheGentleMad
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Re: Le Port

Message par TheGentleMad » mer. 10 juil. 2019 22:38

-----K-----


Kurgoth marcha des heures durant dans les égouts de la ville, rapidement au début pour s'éloigner de l'endroit où il avait laissé échapper un cri, puis de plus en plus lentement à mesure qu'il réalisait qu'il était totalement perdu. Dans ces galeries, toutes semblables, et ces grilles magiques qui ne bougeaient pas d'un pouce malgré sa force, le garzok n'avait aucun moyen de se repérer. La tâche était d'ailleurs rendue encore plus difficile par le fait que, malgré sa vision nocturne, le barbare était totalement aveugle dans les recoins les plus éloignés des plus de lumière formés par les grilles. La désagréable sensation d'être observés se fit également sentir petit à petit. Lorsque j'en fis part à mon maître, celui-ci me répondit simplement :

(Parfait, ça veut dire qu'on sera bientôt dehors.)

Quand je lui demandai s'il ne devait pas plutôt se méfier, il me fit remarquer avec une perspicacité que je ne lui prêtais pas que s'il s'était agi de gardes, il serait déjà encerclé. Il ne s'agissait donc, selon lui, que d'habitants des égouts qui continueraient de le surveiller à distance aussi longtemps que possible sans jamais s'approcher. Oubliant toute idée de trouver la sortie par lui-même, Kurgoth chercha alors à tendre un piège à ceux qui le suivaient. Dans son errance, il finit par trouver ce qu'il cherchait : un cul-de-sac anguleux assez près d'une grille pour qu'il y vît quelque chose. Utilisant ses larges doigts autant, si ce n'est plus, que ses yeux, kurgoth y repéra quelques blocs sur le point de se détacher du mur. Il se mit alors à frapper la roche de ses poings nus, autant pour détacher les blocs que pour faire un maximum de bruit. Quand les blocs s'écrasèrent au sol, Kurgoth les récupéra pour les projeter contre les murs afin de simuler un éboulement. L’imitation ne fut certainement pas des plus réussies, mais l'écho contre les parois sembla suffisamment déformer les sons, tant d'éboulis que des grands coups de poing, pour intriguer les habitants des lieux et les faire tomber dans le piège du prêtre de Thimoros.

Immobile dans l'ombre, juste derrière un recoin, Kurgoth resta silencieux, tendant ce qui lui restait d'oreilles. De légers bruits de pas se rapprochèrent jusqu'à lui puis, une forme assez frêle apparut devant lui et laissa échapper un hoquet surprise en croisant son regard sanglant. Le garzok bondit alors sur sa victime, sans lui laisser le temps de réagir et l'assomma en s'écrasant avec elle contre la paroi la plus proche. Plusieurs voix infantiles s'exclamèrent de concert juste après l'impact, ce qui fit se froncer les sourcils du barbare. Sentant que l'humaine qu'il tenait entre ses bras avait été accidentellement assommée, et ne pourrait donc lui servir de guide, Kurgoth laissa échapper un long soupir alors que les autres enfants dégainèrent des dagues dont mon maître aperçut les reflets métalliques dans la faible luminosité ambiante. Il tendit alors devant lui l'enfant inconsciente en la tenant par la tête et déclara :

"Rangez ça les merdeux, ou vous ramasserez sa cervelle contre les murs !"

Il y eu un instant d'hésitation dans les égouts, puis quelques reflets métalliques disparurent. Une des silhouettes ne se laissa pas impressionner et répliqua aussitôt :

"Lâche d'abord Yûbi, sale monstre ! Que viens-tu faire ici ?"

Kurgoth esquissa un sourire dans les ténèbres, puis répondit calmement.

"Tu la veux ? Alors viens prendre sa place. Vos vies ne m'intéressent pas, je veux juste sortir de ce labyrinthe."

Un silence se fit, plein d'hésitation avant que l'un des humains ne tente de dissuader son ami d'accepter.

"Fais pas ça Natsu! C'est un piège !"

Il y avait donc parmi eux une tête brûlée capable d'accepter, Kurgoth s'adressa donc directement à lui :

"Natsu, c'est ça ? Ces conduits doivent bien sortir de la ville, conduis-y moi et tes amis pourront la soigner... Yûbi, c'est ça ? Tu ne voudrais pas être responsable de sa mort ?"

À ses derniers mots répondit le son de lames sorties de leurs fourreaux. Le garzok laissa alors son regard passer d'une lame à l'autre en resserrant lentement son étau sur le crâne de la fillette. La réaction ne se fit pas attendre et le jeune humain s'approcha à portée du géant. Une fois sa main bien refermée sur l'enfant, il lâcha l'inconsciente et poussa en avant son guide afin de l'inciter à avancer.

"Traîne pas, au plus vite, je suis dehors, au plus vite, tu retrouves tes copains."

Bien que réticent, le garçon, qui lui rappelait Eden, le mena au travers du dédale jusqu'à une large grille donnant sur le port. Profitant d'un relâchement de la poigne de fer du garzok, qui entreprit aussitôt de regarder comment il pourrait sortir du port derrière les barreaux, l'humain se dégagea d'un habile mouvement puis disparut en courant dans les conduits. Le garzok n'en avait cure, il avait trouvé sa sortie, ou presque. Il lui restait à traverser cette dernière grille puis à sortir du port, lui qui ne savait pas nager et détestait l'eau presque autant que la magie. Sachant qu'il devait être discret, il décida de rester dans l'égout jusqu'à la nuit profitant du temps qui restait pour élaborer un plan en observant l'extérieur.

Dès que l'obscurité s'empara des lieux, le barbare se mit à écarter les barreaux de la grille en usant de toutes ces forces. Si ceux-ci semblaient déjà déformés pour laisser circuler de frêles humains, Kurgoth déploya toute sa force pour élargir le passage afin qu'il puisse y glisser sa large carrure. Ceci fait, il préféra se reposer un instant de son effort colossal avant de continuer. Le chemin le plus simple pour rejoindre une embarcation fut sans doute de se jeter à l'eau, mais le barbare ne sachant pas nager, il dut trouver un autre chemin. Devant éviter d'être vu sur les quais, il opta pour la plus acrobatique des échappées. Prenant dans son sac à dos sa corde pour y faire un nœud coulant, il s'en fit un lasso avec lequel il tenta d'accrocher la barque la plus proche. Après de multiples essais infructueux, durant lesquels il manqua de tomber à l'eau, il se rabattit sur l'un des poteaux du ponton. Une fois le plus lointain possible pris dans le lasso, Kurgoth tira la corde pour la tendre et l'attacha aux barreaux tordus des égouts. Le colosse se suspendit alors à la corde des mains et des jambes, emportant avec lui tout son équipement, et s'aventura au-dessus des flots nocturnes. Bien qu'il n'y eut que dix mètres à traverser, la corde céda au niveau des barreaux lorsque le garzok ne fut qu'à mi-chemin, lequel se retrouva projeté dans les eaux sombres et glacées de la nuit. S’accrochant à sa corde comme à sa vie, il utilisa toute sa force et son endurance exceptionnelles pour hisser jusqu'au ponton, non seulement sa carcasse, mais aussi sa lourde armure.

