Les galeries (rues)

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Yuimen
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Les galeries (rues)

Message par Yuimen » sam. 1 févr. 2020 14:20

Les galeries (rues)

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Les galeries reliant les nombreuses salles de Khaz-Kheral ont des tailles et apparences fort diverses, en fonction des lieux qu'elles desservent. Dans les quartiers d'habitations, elles sont larges et hautes, permettant le passage simultané de toute une foule, taillées avec une grande régularité et parfois artistiquement sculptées, quoique toujours sobrement. Celles des forges et lieux de stockage sont tout aussi grandes, mais seul le sol a eu droit à des finitions dignes de ce nom, de manière à le rendre parfaitement plat. En dehors de cela, on trouve une multitude de galeries plus modestes, souvent de simples couloirs plus ou moins grossièrement creusés, pouvant parfois s'avérer si étroits qu'il est presque impossible de s'y croiser.

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Yurlungur
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Re: Les galeries (rues)

Message par Yurlungur » dim. 15 mars 2020 12:03

...

Yurlungur n'eut pas à patienter longtemps. Après quelques heures, le son du cor retentit sous la montagne, et quelques instants plus tard seulement, un Rakhaunen ouvrit la porte pour la guider, comme s'il avait attendu juste derrière pendant tout ce temps. Elle le suivit sans broncher, découvrant partout un branle-bas de combat. On se passait des armes, on enfilait des armures, on entassait des vivres sur des charettes ou dans des sacs pour nourrir l'armée qui s'apprêtait à fondre sur ses ennemis héréditaires. Les visages étaient graves, plombés par l'ampleur historique de la bataille qui s'annonçait, mûs par cette hargne intemporelle qui avait guidé leur existence jusqu'à cet instant, soudé ce peuple comme un seul être régi par sa seule haine. Yurlungur, en les observant, comprenait cette rage, impressionnée toutefois de la voir partagée par un si grand nombre d'individus - envieuse aussi, peut-être ? Ses fureurs à elle n'avaient jamais été que personnelles, rarement partagées par d'autres, et cette communion autour d'un seul idéal de vengeance, elle ne l'avait jamais connu avec personne. À voir autant de Rakhaunens unis vers leur revanche, elle sentait toute sa solitude.

Même dans le Kahren-Kark où son Rakhaunen la guida, les nains cendrés s'activaient de tous côtés, autour de l'épicentre de leur roi, dont les directives fusaient de tous côtés et organisaient cette masse grouillante, énorme, implacable. Bien qu'il dirigeât d'une main de fer cette armée, Yurlungur ne se faisait pas d'illusions. Les pourparlers de tout à l'heure, la volonté de Sibelle de conclure une paix, bien qu'honorables, n'avaient aucune chance d'aboutir. Non seulement le roi ne voudrait jamais en entendre parler, mais même s'il se laissait convaincre, son influence ne serait pas à même de stopper le peuple Rakhaunen dans son ensemble. Les Sindeldi couraient à leur perte. Yurlungur était ravie ; non pas qu'elle fût à ce point vindicative envers les elfes gris, mais parce qu'elle avait l'impression d'être du bon côté. Le roi lui suggéra de rejoindre l'avant-garde, le départ concret étant imminent, elle acquiesça et, s'adressant à son guide, lui indiqua de la mener là-bas.

Rapidement, sans toutefois être encore sortis de la cité, ils rejoignirent les soldats qui formeraient la première ligne de cette armée : mais contrairement à d'autres formations, ceux-ci n'avaient pas l'air d'être de la simple chair à canon. Ils étaient tous engoncés dans des armures lourdes complètes, armés de lances ou d'arbalètes, de solides guerriers qui seraient difficilement abattus. La jeune fille arrêta son guide avant de les avoir tout à fait rejoints : elle comptait rester, en quelque sorte, à l'arrière de l'avant-garde : car non seulement cela lui permettrait de s'entraîner à l'arbalète, mais par ailleurs elle n'avait pas l'intention d'être en première ligne si un affrontement contre des bêtes des profondeurs devait avoir lieu. Cela dit, elle doutait qu'une troupe de goules s'en prenne à eux dans ces conditions : contrairement à la dernière fois, ils étaient ostensiblement armés et prêts à se battre, et réunis en un nombre bien plus conséquent. Cela devrait effrayer la majorité des monstres qui rôdaient dans les ténèbres des abysses.

L'avant-garde ne s'était pas encore mise en marche, attendant sans doute que le départ de toute l'armée puisse se faire. Dans l'intervalle, Yurlungur en profita pour poser quelques questions à son guide.

« Combien de temps va durer le trajet ? À quel moment rejoindrons-nous la surface, d'ailleurs ? »

Il ne répondit pas à la seconde question : il expliqua seulement qu'ils rejoindraient Ruk-Kazhid, probablement une autre de leurs cités souterraines. Yurlungur ignorait combien il y en avait, et elle serait bien en mal de se repérer avec tout ça. Même cette cité, elle n'aurait pas su la positionner sur une carte, alors une autre qu'ils rejoindraient à partir de maintenant, après plusieurs jours de voyage...

