La Forêt de Nostyla

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Yuimen
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La Forêt de Nostyla

Message par Yuimen » jeu. 4 janv. 2018 15:57

Forêt de Nostyla

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Du même nom que le lac qui est juste à côté, cette forêt sombre est mal fréquentée. Elle est, depuis maintenant des décennies, le lieu d'une guerre sans relâche entre différentes bandes organisées de brigands. Le rumeur raconte que la raison de ce conflit incessant est plus profonde qu'un simple emplacement stratégique. Si vous parvenez à faire boire les bonnes personnes, certaines histoires pourraient vous être révélées. Certaines parlent du trésor des premiers brigands d'Ynorie, dissimulé quelque part près de leur ancien repère. D'autres d'une relique extrêmement puissante qui serait remise à celui où celle qui prendrait le contrôle total de cette forêt. D'autres encore d'une créature fantastique qui garantirait richesses et bonheur à celui qui parviendrait à la capturer.

Mais maintenant, la plupart des gens savent l'attrait qu'a cette forêt sur les étrangers et il n'est pas rare de tomber sur quelqu'un prétendant connaitre LA vérité. La plupart du temps ce sont juste des imposteurs profitant de la naïveté des voyageurs pour se faire offrir à boire. Il est même possible que depuis le début toute l'histoire n'ait été qu'un vaste canular. Toujours est-il que cette forêt semble attirer bien des convoitises et qu'il est très fortement déconseiller de s'y aventurer, surtout de nuit...

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Oljyn
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » sam. 2 févr. 2019 14:35

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Nous avons passé deux jours supplémentaires dans la ferme. Puisant sur nos vivres et sur notre temps précieux. L’occasion de se remettre de la bagarre contre les brigands et de s’assurer qu’ils ne reviennent pas. Le lendemain de la confrontation, nous nous sommes rendus compte qu’ils étaient parti en abandonnant armes et objets. De mauvaises factures, aux tranchants abîmés, Kazuto a fait ce qu’il a pu avant de les laisser au fermier pour qu’il puisse se défendre à la prochaine agression. Parmi ce que nous avons trouvé, nous avons conservé un briquet, de l’amadou et des torches, jugeant que ça pouvait être utile. J’ai aussi mis la main sur un étrange caillou qu’un brigand a dû faire tomber de sa poche. Au matin du troisième jour, nous avons quitté la ferme pour partir vers le sud, refusant tout ce que le fermier souhaitait nous offrir, jugeant qu’il en aurait plus besoin que nous.

Nous avons rejoints le lac de Nostyla en quelques heures et profité de ses eaux pures pour nous laver. Kazuto a cessé dès cet instant de regarder de travers ma canne à pêche. Nous avons continué notre chemin en longeant le lac, nous dirigeant vers la forêt sombre de Nostyla.

" On pourrait rattraper notre retard en la traversant mais elle est mal fréquentée. "

Depuis les événements du Val d’Abondance, nous sommes bien moins sereins. Nous savons que le danger peut apparaître de nulle part à présent. Des brigands, mais aussi des Garzoks ou des Sektegs qui ont réussi à traverser les montagnes pour mener des raids en Ynorie. Nous sommes donc constamment sur nos gardes, le visage tendu et les poings fermés. L’idée de traverser une forêt inconnue qui, selon les rumeurs, est pleine de brigands ne m’enchante pas.

" Je préférerais continuer comme prévu. On a moins de chance de se faire attaquer par surprise et on aura une source de nourriture et d’eau. "

" Je comprends. " Répond-il simplement.

Nous restons donc sur les abords du lac jusqu’à ce que la nuit tombe. Mon forgeron monte un campement de fortune tandis que je m'atèle à pêcher de quoi manger. La pêche, c’est une question de patience. Une fois la ligne lancée, couplé au bon appât, il suffit d’attendre. Evidemment il faut le faire au bon moment, avant que le soleil ne se couche. Les poissons remontent vers la surface pour attraper les insectes, moustiques et moucherons qui survolent de trop près la surface du lac. Debout, les pieds nues sur la berge, je patiente. Je sens une vibration, quelque chose est passé à côté du hameçon, ce n’est plus qu’une question de seconde. Une seconde vibration et une tension soudaine. Ca mord ! Je remonte la ligne en vitesse, extirpant une carpe hors de l’eau. Assez à manger pour nous deux. Ravi, je la brandis devant Kazuto en riant.

" Sans doute la plus belle fille que tu n’as jamais pêché. "

Je la prépare pendant que le forgeron fait un feu. L’odeur qu’émane le poisson grillé est à faire baver, surtout que nous n’avons mangé que de la viande séchée et du riz ces derniers jours. Ce repas nous fait le plus grand bien. Je décide de ce moment de convivialité pour en apprendre plus sur la relation entre lui et ma mère. Il m’explique qu’ils se connaissent en effet mais que c’est surtout son grand frère qui l'a bien connue. En fait, elle était censée l’épouser.

" Tu veux rire ? "

" Pas du tout. Un mariage arrangé par nos parents. Ca arrangeait mon frère, ta mère lui plaisait beaucoup et c’est moi qui aie hérité de la belle gueule. Ce n’était pas du tout du goût de ta mère par contre. "

Je retire un paquet d’arrêtes du bord de mes lèvres avant de faire glisser les plus petites avec une rasade d’eau.

" Qu’est-ce qui s’est passé ? "

" De ce que j’en sais. Ton père a débarqué à Oranan et en repartant, ta mère est partie avec lui. "
" Je comprends mieux pourquoi mon grand-père me regarde de travers. "

" Mon frère était un imbécile. Elle a bien fait de partir. Ce n’est pas à nos parents de décider avec qui on va partager nos vies. "

" Et après que s’est-il passé ? "

" Mon frère a laissé tomber la forge pour s’engager dans l’armée où il y a perdu la vie. Mes parents ont décidé de quitter Oranan et ils sont morts il y a quelques années. "

Nous poursuivons notre discussion, sur des sujets plus légers. La pêche, la forge, la cuisine, avant de décider qu’il était temps de prendre du repos. Je prends le premier tour de garde et laisse Kazuto s’endormir.


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Oljyn
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 3 févr. 2019 14:26

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La nuit se passe sans incidents, ce qui nous met de bonne humeur, nous partageons un petit déjeuner en reprenant une conversation, concernant plus particulièrement le concours cette fois.

"Tu as pris ce chemin aussi la première fois ?"

"Ouais. Je me suis rendu au même endroit où on se rend."

"Et tu as aussi eu des soucis sur la route ?"

Il soupire.

"Mon escorte était bien plus efficace que toi. Elle savait de servir d'un sabre, elle."

"Elle ? Oh je vois. Tu n'as pas réussi à revenir à temps parce que tu voulais profiter de ton escorte ? Une jeune femme aux jolies fesses ?"

Dis-je en plaisantant.

" Qu’est-ce que tu viens de dire ? "

La plaisanterie n’a pas l’air du goût du forgeron qui se lève soudainement et renverse l’eau qu’il était en train de faire bouillir.

" Qu’est ce qui te pr… "

Je n’ai pas le temps de terminer ma phrase. Il brise le court espace entre nous et me frappe au visage, m’envoyant à terre. Le choc contre le sol me coupe le souffle. Je sens une main ferme m’attraper le col suivi d’un poing qui percute encore mon visage, le goût de fer dans ma bouche, l’étourdissement que procure un coup de poing bien placé. Je perçois les mots qu’il me crache au visage.

" Ne t’avises plus jamais de parler d’elle ! "

Je sens la poigne me relâcher, un second impact contre le sol. Quelques instant de flottement avant que je reprenne mes esprits. Je me redresse en m’aidant d’un bras, l’autre massant ma joue endolori. Je jure à voix basse, remettant de l’ordre dans ce qui venait de se passer. D’un coup d’œil, je vois le forgeron qui s’éloigne vers la forêt à quelques dizaines de mètres.

" Où est-ce que tu vas ? " Criais-je à son attention

" J’vais pisser ! Tu veux me la tenir peut-être ?! "

Répond-il sans être défait de sa soudaine colère. Je grommelle en me remettant debout avant de me diriger vers le lac. Je crache le mélange de sang et de salive qui emplit ma bouche. Accroupi, je recueille de l’eau dans mes mains en coupe pour me nettoyer le visage. A tâtons, je rafraîchie ma joue gonflée. J’ignore ce qu’il s’est passé il y a huit ans mais il y a forcément quelque chose qui a mal tourné. Je termine ma toilette rudimentaire pour rassembler les affaires, peu enclin à manger un morceau avec la douleur qui saisi ma bouche.

Je patiente plusieurs minutes avant de tourner en rond, un soupçon d’inquiétude commence à me peser sur la poitrine. Encore quelques minutes à tapoter frénétiquement mes doigts sur mon avant-bras avant de me décider à aller voir. Même une grosse commission ne devrait pas prendre autant de temps. Je ramasse mon sabre, seul véritable objet de valeur, bien qu’elle ne soit que sentimentale, que je transporte. Laissant brièvement le camp sans surveillance, je me dirige vers la forêt pour retrouver mon forgeron.


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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 10 févr. 2019 10:11

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" Mais où est-ce qu’il est passé ? "

Je chuchote, me parlant plus à moi-même. Refusant de crier le nom du forgeron pour ne pas attirer l’attention de personnes mal intentionnées qui errent, soit disant, dans ces bois. Je soupire, grommelle, jure, fouille à la recherche d’une trace. Perdre celui qu’on est censé escorter est vraiment la pire des choses qui peut arriver. Il n’a pas pu décider de poursuivre la route seul, toutes ses affaires sont encore au camp. Un éclat lumineux sous un bosquet attire soudain mon attention. La lumière du jour se reflète sur un anneau en acier, l’anneau qui pendait au cou de Kazuto, encore attaché à la ficelle qui est brisée. Juste à côté, quelques gouttes de sang et sur un tronc à proximité dont l’écorce est abîmé, une giclée de rouge carmin. Il lui est arrivé quelque chose et il s’est visiblement défendu. Je ramasse l’anneau que j’accroche autour de mon cou pour être certain de ne pas le perdre. Je dois à tout prix le retrouver. Mon inquiétude naissante ce transforme presque en panique, ou en tout cas en inquiétude avérée. Je retourne sur mes pas pour me diriger vers le camp et à l’orée de la forêt je remarque des chevaux sans cavalier près du campement. Je me dissimule dans les fourrées, me jetant à terre pour ne pas être repéré.

Trois hommes. Je reconnais sans problème l'un d'eux. Débarrassé de son bandage, il a gardé une trace indélébile. Un nez écrasé donnant à celui qu'on appelle canard un nez de cochon en plus de sa voix nasillarde. Maintenant qu'il fait bien jour, je remarque qu'il a l'air jeune. Mon âge peut-être, bien que je lui donnerai un ou deux ans de moins. Ses cheveux sont d'un noir profond et ses yeux... On ne remarque pas ses yeux. Son appendice nasal, écrasé, affichant deux narines dont l'une est close aux trois quart, accapare toute l'attention. Les deux autres me sont inconnus et ressemblent à des brigands lambda. Vêtu d'une tenue de cuir sombre, armés de dagues. Ils arpentent mon campement et les alentours. A ma recherche ? Ce cher canard sait que nous sommes deux, ce serait logique.

Après plusieurs minutes où je contiens ma colère ils abandonnent et se dirigent dans ma direction. Je me recroqueville autant que ma carrure me le permet pour tenir dans le bosquet et ne pas être découvert, retenant ma respiration quand ils passent à côté de moi. L'un d'eux arrête soudain sa monture et s'exprime d'une voix gêné.

"Les gars, j'me sens pas bien. Faut vraiment que je m'arrête."

Le canard répond de sa voix nasillarde après un soupir sifflant.

"Je t'avais dit de ne pas manger ce fruit. J'en ai assez de t'attendre. Tu nous rejoindra au camp."

"Oui ! D’accord !"

Répond-il soudainement pressé avant de descendre de cheval pour courir vers un arbre un peu plus loin et se camoufler derrière. Ses acolytes poursuivent leur chemin et s’enfoncent plus profondément dans les bois. Une fois hors de mon champ de vision, je m'extirpe prudemment de ma cachette et m'approche sur la pointe des pieds du tronc camouflant le dernier bandit. Occupé, très occupé, il ne remarque pas ma présence jusqu'à ce que la lame de mon sabre se pose sur sa gorge.

"Pas un bruit. "

Un son s'échappe du bandit mais pas de quoi alerter les alentours.

"Termine ce que tu es en train de faire. On va avoir une discussion."


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Oljyn
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 10 févr. 2019 10:15

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"On va y aller méthodiquement. Tous les deux."

Les mains et les pieds attachés par du fil de pêche. Posé contre un tronc dans les bois. Le malfrat ne semble pas tranquille. Il jette des regards affolés dans tous les sens en évitant le mien. Les cheveux mi-longs, bouclés, gris et collés à son visage par la sueur. Un visage et un nez rond lui donne la parfaite tête à claques.

"Grand un. Je vais plier quelque chose. Je vais plier une chose qui n'aime pas qu'on la plie. "

Il me coupe dans mon élan. S'exprime sur un ton effrayé et en même temps pragmatique. Ses yeux rivés vers mon visage.

"Je t'arrête tout de suite parce que je verrais pas le grand deux. Je ne verrais même pas le grand un. Je ne supporte pas la douleur. Si je me cogne le doigt de pied je suis foutu pour la journée. "

Je me pince l’arête du nez alors qu’il poursuit.

" Quand j'ai peur j'ai des érections involontaires. J'en ai une maintenant."

La surprise de l'aveu me fait regarder inconsciemment vers son entrejambe.

"Regarde pas. Ça ferait qu'empirer les choses. J'veux pas avoir mal et je te dirais tout. Tout ce que tu veux savoir... Tout sauf là où ils sont."

Je le regarde en poussant un léger grognement, serrant les poings, prêt à frapper.

"Ils sont dans un campement un peu plus loin au nord-est d'ici. Un ancien camp de bûcheron. Ils détiennent sûrement le type que tu cherches dans le plus grand bâtiment. Il sert de réfectoire pour manger mais je laisserai tomber si j'étais toi. On est nombreux et notre chef est un barge..."

Je pose une main contre sa bouche pour faire cesser son flux de parole.

"Ça ira. Merci beaucoup."

Je l'assomme à l'aide d'un bon coup de manche de sabre et retourne ensuite au camp pour rassembler les affaires qui pourront m'être utile. Je cache celles de Kazuto et le reste des miennes dans un bosquet. Je ne peux pas l'abandonner, mon rôle est de le protéger. Retourner à Oranan sans lui serait une trop grande honte à supporter. Pour moi mais aussi pour ma famille. Je retourne dans les bois, en direction du camp des bûcherons.


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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 10 févr. 2019 10:18

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Le camp est plus grand que ce à quoi je m'attendais. Il ne s'agit pas seulement de quelques masures de bois bâtit dans une clairière. Autour s'est répandu des habitations de fortunes. Des tentes, des cabanes dressées à la va-vite entre lesquelles sont disposés, ici et là, diverses caisses, sacs et piles de bois. Je peux également voir des armes, des vivres, des objets volés ayant probablement une certaine valeur. Il y a aussi des animaux, sûrement chapardés aux élevages du Val d'Abondance, chevaux, chèvres, poules, vaches, cochons, chiens et autant d'outils indispensables à l'agriculture, handicapant largement les paysans victimes de leurs raids. Contenant ma colère, je reste à bonne distance et fait le tour pour trouver ce fameux réfectoire. Je ne peux pas m'infiltrer dans le camp. Je serai immédiatement découvert et le nombre impressionnant de bandits ne me laisse aucune chance de parvenir jusqu'au bâtiment en cas de combat.

Je trouve enfin un endroit d'où je peux, entre les tentes et les caisses, apercevoir un long bâtiment de bois en excellent état. Il ne reste plus qu'à trouver le moyen de s'y rendre. Je refais le tour pour me rendre le plus loin possible du réfectoire. Je prends garde à ne pas me faire voir et ne pas croiser une patrouille ou une sentinelle. J'essaie de camoufler mon odeur pour ne pas alerter les chiens en me recouvrant le corps de boue, de terre et de me frotter avec des feuilles. Cette partie du camp n'est pas aussi animée que le reste. Le fait que les tentes ne servent probablement qu’à passer la nuit explique cet abandon. Le jour est désormais bien levé et les bandits participent aux tâches qui font vivre le camp et le garde dans un état relativement potable.

Je m'approche d'une pile de caisse proches d'un drap servant de tente de fortune et m'entreprend d'y mettre le feu en formant un tas de feuille sèche et de brindilles. Je n'aurais pas toute la journée, le bruit du silex contre l'amadou risque d'attirer l'attention. Une étincelle, j'ai juste besoin d'une bonne étincelle. Tac ! Une étincelle rouge jaillit pour tomber entre les feuilles. Un filet de fumée commence à s'élever pendant que les premières feuilles se consument. Je nourris la braise d'un léger souffle continue et celle-ci rougit avant de laisser échapper une petite flamme qui met le feu aux restes des feuilles. Je m'éloigne avant que le départ d'incendie ne se propage, contourne à nouveau le camp tandis que l'alerte au feu est donnée. Les brigands s'activent. La proximité des abris et des divers tonneaux qui encombrent le campement aident l'incendie à grandir, produisant maintenant une large colonne de fumée noire qui étale ses bras plus clairs sur l'ensemble du village de malfaiteur.

Je parviens à pénétrer dans le camp sans me faire repérer. Profitant de la cohue, je m'approche du réfectoire en restant prudent. A quelques mètres de la porte, je me dissimule derrière des sacs de riz. Le canard vient de sortir du bâtiment accompagné d'un grand gaillard. Les cheveux rasés, gris malgré le fait qu'il n'est pas l'air si vieux. Habillé d'une tenue de cuir sombre. Armé simplement d'une matraque glissé à la ceinture. Avec tout le raffut, je n'entends pas ce qu'il dit. Je remarque juste qu'il donne quelques ordres à un troisième type avant de partir en direction de l'incendie en compagnie du canard. Le dernier fait le guet devant la porte, épée à la main.

Je fais le tour des sacs, m'approchant encore sans être vue, autant que je le peux en tout cas car l'absence de cachette m'empêche à un moment de plus avancer. Je ramasse une pierre et la jette dans les hautes herbes à proximité de la porte. La sentinelle réagit, se dresse de tout son long, arme dégainé.

"Qui va là ?!"

Demande-t-il en s'approchant de la source du bruit. Il en cherche la provenance quelques instants avant d'abandonner pour retourner à son poste.

"Probablement un anim..."

Ma charge lui coupe la parole, le souffle et le chemin. Un plaquage contre la fragile porte de bois qui ne tient pas le coup. Nous nous retrouvons tous les deux dans le bâtiment. Grande salle qui contient plusieurs tables, chaises et tabourets. Quelques gamelles et chopes traînent encore sur la table. La charpente poussiéreuse est soutenue par plusieurs poutres usées. Je termine de mettre hors d'état de nuire celui qui m'a servi de bélier d'un bon coup de poing avant de me redresser sous les yeux médusés des bandits présents. Ils sont trois, figés par la stupeur. Ils ne sont pas armés mais leurs mains sont tachées de sang. Assis et attaché à une chaise, devant eux, se trouve Kazuto. En piteux état, le visage tuméfié en ensanglanté. Malgré tout il semble encore conscient et lève la tête vers moi. Je renifle et observe tour à tour les malfrats.

" Vous allez me rendre mon forgeron. "


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Oljyn
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 10 févr. 2019 10:28

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Les brigands se jettent sur moi. Je pousse un grognement d'effort et de colère en m'avançant à leurs rencontres, donnant le premier coup qui frappe le visage du bandit le plus proche. Le second me frappe la joue. Je titube, bloque un second coup avant de riposter pour repousser l'assaillant. Le troisième me fonce dessus et me pousse contre une vieille poutre en grognant d'effort. Le choc me fait lâcher un cri gras. J'écrase mes coudes contre son dos pour lui faire abandonner sa prise. Quand il desserre enfin son étreinte je lui envoie mon genou dans l'estomac, attrape une chope qui traine sur la table et la lui brise contre le crane.

Pas le temps de souffler. Un autre revient à la charge. Nous nous rendons coup pour coup en grognant d'effort. J’arrive à éviter un coup visant mon visage et à lui en rendre un semblable. J’attrape ensuite sa tignasse sombre pour lui écraser le visage contre la poutre. Quand il tombe à terre je pousse un soupir rauque, soulagement mêlé d’effort et de volonté d’en découdre encore.

Un autre se relève et évite un de mes poings pour me frapper l’estomac. Un filet de bave et de sang m’échappe. Un second coup me heurt le menton. Je bloque le bras de mon agresseur avant d’en subir un troisième. Etourdi, je ne tente pas un coup qui risque de rater ma cible. Je me penche, saisie le bandit à la ceinture de mes deux bras pour le soulever avant de nous laisser tomber sur une table derrière lui. Elle ne tient pas le choc et se brise sous le poids de nos deux corps. Je tousse, tentant de reprendre une respiration devenue haletante. Quelqu’un me saisit par derrière, aux épaules. Je pousse sur mes jambes pour me redresser, projetant le parasite contre la poutre. Il ne lâche pas prise et un autre acolyte se relève pour me frapper au ventre puis au visage. Mon souffle se saccade, ma vision se trouble. Un troisième coup m’atteint. Ce dernier, au lieu de m’assommer, me cause un sursaut. Je vois l’assaillant en face de moi décomposer son prochain coup au ralenti. Son visage grimaçant, son coude élancé vers l’arrière, son poing se fermer, son autre bras s’avancer en prévision de l’élan qu’il va donner. Le poing approche. J’ouvre la bouche pour pousser un cri de guerre, je penche la tête sur le côté. Le coup frappe l’homme derrière moi. Je propulse mon pied contre le genou du frappeur. Je sens quelque chose craquer, se plier sous mon pied. J’entends un cri de douleur qui passe à côté de moi pour rejoindre le sol. La prise sur mes épaules se desserre, j’en profite. Je me projette en arrière. Encore et encore, écrasant entre moi et cette pauvre poutre celui qui a décidé de me maintenir. Quand il lâche complètement prise je me retourne pour lui infliger un crochet brutal, l’envoyant au tapis. A bout de souffle, la bave et le sang coulant de mes lèvres ouvertes, je m’appuie sur le pilier de bois pour ne pas m’écrouler.