Le bruit de sa chute sembla avoir attiré l'attention d'un badaud, ce qui interdit au fugitif le luxe de reprendre son souffle. Il ne prit que le temps de récupérer sa corde en desserrant la boucle du nœud coulant avant de s'éloigner aussi vite que possible de l'humain qui venait inspecter les lieux, armé de sa torche. Arrivé rapidement au bout du ponton, il se jeta dans la plus petite embarcation qu'il trouva, dédaignant une plus grande pour être certain de pouvoir manier seul son navire. Kurgoth largua les amarres d'un coup de kitranche puis s'éloigna en prenant appui sur le ponton pour se propulser. Cela fut évidemment insuffisant pour sortir du port, mais au moins, disparaissait-il dans la nuit le temps d'apprendre à manier les rames. N'ayant jamais mis le pied sur un navire, le garzok suivit son instinct et plutôt que d'utiliser les deux rames, il n'en utilisa qu'une, à la manière d'une pagaie. Lentement, en zigzagant et surtout en silence, le fugitif parvint à glisser sur les flots sous les tours gardant le port et longea la jetée vers le Nord. Aussitôt qu'il lui fût possible, Kurgoth accosta sur la plage et se mit à marcher le long de la côte à la recherche d'une cachette où se reposer. Après une bonne heure de marche, exténué, il finit par aller s'étendre sous le premier buisson de bonne taille et s'y endormit bercé par le clapotis des vagues.
1477mots

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Akihito
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Re: Le Port

Message par Akihito » sam. 19 oct. 2019 01:26

Dans le chapitre précédent...

Deuxième Arc : L’art de faire parler la Foudre

Chapitre XXV : De filet en aiguille

Voilà quelques semaines que Akihiko s'était rendu sur ce même port et qu'il avait rencontré le capitaine Hertann, capitaine qui avait faillit l'emmener à l'autre bout du continent. Sa brusque disparition avait autant ennuyé que déçu le jeune homme, pensant voir dans le Sang Pourpre un homme digne de confiance. Il s'était visiblement trompé, mais peu importait maintenant. Il allait trouver un bateau et quitter la ville dès que possible.
Anthelia sur ses talons, l'enchanteur arriva enfin sur la jetée principale où mouillait tous les bateaux. Des militaires, des marchands surtout, de pêche, de tout style et de toute provenance. Ce n'était plus à démontrer, mais cela prouvait néanmoins qu'Oranan restait un port commercial des plus influents. La plupart des navires marchands débarquaient des caisses contenant des objets en tout genre et remontaient en échange de lourds sacs de grains.

"Tu crois que l'un d'entre eux va à Shory ? demanda Anthelia en se mettant à son niveau, observant les embarcations d'un oeil curieux.

- Il y en a un qui part aujourd'hui. La Slive. Je n'ai pas encore parlé avec le capitaine puisque je me suis simplement renseigné, mais d'après les marins à qui j'ai demandé, il acceptera sûrement de nous prendre. C'est un petit marchand, alors toute rentrée d'argent ne peut que lui être profitable.

- La Slive... Très bien, il ressemble à quoi ce bateau ?

- Un deux-mâts, une goélette à la proue ornée d'un lézard et aux voiles vert sombre.

- Une goëlette..? Parce que tu t'y connais en bateau aussi ? questionna la tatoueuse d'un ton surpris.

- Absolument pas. Mais ce sont les informations que m'a donné le fameux marin, alors je te les transmets.

- Misère... Bon, au moins des voiles vertes, ça ne court pas les mers. Allons chercher cette fameuse Slive."

Au bout d'une quinzaine de minutes, Anthelia aperçut un navire correspondant sensiblement à la description qu'on lui avait donné. La proue ressemblait plus à un serpent qu'à un lézard mais il ne s'en préoccupa pas et héla un des marins travaillant sur le pont pour lui demander à voir le capitaine. Ce dernier, un jeune en débardeur blanc trempé et aux boucles brunes, parti le chercher quand Akihiko lui expliqua en criant aussi fort que lui qu'il désirait voyager jusqu'à Shory et qu'il voulait négocier le voyage avec le capitaine. En attendant le maître du bâtiment de commerce, l'enchanteur en profita pour observer d'un peu plus près le bateau. Un bateau d'une trentaine de mètres, dans un bois sombre, possédant deux grands mâts dont les voiles vertes étaient encore enroulées autour des longs troncs de bois. Le nombre de cordages et de nœuds donna rapidement le tournis à Akihiko qui abandonna pour le moment la compréhension de tout ce fatras de câbles de lin. Un navire bien entretenu mais somme toute classique selon ses maigres connaissances. S'ils n'allaient pas être considérés comme des proies de valeur par les pirates, ils n'allaient en revanche pas être des plus menaçants.
Le Kendran qui vint le voir le tira de ses pensées. Un homme à la peau mat brûlée par le soleil, aux cheveux ras et à qui il manquait l'oreille droite. Malgré un visage patibulaire, la voix qui sortit de la poitrine de cet homme bien appareillé avec un long manteau bleu marine à revers était tout ce qu'il y avait de plus normal, à part un fort accent Kendran.

"Mon mousse m'a dit que vous cherchiez un bateau pour Shory. C'bien ça ?

- C'est ça.

- Je fais toutes les villes portuaires de l''ouest et du sud, alors pousser jusqu'à Shory n'est pas un problème. Par contre : mon navire, ma loi. Vous faites ce que je vous dis de faire et tout se passera bien. Normalement, on n'aura pas besoin de vous, sauf pour nous filer un coup de main en cas de gros pépin. Ca sera alors préférable pour notre survie à tous. SI ces termes vous conviennent, cela fera cinquante yus par tête.

- Cela va de soi. Je vous aiderai également à la défense du bateau si besoin est, je suis un combattant plutôt aguerri, acquiesça le mage en tendant une pièce d'argent au capitaine qui l'empocha rapidement.

- Espérons que nous n'ayons pas à le vérifier... Je suis Croane, le capitaine. Bienvenue sur la Slive. Malheureusement, je n'ai pas de cabine pour un couple, alors vous allez devoir dormir avec l'équipage."

Dans une synchronisation parfaite, les deux jeunes gens haussèrent un sourcil.

"On n'est pas en couple.

- Nous ne sommes pas ensemble, renchérit Anthelia au même moment, ce qui fit se regarder les deux qui sourirent de la situation.

- Dans ce cas, c'est parfait. Nous partons dans une demi-heure. Le mousse va vous montrer les différentes pièces, je dois aller faire un peu de paperasse auprès des gardes-côtes."

Le même membre d'équipage qui était aller chercher le capitaine réapparu et les fit monter à bord. Il leur fit une présentation sommaire du navire : le pont avec en dessous de la barre à la poupe, la cabine du capitaine. Vers la proue, une porte menait au dortoir de l'équipage. Passé ces derniers, la cuisine se trouvait au plus proche de la proue pour, selon le mousse, limiter les dégâts en cas de départ de feu. La cuisine disposait d'une trappe permettant d'accéder à la cale qui occupait tout le fond du navire, stockant les provisions de l'équipage et les marchandises en transit.

"Vous faites passer toutes les marchandises par là ?" s'étonna le jeune homme, qui trouvait le procédé des plus compliqué. Le mousse lui répondit sur un ton évident que non, il y avait une trappe plus large au niveau du pont, près du mât principal. C'est par là que tout passait, le cuisinier n'avait sa trappe "personnelle" que pour accéder rapidement à ce dont il avait besoin sans avoir à faire d'incessants aller-retours. Se sentant un peu bête, Akihiko se tut et attendit que le garçon, qui ne devait pas avoir plus de quinze ans, installe un peu à l'écart des autres deux hamacs l'un au-dessus de l'autre. Puis, il partit au pas de course s'afférer au départ. De leur côté, les deux voyageurs déposèrent leurs affaires et commencèrent à se chamailler.

"Je prends le hamac du haut.

- Et puis quoi encore ? Pour mourir si tu me tombes dessus pendant ton sommeil ? Très peu pour moi.

- Je suis plus grand que toi, j'aurais plus de facilité à aller dessus, argumenta Akihiko.

- Ah oui ?"

Avec une agilité certaine, la jeune femme se hissa sans le moindre effort sur le hamac en hauteur, malgré que ce dernier ne soit pas un appui des plus stable.

"Des objections ?