« Ruk-Kazhid ? C'est où ? »

On ne sait jamais, ça aurait pu marcher. Mais le Rakhaunen, souriant froidement, se contenta de répondre énigmatiquement :

« Sous le nez des elfes. »

Yurlungur n'insista pas davantage : d'ailleurs, ils se mettaient en marche. Sous le nez des elfes... Ça ne pouvait tout de même pas... Non, cette cité-là était certes souterraine, mais abandonnée depuis des siècles, des millénaires même. Cela dit, les Rakhaunens vivaient précisément dans ces grottes sans avoir été repérés pendant un temps équivalent... Sacrée surprise pour la commandante, si ce qu'elle pressentait était vrai.

...
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Gamemaster6
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Re: Les galeries (rues)

Message par Gamemaster6 » sam. 21 mars 2020 16:21

Émergence : màj pour Yurlungur

Suivant l'avant-garde, Yurlungur pu constater que, plutôt que de sortir de la montagne, les Rakhaunens s'enfonçaient un peu plus sous terre à chaque minute. Les galeries se succédaient, creusées à même la roche, éclairées par les torches des guerriers ou d'étranges amas de mousse luminescente qui parsemaient çà et là les parois rocheuses. Difficile de dire combien de temps elle marcha ainsi à la suite de la troupe rakhaunen, mais eux ne semblaient aucunement gênés par l'écoulement du temps, marchant à une cadence soutenue pendant ce qui sembla être des heures. A intervalle régulier, d'autres galeries partaient sur les côtés, preuve qu'un véritable réseau souterrain avait été creusé là par ce peuple oublié.

Lorsque le signal de la halte fut donnée, chacun vaqua à ses occupations, ne s'occupant nullement de la jeune fille qui allait visiblement devoir se débrouiller seul pour trouver un coin pour dormir. Seul le rakhaunen affecté à être son guide resta non loin, prêt à répondre à ses questions. Finalement les nains finirent par se reposer et, les heures passant, le bruit des bottes et du métal se transforma en un concert de ronflements particulièrement bruyants, le son se réverbérant avec brio contre les parois des galeries.

Mais si la jeune fille pouvait trouver le sommeil, ce fut pour mieux être réveillée par son guide qui la secoua sans ménagement avant de plaquer sa main sur sa bouche, lui faisant signe de ne pas faire de bruit.

- Humaine pas sûrrrre. Cerrrtains pas confiance, veulent éliminer étrrrangers. Agir vite ! Me suivrrre, dois parrrtirrr.

Qu'elle lui fasse confiance ou non, elle put percevoir, par-delà les ronflements, le son caractéristique d'une lame que l'on sort de son fourreau. Des bruits de pas. Trois ombres difficilement discernables, mais dont la démarche ne faisait aucun doute. En posture de combat, ils étaient loin de vouloir gentiment discuter avec la jeune fille qui allait rapidement devoir agir pour se sortir de ce guêpier.
***
Gains d'expérience.

Expérience à la fin de la présente situation. Trois adversaires en armure lourde dans un boyau relativement étroit, à peine 4 mètres de large, sans visibilité autre que quelques mousses luminescentes çà et là. L'avant-garde a dépassé une galerie adjacente il y a à peine quelques minutes, sur ta gauche. Personne ne se rend pour le moment compte de ce qui est en train de se passer.
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Quand on l'appelle, il apparaît !!
Et il reste, alors gare !

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Yurlungur
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Re: Les galeries (rues)

Message par Yurlungur » ven. 27 mars 2020 19:11

...

Elle qui espérait pouvoir rejoindre rapidement l'air libre, elle était servie ! En suivant l'avant-garde, Yurlungur se rendit rapidement compte que celle-ci, au lieu d'emprunter des galeries ascendantes, qui les auraient menés vers le royaume Sindel, s'enfonçaient vers les entrailles de la terre, encore et toujours plus. Elle réprima un soupir et les suivit en silence, tenant le rythme de la marche sans vraiment chercher à contester. Contester quoi, de toute façon ? La stratégie d'attaque précise lui était inconnue, et la guerre, bien que proche, restait dans sa tête désespérément lointaine. Il fallait encore marcher, rejoindre une autre cité souterraine, attendre sans doute un peu, puis se déplacer à nouveau pour lancer l'assaut à proprement parler... Bah, elle avait toujours un jeu de cartes dans son sac : elle pourrait essayer de jouer avec son guide, ou d'autres. Elle n'était pas certaine de pouvoir se remémorer les règles de tous les jeux auxquels elle s'était essayée à Dahràm, ni des techniques de fraude employées par les marins de la taverne du Gros Néral qu'elle avait épiés, mais elle ferait avec.

Elle avait oublié que les Rakhaunens disposaient de cette vigueur légendaire qui les faisait marcher pendant des heures sans éprouver la moindre fatigue. Elle les suivait sans broncher, consciente que le moindre signe de faiblesse pourrait la discréditer auprès de ce peuple de soldats, jusqu'à ce qu'une halte soit ordonnée. Elle se choisit une place discrète, dans un coin, non loin de la couche que s'était installée son guide, qui continuait à vérifier du coin de l'œil qu'elle n'avait besoin de rien. Il était mignon. Mais elle n'allait pas lui demander de l'aide, surtout pas : eh, c'était une grande fille, elle saurait se débrouiller toute seule, d'abord.

Elle revint toutefois vers lui pour lui demander à manger, et récupéra sa pitance auprès du cuistot de la troupe, puis l'engloutit sans chercher davantage à comprendre ce qu'était ce steak à l'allure étrange. Elle en avait mangé pendant le trajet aller jusqu'à Khaz-Kheral, et elle n'était pas morte : donc elle pouvait bien survivre encore un peu avec ça. Une fois qu'elle en eut fini, elle se blottit dans sa couette à la façon des Rakhaunens - c'est-à-dire encore toute armée. Elle craignait un peu, à vrai dire, qu'ils ne repartent précipitamment au réveil, et ne tenait pas à être laissée en arrière : elle se laverait plus tard, et puis, il n'y avait pas beaucoup d'eau à proximité.