Un bruit derrière moi me fait me redresser, juste à temps pour éviter un morceau de pied de chaise. Je peine à relever mes bras et mon agresseur à lever sa massue improvisée. Il se relance à l’assaut. J’attrape son avant-bras armé de ma main gauche et lui frappe le nez avec mon poing droit. Une fois, deux fois, je m’entends grogner d’effort à chaque coup, un troisième lui brise le nez, le quatrième lui fait perdre connaissance, je lui en offre un cinquième avant qu’il s’écroule et qu’il m’emporte avec lui. Nous nous retrouvons tous les deux par terre. Je roule de côté pour ne plus être sur lui et fixer le plafond. J’entends une toux qui semble douloureuse suivi de quelques mots.

" Oljyn. Oljyn. Il se relève… "

L’un a la rotule brisé. Je peux encore l’entendre gémir de douleur. Un second est allongé à côté de moi, le visage brisé. Il en reste un troisième, c’est vrai, non loin, il se relève en s’appuyant sur une table. Je n’ai pas la force d’en faire de même. Je ne peux pas abandonner, je ne peux pas finir ici en laissant mon forgeron. J’inspire et rassemble mes dernières forces pour pousser le pied de la table d’un coup sec. Celle-ci s’éloigne et déséquilibre celui qui tentait de se relever, il se cogne le menton sur ce qui lui servait d’appui et s’affale au sol pour ne plus bouger.


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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 10 févr. 2019 11:09

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Un rire nerveux agite ma mâchoire et mon torse douloureux. C’est terminé. Je prends un instant pour reprendre un souffle plus calme. N’écoutant que les cris d’alertes venant de l’extérieur et les gémissements plaintifs de douleur venant des brigands vaincus. Mon temps n’est pas illimité, je dois bouger. Mes paupières sont lourdes. Tout mon corps douloureux. Un son sifflant me garde conscient, me ramène à moi. J'entends des pas pressé. Un juron nasillard. Le canard. Je me roule sur le côté pour me mettre sur le ventre et apercevoir le brigand au nez cassé, toujours accompagné du grand gaillard à la massue. Je remarque maintenant qu'il est laid, que sa lèvre supérieure est un peu plus avancée que sa voisine inférieure, ce qui lui donne une face de fouine. Je trouve la force de me mettre assis tout en prenant la parole entre deux respirations profondes.

"Le canard et la fouine. Et eux trois ce sont le loup, le renard et la belette ?"

J'entends un ricanement derrière moi, provenant du visage usé de Kazuto.

" Je fupove que vous êtes le refponfable de fet infendie à l’efterieur. "

Mon visage exprimant la douleur laisse apparaître un sourire hasardeux alors que j'entends encore le ricanement du forgeron.

" Il est maitrivé déformais et nous fommes trop nombreux pour que vous puiffiez vous défendre. "

Un autre rire nerveux s’empare de moi. Il avait sans doute raison mais je refusais de l’admettre. Devant mon silence, il devient impatient et finit par s’écrier.

"Faiffifez le ! "

"Pourquoi vous dites pas attrapez-le ? Se serait plus simple pour vous."

"Filenfe !"

Kozuto se marre franchement cette fois tandis que le canard se dirige vers moi. Sans ménagement il me remet au sol d’un coup de pied. J’aperçois son sourire narquois, satisfait de se tenir au-dessus de moi. Je n’ai pas la force de réagir. Il n'y a plus rien à faire. Aucun de nous deux n'a la force de se défendre. Je penche la tête autant que possible pour échanger un regard avec Kozuto. L'aventure prend fin ici.

Un brouhaha reprend dehors. Cri de douleurs, bruit de sabots et de fracas d’acier. Un bandit paniqué pénètre dans le bâtiment en criant :

" Chef ! Nous sommes attaqués ! "

La fouine se retourne en s’exclamant :

" Impoffible ! Qui font les affaillants ? "

" La milice d’Oranan ! "

Un grognement de rage s’échappe de la gorge du chef des brigands avant qu’il ordonne à ses hommes de battre en retraite, d’abandonner le campement en prenant le strict nécessaire. Le poids sur ma poitrine disparaît. Plus personne ne se préoccupe de nous. L’urgence de s’échapper du camp et de survivre à la milice prend le dessus sur le reste. Je reste allongé, sans bouger tandis que les malfrats quittent le bâtiment.

" Vas-y. Dit-le. "

" Tu es vraiment une escorte de merde. "


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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 10 févr. 2019 20:01

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"Capitaine. On a trouvé ces deux-là. Ils disent qu'ils ne sont pas des bandits. L'un deux était attaché."

Le capitaine nous jette un regard méfiant. Plutôt grand, il porte une armure de maille encore tachée de sang et un sabre à la main. Il a la tête de la personne avec qui on ne plaisante pas. Sa posture dégage une aura de fermeté et d'efficacité. D'ailleurs son attaque sur le campement peut se décrire de cette façon. Quelques cadavres parsèment le sol mais la grande majorité des brigands encore présent sont agenouillés et étroitement surveillés. Les blessés sont pris en charge et une équipe médicale s'approche déjà de nous.

"Ils disent qu'ils participent à l'Erementarīfōji. "

Le capitaine hausse un sourcil, fait signe à un archer à cheval qui s'approche immédiatement.

"Vos noms ?"

Demande le capitaine. Kazuto répond:

"Je suis Kazuto Doru et lui c'est Oljyn Shazano. Mon escorte. "

Le capitaine se tourne ensuite vers le cavalier qui se met à sourire.

"Oui. C'est le forgeron qui s'occupe du gravilay. "

Le milicien qui s'est occupé de nous ramener devant son supérieur commente:

"Ardehis est un fidèle spectateur du concours. Il n'en rate pas une miette. Il adorerait y participer j'en suis sûr. "

Le cavalier rétorque sur la plaisanterie.

"Hélas j'ai deux mains gauches. Imaginez ce qui se passerait si on me mettait un arc dans les mains. " Dit-il en le secouant.

Les deux miliciens rient de leur plaisanterie. Le capitaine, lui, ne fait même pas une grimace amusée. Il reprend la parole, d'une voix dur et avec une précision et une clarté dans chacun des mots, voulant sûrement être sûr et certain d’être bien compris et de ne pas devoir répéter.

"Un fermier est venu nous voir pour nous faire part des attaques répétées venant de ses brigands. Il nous a expliqué que deux grands gaillards se sont chargés de le défendre avant de partir vers le sud. Il craignait pour votre vie et nous a demandé de l'aide. Je voulais mettre fin à l'agissement de ces bandits depuis un moment maintenant. La fumée nous a guidés jusqu'à leur camp. J’imagine que l’incendie ne s’est pas déclenché tout seul. Donc, je vous remercie. "

Il incline respectueusement la tête avant de poursuivre.

"Où comptez-vous vous rendre ?"

"A Gamerian avant de nous enfoncer dans la forêt."

"Je ne peux pas vous escorter aussi loin mais mes médecins vont s'occuper de vous avant de vous escorter, au moins, jusqu'au sud des bois. "

Il soupire.

"J'espère qu'un jour Oranan décidera de s'occuper sérieusement de cette forêt. Bonne chance pour la suite."

Il fait un signe de tête aux guérisseurs qui nous installent un peu plus loin pour s'occuper de nous. Entre de bonnes mains, je me laisse aller et ferme les yeux, confiant. J’ai survécu et j’ai retrouvé le forgeron. Les yeux toujours fermés, je retire l'anneau de mon cou pour le tendre vers le forgeron. Je le sens s'en emparer avec un soupire de soulagement. Je souris. J’espère que le reste du voyage sera plus facile.

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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » sam. 16 févr. 2019 16:00

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Le simple fait de m’habiller est devenu une corvée. Mon visage, mon ventre, mes bras, teintés en bleu ou en violet sont douloureux. Des courbatures atroces crispent mes épaules et mes cuisses. Kozuto ne semble pas mieux au point. Aucun de nous ne l’ose l’admettre évidemment. Nous restons silencieux, droit. J’ignore la douleur dans mon dos pour ne pas le courber devant lui. Depuis le campement des bandits, nous avons économisé nos mots pour ne pas se rajouter une douleur supplémentaire venant de nos mâchoires malmenées. De toute manière, les deux miliciens qui nous accompagnent causent assez pour nous deux. Tous les sujets y passent ; climat, famille, amis, politique, économie. Il ne se passe pas quelques secondes de silence avant qu’un nouveau sujet soit mis sur la table par l’un ou l’autre. Ce matin ne fait pas exception, en préparant un petit déjeuner basique ils trouvent le moyen de discuter de leurs petits déjeuner et repas préférés. J’avale la moitié de mon gâteau de riz sec avant d’abandonner, la douleur encore trop présente m’empêche de mâcher sans grommeler. Leurs discussions incessantes commencent à me peser, à me gonfler même. Pour m’apaiser, j’étudie une de ces étranges pierres que j’ai retrouvées par terre dans le camp de brigand après la bataille. Semblable à celle découvert devant la ferme du val d’abondance. Il s’agit plus d’un petit caillou marqué d’un symbole. Celui-ci ressemble à deux flèches partant dans des directions opposées. Je fouille dans mon sac à la recherche du premier que j’ai ramassé. J’observe les deux symboles en me demandant ce que ça pouvait signifier. Est-ce qu’il y a un lien entre eux ? Pourquoi les bandits en ont avec eux ? Autant de questions qui ne trouveront pas de réponses. J’espère ne plus jamais recroiser la route de ces bandits.

Le voyage en cheval avec les miliciens nous avaient fait rattrapé un peu de temps perdu mais sûrement pas suffisamment et nous arrivions à la limite où ils pouvaient nous accompagner. Nous y étions d’ailleurs. Nous partageons simplement un dernier repas avant de nous séparer.

" Prenez soin de vous et faites attention, j’ai l’impression que le temps se gâte. "

Il pointe son nez vers le ciel gris au-dessus des montagnes. En effet, il semble menaçant mais le vent à l’air de l’écarter de notre chemin. Ils nous souhaitent bonne chance pour le concours de forge avant de s’éloigner pour rejoindre le reste de la milice, nous laissant seul entre deux zones boisées. Au nord, la forêt de Nostyla et ses brigands, au sud, la forêt des Faeras et ses légendes qui nous en gardent éloignés. Nous poursuivons notre route vers les montagnes après un échange de regard. Nous traversons une plaine aux herbes hautes, libérant parfois des envols d’oiseaux sauvages ou la fuite de lièvres. Je m’en amuse mais Kazuto, lui, semble nerveux ou en tout cas de mauvaise humeur. Il reste silencieux, les poings fermés. Je préfère garder le silence également, ne voulant pas à nouveau déclencher une bagarre pour quelques mots. Les heures passent et alors que nous sommes proches des montagnes, le ciel se montre de plus en plus menaçant tandis que le nuage gris commence à en grignoter le flanc. Je brise le silence qui dure depuis des heures, ignorant ma mâchoire qui est soudainement réveillée.

" Il avait raison. On devrait s’abriter. "

" Par ici. " Répond-il simplement.

Il presse le pas pour se diriger droit vers les pics rocheux à proximité de la forêt de Nostyla.

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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 17 févr. 2019 17:10

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La pluie commence à tomber quand nous atteignons l’entrée d’une caverne. Kazuto a trouvé son chemin facilement entre les arbres et les buissons de la forêt. Le vent souffle de plus en plus fort et les gouttes de pluie, grosse comme des cordes, mouillent l’intérieur de la grotte et nous forcent à s’enfoncer plus profondément dans les montagnes. Nous allumons un feu de camp dans une petite alcôve pour nous réchauffer, à l’abri du vent, de la pluie et bientôt du froid.

" Tu connaissais cet endroit ? "

" Oui. " répondit-il d’un ton neutre. "Nous avions découvert l’endroit en voulant nous mettre à l'abri d'un orage."

" Nous ? "

" Moi et mon escorte ! Tu le fait exprès ou quoi ? Tu as décidé de me casser les pieds ?! "

Il se relève, en colère, les sourcils froncés. Je me redresse à mon tour, ne voulant pas subir un autre coup non mérité. Du même ton je rétorque.

" Oh ! Ca va ! Détend toi ! Je fais juste la conversation ! "

" Bah tu me gonfles avec tes conversations ! Le silence c’est bien mieux ! "

" Je t’avoue que si c’est pour t’entendre gueuler comme un porcin je préfère me taire ! "

Le ton monte tandis que nous commençons bientôt à nous échanger des mots peu élogieux. Nous crions dans la grotte, couvrant largement le bruit du vent à l’extérieur.

" Si tu cherches la bagarre, tu vas l’avoir ! " Finit-il par dire en levant ses manches.

" Viens ! Viens ! Je t’attends ! "

" A L’AIDE ! "

Nous plissons les yeux, silencieux, sur le point d’en venir aux mains. Nous restons immobiles, à l’écoute. Je suis à peu près certain d’avoir entendu quelque chose et visiblement mon forgeron aussi.

" AU SECOURS ! "

Nous tournons simultanément la tête vers l’intérieur de la caverne, l’obscurité totale qui s’enfonce dans la montagne.

" Tu as entendu ? "

Soupire las mêlé de colère du forgeron.

" Evidemment, crétin, que j’ai entendu ! "

Ce n’est plus une voix mais plusieurs désormais qui appellent à l’aide du fond de la grotte. Des voix d’enfants qui semblent affolés et surtout en danger. Sans attendre un instant de plus, nous laissons tomber notre confrontation pour allumer une torche et nous précipiter au plus profond de la grotte.

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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 17 févr. 2019 17:28

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Les appels à l'aide se poursuivent et nous entraînent d'avantage dans la caverne qui, par une pente abrupte, se plonge de plus en plus dans l'obscurité qui s'écarte à la lumière de notre torche. Je manque plusieurs fois de perdre l'équilibre et de m'étaler sur les roches pointues.

Finalement, nous tombons au détour d'une paroi sur un groupe de gamins. Une douzaine d'années tout au plus, peut être seize ans pour le plus grand d'entre eux. Paniqués, les plus costauds tentent d'extirper l'un de leur compagnon dont la jambe est coincée dans la faille d'un rocher.

"Par tous les dieux ! Mais qu'est-ce ce que vous faites ici ?!" S'emporte Kazuto.

L’un d’eux, maigre, un visage fin au nez pointue, des cheveux noirs et bouclés lui tombant jusqu’aux épaules, l’air affolé, nous explique qu’ils nous ont entendu crier et ont appelé à l’aide pour secourir William. Celui-ci, l’air à la fois niais et paniqué, petit, les cheveux lisses et bruns lui collant au front est tombé dans une sorte de puits et s’est coincé la jambe.

Grace à la lumière de la torche, surpassant celle de leur petite lanterne sur le point de s’éteindre, je distingue qu’un filet d’eau coule entre ses pieds. Je grimace. Avec la pluie battante à l’extérieur, ce filet d’eau va vite devenir un torrent qui va remplir cette partie profonde de la grotte et nous engloutir sous l’eau glacée en noyant ce pauvre William. Le reste des enfants tentent de l’aider du mieux qui le peuvent, que ce soit en le tirant ou en essayant vainement d’écarter la roche qui le maintien prisonnier. C’est ce que font les plus costauds du groupe, un Humoran au pelage sombre et celui qui parait le plus âgé ; un beau garçon au visage carré, à la barbe naissante, yeux et cheveux bruns et bien coiffé malgré l’effort qu’il fournit. Les filles du groupe le tire par les épaules. L’une, rousse, les yeux bleus, le visage parsemé de tâches de rousseurs, à l’air de garçon manqué et accusateur nous agresse directement.

" Vous attendez quoi pour nous filer un coup de main ?! "

La deuxième semble plus calme, silencieuse, concentrée dans sa tâche, les cheveux bruns et courts. Elle ne se retourne pas, à se demander si elle a remarqué notre présence. Enfin, un dernier a attrapé William à la ceinture pour le tirer d’avantage ; Grassouillet, une tête anormalement large, ses cheveux bouclés lui tombent sur les épaules.

Le forgeron ne démord pas et demande des explications sur la raison de la présence d’un groupe de gamin au fond de cette caverne.

" Kazuto ! "

Je lui montre l’urgence de la situation en dirigeant un doigt vers le filet d’eau qui s’est déjà élargi. D’autres commencent à se former entre les pierres qui se sont sans doute retrouvées là suite à un éboulement, bloquant un cours d'eau qui n'allait pas tarder à se dégager un passage. Mon compagnon de voyage comprend immédiatement et saute dans le puits avec sa masse. Je confie ma torche au maigrichon qui nous a expliqué la situation avant de descendre à mon tour. Nous demandons aux enfants de s’écarter, ce qu’ils font sans trop de résistance, épuisés par l’effort qu’ils ont fournis pour venir en aide à leur camarade. L’eau froide atteint déjà mes chevilles et William commence à claquer des dents. Le forgeron s’empresse de le rassurer tandis que j’inspecte de plus près les roches qui le font prisonnier en évitant de me mettre dans la lumière de la torche.

" Dépêchez-vous ! "

S’égosille la rouquine qui vient sans doute seulement de remarquer que le temps est compté. Kazuto leur ordonne de remonter sur la partie supérieure où attend leur copain qui semble sur le point de s’évanouir. Je lui ordonne de mieux tenir la torche avant de la laisser tomber. Nous plonger dans le noir serait la dernière chose à faire. J’entreprends de tirer sur la pierre pour la dégager mais cela me parait impossible. Kazuto, lui, aide les gamins à remonter avant de s’approcher avec sa masse. William commence à pleurer mais il lui fait signe que tout va bien se passer. Il pose sa masse sur la pierre sans frapper. Assez loin de la jambe pour ne pas lui faire subir un gros choc mais assez proche également pour casser un fragment de pierre assez petit pour être déplacer. Je m’écarte, il inspire, lève sa masse et frappe. Le bruit est terrible, confiné dans un espace clos il me fait mal aux oreilles. Malgré le son, la pierre ne semble pas très abîmée, seul un petit impact est apparu sur la pierre. Pire que ça, le choc à libéré un jet d’eau glacé que je tente de colmater pour gagner du temps. Je jette un regard au forgeron, il n’aura pas un nombre infini de coups de masse. Il hoche la tête et relève sa masse avant de l’abaisser à nouveau en criant d’effort. William pleure d’avantage, sans doute à cause de sa jambe qui subit la vibration du coup ou à cause de la peur de finir noyer. Cette fois la pierre se fissure, pas assez pour libérer ce pauvre garçon, mais suffisamment pour donner de l’espoir à sa bande et au forgeron qui frappe encore tandis que je colmate de ma main restante l’autre trou qui s’est ouvert. Le troisième coup n’est pas assez fort pour briser le rocher mais je n’ai plus assez de mains pour colmater les autres brèches qui s’ouvrent. Le plus âgé des enfants saute dans le puits. L’eau jusqu’aux hanches, il se fraye un passage jusqu’à moi pour m’apporter son aide. Un quatrième coup de masse fissure d’avantage la pierre mais c’est toujours insuffisant et désormais elle est complètement sous l’eau. Les deux filles sautent à leur tour pour aider William, épuisé, à rester debout pour garder la tête hors de l’eau. Nouveau coup de masse du forgeron, galvanisé par la rage. La pierre se brise, libérant le garçon mais également un torrent d’eau qui remplit le puits à toute vitesse, le barrage naturel cède et nous projette contre les parois de pierre.

Le froid m’engourdit un instant, par chance ce n’est pas ma tête qui frappe les pierres. J’ouvre les yeux, la clarté de l’eau me permet de distinguer la lumière de la torche au-dessus de moi et d’entrevoir les autres qui se sont fait engloutir. Les deux jeunes filles sont conscientes et remontent vers la surface par large brassées. Le plus âgé qui m’a l’air d’être un bon nageur plonge vers le fond. Je plisse les yeux pour apercevoir le corps du William, inconscient au fond du puits. Il le récupère avant de se diriger vers la surface. D’un ample mouvement de tête, je cherche le forgeron. Lui aussi est inconscient et son attirail l’attire rapidement vers le fond. Sans plus attendre, je plonge à son secours et le récupère au fond de la cavité. Trop lourd, je peine à le remonter avec un bras en moins et les épreuves des jours précédents. Je grommelle d’efforts, laissant échapper des bulles qui remontent en me narguant. Je suis à bout de force et cet idiot de forgeron ne reprend pas conscience. Je le secoue en espérant le réveiller mais rien à faire, il est complètement dans les vapes. Je lève les yeux vers la lumière, bientôt à court de souffle. Je vois un corps plonger à nouveau et se diriger vers moi. Le plus grand du groupe vient me prêter main forte. Le voir attraper le forgeron me donne un regain d’énergie. Nous parvenons à le ramener à la surface où la main de l’Humoran l’attrape pour nous aider à le sortir de l’eau qui continue de monter. La tête hors de l’eau, j’entends les enfants qui nous supplient en criant de nous dépêcher. William, toujours inconscient, est porté par le grassouillet et le maigrichon.

" Il faut remonter ! Dépêchez-vous ! "

Hurle la rouquine comme si nous n’avions pas compris la situation. Avec le plus âgé, nous soulevons Kozuto et quittons cette cavité de la grotte qui continue à se remplir d’eau.