- Aucune. Décidément, avoir le dernier mot avec toi est des plus compliqués, soupira l'enchanteur en se délestant de sa besace pour l'accrocher à un des crochets de bois garnissant la coque du navire, aussi bien pour les hamacs que les effets personnels des marins. D'un regard vers les couches de ces derniers, il vit d'ailleurs que beaucoup préféraient des caisses aux sacs de voyage. Question d'habitude ou vraie technique de marin ? Il ne s'en préoccupa pas et après avoir également déposé son marteau près de ses affaires, il roula des épaules et s'allongea dans le hamac. Le filet de corde était un moyen de repos que Akihiko n'avait jamais expérimenté, mais qui était très agréable une fois habitué au balancement de ce dernier. Levant les yeux, il vit la silhouette d'Anthelia tendre le hamac au-dessus de lui, épousant les courbes de son corps malgré la couverture dont elle avait garnie le fond. Sa tête apparut alors au bord de son hamac, fixant Akihiko.

"Eh, j'ai une surprise pour toi. Regarde dans le sac sous le hamac."

Ce dernier s'exécuta, tirant le sac en jute que la jeune femme avait trimbalé en plus de ses affaires de voyage. En l'ouvrant, une forte odeur s'en échappa, à mi-chemin entre celle du cuir travaillé et celle plus rance d'une tannerie. La majorité du sac était remplie par un grand nombre de morceaux de peaux : si l'incompréhension et l'horreur prirent un moment le jeune homme à la gorge en les prenant pour de la peau humaine, leur teinte rose et une odeur familière lui apprirent qu'il s'agissait en réalité de peaux de porc. Il se demanda pourquoi la jeune femme pouvait bien se balader avec ce genre de chose quand celle-ci, semblant lire dans ses pensées, lui indiqua d'ouvrir le petit sac posé sur le monticule de peaux. Le visage de Akihiko s'éclaira alors : dans le sac en question, une longues tige de fer claire et une multitude de petites fioles contenant des liquides plus ou moins sombres. Portant l'une d'entre elle à son nez, il sentit l'odeur caractéristique de l'encre.

"Toi qui voulait devenir tatoueur, voilà de quoi t'exercer. Les peaux de cochons sont les peaux animales qui se rapprochent le plus de celle de l'humain ou de l'elfe, c'est donc là-dessus que tu vas te faire les dents avant de te lancer sur une vraie peau de personne vivante.

- Ouah, tu comptes vraiment m'enseigner le tatouage ? Merci beaucoup Anthelia !

- T'emballe pas trop mon grand. Si au bout de deux semaines, t'es incapable de faire un tatouage correct sur les peaux de cochons les plus épaisses, j'irai pas plus loin. Le tatouage, comme tout art, est une question de talent et de prédispositions. N'importe qui peut apprendre à tatouer, mais seuls ceux nés pour ça arriveront à faire des tatouages dignes de ce nom. Et j'ai pas envie de perdre mon temps à transmettre mon art pour quelqu'un qui ne se montrera jamais à la hauteur.

- Erh... Tu es un peu dure avec moi, s'étonna Akihiko devant le caractère sans appel de sa déclaration.

- Je ne te méprise pas Akihiko, loin de là, dit Anthelia en sautant souplement de son hamac pour se placer face à lui. Je pense juste que nous sommes tous nés avec des domaines dans lesquels nous excellerons et d'autres où même avec la meilleure volonté du monde, nous n'atteindrons qu'un niveau tout juste correct au mieux. Alors, je préfère arrêter le plus tôt possible si je vois que le tatouage n'est pas fait pour toi. Cela évitera aussi de te faire de faux espoirs.

- Mmmh... Je suppose que tu as raison, je pense un peu la même chose. Bien que je ne sois pas aussi catégorique que toi.

- En art, le talent fait une grosse différence, plus que dans les autres disciplines. Mais assez palabré. Prends une peau bien épaisse, le sac d'encre et allons saluer le reste de l'équipage. Ensuite, je t'apprendrai les bases de l'encrage et du pointage.

- Faisons ça !"

Plongeant la main dans le sac, Akihiko en sorti un morceau de peau de cochon qu'il estima plutôt épais, le sac avec les encres et l'aiguille avant de sortir sur le pont, pour voir que le capitaine Croane était revenu et que son équipage s'activait pour le départ. Les deux voyageurs saluèrent les membres de l'équipage qui passaient à côté d'eux, un équipage plutôt hétéroclite dans les ethnies qui le composait : malgré une majorité de Kendran, on y trouvait un Sinari trapu dans la force de l'âge, un homme à la peau très blanche et aux yeux rouges dont l'ethnie était inconnue au fulguromancien et même deux Earions dont l'âge aurait put se compter en décennies ou en siècles qu'il n'aurait pas pu faire la différence. Tous lui adressèrent un bref hochement de tête, un regard plus intéressé et prolongé à la tatoueuse, avant de poursuivre leurs tâches respectives. Le capitaine les cantonna à la poupe où ils ne gêneraient personne et ensemble, assistèrent au départ depuis leur ville d'Oranan. Les cordes se délièrent, les voiles se déployèrent et dévoilèrent leurs étendues vertes frappées d'une plume argentée, symbole du marchand sans aucun doute. C'est donc avec un regard excité et un pincement au cœur que le jeune homme vit les remparts de sa ville s'éloigner progressivement alors que le bateau, lui, prenait de plus en plus de vitesse. Le roulis des vagues s'intensifia aussi : quittant les eaux calmes d'Oranan, la haute mer envoya des vagues bien plus fortes se fracasser sans le moindre mal contre la coque du bateau. Lorsque les hautes murailles de la cité disparurent dans le lointain de l'horizon, Akihiko se tourna vers la jeune femme et sourit en brandissant aiguille et peau.

"Bon, on commence ?"


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Akihito
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Re: Le Port

Message par Akihito » mar. 18 août 2020 17:34

Dans le chapitre précédent...
Interarc : Apprendre des meilleurs.

Chapitre XIII.1 : Ombre du passé.

L’air salé du port d’Oranan avait une odeur particulière pour Akihito. La ville natale d’une personne était toujours à bien des égards unique pour cette dernière, et ce qui cristallisait le plus ce sentiment pour le jeune homme, c’était l’air marin. Maintenant qu’il avait visité plusieurs grands ports, celui d’Oranan lui semblait plus chargé en senteurs marines fortes et épicées. Il ne pouvait l’expliquer, c’était simplement une intuition, une idée qui n’avait pas besoin que l’on pose des mots dessus. Certaines choses se faisaient naturellement. Comme la crainte et la peur qui étreignaient Akihito alors que le bateau marchand qui les avait embarqués accostait sur l’un des quais Oranais.

La tatoueuse à ses côtés l’observait avec un air inquiet, le même depuis une bonne heure environ. N’en pouvant apparemment plus, elle finit par vider son sac.

« Akihito, dis moi ce qui ne va pas. Tu es nerveux ?

- Mmh ? Oh, désolé. J’avais pas vu que tu étais là.

- Oui donc c’est bien ça, t'es nerveux.

- Non… Enfin c’est étrange. J’ai un sentiment de malaise qui m’envahit. Comme si quelque chose de terrible se passait mais que je n’étais pas là.

- Malheureusement, intervint Frans en les rejoignant, il se passe toujours des choses tragiques hors de notre portée dans notre bas monde. On n’y peut rien, c’est tout. »

Akihito acquiesça, mais ça n’effaça pas son malaise, bien au contraire. Comme le disait Frans, il n’était pas maître de ce qui pouvait bien se passer aux quatre coins de Yuimen. Mais c’était bien la première fois qu’un tel sentiment l’étreignait.