Le concert de ronflements la berça presque. Au centre d'un parfait silence, le moindre bruit anormal l'aurait réveillée, alors que là, il était camouflé par les souffles sonores des Rakhaunens endormis. Elle se disait qu'elle était une soldate en mission : ça lui rappelait quand elle avait accompagné les troupes d'Arothiir, pour fondre sur la Forêt d'Émeraude ! Sacrée aventure. Les rêves l'attrapèrent un sourire aux lèvres : ils durent cependant la relâcher lorsqu'une main la secoua. Elle s'apprêtait à se lever immédiatement, pour partir, lorsqu'elle reconnut son guide qui lui ferma la bouche et lui fit signe de se taire. À voix basse, il lui apprit que certains de ses compatriotes avaient décidé de l'éliminer, la trouvant peu digne de confiance - essentiellement parce qu'elle était une étrangère. Elle fronça les sourcils. Elle, peu digne de confiance ? Ils allaient voir.

Bien que son guide lui ait demandé de la suivre, lorsqu'elle perçut le son d'une lame qui sortait de son fourreau dans l'obscurité, elle se dit que l'occasion était trop belle de montrer de quoi elle était capable à cette bande de branquignols qui estimaient qu'il fallait assassiner dans leur sommeil une jeune fille qui avait accepté de les aider - et puis, il était probablement trop tard pour fuir.

Elle se releva souplement et dégaina ses lames, avant de souffler au guide :

« Je les retiens... Pourriez-vous partir chercher de l'aide, des témoins ? »

Des témoins, ce serait parfait, et de l'aide, sans doute un peu superflu. Elle comptait bien leur montrer qu'elle pouvait se débarrasser d'eux seule. Le guide répondit rapidement qu'il doutait que quiconque intervienne - (Parfait !) - mais fila sans demander son reste. Elle percevait à travers les ténèbres trois silhouettes qui venaient vers elle, tous équipés d'armes de corps-à-corps, et l'un d'entre eux maniant un genre de bouclier rond, pas très gros. Elle n'avait pas le temps de se cacher pour les attaquer par surprise et gronda :

« Vous comptiez vous en prendre à moi alors que je dormais ? Comme c'est courageux... »

En l'entendant, ils commencèrent à se déployer dans le boyau, naturellement sans répondre. Même en plissant des yeux très forts, ils étaient encore trop loin pour qu'elle détermine précisément ce qu'ils portaient comme armes, et la phosphorescence des champignons était trop faible - tant pis. Sans crier gare, elle se mit en mouvement : tout d'un coup, elle sembla être projetée vers l'avant alors qu'elle fonçait sur l'un d'entre eux, les dents serrées de rage. Ils pensaient sans doute qu'elle était faible, parce qu'elle avait défié leur roi, puis qu'elle s'était retirée ! Ils devaient la croire lâche, mais elle l'était moins qu'eux - et ils allaient voir qu'elle était capable de les tenir en respect. Le seul souci qu'elle voyait à ses desseins, c'est qu'ils semblaient tous engoncés dans des armures lourdes, et que ses courtes lames auraient un peu de mal à infliger des dégâts conséquents à des adversaires ainsi protégés.

Face à trois adversaires rapprochés, elle ne prit même pas le temps de réfléchir et banda tous ses muscles pour lancer une série d'attaques avant qu'ils aient le temps de réagir. Celui protégé d'un bouclier lui semblait le plus difficile à toucher, et elle concentra ses efforts sur celui au centre, tout en tentant de frapper dans leurs trois directions, autant de fois qu'elle le pouvait. Elle réussit à blesser sa cible à l'épaule, puis salement en trouvant une faille dans son armure, à la jointure du bras - dans un craquement caractéristique qui annonçait que l'une des lames de la Trinité s'était détachée dans la plaie ; quant aux deux autres, elle parvint à toucher le Rakhaunen à la rondache à la jambe.

Le blessé s'écroula : il n'était probablement pas mort, mais elle avait senti la giclée de sang sur sa main et entendait distinctement ses gémissements de douleur alors qu'il tentait vainement de retirer le bout d'acier qui s'était fiché dans son aisselle. Celui qu'elle n'avait pas réussi à frapper s'avança alors, brandissant une masse qu'il s'apprêtait à abattre sur son torse, et elle disparut dans les ombres pour réapparaître un mètre en arrière ; le dernier tenta de la charger, mais sa blessure à la jambe devait l'handicaper, ainsi que la confusion après l'avoir vue disparaître et réapparaître ainsi, aussi esquiva-t-elle son attaque sans difficulté.

Yurlungur profita de la pénombre du lieu pour se glisser dans les recoins du boyau, se déplaçant avec aisance dans ce milieu ténébreux. Les deux Rakhaunens essayaient de la localiser là-dessous, mais ils devaient à peine voir plus qu'une silhouette de temps en temps, et entendre peut-être quelques bruissements de cape. Elle constata que celui qu'elle avait le plus blessé était effectivement hors jeu, et ne se releva pas : sentant encore le sang sur sa main, cela lui donna une idée.

