Précédemment
Je m’étais dirigé vers l’Orphelinat pour tenir la promesse que j’avais fait à Xël. J’étais curieux de savoir si il m’avait laissé un message, comme il l’avait annoncé, ce qui signifierait son retour dans la capitale. La bâtisse était grande, sur un étage et grouillait de vie. Des enfants faisaient des allers-venues assez librement. Le lieux était joli, et semblait de l’extérieur à une sorte de parenthèse insouciante, dans la Cité. Un garde était posté à l’entrée, il me jeta un regard scrutateur détaillant mes vêtements riches. J’avais pris l’habitude de ne plus porter mon armure en ville. Je ne me sentais plus un aventurier et nous étions en temps de paix. J’étais devenu un citadin, j’avais trouvé ma place et je refusais de porter les écailles Vlash. J’aimais cette armure car elle faisait partie de mon histoire et me protégeait de toute peur. Cependant je détestais son contre-coup. Toutes ses peurs refoulés remontaient toujours trop violement dès que je me déparais de mes écailles. Ici, à Kendra-Kâr, je me sentais si serein que je n’avais aucune peur à combattre. Oaxaca n’était plus, ma vie était tranquille, je ne risquais pas de me révéler comme ce fut le cas quelques années auparavant, dans les geôles d’Omyre.
Compte tenu de mon apparence, paré de beaux atours citadins, on me laissa entrer sans poser plus de questions. Juste avant d’entrer je me rendis compte que petits yeux par les fenêtres veillaient le moindre de mes faits et gestes. Probablement des enfants curieux.
Je traversai la cour ou un homme s’activait à quelques activités menuisières cernés par de multiples têtes blondes. Je passai devant de nombreuses pièces fermées desquels des voix s’élevaient. Je percevoir quelques notions de mathématiques, de langues et je compris que cela devait être des salles de cours. Alors que je marchais une idée me vint. Peut-être que parmi ces orphelins, certains seraient intéressés par une carrière militaire. Au fond du couloir, j’entrai poliment dans le bureau de la gérante de l’établissement. C’était une belle femme, occupée à gérer de nombreux dossiers.
« Bien le bonjour ma Dame. Je suis à la recherche de la personne qui gère cet établissement. Une connaissance de Xël Almaran… »
Elle leva la tête avec un sourire radieux bien que ses cernes trahissaient sa fatigue et son inquiétude. Je pus lire une expression de surprise lorsque j’évoquai le nom de Xel mais elle n’en fut pas moins chaleureuse.
« Oui ? Je suis Méli Almaran, la directrice de l’orphelinat. Excusez moi, je pensais que vous veniez pour un don. A qui ai-je l’honneur ? » Dit-elle en m’invitant à t’asseoir.
J’eus du mal à cacher ma surprise en entendant qu’elle portait le nom de famille Xël.
« Je suis Ezak d’Arkasse, Chevalier du Royaume. Xël devait me laisser un message ici lorsqu’il serait de retour. »
Je pris le siège face à elle et rajouta dans un sourire, flatteur.
« Si je savais que la directrice était si ravissante, je serais assurément venu plus tôt. »
« Je n’ai pas de nouvelles de lui depuis qu’il est parti s’entraîner avec le Général Bogast. Je sais simplement qu’il est en vie. Navré. »
« Oui il l’est ! Nous avons combattu ensemble sur le front. Il est parti sur l’île des Dieux. J’imagine qu’il s’y trouve encore. Tant pis, vous lui direz que je suis passé. » Je réfléchis un instant, calculateur, cherchant un moyen d’aborder le sujet.
« J’ai pu apercevoir ce que vous faisiez ici. Joli travail. Comment ça se passe depuis la fin de la guerre ? J’imagine que le nombre d’orphelins a drastiquement augmenté vu l’hécatombe que ça été pour nous. »
Elle hocha la tête, feintant un sourire pour dissimuler son inquiétude à ta première remarque avant de prendre un air défait.