Pourtant, le voyage s’était bien déroulé : une mer calme, un départ rapide, et des journées rythmées par les différents exercices auprès de ses professeurs. Alors qu’Anthelia l’avait initié à son premier tatouage sur un des marins du bateau, un Varrockien soucieux de se faire tatouer une représentation de Moura sur l’épaule pour lui porter chance, Frans avait continuer à l’entraîner sur une volée de plusieurs exercices visant à améliorer sa maîtrise des fluides qui étaient encore lacunaire selon lui. Il avait même commencé à lui apprendre deux sorts, la Vague énergétique qu’il trouvait très à propos sur un bateau, ainsi que l’Isolement, qui s’inscrivait dans son désir de pouvoir arrêter quelqu’un en évitant de le blesser un maximum. Avec une bonne grosse dose de dissuasion, il est vrai, mais une application de la magie qui pouvait se terminer sans que personne ne soit blessé.

Il mit finalement le pied-à-terre, espérant que la terre ferme de sa ville le calme de cette tension qui le mangeait littéralement. Il n’en fut rien, au grand damn d’Akihito. Même Amy se mêla de cette affaire.

(Bon sang Aki, qu’est-ce que tu as ? Ça ne te ressemble pas.)

(Je ne sais pas. C’est plutôt à toi de me le dire non ? Tu viens du futur en partie.)

(Je t’ai déjà dit que c’était plus compliqué que tu voulais bien le croire. Je n’ai pas visité les innombrables futurs que chacune des actions que mes porteurs entreprennent créés. Je n’ai tout simplement pas le temps et aussi exceptionnelle que soit ma mémoire, je ne peux pas me souvenir de tout.)

(Vraiment ? Vraiment rien sur un retour à Oranan avec Theli ?) insista le jeune homme pour s’opposer au refus navré de la petite entité dans sa tête. Rien n’apparaissait dans ses souvenirs. Le sentiment se faisant plus pressent, il eut un geste qu’il n’aurait jamais cru possible.

« Theli, Frans, pourquoi ne pas faire un tour de la ville ? Je passe chez moi et je vous rejoins. »

Éloigner ses compagnons.

« Hein ? Pourquoi maintenant ? On a tout le t-

- Voilà une bonne idée, coupa Frans en jetant un regard appuyé à Akihito. Oranan est une des rares villes que je n’ai pas eu le temps de visiter avec un local, ça sera forcément instructif. Et Akihito doit avoir quelques affaires à régler avant de nous recevoir.

- S-Si vous le dîtes… »

La tatoueuse blonde se laissa rapidement entraînée par le vieil homme qui avait semble-t-il compris le besoin d’Akihito, qui lui était bien incapable d’expliquer sa présence. Il salua les deux compères, leur promettant de vite les revoir et parti en courant s’enfoncer dans les rues de la cité. Sans s’en rendre compte, il emprunta le pouvoir de ses bottes pour traverser les rues le plus rapidement possible. Vers cette étrange volute de fumée qui montait du quartier où Akihito avait grandi.



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Nhaundar
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Re: Le Port

Message par Nhaundar » lun. 2 nov. 2020 15:13

Arrêt aux écuries.

Je donne la somme à la femme et prends quelques instants pour caresser mes montures avant de les voir trottiner au loin et de partir à mon tour. Mes préparatifs sont terminés ! Bon il est vrai que je ne souhaitais en réalité prendre le temps de cette petite expérience, mais ce déferlement de magie était si incroyable que je ne regrette rien ! Me voici au port d’Oranan, où je vais participer à l’escorte d’un bateau marchand jusqu’à Tulorim. J’ai la chance que certains membres de l’équipage aient entendu parler de moi et du sacrifice que j’ai réalisé pour sauver un enfant il y a quelques temps, durant un convoi entre Oranan et Bouhen.

"C’est donc ici qu’on se sépare !" Fais-je en regardant la semi-elfe alors que l’équipage termine de charger le navire.

C’est un sentiment étrange pour moi. Je crois que nous ne nous sommes jamais vraiment quittés de la sorte. Je suis mitigé entre l’excitation de cette aventure et la tristesse de me séparer de cette femme, à qui je dois beaucoup.

"Cesse de faire cette tête ! Dès que mes supérieurs n’ont plus besoin de moi, je viendrais m’assurer que tu ne causes pas de grabuge." Déclare-t-elle avec un sourire narquois.

"Moi ? Du grabuge ? Je suis un exemple même d’intégration ! C’est juste que…j’attire les ennuis voilà tout !" Dis-je en répliquant.

Nous rions brièvement, mais l’humeur n’y est clairement pas.

"Méfie-toi !" Déclare Sylve, brisant ainsi le silence qui s’installait. "Tulorim n’est pas…une cité que l’on peut décrire comme bienveillante !"

Je soutiens son regard, mais je vois de la crainte dans ses yeux.

"Je ferais attention !" Les matelots ayant terminé le chargement, l’appel pour le départ est lancé. Je suis obligé de monter rapidement à bord, sans quoi le navire partira sans moi. Sur le pont, j’appelle la semi-elfe. "Comment tu comptes me retrouver une fois là-bas ?"

"Il suffit de suivre les bâtiments en feu !" Me lance-t-elle toujours sur le quai, évoquant une récente tentative de magie avec mes fluides infernaux.

"Pour la énième fois c’était un accident ! La propagation des flammes n’aurait pas dû être aussi importante !" Fais-je en tentant vainement de trouver une vague explication à mon échec.

Le navire s’éloigne lentement et nous nous saluons de la main. Je reste à la poupe du navire longtemps, jusqu’à ce que je ne discerne plus le port et son activité. Je m’installe dans un coin et prends mon orbe magique. La brume présente, tournoi avant de changer de couleur pour un violet terne, en réponse à ma tristesse. Pour chasser ces mauvaises pensées de mon esprit, je reprends ma boule à neige et me perds dans mes doux souvenirs.

Tolurim et ses charmes.

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Yliria
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Re: Le Port

Message par Yliria » mer. 6 janv. 2021 23:20

<< Précédemment
L'écrin d'Ynorie

Comme si le destin lui-même avait décidé de m'envoyer un petit clin d’œil, la signification de la rune m'apparut en même temps que l'astre qu'elle désignait grimpait dans le ciel, face à mon regard. Cela me tira un sourire et j'observai un instant la rune, posée dans la paume de ma main, les reflets du soleil scintillant doucement dessus. Je la rangeai délicatement dans ma besace avec les autres, me demandant si ce n'était qu'une simple et heureuse coïncidence. Alyah soupira, blasée, affirmant que oui, mais je ne pouvais m'empêcher d'imaginer d'autres raison pour trouver cette rune-ci plutôt qu'une autre. Je me décidai finalement à descendre, prête pour une nouvelle journée au dessus de la mer.

Ces quelques jours sur le navire se déroulèrent plus ou moins de la même façon. Entraînement le matin, quelques passes avec Cherock, plus amicales et calmes que le premier duel et une bonne partie de chaque journée à ne rien faire d'autre que flâner sur le bateau, donnant parfois un coup de main dans la voilure où j'étais à l'aise. Je passais chaque jour un moment à interagir avec Ssussun, expérimentant peu à peu, à l'écart et de nuit, ce que je pouvais faire grâce à lui, voulant éviter d'inquiéter l'équipage probablement peu familier avec une créature faite de fluide. Il répondait sans mal à mes sollicitations, mais ne communiquait pas, se contentait d'obéir tout en m'émerveillant par ce dont il était capable. Un être fait de fluide comme lui avait sans doute une affinité magique incroyable, mais cela allait bien au-delà de ce que j'imaginais et je ne savais pas si j'allais un jour être capable d'appréhender tout ce qu'il pouvait réellement faire.