Profitant de ce qu'ils ne distinguaient pas bien où elle était, elle prit la poudre d'escampette et suivit le boyau quelques mètres, jusqu'à être hors de leur vue. Ils tentèrent bien de la courser, mais elle était plus rapide qu'eux, sans armure lourde. Du reste, elle prêtait garde à ne produire aucun bruit qui puisse la trahir, ni ne laisser de traces derrière elle ; enfin, au détour d'une galerie, alors qu'ils étaient encore à quelques pas seulement sans doute, elle profita d'être hors de vue pour goûter au sang du Rakhaunen blessé et s'emparer de son apparence. Personne ne remarquerait qu'il avait perdu son ombre...

Elle sortit de sa cache et s'avança vers les deux Rakhaunens, avançant d'une allure déterminée. Ils l'aperçurent et l'interpellèrent dans leur langue rocailleuse sans qu'elle saisisse un traître mot : elle ne répondit rien et plaça distinctement son index devant sa bouche, leur intimant de se taire, ce qui fonctionna. Ils se montrèrent soudainement plus méfiants, mais pas envers elle : ils se turent et s'approchèrent en observant les alentours, attendant avec hâte ce qu'elle aurait à leur révéler. Les garnements. Elle allait leur montrer.

Celui qui était blessé à la jambe était un peu en retrait, mais ce n'était pas lui qu'elle comptait viser : l'autre, encore intact, était sa cible principale. Dès qu'elle fut à portée, son masque tomba et elle leva sa dague d'un geste aussi violent qu'inattendu pour les deux soldats : celle-ci, avec une précision mortelle, frappa dans la gorge du Rakhaunen, dans cet interstice fatal qui existe entre l'armure et le casque, et s'y enfonça avec la délicatesse d'une aiguille qui trouve son chemin dans une couture. Sauf que cette fois, la couture était fatalement rompue. Elle retira sa dague et le Rakhaunen s'écroula, sans vie, tandis que l'autre restait abasourdi, incapable de comprendre ce qu'il venait de se passer. Elle lui adressa un sourire : sur ses dents brillait encore un peu de ce carmin qu'elle avait volé à son compagnon.

Elle se dit qu'elle pourrait facilement se débarrasser de lui à présent et tenta une frappe sans y mettre beaucoup d'efforts : sa lame ricocha sur le bouclier et elle fronça les sourcils alors qu'il en profitait pour lui foncer dessus, bouclier en avant, afin de la plaquer contre la paroi. Son armure vibra quelques instants au moment de la rendre intangible et le Rakhaunen lui passa purement et simplement à travers alors qu'elle se retournait vers lui, contrariée. Il portait encore un marteau assez menaçant de l'autre main, mais était désormais contraint dans ses mouvements par la paroi dans son dos : avec agilité, sa dague vint atteindre son poignet et lui faire lâcher l'arme - mais il lui sembla que ses gantelets l'avaient protégé d'être blessé à la main ; il répliqua avec un coup de bouclier contre son crâne, qu'elle esquiva à moitié - ça lui ferait une bosse, et ça irait. Il était désarmé, elle venait de buter un de ses compagnons, elle lui intima :

« Rends-toi, et je t'épargnerai ! »

Oh, elle n'en avait absolument pas l'intention. S'il se rendait, elle lui ordonnerait de lâcher son bouclier et de lever les mains en l'air, puis elle le tuerait froidement. De toute façon, il n'y avait pas de témoins, et il y avait encore l'autre qui pissait le sang pour montrer qu'elle savait faire preuve de mansuétude ; mais le Rakhaunen était trop idiot pour accepter, ou se doutait de la fourberie de la gamine, puisqu'il cracha au sol et tenta de la frapper malgré tout. Elle soupira au moment de disparaître et de réapparaître à une vingtaine de centimètres, sur son flanc désarmé. Son bouclier protégeait son autre côté et elle songea qu'elle allait décidément le saigner avec beauté, celui-là.

Mais avant tout, il fallait lui retirer son armure. Se souvenant des enseignements qu'elle avait reçus à Kendra Kâr, elle visa une attache de l'armure au niveau de l'épaule, une de celles qui pouvaient complètement détacher l'amure si elle était correctement atteinte, et toucha avec brio : la cuirasse tomba à terre dans un fracas et elle sourit, avant de se prendre un coup de poing sur l'œil, et de reculer en titubant.

« AAAaah ! Grah, mais ça fait maaal ! »

Son œil gauche avait été épargné, mais c'était l'arcade sourcilière qui avait pris pour le gantelet de métal, et ça allait lui faire un bel œil au beurre noir.

« Mais quel enfoiré ! »

Il n'avait plus ni arme, ni armure : elle se précipita sur lui et le déchiqueta au niveau du torse : il recula et s'adossa contre la paroi sans répliquer - elle trouva ça un peu étrange, mais sa fureur était suffisante pour qu'elle continue, taille et tranche encore, jusqu'à ce qu'il se fût complètement effondré, les entrailles réparties sur le sol. Elle se recula, un peu essoufflée. Ça faisait un bien fou de relâcher un peu la pression en s'acharnant sur un cadavre.