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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » lun. 18 févr. 2019 19:53

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Ma main frappe la joue du forgeron. Aucune réaction, pourtant aucun doute, il est en vie. Sa poitrine se soulève de manière régulière et une fois en sécurité près de notre campement de fortune j’avais posé mon oreille contre sa poitrine et distingué les battements de son cœur. William avait rapidement repris connaissance, plus de peur que de mal pour lui, même si il se plaint de douleurs à la jambe. Les autres gamins, extrêmement bruyants, le rassurent et lui expliquent à quel point ils sont heureux qu’il soit encore en vie. Je gifle Kozuto une seconde fois, il réagit, ouvre les yeux et se penche sur le côté pour tousser un peu d’eau. Soulagé de le revoir conscient, je me redresse pour m’occuper plus sérieusement du feu qui menace de s’éteindre. J’essaie de contenir mes tremblements de froid et récupère du petit bois que nous avions eu l’intelligence de ramasser avant d’entrer dans la grotte et que la pluie trempe tout ce qu’il y a de combustible. Je dépose du petit bois avec parcimonie avant de l’attiser d’un souffle long et léger. Le bois sec prend rapidement et le feu repart, attirant les enfants dont ceux qui sont mouillés claquent des dents. Je fouille dans mes affaires, cherchant dans les vivres quelque chose qui peut faire un repas chaud. Je distribue également nos couvertures et leur conseille de retirer leurs vêtements trempés pour les faire sécher. Les garçons s’exécutent sans attendre, ne gardant que les sous-vêtements avant de se protéger du froid avec les couvertures sèches. La rouquine me jette un regard méfiant mais la fille silencieuse lui pose une main sur l’épaule sans dire un mot, ce qui semble la convaincre de suivre mon conseil. Je me tourne pour leur laisser leur intimité, de même que tous les autres garçons présents. Heureusement, le maigrichon au nez pointu, le grassouillet et l’Humoran ne sont pas trop mouillés et peuvent se permettre de rester habillé, autrement j’aurais manqué de couverture. Kazuto se reprend peu à peu, jurant de plus en plus fort. Les gamins se taisent, écoutant attentivement les diverses envolées lyriques du forgeron qui finit par se redresser, les sourcils froncés, le regard dardé vers la bande de jeunes spéléologues.

" Merci monsieur. "

Le regard du forgeron s’apaise. William, les lèvres encore violacées par le froid venait d’éviter une scène de colère. Kozuto pousse simplement un râle las avant de s’asseoir près du feu pour se réchauffer. J’arrive à concocter un repas chaud en quelques minutes, le temps pour les enfants de se présenter. C’est le maigrichon au nez pointu qui prends la parole, l’air encore un peu affolé.

" Mon nom est Maurice et voici mes amis. Celui que vous avez sauvé s’appelle William, à côté de lui c’est Joe "

Dit-il en désignant le plus âgé qui nous fait signe. Il se tourne ensuite vers les deux filles, blottit dans leur couverture. Il désigne la rouquine et la présente sous le nom de Hiolde, quant à sa voisine silencieuse elle se nomme Millie. Il présente ensuite l’Humoran sous le nom de Calas et le grassouillet se nomme Dulan.

" Ça n’explique pas d’où vous venez et ce que vous foutez dans une caverne au milieu de nulle part. "

" Nous venons de Gamerian et nous sommes à la recherche d’un trésor. "

" Un trésor ?! Mais pourquoi chercher un trésor à votre âge ?! Vos parents sont sûrement morts d’inquiétudes ! "

"Arrêtez de nous infantiliser ! Nous sommes assez grands pour nous débrouiller tout seul !" Rugit la rouquine.

" Ah bah ça on a vu ! Redit le en regardant dans les yeux ton camarade. Il serait mort si nous n’étions pas intervenus à temps ! "

William blêmit d’avantage tandis que Hiolde foudroie le forgeron du regard sans pour autant la ramener à nouveau. Maurice reprend la parole pour calmer les tensions.

" De toute manière nos affaires sont perdus, tout doit être sous l’eau maintenant. Notre première aventure est un échec. Il faut rentrer maintenant. "

Les autres acquiescent, même la rouquine qui ne semble toujours pas avoir avalé les paroles du forgeron.

" On devrait se détendre un peu. Finir de manger, se reposer et retourner à Gamerian dès demain quand l’orage sera passé. "

Kazuto renifle et mange sans se défaire de son visage courroucé. Les enfants se servent généreusement, je doute qu’ils aient mangé à leur faim ces derniers jours. Quelle bande d’inconscients. Le pire est évité mais je n’arrive pas à me défaire de l’idée qu’il aurait pu arriver malheur si nous n’étions pas passées par ici ou pas à ce moment-là. Je mange également en silence, contenant mes grommellements de douleurs à chaque mouvement de mastication. Les gamins continuent de discuter entre eux quelques minutes après le repas mais il me suffit de détourner le regard quelques instants pour que le silence tombe dans l’alcôve qui nous sert de refuge. Ils se sont tous endormis. Il en va de même pour le forgeron. Je soupire et tend l’oreille vers l’extérieur. Seul les quelques coup de tonnerres me parviennent. Je pense que nous sommes en lieu sûr pour cette nuit. Je retire le haut de mon équipement pour l’essorer et le laisser sécher pour éviter de m’endormir avec une tenue trempé. Je remets du bois sur le feu pour qu’il tienne la nuit et m’installe à côté en attendant le sommeil qui ne devrait pas tarder.


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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » mar. 19 févr. 2019 15:53

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" Hiolde ?! Où est Hiolde ?! "

J’ouvre un œil tandis que je sens de l’agitation gagner la grotte. Plusieurs des enfants se mettent à scander le nom de la rouquine. Les flammes du feu de camp sont encore bien vivaces, ce qui me laisse penser que je n’ai pas dormi longtemps.

" Calas aussi a disparu ! " ajoute le grassouillet.

Les gamins se mettent à paniquer, à la recherche de l’Humoran et de la rouquine, hurlant leurs noms à tout va. Avec Kazuto nous nous redressons presque en même temps, avec lenteur, épuisés par les derniers jours de voyage et encore gênés par la douleur des coups reçus. Il n’y a que deux personnes qui ne s’affolent pas. Millie, la jeune fille aux cheveux courts, gardant décidément son sang-froid en toute circonstance et William qui reste blottit dans sa couverture sans oser lever le regard, comme un enfant qui vient de faire une bêtise. Mon compagnon de route le remarque aussi et s’approche doucement de lui avant de s’accroupir.

" Tu sais quelque chose mon garçon ? "

Il secoue la tête, mauvais menteur, il baisse d’avantage les yeux et se recroqueville pour se faire encore plus petit. Ses amis s’approchent de lui pour lui demander de dire ce qu’il sait ce qui lui arrache quelques larmes avant de finalement avouer qu’il a vu la rouquine et l’Humoran repartir vers le fond de la caverne.

" Elle m’a demandé de ne rien dire. Elle veut récupérer nos affaires. " Dit-il entre deux sanglots.

"La petite idiote. " Peste Kazuto en se redressant.

" Calas peut voir dans le noir, c’est pour ça qu’elle lui a demandé de l’accompagner. Elle n'a sûrement pas supporté votre commentaire et veut vous prouver le contraire. "

Tandis que Kazuto maudit la stupidité du raisonnement je ramasse mon sabre et prépare une torche. Je vide ma bourse en cuir pour la mettre par-dessus le bout qui doit brûler, espérant ainsi la préserver de l’humidité. Je me sers d’un fil de pêche pour serrer la bourse aussi fort que je le peux. Le forgeron m’interpelle.

" Qu’est-ce que tu fais ? "

" Je vais les chercher. "

" Je viens avec vous ! " S’empresse de dire Joe, le plus âgé de la bande.

" C’est trop dangereux. "

" Vous aurez besoin de moi pour retrouver le camp. "

" Je viens aussi. "

J’entendais Millie pour la première fois et son ton est sans équivoque, elle ne donne pas l’impression de me laisser le choix. Son regard est aussi déterminé que celui de son camarade. Je soupire.

" De toute manière si je vous dis non vous viendrez quand même alors allons-y… "

Je leur laisse un instant pour se préparer avant de repartir vers le fond de la caverne avec les autres qui vont nous permettre d’y voir clair. La cavité où se trouve le puits est complètement inondée à présent et rend la galerie méconnaissable. S’y diriger va être difficile en plus d’être dangereux, se perdre dans un conduit immergé, dans le noir et sans savoir où cela mène à de quoi rendre claustrophobe.

" Il n’y a pas beaucoup de chemin à parcourir sous l’eau. A quelques mètres il y a un autre plateau où nous serons à nouveau au sec." me rassure Joe.

J’incline la tête. Il n’est visiblement pas idiot et lui a déjà arpenté cette partie de la caverne. Je m’avance dans l’eau glacé, frissonnant quand elle m’atteint la ceinture. Les gamins m’accompagnent sans ciller, prêt à tout pour sauveur leurs compagnons.

"Je veille sur les autres. Faites attention à vous."

Après un dernier regard nous plongeons dans les eaux froides et obscures de la caverne.

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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » mer. 20 févr. 2019 19:48

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J’ai l’habitude de nager, proche des rivages ou en haute mer. Immergé dans une eau salée où il n’y a aucun obstacle, où l’obscurité est due aux yeux clos pour ne pas se les faire irriter par le sel. L’expérience que je vis en ce moment n’a rien de semblable. L’eau est glacée et si je ne vois rien c’est parce qu’aucune lumière n’est présente. Je suis forcé d’utiliser mes mains pour sentir les parois de roches avant que ça ne soit ma tête qui les détecte. Il n’y a pas le bruit des vagues, seulement celui des brasses des gamins qui m’accompagnent et parfois celui d’un rocher qui se détache pour couler et toucher le fond invisible. L’impression de malaise est à la limite du supportable. Je tiens bon, pensant à la rouquine et son camarade qu’il faut sauver de l’autre côté de cette galerie inondée. Je suis les directives que m’a données Joe. Serrer à droite et remonter dès que c’est possible. Ça ne dure qu’une poignée de secondes mais cela me semble une éternité et me demande plus de force que je ne l’aurais cru. Nager en gardant une main tendue vers la droite pour sentir la paroi sans s’en éloigner et une autre au-dessus de ma tête pour remonter dès qu’elle ne touche plus de roche dure. J’aimerais ne plus jamais revivre ça malgré le fait de savoir que pour retourner auprès des autres je devrais forcement repassé par ici.

Je reprends une bouffée d’air en revenant à la surface. L’obscurité est totale mais l’écho que j’entends provenant sans doute d’une cascade un peu plus loin me laisse croire que la caverne dans laquelle nous sommes est immense. Immense et remplie d’eau. Joe m’interpelle à ma droite et derrière moi une inspiration suivie d’une légère quinte de toux me rassure sur le fait que nous avons réussi tous les trois à passer cette épreuve qui est bien plus difficile qu’elle ne parait. Grâce à Joe nous parvenons à nous hisser sur une zone non immergé. Toujours plongé dans le noir, je fouille mes affaires à la recherche de ma torche. Malheureusement ma bourse de cuir n’a pas suffi à la préserver de l’humidité. Nous voilà condamnés à progresser dans l’obscurité, dans un lieu inconnu probablement rempli de pièges mortels.

" Laissez-moi faire. " Intervient la jeune fille.

Soudain une lueur. Une flamme apparaît dans sa main, ne dégageant aucune chaleur mais suffisante pour éclairer à quelques mètres aux alentours. Elle la dirige vers la torche et je l’aperçois sécher en quelques minutes avant de prendre feu. Je brandis la torche tandis que Millie se sert encore de sa magie pour sécher nos vêtements et augmenter la température autour de nous, nous préservant de l’hypothermie. Cette fille est donc un mage, c’est très impressionnant à voir à l’œuvre et elle semble bien maîtriser ses pouvoirs pour une fille aussi jeune. Nous restons sur place une dizaine de minutes le temps de se sécher avant de continuer notre progression, guidés par Joe.

Mise à part le bruit de la cascade que nous ne discernons pas, la caverne est absolument silencieuse, troublé par le bruit de nos pas. La torche permet de voir un lac souterrain percé de stalagmites et stalactites immenses. Nous progressons sur une étroite bande de roche qui en fait le tour, prenant soin de ne pas glisser dans l’eau.

" Si nous sommes venus ici c’est parce qu’on nous a dit qu’un trésor y est caché. C’était un camp de brigand avant et ils ont dû s’enfuir en laissant leur fortune. "

" Qui vous a raconté ça ? "

" Un type à Gamerian. "

" Et vous l’avez cru ? "

" On en avait assez de rester à rien faire. Nous sommes tous débrouillards et nous avions soif d’aventures. "

Je soupire, je peux comprendre cette argument, c’est le même qui m’a poussé à aider le forgeron à remporter le concours de forge. Sauf que je suis bien plus âgé qu’eux.

" Vos parents sont au courant ? "

Joe laisse un échapper un rire avant de répondre.

" Non. Jamais ils ne nous auraient laissé partir. Aucun de nous ne vit dans une famille aisée, on s’est dit que revenir avec un tas de richesses suffirait à nous faire pardonner… Bien sûr si on rentre bredouille… "

Il marque une pause avant de poursuivre.

"Hiolde a les parents les plus stricts mais aussi les plus pauvres. C’est peut-être ce qui l’a poussée à persévérer. Par ici."

Nous arrivons à un embranchement, tout droit la bande étroite longeant le lac se poursuit et à droite une galerie plus large mais plus accidentée offre un chemin peu pratique pour monter vers l’inconnu. Nous empruntons la galerie et alors que le bruit de la cascade se fait de plus en plus lointain, c’est maintenant le bruit de nos soupires d’efforts qui brisent le silence. L’ascension dure quelques minutes et débouche sur une autre caverne qui semble immense elle aussi. Je pousse du pied un caillou qui met de longues secondes avant que je l’entende tomber dans de l’eau.

" Nous y sommes presque. "

Il s’engage à gauche pour emprunter un large chemin. Nous progressons encore de longues minutes ou je contemple ce que la lumière de ma torche me permet de voir. Une cathédrale souterraine ou aucune forme ne se ressemble et où l’écho de nos voix me laisse penser que la taille de cette cavité est inimaginable. Soudain un cri me fige sur place, un cri de jeune fille qui se répercute sur toutes les parois de la grotte et donne l’impression qu’il vient de partout à la fois. Joe s’écrie :

" Hiolde ! Vite ! "


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Oljyn
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » dim. 24 févr. 2019 16:40

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Nous courrons à toute vitesse sans prendre en compte le risque de glisser et de tomber dans le ravin. Je suis de près Joe pour ne pas perdre ma seule source de lumière et m’assure de temps en temps que Millie est toujours derrière nous. Les cris se poursuivent et une nuée de chauves-souris nous foncent soudainement dessus. Elles ne font que passer, chassées par le bruit inconvenant qui perturbe leur sieste. Nous nous immobilisons le temps qu’elles passent en nous protégeant le visage avant de reprendre notre folle course. Au détour d’un rocher fendu, Joe tourne brusquement à gauche et cri le nom de son amie. La lumière de la torche révèle une monstruosité accrochée au plafond. Une espèce de pieuvre aux longues tentacules et possédant une mâchoire capable de gober un enfant. C’est d’ailleurs ce qu’elle essaie de faire avec la rouquine qui hurle en évitant que la mâchoire hideuse se referme sur son crâne, maintenue hors de portée grâce à l’aide de l’Humoran. Je dégaine mon sabre et lui vient en aide, tranchant nette le tentacule qui tenait Hiolde. Celle-ci, libérée de la force qui la soulevait tombe au sol en emportant Calas avec elle. Le tentacule coupé se crispe, se torsade alors que les autres viennent vers moi. L’un me saisit le bras, l’autre la jambe. Sans attendre j’en tranche un alors que la bouche muni de centaines de crocs pointus ressemblant à des crochets claquent à côté de mon crâne. Ses six tentacules restants s'abattent sur moi, fouettant mes jambes et mon torse avant d'essayer de me saisir. Joe intervient en attaquant la pieuvre avec sa torche. Il est repoussé rapidement et mit à terre, frappé au ventre par un des longs appendices.

Calas revient m'aider, saisissant ce qui maintient ma jambe pour m'en libérer. La créature claque encore des mâchoires alors qu'elle m'en rapproche d'avantage. Une boule de feu traverse la salle pour frapper la pieuvre qui pousse une espèce de cri ressemblant à un raclement de pierres. Elle me lâche pour mieux s'agripper aux aspérités du plafond rocailleux. Une deuxième boule brûlante la touche, manquant de la faire tomber. Je saisi un tentacule coupé pour l'empêcher de fuir. Je tire dessus de toutes mes forces. Pour se débarrasser de moi, elle décroche du plafond deux autres de ses membres pour m'atteindre. Calas et Joe réagissent rapidement et s'en emparent, tirant à leurs tour pour faire tomber la créature. Elle tient bon, s'accrochant de ses derniers moyens aux stalactites. Une troisième boule de feu lui fait lâcher prise. Elle tombe au sol et je me rends compte alors qu'elle est loin d'être impressionnante. Si ses tentacules atteignent facilement les deux mètres, la créature en elle-même m'arrive à peine aux genoux. Elle se recroqueville sur elle-même avant d'essayer de remonter aux parois. Nous l'en empêchons, Hiolde et Millie viennent nous assister pour la maintenir au sol. Je m'en approche avec ma lame pour lui trancher la tête alors qu'elle la tend vers moi en dernière tentative pour me mordre.

La tête tombe au sol et les tentacules font de même après quelques convulsions. Nous reprenons notre souffle et notre calme, debout devant le monstre vaincu, excepté Hiolde qui fond en larmes en allant se réfugier dans les bras de l’Humoran. Sans son intervention, elle serait morte, privée de la moitié de son corps que cette pieuvre serait en train de digérer dans un recoin de la caverne.

Je jette un regard circulaire dans la cavité où nous nous trouvons. Il doit s’agir de leur ancien campement. Sept paillasses rudimentaires sont disposés autour d’un reste de feu de camp, quelques restes de nourriture, des affaires éparpillés un peu partout, des sacs, des armes.

" Récupérons tout ça et on vous ramène chez vous. "

Les deux garçons acquiescent et m’aident à ramasser ce qui traîne. Calas récupère un arc et un carquois, Joe saisit une masse qui doit lui appartenir, Millie rassemble les vivres qu’elle regroupe dans des petits sacs. Hiolde sèche ses larmes avant de se mettre au travail à son tour.

" Vous êtes prêts ? "

Ils se redressent et nous nous figeons tous l’instant d’après. Un bruit étrange se fait entendre, une sorte de cliquetis suivi d’un reniflement rauque venant de l’entrée de la cavité. Moi qui en suis de dos je ne peux qu’apercevoir les regards horrifiés des enfants face à moi. Je tourne doucement la tête, sans geste brusque.

Une créature bien plus terrifiante et répugnante que la pieuvre vient de pénétrer dans la cavité. Un corps gris, rachitique, de la taille d’un des enfants qui m’accompagne. Une apparence qui me fait penser à un gobelin mais qui, en même temps, n’a rien à voir avec eux. Celle-ci possède un aspect plus bestial, plus sauvage. Ses paupières ont recouverts totalement ses yeux et des cornes courbés y prennent leur base pour pousser jusqu’à l’arrière du crâne. Evidemment, la créature est pourvue de griffes et d’une bouche difforme, sans lèvres, laissant apparaître des crocs acérés. L’étrange fente au milieu de son visage qui doit lui servir de nez s’agite, provocant le reniflement qui nous a averti de sa présence. A nouveau, ce son étrange de cliquetis mat se fait entendre et des membranes plus souples sur ses cornes se mettent à vibrer. La bête pivote son visage vers nous et montre les dents. La créature est clairement aveugle. Sans gestes brusques, je me baisse pour ramasser un caillou avant de le lancer de côté pour qu’elle se jette dessus et libère le passage. Le projectile rebondit sur la roche en produisant un bruit fort. Pour autant, l’étrange gobelin ne se détourne pas de nous. Pire il s’avance de quelques pas avant de nous charger.

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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » jeu. 28 févr. 2019 09:29

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La rouquine ne parvient pas à retenir un hurlement. La créature bondit sur moi, malgré sa carrure chétive, elle possède de la force. Retenant ses griffes à l’aide de ma lame, j’ai du mal à la repousser.

" Courrez ! "

Criais-je à l’attention des gamins, conscient que je ne pourrais pas tenir longtemps. Ils hésitent un instant avant que Joe et Millie donnent l’impulsion. Ces deux-là sont sans hésiter les deux plus matures de la bande. Ils passent à côté de nous et attirent l’attention du Sekteg. Je saisis l’occasion pour lâcher de la pression d’un côté de la lame, laissant la créature s’emporter par sa propre force. Je pivote pour accompagner son mouvement avant de lui porter un coup de poing au visage. Elle tombe sur les genoux et j’en profite pour m’enfuir à toute jambe avant que la lumière de la torche ne disparaisse. Elle ne met pas longtemps à se redresser pour me poursuivre. Je sens qu’elle me rattrape et qu’elle n’est plus très loin. J’entends le son de ses griffes raclant la pierre, sa respiration haletante de plus en plus forte. Je parviens sur la corniche au bord du gouffre obscur. Je me baisse et tourne brusquement à droite vers les enfants qui ne sont qu’à quelques mètres. Le monstre qui avait bondit me loupe. Il manque de tomber dans le ravin mais parvient à se rattraper à l’aide de ses griffes avant de foncer sur moi à nouveau. Je l’entends encore me rattraper, je n’ai aucune chance de le semer et en plus je risque de mettre les enfants en danger. Je dégaine mon sabre et me retourne brusquement pour venir cueillir la créature. Mais il n’en est rien. Celle-ci esquive ma lame en sautant contre la paroi et y rebondit pour me sauter dessus. Le choc me met à terre, au bord du gouffre, je peux sentir le vide obscur et glacé sous mes épaules et les griffes du monstre s’y planter alors qu’elle ouvre grand sa gueule baveuse pour dévoiler ses crocs. La lumière de la torche s’éloigne, bientôt je serais dans le noir et je me ferais dévorer vivant. Elle se dresse de toute sa hauteur, peut être fière d’avoir attrapé une si grosse proie. Je tourne la tête vers les gamins qui sont, je l’espère, assez loin maintenant. Mais tout ce que je peux voir c’est une boule lumineuse, une boule flamboyante qui me fonce droit dessus. Une boule de feu !
Elle percute le Sekteg, brisant la prise qu’il avait sur moi. Une flèche vient ensuite se ficher dans son torse et lui arrache un second cri de douleur. C’est maintenant ou jamais. Je frappe son visage, l’hébétant à moitié avant de la saisir au torse de mes deux mains et de soulever la créature qui ne doit pas faire plus de quarante kilo. Je glisse mon pied sous son ventre et dans un dernier effort la fait basculer au-dessus de moi pour la jeter dans le ravin.