Puis, par un après-midi au ciel couvert, le port de la fameuse Oranan fut finalement en vue. La vigie prévint les marins et la capitaine prépara les manœuvres d'entrée et j'en profitai pour grimper sur la vergue du grand-mât pour apercevoir la cité. Passée la surprise de voir deux immenses tours garder l'entrée du port, ce furent des toits pointues et aux angles étrangement redressés qui attirèrent mon regard. Les bâtiment étaient hauts, le port immense et en pleine activité, d'immense vaisseaux amarrés aux quais ou, plus loin, en pleine construction. Tulorim souffrait largement la comparaison avec ce ville, qui semblait plus vaste et surtout plus organisée et construite de façon bien plus ordonnée.

Ce que j'aperçus aussi, et ça c'était immanquable, c'était l'immense champ de tentes et d'abris désorganisés semblant faire le tour de la cité. Je me demandais si l'armée ynorienne stationnait souvent devant la cité d'ordinaire, mais une fois entrée dans le port, je perdis le tout de vue sans avoir de réponse. Les hautes tours que nous passâmes sans encombre étaient pleines de gardes vigilants et je pus apercevoir de nombreux soldats sur les quais et certains vaisseaux. Je déglutis, soudainement légèrement mal à l'aise à l'idée de débarquer dans une cité militaire semblable à Nessima. une fois de plus je n'allais pas être accueillies à bras ouverts, mais la présence d'autant de soldats me faisaient angoisser plus que d'ordinaire.

(Cherock t'as dit que tout irait bien si tu restes avec lui.)

(Je sais... j'ai l'impression de revivre la même chose qu'à Nessima...)

(C'est sûr que ça y ressemble. Tout ira bien, calme-toi et profite de la visite.)

Je hochai la tête et descendis les cordages tandis que le bateau commençait les manœuvres d'approche alors que des soldats, probablement venus vérifier l'identité du navire, se plaçaient sur le quai. J'allais rapidement à ma cabine et m'équipai intégralement, glissant mon masque sur mon visage avant de remonter. Cherock semblait étrangement tendu alors qu'il rentrait finalement chez lui. Que ce soit lui, sa mère ou les marins, tous semblaient bien plus sur leurs gardes qu'avant et je ne comprenais pas vraiment ce qui pouvait provoquer cela chez eux. Je me contentai de rester derrière lui et d'observer la ville alors que nous entrions dans le port. Outre les bâtiments à l'aspect étonnant, les gens portaient des tenues différentes de tout ce que j'avais pu voir. Que ce fussent les chapeaux étranges ou les vêtements que je pouvais apercevoir sur certains, rien ne semblait pareil ici. Le dépaysement était encore plus flagrant qu'à Kers où les gens avaient tout de même des habits similaires à ceux que j'avais l'habitude d'observer ailleurs. J'inspirai alors qu'on approchait du quai et me plaçait non loin de Cherock. Juste au cas où.

Ce dernier m'informa calmement, mais avec toujours cette tension dans la voix, que mon masque serait plus un problème qu'autre chose. Faire bonne impression, selon lui, était l'essentiel au vu de la situation avec Oaxaca et mieux valait être à visage découvert pour l'arrivée au port. L'idée ne me plaisait pas du tout et ce n'étaient pas les mots d'Anthelia, qui se voulait rassurante, qui allaient m'aider. Que Cherock soit connu ou non, je ne voyais pas en quoi cela allait empêcher quiconque de dégainer une lame en me prenant pour un agent de la Déesse Sombre. Je soupirai en sentant mon cœur accélérer et jurai dans un murmure avant de glisser mon masque sur le côté de mon visage plutôt que devant, laissant un regard sombre à Cherock tandis que la passerelle était positionnée sur le quai.

- Je te laisse leur parler, parce que quoi que je dise, je doute qu'ils en écoutent un seul mot.

Et cela ne loupa pas. A peine le premier soldat mit le pied sur le navire que j'étais déjà repérée et une main se posa sur la poignée d'un sabre. Je retins de justesse ma main de faire de même et me bornai à garder un visage aussi neutre que possible, laissant à Cherock le soin d'expliquer et justifier ma présence. Plus que ma bonne foi, il joua sur son statut lié à la Kizoku Rana, parla d'un dragon d'or shaakt, ce qui n'avait pas de sens pour moi et, après quelques pourparlers et un salut, il parvint à m'obtenir un sauf-conduit... en quelque sorte. Les autorités militaires allaient être au courant de ma présence et le moindre problème se reporterait sur Cherock, mais je pouvais entrer en ville sans crainte pour le moment. Le chef du groupe de soldat alla ensuite s'entretenir un instant avec la capitaine, nous laissant débarquer sans encombre. Les regards que me jetèrent les gardes n'avaient rien d'amicaux et je soupirai en serrant les poings, détestant un peu plus mes origines si cela était possible.

- Voilà. Maintenant que ta présence est officielle, libre à toi de mettre ou non ton masque, mais comme je t'ai dis il faudra me passer dessus avant qu'on te pose le moindre problème.

Je fixai Cherock une demi-seconde avant de remettre mon masque devant mon visage, sans même hésiter. Ce n'était pas parce qu'un soldat estimait que sa parole avait de la valeur que tous les citoyens allaient penser la même chose et j'avais mon eu mon compte de haine ces derniers temps, je voulais juste qu'on m'oublie. Je hochai la tête après avoir repris une respiration plus calme, me rendant compte que j'avais quelque peu retenu mon souffle pendant une partie de l'échange.

- Cela a été... plus simple que je ne l'imaginais, mais je préfère rester prudente.

Peut-être qu'un jour je pourrais me balader partout sans risquer des regards de haine ou des insultes, mais pour l'heure, je me contentai de ce que j'avais.

- Ou est-ce qu'on va maintenant ?

Je tentai de faire abstraction de l'expression déçue de Cherock alors qu'il fixait un instant mon visage. J'aurai pu lui expliquer, essayer de lui faire comprendre à quel point c'était pesant, de supporter ces regards quand je n'avais rien fait d'autre qu'exister pour les mériter. Je m'abstins, néanmoins, en voyant son expression changer lorsqu'il expliqua devoir passer chez lui. Il commença à parler d'une auberge pour déposer nos affaires, mais Anthelia ne l'entendit pas de cette oreille et proposa de nous loger chez elle. Je ne voulais pas être un fardeau de plus.

- Je peux aller à l'aub...

- C'est hors de question, tu viens avec nous, inutile de discuter !

Ce fut tout juste si elle ne m'empoigna pas par les épaules pour me forcer à prendre le même chemin qu'elle et je jetais un regard un peu surpris à Cherock, ne m'attendant pas à une réaction de ce genre de la part de la jeune femme avec qui j'avais eu peu de contacts jusqu'à présent. Je finis par leur emboîter le pas, à la fois soulagée et légèrement inquiète concernant les moyens qu'elle serait prête à mettre en œuvre pour me forcer à la suivre. Elle avait tout de même lancé une boule de feu à Cherock à peine l'avait-elle retrouvé...

Tout en avançant, j'observai avec une certaine curiosité la ville. Les rues étaient larges, pavées et bien plus propres que je ne l'imaginais. La majorité des habitants semblait être des ynoriens, mais je perçus quelques elfes et thorkins au milieu des passants, bien qu'ils fussent peu nombreux. Partout où je portais les yeux, je voyais des visages fermés et soucieux. Ce n'était vraiment pas ce à quoi je m'attendais en écoutant Cherock parler de sa ville natale. Quelque chose clochait, ou alors j'étais simplement trop paranoïaque et je voyais le mal partout.. Elena étant en train de discuter avec Anthelia, je tapotai le bras de Cherock pour me faire remarquer, une question me brûlant les lèvres depuis que j'avais vu les premiers bâtiments.

- Tu saurais m'indiquer où se trouve le temple de Gaïa si on peut l'apercevoir pendant le trajet jusqu'à chez Anthelia ? Elle est toujours comme ça d'ailleurs ? Je suis pas à l'épreuve du feu moi...