Elle se pencha sur lui, le vida de ses poches, puis opéra de même avec son camarade qu'elle avait assassiné avec bien plus de finesse. Ce serait lui qu'on montrerait aux autres, s'ils voulaient les voir. Elle retourna à sa couchette, déposa le résultat de ses rapines au milieu de ses affaires, puis retourna voir celui qui baignait dans son sang, sans avoir davantage bougé. Il gémissait faiblement, mais il n'était pas mort : heureusement, Yurlungur était incapable de la moindre pitié pour lui. N'avait-il pas essayé de la tuer dans son sommeil ? Il méritait bien ce qui lui arrivait. (L'adolescente disposait d'une définition particulière du mérite, par ailleurs assez asymétrique entre elle et le reste du monde.)

Elle le saisit par le col et le traîna derrière elle pour rejoindre le reste de l'avant-garde, commentant :

« T'as intérêt à pas faire le con. Je peux retirer la lame qui est en toi, mais si tu refuses de coopérer, je te laisse crever. »

Et après un instant, elle crut bon de préciser :

« ... comme tes deux potes. »

Oh, elle n'avait aucune intention de le laisser en vie. Oui, elle pouvait retirer la lame, mais ce serait presque plus court d'attendre qu'il décède, et il ne devait plus en avoir pour bien longtemps. Comme ça, elle pourrait même observer l'effet de la lame de la Trinité une fois qu'elle était fichée dans la chair de quelqu'un ! Qui sait, peut-être ces bouts de métal offerts par les harpies avaient-il d'autres propriétés encore inconnues de l'Ombre, qui seraient délicieuses pour les victimes...

Elle finit par apercevoir son guide qui revenait, trottinant avec une demi-douzaine des siens, tous équipés en armure, naturellement. Ils arrivaient après la bataille ! Mais elle percevait bien leurs regards, qui allaient à leur camarade, à elle, à son arcade amochée... Elle relâcha son témoin, qui s'effondra sur le sol en crachant encore un peu de sang.

« Trois des vôtres ont tenté de m'assassiner dans mon sommeil, commenta-t-elle d'un ton des plus sombres alors que les Rakhaunens s'étaient arrêtés en face d'elle. Elle tenait encore ses lames sanglantes entre ses mains et expliqua avec sècheresse : Ils s'attendaient visiblement à pouvoir me cueillir alors que je dormais encore... Mais ils ont eu droit à un combat face à moi dans les meilleures conditions. J'ai tué les deux autres, leurs cadavres sont dans le boyau derrière... et il reste celui-ci. »

Elle s'arrêta un instant, leur laissant le temps de digérer la nouvelle, puis sourit et proposa :

« Je me suis dit que je connaissais fort mal votre peuple, qui semble considérer que, puisque je me suis portée volontaire pour combattre à vos côtés, pour tuer le plus de Sindeldi possibles, et vous aider à vous venger de l'affront qui vous a été fait il y a deux millénaires, je devais être abattue en plein sommeil. Mais je m'en remets à vos coutumes locales pour celui-ci : devrait-on le laisser saigner jusqu'à la mort, ou me laisserez-vous abréger ses souffrances ? »

Elle sentait en elle ces deux sentiments contraires, la satisfaction d'avoir remis à leur place ces assassins de pacotille, et l'agacement d'avoir été prise comme cible. Il devait être palpable qu'elle était un peu impatiente : impatiente de retourner au lit sans doute, et de pouvoir soigner un peu ses blessures avant qu'elles ne s'infectent ou ne s'aggravent.

...
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Re: Les galeries (rues)

Message par Gamemaster6 » sam. 28 mars 2020 15:50

Émergence : màj pour Yurlungur


Les Rakhaunens qui s'étaient attroupés ne dirent pas un mot pendant les explications de la jeune fille. Pas un mot, pas un son et leurs regards ne manifestaient rien. Soudainement, l'un des Rakhaunens s'avança, arme à la main et leva son imposant marteau de guerre avant de fracasser le pauvre hère qui se vidait de son sang sur le sol rocheux. Il cracha ensuite sur le sol avant de fixer Yurlungur. Il semblait être un des supérieurs et la toisa quelques secondes.

- Tu es une brrrave. Verrrmine lâche doit êtrrre purrgée. Tu as bien agis.

Les Rakhaunens présents semblaient d'accord avec les paroles de leur chef. D'un geste, il renvoya les autres à leurs postes et promis à la jeune fille qu'il veillerait personnellement à ce que cela ne se reproduise plus.

- Quand tu serrras rrreposée et prrrête, viens me voirrr. Vodoârrr te guiderrra.

Il désigna le guide qui ne quittait pas la jeune fille et celui-ci hocha la tête. Sans plus de cérémonie, il retourna auprès de ses hommes après avoir ordonné de libérer le chemin du cadavre qui restait au milieu de la galerie, ne se souciant plus de la jeune fille qui pouvait retourner dormir.

En se réveillant, elle sera conduite jusqu'au chef qui l'observa un instant, silencieux, sa main se grattant lentement la longue barbe tressée et décorée qu'il portait.

- Jeune étrrrangèrrre douée avec des lames. J'ai une mission à te confier. Galerrries peu sûrre sous la ville. Une fois arrrivés, nous aider à entrrrer dans la ville des elfes. Tu dois la connaîtrrre.

Cette idée semblait lui plaire énormément au vu du sourire carnassier qui ourlait ses lèvres et il attendait avec impatience la réponse de la jeune fille.