« Oui et je manquais déjà de place avant j’envoie des lettres un peu partout dans le royaume pour demander qui pourrait avoir besoin de jeunes enfants pour les aider dans leurs tâches quotidiennes. »
Parfait ! Mon ouverture était là. Je fis mine de poser un instant ma main sous le menton.
« Je suis en train de créer un bataillon, comme me le permet mes fonctions de Chevalier. Je veux y former des forces d’élites. Si la voie des armes intéresse quelques uns de vos protégés, je pourrais y accueillir ceux en âge de tenir une épée. Ce n’est pas une voie simple, mais elle est méritante. Sans compter le fait que le Royaume a maintenant affreusement besoin de bras. »
Elle fronca les sourcils.
« L’orphelinat n’est pas là pour servir de réserve à l’armée du royaume vous savez. »
Je levai les mains en m’appuyant sur sa chaise comme pour montrer pattes blanche.
« Je ne représente pas l’armée du Royaume, mon bataillon est détaché de celle-ci. Au reste je ne fais que vous proposer de recueillir ceux qui voudraient le rejoindre, rien de plus. »
Elle garda le silence un instant en me jaugeant avant de déclarer. « Si je m’écoutais, je vous traînerais dehors en vous tirant par les oreilles. »
Elle m’adressa un mince sourire avant de reprendre.
« Mais j’ai toujours juré de laisser les enfants libres de choisir leur voie. Peut-être que parmi eux certains veulent se jeter dans la voie martiale… »
Je me mis à rire à la menace de Meli.
« Je ne doute pas que vous oseriez le faire. »
Je me levai pour amorcer un départ, inutile d’insister plus. Cela ne ferait que la braquer.
« Parlez-en leur et si d’aventure certains veulent me rejoindre ils seront accueillis comme il se doit. J’enverrai quelqu’un d’ici quelques jours les récupérer le temps que je mette les choses en place. Ça vous va ? »
« Ne désirez vous pas visiter ? »
Je réfléchis un instant. Je n’avais pas grand-chose à faire pour l’heure, et c’était peut-être là le moyen de la faire plier.
« Avec joie ! Cela ferait de moi un goujat que de refuser l’invitation d’une noble dame. »
« Je vous en prie. Appelez moi Méli. En plus je suis loin d’être une noble. »
Elle se leva et m’invita à sortir d’un geste pour m’accompagner dans le couloir tout en poursuivant.
« J’ai passé toute ma vie dans les quartiers Est de la cité. Si vous l’ignorez ils font partie des plus pauvres et des plus mal fâmés. Malgré ça j’ai toujours laissé ma petite maison ouverte pour les enfants défavorisés devant vivre dans les rues. Xël faisait partie de ceux là. »
J’évoluai auprès d’elle en l’écoutant attentivement.
« Ah ! Almaran… Je comprends mieux, vous l’avez adopté. J’imagine que vous ne saviez pas à l’époque que vous donniez votre nom à un futur héros du Royaume. »
« C’est plutôt lui qui a adopté mon nom mais il m’en rend très fière. Il a beaucoup changé en quelques années. »
Elle s’arrêta devant une porte et frappe poliment avant d’ouvrir pour dévoiler ce qui s’apparentait à une salle de classe ou un vieux barbu enseigne la lecture à des enfants d’environ cinq ou six ans. Elle présenta le vieil homme sous le nom d’Aenthus Kalibrana avant de te présenter. Je fis un signe aux enfants et et au vieil homme avant de poursuivre la visite après que Méli ait refermé la porte.
« Ce que vous offrez à ces enfants est juste formidable. Nous autres de la noblesse avons la chance d’avoir les moyens de s’offrir les meilleurs professeurs. Il est bon que les plus défavorisés aient cette chance de pouvoir s’élever. »
Je continuai à la suivre et repris, continuant mon numéro de charme non sans un air malicieux.