- Mmmh... On ne va pas passer devant, mais tu n'auras aucun mal à le trouver. Il est au beau milieu de la ville, en face du Conseil d'Ynorie. Un grand temple blanc. Et pour Theli... elle a un sacré caractère, mais c'est sa façon de s'inquiéter pour toi. Je crois bien qu'elle t'apprécie, mais elle réserve des boules de feu exclusivement pour moi. Même si je ne sais pas si c'est un compliment...

Je ne pus retenir un léger gloussement à ses derniers mots et remerciai mon masque de masquer mes joues rouges et la gêne qui y était inscrite. La maison d'Anthelia, située dans le quartier Ouest, finit par apparaître. Elle ressemblait en tout point à ses voisines et, en entrant, je sentis comme une atmosphère plus apaisante. Alors que j'observai les lieux décorés de tentures de couleurs comme le pourpre ou le turquoise, je vis Cherock déposer ses affaires et discuter avec sa mère, un air grave inscrit sur le visage. Je me figeai en entendant qu'il allait aller chez lui avec sa mère. Je l'observai alors qu'Anthelia, malgré l'envie évidente de le soutenir, décidai finalement de les laisser entre eux. En silence, ils s'avancèrent vers la porte et, déposant mon sac près d'un mur, je les suivis. Cherock ouvrit la porte et son regard surpris, tout comme celui de sa mère, tomba sur moi alors que je sortais en le dépassant. Je répondis à sa question avant même qu'il ne la pose.

- Je viens. Je ne vous dérangerai pas, Elena et toi, j'ai juste... besoin d'y aller. S'il te plaît...

J'avais des choses à me faire pardonner. Alors peut-être que cela pouvait sembler stupide ou étrange, mais j'avais besoin de ça. Sans doute que Cherock n'allait pas comprendre, mais je ne me voyais pas faire autrement.

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Akihito
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Re: Le Port

Message par Akihito » sam. 9 janv. 2021 18:49

Dans le chapitre précédent...

Troisième Arc : Encre de feu, Ancre de sang.

Chapitre XIX.1 : Un deuil à finir.

La suite du voyage se déroula sans accroc. Akihito s'était attendu à ce qu'une tempête, ou qu'une attaque d'une quelconque créature marine ne vienne perturber la traversée, car de ce qu'il avait appris d'Yliria, elle attirait autant les ennuis que lui si ce n'était plus. Mais il n'alla pas se plaindre et profita de ce repos bienvenu pour se reposer, reprendre ses forces, se faire pardonner auprès d'Anthelia et tout un tas d'autres choses. Parmi elles, les quelques passes d'armes qu'il effectuait tous les matins en compagnie de la semi-Shaakte le remirent en jambes : voilà des mois qu'il ne s'était pas réellement entrainer avec une arme, et il voyait déjà ses progrès. Même s'il se doutait bien que sa partenaire le ménageait lors de leurs affrontements. Quand enfin il put apercevoir de nouveau les deux tours ouvrant le port d'Oranan, il se sentit de nouveau chez lui. Et il espérait qu'il n'aurait pas à la quitter aussi précipitamment que la dernière fois qu'il avait apprécié les embruns oranais. Akihito avait déjà préparé ses affaires et il croisa Yliria qui justement allait faire les siennes en remontant sur le pont. Il rejoignit le capitaine, qui vérifiait que tout allait bien se passer. Mais à mesure qu'ils approchaient, des détails troublants firent tiquer le jeune homme : les archers postés étaient bien plus nombreux, de même que les navires de de combat. Oranan semblait sur le point de partir en guerre... Ou de l'accueillir. Et avec la pression grandissante des forces d'Omyre, c'était tout sauf des bonnes nouvelles. Mais il se garda de faire des jugements hâtifs, et alla retrouver le capitaine.

« Merci encore Capitaine, de m'avoir fait cette faveur.

- Je vous en prie. On peut considérer que nous sommes quittes.

- Et Fred ? Vous pensez qu'il fera l'affaire sur votre navire ?

- Mmmh... C'est un brave gars, et il bosse bien. Aussi longtemps qu'il voudra rester sur la Slive, il recevra un salaire correct. Il faudra quand même que vous me disiez où vous avez trouvé un marin pareil, rajouta le capitaine en jetant un regard en coin à l'enchanteur.

- C'est assez compliqué... Je laisserai Fred vous expliquer s'il le souhaite.

- Bah, on n’y peut rien. WOH MOUSSAILLON ! QU'EST-CE QUE TU FICHES AVEC CE NOEUD ? REFAIS MOI CA PROPREMENT TOUT DE SUITE ! »

S’amusant du retour des vociférations du capitaine qui ne l'avaient quitté que l'espace d'un instant, il se tourna vers sa mère, non loin de lui. Il pouvait voir son état s'améliorer de jour en jour, et si la mélancolie voilait encore ses yeux, le léger sourire sur ses lèvres qui flottait en permanence était un bon indicateur qu'elle allait mieux, progressivement. Sur le quai, des miliciens Oranais attendaient impatiemment que le bateau ait fini sa manœuvre, et il sentit une présence derrière lui. Yliria venait de se glisser dans son dos, et semblait un peu tendue. Les soldats ne devaient pas lui inspirer confiance, et il pouvait l'imaginer sans problème. Et alors que la rampe était progressivement mise en place, Akihito se tourna vers elle.

« Désolé Yliria, mais tu vas devoir retirer ton masque, du moins pour ton arrivée au port. Je sais que ça ne te plait pas, mais mieux vaut faire une première impression à visage découvert, les tensions avec Oaxaca sont grandes en ce moment. »

Anthelia les rejoignit sur ces mots, posant une main rassurante sur l'épaule de la jeune fille.

« Akihito et moi, on sera là pour garantir ta sécurité et ta présence dans la ville. Enfin surtout Monsieur le Héros. Il paye pas de mine comme ça, mais c'est une vraie personnalité ici.

- Je te laisse leur parler, parce que quoi que je dise, je doute qu'ils écoutent un seul mot. »

Yliria lui jeta un regard noir, clairement peu enjouée de devoir dévoiler son visage. Mais elle obtempéra en jurant. Akihito descendit de la passerelle et immédiatement, les miliciens se tendirent et l'un d'eux mit même la main à la garde de son épée. L'enchanteur leva la main en signe d'apaisement, tout en observant les miliciens. Armures complètes, troupe plus nombreuse que d'habitude... Quelque chose se trâmait.

« J'espère que vous avez une raison d'amener une Shaakte dans notre cité.

- Jusqu'à preuve du contraire, ils sont autorisés à circuler dans la ville, non ?

- On n’a jamais accepté de Shaakts, et encore plus maintenant, depuis la débâcle de la forêt d'Ynorie, répliqua d'un ton acerbe le même milicien.

- Pourtant, je crois bien que le Dragon d'Ynorie est un shaakt en plus d'un milicien.

- C'est vrai mais... La milice l'a reconnu. Le Dragon est des nôtres.

- Et ma parole n'a pas de poids ? »

D'un geste, Akihito dévoila la Kizoku à sa ceinture et retira son gant, dévoilant la Kizoku Hana marquée au dos de sa main. Il n'aimait pas vraiment se servir de sa notoriété ainsi, mais il savait que c'était nécessaire. Et en bons Ynoriens, les miliciens reconnurent rapidement le symbole, l'arme et donc l'identité d’Akihito.

« Cette semi-shaakte, dit le jeune homme en accentuant le "semi", m'a sauvé la vie, et est digne de confiance. Je me porte garant de sa présence dans notre ville, et assumerais tout ce qui pourrait lui être reproché bien que je sois certain que ce ne soit pas nécessaire. »

Il défia du regard les miliciens, qui se regardèrent les uns les autres, pas vraiment sûrs de ce qu'ils devaient faire. Akihito décida d'enfoncer le clou pour achever de les convaincre.