Elle comprend ce qui l'attends et s'agrippe de ses griffes à mon avant-bras, taillade encore ma chair et m'emporte avec elle dans sa chute. J'essaie de me retenir de ma main libre, raclant mes ongles contre la roche brute. Rien à faire, je bascule dans le gouffre sans fond et même si le monstre lâche prise pour tomber dans les ténèbres, ce n'est plus qu'une question de secondes avant que ce soit mon tour. Quelque chose m'agrippe le pied avant que je ne tombe. Puis mon autre pied, mes chevilles et je me sens remonter. Je tortille mon cou pour regarder par-dessus mon épaule et voit les enfants redoubler d'efforts pour me ramener, le visage rouge, gonflé et transpirant. Ils parviennent à me hisser sur le plateau rocailleux. Je me roule sur le dos pour ne plus voir le vide. En dessous, j'entends le hurlement de la bête avant qu'elle n'atteigne les eaux. Il y a quelques sons de mouvement aqueux avant que le silence ne retombe sur la caverne, perturbé par nos souffles haletants. La douleur des griffures se révèlent maintenant, lancinante. Je me redresse en me tenant mon bras douloureux. Ce n'est pas beau à voir, mon épaule dégouline de sang et mon poignet est tailladé de toute part.

"Est-ce que ça va ? " s'inquiète Joe.

Je me contente d'acquiescer sans pouvoir détourner le regard de l'état de mon bras. Des coups et des blessures j'en ai reçu mais jamais je n'ai été dans cet état. Une peur soudaine me saisit la poitrine. La crainte de mourir de blessures trop virulentes, de mourir dans la douleur après une lente agonie, après avoir perdu tout mon sang. Un hurlement venant du gouffre me ramène à la raison. La créature n'est pas morte et pire que ça, son hurlement reçoit une réponse et une dizaine de cris résonnent dans la caverne. Nous retenons notre souffle pendant que Calas scrute les alentours de sa vision nyctalope avant de s'écrier.

"Ils approchent !"

On m'aide à me relever sans attendre une seconde de plus et nous nous précipitons vers la sortie de la grotte.


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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Oljyn » jeu. 28 févr. 2019 09:31

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Nous courrons à toutes jambes, fuyant les cris et les raclements de griffes qui se rapprochent de toute part. Nous atteignons la galerie accidentée, plus facile à descendre qu'à remonter. Cela dit elle reste dangereuse et le risque de glisser et de se casser une jambe dans la précipitation est élevé. Notre progression est ralentie et les gobelins bestiaux gagnent du terrain.

Millie se tourne vers moi et me fait signe d'avancer avant d'agiter ses mains. J’obéis, comprenant qu'elle veut lancer un sort, sans trop m'éloigner en cas de problème. Elle ferme les yeux un instant pour se concentrer tandis qu'un premier Sekteg apparait dans la lueur de la torche qui s'éloigne. Je lâche mon bras gauche blessé pour saisir mon sabre, le serrant fort dans ma main. J'ai peur de mourir dans la douleur mais je suis prêt à me sacrifier pour les sauver. Je m'avance pour empêcher le Sekteg d'attaquer la jeune mage mais c'est inutile. Millie dresse ses bras, élevant un mur de flammes sortant de nulle part et bloquant le passage. La créature cesse d'avancer, grogne et hurle contre la paroi brûlante. J'attrape Millie qui est essoufflée, éprouvée, sans doute par son dernier sort. Je range mon sabre et ignore la douleur de mon bras pour la mettre sur mes épaules et continuer la fuite, largement éclairé par les flammes du sort. Nous rejoignons les autres sur la corniche étroite bordant le lac souterrain.

"Courrez !" Criais-je encore.

Nous reprenons notre course, épuisés mais tellement effrayés que nous ignorons toute douleur et toute fatigue pour sortir d'ici en un seul morceau. Nous arrivons au bout du chemin étroit. Je m'assure que Millie est encore consciente avant de plonger dans l'eau. Le froid et l'obscurité, à nouveau. Toute lumière disparaît, je saisis la main de Millie pour la guider vers la sortie avant qu'elle ne manque de souffle. Je n'ai plus que mes pieds pour nager, ma main gauche douloureuse me servant à ne pas m'éloigner de la paroi qui me guide vers l'extérieur. A plusieurs reprises je me frotte le dos contre le plafond rocheux en croyant pouvoir déjà remonter. Je ne laisse pas la panique me gagner, la surface est là, quelque part, à quelques mètres à peine. Je continue à nager, m'agrippant à la paroi pour m'aider dans ma progression, écharpant d'avantage ma main ainsi que mon dos en essayant de remonter, lâchant des bulles d'efforts qui finiront irrémédiablement par me manquer et manquer à la jeune mage.

Enfin j'aperçois une lueur traversant l'eau claire. La flamme virevoltante d'une torche. Je puise dans mes dernières ressources et use de toute les forces qu'il me reste. Libérant un flot de bulles d'oxygène qui s'élèvent vers la surface en déformant la lumière salvatrice. J'ignore la douleur à mon bras gauche pour faire de grandes brassées et tirer Millie vers la surface. Elle traverse la barrière d'eau la séparant d'une bouffée d'air. Je vois ses jambes s'agiter doucement, elle est en vie. Nous sommes en vie.


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Byrnisson
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Byrnisson » sam. 16 janv. 2021 23:59

Partie III - En guerre


Chapitre I - Suite - [Précédent post ici ]

« Fouiitshh, Fouiitshh ! » - Encore un pas, rien qu’un pas de plus. Puis un autre ; et encore un autre… Cela ne cessera donc jamais. Je commence à envier nos officiers, qui voyagent confortablement installés sur leurs montures.

Nous avons quitté les reliefs montagneux depuis belle lurette, et cheminons maintenant dans les vastes plaines de l’Ynorie. D’après nos éclaireurs, l’armée ennemie occupe les plaines de Kôchii, aux portes de la cité d’Oranan. Il nous est donc impossible de rejoindre le Val d’abondance par la route, désormais bloquée. Nos tacticiens ont toutefois trouvé un chemin alternatif ; plus rapide et plus discret : le lac de Nostyla. Cette vaste étendue d’eau, jouxtant la forêt éponyme, offre des berges suffisamment larges pour permettre à notre armée de le longer. En cas d’alerte, nous pouvons également bénéficier du couvert des arbres. Seul désavantage, la forêt est fréquentée par de nombreux brigands. Plutôt gérable, quand on voyage accompagné de plusieurs centaines de soldats prêts à en découdre.

L’armée s’est étirée en un long filin qui serpente sur les berges du lac. Les pieds dans la boue, j’aperçois le détachement de tête qui installe le bivouac sur une rive éloignée. Les rejoindre nous prendra encore quelques heures. Je peste ; les innombrables piétinements de mes prédécesseurs ont transformé la berge en pataugeoire. J’ai les pieds qui collent, les jambes qui tirent et un affreux mal de crâne. Ces derniers jours, j’ai expérimenté sans ménagement ma magie. Je m’émerveille des multiples effets qu’elle peut créer, même si, pour le moment, je n’arrive pas à produire de charme plus utile que mon aura. Selon les dires de Bernas, cette dernière « Fais mousser les bourgeons » quand on la fixe trop longtemps. Cela pourrait me procurer un avantage tactique dans les inévitables confrontations qui m’attendent. Cherchant à développer une variante plus violente de cet effet, je tente de reproduire le flash qu’il m’est arrivé de créer accidentellement à plusieurs reprises.

Me connecter à mon énergie est devenu une habitude. Une simple pensée suffit. Je parviens également à n’en mobiliser qu’une partie, là ou auparavant, je la consumais sans retenue. J’essaye ensuite de la diriger vers ma main, pour la libérer d’une seule salve lumineuse. Tout est dans le dosage, je le sens ; mais je n’en maîtrise pas encore les savantes proportions. Parfois, je libère mon énergie trop vite, mais en trop petite quantité. L’effet ne produit dans ce cas pas plus de lumière qu’une vulgaire bougie. Parfois, à l’inverse, je mobilise une trop grande énergie, mais ne la libère pas assez rapidement : elle fuit bien avant d’atteindre la paume de ma main et produit un halo tout autours de mon bras.

Loin d’être désespéré, je m’acharne et m’exerce, chaque jour, jusqu’à l’épuisement de mon énergie. Ces derniers jours, néanmoins, j’en subis le contrecoup. J’écope de violents maux de têtes et de vertiges. J’ai donc un peu freiné mes ardeurs, et ne m’exerce plus qu’un jour sur deux.

« Slurp » - Cette fois-ci mon pied s’est enfoncé jusqu’à la cheville. Je lâche un juron bien vulgaire, de ceux que Bernas m’a enseignés. J’espère qu’il nous ramènera un gibier au campement pour le repas du soir ; faut-il encore que je le retrouve, car notre virée dans la boue a complètement désordonné les régiments. Depuis que nous sommes près de cette forêt, j’ai repris du service avec mes gamelles. J’en fait profiter mes plus proches compagnons, qui me le rendent bien.

« Luciole, reine de la casserole ! »– disent-ils.

À défaut d’être glorieux, le surnom me vaut les faveurs des soldats. L’un d’entre eux m’a même offert une rune après s’être délecté d’un de mes plats. Un caillou de plus, qui s’ajoute à ma collection. Je garde en tête de me renseigner un jour sur la manière de s’en servir.

« Splash ! » - Un soldat trébuche devant moi et projette une splendide gerbe de vase sur ma veste. Voyons l’aspect positif des choses. Une fois séchée, elle amortira les estocades de mes futurs ennemis.

Suite
Modifié en dernier par Byrnisson le lun. 5 juil. 2021 18:57, modifié 1 fois.

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Cromax
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Cromax » sam. 30 janv. 2021 15:23

La Fin d’une Ere
(Mission « Roseraie de Soie (Aenaria, Xël, Faëlis, Cherock)




Après une bonne heure de préparation, la fine équipe était prête à voyager. Une charrette contenant vivres et matériel de camping tirée par l’une des montures du groupe leur garantissait des nuits confortables et de la nourriture en large suffisance pour atteindre leur but. Ils partirent donc ainsi, à quatre, dûment prêts pour le voyage. Celui-ci dura un peu plus d’une semaine, et ne comporta que quelques menus désagréments : la monture de Xël essaya un jour de s’échapper à son contrôle, ruant et s’ébrouant dans tous les sens. Par chance, le groupe parvint à la maîtriser avant que le mage d’air n’en tombe. La charrette n’entrant pas aisément au sein même de la forêt de Nostyla, ils durent la contourner par l’ouest jusqu’à trouver une voie assez vaste pour l’introduire. Ils croisèrent un ou deux groupes d’humains en campements forestiers n’ayant rien à voir avec la guerre. Des bandits, sans doute, mais aucun d’eux ne tenta de les attaquer : ils avaient l’air de savoir bien trop se défendre pour faire des cibles faciles.

Enfin, en fin d’une matinée de marche, ils arrivèrent en vue du campement Thorkin, où curieusement, ils semblaient attendus de pied ferme. Un jeune homme aux cheveux platines et aux traits fins, très séduisant, barrait la route de leur arrivée, attendant en souriant chaleureusement qu’ils soient à sa portée de voix. Le soldat portait une armure de plaque aux couleurs de Kendra Kâr.


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« Soyez les bienvenus sur le Campement de guerre Thorkin de Nostyla, aventuriers. Je suis le contact dont le Général Andelys vous a sans doute parlé. »

Il fit rapidement un tour de regard du groupe, toujours souriant.

« Dame Aenaria, Ser Faëlis, soyez les bienvenus ici. Votre présence m’honore. »

Il salua également d’un signe de tête Xël et Cherock, qu’il ne semblait pas reconnaître.

« Veuillez abandonner ici vos effets encombrants, les soldats s’occuperont de les ranger dans le camp. Pour l’heure, le Général Throg’inn vous attend. »

Le jeune guerrier les mena d’une démarche à la fois féline et assurée au sein du campement. L’organisation de celui-ci était bien différente de celui de Kendra Kâr : les tentes naines, plus vastes et couvertes de peaux, étaient organisées en rangs serrés et en cercle concentrique menant à la tente centrale, où ils étaient attendus. Les regards des guerriers nains, nombreux, se pressaient sur cette expédition curieuse au sein des leurs. Lorsqu’ils arrivèrent à destination, un nain particulièrement impressionnant les attendait. Xël le connaissait bien : il avait croisé le fer en sa compagnie contre le légendaire Crean Lorener, à la Porte d’Ynorie.


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Le général nain était là, et pénétra sa tente sans un mot. Le jeune guerrier kendran invita le quatuor à rentrer à sa suite. Lorsque les volontaires pour la mission à la roseraie furent tous entrés, il les suivit à son tour, rabattant les pans de fourrure de la tente. Le général s’était assis sur une sorte de chaise en bois robuste incrusté de runes naines. D’un regard sombre, il invita les aventuriers à s’asseoir sur des sièges similaires, autour d’une table non moins robuste. Puis, il prit la parole.

« Je n’ai pas le loisir de tous vous connaître, envoyés kendrans. Ser Xël Almaran, vous me voyez fort aise de vous compter parmi ce groupe. Je suis en revanche un peu plus surpris par le choix de mes pairs humains sur l’utilité d’elfes pour ce genre de missions… »

Il lorgna d’un regard un peu sévère Faëlis et Aenaria. Le jeune soldat humain roula des yeux dans les orbites sans dire un mot, cependant. Le général coupa court à toute revendication.

« Enfin bref. Vous êtes là pour foutre des bâtons dans les roues de ces cornards de Treize, c’est tout ce qui compte. On vous l’a sans doute dit : ils squattent le Palais de la Roseraie de Soie, au Nord d’ici. Un vaste campement de guerriers garzoks et d’humains encercle ce dernier. J’serais même pas surpris de voir quelques saletés de monstres d’acier parmi eux. Votre but, ça va être de pénétrer le castel pour foutre autant de bordel que possible à l’intérieur, butant ces deux fils de chienne à l’intérieur, Crean et Khynt. Et pour ce faire, on vous a concocté un plan. »

Il adressa un regard bourru au jeunot, qui prit la parole avec aisance et charisme.

« J’ai connaissance d’un souterrain secret menant à l’intérieur de la forteresse. Son entrée est hélas en bordure du camp ennemi. Le Général Throgg’inn a consenti à user des forces des siens pour réaliser une attaque surprise à une centaine de mètres de là, pour attirer les forces qui vous poseraient souci, afin de vous permettre de rejoindre le passage secret. Une distraction dont vous devrez profiter au mieux, aussi rapidement et discrètement que possible. Suite à ça, vous devrez vous débrouiller… »

Il laissa le silence retomber, puis questionna l’assemblée :

« Auriez-vous des questions ou autres suggestions pour la réalisation de ce plan ? »

La parole était aux aventuriers.



[HJ : Vous pouvez RP librement la semaine de voyage, en détail ou de manière ellipsée selon le temps que vous accorderez à votre RP, en tenant compte des quelques péripéties proposées, et en en inventant quelques autres sommaires, si vous le souhaitez. Vous pouvez pendant cette période faire de nombreux apartés, notamment lors des campements nocturnes.
La résolution de cette réunion peut se faire sur le groupe discord, où je ferai répondre l’un et l’autre des PNJ à vos questions éventuelles.]

XP :
Aenaria : 0,5XP (discussion avec Andelys) + 0,5XP (discussion avec Faelis) + 0,5XP (discussion de groupe sur les pouvoirs) + 0,5XP (réunion et préparation)
Faëlis : 0,5XP (Discussion avec Aenaria) + 0,5XP (discussion de groupe sur les pouvoirs) + 0,5XP (réunion et préparation)
Cherock : 0,5XP (discussion avec Andelys) + 0,5XP (adieux avec Yliria) + 0,5XP (discussion de groupe sur les pouvoirs) + 0,5XP (réunion et préparation)
Xël : 0,5XP (discussion avec Andelys) + 0,5XP (discussion de groupe sur les pouvoirs) + 0,5XP (réunion et préparation)]

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Xël
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Xël » jeu. 4 févr. 2021 22:45

Une fois les préparatifs terminés nous prenons finalement la route. Après une courte conversation sur mes qualités de cavaliers il est convenu que je m’occupe de conduire la charrette. On nous fournit suffisamment de vivres et d’équipements pour voyager confortablement. Le temps est clément, agréable, difficile de croire que je prends la route pour accomplir une mission qui est à la fois la plus importante et probablement la plus difficile de ma vie. J’interpelle Cherock en le voyant passer à côté de moi sur son renne histoire de discuter un peu et d’en savoir plus sur ses tatouages arcaniques. J’ai l’air de le tirer de sa réflexion et il met un court instant à comprendre de quoi je veux parler, il entreprend de ranger son sac tout en m’expliquant qu’il a réussi à enchâsser un sort dans un tatouage en remplaçant l’encre par des fluides magiques. Il me demande si c’est si perturbant que ça en me voyant hausser un sourcil, perplexe.

« Ah bah oui carrément. »

Déjà je vois rarement des tatouages, puis les mages c’est pas non plus quelque chose de courant, même si on pourrait penser le contraire en croisant notre groupe d’utilisateurs de fluides. Alors apprendre qu’il peut regrouper les deux est vraiment surprenant.

"T'es en train de me dire que tu peux graver un sort dans la peau de quelqu'un... C'est pas dangereux ?"

Après un sourire gêné qui m’amuse il répond qu’en théorie ça ne l’est pas et avoue s’être servi de Kiyo comme cobaye, que tout s’est bien passé mais qu’il est incapable de dire ce qui va se passer dans plusieurs d’années. Il me dit avec un haussement d’épaule qu’à sa connaissance il est le seul à pratiquer ce genre de magie mais rappelle que ça peut être un avantage indéniable.

"C'est vrai que pouvoir utiliser un sort sans puiser dans sa réserve de magie c'est plutôt intéressant."

Je lâche ça sans vraiment en être certain mais si j’ai bien compris le sort devrait se servir du fluide du tatouage pour se lancer. Incertain je demande quand même une confirmation que Cherock valide et ajoute même que grâce à ça même quelqu’un qui ne possède pas de fluide pourrait se servir de cette magie ou alors que je pourrais utiliser un sort d’un autre élément. Il précise cependant qu’il n’essaierait pas de tatouer un fluide opposé.

« C’est plus prudent. »

Je me souviens du conseil du vieux mage que j’ai croisé à Oranan il y a longtemps. Ne jamais consommé de fluide de terre. L’idée est interessante, tout ce qui peut me faire économiser mes forces est bon à prendre.

« Je vais y réfléchir. Et sinon, tu disais vouloir rejoindre cette équipe pour venger ta ville natale ? »

"Si vous... Tu veux. C'est un service mutuel, ça m'aide aussi à améliorer ma technique. Et non, je ne venge pas exactement Oranan. Nous sommes en guerre depuis le début avec Omyre. Kendra-Kâr n'a pas été en première ligne, mais nous si : et en l'an 2, Crean a mené un assaut massif contre la ville. Il a été repoussé avec succès, mais non sans mal. Et maintenant qu'il n'est plus le seul des 13 a assiéger Oranan... autant diminuer la pression autant que possible. Couper la tête du serpent."

« Je vois. Tu savais qu’il était Ynorien avant ? »

Etonné, il me demande si je plaisante. Je lui raconte alors ce que j’ai lu dans le livre que m’a offert l’obscurologue. L’assassinat de son supérieur, la trahison de ses hommes, l’origine de sa haine pour l’Ynorie. Cherock secoue la tête, perplexe avant de déclarer que ça ne change rien et qu’il faut l’arrêter.

« Il est la chose la plus effrayante que j’ai vu de ma vie... et pourtant j’en ai vu des trucs degueulasses ... »

Après un haussement de sourcil, Cherock m’adresse un sourire, visiblement curieux d’en apprendre d’avantage.

« J’imagine qu’on a tous des choses à se raconter. »

Le voyage se poursuit calmement jusqu’au soir ou Aenaria se propose pour faire à manger tandis que nous nous partageons les autres tâches. Je choisis de m’occuper des chevaux, si je ne sais pas les monter correctement je sais au moins comment les soulager d’un long périple. Je les liberes de leurs sangles, leur donne à boire, à manger, les félicites pour le voyage accompli. Il n’y a que pour la monture étrange de Cherock où je me montre plus prudent même si elle à le droit au même traitement que les chevaux. Nous mangeons à notre faim, du lard cuit dans un bouillon de légumes. Je me régale et félicite l’elfe grise avant que nous entamions la première nuit de sommeil en partageant les tours de garde.

Nous nous remettons en route aux premières heures le lendemain et rien ne vient troubler la journée de voyage. Ce n’est qu’au troisième jour que Bijou mon cheval, pour une raison inconnu, me fait des misères.

« Doucement Bijou ! »

Se ruant et s’ébrouant dans tous les sens, je crains de tomber et de voir la charrette partir au loin. Heureusement les autres parviennent à la calmer nous permettant de continuer jusqu’au soir où nous remettons en place un campement comme les soirs précédents. Nous n’hésitons pas à piocher dans les vivres en quantité suffisantes pour manger à notre faim, gardant le moral et reprenant des forces pour que le trajet se passe au mieux. Faëlis me demande soudain si mes cicatrices me viennent de mes précédentes batailles. Je baisse les yeux vers mes bras, séparé de mon armure et les manches remontés, je peux en effet apercevoir ce qu’il reste des carreaux d’arbalètes qui m’ont perforés les bras. Je désigne celle à mon avant-bras droit, proche du coude.

« Celle-ci c’est la toute première, à Esseroth sur Aliaénon en essayant de repousser les armées de Vallel. »

Le souvenir des remparts de la cité me revient en tête accompagné de la silhouette de ces rats immenses capables d’escalader les murailles. Je désigne ensuite mon bras gauche, exposant mieux la marque sur mon biceps, le visage assombri par les souvenirs qui me reviennent.

« Celle là... celle là c’est pendant la bataille de Luminion quand nous avons affrontés les armées de Crean. »

L’Hinion se demande ce qui a bien pu provoquer de telles blessures.

« Oh, ce sont juste des traits d’arbalètes. Il y avait bien plus effrayant sur le champs de bataille. J’ai vu les guerriers d’élites de Lorener faucher des rangs entier de cavaliers. Sans l’aide des nains nous n’aurions pas tenu le Duché et Kendra Kâr serait aussi assiégée. »

Il s’en était fallu du peu et comme Faëlis le suggère la bataille était bien terrifiante. Il avance que la magie a dû être utile mais je me souviens seulement des sorts qui n’ont pas réussi à arrêter l’armée ennemi.