«Alors si je comprends bien vous êtes la mère de substitution de Xël. Il y’a t’il un monsieur Almaran qui lui fait office de père ? »
« C’était le but premier en construisant l’orphelinat. Ne pas servir seulement à offrir un lit, mais aussi une éducation pour bâtir des hommes et des femmes capables d’enrichir le royaume. Au vu des fonds que nous avions pour le faire, le Roi ni a vu aucun inconvénient, il était même plutôt ravi. »
Elle me mena dans une grande salle qui servait de salle à manger juste à côté des cuisines, avant de répondre au sujet d’un Monsieur Almaran
« Il y a eu un. Mais il a disparu depuis longtemps. » Elle paraissait un peu gênée par le sujet, alors j’eus la décence d’en changer.
« Oui, Solennel semblait proche du peuple. Il était aimé, et cet amour est reporté maintenant sur sa sœur qui, au demeurant, le mérite plus que quiconque…» Je soupirai longuement.
« Puisse-t-elle un jour devenir Reine… »
Méli hocha la tête avant de me laisser entrer dans la cuisine ou s’activait un homme d’une quarantaine d’année assez grassouillet, montrant à des enfants plus âgés les secrets de la boulangerie et la pâtisserie. Tous étaient trop occupés pour nous remarquer, mais Méli me présente le gros comme étant Boberan Ladimus, un ancien militaire qui après une blessure de guerre s’est dirigé vers les métiers de la bouche.
« Il vient régulièrement former les jeunes. D’ailleurs vous avez du croiser un menuisier dans la cour. J’essaie d’apprendre l’artisanat aux plus âgés pour qu’ils puissent trouver un métier une fois adulte. Fut un temps où je devais leur trouver des petits boulots pas toujours très sûres pour qu’ils puissent se nourrir. Laissons les travailler, Boberan est toujours grognon quand il cuisine. »
Dit-elle en souriant avant de m’inviter à prendre la direction de l’étage.
J’hochai la tête sentencieusement sans rien dire. A vrai dire, j’étais assez impressions et le regard que je portais sur Méli changeait. Comment avait-elle pu seulement monter un tel endroit. J’aurais été incapable de penser à tout cela.
« Hé bien… Vous avez pensé a tout… Vous vous avez monter tout cela toute seule ? »
Elle ria, visiblement flattée.
« Non. Non… Déjà sans l’argent de Xël et de ses deux amis Karz et Charis je n’aurais rien pu faire. C’est lui qui a fait don de son argent à son retour d’Aliaénon au Royaume à condition de construire cet endroit et de me mettre à la direction. Pour les idées, j’en ai longuement discuté avec le Roi et j’ai le soutien d’amis comme Boberan, Aenthus et d’anciens enfants dont je me suis occupé. Comme Alena par exemple qui s’occupe des bébés avec les filles les plus âgées, perdre ses parents ou être abandonnée n’épargne hélas aucun âge. »
En entendant le nom de Karz, je sursautai, comme le monde était petit.
« Karz a participer à l’élaboration de cet endroit ?! Je ne savais pas qu’il était l’ami de Xel, c’était aussi l’un des miens. Vous évoquez là un nom qui me rappelle une vie passée et révolue. Hé bien… ça ne m’étonne pas lui. Il a toujours été un grand sentimental. »
En effet, en gagnant l’étage je pus entendre quelques pleures et des voix féminines essayant de les rassurer. Elle me montra également quelques chambres aux nombreux lits puis une salle dédié aux jeux pour les jeunes enfants.
« Nous faisons de notre mieux avec les dons que nous recevons. J’ai toujours vécu pauvre alors je ne dépense pas aveuglement. Les meubles, la literie et beaucoup d’autres choses sont le fruit d’un travail commun avec des artisans et des marchands de la cité. »
Je me tournai vers, de plus en plus impréssionné par le travail accompli et la gestion e l’nedroit.
« Vous n’êtes peut-être pas une noble dame mais votre noblesse d’âme vous honore alors permettez, mais je continuerai à vous considérer et à vous traiter comme telle. » Dit-il en inclinant la tête comme si il saluerai une Dame de haute noblesse.