« Surtout en ces temps troublés, je n'oserais pas mettre en danger Oranan. Vous ne faites que votre travail : mais je peux vous assurer qu'elle ne causera aucun trouble. Je le jure sur la Kizoku Rana.

- Eh bien... Je pense qu'on peut la laisser entrer dans la ville..?

- Si c'est le Porteur, ça devrait être bon... »

Deux des gardes échangeront entre eux, avant que celui qui portait les épaulettes de sergent ne prenne la parole.

« Très bien, nous la laissons entrer. Mais je devrai avertir mes supérieurs de sa présence. Et de votre... Tutellage.

- Ça va de soit. Merci de votre compréhension et de votre travail. »

Akihito et le sergent se saluèrent à l'Ynorienne en s'inclinant l'un en face de l'autre, puis le militaire s'entretint avec le capitaine Croane. Akihito, Anthelia, Hitomi, Frans et Yliria mirent eux pied à terre, et l'enchanteur s'adressa à sa comparse.

« Voilà. Maintenant que ta présence est officielle, libre à toi de mettre ou non ton masque, mais comme je t'ai dit il faudra me passer dessus avant qu'on te pose le moindre problème. »

Yliria ne dit rien pour commencer, remettant instantanément son masque. Akihito eu une moue déçue, mais il ne pouvait pas lui en vouloir. Néanmoins, elle reconnut que cela c'était mieux passé que prévu, et lui demanda ce qu'ils allaient faire maintenant. Les yeux bicolores d’Akihito s'assombrirent, car une tâche peu joyeuse se profilait.

« Je... Dois retourner chez... Moi. Mais on va d'abord déposer nos affaires. L'auberge des hommes libres est un établissement qui acceptera sans... »

Sa phrase fut interrompue par une légère tape à l'arrière du crâne. Anthelia le couvait d'un regard mi-réprobateur, mi-bienveillant.

« On va aller chez moi, il y a largement la place pour nous tous, et plus confortable pour Yliria.

- ... Merci Theli. »


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Kiyoheiki
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Re: Le Port

Message par Kiyoheiki » mar. 12 janv. 2021 23:12

~Auparavant~

~5~

L'heure du rendez-vous approche à grands pas tandis que je regarde les mouvements effectués dans le port. La seule voie encore ouverte vers l'extérieur, la dernière arrivée d'air que l'armada d'Omyre compte écraser pour suffoquer la cité. La tension est palpable dans l'air, mais tous les visages que j'ai aperçu jusque-là sont surtout déterminés. Après quelques minutes, je stoppe mon avancée devant un quai. Le navire marchand à bord duquel je dois embarquer est là, son équipage en plein acheminement de caisses et denrées diverses. Voiles encore abaissées, cordages tendus jouant sur le pont jusqu'à ce que l'un d'entre eux émette un claquement, tirant heureusement un simple juron de la part d'un marin.

Une brève collision contre mon omoplate suivie d'un souffle puissant contre ma nuque me tirent de ma contemplation. J'ai à peine le temps de pivoter que Ganko, mon percheron gris pommelé colle de nouveau ses naseaux contre moi avec brutalité. Il semble avoir repris un semblant de calme naturel après ces quelques heures, ce qui me rassure. Quand je suis allé le quérir auprès des montures ramenées d'urgence dans la ville, mon gigantesque étalon était en proie à une dangereuse colère. Il m'a fallu user de magie pour le calmer avant qu'il ne blesse quelqu'un. Le jeune palefrenier m'a expliqué que plusieurs autres chevaux que Ganko considère comme sa harde ont été emmenés par leurs cavaliers respectifs, y compris de doux Rei, hongre de Hidate. Mon étalon étant entier et particulièrement possessif n'a pas du tout apprécié ni d'être parqué dans un recoin de la ville, ni d'être séparé de ses semblables. Je frotte le large front de l'équidé jusqu'à ce que ce dernier en ait assez et redresse la tête, observant de haut tous les passants. Ces derniers savent ne pas se déplacer derrière les puissants sabots de l'animal, ce qui crée un peu d'espace autour de nous.

Un souffle dédaigneux attire mon attention sur les cinq personnes à proximité. Quand elle a su que tous les miliciens de mon foyer étaient ou allaient être mobilisés, la Vénérable voisine qui ne m'a jamais accepté s'est empressée de se manifester. Il était hors de question pour elle de laisser deux enfants en bas âge et une gamine pas encore formée sous la garde d'une seule personne. Je trouve quelque peu amusant que si elle me traite toujours avec dédain, elle ne semble pas reprocher quoi que ce soit à ma Pâle épouse. Quand elle remarque mon attention sur elle, la Vénérable laisse ses traits se durcir puis elle place les mains dans ses longues manches, en posture fermée. Elle pourrait paraitre d'une grande sévérité, si les bambins jumeaux Kiyomi et Genjimasa n'étaient pas chacun rivé d'une main potelée à sa tenue. Non loin d'eux, ma jeune pupille Tohru observe les mouvements sur le port, les yeux brillants. Si elle évite mon regard, jouant distraitement avec mon heaume qu'elle a insisté pour tenir un moment, ce n'est pas le cas de la dernière mais ô combien importante personne de ce petit groupe.

Talia D'Omble D'Esh Elvohk m'observe de ses yeux vert olive, rendus luisants par la position du soleil. La tunique sombre rehaussée de liserés argentés offerte par Ayame l'enserre à la perfection, sa collerette naturelle de plumes se posant au col avec naturel. J'ai encore en tête la conversation à voix basse que nous avons eu dans notre chambre, de ma culpabilité de l'avoir amené avec moi en plein cœur d'une autre guerre. Je voulais lui montrer les trésors de ma Patrie, mais la froide réalité s'est imposée. La sensation de ses serres sombres contre mes lèvres pour me maintenir muet pendant qu'elle murmurait des paroles courageuses et rassurantes persiste encore. Il m'a été par contre bien plus difficile de lui arracher l'ombre d'une promesse, à tenir impérativement si la cité devait tomber.

Je prends délicatement ses mains écailleuses et les élève lentement, esquissant un sourire de voir l'anneau d'argent de Mère à son doigt. Je le lisse du pouce, puis fais de même contre ses écailles. Je les amène délicatement à mon visage, y apposant un respectueux baiser. Ma digne et magnifique Talia frissonne légèrement, comme à chaque fois que j'effectue ce geste, avant de laisser échapper un doux soupir. Ses serres entourent mes poignets en un mouvement qui pourrait apparaître dangereux, mais qui a pour seul but de me rendre la pareille. Son regard se dirige vers les navires et son expression se fait plus tendue. Je la vois déglutir et inspirer profondément avant de reporter son attention sur moi. Ses lèvres rosées s'entrouvrent pour laisser filer sa noble voix.

"Kiyoheiki. Plus tôt, tu m'as fait promettre quelque chose. À ton tour, donne-moi ta parole."

Elle prend un instant, s'apprêtant à parler puis marquant une pause comme si elle cherchait ses mots. Elle finit par fermer les yeux. Lorsqu'elle les rouvre, elle semble résolue.

"Promets-moi de me revenir en vie."

Ma gorge se serre à sa demande. Ce ne sont pas des paroles rassurantes qu'elle veut, mais une certitude. La guerre dans toute sa noirceur est à nos portes, et elle me sait homme d'honneur. Puis-je lui faire une telle promesse quand j'ai conscience que tant d'autres ne reverront jamais leurs foyers ? Donner ainsi ma parole ne risque-t-il pas d'influencer mon attitude pour être en mesure de la tenir ? Je ferme les yeux à mon tour, bien trop conscient des cinq années qu'elle a eu à m'attendre en Aliaénon, de ses tourments à la pensée que je l'avais abandonnée. Au fond de moi, je veux faire cette promesse. Mais lui garantir que je préserverai ma vie en toutes circonstances va à l'encontre de mes principes. Je ne suis pas un couard. Mon sang ynorien ne supporterait pas que je laisse les autres sans appui.