***
Gains d'expérience

Combat contre les rakhaunens : 3xp
Repas, voyage: 0,5xp

Total : 3,5xp

Tu trouves une rune Xi et tu peux récupérer :

- Marteau de guerre à une main (Arme de mêlée à une main Niv.20)
- Set complet (plastron, jambière, casque et protections de bras) d'armure rakhaunen
- Rondache cerclée de métal : (bouclier moyen Qualité Artisan)
- Masse à ailettes à deux mains (Arme de mêlée à deux mains Niv.20)
Dis moi ce que tu souhaites récupérer

Armée Rakhaunen de Khaz-Keral
- A vaincu seule trois guerriers s'en prenant à elle
- Titre officieux : Tranche-Vie
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Quand on l'appelle, il apparaît !!
Et il reste, alors gare !

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Yurlungur
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Re: Les galeries (rues)

Message par Yurlungur » ven. 3 avr. 2020 19:59

...

Devant l'absence de réaction des Rakhaunens, la jeune fille se demanda si elle avait bien fait de venir à eux aussi brutalement. Ne venait-elle pas de tuer deux des leurs, et de leur présenter le dernier dans un état d'agonie avancé ? Si la volonté de l'éliminer était plus générale qu'elle ne l'aurait cru, elle était à présent dans de beaux draps, face à la petite troupe. Peut-être aurait-elle mieux fait de déguerpir... mais à nouveau, pour aller où ? Se transformer en Rakhaunen était une option, mais peu viable, étant donné son incapacité à parler leur langage, et elle ne pouvait espérer rejoindre la surface facilement de là où elle était sans l'aide du petit peuple.

Lorsque l'un d'entre eux s'avança et brandit son marteau, elle s'écarta vivement, juste à temps pour éviter la giclée de sang qui sortit du corps soudainement broyé. Le Rakhaunen reposa son marteau, cracha au sol et la félicita : alors seulement elle se détendit. Ses paroles faisaient sens : elle imaginait qu'il avait tenu à abattre le traître par lui-même afin d'asseoir son autorité, ou ce genre de préoccupations ; le seul fait qu'elle ait réussi à défaire trois Rakhaunens qui l'attaquaient par surprise devait suffire, pour elle-même, à indiquer aux autres qu'elle n'était pas à prendre à la légère, et elle n'avait pas besoin de l'exécuter elle-même. C'était sans doute un peu mieux ; cela dit, elle se souvenait de Kendra Kâr, elle se souvenait que le sang n'est utile aux transformations d'une Ombre que lorsqu'un cœur palpite encore. Tant pis. Elle ne serait pas une Rakhaunen.

Alors le chef renvoya tout le monde au travail, ajoutant en guise d'excuse qu'il veillerait à ce que ce genre d'incidents ne se reproduise pas, puis lui indiqua qu'il souhaitait la voir, lui laissant toutefois le temps de prendre un peu de repos. Elle opina du chef et se détourna, retournant à son campement de fortune. Là, elle dissimula un peu mieux au milieu de ses propres affaires ce qu'elle avait récupéré sur les cadavres de ses adversaires : un petit caillou orné d'un symbole, qui devait être une rune, une masse d'armes, une rondache et un marteau. Elle aurait pu récupérer également quelques pièces d'armure lourde, mais cela lui semblait plus difficile à transporter sur elle : en revanche, elle n'avait plus beaucoup de place. Elle réfléchissait en regardant sa vieille dague et le fouet qu'elle se trimbalait depuis belle lurette sans jamais l'avoir vraiment utilisé. Celui-ci, elle pourrait bien s'en débarrasser. D'ailleurs, le bouclier lui semblait pas mal : bien qu'elle ne se soit jamais servi d'un tel objet, elle avait tout de même l'impression qu'il pourrait être plus utile que sa dague, qui n'arrivait pas vraiment à parer les coups.

Elle déposa la dague et le fouet dans un coin, non sans une certaine nostalgie vis-à-vis de la dague, puis se détourna, accrochant la rondache à sa ceinture à la place du fouet. Il fallait qu'elle s'exerce un peu au tir, et elle remplaça donc sa dague par l'arbalète d'Aethelin ; l'autre place à sa ceinture accueillit le marteau de guerre Rakhaunen, qui serait comme un trophée de son massacre - et la masse d'arme, elle l'empaqueta solidement. Celle-ci, elle ne l'utiliserait probablement jamais, mais elle pourrait toujours la revendre et se faire un peu de sous.

Il fallait aussi panser ses plaies, mais elle n'avait rien, et elle pesta en saisissant une potion de soin, et espérant que ça suffise. La bosse à la tête ne lui faisait pas trop mal, et elle estimait que ça partirait au bout de quelques jours, mais la blessure au niveau de son arcade sourcilière était un peu plus préoccupante. Afin de désinfecter la plaie et, peut-être, la refermer, elle saisit sa gourde, leva la tête vers le plafond en fermant l'œil et versa doucement une potion moyenne sur la plaie, frémissant alors que le liquide s'infiltrait dans la chair en picotant. Elle attendit ensuite quelques instants tête vers ciel que la mixture fasse effet, refermant sans regarder la gourde magique, et s'allongea en gardant la tête vers le haut, manquant de se casser la figure.