« Ils étaient trop nombreux pour que ça soit suffisant. »

Aenaria intervint, me demandant de décrire les guerriers d’élites du premier des Treize.

« On ne peut pas les rater. Leurs équipement est différent, ils sont recouverts d’acier et portent des armes pesant sans doute mon poids. Je n’ai pas eu l’occasion d’en affronter un directement mais ils sont forts, c’est certain. »

Faëlis s’inquiète d’en trouver dans le palais et voudrait savoir si j’ai pu remarquer un point faible dans leurs armures mais je me souviens qu’il était impossible de voir un morceau de chair apparaissant entre l’acier orné de piques et de pointes. Je hausse les épaules, navré.

« Comme je vous l’ai dit... je n’étais pas en première ligne, j’étais très peu équipé. Je n’ai que pu les voir de loin avant de protéger le plateau au dessus de nos têtes qui était débordé. »

L’elfe blanc me propose alors une chose étonnante, faire disparaître mes cicatrices. Je hausse les sourcils avant de les observer. C’est vrai qu’elles ne sont pas très belle mais il ne m’a jamais traversé l’esprit de les voir s’effacer. Elles me rappellent de mauvais souvenir et parfois elles me font mal quand je repense à comment je les ai obtenue mais je m’y suis habitué, c’est aussi une manière de me souvenir de l’erreur que j’ai fait pour me faire blesser et ainsi ne pas la reproduire.

"Ce n'est pas nécessaire. Elles font partie de moi. "

Faëlis semble étonné, m’observant comme si je venais de parler une langue inconnu mais il n’insiste pas. Aeneria prend alors la parole:

"Ce ne sera donc pas votre premier round sur un terrain peuplé de créatures de Crean, avez-vpus croisé des créatures de Khynt durant vos précédentes batailles, vous semblez bien connaître nos futures adversaires. D'ailleurs le vouvoiement commence a faire bien trop formel, qu'en dites-vous messieurs ?"

Avec un mince sourire je réponds que je n’ai pas hésité à tutoyer Cherock dès notre départ.

"Il me semble avoir détruit toutes les créatures de Khynt, les plus grosses en tout cas. j'ignore si il en a encore en réserve. C'est surtout Lorener qui me préoccupe pour être honnête. Je l'ai combattu aux côtés d'un géneral nain et du Duc de Luminion et nous avons eu du mal à lui porter un coup."

Faëlis déclare que nous verrons bien ce que l’avenir nous réserve et Cherock sort de son mutisme en souriant pour accepter volontiers de se montrer moins formels avant de se tourner vers moi pour dire que ses cicatrices ne sont pas si glorieusement acquises. Je rétorque que ce n’est pas vraiment de la gloire que je ressens en les voyants et Faëlis réclame d’en savoir plus sur le tatoueur. Je suis content que l’attention se tourne vers lui, me permettant de ne pas fouiller d’avantage dans ma mémoire. Il montre son bras droit, couvert de ramifications et déclare que c’est plus une honte qu’autre chose mais qu’il compte harmoniser un tatouage avec. L’occasion parfaite pour lui de parler du don qu’il possède. Le succès est immédiat et les deux elfes se montrent très intéressés. La soirée se termine sur ce sujet et nous décidons de nous reposer après avoir distribué les rotations de nuit.

Le quatrième jour est à peine perturbé par des cris qui nous alertent. En accélérant la cadence nous intervenons à temps pour interrompre un groupe de bandit qui s’en prennent à des voyageurs. Faëlis y trouve le moyen d’essayer le sort que je lui ai montré et après une charge à cheval ll fait filer une flèche doté de deux petites ailes de lumière vers les brigands. Cela suffit pour les faire déguerpir et après nous être assurés que les voyageurs ne sont pas blessés nous poursuivons notre route.

« C’était pas mal. »

Le félicitais-je avec un sourire. Je l’ai vu s’exercer à plusieurs reprises et ça commence à porter ses fruits. Le soir même il décide de se faire tatouer des éclairs venant tenir compagnie à l’étrange oiseau déjà tatoué sur son torse. Je l’observe en silence, me demandant quel sort me serait utile si je décidais de laisser le tatoueur arcanique s’entraîner sur moi, quel motif je choisirais et où déciderais-je de le placer. Un sort de vent ? D’un autre élément ? Un dessin en rapport avec le vent ? Aucune idée.

Nous atteignons les bords de la forêt le lendemain mais impossible d’y entrer directement, aucun passage n’est tracé pour laisser passer la charrette. Nous sommes forcés de contourner les bois en longeant le lac tout au long de la journée et le soir venu après m’être occupé des chevaux je décide d’en profiter pour me décrasser. Je retire mon armure au campement avant de m’approcher du lac et de me débarrasser de mes vêtements pour les nettoyer un peu, chassant la sueur et la saleté accumulé lors des derniers jours. Enfin c’est à mon tour de plonger dans l’eau, profitant de l’eau tiède pour me rafraichir. J’ai trouvé la journée particulièrement chaude et c’est un plaisir de sentir la saleté se décoller de ma peau. Je me remets debout pour me frotter les bras, repassant sur mes cicatrices en repensant à la proposition de Faëlis de les faire disparaître. Mon regard glisse alors sur celle qui taille ma poitrine de part en part avant de chercher d’une main celle balafrant mon dos de l’épaule à la hanche. Je laisse retomber ma main dans l’eau, fermant les yeux et inspirant profondément pour chasser le souvenir des créatures de Khynt et de l’ombre qui m’a infligé ce coup dans le dos. J’écarte mes doigts, laissant l’eau filer à travers mes phalanges. Je reste un moment immobile avant qu’un frisson me parcourt l’échine. Je termine alors de me laver pour rejoindre le camp, m’enveloppant dans ma couverture et accrochant mes vêtements près du feu pour les faire sécher.

Nous trouvons un passage pour pénétrer dans les bois le lendemain et il nous faut encore trois jours pour atteindre finalement le camp nain en fin de matinée où nous semblons être attendu. Un beau gosse à l’allure de prince charmant, portant une armure aux couleurs du royaume nous adresse un sourire chaleureux en nous souhaitant la bienvenue. Il se présente comme étant le contact désigné par me général Andelys et après avoir salué les elfes qu’il semble connaître il nous invite à laisser nos affaires pour aller rencontrer le général nain. Il nous mène d’une démarche étrange au cœur du campement jusqu’à un nain que je reconnais. Celui avec qui j’ai combattu Lorener à Luminion. Sans un mot il pénètre dans sa tente et nous sommes invités à le suivre puis à nous asseoir sur des sièges en bois robuste avant qu’il prenne la parole. Il semble se souvenir de moi et connaître mon nom ce qui m’étonne. Excepté notre combat, la seule chose dont je me souviens c’est de quelques mots qu’il m’a dit et que je n’ai pas réussi à comprendre avant de m’effondrer d’épuisement dans la boue. Rapidement et sans détour il nous rappelle le but de notre mission avant d’inviter d’un regard bourru le jeune Kendran à détailler le plan prévu. Assez simple, il s’agit de profiter d’une diversion pour utiliser un passage secret. Je jette un œil à mes compagnons de route quand il demande si nous avons des questions.

C’est Faëlis qui intervient en premier en demandant le nom de son interlocuteur d’une bien curieuse façon avant de demander une carte du palais dans le but d’identifier les appartements qu’auraient pu réquisitionner les deux lieutenants d’Oaxaca. Cherock s’avance ensuite pour se présenter et faire plusieurs remarques. La première concerne le passage secret, voulant s’assurer qu’il ne risque pas d’être connu de nos cibles. La seconde concerne l’attaque éclair qu’il trouve bien proche du passage, risquant selon lui de nous engloutir dans la bataille. Enfin il demande à en savoir plus sur les montres d’acier. Je pensais les avoir toutes détruites à Luminion mais il se pourrait qu’il en reste encore. En tout cas à cette question je peux y répondre et je le fais comprendre d’un regard au nain avant de me tourner vers le fulguromancien.

« Ce sont des créatures ressemblants à des insectes, plus grandes que des chevaux, faites d’acier, armés de scies tournoyantes capables de faire tomber les arbres et les murs. Elles peuvent également faire sortir une échelle de leurs thorax, assez grande pour atteindre le haut du mur d’Ynorie. Il m’a fallu une magie colossale pour arracher ses plaques d’acier à l’une d’elle. C’est plus facile de viser les points faibles situés aux articulations de ses bras, entre l’abdomen et le thorax ou au niveau des pattes, pour les immobiliser. Elles possèdent aussi une sorte d’intelligence, ou d’intuition... »

Je passe négligemment une main sur mon armure au niveau de ma poitrine avec une grimace de douleur, le souvenir de la blessure causé par celle que j’ai combattu au sommet du plateau en compagnie des autres soldats. Le général ajoute qu’il en existe plein de formes différentes. J’acquiesce, me souvenant aussi de celles qui ont répandu les flammes sur le champs de bataille. Il poursuit en répondant à Cherock qu’il n’est pas question d’attaquer le campement, seulement d’une escarmouche servant de diversion pour nous permettre de passer. C’est au tour du Kendran de s’exprimer, se voulant rassurant au sujet du passage secret. Il prévient néanmoins d’avancer prudemment pour éviter les pièges et qu’emprunter ce passage sera dans tous les cas plus facile que de traverser le camp. Il se tourne ensuite vers Faëlis pour lui adresser un sourire en refusant de donner son nom, ne manquant pas de me faire hausser un sourcil. Il annonce ne pas avoir de cartes mais s’étonne que l’Hinion n’en est pas dessiné une lors de sa dernière visite avant de jeter un bref regard à Aenaria. Mais c’est qui ce type ? En tout cas il attise la curiosité de notre archer qui ne cache pas avoir des questions à lui poser après la réunion en compagnie de l’elfe grise.

Cherock reprend la parole sans ce soucier du manège entre les trois plus belles têtes de la tente. Il dit mieux comprendre le plan prévu mais se demande si ça ne risque pas d’éveiller les soupçons de Crean, réputé pour être assez malin. Il propose un autre plan, plus compliqué, que j’ai du mal à suivre. Le nain secoue la tête pour rétorquer qu’un assaut d’envergure n’est pas recommandé et qu’une reconnaissance à déjà été effectuée pour attaquer un point important du camp. Après un instant de réflexion il admet que venant de nain cela pourrait être suspicieux mais qu’il pourrait demander au commandant de Perussac d’envoyer ses hommes ayant l’air de revanchards, signifiant un nouveau sacrifice de sa part dit-il en me regardant. J’écarquille les yeux, Perussac n’est donc pas loin. Je suis contre cette idée, les hommes de Luminion se sont assez sacrifiés. Mais ce n’est pas à moi de décider pour notre groupe, surtout si ça nous permet d’augmenter les chances de réussite de notre mission. Attristé, je déclare simplement:

"Je ne voudrais pas que mon avis mette en péril notre mission. Je préfère laisser mes compagnons prendre cette décision."

Je serre le poing, culpabilisant de ne pas avoir purement refuser une telle idée alors que Cherock reprend pour encourager le général à mener une offensive d’une plus grande envergure contre le palais provoquant deux soupires las chez le général qui explique patiemment au tatoueur qu’un tel plan va causer beaucoup de morts. Mais ça ne semble pas arrêter Cherock qui encourage le nain à nous laisser les volontaires de ses troupes et de celles de Robert pour frapper fort. Prêt à assumer les conséquences. Je ne peux pas en entendre plus et je me sens obligé d’intervenir avant qu’un bain de sang ne se dessine trop clairement.

« Je comprends l’intérêt de ce plan. Mais est-ce que c’est vraiment nécessaire de sacrifier des nains et des hommes qui seront utiles à la bataille à venir ? »

C’est le moment qu’Aenaria choisit pour se présenter et demander une carte avec les positions des points d’intérêts. Le général lui accorde un regard désespéré avant de se lever pour sortir une carte de Nirtim qu’il étale sur la table avant de singer l’elfe grise en baladant son gros doigt sur le vélin. Je ne parviens pas à retenir un sourire devant la scène malgré la gravité de la situation. Visiblement le général est fatigué de nous entendre et se fait plus clair et plus bourru. Il nous fait comprendre que le plus simple pour lui serait de nous laisser nous débrouiller mais qu’il est prêt à envoyer des troupes si nous pensons que c’est nécessaire rappelant néanmoins que le rôle de Cherock est de s’infiltrer dans le palais, pas de veiller sur ses nains.

Finalement après quelques mots le tatoueur nous invite à le suivre à l’extérieur de la tente pour décider entre nous du meilleur plan à prendre. Il résume le plan qu’il a proposé avant d’en demander plus sur mes portails. J’écoute attentivement tout ce qu’il a à dire avant de déclarer.

"Très honnêtement. Je suis plutôt contre. Le Général n'a de toute façon pas de bonnes raisons de se lancer à l'attaque du camp. Que ce soit une attaque ou plusieurs, Crean se doutera de quelque chose alors autant risquer le moins de vie. Je suis d'avis de nous contenter du plan qu'il nous propose.

En ce qui concerne mes portails c'est assez simple. Je peux en user autant que je veux si ils sont situés à proximité, dans mon champs de vision. En revanche si il s'agit d'une zone éloigné alors j'aurais besoin de repos. Du palais, je pourrais sans doute nous ouvrir un accès jusqu'à ce camp, voir peut être jusqu'à Oranan. En revanche je pense être un peu juste pour atteindre le camp de Kendra Kâr. Disons que plus je dois le maintenir longtemps pour laisser passer du monde et moins je peux aller loin."


Aenaria est plutôt d’accord avec moi et juge inutile de coordonner autant d’attaques, préférant une attaque rapide que nous pourrions rendre plus destructrice avec nos sorts. L’avis de Faëlis va aussi dans mon sens et je me sens soulagé de ne plus avoir autant de vies impliqués dans notre infiltration. Cherock accepte notre avis et nous rentrons à nouveau dans la tente pour lui donner notre décision de suivre son plan initial.

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Akihito
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Akihito » ven. 5 févr. 2021 00:04

Dans le chapitre précédent...

Evénement : La fin d'une ère.

4 : Voyage initatique.

Les préparatifs s’enchaînèrent, et bientôt la charrette fut amenée dans les étales. Restait à savoir qui allait tirer la charrette. Et se souvenant de paroles prononcées par Xël, plus tôt…

« Xël si vous êtes si peu à l'aise sur un cheval, pourquoi ne pas prendre les rênes de la charrette ? Ce sera plus simple que de le monter.

- Pourquoi pas ! Espérons juste qu’il ne se barre pas au galop dans la forêt comme la dernière fois !

- … Mieux vaut s’abstenir de vous confier nos provisions, dans ce cas.

- En plus, je suis plutôt gourmand, » ajouta-t-il dans un sourire, avant d’assurer qu’il n’y avait normalement pas de problème. L’affaire fut entendue, et Akihito alla préparer Brume pendant que Xël attelait sa monture gracieusement prêtée par l’armée.

« Akihito ? C'est quoi cette histoire de tatouage ?

- Mmh ? Ah oui, les tatouages arcaniques. »

Il défit son paquetage de son épaule et le posa à côté de Brume, commençant à ranger ses affaires sur la selle. Il avait été un peu surpris par la soudaine question, mais il y répondit tout en ponctuant son rangement de quelques affectueux grattements dans le cou de sa renne.

« Pour faire simple, j'ai appris au cours des derniers mois à tatouer. Et j'ai eu une idée, en combinant le tatouage au sort de transfert Magique, et en remplaçant l'encre par un fluide... De créer le tatouage arcanique. Un sort qui est enchâsser dans le tatouage, expliqua le jeune homme, avant de remarquer l’air perplexe de son interlocuteur. C'est... Si perturbant que ça ?

- Ah bah oui carrément. T'es en train de me dire que tu peux graver un sort dans la peau de quelqu'un... C'est pas dangereux ?

- En théorie... Non. J'en ai déjà fait un, sur le semi-shaakt qui m'accompagnait, Ser Kiyoheïki. Et nous n'avons rien trouvé de dangereux. Après, qui sait ce qui pourrait se passer dans 1, 5, 10 ans... De ce que je sais, je suis le premier à faire une chose de la sorte, dit-il en haussant les épaules. Mais ca peut être un avantage indéniable.

- C'est vrai que pouvoir utiliser un sort sans puiser dans sa réserve de magie c'est plutôt intéressant… Si c’est bien ce que ça fait ?

- C'est ça. Le fluide dans le tatouage sert d'énergie pour le sort. Et c'est aussi ce qui permet à une personne ne possédant pas de fluides de s'en servir malgré tout. Si je vous tatouais un fluide de foudre, par exemple, vous pourriez utiliser un sort de foudre, même si vous n'en possédez pas naturellement. »

Il ajouta avec un air plus sérieux.

« Mais je ne pense pas qu'un tatouage avec un fluide opposé à ceux que la personne possède naturellement soit possible. La réaction pourrait être terrible, alors je n'en ferai pas. »

L’aéromancien approuva cette mesure de sécurité, avant d’en demander plus à Akihito sur ses motivations pour rejoindre la guerre. L’Ynorien résuma rapidement l’affaire.

« Nous sommes en guerre depuis le début avec Omyre. Kendra-Kâr n'a pas été en première ligne mais nous, si. Et en l'an deux, Crean a mené un assaut massif contre la ville. Il a été repoussé avec succès, mais non sans mal. Et maintenant qu'il n'est plus le seul des 13 à assiéger Oranan... Autant diminuer la pression autant que possible. Couper la tête du serpent.

- Je vois. Tu savais qu’il était Ynorien avant ?

- Ynorien ? Crean ? Tu plaisantes ? »

L’enchanteur ébahi écouta son interlocuteur lui raconter que bien des années auparavant, Crean était un gradé de l’armée Ynorienne. Poussé par ses ambitions et sa volonté de gagné, il tua un de ses supérieurs et cela lui permit de remporter une bataille. Mais ça ne le sauva apparemment pas de ses hommes, qui le tuèrent en retour pour son ignoble meurtre. Et c’était pourquoi le Premier semblait autant détester l’Ynorie. En l’évoquant, Xël avait des frissons : Crean était terrifiant.

« Tu auras tout le temps de nous en dire plus pendant ces quelques jours de voyages.

- J’imagine qu’on a tous des choses à se raconter. »

Ce petit aparté fini, toute la troupe se mit en rouie sans plus tarder : la guerre n’allait pas sagement les attendre, aussi devaient-ils gagner le plus de temps possible.

Le voyage dura un peu plus d’une semaine, comme l’avait estimé Akihito. Chaque soir, le camp était monté, et tout le monde se répartissait les tâches : un allait préparer le feu, l’autre la cuisine et les deux restants montaient les tentes. Enfin, même si dans les faits, c’était surtout Aenaria qui s’occupait de la cuisine : si Akihito s’aventura un soir à préparer le repas en obtenant un résultat plutôt convenable, la Sindelle semblait être une cuisinière confirmée. Les autres préfèrent, par facilité ou pour le bien commun, ne pas se mêler des activités culinaires.

En bonne militaire, la jeune femme proposa et organisa des tours de gardes. Si elle et Faëlis prirent une large partie de ces derniers, les deux humains insistèrent pour prendre leur part également. Les tours de garde s’enchaînèrent donc aux jours de chevauchées dans la campagne Ynorienne. Pendant leur voyage, les aventuriers avaient eu l’occasion d’échanger, en apprenant un peu plus les uns sur les autres. Ainsi, Xël était un orphelin ayant vécu à Kendrâ-Kar, et après une mission couronnée de succès sur un autre monde que celui de Yuimen, il avait gagné suffisamment de fonds pour offrir un toit plus décent aux orphelins de la cité Blanche. Une action noble qui renforçait l’image que le tatoueur se faisait du mage. Bon, la même journée, il avait perdu le contrôle de sa monture, entrainant cette dernière dans une cavalcade folle. Ils perdirent un certain temps à calmer la bête et à ramasser les quelques objets tombés lors de la longue course du cheval.

(Bon, c’est un brave type, mais il reste humain.)

(Personne n’est parfait,) approuva la Faëra. (Aurait-il eu une certaine appréciation pour les armes blanches que je l’aurais peut être choisi comme Porteur, finalement.)

(Tu plaisantes ? Il n’est même pas Ynorien !)



(Comme bon nombre de tes prédécesseurs… Mais lui, il a des fluides d’air !)

La chamaillerie mentale se poursuivit un temps, avant qu’Akihito n’y mette fin pour se concentrer sur sa aposture à cheval. Le tout nouveau cavalier qu’il était s’habitua rapidement à roulement lent de sa monture, et en se calant sur ce dernier, il arriva au crépuscule du troisième jour, à descendre de sa monture sans avoir mal au derrière ni au dos. Le camp se monta une nouvelle fois, avec une efficacité gagnée de l’expérience des deux derniers jours.

Autour d’un feu, les langues se délièrent, une nouvelle fois, avec davantage de facilité. Aenaria abattit le vouvoiement qui subsistait, et la discussion vint à parler des cicatrices de Xël, bien visibles quand il retirait son armure. Des traits d’arbalète, durement encaissés lors de sa défense du Duché de Luminion. Contre les armées de Crean et Khynt, très effrayantes selon ses propres mots. Voyant des regards glisser vers ses propres cicatrices, il prit la parole.

« J'aimerais pouvoir dire que mes cicatrices sont aussi glorieusement acquises que les tiennes.

- Plus de mauvais souvenirs que de gloire... répondit le Kendran en secouant la tête.

- Vraiment, n'avez-vous pas vous-même un passé militaire et de grandes batailles à nous raconter ? demanda à son tour Faëlis.

- Eh non, rien de très impressionnant. Quelques exploits personnels, pour obtenir les reliques que je porte aujourd'hui, mais pas de passé militaire ni de grandes batailles. »

Il découvre son bras, montrant la cicatrice en forme de ramifications courant tout le long de son membre.

« Même cette cicatrice est plus une honte qu'autre chose, mais je compte harmoniser un tatouage avec.

- Voilà bien une fort belle ambition ! Auriez-vous donc des connaissances en la matière ?