Changeant légèrement la formulation, j'acquiesce.

"Je suis encore loin d'avoir rendu justice à tes sentiments comme il se doit, ma tendre épouse. Quoi qu'il advienne, je reviendrai à tes côtés. Je t'en fais le serment, Talia."

Elle pince légèrement les lèvres et me rend mon signe de tête avant de faire glisser ses serres le long de mes bras, en une caresse précédant une étreinte. Je la lui rends, une sourde inquiétude pulsant comme une créature affamée tapie dans l'ombre. Mais elle ne m'est pas étrangère, alors je l'ignore et profite de ce contact.
Ce n'est que quand Ganko me donne un second coup de ses naseaux que je me décide à desserrer mon étreinte. Talia récupère mon heaume des mains de Tohru, s'incline pour apposer délicatement ses lèvres contre les miennes, puis me coiffe de mon casque. Je contemple ma famille un moment avant de lui faire un signe de tête et me détourner d'elle, les rênes de ma gigantesque monture en main.

Non loin du navire, je crois apercevoir la silhouette du Porteur de la Kizoku-Rana. Cette image ainsi que le bruit des planches du ponton sous mes bottes et les sabots de mon étalon me font prendre conscience de la réalité de la situation. Cette fois-ci, nous y sommes.

Je redresse fièrement la tête, marchant résolument vers notre moyen de transport.


Modifié en dernier par Kiyoheiki le jeu. 14 janv. 2021 11:56, modifié 1 fois.

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Akihito
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Re: Le Port

Message par Akihito » mer. 13 janv. 2021 20:03

Dans le chapitre précédent...

Troisième Arc : Encre de feu, Ancre de sang.

Chapitre XXIV.2 : Brume de guerre.

Le port, contrairement à d’habitude en début de soirée, était encore en pleine activité. Des navires embarquaient des caisses, divers produits, sous l’étroite surveillance de la milice et même de l’armée ynorienne. Se rappelant que le bateau qu’ils devaient rejoindre s’appelaient le Cadran, il s’adressa à un milicien qui lui pointa le bord est du quai. Là-bas mouillait un navire qui ressemblait à n’importe quelle embarcation marchande, à l’exception près qu’une grande quantité de soldats l’entourant. Réquisitionné ou payé grassement par le Conseil, le bateau devait sans doute transporter au passage quelques marchandises nécessaire au camp des forces alliées.

Arrêté une dizaine de mètres avant la jetée du Cadran par un cordon de miliciens, Akihito n’eut qu’à écarter le pli de son manteau pour dévoiler la Kizoku pour qu’on le laisse passer, malgré un regard sceptique porté à sa nouvelle monture. Ils avaient sans aucun doute été informés de sa venue. Pour Yliria, en revanche…

« C’est la noiraude que vous promenez dans la ville ? Est-elle autorisée à monter sur le Cadran par le Conseil ?

- La semi-shaakte, soldat, corrigea d’un ton sec Akihito. Vous feriez mieux de tenir votre langue, votre collègue et supérieur Sergent Kiyoheiki est aussi un semi-shaakt. De plus, elle est une éminente membre des Danseurs d’Opale, alors elle a plus que sa place dans la mission pour laquelle le Conseil nous envoie. »

(Une éminente membre des Danseurs d’Opale ? Tu sors ça d’où ?)

(Ce genre de type ne respecte que l’autorité et les rapports hiérarchiques. Alors j’ai préparé un petit mensonge pour qu’il évite de la ramener.)

Et ça marchait. Visiblement mouché, le soldat bégaya avant de s’effacer, la tête baissée, pour laisser passer la jeune fille. Anthelia passa à sa suite, et sans que personne ne fasse de remarque, cette fois-ci. Craignaient-ils offenser une autre personnalité, ou son apparence humaine la préservait de ce genre de traitement ? Peu importait. Une fois éloignée, il s’excusa brièvement auprès d’Yliria.

« Désolé pour le petit mensonge sur ta position dans ton ordre, mais sans ça il aurait été emmerdant. »

La jeune fille ne sembla pas plus perturbée que ça, reprit-il sa course pour se présenter au capitaine. L’affaire fut rapidement entendue, notamment sur la présence non prévue de Brume et Yliria : le Drgon d’Or emmenait déjà sa propre monture, et Yliria n’était qu’une bouche de plus à nourrir. Et en parlant du second, il vit le milicien se diriger vers eux quelques minutes plus tard.

« Sergent, je vous présente mes compagnons. Anthelia, mon amie et qui souhaite participer à l’effort de guerre. Et ensuite… Yliria, qui se joins à l’équipe d’aventuriers indépendants. Et je peux vous garantir que cette jeune fille est tout à fait qualifiée pour la mission, ou alors je ne le suis pas non plus. »

- Euhm... Enchanté, Sergent, je m'appelle Yliria Varnaan'tha et, comme Akihito l'a dit, je vais me joindre à l'appel émis pour contrer Omyre. Ravie de vous rencontrer. »

Yliria se présenta également, ce à quoi le sergent se présenta à son tour. Il était étonné et même un peu de déçu de voir que les deux jeunes gens ne relevaient pas plus que ça leur ascendance commune. Il ne s'attendait pas à une profusion de joie ou quoi que ce soit de la sorte, mais aurait pensé que la première soit étonnée de la présence du second au sein de la milice oranaise. Il quitta ses réflexions quand Kiyoheïki s'adressa à lui directement, un air sérieux sur le visage.

« J'aimerais être en mesure de me fier à vos paroles, ser Yoichi, mais si j'ai foi dans le Conseil, je ne vous connais personnellement que trop peu. Et quand bien même vous me seriez familiers l'un et l'autre, l'expérience m'a par trop souvent prouvé que l'on peut se fourvoyer sur la teinte du cœur des gens... »

La trahison semblait être une expérience dont le semi-shaakt avait goûté le fruit amer. Il vit un voile passer devant ses yeux, ressassant sans doute des camarades l'ayant abandonné, trahis, alors qu'il leur avait fait confiance. Mais Il eu un mince sourire ensuite, décidé à donner une chance à l'enchanteur.

« Toutefois, il n'est pas dans ma nature de ne laisser aucune chance à ceux que je rencontre. Un acte valant mille mots, j'attendrai de vous voir à l’œuvre. Pour l'heure, je vous suis simplement gré de votre appui.

- Je comprends vos inquiétudes et vos doutes, sergent Kiyoheïki. Vous vous apercevrez cependant que ma volonté de protéger ma terre natale n'a rien à envier à la vôtre. Nous ne serons peut être jamais amis, mais toujours frères d'armes. »

(Joliment dit,) approuva Amy, en même temps que le hochement de tête approbateur du Dragon d'Or. Tous se hâtèrent ensuite de monter à bord du navire, qui devait lever l'ancre sous peu. L'Ynorien tourna un dernier regard vers Oranan. Oranan la belle, Oranan l'Ecrin d'Ynorie. Oranan sa ville natale. La quitter dans une telle situation de crise ne pouvait que lui faire un pincement au coeur... Il décida cependant de faire confiance aux murs qui avaient toujours tenu bon, malgré les sièges et les assauts aussi bien des ennemis d'hier que d'aujourd'hui. Son père croyait en la présence des esprits protecteurs des hommes de Wiehl, protégeant leur foyer et leur famille. Si ce genre d'histoire était vrai... Alors l'esprit de Marcus Yoichi se trouvait déjà en sentinelle sur les remparts de la ville, armure de Samouraï sur le dos. Prêt à accueillir les hordes de Garzoks.

(Je te laisse la ville, Papa.)

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