Elle soupira. L'aventure de tout à l'heure ne lui donnait pas tellement envie de se rendormir, étant donnés les risques, mais il fallait qu'elle soit en forme. Les Rakhaunens marchaient bien trop vite pour que ce soit envisageable de les suivre autrement qu'après une bonne nuit de sommeil...
***
Lorsqu'elle se réveilla, elle mangea un peu auprès de son guide, puis le suivit jusqu'au petit chef qu'elle avait rencontré la veille. Elle le dévisageait autant que lui, cherchant à savoir ce qu'il lui demanderait, cette fois. Elle avait la désagréable sensation qu'il attendait d'elle quelque chose qu'elle ne pourrait pas lui fournir, ou qu'il s'imaginait pouvoir la berner parce qu'elle était une gamine. Il finit par annoncer qu'il comptait lui confier une mission, évoquant les galeries peu sûres sous la ville et le rôle qu'elle pourrait jouer de guide pour les aider à entrer dans la ville, qu'elle connaissait. Elle fronça les sourcils, confuse.

« Je... ne connais pas trop les souterrains. D'ailleurs, les Sindeldi ne doivent pas les connaître non plus, puisque presque tous ignorent l'existence d'une ancienne cité sous Nessima... »

Il corrigea aussitôt la méprise, expliquant que les Rakhaunens s'occupaient des galeries, mais qu'elle les guiderait une fois dans la ville, puisqu'elle y avait été. Elle écarquilla un instant les yeux de surprise puis se détendit - c'était déjà bien plus dans ses cordes. En souriant, elle précisa :

« Ah ! Oui, d'accord. Je n'y ai été... mais je ne suis restée qu'une seule journée. Au fait... »

Elle se souvenait d'un détail intéressant à propos de la Garde militaire où ils avaient été reçus : celle-ci était bâtie sur l'ancienne cité shaakte, et ils avaient reçu leur ordre de mission dans une salle restaurée datant de cette lointaine époque. Peut-être que...

« Vous savez où est-ce que vous allez sortir, dans la ville ? Je pense qu'il y a peut-être un accès direct à la Garde militaire de Nessima depuis l'ancienne cité des Shaakts. Si on parvient à rentrer par là, ils seront probablement complètement désorganisés, et ça aidera ceux qui tenteraient d'assiéger la cité en surface. En revanche, on aura face à nous de vrais combattants, expérimentés, et assez coriaces... Mais ça ne vous fait pas peur, si ? »

Tel qu'elle l'avait tourné, et connaissant le caractère des Rakhaunens, il ne pourrait pas refuser cette éventualité, et effectivement il acquiesça.

« La portion souterraine que j'ai vue sous la Garde militaire était une salle très haute, peut-être dix mètres. De nombreuses colonnes soutenaient l'ensemble, et des orbes blanches diffusaient de la lumière... Il y avait aussi un canal d'eau qui coulait au sol. S'il y a une entrée qui ressemble à ça, ça devrait être la bonne. »

Elle imaginait à quel point Sylënn serait surprise de voir débarquer une armée dans son salon : ce serait formidable. S'ils frappaient là, toute la ville serait perdue très rapidement, car ils arriveraient en plein dans le quartier militaire. Le temps qu'ils se réorganisent, il serait déjà trop tard, et la cité serait tombée - les trois autres quartiers devant, à son sens, poser bien moins de problèmes étant donné l'agencement de la ville. Mais ces beaux espoirs furent vite brisés : il admit ne connaître aucune sortie ressemblant à cela. Elle haussa des épaules.

« Tant pis. Bon... Je ne me suis rendue que dans deux quartiers de la ville, à l'ouest et à l'est. Celui à l'ouest est celui où se trouve la garde militaire, ainsi que de nombreuses infrastructures militaires ; celui de l'est est celui où se trouve le port et le quartier pauvre. Les deux autres quartiers abritent des habitations et des commerces, je crois, mais rien de plus stratégique... Attaquer le port pourrait empêcher une retraite par ce côté, mais je dirais qu'un assaut sur le quartier ouest est le plus important, d'autant plus s'ils ne s'y attendent pas. Vous en dites quoi ? »

Elle se mettait à réfléchir de la même façon que lorsqu'elle avait accompagné l'armée d'Arothiir dans la Forêt d'Émeraude : à l'époque, elle n'avait d'ailleurs pas bien saisi la visée de chacune des parcelles du plan exécuté d'une main de maître par les trois harpies et leur dévouée Elisha'a, qui avait consenti à la guider dans la jungle du Royaume Pâle avant de refuser de la former. Cela éveillait le souvenir du vieux maître, Arsok. À présent, tout cela faisait sens, et elle avait l'orgueil de penser pouvoir comprendre les stratégies de base, alors qu'elle ne faisait qu'énoncer des stratégies assez naturelles. Mais les Rakhaunens étaient enfermés sous terre depuis des millénaires - avaient-ils pu développer des tactiques d'assaut efficaces dans ces conditions ? Peut-être face aux goules et aux monstres des profondeurs, songea-t-elle. Le Rakhaunen, en écoutant ces renseignements, lui demanda si elle avait déjà participé à une guerre, et elle sourit, un brin nostalgique.

« J'ai accompagné une armée, il y a quelques mois... Mais c'était loin d'ici, très loin. J'ai côtoyé la générale, à l'époque... »

Aliaénon était inaccessible, désormais, et deux des harpies perdues. Elle n'avait pas tellement envie de continuer à parler de ça.