- C'est exact. Ma... Compagne, m'a enseigné cet art. Même si je l'ai poussé dans une voie différente avec les tatouages arcaniques. Mmh, c'est vrai que je ne vous l'ai finalement pas expliqué. Le tatouage arcanique est la fusion d'un tatouage et d'un sort, le Transfert Magique, qui permet de stocker magiquement un sort dans un objet. En utilisant non pas de l'encre, mais un fluide élémentaire dans un tatouage, j'ai créé un procédé permettant d'encrer un sort dans un tatouage. Le fluide se régénérant avec le temps, il permet alors d'avoir accès à ce sort de manière illimité. Enfin, il faut bien un petit temps entre deux utilisations, environ une journée.

- Voilà bien quelque chose de remarquable ! Un tel pouvoir pourrait représenter un atout de taille en donnant des chances de survie supplémentaires à bien des soldats ! Et même... Peut-être pourrions-nous en profiter pour notre mission.

- Je suis d'accord avec Faëlis, cette capacité que tu possèdes, que tu as maîtrisé Akihito, est vraiment exceptionnelle. C'est un atout, pour notre mission actuelle ou pour l'avenir. »

Des éloges venant de personnes si émérites valaient leur pesant d’or. Si Xël et Aenaria se montraient intéressés, mais encore un peu réservés, ce n’était pas le cas de Faëlis. Celui-ci était curieux, et souhaitait même expérimenter un tatouage arcanique. Les deux hommes en parlèrent le lendemain, alignant leurs montures le long du trajet. Choisissant d’abord le sort élémentaire qu’il souhaitait, il se décida finalement pour le Choc de Valyus.

« Bon choix : simple, efficace. C’est en plus le sort que je maîtrise depuis le plus longtemps : son enchâssement se fera sans aucun problème. »

Puis, alors qu’il réfléchissait à la forme du tatouage, un événement impromptu perturba leur voyage jusqu’alors tranquille. Ils longeaient alors les berges du lac de Nostyla, quand ils aperçurent deux groupes, s’affrontant ou sur le point de le faire. Les premiers avaient tout de parfaits fermiers, quand les autres à leurs habits bigarrés, leurs armes en mauvais états et leur attitude menaçante, étaient sans doute des brigands. Akihito commença à armer sa magie, prêt à faire feu, quand son regard accrocha les gestes de Faëlis qui talonnait sa monture vers l’affrontement. Il prit rapidement une flèche, l’encocha, et sous le regard stupéfait d’Akihito, une petite forme ailée et reptilienne s’enroula autour du projectile. Ressemblant fortement à un dragon tel qu’ils habitaient parfois ses rêves, ce dernier semblait lui être composé de fluides purs. La corde de l’arc claqua dans l’air, et la flèche partie à une rapidité stupéfiante en direction des bandits. Le projectile ne toucha personne, mais plus que sa trajectoire étrange, il eut l’intérêt de signaler leur présence aux malfrats. Et ils prirent la meilleure décision possible : ils décampèrent.

Sans surprise, les personnes sauvées étaient bien entendu des fermiers Ynoriens fuyant la guerre. Faëiis refusa qu’ils se séparent de leurs maigres possessions. De rapides salutations plus tard, les aventuriers reprirent leur voyage. Si Akihito se serait bien arrêté pour les escorter hors de la bordure de la forêt, connue pour accueillir quantité de bandits, il se retint pourtant. Leur mission ne leur laissait pas réellement le temps de prendre ce temps, aussi se contenta-t-il de leur conseiller de rester prudents. Le camp fut établi le soir, toujours sur les mêmes berges. Xël alla laver dans les eaux fraîches du lac, une bien bonne idée, mais Akihito souhaitait lui profiter de la clarté encore visible du soleil sur le lac pour tatouer Faëlis.

L’Hinïon s’était décidé : il possédait déjà un tatouage en forme de phénix sur le torse, reçut lors d’une aventure des plus étrange. Un tatouage qui recelait un pouvoir, selon lui, et en l’observant et en le touchant, les dons d’enchanteur lui permirent d’en saisir une partie du pouvoir : il permettait d’émettre de la lumière, à travers le corps de Faëlis. L’origine du pouvoir était assez étrange… Cela ressemblait à un fluide élémentaire, mais c’était quand même différent… Se rappelant que selon le mage blanc, c’était un tatouage reçu sur un autre monde, il ne chercha pas plus loin : ça venait d’un autre monde.

Akihito se concentra ensuite sur son nouvel objectif, sa nouvelle œuvre, et commença par observer le « support ». Et étonnamment, la peau de l’Hinïon était… Parfaite. Pas la moindre cicatrice, imperfection, ou quelconque marque. L’enchanteur, pour l’avoir entendu et vu, savait que les Hinïons étaient réputés pour leur grande beauté. Mais là, ça frôlait la perfection.

(Je te confirme, même les Hinïons ne sont pas aussi parfaits d’habitude.)

(Il est peut-être tout simplement chanceux pour être né avec un corps parfait et l’avoir garder intact ?)

(En ayant une vie d’aventure et de péril, avec son lot de blessures ? J’en doute…)

Ce n’était pas important de toute façon. Tout ce qui comptait au final, c’était que la peau de Faëlis était ferme, souple et sans imperfection : en bref, une peau parfaite pour tatouer dessus. Il voulait qu’autour de son phénix aux ailes déployées, une nuée d’éclairs se déploient pour rendre son envol encore plus glorieux. Une idée assez globale, mais qui était au moins simple à réaliser.

« Attention Faëlis, ça va vous démanger un peu, mais c’est pour relâcher les muscles. »

Le fulguromancien relâcha une petite quantité de foudre sous forme de décharges, détendant lentement les muscles de l’elfe. Si la plupart des personnes imaginaient -à raison- que la foudre crispait les muscles, c’est qu’elles n’en avaient vu que sous sa forme la plus primaire et puissante, la foudre. Mais la vérité, c’était que tout était une affaire de dosage. L’énergie de foudre stimulait le tissu musculaire et l’assouplissait sans le tendre, ce qui provoquait le relâchement des muscles. Enfin, la contribution d’Aenaria et de ses fluides matérialisa une petite flamme qui désinfecta la pointe de son aiguille.
Une fois son patient prêt à être tatoué, Akihito se mit à l’œuvre et trempa son aiguille dans la fiole de foudre. Enfonçant à petits coups de maillet l’aiguille, il apprécia et évalua l’élasticité de la peau, avant de réellement commencer à dessiner. Un à un, des éclairs pourpres se formèrent, partant en épie de part et d’autre de la base de la queue et autour des pointes d’ailes déployées de l’oiseau mythique. Aucun ne ressemblait à un autre, ayant tous une trajectoire, une allure différente. Mais ce qui les rassemblaient, c’était leur base, non connectée au tatouage initiale, et aux formes arrondies. Comme si elles étaient cachées par quelque chose d’invisible. Ce quelque chose, Akihito le révéla quand ayant enfin fini de faire les fourches de foudre, il s’attaqua à la deuxième partie de son tatouage.

Englobant les pattes, une partie de la queue et des ailes, un nuage d’orage se forma. Aidé de ses aiguilles prismatiques, Akihito voulu le corps céleste sombre, tranchant nettement avec la peau d’albâtre de l’hinïon… Mais mettant ainsi en valeur le phénix émergeant de la masse obscure. Les éclairs semblaient tous sortir du nuage et de discrètes mais visibles ramifications de fluides de foudre les reliaient, au sein de l’obscurité cotonneuse. Pour ne pas faire en sorte que le phénix se découpe clairement sur l’orage, rendant le tout peu harmonieux, Akihito repassa sur la queue plumée du phénix, jusque-là simplement encadrée par celle du tatoueur. Mais ne voulant pas interférer avec cette encre inconnue qui composait le phénix, il n’utilisa pas de fluide mais une encre classique. Le résultat final, c’était un phénix lumineux émergeant progressivement de par sa lumière d’un nuage sombre d’orage, répandant une pluie d’éclairs. Comme si, sur le passage de l’oiseau de légende, la masse crevée déchaînait l’énergie qu’elle contenait.

Dernière étape, Akihito posa sa main à plat sur le torse de Faëlis, sur son tatouage. Il sentit sous sa paume les fluides de foudre, formés en canaux, attendre impatiemment l’ajout de la magie que le fulguromancien allait modeler. Le sort vint instinctivement tant il était devenu naturel pour lui. Il déchargea son énergie, causant une petite secousse dans la poitrine de l’Hinïon. Akihito se releva, uniquement pour s’apercevoir que trop occupé par son activité, il avait réalisé les dernières touches de son tatouage à la lueur d’un orbe de lumière produit par Aenaria. Visiblement, il avait été trop absorbé par son travail, et remercia chaleureusement l’attention de la Sindelle.

Tendant la main, il aida l’Hinïon à se relever.

« Et voilà, Faëlis. Te voilà doté d’un tatouage arcanique. Ne reste plus qu’à l’essayer ! »


HRP :
  • Consommation d'une fiole de foudre 1/16
  • Ajout à la fiche de Faëlis :
    Tatouages arcaniques

    • Phénix perçant l'orage
      Description : Tatouage sur le torse juxtaposé sur le Muutos de Lumière représentant un phénix aux ailes déployées. Le nuage d'orage englobe les pattes et une partie des ailes et de la queue. D'un noir sombre, la couleur s'amenuise à mesure que le phénix émerge de ce dernier. Les éclairs, ramifiés au sein de l'orage, brillent eux d'une lueur pourpre luminescentes et semblent être libérés vers le bas et les côtés par le passage de l'oiseau.
      Contient le sort : Choc des éclairs, Rang 3
      Post du tatouage.

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Akihito
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Akihito » ven. 5 févr. 2021 14:13

Dans le chapitre précédent...

Evénement : La fin d'une ère.

5 : Stratego.

Le reste du trajet se déroula sans incident majeur. La petite troupe continua de longer la forêt, à la recherche d'un passage où leur véhicule pourrait s'enfoncer dans la forêt sans enliser ses roues dans la végétation. Hélas, tout le cinquième jour ne fut qu'une succession de trouées dans la végétation assez praticables pour des chevaux, mais pas assez pour leur voiture. Cela eu au moins l'avantage d'un cinquième soir au bord du lac, qui permit à l'équipe un décrassage en règle ce dernier. Une opportunité bienvenue, d'autant plus qu'il permettait d'économiser un tant soit peu leurs provisions d'eau pour les chevaux.

Finalement, le sixième jour vit enfin l'apparition d'une voie praticable, et visiblement empruntée récemment. Sans doute était-ce le campement Thorkin qui l'avait utilisé pour s'approvisionner en eau. Ce même soir, Akihito commença à enchanter un à un ses équipements. Selon la carte Aenaria, ils devaient arriver soit demain tard dans la soirée, soit dans la matinée du huitième jour. Et comme sa préparation du combat contre Kisp lui avait appris, un jour pour tout enchanter était éprouvant, aussi étala-t-il ses Transferts magiques sur les deux derniers soirs. Cela lui permit en outre de mieux cerner l'incrustation tunique sur ses gantelets : à chaque fois qu'il réussissait son sort, une partie des fluides étaient générés par la rune Aok. La foudre se déversait alors dans le sort parfaitement complété, ce qui économisait une bonne partie des réserves fluidiques du fulguromancien.

Évidemment, il n'avait pas été à l'abri de l'échec, et même avec son endurance magique prolongée, le Transfert Magique était un sortilège gourmand. Et même si à l'aide de la foudre qu'il générait dans son arme, il pouvait avec plus ou moins de succès réapprovisionner ses réserves, c'était un processus assez fatiguant, surtout après une pleine journée de chevauchée. Aussi ne força-t-il pas et répartit ses enchantements en deux sessiosn. Evidemment, son manège attira l'attention de ses compagnons, qui se penchèrent sur l'idée. L'heure n'était pas encore à l'apprentissage, mais l'idée semblait avoir fait son petit chemin dans leurs esprits.

Finalement, et sans doute à cause de la perte de temps pour trouve run chemin praticable, eur convoi arriva en bordure du campement Thorkin dans la matinée du huitième jour. Niché dans la forêt, un habitat assez original pour un peuple aussi montagnard, le camp s'étendait sur des dizaines de mètre, et devait bien contenir plusieurs milliers de guerriers. L'enchanteur n'en avait pas vu autant depuis son passage à Mertar, aussi la sensation de dominer par sa taille une foule lui rappela de vieux souvenirs. Tous n'étaient pas bons, loin de là; mais la plupart formaient la première aventure d’Akihito, dont il était fier. Aux abords du camp, une silhouette se démarqua par sa taille. Un Kendran, grand, aux cehveux couleurs blés, et parés d'une lourde et visiblement onéreuse armure frappée des couleurs de sa patrie. Il les repéra rapidement et les rejoignit, arborant un sourire amical.

« Soyez les bienvenus sur le Campement de guerre Thorkin de Nostyla, aventuriers. Je suis le contact dont le Général Andelys vous a sans doute parlé. »

Il salua d’un signe de tête Xël et Akihito, qu’il ne semblait pas reconnaître contrairement aux deux elfes. Ce qui était étrange, c'était que les deux concernés ne semblaient pas le connaitre en revanche, si Akihito se fiait à l'air dubitatif et soupçonneux qui flottaient sur leurs visages. Mais il n'en dit pas plus, et sous la direction du jeune homme sans nom, s'enfoncèrent dans le camp. Un camp avec la même rigueur militaire que celui du Val, mais dans un style complètement différent : plutôt que des rangées biens soignées, il avait là plusieurs cercles concentriques autour de l'état major, telles plusieurs couches de défense pour protéger le général. Un Thorkin qui, avec sa carrure titanesque pour sa race et de la hache à deux mains qui reposait à côté de lui, n'avait visiblement besoin de personne pour se défendre. D'un signe de tête, il entra dans la grande tente en peaux de bêtes. Semblable à toutes les autres du camp, hormis qu'elle faisait quatre ou cinq fois la taille de celle des soldats réguliers. Il s'assit à une table massive de bois, et invita les aventuriers à faire de même. Mais à la vue des chaises vraisemblablement pensées pour des Thorkins, le mètre quatre-vingt deux d’Akihito allait plus être ridicule qu'autre chose, aussi préféra-t-il rester debout.

Le général Throg'inn salua Xël, qu'il connaissait visiblement. Cela fit de nouveau se sentir Akihito un peu petit : depuis leur arrivée au camp du Val, tout le monde semblait connaitre tout le monde. Et lui... Devait sans doute passer pour un simple citoyen parmi les grands. Un léger apitoiement qui fut balayé par le racisme ouvertement assumé du Thorkin envers ses compagnons elfes. Une remarque qu'il éclipsa rapidement en entrant dans le vif du sujet, leur rappelant pourquoi ils étaient là : entraver les Treize, en passant à travers leurs campement établis autour du Palais de la Roseraie.

« J’ai connaissance d’un souterrain secret menant à l’intérieur de la forteresse. Son entrée est hélas en bordure du camp ennemi. Le Général Throg’inn a consenti à user des forces des siens pour réaliser une attaque surprise à une centaine de mètres de là, pour attirer les forces qui vous poseraient souci, afin de vous permettre de rejoindre le passage secret. Une distraction dont vous devrez profiter au mieux, aussi rapidement et discrètement que possible. Suite à ça, vous devrez vous débrouiller… »

Puis, il laissa l'équipe s'exprimer si besoin, s'ils avaient des questions sur le plan, sur son déroulé. Akihito s'avança, saluant poliment le Thorkin en face de lui. À la vue de sa tente imposante et de l'aura qu'il dégageait, il se doutait bien que c'était le fameux général Throg'inn qui ne s'était jamais présenté comme tel.

« Akihito Yoichi, d'Oranan. Mes respects général, j'ai en effet plusieurs questions à soumettre à vous et au contact du Général Andelys. Premièrement... »

il se tourna vers l'humain.

« Je ne sais pas comment vous connaissez ce passage secret, mais êtes-vous sûr de ce caractère "secret" ? Du peu que je sais de Crean et de Khynt, c'est que le premier est un stratège de génie et le second un homme d'une grande intelligence. Peut-être qu'ils ont découvert ce passage et l'ont piégé, condamné, ou que sais-je. Du moins, si je devais établir mon quartier général dans une bâtisse en plein territoire ennemi, la première chose que je ferais serait de chercher les accès pour ne pas me faire prendre à revers... »

Puis il fit de nouveau face au général.

« Deuxièmement, pourquoi faire une attaque de diversion si proche de notre point d'entrée ? Une centaine de mètres, ça me semble bien peu dans une bataille de grande envergure. Nous pourrions être happé dans la mêlée en un rien de temps. Vous avez sûrement vos raisons de nous fournir une fenêtre de tir aussi serrée, mais j'aimerais les entendre. Et enfin... »

A la suite de son index et de son majeur, l'enchanteur leva son annulaire.

« De quels monstres d'acier vous parlez ? Des guerriers garzoks ou humains, je vois ce que c'est... Mais ça ?

- Ce sont des créatures ressemblants à des insectes, plus grandes que des chevaux, faites d’acier, armés de scies tournoyantes capables de faire tomber les arbres et les murs. Elles peuvent également faire sortir une échelle de leurs thorax, assez grande pour atteindre le haut du mur d’Ynorie. Il m’a fallu une magie colossale pour arracher ses plaques d’acier à l’une d’elle. C’est plus facile de viser les points faibles situés aux articulations de ses bras, entre l’abdomen et le thorax ou au niveau des pattes, pour les immobiliser. Elles possèdent aussi une sorte d’intelligence, ou d’intuition...

- Pire, ajouta le Thorkin. Ce ne sont pas ses seules créations. On dit qu'il en existe de plein de formes différentes, de ces saletés métalliques. Et de plein de tailles. Avec d'autres forces, et d'autres faiblesses. Il n'a peut-être pas poussé le vice à les faire entrer dans le palais, ça sera votre chance. Ensuite, vous avez mal compris ce que nous envisageons comme plan. Il n'est pas question pour mes troupes d'attaquer le campement entier. Ce n'est qu'une escarmouche de braves prêts à mourir pour votre cause qui mènera l'assaut ce soir-là, juste le temps pour vous de vous infiltrer, et afin d'attirer les garzoks des alentours directs, d'où la proximité du point d'entrée.

- De ce que je sais, il n'a pas été révélé : il est secret depuis l'intérieur du palais aussi, et vos cibles n'y sont pas coutumières, intervint ensuite le Kendran. Ce n'est que par un concours de circonstances malheureux qu'elles ont investi ce palais. Cela reste une possibilité néanmoins. Mais croyez-moi : il vous sera certainement plus facile de traverser quelques murs de gravats qu'un campement orque dans son intégralité. Quant aux pièges... J'imagine qu'il vous faudra avancer prudemment. »

Akihito écouta les réponses des deux intéressés, plongé dans une profonde réflexion. Faëlis et Aenaria avait l'air intrigué par le Kendran, mais c'était quelque chose qui ne le concernait pas aussi n'y prêta pas attention. Il prit alors la parole.

« Je comprends mieux. Il est vrai qu'on ne peut pas vraisemblablement vous demander un assaut généralisé. Néanmoins, un raid nocturne sans réelle cible serait suspect, vous ne pensez pas ? A la limite si réalisé par une troupe de Garzoks peu futés ou d'Ynoriens désireux de protéger leurs terre, pourquoi pas. Mais par des soldats réguliers de Mertar... Ça n'aurait pas de sens. L'idée d'une diversion aura tôt fait de traverser Crean, qui pourrait être sur ses gardes. Mais j'ai peut-être une solution à ce problème : envoyer des éclaireurs en amont de notre propre groupe pour repérer les éventuels points stratégiques qui sont être stratégiquement importants. Dépôts d'armes, de nourriture, infirmerie de campagne... Bref, des cibles stratégiques pour handicaper une armée sur le long terme avec de la guérilla. Ça demandera un plus grand investissement de vos troupes j'en suis conscient, mais ça pourrait donner un impact plus significatif à votre attaque surprise, tout en couvrant notre entrée, dit-il en prenant une poignée de secondes pour rassembler son courage, avant de reprendre. Je suis prêt à faire partir des éclaireurs, si nécessaire. »

Le général Thorkin restait réticent à l'idée d'effectuer un assaut impliquant un peu plus que ses troupes. Et à mesure qu'il parlait et qu’Akihito réfléchissait, de nouvelles idées et arguments lui venaient en tête.

(Pérussac... Si je me rappelle bien ce qu'à dit Xël, c'est l'homme qui était en charge de la défense de Luminion.)

(Et ils ont de justesse été sauvés par les Thorkins.)

(Pas sûr qu'il soit prêt à se frotter de nouveaux aux forces de Crean...)

« Faire appel aux forces de Pérussac pourrait être une bonne idée, même si une attaque ciblée isolée reste quand même quelque peu suspecte. Je reste convaincu qu'une tactique de guérilla généralisée serait préférable, argua l'enchanteur en balayant d'un geste de la main l'espace autour de lui. Ce camp doit comporter des milliers de membres de votre peuple, difficile pour les sbires de la Déesse Noire d'ignorer votre présence. Surtout après la cuisante débandade que votre armée leur a infligé ; Crean serait fou de ne pas garder un oeil sur vous et vos hommes. J'ignore quel sera votre rôle dans cette guerre, et ça ne me concerne pas. Mais je suis sûr que quelques uns de vos guerriers qui harcèlent et attaquent le campement de la Roseraie serait très profitable au combat à venir. Ni vous, ni moi, n'avez envie de voir ces enfoirés venir en renforts aux forces de Karsinar. »

Puis, il abattit sa dernière carte. Si cela ne convainquait pas le général, alors il n'avait plus rien à avancer pour le faire dévier de son plan.

« Surtout, ça donnerait un sens à cette attaque. Ce n'est plus des braves qui seront prêts à mourir dans une diversion, des morts inutiles si notre infiltration s'avère être un échec. En alliant cette diversion avec une guerre d'usure, vous ferez d'une pierre deux coups.