Elle inclina la tête avant de poursuivre. «
Puis-je vous poser une question ? Comment était Xël après la bataille ? Avant de se rendre sur cette Île ? »
Mon visage s’assombrissa quelques peu lorsque je repensais aux propos de Xël que j'avais jugés inconhérents. J’hésitais longuement à ma formulation, je ne voulais pas lui mentir, mais je ne voulais pas non plus nourrir son inquiétude de « mère ».
« Physiquement entier mais je crains que comme nous tous les évènements l’ont profondément marqué… Il était disons… désorienté.»
Je rajoutai néanmoins:
« Mais encore une fois, il n’y avait pas une seule âme qui ne l’était pas après cette hécatombe. »
« Il ne vous a pas dit quand il allait rentrer ? »
Si, il l’avait dit clairement ; après s’être vengé de tous les ennemis du Royaume.
« Non… »
Elle soupira.
« Je ne devrais pas autant m’inquiéter. J’ai vu dans l’arène qu’il est tout à fait capable de se défendre. » Elle se repris. « Excusez-moi. Dites moi, dans quel tranches d’âges recrutez vous vos hommes ? »
« Quatorze… Allez Quinze ans est un âge raisonnable pour débuter une formation. J’ai même commencé bien plus tôt à manier les armes, mais je suis un cas précoce. Les filles sont aussi les bienvenues. C’est un milieu plutôt masculin mais je suis bien placé pour savoir que les femmes peuvent être aussi bonnes, si ce n’est meilleures combattantes que les hommes. »
« Bien. Je ferais passer le message Ser d’Arkasse. Où peuvent-ils venir vous trouver ? »
« Vous leur direz de s’adresser au Sieur Xander de Maisonneuve dans le quartiers proches du palais. C’est lui qui me fait office de mécène, il saura où les rediriger. »
J’ignorais si l’homme était prêt, mais nulle doute que ça lui mettraiot une pression pour remplir rapidement mes exigences. Elle hocha la tête bien que l'idée ne semblait toujours pas lui plaire.
"Je vous préviens, les enfants ici sont loin d'être faciles. Ne vous attendez pas à recevoir des recrues bien élevés et acceptant facilement l'autorité et la discipline."
J’eus un sourire énigmatique. Les hommes que j’avais eus sous mon commandement étaient des exclus d'Omyre, des sales gosses des quartiers pauves de Kendra-Kâr, cela ne me faisait pas peur.
"J'y compte bien ! Les caractères forts ne font pas des simples soldats. Je compte faire d'eux l'élite du Royaume et pour ça, il faut avoir le feu."
"Oh et dites à Sieur de Maisonneuve de dissimuler ses objets de valeurs. Beaucoup ont dû user de vols pour survivre avant que ce lieu soit construit et ils pourraient le déposséder de tous ses bijoux sans même qu'il s'en rende compte."
J’hôchai la tête avant de répondre sur un ton ironique. "
Oh, je suis sûr qu'il sera ravi... Fort heureusement, ils apprendront un art qui leur assurera argent, gloire et reconnaissance. Qui sait, peut-être que je ferais de certains d'entre eux des écuyers et qu'ils pourront s'élever un jour au rang de Chevalier."
« Si ça ne les tues pas. » Dit-elle en me raccompagnant vers la sortie
"Ce n'est pas le but. Croyez-moi, je ne traite pas mes hommes comme de la chaire juste bonne à être sacrifier. Je prendrai soin d'eux."
Arrivé à l’exterieur je lui tendis un yus d'or avant d'énoncer malicieusement.
"Pour vous remercier avoir résisté à l'envie de me mettre dehors en me tirant par l'oreille."
« Gardez votre argent Ser d’Arkasse. Cela me donne trop l’impression de vous les vendre. » Répond-elle avec un sourire poli. « Je vous souhaite bon courage. N’hésitez pas à revenir nous voir. Les enfants sont toujours heureux d’entendre les histoires des héros du royaume. »
Je gardai donc mon argent et je la saluai de la tête courtoisement.
"En espérant avoir un jour à nouveau la chance de me retrouver en votre agréable compagnie, Dame Méli."
Et je m’en allai, sans plus de cérémonie, heureux de ce nouveau partenariat que je venais de tisser.
Suivant