« [color=#OOFF40]Mais bon, c'est assez logique. Si on attaque d'abord le quartier pauvre, même s'il est mal défendu et qu'on s'en sortira bien, l'armée aura le temps de s'organiser dans son quartier et le combat sera plus difficile que si on les prend par surprise.[/color] »

Et puis, elle, ça l'emmerdait d'avoir à fracasser des pauvres hères incapables de se défendre. Elle préférait frapper fort là où ça faisait mal, face à des adversaires dignes de ce nom, et laisser une maigre chance aux miséreux à l'est de s'échapper. Ils ne méritaient pas tellement ce sort qu'on leur réservait... Le Rakhaunen reconnut le bien-fondé de la stratégie proposée par la jeune fille, qui se sentait quant à elle un peu lésée niveau informations, aussi demanda-t-elle :

« Tous les Rakhaunens attaqueront par les souterrains ? Et les Eruïons, par la surface ? »

Après tout, elle avait bien le droit de savoir : d'autant plus que, si une partie de l'attaque se faisait par la surface, il faudrait penser à leur ouvrir les portes. Elle les avait traversées, en arrivant à Nessima, mais ça n'avait été qu'en montrant patte blanche - et d'ailleurs, elle avait été singulièrement mal traitée - et les murailles de la cité étaient précisément conçues afin de pouvoir défendre des assauts aussi conséquents. Mais le Rakhaunen, au lieu de lui répondre, évoqua la présence d'autres Rakhaunens qu'eux. Elle fut un instant décontenancée. Évidemment qu'il y avait davantage que l'avant-garde, sinon ils étaient perdus.

« Il y a toute l'armée de Khaz-Kheral, non ? Il n'y aura pas que notre avant-garde, je veux dire... »

Mais il rétorqua que le peuple Rakhaunen disposait d'autres cités. Pendant quelques instants, elle resta silencieuse, pensive. C'était plutôt logique, mais curieusement, elle n'y avait même pas pensé. Khaz-Kheral était si impressionnante qu'elle avait imaginé que tous les Rakhaunens s'y étaient rassemblés... mais pas du tout.

« Il y a donc d'autres cités cachées dans les montagnes grises ? Nous allons rejoindre leurs armées en cours de route ? »

C'était assez étrange, ça : ils avaient passé des jours et des jours à marcher dans les galeries pour atteindre la cité sous la montagne, sans jamais s'arrêter dans l'une des autres. Elles devaient être assez espacées, mais en même temps, Yurlungur était incapable de se repérer là-dessous... Il la corrigea : l'autre armée qui les rejoindrait viendrait d'un autre massif montagneux. Il conclut enfin qu'ils étaient certains de vaincre, et elle eut comme un doute. Certes, ils étaient puissants, et certes, ils étaient très bien préparés, et certes, ils profiteraient d'un effet de surprise conséquent - si tant est que Sibelle et Jorus ne prévienne pas Sylënn avant. Mais que ce Rakhaunen, comme son roi, répète cette phrase, cette assurance d'une victoire qui semblait déjà acquise, comme un mantra, ça ne présageait rien de bon. La Trinité n'avait jamais eu à la rassurer à ce propos, les trois harpies n'avaient jamais exprimé leur certitude de vaincre. Peut-être parce qu'elles entrevoyaient la possibilité d'être défaites, bien qu'elles aient alors tout fait pour réduire au possible les pertes ; ou peut-être parce que, sans davantage d'arguments, ça ressemble plus à un lavage de cerveau et un optimisme effarant qu'à une réelle stratégie guerrière.

« Il faudra faire attention. Nessima est loin d'être la seule cité des Sindeldi, et elle dispose de fortes défenses et de beaucoup de soldats. Même si la victoire est probable, la bataille sera sanglante. »

Elle avait corrigé “assurée” par “probable”. Le Rakhaunen était d'accord, mais continuait à annoncer la fin de l'ère des elfes. En attendant, il n'avait toujours pas répondu à sa question originelle.

« Mais donc... y aura-t-il une armée qui attaquera par la surface ? »

Il confirma, précisant même que leur Roi arriverait de ce côté. C'était étrange. L'armée Rakhaunen avait la possibilité d'entrer directement par les souterrains, pourquoi ne pas en profiter ? Ou peut-être que toute une armée ne passait pas ? Bah, c'était trop tard pour être rectifié.

« Dans ce cas, il nous faudra essayer d'atteindre une porte pour la leur ouvrir et leur permettre de pénétrer dans la cité plus aisément... »

Le Rakhaunen n'apprenait rien : il expliqua que c'était précisément le rôle qu'ils auraient à jouer. Elle hésita. Un plan venait de germer dans son esprit, mais elle songeait qu'il était trop ardu à mettre en place. Elle avait encore la possibilité de se métamorphoser en Sindel - au moins l'un des trois à qui elle avait volé du sang devait être en vie à l'heure actuelle, voire tous - et elle pourrait commencer par s'infiltrer et gérer seule cette histoire d'ouvrir les portes en profitant du chahut provoqué par l'avant-garde qui débarquerait en pleine cité. Mais d'une part il faudrait révéler la nature de ses pouvoirs, et aussi refuser finalement ce rôle de guide, tout en conservant la lourde responsabilité de s'acquitter de l'ouverture des portes seule. C'était peut-être un peu difficile.

« Je vous guiderai, dans ce cas, du mieux que je pourrai. »

Il la remercia, puis elle prit congé, prête à reprendre la route. Elle se préparait mentalement pour la bataille qui arrivait, pour tout ce que cela impliquait... Et elle se surprenait à adresser de courtes prières, à Phaïtos ou à Thimoros, quant au succès des nains cendrés. Une telle piété ne lui était pas arrivé depuis qu'elle avait quitté Dahràm...

...

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