- Vous devez savoir, homme, que j'ai des consignes précises concernant la bataille à venir en Ynorie. Nous ne pourrons, dès votre entreprise lancée, couvrir votre fuite : ce campement sera démonté et les troupes mises en mouvement vers les plaines. Laisser en arrière des guerriers en nombre restreint nous en desservirait pour la bataille à venir. Je dois quand même admettre l'intelligence de votre plan, et l'intérêt d'une attaque plus conséquente sur le versant sud de leur camp. Attaque qui ne saura être qu'une attaque éclair, visant des points stratégiques précis, bien entendu. Sachez cependant que si nous avons nous-mêmes reçu des renforts, il en est de même pour eux : c'est un campement majeur qui est présent là, et qui a pour vocation d'entrer dans la guerre également. L'attaquer aussi ouvertement ne sera pas sans conséquence. Je peux prendre, pour vous et pour la stratégie, cette décision de laisser ici un bataillon complet de mes soldats. Dans ce but. Sans que ça desserve mes instructions. Mais vous devez bien vous rendre compte du chaos que cela engendrerait, et de leur mort possible dans cette entreprise. Êtes-vous prêt à en assumer personnellement les conséquences ?

- Je ne suis pas un gradé de votre armée, de même que je ne suis pas le chef de ce groupe envoyé par Kendrâ-Kar. Alors je ne suis pas seul maître de la décision. Mais si ça ne tenait qu'à moi... Je proposerais cette option aux volontaires, dans votre armée et celle de Pérussac. C'est une mission très risquée, alors je ne souhaite pas impliquer d'autres soldats que ceux prêts à en affronter les risques. Nous ferons dès lors avec les volontaires, attaquant l'enclos et d'autres points sensibles si nous en avons les forces nécessaires. »

Il fixa le général thorkin : leur dieu tutélaire était Valyus. Et bien que leur culte était très différent de celui Kendran, les deux partageaient un certain nombre de points, dont un crucial : Valyus était le dieu de la Protection. Se saisissant du marteau dans son dos, il pose la tête sur le sol a ses pieds et appuya ses mains sur l'extrémité de son manche.

« D'aucuns m'ont apparemment attribué le titre d’Élu de Valyus... Et j'ignore encore si j'en suis digne. Mais je suivrai ses enseignements quoi qu'il arrive : je protégerai les vies des hommes qui me sont confiées du mieux que je pourrai. Et étant l'initiateur de ce plan, je ne peux qu'en prendre la responsabilité des conséquences, quelles qu'elles soient. »

Aenaria intervint, répondant avec courtoisie mais fermeté à la salutation quelque peu désobligeante du Général envers les elfes. Si il ne pouvait pas réellement lui en reprocher de l'avoir mal pris, il était plus inquiet que la tension ne monte d'un cran inutilement. Aussi décida-t-il de calmer le jeu, une fois que le Général se tourna de nouveau vers lui.

« Le plus simple pour moi et mes armées, ça serait encore que vous vous débrouilliez seuls. C'est l'option qui apporterait sans aucun doute le moins de victimes. Je suis prêt néanmoins à envoyer des troupes s'occuper de votre idée de guérilla, si c'est l'approche que vous choisissez. Mais ne racontez pas n'importe quoi non plus : votre objectif c'est de rentrer dans ce foutu palais, pas de veiller sur les Valeureux qui se sacrifieront pour que vous réussissiez. Tout élu que vous puissiez être.

- Merci des options que vous nous offrez, général Throgg'Inn. Et ne vous méprenez pas, je ne comptais pas veiller ou materner les soldats de votre armée. Je voulais juste vous assurer que mon intention n'était pas de sacrifier pour notre mission vos troupes, mais de leurs garantir un maximum la chance de sortir vivant de cette opération. Si vous nous le permettez, j'aimerais que vous nous laissiez nous concerter un instant, le temps de nous accorder sur la suite des opérations. »

D'un signe de la main, Akihito invita son groupe à le suivre en dehors de la tente. Il s'adressa à eux, une fois écartés du tumulte du camp, dans un renfoncement de toiles et de peaux.

« Bien. J'imagine que je n'ai pas à tous vous réexpliquez, vous avez tous pu entendre ce que je proposais au général. Plutôt qu'une simple attaque de diversion, plutôt une multitude pour rendre notre infiltration moins visible. On peut même encore plus semer le trouble en les lançant avec une synchronisation parfaite : Aenaria, es-tu capable d'envoyer plusieurs messages en même temps, ou dans un court laps-de-temps ? SI on décide d'emprunter cette voie, ça pourrait-être d'une grande aide. »

Akihito se tourna ensuite vers l'aéromancien.

« Xël, j'ignore la fréquence d'utilisation de tes portails, ni leur portée. Mais les garder pour nous échapper serait une bonne idée : une fois que nous serons infiltrés, les Thorkins vont se retirer pour éviter les pertes inutiles. Aussi, une porte de sortie sans avoir à traverser le camp dans le sens inverse serait plus que profitable. »

Il prit une nouvelle inspiration, avant de conclure.

« Plusieurs forces d'attaque nécessitent plus de Thorkins ou de soldats impliqués. Je ne compte pas parler en votre nom, aussi si cette idée vous gêne, autant en parler dès maintenant. Mais n'oubliez pas : nous aurons besoin d'une diversion car seuls, nous courons au suicide. Reste à savoir combien d'hommes nous sommes prêts à entraîner avec nous dans cette dangereuse entreprise. Pour ma part, j'accepterai tous les volontaires. Ces soldats sont expérimentés et conscients des risques. Bien organisé, cet assaut sera plus qu'une simple diversion : elle handicapera les forces de Crean et de Khynt. Ce qui, dans le cas où notre mission échoue, ne rendra pas les morts de cet assaut vains.

- Très honnetement, commença Xël, Je suis plutôt contre. Le Général n'a de toute façon pas de bonnes raisons de se lancer à l'attaque du camp. Que ce soit une attaque ou plusieurs, Crean se doutera de quelque chose alors autant risquer le moins de vie. Je suis d'avis de nous contenter du plan qu'il nous propose. En ce qui concerne mes portails c'est assez simple. Je peux en user autant que je veux si ils sont situés à proximité, dans mon champs de vision. En revanche si il s'agit d'une zone éloigné alors j'aurais besoin de repos. Du palais, je pourrais sans doute nous ouvrir un accès jusqu'à ce camp, voir peut être jusqu'à Oranan. En revanche je pense être un peu juste pour atteindre le camp de Kendra Kâr. Disons que plus je dois le maintenir longtemps pour laisser passer du monde et moins je peux aller loin.

- Je pense qu'avec une seule attaque de diversion de type raid éclair, nous pouvons passer. Je pense même que nous pouvons rendre notre présence à tous les quatre moins grandes si nous aidons les nains qui attaquerons avec un soupçon de magie. Entre la lumière, la foudre, l'air et le feu, nous pouvons faire une sacrée peur à nos adversaires.

- Je suis en mesure d'envoyer autant de messages que vous le souhaitez tant que j'ai du papier et le temps de les écrire. Cela dit, je n'ai rien d'un expert en stratégie militaire, mais une attaque forte et localisée serait je suppose plus efficace pour détourner les défenseurs, non ? »

Visiblement, la tactique d’Akihito n'était pas partagée par ses camarades. Pas du tout, même. La stratégie de diversion avec une seule attaque centrée près du tunnel semblait avoir les faveurs de tous, et seul l'Ynorien estimait que ce serait suspect. Mais soit : il n'était pas un stratège, et s'il était le seul à avoir un avis divergent, c'était sûrement lui qui se trompait.

« Ma tactique ne semble pas vous intéresser plus que ça, alors contentons nous au plan initiale. Pas besoin de message, du coup. Pour la magie, je pourrai vous apprendre le Transfert Magique pour que nous puissions faire ce soutien sans entamer nos réserves magiques avant d'affronter Crean et Khynt. Et mieux vaut donc garder tes portails pour notre fuite, Xël. »

Akihito confirma du regard l'avis de ses compagnons, avant de retourner dans la tente.

« Général, nous nous rangeons finalement à votre plan initial, et après une bref pause et avoir fait le plein de provisions, nous serons prêt à partir, déclara l'enchanteur avant de se tourner vers le Kendran en armure. A votre avis, de combien de troupes avons-nous besoin pour mener ce raid de diversion ? »


HRP :

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Faëlis
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Faëlis » ven. 5 févr. 2021 17:41

Le voyage prit quelques jours, et Halcyon put se pavaner à loisir devant les autres chevaux, ce qui sembla presque le mettre de bonne humeur. Il lâcha même un de ses « pfffrrrt » méprisant en voyant la monture de Xël s'affoler, emportant presque leur chariot de vivres ! Manifestement, le mage-soldat n'était pas très bon pour l'équitation, et Faëlis dû se précipiter pour aider les autres à maîtriser l'animal. Halcyon ne se fit pas prier, conforté qu'il était dans l'idée que les autres chevaux avaient honte de voyager aux côtés d'un si noble destrier. Bon, au moins, il se tenait lui-même tranquille...

Le soir du deuxième jour, alors que Xël profitait d'un ruisseau pour se laver, Faëlis remarqua les nombreuses et profondes cicatrices qu'il arborait. Curieux, l'elfe demanda d'où elles venaient. La première, il l'avait récolté sur cet autre monde, Aliaénon, tandis qu'une lourde blessure au bras venait de la bataille de Luminion. L'elfe curieux insista :

« Voilà de bien cruelles blessures... qu'est-ce qui peut bien provoquer cela ? »

Ce n'était d'après lui que de simples traits d'arbalètes. Il avait vu bien pire : les champions de Crean Lorener pouvaient abattre des régiments entiers et renverser des cavaliers. Sans l'aide des nains, la bataille aurait été perdue.

« Voilà bien un spectacle terrifiant... votre magie a dû être fort utile contre de telles brutes, non ? »

« Ils étaient trop nombreux pour que cela soit suffisant. »

Aenaria était elle aussi curieuse, se demandant à quoi ressemblaient ces fameux guerriers, et apparemment, le spectacle valait le détour : ils étaient colossaux et lourdement armés. Il n'en avait pas affronté directement mais ne doutait pas de leur puissance.

« N'avez-vous point trouvé un point faible ? Une faille dans leur armure ? Car il se pourrait que nous en trouvions dans le palais... » s'inquiéta Faëlis.

Hélas, il n'en savait pas plus, car il ne les avait vu que de loin. L'elfe soupira :

« J'imagine qu'il nous faudra être discret et improviser... Cela dit, pour parler sur un ton plus léger, je pense être en mesure de faire disparaître ces cicatrices si elles vous dérangent. »

Il déclina l'offre, estimant que ces disgracieuses choses faisaient partie de lui. Quelle étrange vision des choses... enfin, si cela était son choix ! En attendant, la sindel souhaitait aussi en apprendre plus sur les créatures de Khynt, tout en s'étonnant que le groupe pratique encore le vouvoiement !

D'après Xël, les créatures de Khynt avaient été vaincues, mais il craignait plus celles de Crean.

« Au moins, on peut dire que vous... enfin que tu ne te vantes pas de tes exploits ! L'avenir nous dira s'il nous réserve pire encore... »

Pour Xël, cependant, cela n'était qu'affaire que de mauvais souvenirs. Cherock prit finalement la parole pour apprécier le tutoiement et mentionner que ses propres cicatrices n'étaient pas aussi glorieuses.

« Vraiment, n'avez-vous pas vous-même un passé militaire et de grandes batailles à nous raconter ? » s'amusa l'elfe.

Le beau semi-ynorien affirma cependant ne pas avoir grand chose de glorieux, hormis pour récupérer ses reliques. Hélas, Faëlis n'avait guère connaissance de celles-ci. L'une de ses cicatrices, en revanche, était surtout pour lui sujet de honte, et il comptait la transformer à l'aide d'un tatouage.

« Voilà bien une fort belle ambition ! Auriez-vous donc des connaissances en la matière ? »

Il précisa que sa compagne lui avait enseigné cet art. Il se mit alors à expliquer le principe de ce qu'il appelait des « tatouages arcaniques ». Cela consistait en une fusion de sortilèges permettant au tatouer d'invoquer presque à volonté un sortilège. Faëlis avait les yeux ronds. Quel pouvoir exceptionnel !

« Voilà bien quelque chose de remarquable ! Un tel pouvoir pourrait représenter un atout de taille en donnant des chances de survie supplémentaires à bien des soldats ! Et même... peut-être pourrions-nous en profiter pour notre mission. »

Il fit savoir qu'il serait intéressé par le fait d'approfondir le sujet. Si l’esthétique pouvait devenir une arme, il serait criminel de ne pas en profiter ! Tout le monde était d'accord avec cela, mais la nuit était déjà bien avancée et il allèrent se coucher. Ils devaient reprendre la route tôt le lendemain.

Les bandits attirés par la guerre s'assemblaient déjà, mais ils étaient prudents et se gardèrent bien de les embêter. L'elfe songea à plusieurs reprises à leur apprendre la vie, mais leur mission était plus importante que ces malandrins. Aussi, l'elfe se contenta de continuer à s’entraîner à invoquer des dragons fluidiques comme Xël lui avait montré. Il commençait à progresser et parvenait globalement à lancer le sortilège. Cependant, les dragons, mal-formés, handicapaient plus la flèche qu'ils ne l'aidaient. Enfin bon, réussir à lancer le sortilège correctement était déjà un progrès plus qu'appréciable !

Au quatrième jour, ils firent pourtant une rencontre inattendue : un groupe de bandits semblaient vouloir s'en prendre à des voyageurs sur la route, les menaçant de leurs fourches, arcs et haches rudimentaires. Avant même que le reste du groupe ne réagisse, Faëlis, porté par le dégoût envers ces manants criminels talonna sa monture et se rua vers eux ! Il encocha une flèche, invoquant cette fois-ci presque instinctivement le sortilège que lui avait enseigné le mage d'air : ils étaient un peu trop loin, aussi, un peu d'aide serait bonne pour sa flèche ! Le petit dragon de lumière s'enroula autour du projectile et bondit vers la cible ! Ceci suffit à achever de convaincre les bandits de se disperser, mais il sembla un instant que la flèche avait bien dévié de trajectoire pour les atteindre ! Sans succès au final, ils étaient vraiment trop loin, mais l'elfe rit en allant récupérer son projectile :

« Je crois que je commence à devenir bon à ça ! »

Puis, il descendit de cheval pour aller trouver les victimes et les rassurer. Il s'agissait d'ynoriens qui fuyaient la guerre et qui le remercièrent chaudement, lui proposant même quelques-unes de leurs maigres vivres. L'elfe leva les mains en signe de protestation :

« Nul besoin de paiement, voyons ! Je n'ai fait que mon devoir de gentilhomme ! Mais prenez garde : la guerre se trouve aussi sur ces routes, je vous conseille de partir vers le sud plutôt que de grimper les montagnes... »

« Mais... on dit que les forces d'Omyre ont été vaincues à Luminion... Serais-ce faux ? N'y a-t-il donc pas moyen d'échapper à tout ceci ? »

« Si fait, rassurez-vous. Mais les bandits et certaines troupes ennemis sont encore en maraude. Rassurez-vous, nous allons nous en charger, mais de grâce, prenez plutôt la route du sud. Avez-vous besoin de vivres supplémentaires pour cette longue route ? »

Ils assurèrent que ce n'était pas le cas, mais l'elfe avait des doutes. Aussi, avec l'accord des autres, il alla chercher quelques rations qu'il confia aux voyageurs pour être sûr qu'ils ne manquent de rien pendant le voyage.

Et ils reprirent la route. Ils contournèrent la forêt pour trouver un chemin dans lequel leur charrette pouvait se glisser.

Le soir, Cherock lui proposa de tester le tatouage arcanique. Ils prirent le temps de discuter des possibilités, et Faëlis rechercha un sortilège capable de lui permettre de se défendre sans flèches. Son choix se porta sur le choc des éclairs. Choix que le semi-ynorien approuva. C'était un sortilège qu'il connaissait bien et qu'il n'aurait aucune peine à transmettre.

L'expérience fut somme-toute assez peu douloureuse, quoique parfois un peu irritante. Cherock dessina des nuages d'orage et des éclaires autour du phénix du torse de l'elfe. Le « phénix perçant l'orage », il l'appela, car l'oiseau semblait maintenant jaillir de la foudre. Le résultat était d'une grande élégance, tout en étant menaçant.

« Votre talent en dessin n'est plus à démontrer ! » s'extasia l'elfe en se relevant.

Il se releva et écarta les bras, et son muutos s'illumina comme jamais. Il irradia si fort que sa peau même semblait rayonnée de l'intérieure, comme celle d'un être surnaturel. Le phénix rayonnait de lumière, mais maintenant, cette lumière pure se teintait d'un bleu nuit sublime. Tout fier de lui, l'elfe remercia encore son compagnon avant d'aller se coucher. Ils devaient arriver à destination le lendemain...

De fait, en fin de matinée, ils trouvèrent enfin le camp des thorkyn et, à l'entrée, un le kendran le plus séduisant qu'ai jamais vu Faëlis. Un jeune chevalier blond qui les accueilli avec un sourire éblouissant. Pour le coup, l'elfe était bien content d'avoir, comme chaque matin, usé de son pouvoir pour se purifier de toute saleté et rayonner de son teint le plus éclatant !

Il s'agissait du contact signalé par le général et, étonnamment, il semblait connaître les noms de Faëlis et Aenaria puisqu'il les appela par leur nom. Avec une grâce littéralement elfique, il les conduisit au camp, vers le chef de guerre des nains, leur proposant de laisser leurs armures au camp, ce que l'elfe fit avec plaisir. Puis, il les conduisit devant un général imposant et vêtu d'une peau d'ours. C'était un nain du nom de Throgg'inn, un solide guerrier à l'air fruste, ce qui était un pléonasme en soit. Ce dernier ne manqua pas d'ailleurs d'engager la conversation en signalant sa désapprobation à faire appel à des elfes pour cette mission. Néanmoins, il leur apporterait toute l'aide possible en attaquant le camp ennemi. Avec toute la politesse et la diplomatie qui étaient la sienne, Faëlis lui assura :

« Je ne doute pas qu'à l'issue de cette bataille, nous ne serons plus des elfes ou des nains, mais bien des frères d'armes. Vous pouvez compter sur nous : j'ai conscience des risques que vous et vos soldats allez prendre et vous fait le serment que ce ne sera pas inutile : Ensemble, nous vaincrons ! »

Le jeune humain, plus pragmatique, précisa que l'armée des nains ferait diversion pour leur permettre d'atteindre un passage secret pour entrer dans le palais. Décidément, ce superbe éphèbe était de plus fort au courant de la situation ! Faëlis se glissa plus près de lui pour demander :

« Voilà un plan simple et efficace ! Mais dites-moi, vous connaissez mon nom, mais pour mon plus grand regret, ce n'est pas réciproque. Me feriez-vous l'immense honneur de combler cette honteuse lacune de ma part ? De plus, vous semblez bien connaître les lieux... auriez-vous une carte du palais, que je tente d'y retrouver ce dont je me souviens ? Peut-être serait-il possible d'identifier certains grands appartements que les vils lieutenants de la déesse noir auraient pu s'approprier... »

Mais le blondinet n'était manifestement pas très ouvert, et se refusa à donner son nom. Cela devenait vraiment intrigant... Pendant ce temps, Cherock se renseignait sur les créatures du camp : rien de bon, puisque selon le général, il y avait en plus des garzoks des monstruosités de métal, que Xël avait déjà affronté, apparemment douloureusement...

Quand à la question de savoir si l'ennemi ne pouvait pas avoir connaissance du passage secret, cela était, apparemment, peu probable, car ils ne se trouvaient au palais que depuis peu. Il n'y avait ni carte disponible ni connaissance de ce qui se trouvait à l'intérieur. Avec une moue intriguée, Faëlis demanda avec un sourire amusé :

« Hé bien, messire Sans-nom, j'avoue ne pas avoir eu le temps de dessiner un carte moi-même. Cela dit, je pense que Dame Aenaria et moi, ici présent, aimerions vous poser quelques questions seul à seul, si cela ne vous dérange pas. »

Mais à nouveau, il déclina, déclarant qu'il préférait que ce soit après la mission. Entre-temps, Cherock et Xël discutaient des créatures de Khynt, le mécaniste d'Oaxaca et l'une de leurs cible. Celui-ci avait créé des monstruosités d'acier qui avaient semé la mort au col de Luminion, les mêmes que le général avait dit avoir vu dans le camp ennemi. Elles avaient quelques point faibles au niveau des articulations mais étaient par ailleurs très résistants et dotées d'une forme d'intelligence.

Cherock avait quelques doutes sur la stratégie à employer, et il préconisait plutôt de multiples attaques pour détourner l'attention de leur groupe, mais le général nain le rassura : ils allaient attaquer un enclos de bête et ainsi semer le maximum de pagaille dans le camp ennemi. Il était en revanche prêt à laisser un régiment derrière lui pour couvrir la fuite du groupe si nécessaire, mais cela représentait un risque pour ces hommes qui feraient face à une armée entière. Un risque qu'ils allaient devoir assumer. Cela, Faëlis ne pensait pas en être capable, surtout alors qu'il savait avoir d'autres moyens de s'échapper.

Cherock en revanche se disait prêt à assurer leur protection, arguant que certains le qualifiait d'élu de Valyus, bien qu'il ait lui-même des doutes à ce sujet. L'elfe voyait cependant ce qu'il voulait dire... mais de là à protéger toute une armée... et manifestement, Xël et Throgg'inn avaient des doutes également quant aux risques encourus.

Finalement, ils sortirent de la tente pour discuter entre eux. Cherock voulait connaître les capacités de communication du groupe, car il avait manifestement lui-même des craintes par rapport à son plan.

« Je suis en mesure d'envoyer autant de messages que vous le souhaitez tant que j'ai du papier et le temps de les écrire. Cela dit, je n'ai rien d'un expert en stratégie militaire, mais une attaque forte et localisée serait je suppose plus efficace pour détourner les défenseurs, non ? » assura Faëlis

De leur côté, Xël et Aenaria se révélèrent du même avis que Faëlis : une attaque localisée, qui mettait en danger le moins de soldats que possible, était préférable. Ils retournèrent donc dans la tente, prêt à donner sa réponse final au nain mal embouché.

(((Apprentissage du renfort draconique et acquisition du tatouage
Début ici
et ici
Et juste à la dernière ligne ici)))
Modifié en dernier par Faëlis le mar. 9 févr. 2021 18:33, modifié 1 fois.

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Aenaria
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Re: La Forêt de Nostyla

Message par Aenaria » ven. 5 févr. 2021 21:58

Lorsque Cherock me demanda d’accéder à la carte que j’avais récupéré, je la lui prêtai sans problème, c’était la base du travail d’équipe selon moi. Il put ainsi en utilisant l’échelle fournie calculer notre temps de route afin de demander ce qui allait nous manquer pour trajet. Xël mentionna le fait qu’il était fort mauvais cavalier et qu’il était plus que volontaire pour être le cavalier de notre charrette de provisions, je ne vis là-dedans aucune objection.

Récupérant chacun une monture, je pris soin d’attacher correctement tous mes achats à la selle de mon cheval, qui était fort robuste et prêt à prendre la route si je me fiais à son excitation. Il me faudrait tenir les rennes fermement au début du voyage pour bien lui faire comprendre qui commandait, mais cela ne me faisait pas trop peur, j’avais déjà eu à faire à des chevaux plus virulents que celui-ci.

Le reste de nos demandes furent reçues favorablement par l’intendance qui nous fournit des vivres et des équipements en quantité suffisante pour nous permettre de voyager dans de bonnes circonstances, si on pouvait dire cela. Je vérifiai rapidement si la répartition du poids était correcte pour éviter les mauvaises surprises sur la route puis sautant presque sur la selle, nous nous mîmes rapidement en route car le trajet serait long, mieux valait ne pas traîner. La journée était déjà bien avancée, si nous pouvions éviter de nous arrêter pour nous sustenter durant la route, cela nous ferait gagner du temps.

Personnellement, je pouvais ne pas manger sur la route mais je ne savais ce qu’il en était de mes camarades de mission. Nous trouvâmes rapidement un chemin à suivre afin de nous rendre jusqu’à la forêt de Nostyla qui était notre première direction car nous devions la traverser pour retrouver le campement thorkin. D’après la carte, nous avions entre quatre et quatre jours et demi de route pour nous y rendre, en croisant les doigts pour que rien ne vienne perturber le trajet.

Après quelques heures de route, mes craintes se dissipèrent concernant la tenue de l’estomac de mes compagnons d’armes. Nous trouvâmes un petit coin tranquille à l’écart de la route où nous pouvions établir notre campement pour la nuit. Je pris les choses en main en me proposant de guider tout le monde pour monter rapidement le camp et efficacement. Deux d’entre nous devaient s’occuper de monter les tentes, pendant qu’un autre devait récupérer du bois pour le feu et le quatrième devait s’occuper de nos montures en les délestant et en leur permettant de manger et boire. Une organisation simple, la division des tâches était toujours un gage d’efficacité.

(Tu as l’air rompu à l’exercice !)
(C’est loin d’être ma première fois. Apprendre à monter rapidement un camp de voyage faisait partie des premiers cours de l’académie militaire. Le monter et le démonter évidemment.)
(Vous garderez la même organisation tous les soirs ?)
(Après deux soirs de suite à fonctionner ainsi, les gars devraient prendre le pli, du moins je pense. Les journées sur la route sont harassantes, pour nous mais aussi pour les montures. Il faut prendre soin de nos corps, de nos estomacs mais également de nos montures. Bien manger et dormir un temps suffisant seront deux objectifs à tenir.)
(Oui chef !)

Je ne pus m’empêcher de sourire intérieurement face à la blague de ma faera avant de me replonger dans le travail. Après avoir accompli ma part du travail, je me proposai de préparer le repas de notre premier feu de camp. Une casserole avec de l’eau, des aromates, quelques légumes, un peu de lard et le tout parti pour un temps appréciable de cuisson, ce qui nous permettait de nous reposer en attendant.

J’utilisai cette tranquillité apparente afin de proposer aux garçons de garder cette organisation pour chaque campement car nous avions été d’une redoutable efficacité, nous permettant de nous reposer au mieux et de profiter de la soirée pour faire plus ample connaissance. Je suggérai également la prise de tour de garde afin de nous protéger durant la nuit. Personnellement, je n’avais besoin que de peu de sommeil pour récupérer, j’avais d’ailleurs beaucoup dormi dernièrement, je pouvais sans problème passer la première nuit éveillée pendant plusieurs heures avant de passer le relais pour la partie la plus calme de la surveillance. Un roulement était à prévoir pour chaque nuit à venir mais je n’avais aucun doute sur la participation active de chaque membre de la mission.

Les discussions furent relativement écourtées en cette première soirée, la fatigue, l’excitation, tout cela mêlé, les garçons sombrèrent rapidement. Je pris mon tour de garde en entretenant le feu, me permettant de mieux voir aux alentours. M’asseyant dans la charrette, j’utilisai la hauteur à bon escient. Les étoiles apparurent, mes pensées vagabondèrent vers de lointaines contrées, vers un territoire que j’avais bien souvent exploré, le domaine de mon enfance, le manoir de Faronia.

Je me plongeai dans mes nombreux souvenirs tout en gardant un œil attentif à notre environnement et les oreilles à l’affut du moindre bruit suspect. Ceci me permit de passer mon quart avant de passer le relais à Cherock en le réveillant le plus doucement possible, les mauvais réveils étaient la pire chose qui pouvait arriver quand on campait. Lorsqu’il fut prêt, je me rendis à ma propre tente afin de prendre un peu de repos en gardant mon esprit tourné vers le Naora.

Au petit matin, nous équipâmes nos montures et repartîmes après un petit déjeuner en quantité suffisante. La route se passa dans le calme, aucun nuage à l’horizon, le paysage ne changeait que peu, la monotonie du trajet me ramena des années en arrière quand je partais en campagne avec les miens.

(Tu me racontes tes souvenirs de campagne ?)
(Avec plaisir. Par quoi vais-je commencer…)

Nous discutâmes sur toute la route avec ma faera, oubliant ainsi la fatigue de rester assis sur un cheval toute une journée. Puis ce fut le moment de faire un nouveau campement. Reprenant les mêmes ordres que la veille, nous fûmes encore une fois rapides et efficaces dans nos actions respectives, ce qui nous permit de nous retrouver de nouveau au coin de feu pour partager un bon repas avant de vaquer à nos occupations personnelles et nous coucher. Le même rituel se répéta pour moi qui prit la surveillance du campement jusqu’à tard dans la nuit avant de passer le relais.

La journée était belle et fort agréable avec une petite brise qui venait faire onduler mes cheveux au vent. Aucun trouble à l’horizon pour cette troisième journée de voyage enfin presque. Xël qui avait choisi de prendre les rennes du cheval tirant notre charrette de ravitaillement se trouva fort dépourvu lorsque sa monture s’ébroua dans tous les sens, le faisant partir au galop sans aucun contrôle. Talonnant mon propre cheval, et rapidement suivie par le reste du groupe, nous fîmes entendre raison au cheval du créateur de portails afin de reprendre la route le plus sereinement possible.

Le soir, j’étais distraite par le plat qui chauffait tranquillement sur le feu lorsque Faëlis s’enquit de l’origine des cicatrices sur le corps de Xël. Il se mit alors à lui expliquer qu’elles dataient d’un affrontement contre Vallel mais également de la bataille de Luminion où il avait pu croiser les créatures de Crean et Khynt. Faëlis posa des questions et l’une d’entre elle vint aussitôt à mon esprit.

- « A quoi ressemble les guerriers d'élites de Crean ? Comment vous les décrireriez ? »

Ses connaissances s’avéraient fort intéressantes car tout ce que je savais des Treize, je l’avais lu dans des livres de la bibliothèque de Tahelta mais rien ne valait l’expérience acquis sur le terrain.

- « Ce ne sera donc pas votre premier round sur un terrain peuplé de créatures de Crean, avez-vous croisé des créatures de Khynt durant vos précédentes batailles, vous semblez bien connaître nos futures adversaires. D'ailleurs le vouvoiement commence à faire bien trop formel, qu'en dites-vous messieurs ? »

Sans m’en rendre compte, je proposai aux garçons de nous tutoyer, le vous faisait bien trop formel. Nous continuâmes notre discussion et nous mîmes d’accord pour nous tutoyer à partir de maintenant. Après tout, nous allions devoir compter les uns sur les autres durant notre infiltration du palais, un peu moins de formalité me semblait nécessaire.

La soirée continua avec Cherock qui nous fit part d’un talent bien particulier à savoir celui de tatoueur arcanique. Il avait acquis la possibilité de transférer des fluides dans de l’encre de tatoueur afin de donner à la personne recevant le tatouage la capacité de lancer un sort de l’élément choisi. C’était un véritable talent et je fus très intéressée par la possibilité qu’il nous offrait de nous tatouer.

- "Je suis d'accord avec Faëlis, cette capacité que tu possèdes, que tu as maîtrisé Cherock, est vraiment exceptionnelle. C'est un atout, pour notre mission actuelle ou pour l'avenir."

En jaugeant le pour et le contre, et ayant bien compris qu’il fallait que l’une des personnes présentes possède le sort que je voulais me faire tatouer, je décidai de laisser mon tour pour Faëlis qui lui prit pratiquement rendez-vous pour le soir suivant. J’aurais ainsi l’occasion de regarder

Après quelques heures de sommeil réparateur, le quatrième jour pointa le bout de son nez. Nous avancions à bon rythme et avions maintenant des habitudes bien ancrées le soir et le matin, presque comme des militaires en campagne.

(Tu ne comptes tout de même pas transformer tes camarades de mission en soldats aguerris à l’art de la guerre ?)
(Loin de moi cette idée, mais avoir des habitudes qui commencent à se former dans nos esprits est une bonne chose. Nous gagnons du temps le soir et pouvons nous reposer un peu plus le matin. La route fatigue les organismes, tu ne peux pas t’en rendre compte, mais c’est indéniable. Hors de question de les transformer en soldats !)
(Ma parole, mais tu les prends pour tes enfants !)
(Pas du tout ! Nous préserver pour arriver dans les meilleures dispositions possibles au campement au nord de la forêt de Nostyla, voilà mon objectif.)

Sur la route, nous rencontrâmes des voyageurs qui étaient présentement importunés par un groupe de bandits. Faëlis prit les devants et partit dans un acte héroïque en sauvant les voyageurs des griffes de ces hommes. Il avait réussi à utiliser une nouvelle compétence, celle que Xël lui avait montré au campement kendran au Val. Une belle réussite pour l’hinïon qui avait réglé le conflit d’une main de maître. Il proposa d’ailleurs quelques rations au groupe de voyageurs afin de terminer leur périple, un geste noble de sa part.

Nous continuâmes notre route et arrivâmes en vue du lac de Nostyla le soir venu. Au campement, Faëlis demanda à Cherock de se faire tatouer, Xel en profita pour aller se rafraîchir dans le lac après notre repas, une bien bonne idée que j’imiterai durant la nuit. Je m’attardai sur la pratique magique de Cherock qui était tout à faire fascinante, c’était à la fois de l’art et de la magie. Malheureusement le soleil déclinait plus vite que prévu, j’avais peur que l’arcaniste ne manque de lumière et c’est tout naturellement qu’il se tourna vers moi afin d’en pourvoir un peu plus afin de terminer son ouvrage. J’acceptai avec plaisir, je savais à quel point les aiguilles pouvaient faire mal si on ne les utilisait pas à bon escient. Une fois son travail accompli, Faëlis put regarder à loisir le nouveau dessin ornant son corps, je ne pus m’empêcher de siffler pour montrer mon admiration devant le travail accompli.

Cherock se retira dans sa tente tout comme Faëlis, Xël revint de son bain et tout ce petit monde se reposa. Récupérant le morceau de savon sur lequel j’avais lorgné durant la journée ainsi qu’une couverture de coton et des vêtements propres, je rejoignis à mon tour le lac, gardant un œil sur le campement et ses alentours avant de me départir de mon équipement et de mes vêtements pour piquer une tête dans le lac. Je nageai pendant de longues minutes qui me parurent des heures mais en réalité c’était parce que mes muscles étaient ankylosés par les jours de route à cheval. L’eau était fraîche, il n’y avait pas de vent, juste le bruit de mes doigts tapotant l’eau alors que je faisais la planche en admirant les étoiles qui brillaient toujours autant dans le ciel de Nirtim.

Cette baignade me ramena de nouveau à Faronia et à son lac souterrain où j’aimais tant me baigner, m’entraîner. J’avais passé des heures à faire des longueurs dans ce bassin afin de fortifier mes muscles lorsque j’étais plus jeune, pour rendre mon père fier de moi, pour devenir un bon soldat. Il n’était plus là physiquement pour voir ce que j’étais devenue mais son souvenir était toujours vivace dans ma mémoire, tout comme ma mère et Gameleb. Ils étaient autant de raison d’accomplir mon destin et de retrouver leur assassin pour le mettre devant la justice elfique ou bien devant la mienne.

Je plongeai quelques secondes afin de rejoindre le bord du lac, récupérai le savon que j’avais laissé sur la berge, me savonnai avant de me rincer abondamment et de sortir de l’eau pour me sécher avec la couverture. Je restai là, debout, emmitouflée dans la couverture, à observer le calme du lac. Le calme avant la tempête comme on disait, nos vies allaient se jouer dans quelques jours et de nos actions dépendaient la vie de milliers de personnes. Soudain, le poids de notre tâche me tomba violemment sur les épaules, me glaçant presque le sang.

(Pas d’inquiétude Naria, tu n’es pas toute seule dans cette histoire.)
(Je sais mais de nos choix, de nos actions, de notre coordination dépend tellement de choses ! Il en est de même pour nos camarades partis pour la mission du château de Vandrak ou pour la mission dite de la mer verte. Nous nous devons de réussir, à tout prix.)
(Même au prix de ta vie ou de celles de tes compagnons.)
(Plutôt moi qu’eux mais je compte bien m’en sortir en un seul morceau.)
(Je n’en attendais pas moins de la part de ma valkyrie.)

Je souris de manière fugace avant de récupérer mes vêtements propres, me rhabillai, pris pièces d’armures que j’avais laissé non loin et retournai au campement. Cette nage m’avait détendu et fatigué en même temps, je savais que je dormirai bien. Je pris le temps de boire un peu d’eau avant de me sécher près du feu avec lequel je me mis à jouer avec mes propres fluides, allumant et éteignant le bout de mes doigts, créant une flamme bleutée pour éclairer la tente derrière moi. Ce fut fort plaisant de manipuler un peu la magie sans crainte, rassérénée par ces petits exercices, je réveillai Xël afin qu’il prenne le quart suivant avant de me coucher.

En ce début de cinquième jour de route, la lisière de la forêt apparût, cela voulait dire que nous avions fait déjà une bonne partie de notre voyage. Cependant nous fûmes bien ennuyés car la route que nous devions emprunter ne nous permettait pas de faire passer notre charrette. D’un commun accord, nous décidâmes de longer les bois afin de trouver une autre trouée pour faire passer tout notre matériel, ceci nous prendrait plus de temps mais au final, nous rapprocherait tout de même de notre objectif.

A la fin de la journée, nous trouvâmes enfin ce que nous cherchions, une trouée dans les bois qui nous permettait d’avancer tous ensemble. J’ouvris la marche en utilisant quelque peu de lumière pour nous éclairer car la lumière commencer à décliner et la densité de la forêt n’aidait pas. Xël suivit puis les deux cavaliers fermèrent la marche. Après un temps relativement court de route, nous nous arrêtâmes pour monter le camp pour la nuit. Un bon repas avalé et nous prîmes chacun notre tour de garde.

Les deux jours et demi suivant furent d’une monotonie indescriptible : des arbres, des feuilles, des plantes grimpantes, le campement le soir où nous nous racontons un peu plus nos histoires, une nuit avec un sommeil léger à cause de tous les bruits de la forêt. Et cela se répéta deux fois malheureusement, moi qui pouvais me targuer de bien dormir en bivouac, ce furent trois nuits plus fatigantes que les précédentes. Je sortis donc de la forêt en étant quelque peu fatiguée de toute cette verdure et de ces mauvaises nuits.

Nous arrivâmes rapidement en vue du campement de nains où nous furent rapidement accueilli à l’entrée par un humain à la fière allure, portant haut les couleurs de la cité blanche. Il se présenta immédiatement à nous comme étant le contact du général Andelys, nous étions arrivés à bonne destination. Il nous salua, Faëlis et moi, par nos prénoms, chose que je trouvai très étrange. Il nous demanda de laisser nos affaires à l’entrée pour rejoindre la tente avec le général Throg’inn, ce dernier nous attendait au centre du campement.

En entrant dans sa tente, nous découvrîmes un décor typiquement nain, sobre, brut mais efficace, du bois et des peaux. Il s’assit sur un fauteuil et nous invita à tous faire de même pour nous mettre à l’aise. Il commença par saluer Xël qu’il semblait connaître avant de nous lancer une pique à Faëlis et moi. Mon sang ne fit qu’un tour, je n’aimais pas spécialement les nains mais celui-là avait le don de mettre les gens à l’aise, le regard qu’il venait de nous lancer en disait long.

Il nous expliqua que notre but était de mettre autant de bazar que possible dans le camp de l’ennemi autour du palais puis il laissa la parole à l’énigmatique blondinet qui nous avait chaleureusement accueilli. Il nous expliqua que son plan consistait en la création d’une diversion pour nous permettre de prendre un tunnel secret que seul lui connaissait. Monsieur connaissait un tunnel secret menant à l’intérieur du palais, moi-même je connaissais un tunnel permettant de passer la montagne et d’arriver rapidement sur la zone.

(Qu’est-ce qui ne va pas ?)
(Il connaît mon nom et celui de Faëlis, il a forcément un lien avec le palais de la roseraie et donc avec les amants de la rose sombre. Je suis presque sure qu’il fait ou du moins faisait parti du personnel des lieux que nous devons investir par surprise.)
(Je n’ai pas souvenir de l’avoir vu sur place…)
(Nous n’avons pas eu à faire à tout le personnel de Grantier et il a probablement pu arriver sur place après mon passage et Cromax a pu lui parler du groupe qui l’a aidé, je ne sais pas, mais le lien est indéniable.)
(L’avenir nous le dira.)

Je n’avais pas suivi tout le début de la conversation qui s’était ensuivie de la part de mes camarades. Ecoutant distraitement toutes les discussions qui avaient lieu entre le général et les deux humains, je me rendis compte que tous ces propos manquaient de poids à mes yeux car rien ne valait une carte sur laquelle on disposait tout le monde. Attendant mon tour, je pris enfin la parole.

- « Général, je me nomme Aenaria Imfilem et je suis lieutenant de l'armée sindel. Sachez que c'est un honneur de vous être présentée. Je sais que vous avez une aversion particulière pour les elfes, je dois dire que nos formateurs ne vous portaient dans leurs cœurs, j’en suis profondément désolée. L’heure est plus à la concertation et à la mise de côté de nos rancœurs personnelles afin de tous sortir victorieux de ce conflit. J’ai entendu mes camarades vous poser beaucoup de questions mais j’en ai moi-même une qui nous permettrait je pense à tous d’y voir plus clair : disposeriez-vous d’une carte de la zone avec la position de votre campement, la position approximative de nos ennemis autour du palais et l’entrée du tunnel ? Je me doute que c'est beaucoup vous demander vu la situation, mais j'ose néanmoins. »

Suite à mon intervention, le général me regarda de manière exaspérée avant de sortir une carte de la zone et de pointer différentes parties de cette dernière en étant d’une imprécision la plus totale. Il venait ouvertement de se payer ma tête, presque sans réfléchir et malgré moi, mon poing droit se serra très fort pour éviter de ne le coller dans le visage de ce personnage grossier, qui se prenait pour plus fort que nous elfes.

(Aenaria, je t’en supplie, reste calme, ce n’est pas le moment de créer un incident diplomatique de grande ampleur ! Ta tête pourrait finir au bout de sa hache !)
(Il s’est moqué de moi, j’ai envie de lui exploser la boîte crânienne, de lui foncer dessus avec mon épée sortie et de l’embrocher comme une grosse vache !)
(Tu ne feras rien de ça donc maintenant tu m’écoutes et tu te tais. Tu es plus intelligente que lui, respire et reprends tes esprits. De grandes choses se jouent en ce moment dans cette tente, tu as mieux à faire que te prendre la tête avec lui. Soutiens tes coéquipiers, c’est le plus important, apporte-leur tes connaissances tactiques ou bien tout ce qui concerne tes compétences personnelles et arrête de ronchonner !)

Ma parole, mais je venais de me faire remonter les bretelles par ma propre faera. Cependant, elle marquait quand même beaucoup de points, elle avait raison, je ne pouvais pas me montrer impulsive, je devais me montrer plus forte que cela. Pour moi, pour ma faera et aussi pour mes compagnons d’infortune.

Lorsque Cherock prit congé du général, je ne me fis pas prier et attendit qu'il synthétise tout ce qu'il avait pu voir avec le nain. Il me posa une question pour connaître mes capacités de télépathes, et pour tout dire, cela me prit au dépourvu car je n'avais encore pas tester toutes les possibilités. Pour lui il fallait attaquer avec plusieurs groupes pour que nous passions inaperçu.

Xël enchaîna en disant que tout ceci, l'utilisation d'autant de soldats pour une simple diversion, le mettait mal à l'aise. Il ajouta quelques informations concernant la portée de ses portails qui pourraient le cas échéant nous sauver les fesses une fois qu'elles seront dans le palais.

- « Je ne suis pas en mesure de te dire jusqu'à combien de message je peux envoyer à la fois, je pense qu'il faut simplement pour moi avoir eu un contact télépathique avec une personne pour attendre son esprit une nouvelle fois. Si je parle à toutes les personnes d'importance avant notre départ, je peux assurer les messages par la suite. »

Et maintenant, je voulais donner mon point de vue sur la situation, tout ceci méritait qu'on le fasse tous, beaucoup de vies ici mais aussi à Kendra Kâr, dépendaient de notre décision et de notre choix stratégique.

- « Je pense qu'avec une seule attaque de diversion de type raid éclair, nous pouvons passer. Je pense même que nous pouvons rendre notre présence à tous les quatre moins grande si nous aidons les nains qui attaquerons avec un soupçon de magie. Entre la lumière, la foudre, l'air et le feu, nous pouvons faire une sacrée peur à nos adversaires. »

Finalement, ce fut l’attaque d’un seul groupe qui remporta les votes et ce fut Cherock qui eut la charge d’annoncer la nouvelle au bourru général que nous devions écouter. Nous n’avions plus qu’à attendre sa réaction à notre décision.

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